Proposition de loi Sortir la France du piège du narcotrafic

Direction de la Séance

N°259

28 janvier 2025

(1ère lecture)

(PROCÉDURE ACCÉLÉRÉE)

(n° 254 , 253 )


AMENDEMENT

C Favorable
G Favorable
Adopté

présenté par

Mme Muriel JOURDA et M. DURAIN

au nom de la commission des lois


ARTICLE 23

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I. – Alinéa 17

Rédiger ainsi cet alinéa :

– sont ajoutées deux phrases ainsi rédigées : « À peine d’irrecevabilité, aucune demande de mise en liberté ne peut être formée tant qu’il n’a pas été statué sur l’appel d’une précédente demande. Cette irrecevabilité s’applique de plein droit jusqu’à l’expiration du délai de dix jours prévu pour l’appel par l’article 186 ; l’ordonnance du juge des libertés et de la détention et, le cas échéant, l’appel interjeté par les parties sont immédiatement notifiées, par tout moyen, au juge d’instruction par le greffe du magistrat ou de la juridiction compétente. » ;

II. – Alinéa 24

Supprimer cet alinéa.

III. – Alinéa 33

Rédiger ainsi cet alinéa :

3° bis À l’article 148-4, le mot : « quatre » est remplacé par le mot : « six » ;

IV. – Alinéas 37 à 39

Supprimer ces alinéas.

V. – Alinéa 45

Supprimer cet alinéa.

VI. – Après l’alinéa 45

Insérer six alinéas ainsi rédigés :

…° Au quatrième alinéa de l’article 706-71, après le mot : « évasion », sont insérés les mots : « ou de sa particulière dangerosité » ;

…° Au premier alinéa de l’article 706-73-1, les mots : « de l’article 706-88 » sont remplacés par les mots : « des articles 706-88 et 706-105-2 ».

…° La section 8 du chapitre II du titre XXV du livre IV est complétée par un article 706-105-2 ainsi rédigé :

« Art. 706-105-2. – Par dérogation à l’article 706-71, lorsqu’il s’agit d’une audience au cours de laquelle il doit être statué sur le placement en détention provisoire ou la prolongation en détention provisoire d’une personne mise en examen pour une infraction mentionnée à l’article 706-73, il peut être recouru à un moyen de télécommunication audiovisuelle sans que la personne détenue puisse refuser son audition.

« Toutefois, le juge des libertés et de la détention ou le président de la juridiction saisie peut, à la demande du ministère public, de la personne détenue ou de son avocat, ou d’office, autoriser sa comparution physique.

« Cette comparution physique est de droit lorsqu’il doit être statué sur l’appel portant sur une décision de refus de mise en liberté ou sur la saisine directe de la chambre de l’instruction en application du dernier alinéa de l’article 148 ou de l’article 148-4 par une personne détenue en matière criminelle depuis plus de six mois dont la détention n’a pas déjà fait l’objet d’une décision de prolongation et n’ayant pas personnellement comparu, sans recourir à un moyen de communication audiovisuelle, devant la chambre de l’instruction depuis au moins six mois. »

Objet

Le présent amendement poursuit deux objectifs dans le domaine procédural spécifique du placement en détention provisoire et de la prolongation de la détention provisoire :

-          d’une part, étendre la possibilité de faire usage d’un moyen de télécommunication audiovisuelle, même en cas de refus de la personne concernée, lorsque celle-ci présente une particulière dangerosité ;

-          d’autre part, prévoir que cette visioconférence, plutôt qu’une comparution physique nécessitant une extraction judiciaire de la personne et son transport entre l’établissement pénitentiaire et la juridiction, devient le principe lorsque l’infraction reprochée relève du champ de la criminalité organisée tel que figurant à l’article 706-73 du code de procédure pénale.

L’article 706-71 du code de procédure pénale contient les principales règles applicables au recours à la visioconférence en procédure pénale. Lorsqu’il doit être statué sur le placement en détention provisoire ou la prolongation de la détention provisoire, il prévoit actuellement que la personne détenue puisse refuser l’utilisation d’un moyen de télécommunication audiovisuelle, sauf si son transport paraît devoir être évité en raison des risques graves de trouble à l’ordre public ou d’évasion.

Néanmoins, ces deux motifs apparaissent trop restrictifs, dans la mesure où la caractérisation de ces risques graves est plus exigeante et plus étroite que la démonstration de la particulière dangerosité de la personne détenue concernée (qui peut être tirée de ses antécédents, des procédures en cours la concernant et des faits qui lui sont reprochés). Or, cette particulière dangerosité, à elle seule, expose l’intégrité physique des membres de l’administration pénitentiaire assurant son extraction judiciaire, mais également de toute personne se situant sur le tracé du transport, et ce, malgré l’ampleur des moyens qui peuvent être mobilisés afin d’assurer la sécurité de tous.

Il apparaît ainsi nécessaire de prévoir que, lorsque le transport de la personne détenue paraît devoir être évité en raison de sa particulière dangerosité, le recours à la visioconférence puisse avoir lieu, malgré son refus.

Dans le prolongement de cette évolution, cet amendement vise également à ce que la comparution des personnes détenues par visioconférence devienne le principe, en matière de détention provisoire, lorsqu’elles sont mises en examen pour l’une des infractions de la criminalité et de la délinquance organisée figurant à l’article 706-73 du code de procédure pénale.

En effet, la nature même des infractions reprochées fait apparaître la particulière sensibilité de leur extraction. Il s’agit ici d’éviter que des personnes fortement susceptibles d’être impliquées dans des réseaux criminels fassent usage des moyens et informations dont elles disposent pour mettre en danger les personnes assurant leur transport.

Cette nouvelle règle s’inspire du modèle italien, introduit dès les années 1990, afin de répondre à la nécessité de remédier aux dangers que représente la translation des détenus mais également pour assurer l’efficacité de la mesure d’incarcération, en limitant les contacts des détenus avec le monde extérieur.

Il convient néanmoins de souligner que l’érection de la visioconférence en tant que règle de principe, pour ces détenus particuliers, ménage la possibilité pour le magistrat saisi de décider, s’il l’estime nécessaire, que la comparution du détenu se fera, par exception, de manière physique. Cette décision pourra être prise d’office, ou à la demande du ministère public, de la personne détenue ou de son avocat.

Par ailleurs, afin de préserver les garanties accordées aux personnes détenues, il est prévu que cette comparution physique ait également lieu lorsqu’il doit être statué sur l’appel portant sur une décision de refus de mise en liberté ou sur la saisine directe de la chambre de l’instruction en application du dernier alinéa de l’article 148 ou de l’article 148-4 par une personne détenue en matière criminelle depuis plus de six mois dont la détention n’a pas déjà fait l’objet d’une décision de prolongation et n’ayant pas personnellement comparu, sans recourir à un moyen de communication audiovisuelle, devant la chambre de l’instruction depuis au moins six mois.

Afin de garantir la proportionnalité et l’opérationnalité du dispositif, le présent amendement ajuste par ailleurs la réforme du régime procédural des demandes de mise en liberté prévu par l’article 23 sur trois points :

-          il clarifie premièrement les dispositions relatives à la recevabilité des nouvelles demandes de mise en liberté formulées alors qu’il n’a pas encore été statué sur un appel précédent. Il est ainsi explicitement précisé qu’aucune demande de mise en liberté ne peut être formée, à peine d’irrecevabilité, tant qu’il n’a pas été statué sur ledit appel ;

-          il supprime le dispositif imposant à la défense de transmettre des pièces cinq jours avant l’audience ;

-          il substitue à la suppression de la possibilité de saisine directe de la chambre de l’instruction lorsque le prévenu n’a pas été entendu depuis plus de quatre mois une extension à six mois de ce délai.