Proposition de loi Sortir la France du piège du narcotrafic
Direction de la Séance
N°221
27 janvier 2025
(1ère lecture)
(PROCÉDURE ACCÉLÉRÉE)
(n° 254 , 253 )
AMENDEMENT
C | Défavorable |
---|---|
G | |
Retiré |
présenté par
Le Gouvernement
ARTICLE 2
Consulter le texte de l'article ^
I.− Alinéa 4
Remplacer la référence :
706-78-1
par la référence :
706-77-1
II.− Alinéa 5
Supprimer cet alinéa
III.− Alinéas 6 et 7
Remplacer les mots :
et 706-74-1
par les mots :
706-75 et 706-76-1
IV.– Alinéas 8 à 69
Remplacer ces alinéas par soixante-dix alinéas ainsi rédigés :
6° Le chapitre Ier du titre XXV du livre IV est ainsi modifié :
a) Au début, est ajoutée une section 1 est ainsi rédigée :
« Section 1
« Compétence de la juridiction nationale anticriminalité organisée
« Art. 706-75. – Pour la poursuite, l'instruction et le jugement des infractions entrant dans le champ d'application des articles 706-73, à l’exception du 11°, du 11° bis et du 18°, 706-73-1, à l’exception du 11°, et 706-74, le procureur de la République anticriminalité organisée, le pôle de l'instruction, le tribunal correctionnel et la cour d'assises de Paris exercent, dans les affaires qui sont ou apparaîtraient d'une grande complexité, une compétence concurrente à celle qui résulte de l'application des articles 43, 52, 382, 706-42 et 706-76.
« En ce qui concerne les mineurs, le procureur de la République anticriminalité organisée, le juge d'instruction, le juge des enfants, le tribunal pour enfants et la cour d'assises des mineurs de Paris exercent, dans les affaires qui sont ou apparaîtraient d'une grande complexité, une compétence concurrente à celle qui résulte de l’article 706-76 et de l’article L. 231-1 du code de la justice pénale des mineurs.
« Cette compétence s’étend aux infractions connexes.
« Lorsqu'ils sont compétents pour la poursuite et l'instruction des infractions mentionnées au premier alinéa, le procureur de la République anticriminalité organisée et le pôle de l'instruction de Paris exercent leurs attributions sur toute l'étendue du territoire national.
« Art. 706-75-1. – Sans préjudice des dispositions de l’article 43-1, la compétence du procureur de la République anticriminalité organisée en application de l’article 706-75 s’exerce de façon prioritaire sur celle des juridictions mentionnées à l’article 706-76 tant que l'action publique n'a pas été mise en mouvement. Les parquets près ces juridictions se dessaisissent alors sans délai à son profit.
« Art. 706-75-2. – Sans préjudice des dispositions du troisième alinéa de l'article 41, lorsqu'il exerce sa compétence de façon prioritaire en application de l’article 706-75-1, le procureur de la République anticriminalité organisée peut requérir par délégation judiciaire tout procureur de la République près une juridiction mentionnée à l’article 706-76 de procéder ou faire procéder aux actes nécessaires à la recherche et à la poursuite des infractions entrant dans le champ d'application des articles 706-73, à l’exception du 11°, du 11° bis et du 18°, 706-73-1, à l’exception du 11°, et 706-74 dans les lieux où ce dernier est territorialement compétent.
« La délégation judiciaire mentionne les actes d'enquête confiés au procureur de la République ainsi délégué. Elle ne peut prescrire que des actes se rattachant directement à l'enquête pour laquelle elle a été délivrée.
« Elle indique la nature de l'infraction objet de l'enquête. Elle est datée et signée par le procureur de la République anticriminalité organisée et revêtue de son sceau.
« Le procureur de la République anticriminalité organisée fixe le délai dans lequel la délégation doit lui être retournée accompagnée des procès-verbaux relatant son exécution. A défaut, la délégation judiciaire et les procès-verbaux doivent lui être transmis dans le mois de la fin des opérations exécutées en vertu de cette délégation.
« Le magistrat délégué exerce, dans les limites de la délégation, tous les pouvoirs du procureur de la République anticriminalité organisée prévus par la présente section.
« Art. 706-75-3. – Pour le jugement des délits et des crimes entrant dans le champ d'application des articles 706-73, à l’exception du 11°, du 11° bis et du 18°, 706-73-1, à l’exception du 11°, et 706-74, le premier président de la cour d'appel de Paris peut, sur les réquisitions du procureur général, après avis des chefs des tribunaux judiciaires intéressés, du bâtonnier de Paris et, le cas échéant, du président de la cour d'assises de Paris, décider que l'audience du tribunal correctionnel, de la chambre des appels correctionnels de Paris ou de la cour d'assises de Paris se tiendra, à titre exceptionnel et pour des motifs de sécurité, dans tout autre lieu du ressort de la cour d'appel que celui où ces juridictions tiennent habituellement leurs audiences.
« L'ordonnance prise en application du précédent alinéa est portée à la connaissance des tribunaux intéressés par les soins du procureur général. Elle constitue une mesure d'administration judiciaire qui n'est pas susceptible de recours.
« Art. 706-75-4. – Le procureur de la République près un tribunal judiciaire autre que celui de Paris peut, pour les infractions entrant dans le champ d'application des articles 706-73, à l’exception du 11°, du 11° bis et du 18°, 706-73-1, à l’exception du 11°, et 706-74, requérir le juge d'instruction de se dessaisir au profit de la juridiction d'instruction de Paris. Les parties sont préalablement avisées et invitées à faire connaître leurs observations par le juge d'instruction ; l'ordonnance est rendue huit jours au plus tôt et un mois au plus tard à compter de cet avis.
« L'ordonnance par laquelle le juge d'instruction se dessaisit ne prend effet qu'à compter du délai de cinq jours prévu par l'article 706-75-6 ; lorsqu'un recours est exercé en application de cet article, le juge d'instruction demeure saisi jusqu'à ce que l'arrêt de la chambre criminelle de la Cour de cassation soit porté à sa connaissance.
« Dès que l'ordonnance est devenue définitive, le procureur de la République anticriminalité organisée adresse le dossier de la procédure au procureur de la République de Paris.
« Les dispositions du présent article sont applicables devant la chambre de l'instruction.
« Art. 706-75-5. – Dans les cas prévus à l'article 706-75-4, le mandat de dépôt ou d'arrêt conserve sa force exécutoire ; les actes de poursuite ou d'instruction et les formalités intervenus avant que la décision de dessaisissement ou d'incompétence soit devenue définitive n'ont pas à être renouvelés.
« Art. 706-75-6. – Toute ordonnance rendue sur le fondement de l'article 706-75-4, par laquelle un juge d'instruction statue sur son dessaisissement peut, à l'exception de toute autre voie de recours, être déférée dans les cinq jours de sa notification, à la requête du ministère public, des parties, à la chambre criminelle de la Cour de cassation qui désigne, dans les huit jours suivant la date de réception du dossier, le juge d'instruction chargé de poursuivre l'information. Le ministère public peut également saisir directement la chambre criminelle de la Cour de cassation lorsque le juge d'instruction n'a pas rendu son ordonnance dans le délai d'un mois prévu au premier alinéa de l'article 706-75-4.
« L'arrêt de la chambre criminelle est porté à la connaissance du juge d'instruction ainsi qu'au ministère public et signifié aux parties. » ;
b) Avant l’article 706-75, est ajoutée une section 2 intitulée : « Compétence des juridictions interrégionales spécialisées » ;
c) Le dernier alinéa de l’article 706-75, qui devient l’article 706-76, est supprimé ;
d) L’article 706-76, qui devient l’article 706-76-1, est ainsi modifié :
- au premier alinéa, les mots : « visés à l’article 706-75 » sont remplacés par les mots : « mentionnés à l’article 706-76 » ;
- le deuxième alinéa est supprimé ;
e) L’article 706-77, qui devient l’article 706-76-2, est ainsi modifié :
- à la première phrase du premier alinéa, après le mot : « peut, », sont insérés les mots : « à la demande du procureur de la République compétent en application de l’article 706-76-1, » ;
- à la même première phrase du premier alinéa, après la référence : « 11° », sont insérés les mots : « , du 11° bis » et après la référence : « 706-73-1 », sont insérés les mots : « , à l’exception du 11, » ;
- à la fin de ladite première phrase du premier alinéa ; la référence : « 706-75 » est remplacée par la référence : « 706-76 » ;
- les deuxième et dernière phrases du premier alinéa sont supprimées ;
- les deuxième à dernier alinéas sont supprimés ;
- est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Les dispositions des articles 706-75-4 à 706-75-6 sont applicables. » ;
f) À l’article 706-79-1, qui devient l’article 706-76-3, la référence : « 706-75 » est remplacée par la référence : « 706-76 » ;
g) Après l’article 706-79-1 devenu l’article 706-76-3, est insérée une section 3 intitulée : « Dispositions communes » ;
h) L’article 706-75-1, qui devient l’article 706-77-1, est ainsi modifié :
-à la première phrase du premier alinéa, après le mot : « sein », sont insérés les mots : « du tribunal judiciaire de Paris lorsqu’il a une compétence nationale en application de l’article 706-75 et » ;
- à la première phrase des premier et dernier alinéas, après la référence : « 11° », sont insérés les mots : « , du 11° bis » et, après la référence : « 706-73-1 » sont insérés les mots : « , à l’exception du 11°, » ;
- à la première phrase du deuxième alinéa, après le mot : « sein », sont insérés les mots : « de la cour d’assises de Paris lorsqu’elle a une compétence nationale en application de l’article 706-75 et » ;
- à la première phrase du troisième alinéa, après le mot : « sein », sont insérés les mots : « de la cour d’appel de Paris lorsqu’elle a une compétence nationale en application de l’article 706-75 et » ;
i) Après l’article 706-75-1 devenu l’article 706-77-1, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art. 706-77-2. – La juridiction saisie en application du présent chapitre reste compétente quelles que soient les incriminations retenues lors du règlement ou du jugement de l'affaire, sous réserve de l'application des articles 181 et 469. Si les faits constituent une contravention, le juge d'instruction prononce le renvoi de l'affaire devant le tribunal de police compétent en application de l'article 522. » ;
j) L’article 706-75-2, qui devient l’article 706-77-3, est ainsi modifié :
- après le mot : « étendue », sont insérés les mots : « à l’ensemble du territoire national ou » ;
- après la référence : « 11°, » sont insérés les mots : « 11° bis et 18°, » ;
- après la référence : « 706-73-1, », sont insérés les mots : « , à l’exception du 11°, » ;
k) L’article 706-78 est abrogé ;
l) L’article 706-79, qui devient l’article 706-77-4, est ainsi modifié :
- les mots : « à l’article 706-76 » sont remplacés par les mots : « aux articles 706-75 et 706-76-1 » ;
- après la référence : « 706-73, », sont insérés les mots : « à l’exception du 11°, 11° bis et 18°, » ;
- après la référence : « 706-73-1, », sont insérés les mots : « , à l’exception du 11°, » ;
m) L’article 706-79-2 devient l’article 706-77-5 ;
7° Le chapitre II du titre XXV du livre IV est ainsi modifié :
a) À la seconde phrase du dernier alinéa de l’article 706-80-1, les mots : « près le tribunal judiciaire de Paris » sont remplacés par les mots : « anticriminalité organisée » ;
b) Le premier alinéa de l’article 706-81 est ainsi modifié :
- après le mot : « République », sont insérés les mots : « , après avis du procureur de la République anticriminalité organisée, » ;
- les mots : « , après avis de ce magistrat, » sont supprimés ;
- après le mot : « saisi », sont insérés les mots : « , après avis du procureur de la République et, s’il est différent, du procureur de la République anticriminalité organisée, » ;
- le mot : « peuvent » est remplacé par le mot : « peut ».
c) Le II de l’article 706-105-1 est ainsi modifié :
- à la première phrase du premier alinéa et à la fin du second alinéa, les mots : « de Paris » sont remplacés par les mots : « anticriminalité organisée ou le procureur de la République territorialement compétent en application de l’article 706-76-1 » ;
- à la première phrase du premier alinéa, les mots : « au dernier alinéa de l’article 706-75 » sont remplacés par les mots : « aux articles 706-75 et 706-76 » ;
8° Le dernier alinéa de l’article 706-42 est ainsi modifié :
a) La première occurrence du mot : « et » est remplacée par le signe : « , » ;
b) Après la référence : « 706-17 », sont insérés les mots : « , 706-75 et 706-76 » ;
c) La dernière occurrence du mot : « et » est remplacée par le signe : « , » ;
d) Sont ajoutés les mots : « et aux infractions en matière de délinquance et de criminalité organisée ».
V.– Alinéa 70
Remplacer cet alinéa par quatre alinéas ainsi rédigés :
III. – Le code de l’organisation judiciaire est ainsi modifié :
1° À l’article L. 217-1, les mots : « et un procureur de la République antiterroriste » sont remplacés par les mots : «, un procureur de la République antiterroriste et un procureur de la République anti-criminalité organisée » ;
2° Aux articles L. 217-2 et L. 217-3, les mots : « et le procureur de la République antiterroriste » sont remplacés par les mots : «, le procureur de la République antiterroriste et le procureur de la République anti-criminalité organisée » ;
3° À l’article L. 217-4, les mots : « ou au procureur de la République antiterroriste » sont remplacés par les mots : «, au procureur de la République antiterroriste ou au procureur de la République anti-criminalité organisée ».
Objet
Le Gouvernement souscrit pleinement à la volonté des auteurs de la proposition de loi et de la commission des lois du Sénat de doter l’autorité judiciaire d’un véritable parquet national compétent pour traiter les phénomènes criminels du haut du spectre, en capacité de coordonner l’action judiciaire en matière de lutte contre la criminalité organisée.
Les améliorations adoptées par la commission des lois vont dans le bon sens. En particulier, l’extension du champ de compétence de ce nouveau parquet à l’ensemble des infractions relevant de la criminalité organisée paraît indispensable. La lutte contre la criminalité organisée ne peut en effet se limiter au trafic de stupéfiants et impose un traitement global de l’ensemble des phénomènes criminels qu’il engendre, qui sont étroitement imbriqués (corruption, blanchiment, règlements de compte, etc.). Il apparaît par exemple inconcevable de scinder le traitement judiciaire d’une organisation criminelle qui s’adonne à un trafic de stupéfiants et commandite des assassinats pour éliminer leurs concurrents.
Toutefois, le dispositif envisagé n’est pas totalement satisfaisant. Les points suivants posent plus particulièrement difficulté :
· Il n’est pas souhaitable de prévoir une compétence exclusive du parquet national pour tous les meurtres en bande organisée, tous les actes de torture et de barbarie en bande organisée ainsi que les crimes de direction ou organisation d’un trafic de stupéfiants. Un tel mécanisme crée des rigidités inutiles et contreproductives dans la répartition des compétences entre les différents échelons judiciaires (local, interrégional, national). Le nombre de procédures relatives à ces infractions est important et en constante augmentation (446 procédures relatives à un meurtre en bande organisée ont été traitées par l’autorité judiciaire en 2021, 615 en 2022 et 857 en 2023). Il est à craindre que ces procédures accaparent entièrement le nouveau parquet national, sans que cela soit toujours pleinement justifié et au détriment du reste. Un tel système empêche donc toute allocation pertinente des moyens, ce que permet le mécanisme de la compétence concurrente. Enfin, cela peut également fragiliser les procédures en cas de débat sur la qualification des faits retenue avec, à la clé, une nullité de l’entière procédure.
· Les mêmes observations peuvent être faites s’agissant de rendre obligatoire la saisine de l’OFAST pour les crimes pour lesquels le parquet national est exclusivement compétent, lorsqu’ils sont en lien avec le trafic de stupéfiants. Cette obligation contrevient au principe de libre choix du service d’enquête par le parquet, qui découle de son rôle de direction d’enquête, et introduit trop de rigidités dans le dispositif.
· Le texte institue des mécanismes d’information obligatoire à plusieurs niveaux, qui s’enchevêtrent et passe outre les principes régissant l’organisation hiérarchique du ministère public. En particulier, le rôle du procureur général n’est pas précisé et ce dernier semble totalement absent alors que la loi lui dévolue des missions particulières en matière de définition de la politique pénale et des priorités d’action publique, sans compter la possibilité qu’il a d’adresser des instructions dans les dossiers. En outre, il confie l’animation et la coordination de la politique d’action publique en matière de lutte contre la criminalité organisée au procureur national anticriminalité organisée. Cela pose un problème d’articulation avec les prérogatives des procureurs généraux
· Le texte passe outre le principe d’indisponibilité de l’action publique et d’indépendance des magistrats en prévoyant une possibilité de dessaisissement d’une juridiction à l’initiative du parquet postérieurement à la mise en œuvre de l’action publique.
Le présent amendement a pour objet de rectifier ces points tout en maintenant la création d’un parquet national doté de prérogatives lui permettant d’exercer pleinement ses missions (compétence prioritaire notamment).
Par ailleurs, il opère les coordinations nécessaires dans le code de l’organisation judiciaire à la création d’un parquet national.