Proposition de loi Sortir la France du piège du narcotrafic
Direction de la Séance
N°211 rect.
28 janvier 2025
(1ère lecture)
(PROCÉDURE ACCÉLÉRÉE)
(n° 254 , 253 )
AMENDEMENT
C | Demande de retrait |
---|---|
G | |
Tombé |
présenté par
Le Gouvernement
ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS ARTICLE 21
Après l'article 21
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Aux vingtième et dernier alinéas du a du 2° et aux onzième et dernier alinéas du b du 2° de l’article 64 du code des douanes, les mots : « code de procédure civile » sont remplacés, par les mots : « code de procédure pénale ».
II. – Après l’article 64 du code des douanes, sont insérés des articles 64-1 à 64-6 ainsi rédigés :
« Art. 64-1. – En cas de flagrant délit, si les nécessités de l’enquête douanière relative à l’un des délits, lorsqu’il est commis en bande organisée, mentionnés aux articles 414, 414-2 et 415 l’exigent, le juge des libertés et de la détention peut autoriser les agents des douanes habilités à effectuer des opérations de visite et de saisie en dehors des heures prévues par l’article 64.
« Art. 64-2. – Hormis le cas de flagrant délit, si les nécessités de l’enquête douanière relative à l’un des délits, lorsqu’il est commis en bande organisée, mentionnés aux articles 414, 414-2 et 415 l’exigent, le juge des libertés et de la détention peut autoriser les agents des douanes habilités à effectuer des opérations de visite et de saisie en dehors des heures prévues par l’article 64 lorsque ces opérations ne concernent pas des locaux d’habitation.
« En cas d’urgence, le juge des libertés et de la détention peut également autoriser les agents des douanes habilités à procéder à ces opérations dans les locaux d’habitation :
« 1° Lorsqu’il existe un risque immédiat de disparition des preuves ou des indices matériels ;
« 2° Lorsqu’il existe une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner qu’une ou plusieurs personnes se trouvant dans les locaux où la visite doit avoir lieu sont en train de commettre des délits entrant dans le champ d’application des articles 414, 414-2, et 415.
« Art. 64-3. – A peine de nullité, les autorisations mentionnées par les articles 64-1 et 64-2 sont données pour des opérations de visite et de saisie déterminées et font l’objet d’une ordonnance écrite, précisant la qualification de l’infraction dont la preuve est recherchée ainsi que l’adresse des lieux dans lesquels les visites et saisies peuvent être faites.
« Cette ordonnance, qui est susceptible d’appel dans les conditions prévues par le code de procédure pénale, est motivée par référence aux éléments de fait et de droit justifiant que ces opérations sont nécessaires et qu’elles ne peuvent être réalisées pendant les heures mentionnées à l’article 64.
« Les opérations sont faites sous le contrôle du magistrat qui les a autorisées, et qui peut se déplacer sur les lieux pour veiller au respect des dispositions légales. Le magistrat qui les a autorisées est informé dans les meilleurs délais par les agents des douanes habilités des actes accomplis en application des articles 64-1 et 64-2.
« Dans les cas prévus aux second, troisième et quatrième alinéas de l’article 64-2, l’ordonnance comporte également l’énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de cette décision par référence aux seules conditions prévues par ces alinéas.
« Pour l’application des dispositions des articles 64-1 et 64-2, est compétent le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire du lieu de la direction des douanes dont dépend le service chargé de la procédure. La visite s’effectue sous le contrôle du juge qui l’a autorisée. Lorsqu’elle a lieu en dehors du ressort de son tribunal judiciaire, il délivre une commission rogatoire, pour exercer ce contrôle, au juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire dans le ressort duquel s’effectue la visite.
« Art. 64-4. – Les opérations prévues aux articles 64-1 et 64-2 ne peuvent, à peine de nullité, avoir un autre objet que la recherche et la constatation des infractions visées dans la décision du juge des libertés et de la détention.
« Le fait que ces opérations révèlent des infractions autres que celles visées dans la décision du juge des libertés et de la détention ne constitue pas une cause de nullité des procédures incidentes.
Objet
Aucune disposition ne permet actuellement aux agents des douanes de procéder à des visites domiciliaires de nuit. Or, les services douaniers sont parfois confrontés au besoin opérationnel d’entrer de nuit dans des locaux de stockage, en particulier, de produits stupéfiants, dans le cadre par exemple de livraisons surveillées organisée sur le territoire national de cocaïne provenant de l'étranger, ce qui est particulièrement préjudiciable à l’enquête douanière, face à la nécessité de mener des fouilles pour découvrir des éléments de preuve et du produit.
Le cadre légal des visites domiciliaires douanières (article 64 du code des douanes) cantonne l’engagement de ces opérations aux heures comprises entre 6 heures et 21 heures, sans aucune possibilité de déroger à ce principe. En effet, contrairement à la dérogation existant dans le code de procédure pénale (articles 59-1, art. 97-2 et art 706-89 et suivants), le code des douanes ne prévoit pas une telle capacité d'agir de nuit dans le cadre des visites domiciliaires.
Dans de telles conditions, les agents des douanes ne peuvent à ce jour qu’intervenir sur le fondement d'un pouvoir inadapté du code des douanes, l’article 63 ter, qui organise uniquement un droit d’accès à des lieux ou locaux à usage professionnel, des terrains ou des entrepôts, qui n’est possible qu’entre 8 heures et 20 heures ou, en dehors de ces heures, qu’à la seule condition de l’existence de l'accès au public autorisé, ou lorsque sont en cours des activités de production, de fabrication, de conditionnement, de transport, de manutention, d'entreposage ou de commercialisation.
Dès lors, toute intervention de nuit au titre de l’article 63 ter du code des douanes suppose de caractériser la preuve d’une des activités précitées dans les locaux ciblés.
Enfin et surtout, les agents ne peuvent pas procéder à des opérations de fouille coercitive sur le fondement de l’article 63 ter du code des douanes, qui sont seulement envisageables dans le cadre de la visite domiciliaire régie par l'article 64 du code des douanes.
De fait, cet unique cadre juridique pour opérer après 21 heures est de nature à dégrader les modalités de visite des lieux par les agents des douanes, où peuvent pourtant se trouver des éléments de preuves utiles à l’enquête et des produits stupéfiants.
La mesure proposée vise à créer dans le code des douanes, une disposition, analogue à celle du code de procédure pénale (art. 706-89 et suivants) qui permet aux services de police de judiciaire sur ordonnance du juge des libertés et de la détention, à la requête du procureur de la République, de procéder à une opération de visite domiciliaire et de saisie des pièces à conviction, en dehors des heures prévues par l'article 64 du code des douanes.
Aussi, cette mesure proposée permettra à des agents des douanes spécialement habilités par le ministre chargé des douanes de procéder à des visites domiciliaires de nuit dans le cas des délits douaniers les plus graves uniquement lorsqu’ils sont commis en bande organisée (ex : contrebande de stupéfiants ou d’armes, délit de blanchiment douanier portant sur des infractions à la législation sur les stupéfiants), sur autorisation d’un juge des libertés et de la détention, pour accroître l’efficacité des enquêtes.
Il importe de préciser que les dispositions proposées opèrent une conciliation équilibrée entre les exigences constitutionnelles de la recherche des auteurs d’infractions et le droit au respect de la vie privée ainsi que l’inviolabilité du domicile, cf par exemple la décision n° 2023-855 DC du 16 novembre 2023 relative à la loi d’orientation et de programmation du ministère de la justice 2023-2027 rendue par le Conseil constitutionnel qui a créé un article 59-1 dans le code de procédure pénale autorisant en flagrance des perquisitions de nuit.
En effet, la mesure proposée prévoit bien que les opérations de visite domiciliaire auraient lieu uniquement sur autorisation de l’autorité judiciaire, gardienne de la liberté individuelle, et le déroulement des mesures autorisées est assorti de garanties procédurales appropriées et effectives. Par ailleurs, la mesure proposée vise à la constatation, sous le contrôle de l’autorité judiciaire, d’infractions particulièrement graves, dans certains cas limitativement énumérés et uniquement si elles sont commises en bande organisée.
La mesure proposée s’inspire plus particulièrement des articles 706-89 et suivants du code de procédure pénale, dans une logique de lutte contre les infractions douanières les plus graves, que ce soit en flagrance ou hors flagrance.
Enfin, à ce jour l’article 64 du code des douanes prévoit que les ordonnances autorisant des visites domiciliaires peuvent faire l’objet d’un recours devant le premier président de la Cour d’appel territorialement compétente, par similarité avec les visites domiciliaires mises en œuvre par l’administration fiscale.
Toutefois, ces dernières années, le législateur a organisé en matière douanière des procédures de recours obéissant aux règles du code de procédure pénale, par exemple en cas de retenue temporaire d’argent liquide (article 67 ter C du code des douanes) ou en cas de demande de restitution de supports de données informatiques (article 323-11 du code des douanes).
Dans ces conditions, il est proposé de rendre applicables les règles du code de procédure pénale aux recours contre les ordonnances autorisant les visites domiciliaires réalisées en matière douanière.
NB :La rectification consiste en un changement de place de l'article additionnel après l'article 16 vers l'article additionnel après l'article 21.
La mention « Tombé » signifie qu'il n'y avait pas lieu de soumettre l'amendement au vote du Sénat dans la mesure où soit l'objectif poursuivi par l'amendement a été atteint par l'adoption d'un autre amendement (ex. : amendement de rédaction globale incluant la modification proposée), soit, au contraire, l'amendement était incompatible avec un amendement précédemment adopté (ex. : l'adoption d'un amendement de suppression fait tomber tous les autres).