Projet de loi Projet de loi de finances pour 2025
Direction de la Séance
N°I-2181
25 novembre 2024
(1ère lecture)
PREMIÈRE PARTIE
(n° 143 , 144 )
AMENDEMENT
C | Favorable |
---|---|
G |
présenté par
M. HUSSON
au nom de la commission des finances
ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS ARTICLE 31
Après l’article 31
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – L’article 43 de la loi n° 2012-1509 du 29 décembre 2012 de finances pour 2013 est ainsi modifié :
1° Au I, après le mot : « affectés », sont insérés les mots : « , sous réserve des dispositions du I ter, » ;
2° Après le I bis, il est inséré un I ter ainsi rédigé :
« I ter. – Une fraction de 250 millions d’euros du produit de la mise aux enchères des quotas d’émission de gaz à effet de serre mentionné au I est affectée chaque année aux autorités organisatrices de la mobilité mentionnées aux I et II de l’article L. 1231-1 du code des transports, aux communes continuant à organiser un service de transport public en vertu du II du même article L. 1231-1 ainsi qu’à l’autorité organisatrice des mobilités mentionnée à l’article L. 1243-1 du même code. La répartition de cette fraction entre les affectataires est déterminée en tenant compte de critères de ressources et de charges selon des modalités définies par décret. »
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
Objet
Comme la mission d’information de juillet 2023 rapportée par MM. Hervé Maurey et Stéphane Sautarel au nom de la commission des finances l’avait démontré, les autorités organisatrices de la mobilité (AOM) sont confrontées à des besoins de financements croissants, en raison notamment du choc d’offre de mobilité collective du quotidien incontournable pour que la France tienne ses engagements en matière de décarbonation du secteur des transports. Cette mission d’information avait formulé une série de recommandations visant à poser les jalons de la « réforme indispensable du modèle de financement de la mobilité du quotidien ».
Dans le prolongement d’un protocole financier conclu entre l’État et Île-de-France mobilités (IDFM), et pour résoudre l’impasse financière dans laquelle se trouvait alors l’AOM francilienne, les articles 139 et 140 de la loi n° 2023-1322 du 29 décembre 2023 de finances pour 2024 lui ont octroyé des moyens de financements complémentaires. Le premier a augmenté de 0,25 point le taux plafond du versement mobilité en Île-de-France. Le second a instauré une taxe additionnelle à la taxe de séjour appliquée dans les communes francilienne au profit d’IDFM.
Remédier à l’impasse de financement d’IDFM était nécessaire. Cependant, le sujet francilien ne peut et ne doit pas éclipser les difficultés financières rencontrées par les AOM de province. Le Sénat avait souhaité combler cette lacune dès l’examen du projet de loi de finances pour 2024 en faisant adopter le dispositif contenu dans le présent amendement. Malheureusement, le Gouvernement de l’époque n'avait pas jugé bon de reprendre cette initiative dans le texte final adopté après usage des dispositions de l’article 49 alinéa 3 de la Constitution.
Le dispositif adopté l’année dernière par le Sénat et proposé de nouveau dans le présent amendement s’inspire d’une des recommandations de la mission d’information de la commission des finances. Celle-ci visait en effet à affecter aux AOM une part du produit issu des mises aux enchères des quotas d’émission de gaz à effet de serre dans le cadre du système européen d’échange des quotas d’émissions (ETS). Cette ressource, dont le produit à atteint 1,6 milliard d’euros en 2024, confère à l’État des moyens importants qui doivent servir à financer la transition écologique. La législation européenne prévoit d’ailleurs expressément que cette ressource doit être fléchée, à hauteur de 50 % au moins, vers des actions tendant à réduire les émissions de gaz à effet de serre et plus largement à faire face aux conséquences du changement climatique. Or, aujourd’hui, la France ne respecte pas cette règle puisque seuls 700 millions d’euros sont affectés à l’Agence nationale de l’habitat (ANAH) pour financer des actions de rénovation énergétique. L’affectation d’une partie de cette ressource aux AOM permettrait ainsi à la France de se mettre en conformité avec le droit de l’Union européenne.
Le présent amendement propose ainsi une affectation pérenne, de 250 millions d’euros dès 2025, et qui aurait vocation à augmenter au fil des années, à mesure de l’accroissement des besoins de financements des AOM et du dynamisme de cette ressource.
Depuis son adoption par le Sénat il y a un an, la plupart des acteurs du secteur recommandent la mise en œuvre de ce nouveau mode de financement des transports de proximité. Il en va ainsi notamment du Groupement des autorités responsables de transport (GART) et de l'Union des transports publics et ferroviaires (UTPF). Depuis cette année, le Mouvement des entreprises de France (MEDEF) soutient également cette réforme du financement des AOM.
Outre son avantage, par rapport au versement mobilité, de ne pas renchérir le coût du travail, l’affectation de quotas carbone permet aussi d’envisager un financement pérenne de la croissance des besoins des AOM, sans avoir régulièrement à accroître les prélèvements obligatoires pesant sur les entreprises ou les particuliers.
Cette ressource permettra de répondre à la question de la mobilité en zone rurale, qui est une des grandes oubliées du système de financement des transports du quotidien. Lors de l’examen de la loi d’orientation des mobilités (LOM) de 2019, le Sénat avait adopté des dispositions visant à couvrir ce vide. Malheureusement, le Gouvernement de l’époque ne l’avait alors pas suivi. Les petites communautés de communes situées en zone rurales dotées de bases fiscales très limitées et empêchées d’instaurer un versement mobilité si elles n’ont pas mis en place un service régulier de transport public seront également destinataires de cette nouvelle ressource. L’amendement prévoyant que la répartition des crédits soit opérée selon une logique de péréquation, en fonction de critères de ressources et de charges, celles-ci ont vocation à bénéficier pleinement du dispositif.
Les modalités de répartition de cette ressource devront être déterminées dans le cadre d’une concertation approfondie avec les associations d’élus et le Groupement des autorités responsables de transport (GART).