Projet de loi Projet de loi de finances pour 2025

Direction de la Séance

N°I-1387

20 novembre 2024

(1ère lecture)

PREMIÈRE PARTIE

(n° 143 , 144 )


AMENDEMENT

C Défavorable
G Défavorable
Retiré

présenté par

MM. DOSSUS et Grégory BLANC, Mme SENÉE, MM. BENARROCHE et DANTEC, Mme de MARCO, MM. FERNIQUE et GONTARD, Mme GUHL, MM. JADOT et MELLOULI, Mmes OLLIVIER et PONCET MONGE, M. SALMON, Mmes SOUYRIS, Mélanie VOGEL

et les membres du groupe Écologiste - Solidarité et Territoires


ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS ARTICLE 9

Après l’article 9

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le code des impositions sur les biens et services est ainsi modifié :

1° Le premier alinéa de l’article L. 422-14 est remplacé par cinq alinéas ainsi rédigés :

« Est soumis à la taxe tout embarquement sur le territoire de taxation mentionné à l’article

L. 422-16 de passagers à bord :

« 1° D’un aéronef réalisant un vol commercial, autres qu’en transit direct ;

« 2° D’un aéronef privé réalisant un vol commercial et transportant moins de soixante passagers, autre qu’en transit direct ;

« 3° D’un aéronef privé réalisant un vol mais ne faisant pas l’objet d’une exploitation commerciale au sens de l’article 3 du règlement (CE) n° 216/2008 du Parlement européen et du Conseil du 20 février 2008 concernant des règles communes dans le domaine de l’aviation civile et instituant une Agence européenne de la sécurité aérienne, et abrogeant la directive 91/670/CEE du Conseil, le règlement (CE) n° 1592/2002 et la directive 2004/36/CE, autre qu’en transit direct.

« Ne sont pas assujettis à la présente taxe les embarquements dans un des territoires mentionnés aux deuxième à cinquième alinéas de L. 422-16 du code de l’imposition des biens et services, à l’article

L. 112-4 du même code, à l’article 74 de la Constitution, ainsi que la Corse, et ayant pour destination finale un autre de ces mêmes territoires. »

2° L’article L. 422-22 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, après les mots : « du passager », sont insérés les mots : « , du type d’aéronefs ».

b) Le tableau constituant le deuxième alinéa est ainsi rédigé :

« 

Destination finale

Type d’aéronef

Services additionnels à bord dont bénéficie le passager, sans supplément de prix, par rapport à d’autres passagers

Montant ( €)

Européenne ou assimilée

Aéronef réalisant un vol commercial, autres qu’en transit direct

Aucun service additionnel

20

Européenne ou assimilée

Aéronef réalisant un vol commercial, autres qu’en transit direct

Présence de services additionnels

60

Européenne ou assimilée

Aéronef privé réalisant un vol commercial et transportant moins de soixante passagers et aéronef privé réalisant un vol mais ne faisant pas l’objet d’une exploitation commerciale, tels que définis à l’article

L422-14 du code des impositions sur les biens et services

Présence ou non de services additionnels

1000

Destination mentionnée à l’article L. 422-22 bis

Aéronef réalisant un vol commercial, autres qu’en transit direct

Aucun service additionnel

20

Destination mentionnée à l’article L. 422-22 bis

Aéronef réalisant un vol commercial, autres qu’en transit direct

Présence de services additionnels

60

Destination mentionnée à l’article L. 422-22 bis

Aéronef privé réalisant un vol commercial et transportant moins de soixante passagers et aéronef privé réalisant un vol mais ne faisant pas l’objet d’une exploitation commerciale, tels que définis à l’article

L422-14 du code des impositions sur les biens et services

Présence ou non de services additionnels

1000

Tierce

Aéronef réalisant un vol commercial, autres qu’en transit direct

Aucun service additionnel

50

Tierce

Aéronef réalisant un vol commercial, autres qu’en transit direct

Présence de services additionnels

200

Tierce

Aéronef privé réalisant un vol commercial et transportant moins de soixante passagers et aéronef privé réalisant un vol mais ne faisant pas l’objet d’une exploitation commerciale, tels que définis à l’article

L422-14 du code des impositions sur les biens et services

Présence ou non de services additionnels

3000

 » ;

3° Après le même article L. 422-22, il est inséré un article L. 422-22-… ainsi rédigé :

« Art. L. 422-22-… – Les États, hors espace économique européen, considérés comme destination européenne ou assimilée sont les suivants :

« 1° La Principauté d’Andorre ;

« 2° La Principauté de Monaco ;

« 3° Le Royaume uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord ;

« 4° La République de Saint-Marin ;

« 5° La Confédération suisse ;

« 6° La Bosnie-Herzégovine ;

« 7° La Serbie ;

« 8° Le Kosovo ;

« 9° Le Monténégro ;

« 10° L’Albanie ;

« 11° La Macédoine du Nord ;

« 12° La Biélorussie ;

« 13° L’Ukraine ;

« 14° Le Maroc ;

« 15° L’Algérie ;

« 16° La Tunisie ;

« 17° La Libye ;

« 18° La Turquie. »

Objet

Cet amendement vise à inclure les jets privés dans l’assiette de la taxe sur le transport aérien de passagers et à renforcer son montant en distinguant les destinations européennes, incluant notamment les pays du Maghreb, des destinations hors Europe.

Il reprend les propositions de nombreuses organisations de la société civile et de la convention citoyenne pour le climat au sujet de l’adoption d’une écocontribution renforcée sur les billets d’avion. Inspirée de la proposition de la Convention Citoyenne pour le Climat, cette mesure conserve en effet le même objectif : renforcer le principe du « pollueur-payeur » en ciblant particulièrement les voyageurs bénéficiant de services haut de gamme, tout en préservant relativement les passagers en classe économique.

Il n’est plus possible de laisser l’avion, mode de transport ultra-polluant, être favorisé par rapport au train, mode de transport bas-carbone. Selon l’ADEME, le transport aérien émet 14 à 40 fois plus de CO2 par kilomètre parcouru et par personne transportée que le train. Pourtant, le coût implicite du carbone dans le secteur aérien reste relativement faible par rapport au secteur ferroviaire. Il est important de noter qu’au-delà de cette inégalité, plusieurs pays, comme les États-Unis, le Canada, l’Australie ou encore l’Italie et la Suisse, appliquent déjà des taxes sur les jets privés.

C’est le choix fait par tous nos voisins et notamment les pays hébergeant les principaux hubs européens (London Heathrow, Francfort, Amsterdam Schiphol) qui disposent tous de niveaux de taxation bien supérieurs à ceux de la France. Le Réseau Action Climat a montré que la proposition de la Convention citoyenne rapporterait 3,7 milliards d’euros (3,5 milliards pour un alignement sur le barème britannique et 2,5 milliards sur le barème allemand). Cette taxe est prélevée au décollage, et son montant est calculé en fonction de la destination finale, il n’y a donc aucun risque de fuite de trafic dans d’autres aéroports. Ses recettes sont directement fléchées vers l’AFIT, et permettraient de renforcer les investissements dans les infrastructures de transport décarboné.

Par ailleurs, alors que des investissements dans les infrastructures ferroviaires, il est pertinent de davantage faire contribuer le secteur aérien. Cela répond également à une exigence de justice sociale de mieux répartir les efforts sur ceux qui sont capables de les assumer. Si la fiscalité du secteur aérien doit être revue de façon profonde et ambitieuse pour mettre fin à tous les avantages dont il profite, la taxe sur les billets d’avion (TSBA) semble le meilleur véhicule pour enclencher cette transition.

Concrètement, à l’instar de la proposition de la Convention Citoyenne, l’amendement propose d’augmenter significativement la taxe sur le transport aérien de passagers pour les voyageurs les plus aisés. Par exemple, pour les utilisateurs de jets privés, la taxe pourrait atteindre au minimum 3 000 euros pour un vol pour une destination hors de l’Europe, contre une vingtaine d’euros pour un passager en classe économique qui voyage sur le territoire métropolitain ou en Europe.

Enfin, cette proposition pourrait générer des recettes substantielles pour l’État : plus de 1,2 milliards d’euros par an, même sans réduction du trafic. En supposant une baisse de 10 % des ventes de billets, hypothèse considérée ici comme extrême, les recettes resteraient élevées, autour de 0,8 milliards d’euros, sans tenir compte des revenus liés à la taxation des billets des jets privés.

Concernant ces derniers, en partant d’une hypothèse de 70 000 vols annuels avec 6 passagers par vol en moyenne, et un montant de 1 000 euros par passager, on pourrait générer environ 0,4 milliards d’euros de recettes supplémentaires par an, malgré une prévision prudente basée sur une baisse du trafic par rapport aux 90 000 vols recensés en 2023.