Projet de loi Lutte contre le crime organisé et le terrorisme

Direction de la Séance

N°227

29 mars 2016

(1ère lecture)

(PROCÉDURE ACCÉLÉRÉE)

(n° 492 , 491 , 474, 476)


AMENDEMENT

C Défavorable
G Favorable
Rejeté

présenté par

Le Gouvernement


ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS ARTICLE 27 OCTIES

Après l’article 27 octies

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Le code de procédure pénale est ainsi modifié :

1° L’intitulé du chapitre III du titre Ier du livre Ier est complété par les mots : « et de la collégialité de l’instruction » ;

2° Avant l’article 49, est insérée une division ainsi rédigée : « Section 1 : Du juge d’instruction » ;

3° Le premier alinéa de l’article 49 est complété par les mots : « avec, le cas échéant, le concours d’un ou plusieurs juges cosaisis ou du collège de l’instruction » ;

4° L’article 52-1 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, les mots : « Dans certains tribunaux de grande instance, » sont supprimés ;

b) Les deuxième et troisième alinéas sont supprimés ;

5° Le chapitre III du titre Ier du livre Ier est complété par une section 2 ainsi rédigée :

« Section 2 : Du collège de l’instruction

« Art. 52-2. – Le collège de l’instruction est chargé, lorsqu’il est saisi soit à l’initiative du juge d’instruction en charge de la procédure, soit sur requête du procureur de la République, soit sur demande d’une partie déposée selon les modalités prévues à l’avant-dernier alinéa de l’article 81, de prendre une des ordonnances mentionnées à l’article 52-4.

« Art. 52-3. – Le collège de l’instruction est composé de trois juges d’instruction, dont le juge saisi de l’information, président.

« Les deux autres juges sont désignés par le président du tribunal de grande instance. Celui-ci peut établir à cette fin une ordonnance de roulement.

« Lorsque l’information fait l’objet d’une cosaisine, le ou les juges cosaisis font partie du collège de l’instruction. Si plus de trois juges ont été désignés dans le cadre de la cosaisine, l’ordre de leur désignation détermine leur appartenance au collège, sauf décision contraire du président du tribunal de grande instance.

« Lorsque, dans un tribunal de grande instance, le nombre de juges d’instruction ne suffit pas pour composer le collège, l’un des membres du collège peut être désigné parmi les autres juges du siège du tribunal.

« Les membres du collège de l’instruction sont désignés lors de la saisine de celui-ci ; cette désignation vaut également pour les autres saisines qui peuvent intervenir dans le cadre de la même information.

« Les désignations prévues au présent article sont des mesures d’administration judiciaire non susceptibles de recours.

« Art. 52-4. – Lorsqu’il est saisi dans les conditions prévues à l’article 52-2, le collège de l’instruction est compétent pour prendre une des ordonnances suivantes :

« 1° Ordonnance statuant sur la demande d’une personne mise en examen tendant à devenir témoin assisté en application de l’article 80-1-1 ;

« 2° Ordonnance statuant sur une demande d’acte déposée en application des articles 81, 82-1, 82-2 et 167 ;

« 3° Ordonnance statuant sur les demandes relatives au respect du calendrier prévisionnel de l’information, en application de l’article 175-1 ;

« 4° Ordonnance statuant sur les demandes des parties déposées après l’avis de fin d’information en application du quatrième alinéa de l’article 175 ;

« 5° Ordonnance procédant au règlement de l’information en application des articles 176 à 183 ; la demande tendant à la saisine du collège intervient alors dans le délai mentionné au quatrième alinéa de l’article 175.

« Art. 52-5. – Les décisions du collège de l’instruction prévues à l’article 52-4 sont prises par ordonnance motivée signée par le président du collège et mentionnant le nom des deux autres juges faisant partie du collège.

« Art. 52-6. – Les juges du collège de l’instruction ne peuvent, à peine de nullité, participer au jugement des affaires pénales qu’ils ont connues en cette qualité. » ;

6° L’intitulé du chapitre Ier du titre III du livre Ier est ainsi rédigé : « Du juge d’instruction et de la collégialité de l’instruction : juridiction d’instruction du premier degré » ;

7° Au premier alinéa du II de l’article 80, les mots : « En matière criminelle, ainsi que lorsqu’il requiert une cosaisine, » sont supprimés ;

8° L’article 80-1-1 est ainsi modifié :

a) Au deuxième alinéa, les mots : « à l’issue d’un délai de six mois après la mise en examen et » sont remplacés par les mots : « dans les dix jours qui suivent la mise en examen, puis à l’issue d’un délai de six mois après celle-ci, puis » ;

b) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Faute pour le juge d’instruction d’avoir statué dans le délai d’un mois, la personne mise en examen peut saisir directement le président de la chambre de l’instruction, qui statue et procède conformément aux troisième, quatrième et cinquième alinéas de l’article 186-1. » ;

9° L’article 83-1 est ainsi modifié :

a) Au troisième alinéa, les deux dernières phrases sont supprimées ;

b) Au quatrième alinéa, les deux dernières phrases sont supprimées ;

c) Au dernier alinéa, les mots : « et de cette dernière » sont supprimés ;

10° Au troisième alinéa de l’article 84, après les mots : « du juge chargé de l’information », sont insérés les mots : « ou d’un juge membre du collège de l’instruction » et les mots : « d’instruction » sont supprimés ;

11° Le dernier alinéa de l’article 118 est supprimé ;

12° L’article 183 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les ordonnances rendues par le collège de l’instruction en application de l’article 52-5 sont notifiées conformément aux dispositions du présent article. » ;

13° L’intitulé de la section 12 du chapitre Ier du titre III du livre Ier est ainsi rédigé : « De l’appel des ordonnances du juge d’instruction ou du collège de l’instruction ou du juge des libertés et de la détention » ;

14° Après l’article 186-3, il est inséré un article 186-4 ainsi rédigé :

« Art. 186-4. – Les articles 186 à 186-3 s’appliquent aux appels formés contre les ordonnances rendues par le collège de l’instruction. » ;

15° Au 3° de l’article 804, les références : « des articles 52-1, 83-1, 83-2 » sont remplacées par les références : « des articles 52-1 à 52-6, 83-1, 83-2, du dernier alinéa de l’article 183, de l’article 186-4 » ;

16° L’article 905-1 est ainsi rédigé :

« Art. 905-1. – Les articles 52-1 à 52-6, 83-1, 83-2, le dernier alinéa de l’article 183 et l’article 186-4 ne sont pas applicables à Saint-Pierre-et-Miquelon. » ;

17° À la seconde phrase du premier alinéa de l’article 805 du même code, les mots : « Les termes : "pôle de l’instruction" et "collège de l’instruction" sont remplacés par les termes : "juge d’instruction" et » sont supprimés.

II. – Le I du présent article entre en vigueur le 1er octobre 2018.

À cette date, les informations en cours dans les tribunaux de grande instance ne comprenant pas de pôle de l’instruction sont transférées aux pôles de l’instruction territorialement compétents.

III. – La loi n° 2007-291 du 5 mars 2007 tendant à renforcer l’équilibre de la procédure pénale est ainsi modifiée :

1° Les articles 1 à 5 sont abrogés ;

2° Les II et III de l’article 30 de la même loi sont abrogés.

IV. – Le présent article est applicable sur tout le territoire de la République, sous les réserves prévues aux 15° à 17° du I.

Objet

Cet amendement, qui reprend les dispositions qui figuraient dans le projet de loi déposé en juin 2013, a pour objet de remplacer dans le code de procédure pénale les dispositions de la loi du 5 mars 2007 tendant à renforcer l'équilibre de la procédure pénale qui prévoient au 1er janvier 2017, après trois reports d'entrée en vigueur, une collégialité obligatoire et systématique de l'instruction, par des dispositions permettant que les décisions essentielles de l'instruction puissent être prises, à chaque fois que cela apparaîtra justifié, par une formation collégiale composée de trois juges d'instruction.

Il n'apparaît en effet pas possible de mettre en oeuvre la collégialité prévue par la loi de 2007 à la fois pour des raisons de moyens, puisqu'elle exigerait la création de plus de trois cents postes de juges d'instruction, et de cohérence, car son caractère systématique, qui n'existe dans aucun autre pays, était de nature à aboutir à une collégialité de façade qui n'aurait pas permis une véritable avancée des droits des justiciables.

Il est en conséquence institué une collégialité de l'instruction qui n'interviendra qu'à la demande des parties ou des magistrats, lorsque ces derniers l'estimeront nécessaire, et qui ne portera que sur les phases de l'instruction justifiant effectivement qu'une décision soit prise par un collège de trois juges. Cette collégialité viendra le cas échéant renforcer la co-saisine, qui est maintenue en raison de son efficacité.

A chaque fois que l'intervention du collège aura été sollicitée, il sera de plein droit compétent pour statuer, selon les cas, sur la demande d'un mis en examen de devenir témoin assisté, demande qui pourra désormais être faite dans les 10 jours suivants la mise en examen, et pas uniquement tous les six mois suivants, ou sur des demandes d'actes ou d'expertise, sur le respect du calendrier prévisionnel de l'instruction, ou sur le règlement de l'information.

La composition du collège sera fixée lors de sa première saisine, et sera identique pour la durée de la procédure. Le juge d?instruction en charge de la procédure sera le président du collège, et il aura deux autres juges d'instruction comme assesseurs. En cas de co-saisine, les juges co-saisis seront membres du collège. En cas d'impossibilité l'un des membres du collège pourra être un juge autre qu'un juge d'instruction.

Cette réforme, dont l'entrée en vigueur est fixée au 1er octobre 2018, implique, comme le faisait la loi du 5 mars 2007, que les juges d'instruction seront tous regroupés dans les tribunaux de grande instance dans lesquels il y a un pôle de l'instruction, la fonction de juge d'instruction étant supprimée dans les autres tribunaux. Le Gouvernement pourra toutefois compléter la liste des juridictions dans lesquelles il y a actuellement un pôle de l'instruction, afin de créer de nouveaux pôles si l'activité pénale de la juridiction le justifie.

Cet amendement met ainsi en place, d'une façon cohérente, réaliste et équilibrée, une collégialité de l'instruction qui permettra à l'institution judiciaire de traiter les affaires pénales les plus graves et les plus complexes d'une manière tout à la fois plus efficace et plus respectueuse des droits de la défense et de la présomption d'innocence.