Sommaire
Présidence de Mme Pascale Gruny
Secrétaires :
Mme Françoise Férat, M. Joël Guerriau.
2. Financement de la sécurité sociale pour 2021. – Suite de la discussion d’un projet de loi
Articles additionnels après l’article 13 bis (suite)
Amendement n° 495 rectifié de Mme Victoire Jasmin. – Rejet.
Amendement n° 803 rectifié de M. Sebastien Pla. – Rejet.
Amendement n° 427 rectifié bis de Mme Nathalie Delattre. – Retrait.
Amendement n° 663 de M. Sebastien Pla. – Devenu sans objet.
Amendement n° 974 de Mme Laurence Cohen. – Rejet.
Amendement n° 1 rectifié ter de M. Michel Savin. – Adoption de l’amendement rédigeant l’article.
Amendement n° 595 rectifié bis de M. Jean-Jacques Lozach. – Devenu sans objet.
Amendement n° 110 rectifié ter de Mme Viviane Malet. – Adoption.
Amendement n° 560 rectifié de M. Victorin Lurel. – Devenu sans objet.
Amendement n° 867 rectifié ter de M. Georges Patient. – Devenu sans objet.
Adoption de l’article modifié.
Articles additionnels après l’article 13 quater
Amendement n° 114 rectifié bis de Mme Viviane Malet. – Rejet.
Amendement n° 863 rectifié de M. Georges Patient. – Rejet.
Article 13 quinquies (nouveau)
Amendement n° 148 de la commission. – Adoption.
Amendement n° 259 rectifié bis de M. Antoine Lefèvre. – Devenu sans objet.
Adoption de l’article modifié.
Article additionnel après l’article 13 quinquies
Amendement n° 596 rectifié ter de M. Jean-Jacques Lozach. – Rejet.
Amendement n° 913 rectifié de Mme Raymonde Poncet Monge. – Rejet.
Adoption de l’article.
Articles additionnels après l’article 13 sexies
Amendement n° 453 rectifié bis de M. Richard Yung. – Devenu sans objet.
Amendement n° 426 rectifié de M. Olivier Cadic. – Devenu sans objet.
Amendement n° 792 rectifié bis de M. Jean-Yves Leconte. – Devenu sans objet.
Amendement n° 90 rectifié ter de Mme Jacky Deromedi. – Devenu sans objet.
Amendement n° 975 de Mme Laurence Cohen. – Rejet.
Amendement n° 497 rectifié de M. Michel Canevet. – Retrait.
Amendement n° 499 rectifié de M. Michel Canevet. – Retrait.
Amendement n° 498 rectifié de M. Michel Canevet. – Rejet.
Amendement n° 966 rectifié de Mme Laurence Cohen. – Rejet.
Suspension et reprise de la séance
PRÉSIDENCE DE M. Gérard Larcher
3. Questions d’actualité au Gouvernement
Mme Véronique Guillotin ; M. Adrien Taquet, secrétaire d’État auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargé de l’enfance et des familles ; Mme Véronique Guillotin.
renforcement du protocole sanitaire dans les lycées
M. Thomas Dossus ; M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports ; M. Thomas Dossus.
nouvelles mesures sanitaires envisagées dans les lycées
Mme Colette Mélot ; M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports.
situation des producteurs de fleurs coupées
M. Jean Pierre Vogel ; M. Alain Griset, ministre délégué auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance, chargé des petites et moyennes entreprises ; M. Jean Pierre Vogel.
respect du parlement et exemple de la couronne malgache
Mme Annick Billon ; Mme Roselyne Bachelot, ministre de la culture ; Mme Annick Billon.
perspectives de vaccination contre la covid-19
M. Gérard Lahellec ; M. Adrien Taquet, secrétaire d’État auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargé de l’enfance et des familles ; M. Gérard Lahellec.
chavirage de canots de clandestins au large de cayenne
Mme Marie-Laure Phinera-Horth ; M. Sébastien Lecornu, ministre des outre-mer.
protocole sanitaire dans les écoles
M. Christian Redon-Sarrazy ; M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports.
réouverture des lieux de culte
M. Pierre Cuypers ; M. Gabriel Attal, secrétaire d’État auprès du Premier ministre, porte-parole du Gouvernement ; M. Pierre Cuypers.
M. Gilbert-Luc Devinaz ; M. Jean-Yves Le Drian, ministre de l’Europe et des affaires étrangères.
situation du secteur de l’événementiel
Mme Catherine Dumas ; M. Alain Griset, ministre délégué auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance, chargé des petites et moyennes entreprises ; Mme Catherine Dumas.
impact du confinement sur le niveau des élèves
Mme Sonia de La Provôté ; M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports.
données scientifiques et fermetures des commerces
M. Jean-Baptiste Blanc ; M. Adrien Taquet, secrétaire d’État auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargé de l’enfance et des familles.
dysfonctionnement de l’établissement français du sang en guadeloupe
Mme Victoire Jasmin ; M. Adrien Taquet, secrétaire d’État auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargé de l’enfance et des familles ; Mme Victoire Jasmin.
effets psychologiques du confinement
Mme Brigitte Lherbier ; M. Adrien Taquet, secrétaire d’État auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargé de l’enfance et des familles.
perspectives d’un déconfinement
M. Michel Bonnus ; M. Adrien Taquet, secrétaire d’État auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargé de l’enfance et des familles ; M. Michel Bonnus.
Suspension et reprise de la séance
PRÉSIDENCE DE M. Pierre Laurent
4. Financement de la sécurité sociale pour 2021. – Suite de la discussion d’un projet de loi
Candidatures à une éventuelle commission mixte paritaire
Amendement n° 830 rectifié bis de M. Jean-Pierre Decool. – Rejet.
Amendement n° 149 de la commission. – Retrait.
Amendement n° 755 rectifié de Mme Corinne Féret. – Rejet.
Adoption de l’article.
Articles additionnels après l’article 14
Amendement n° 325 rectifié bis de M. Daniel Chasseing. – Retrait.
Amendement n° 84 rectifié bis de Mme Nathalie Goulet. – Retrait.
Amendement n° 949 de Mme Raymonde Poncet Monge. – Rejet.
Amendement n° 916 de Mme Raymonde Poncet Monge. – Rejet.
Amendement n° 150 de la commission. – Adoption de l’amendement supprimant l’article.
Article 14 ter (nouveau) – Adoption.
Amendement n° 763 rectifié de Mme Corinne Féret. – Rejet.
Amendement n° 1039 de Mme Laurence Cohen. – Rejet.
Amendement n° 1062 de la commission. – Adoption.
Adoption de l’article modifié.
Article additionnel après l’article 15
Amendement n° 1063 de la commission. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.
Amendement n° 151 de la commission. – Adoption.
Adoption de l’article modifié.
Article 15 ter (nouveau) – Adoption.
Amendement n° 83 rectifié de Mme Nathalie Goulet. – Retrait.
Amendement n° 779 rectifié de M. Bernard Jomier. – Rejet.
Adoption de l’article.
Article 15 quinquies (nouveau)
Amendement n° 780 rectifié de M. Bernard Jomier. – Rejet.
Adoption de l’article.
Articles additionnels après l’article 15 quinquies
Amendement n° 454 rectifié de M. Richard Yung. – Retrait.
Amendement n° 455 rectifié de M. Richard Yung. – Rejet.
Amendement n° 1040 de Mme Laurence Cohen. – Rejet.
Amendement n° 1011 de Mme Laurence Cohen. – Rejet.
Amendement n° 152 de la commission. – Adoption.
Amendement n° 619 rectifié de Mme Jocelyne Guidez. – Devenu sans objet.
Amendement n° 1012 de Mme Laurence Cohen. – Adoption.
Amendement n° 801 rectifié de Mme Monique Lubin. – Devenu sans objet.
Amendement n° 401 rectifié de Mme Céline Boulay-Espéronnier. – Adoption.
Amendement n° 722 rectifié de Mme Monique Lubin. – Retrait.
Amendement n° 905 rectifié de M. Jean-Yves Roux. – Retrait.
Amendement n° 921 de Mme Raymonde Poncet Monge. – Rejet.
Amendement n° 844 rectifié de M. Daniel Gremillet. – Retrait.
Amendement n° 902 rectifié de M. Jean-Pierre Corbisez. – Retrait.
Amendement n° 245 rectifié quater de M. Daniel Chasseing. – Retrait.
Amendement n° 721 rectifié de Mme Victoire Jasmin. – Adoption.
Amendement n° 723 rectifié de Mme Laurence Rossignol. – Adoption.
Amendement n° 482 rectifié ter de Mme Monique Lubin. – Rejet.
Amendement n° 412 de Mme Jocelyne Guidez. – Adoption.
Amendement n° 1013 de Mme Laurence Cohen. – Rejet.
Amendement n° 984 de Mme Laurence Cohen. – Rejet.
Amendement n° 419 rectifié bis de Mme Jocelyne Guidez. – Rejet.
5. Modifications de l’ordre du jour
Suspension et reprise de la séance
PRÉSIDENCE DE Mme Nathalie Delattre
7. Financement de la sécurité sociale pour 2021. – Suite de la discussion d’un projet de loi
Amendement n° 483 rectifié ter de Mme Monique Lubin. – Retrait.
Amendement n° 153 de la commission. – Adoption.
Amendement n° 154 de la commission. – Adoption.
Amendement n° 717 rectifié de Mme Michelle Meunier. – Rejet.
Amendement n° 155 de la commission. – Adoption.
Amendement n° 156 de la commission. – Adoption.
Amendement n° 157 de la commission. – Adoption.
Amendement n° 798 rectifié de Mme Monique Lubin. – Rejet.
M. Philippe Mouiller, rapporteur de la commission des affaires sociales pour l’autonomie
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État
Mme Sophie Cluzel, secrétaire d’État auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées
Adoption, par scrutin public n° 18, de l’article modifié.
Articles additionnels après l’article 16
Amendement n° 158 de la commission. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.
Amendement n° 903 rectifié de M. Jean-Pierre Corbisez. – Retrait.
Amendement n° 601 du Gouvernement. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.
Amendement n° 970 de Mme Laurence Cohen. – Rejet.
Amendement n° 570 de Mme Marie-Noëlle Lienemann. – Rejet.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales
Amendement n° 216 rectifié de Mme Annie Delmont-Koropoulis. – Adoption.
Amendement n° 217 rectifié de Mme Annie Delmont-Koropoulis. – Rejet.
Amendement n° 355 rectifié de M. René-Paul Savary. – Adoption.
Adoption de l’article modifié.
Articles additionnels après l’article 17
Amendement n° 607 rectifié ter de Mme Marie-Pierre Monier. – Rejet.
Amendement n° 261 rectifié quinquies de M. Alain Milon. – Retrait.
Renvoi de la suite de la discussion.
Nomination de membres d’une éventuelle commission mixte paritaire
compte rendu intégral
Présidence de Mme Pascale Gruny
vice-président
Secrétaires :
Mme Françoise Férat,
M. Joël Guerriau.
1
Procès-verbal
Mme le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
2
Financement de la sécurité sociale pour 2021
Suite de la discussion d’un projet de loi
Mme le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, de financement de la sécurité sociale pour 2021 (projet n° 101, rapport n° 107, avis n° 106).
Dans la discussion des articles, nous poursuivons, au sein du titre Ier de la troisième partie, l’examen des amendements tendant à insérer des articles additionnels après l’article 13 bis.
TROISIÈME PARTIE (suite)
DISPOSITIONS RELATIVES AUX RECETTES ET À L’ÉQUILIBRE DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR L’EXERCICE 2021
TITRE IER (suite)
DISPOSITIONS RELATIVES AUX RECETTES, AU RECOUVREMENT ET À LA TRÉSORERIE
Chapitre Ier (suite)
Tenir compte de la crise de la covid-19
Articles additionnels après l’article 13 bis (suite)
Mme le président. L’amendement n° 495 rectifié, présenté par Mme Jasmin, M. Lurel, Mme Conconne et M. Antiste, est ainsi libellé :
Après l’article 13 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – L’article L. 758-1 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigé :
« Art. L. 758-1. – En Guadeloupe, en Guyane, à La Réunion, en Martinique, à Mayotte, à Saint-Barthélemy et à Saint-Martin, le tarif de la cotisation sur les boissons alcooliques, prévu à l’article L. 245-9 est fixé à 0,04 euro par décilitre ou fraction de décilitre, pour les rhums, tafias et spiritueux composés à base d’alcool de cru produits et consommés sur place. »
II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Victoire Jasmin.
Mme Victoire Jasmin. Je commencerai par dire que l’abus d’alcool est dangereux pour la santé. Il n’est donc pas question, au travers de cet amendement, d’inciter à la consommation d’alcool. Il s’agit en revanche de défendre les entreprises ultramarines de Guadeloupe, de Martinique et de La Réunion productrices d’alcool de rhum, car la filière canne-sucre-rhum est pourvoyeuse d’emplois locaux.
Il s’agit également de dénoncer une injustice. En 2019, voire en 2018, en raison de données erronées, le tarif de la cotisation sur les boissons alcooliques, par hectolitre d’alcool pur, est passé de 40 euros à 557,90 euros, soit quatorze fois plus, alors que les entreprises locales sont en souffrance et connaissent les mêmes difficultés qu’en métropole. (Mme Catherine Conconne acquiesce.)
Je souhaite une révision d’un tel montant, car les données qui ont motivé ces choix tendaient à faire croire que les jeunes Ultramarins consommaient plus d’alcool qu’ailleurs. Or ce n’est pas ce que montrent les vraies statistiques. De plus, ils ne consomment malheureusement pas notre rhum, mais ils consomment d’autres spiritueux et alcools.
L’objet de cet amendement est donc de revenir à un tarif de 40 euros par hectolitre d’alcool pur.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. La loi a déjà défini une trajectoire haussière de la taxation sur le rhum après de longs débats ces dernières années. Il n’est pas opportun d’y revenir.
Avis défavorable.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre délégué auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance, chargé des comptes publics. L’avis du Gouvernement est défavorable pour des raisons identiques à celles qui ont été évoquées par M. le rapporteur et pour celles qui ont été avancées à l’occasion de chacun des débats que nous avons eus à ce sujet, que ce soit en PLFSS ou lors des différents PLFR, autant d’occasions de remettre l’ouvrage sur le métier !
Nous tenons à cet alignement et à cette convergence, tout en précisant qu’une fois cette convergence actée le régime de fiscalité sur les boissons visées par l’amendement restera un régime relativement plus favorable.
Mme le président. La parole est à Mme Catherine Conconne, pour explication de vote.
Mme Catherine Conconne. C’est avec un certain plaisir que je vais soutenir l’amendement de ma collègue, qui a parfaitement expliqué d’un point de vue technique l’injustice – je dis bien l’injustice ! – ayant frappé la filière canne-sucre-rhum il y a deux ans. Elle a souligné les données erronées qui ont prévalu pour construire cette mesure. Il semblerait que nous soyons les plus grands consommateurs d’alcool du monde… Or 12 % seulement de la production de rhum est consommée à la Martinique. Notre jeunesse et les locaux consomment davantage de bière importée, de cognac, de champagne non fabriqués chez nous et plus faiblement taxés.
Imposer à cette filière, au potentiel de développement extraordinaire, un bâton supplémentaire dans ses moulins de broyage a été vécu comme une véritable injustice. Hélas ! chez nous, on a pris l’habitude et on s’est plié au rôle facile de financer l’inactivité, avec un RSA qui explose et des chômeurs dont le nombre n’arrête pas d’augmenter. Mme la présidente du conseil départemental de Guadeloupe a souligné hier que plus de 1 000 Guadeloupéens supplémentaires étaient demandeurs du RSA depuis la crise du covid.
La mauvaise connaissance, que dis-je, la mauvaise perception de nos réalités nous conduit généralement à entendre la même ritournelle sur nos amendements : rejetés, avis défavorable !
Nous partons de nos pays en conscience, pleins d’enthousiasme et nous revenons le bagage mince, comme dirait la chanson ! Nous nous plions de plus en plus à une forme de résignation, comme je le disais récemment à Alain Milon et à une de mes collègues de La Réunion. Une fois de plus, nous allons entendre « avis défavorable », « rejeté ». À la manière de Jacques Brel, je terminerai sur ces mots : « au suivant » !
Mme le président. Je suis saisie de quatre amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 803 rectifié, présenté par MM. Pla et Jomier, Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Jasmin, Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Antiste et J. Bigot, Mme Bonnefoy, MM. Bouad, Durain et Gillé, Mme Harribey, M. P. Joly, Mme G. Jourda, M. Leconte, Mme Lepage, MM. Lozach, Lurel, Marie et Mérillou, Mme Monier, M. Montaugé, Mme S. Robert, MM. Sueur, Temal et Tissot, Mmes Préville, Briquet et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 13 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Les cotisations dues au titre des prestations familiales, des accidents du travail et des maladies professionnelles, de l’assurance maladie, invalidité et maternité, de l’assurance vieillesse par les travailleurs relevant du régime de protection sociale défini à l’article L. 722-8 du code rural et de la pêche maritime, font l’objet d’une exonération totale ou partielle dans les conditions prévues au II du présent article.
II. – Cette exonération est accordée aux travailleurs non-salariés agricoles mentionnés au 1° de l’article L. 722-1 du même code qui exercent leur activité principale dans un des secteurs mentionnés à l’annexe II du décret n° 2020-371 du 30 mars 2020 relatif au fonds de solidarité à destination des entreprises particulièrement touchées par les conséquences économiques, financières et sociales de la propagation de l’épidémie de covid-19 et des mesures prises pour limiter cette propagation. Cette exonération est appliquée à hauteur de :
a. 100 % pour les entreprises qui ont constaté une baisse de chiffre d’affaires en 2020 d’au moins 60 % par rapport à l’année précédente ;
b. 50 % pour les entreprises qui ont constaté une baisse de chiffre d’affaires en 2020 d’au moins 40 % par rapport à l’année précédente ;
c. 25 % pour les entreprises qui ont constaté une baisse de chiffre d’affaires en 2020 d’au moins 20 % par rapport à l’année précédente.
Les travailleurs non-salariés agricoles mentionnés au 1° de l’article L. 722-1 dudit code qui ne bénéficient pas du présent dispositif d’exonération peuvent demander à bénéficier d’une remise partielle des dettes de cotisations et contributions mentionnées au I du présent article constituées au titre de l’année 2020 ou d’un échéancier de règlement sur trente-six mois. Le niveau de la remise ne peut excéder le sixième des sommes dues au titre de l’année 2020.
La réduction d’activité est appréciée selon les modalités définies par décret pour le bénéfice du fonds de solidarité à destination des entreprises particulièrement touchées par les conséquences économiques, financières et sociales de la propagation de l’épidémie de covid-19.
III. – Les modalités d’application du présent article sont fixées par décret.
IV. – La perte de recettes pour les organismes de sécurité sociale est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Christian Redon-Sarrazy.
M. Christian Redon-Sarrazy. Cet amendement vise à exonérer de charges sociales les exploitants des filières agricoles en général, fortement impactées par la crise, telles que l’horticulture, la production de pomme de terre de transformation, la filière avicole, l’élevage, la viticulture ou la production de fromage.
L’exonération de charges patronales pour les salariés de ces filières agricoles en grande difficulté a déjà fait l’objet de mesures adoptées à l’Assemblée nationale dans le projet de loi de finances (PLF) pour 2021.
Il s’agit dans cet amendement de rendre accessible aux travailleurs non salariés agricoles une exonération de charges, car aucun dispositif n’a été prévu à leur égard alors même qu’ils subissent de plein fouet cette crise sanitaire qui affecte durablement leur activité.
L’annonce d’un nouveau reconfinement, le 30 octobre dernier, va venir aggraver encore une situation déjà fortement dégradée et qui menace la survie de nombreuses exploitations ayant enregistré des pertes massives pendant la crise.
Alors que les prix payés à la suite de l’effondrement du marché ne couvrent pas les coûts de production, que les reports de charges obtenus au printemps ainsi que les prêts garantis par l’État (PGE) souscrits vont devoir commencer à être remboursés sans réelle perspective de reprise dans les mois à venir, de nombreux exploitants vont verser dans la précarité.
C’est pourquoi, afin de soutenir les petites entreprises agricoles pour lesquelles les cotisations sociales représentent une charge non négligeable, il convient d’attribuer cette exonération aux non-salariés de ces secteurs, en fonction des pertes subies au cours de l’année 2020. Elle permettra un réel allégement de leurs charges, en les exonérant de cotisations sociales pour 2020.
Mme le président. L’amendement n° 427 rectifié bis, présenté par Mme N. Delattre, MM. D. Laurent, Artano, Babary et Belin, Mme Berthet, MM. Bilhac, E. Blanc, Bonne, Bouchet, Bouloux, J.M. Boyer, Brisson, Buis, Burgoa, Cabanel et Calvet, Mmes Canayer et Chain-Larché, M. Courtial, Mme L. Darcos, M. Darnaud, Mme Deromedi, M. Détraigne, Mme Drexler, M. Duffourg, Mmes Dumas et Dumont, M. Favreau, Mme Férat, MM. Fialaire et B. Fournier, Mme Garriaud-Maylam, MM. Grand et Gremillet, Mme Guillotin, M. Houpert, Mmes Imbert et G. Jourda, MM. Kern, Klinger et Laménie, Mme Lassarade, MM. Lefèvre et H. Leroy, Mme Lopez, MM. Louault et Mandelli, Mme M. Mercier, M. de Nicolaÿ, Mme Noël, M. Pellevat, Mme Perrot, MM. Piednoir et Pointereau, Mmes Raimond-Pavero et Renaud-Garabedian, M. Regnard, Mme Richer, MM. Saury et Savary, Mme Sollogoub, M. Somon, Mme Ventalon et M. Cuypers, est ainsi libellé :
Après l’article 13 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Les cotisations dues au titre des prestations familiales, des accidents du travail et des maladies professionnelles, de l’assurance maladie, invalidité et maternité, de l’assurance vieillesse par les travailleurs relevant du régime de protection sociale défini à l’article L. 722-8 du code rural et de la pêche maritime, font l’objet d’une exonération totale ou partielle dans les conditions prévues au II du présent article.
II. - Cette exonération est accordée aux travailleurs non-salariés agricoles mentionnés au 1° de l’article L. 722-1 du même code qui exercent leur activité principale dans le secteur de la culture de la vigne mentionné à l’annexe II du décret n° 2020-371 du 30 mars 2020 relatif au fonds de solidarité à destination des entreprises particulièrement touchées par les conséquences économiques, financières et sociales de la propagation de l’épidémie de covid-19 et des mesures prises pour limiter cette propagation et dont l’activité a été réduite au cours de l’année 2020 au moins 20 % par rapport à l’année précédente.
Le montant de l’exonération est égal au produit des revenus d’activité de l’année tels qu’ils sont pris en compte pour la détermination de l’assiette des cotisations définie à l’article L. 731-14 du code rural et de la pêche maritime et d’un coefficient. Ce coefficient est déterminé proportionnellement à la perte subie par application d’une formule fixée par décret.
Les travailleurs non-salariés agricoles mentionnés au 1° de l’article L. 722-1 du code rural et de la pêche maritime qui ne bénéficient pas du présent dispositif d’exonération peuvent demander à bénéficier d’une remise partielle des dettes de cotisations et contributions mentionnées au I du présent article constituées au titre de l’année 2020 ou d’un échéancier de règlement sur trente-six mois. Le niveau de la remise ne peut excéder le sixième des sommes dues au titre de l’année 2020.
La réduction d’activité est appréciée selon les modalités définies par décret pour le bénéfice du fonds de solidarité à destination des entreprises particulièrement touchées par les conséquences économiques, financières et sociales de la propagation de l’épidémie de covid-19.
III. - Les modalités d’application du présent article sont fixées par décret.
IV. - La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. René-Paul Savary.
M. René-Paul Savary. Je présente cet amendement au nom de Nathalie Delattre et de Daniel Laurent pour le groupe d’études Vigne et vin. Ils m’ont d’ailleurs chargé de vous remercier de l’adoption conforme de l’article 13 bis, ce qui a été ressenti positivement par les élus des territoires viticoles et par l’ensemble des professionnels du secteur.
Ce serait un complément essentiel que d’introduire les mêmes dispositions pour les non-salariés agricoles, c’est-à-dire les exploitants eux-mêmes, car beaucoup de petites entreprises viticoles n’ont pas forcément de salariés. Ces exploitations viticoles sont pourvoyeuses de centaines de milliers d’emplois non délocalisables sur l’ensemble de nos territoires, au travers de leurs activités saisonnières. Elles ont été terriblement impactées par la crise sanitaire, mais également économique.
La consommation de vin associée aux événements festifs a fortement baissé, les salons sont annulés les uns après les autres, les exportations, notamment aux États-Unis, ont considérablement ralenti, les cafés, hôtels, restaurants sont fermés. Les mesures de soutien gouvernemental sont aujourd’hui insuffisantes par rapport au poids du secteur et elles ne sont pas forcément adaptées à sa spécificité – je pense au chômage partiel dont il ne peut bénéficier.
La viticulture est un ambassadeur de la France à l’international, un emblème de la gastronomie et de l’art de vivre à la française, qui est en train de se perdre. Elle est le deuxième contributeur positif de notre balance commerciale. C’est une richesse, un patrimoine, une culture qu’il est essentiel de préserver.
C’est la raison pour laquelle nous vous proposons une telle adaptation, en complément de l’article 13 bis.
Mme le président. L’amendement n° 428 rectifié bis, présenté par Mme N. Delattre, MM. D. Laurent, Artano, Babary et Belin, Mme Berthet, MM. Bilhac, E. Blanc, Bonne, Bouchet, Bouloux, J.M. Boyer, Brisson, Buis, Burgoa, Cabanel et Calvet, Mmes Canayer et Chain-Larché, M. Courtial, Mme L. Darcos, M. Darnaud, Mme Deromedi, M. Détraigne, Mme Drexler, M. Duffourg, Mmes Dumas et Dumont, M. Favreau, Mme Férat, MM. Fialaire et B. Fournier, Mme Garriaud-Maylam, MM. Grand et Gremillet, Mme Guillotin, M. Houpert, Mmes Imbert et G. Jourda, MM. Kern, Klinger et Laménie, Mme Lassarade, MM. Lefèvre et H. Leroy, Mme Lopez, MM. Louault et Mandelli, Mme M. Mercier, M. de Nicolaÿ, Mme Noël, M. Pellevat, Mme Perrot, MM. Piednoir et Pointereau, Mmes Raimond-Pavero et Renaud-Garabedian, M. Regnard, Mme Richer, MM. Saury et Savary, Mme Sollogoub, M. Somon, Mme Ventalon et M. Cuypers, est ainsi libellé :
Après l’article 13 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Les cotisations dues au titre des prestations familiales, des accidents du travail et des maladies professionnelles, de l’assurance maladie, invalidité et maternité, de l’assurance vieillesse par les travailleurs relevant du régime de protection sociale défini à l’article L. 722-8 du code rural et de la pêche maritime, font l’objet d’une exonération totale ou partielle dans les conditions prévues au II du présent article.
II. – Cette exonération est accordée aux travailleurs non-salariés agricoles mentionnés au 1° de l’article L. 722-1 du même code qui exercent leur activité principale dans le secteur de la culture de la vigne mentionné à l’annexe II du décret n° 2020-371 du 30 mars 2020 relatif au fonds de solidarité à destination des entreprises particulièrement touchées par les conséquences économiques, financières et sociales de la propagation de l’épidémie de covid-19 et des mesures prises pour limiter cette propagation et dont l’activité a été réduite au cours de l’année 2020 d’au moins 40 % par rapport à l’année précédente.
Le montant de l’exonération est égal au produit des revenus d’activité de l’année tels qu’ils sont pris en compte pour la détermination de l’assiette des cotisations définie à l’article L. 731-14 du code rural et de la pêche maritime et d’un coefficient. Ce coefficient est déterminé proportionnellement à la perte subie par application d’une formule fixée par décret.
Les travailleurs non-salariés agricoles mentionnés au 1° de l’article L. 722-1 du code rural et de la pêche maritime qui ne bénéficient pas du présent dispositif d’exonération peuvent demander à bénéficier d’une remise partielle des dettes de cotisations et contributions mentionnées au I du présent article constituées au titre de l’année 2020 ou d’un échéancier de règlement sur trente-six mois. Le niveau de la remise ne peut excéder le sixième des sommes dues au titre de l’année 2020.
La réduction d’activité est appréciée selon les modalités définies par décret pour le bénéfice du fonds de solidarité à destination des entreprises particulièrement touchées par les conséquences économiques, financières et sociales de la propagation de l’épidémie de covid-19.
III. – Les modalités d’application du présent article sont fixées par décret.
IV. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. René-Paul Savary.
M. René-Paul Savary. Il s’agit d’un amendement de repli quasiment identique au précédent. Ici, le seuil d’activation des exonérations serait fixé à une perte de chiffre d’affaires d’au moins 40 %. Cela ne mettrait pas à égalité ceux qui ont des salariés et ceux qui n’en ont pas, mais ce serait déjà une avancée, même si nous défendons bien sûr prioritairement l’amendement n° 427 rectifié bis.
Mme le président. L’amendement n° 663, présenté par MM. Pla, Bourgi, Bouad, Devinaz et Durain, Mmes Harribey, Jasmin et G. Jourda, MM. Lurel, Mérillou et Michau, Mme Monier et MM. Montaugé, Redon-Sarrazy et Tissot, est ainsi libellé :
Après l’article 13 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – L’article L. 731-11 du code rural et de la pêche maritime est complété par cinq alinéas ainsi rédigés :
« Les cotisations mentionnées au premier alinéa ainsi que celles relatives aux accidents du travail et aux maladies professionnelles et maternité pour les travailleurs relevant du régime de protection sociale défini à l’article L. 722-8 du code rural et de la pêche maritime font l’objet d’une exonération totale ou partielle dans les conditions prévues au 1° de ce présent article.
« 1° Cette exonération est accordée aux travailleurs non-salariés agricoles mentionnés au 1° de l’article L. 722-1 du code rural et de la pêche maritime qui exercent leur activité principale dans le secteur culture de la vigne mentionné à l’annexe II du décret n° 2020-371 du 30 mars 2020 et dont l’activité a été réduite au cours de l’année 2020 d’au moins 40 % par rapport à l’année précédente.
« 2° Le montant de l’exonération est égal au produit des revenus d’activité de l’année tels qu’ils sont pris en compte pour la détermination de l’assiette des cotisations définie à l’article L. 731- 14 du code rural et de la pêche maritime et d’un coefficient. Ce coefficient est déterminé proportionnellement à la perte subie par application d’une formule fixée par décret.
« 3° Les travailleurs non-salariés agricoles mentionnés au 1° de l’article L. 722-1 du code rural et de la pêche maritime qui ne bénéficient pas du présent dispositif d’exonération peuvent demander à bénéficier d’une remise partielle des dettes de cotisations et contributions mentionnées au 1° du présent article constituées au titre de l’année 2020 ou d’un échéancier de règlement sur trente-six mois. Le niveau de la remise ne peut excéder le sixième des sommes dues au titre de l’année 2020.
« La réduction d’activité est appréciée selon les modalités définies par décret pour le bénéfice du fonds de solidarité à destination des entreprises particulièrement touchées par les conséquences économiques, financières et sociales de la propagation de l’épidémie de covid-19. »
II. – Les modalités d’application du présent article sont fixées par décret.
III. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Christian Redon-Sarrazy.
M. Christian Redon-Sarrazy. Cet amendement a pour objet de défendre la filière viticole, qui a subi de plein fouet la crise économique liée à la lutte contre le coronavirus.
Depuis plus d’un an, elle est en proie à un contexte économique difficile, que ce soit du fait du conflit entre l’Europe et les États-Unis sur l’aéronautique, dont la filière est une victime collatérale – les vins français sont taxés à 25 % depuis octobre 2019 à leur entrée sur le sol américain, qui est notre premier marché à l’export –, de l’enchaînement des difficultés à l’export – Chine, Royaume-Uni – ou encore de la crise sanitaire planétaire.
Sur le premier semestre 2020, le secteur accuse des pertes de plusieurs milliards d’euros. Or, à l’inverse de nombreux secteurs économiques, les entreprises viticoles de la production n’ont pas eu recours dans leur très grande majorité au chômage partiel et ont continué à rémunérer leurs salariés pour assurer l’entretien de la vigne, en prévision de la récolte à venir.
Le reconfinement en vigueur depuis le 30 octobre dernier va venir aggraver une situation déjà fort dégradée pour la fin de l’année 2020 ainsi que pour 2021 : pas de reprise du tourisme, notamment des visiteurs internationaux ; fermeture des bars et des restaurants ; annulation des grands salons professionnels et grand public ; reprise en demi-teinte de l’export du fait de la situation sanitaire préoccupante dans de nombreux pays.
C’est pourquoi, afin d’aider les petites entreprises pour lesquelles les cotisations sociales représentent une charge non négligeable, un soutien doit être mis en place en ce qui concerne les charges sociales des exploitants en 2021.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Ces amendements visent à répondre à une faille de l’article 13 bis, article qui, comme l’a souligné René-Paul Savary, ne concerne que les employeurs et pas des indépendants, lesquels ont été oubliés.
Pour autant, ces derniers présentent les mêmes difficultés. On voit mal en quoi, à perte de chiffre d’affaires égale, les indépendants du seul secteur agricole devraient recevoir une compensation différente de celles de tous les autres entrepreneurs du pays. Cela pose une vraie question de principe et risque peut-être de soulever une difficulté constitutionnelle.
Si l’une de ces initiatives devait prospérer, il me semble que ce serait plutôt l’amendement n° 428 rectifié bis, qui tend à conditionner le dispositif à une perte de chiffre d’affaires d’au moins 40 % sur 2020.
La commission souhaite néanmoins connaître l’avis du Gouvernement.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre délégué. Sans préjuger la fin de mon propos, l’amendement n° 428 rectifié bis tend effectivement à couvrir les indépendants, alors que le dispositif adopté à l’Assemblée nationale, qui fait l’objet de l’article 13 bis, ne couvre que les employeurs dans le domaine agricole.
Cela étant, le Gouvernement est défavorable à ces dispositions comme il était défavorable à l’adoption de l’article 13 bis à l’Assemblée nationale.
Nous avons mis en place un système d’exonération de cotisations patronales et de crédits pour le paiement des cotisations salariales applicable à l’intégralité du secteur économique, sous réserve de pouvoir démontrer une perte d’activité de 50 % pour les secteurs S1 bis et d’être fermé par décision administrative pour le secteur S1. Ces dispositions s’appliquent à l’ensemble du secteur agricole et, évidemment, à la viticulture.
L’Assemblée nationale a adopté un dispositif propre à la viticulture, alors que l’amendement n° 803 rectifié de M. Pla dont nous discutons ici s’appliquerait à la totalité du champ de l’agriculture. Ce dispositif nous paraît présenter un certain nombre de difficultés ou de failles.
Tout d’abord, il est différent de celui qui est applicable à la totalité des secteurs économiques S1 bis et S1 du fait d’une barémisation des exonérations en fonction des pertes de chiffre d’affaires par tranches de 10 %, de 20 % et de 30 % selon les cas.
Ensuite, nous craignons un problème constitutionnel de rupture d’égalité dans la mesure où le secteur viticole, par l’article 13 bis, et, si d’aventure votre assemblée adoptait l’amendement n° 803 rectifié bis, le secteur agricole en général se verraient appliquer des conditions d’exonération différentes des autres activités économiques, ce qui ne se justifie pas en termes de droit. J’ai eu l’occasion de souligner devant l’Assemblée nationale que nous nous interrogions sur la constitutionnalité de l’amendement qui a été adopté et qui est devenu l’article 13 bis. Cet argument vaut également devant le Sénat.
Enfin, autre difficulté pour la question des indépendants, dans un certain nombre de cas, l’adoption de l’amendement n° 428 rectifié bis proposé par Mme Delattre pourrait amener une prise en charge moins favorable pour les viticulteurs indépendants que ce que nous prévoyons dans le dispositif d’exonération déjà acté par le Gouvernement.
Pour ce qui concerne les indépendants et uniquement eux, nous avons prévu, dans la mesure où la cotisation est annuelle, un dispositif d’exonération forfaitaire à hauteur de 600 euros par mois. L’application du dispositif prévu dans l’amendement n° 428 rectifié bis aux indépendants du secteur de la viticulture – je concentre mon propos sur celui-ci puisque j’ai entendu M. le rapporteur dire que la commission avait un tropisme favorable pour cet amendement – pourrait amener certains indépendants de la viticulture à bénéficier d’une exonération totalement proratisée à leur activité de l’année précédente ou des mois précédents, avec un montant d’exonération inférieur au forfait de 600 euros par mois. Voilà la différence négative pour les indépendants.
La différence positive, mais j’ai exprimé ma crainte sur le caractère constitutionnel d’une telle mesure, serait pour les indépendants qui ne pourraient justifier d’une perte de chiffre d’affaires de 50 % : dans le dispositif tel qu’il est acté par le Gouvernement, ils n’ont droit à aucune exonération, alors qu’ici ils pourraient en bénéficier d’une dès une perte de chiffre d’affaires supérieure à 20 %. Néanmoins, il y aurait des gagnants et des perdants pour les indépendants du secteur viticole.
Cela étant, et en nous en tenant aux arguments que nous avons développés en vain devant l’Assemblée nationale, nous considérons que la différence de traitement proposée au travers de ces amendements, comme d’ailleurs la différence de traitement intégrée dans l’article 13 bis, ne se justifie pas entre les secteurs économiques. Le dispositif que nous avons prévu s’applique à l’ensemble des secteurs économiques sans risque juridique.
Pour toutes ces raisons, le Gouvernement est défavorable à ces quatre amendements.
Mme le président. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.
M. René-Paul Savary. Si l’analyse de M. le ministre est pertinente, il s’agit tout de même d’une activité particulière, qui, de ce fait, mérite un traitement particulier. Il y a aussi le problème des stocks. Nombre de vins ne se boivent pas dans l’année, il faut les conserver un certain temps, parfois très longtemps. C’est ce qui explique que de nombreuses entreprises ont un chiffre d’affaires inférieur aux stocks constitués à l’intérieur de leurs caves, ce qui pose un certain nombre de problèmes. Certains montages financiers peuvent aider à amortir les mauvaises années, mais face à une crise telle que celle-là ce sont des pans entiers qui tombent !
Prenons l’exemple du Champagne, qui génère 5 milliards d’euros de chiffre d’affaires global dans l’ensemble de l’économie. Quand vous avez 30 % en moins, c’est un chiffre considérable : c’est tout un secteur qui s’effondre par pans entiers, surtout s’il est constitué par de petites exploitations, avec des surfaces minimes. C’est un exemple, mais il y en a d’autres. Voilà pourquoi les vignerons indépendants méritent l’attention du Gouvernement et de la Haute Assemblée.
Il me semble, monsieur le rapporteur général, que c’est l’amendement n° 427 rectifié bis qui est le plus proche de l’article 13 bis, car il reprend les mêmes bases d’exonérations que lui. Nous pourrions, avec les explications données par M. le ministre, concentrer nos votes sur cet amendement. Ainsi, nous aurions une disposition spécifique pour les indépendants.
Il y aura certes des gagnants et des perdants, mais je crois que les gagnants seront plus nombreux que les perdants. D’ailleurs, quand on parle de gagnants, il faut mettre des guillemets, car ils seront juste moins perdants ! Quoi qu’il en soit, le nombre de bénéficiaires pourrait satisfaire la profession et l’ensemble de la filière. De nombreux territoires sont concernés.
Mme le président. La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.
M. Bernard Jomier. Monsieur le ministre, nous n’avons pas la même analyse. À la question de savoir si les filières agricoles subissent des dommages nécessitant des mesures particulières, nous répondons clairement oui. Cependant notre réponse vaut pour l’ensemble des filières, y compris pour les non-salariés dont nous débattons ce matin.
La filière horticole subit de graves dommages et traverse de grandes difficultés. Pourquoi ne pourrait-elle pas bénéficier du même dispositif ? Idem pour les producteurs de fromages et la filière avicole. L’ensemble des filières agricoles méritent que l’on apporte à leurs difficultés une réponse commune en termes de dispositifs de réduction des charges.
C’est la raison pour laquelle je soutiendrai l’amendement de mon collègue Sebastien Pla, qui s’adresse à l’ensemble de ces filières. Si nous adoptions un dispositif ne concernant qu’une seule filière, que dirions-nous aux autres ? Comment justifier une telle inégalité de traitement ? Il n’y a nulle raison objective à pareille différenciation. Je vous appelle donc, mes chers collègues, à adopter cet amendement.
Mme le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Olivier Dussopt, ministre délégué. Monsieur Savary, j’ai certes concentré mon propos sur les amendements nos 427 rectifié bis et 428 rectifié bis, en écho aux propos de M. le rapporteur général et à l’amendement adopté par l’Assemblée nationale, mais ce n’était nullement une invitation à les adopter : je maintiens mon avis défavorable pour un certain nombre de raisons que j’ai évoquées.
Je souligne que, en matière de dispositifs d’exonérations de cotisations, la difficulté que nous rencontrons et à laquelle nous sommes particulièrement attentifs, c’est que ces exonérations ne soient pas considérées comme des aides d’État. C’est pourquoi nous avons conçu cette aide à partir de règles uniques pour tous les secteurs d’activité économique et de manière extrêmement limitée dans le temps.
J’ajoute que la plupart des amendements – c’est une question de forme, mais cela peut compter – ne sont pas d’une totale clarté sur les périodes d’application entre 2020 et 2021, même si je présume qu’il s’agit plutôt de 2020. Le risque d’une confusion sur la période d’application renforce le caractère juridiquement fragile d’un tel dispositif. Je le souligne par précaution et pour la clarté du débat.
Un mot également d’un argument que je n’ai pas évoqué dans ma première intervention. Au-delà des exonérations et sur la question des stocks en particulier, je rappelle à votre assemblée que nous avons d’ores et déjà rendu disponibles plus de 210 millions d’euros de crédits pour la distillation de crise, auxquels s’ajoute une quarantaine de millions d’euros pour aider les différents acteurs de la filière. Je pense notamment à ceux de la transformation. (M. René-Paul Savary s’exclame) Je vois que M. Savary réagit, j’imagine qu’il considère que c’est insuffisant. Quoi qu’il en soit, je ne veux pas laisser penser que nous n’avons rien fait en la matière.
Mme le président. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote.
M. Daniel Chasseing. La vigne est impactée, mais les départements d’élevage sont aussi confrontés à une mévente de bovins et d’ovins. On a évoqué également le cas des horticulteurs, nombreux autour des villes moyennes. Le dispositif défendu par René-Paul Savary devrait pouvoir les concerner. Il serait opportun de voter un amendement pour regrouper l’ensemble des filières afin que tous les travailleurs indépendants soient aidés.
Mme le président. Quel est donc l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. J’ai demandé au nom de la commission l’avis du Gouvernement. Chacun est maintenant en capacité de choisir. Je maintiens que l’amendement n° 428 rectifié bis tend à fixer un seuil d’activation clair à 40 % de perte de chiffre d’affaires. Il est le seul à pouvoir prospérer et à ne pas être retoqué par le Conseil constitutionnel. Sagesse.
Mme le président. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.
M. René-Paul Savary. Je m’exprimerai cette fois sur l’amendement n° 428 rectifié bis. Je comprends les arguments du rapporteur général. L’adoption de cet amendement constituerait une avancée dans ce contexte particulier. Les deux amendements de Nathalie Delattre et de Daniel Laurent sont rattachés à l’article 13 bis. Voilà pourquoi nous nous arcboutons sur la spécificité du secteur viticole, qui est le sujet qui nous anime aujourd’hui. C’est bien volontiers sinon que nous aurions soutenu l’ensemble des autres filières. Monsieur le rapporteur général, cette aide serait déjà un effort significatif et je me rallie à votre proposition : je retire l’amendement n° 427 rectifié bis.
Mme le président. L’amendement n° 427 rectifié bis est retiré.
Je mets aux voix l’amendement n° 803 rectifié.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 13 bis, et l’amendement n° 663 n’a plus d’objet.
L’amendement n° 490 rectifié, présenté par Mme Jasmin, MM. Lurel et Antiste, Mme Conconne, M. Pla, Mme Préville et MM. Temal et Tissot, est ainsi libellé :
Après l’article 13 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Après l’article L. 241-13 du code de sécurité sociale, il est inséré un article L. 241-13-… ainsi rédigé :
« Art L. 241-13-…. – I.- Les cotisations à la charge de l’employeur dues au titre des assurances sociales et des allocations familiales, les cotisations dues au titre des accidents du travail et des maladies professionnelles, mentionnées à l’article L. 241-13 du code de la sécurité sociale, à l’exception des cotisations à la charge de l’employeur dues au titre des régimes de retraite complémentaire légalement obligatoires, qui sont assises sur des gains et rémunérations tels que définis à l’article L. 242-1 du même code ou à l’article L. 741-10 du code rural et de la pêche maritime, font l’objet d’une exonération totale ou partielle dans les conditions prévues au II du présent article.
« II. – Cette exonération est assise au titre de l’année 2021 sur les revenus d’activité versés aux salariés mentionnés au 1° et aux 6° à 10° de l’article L. 722-20 du code rural et de la pêche maritime exerçant leur activité principale dans le secteur de la culture de la plante de canne à sucre, mentionnée à l’annexe II du décret n° 2020-371 du 30 mars 2020, dans les collectivités territoriales régies par les articles 73 et 74 de la Constitution.
« Elle est appliquée sur le montant de cotisations et contributions sociales mentionnées au présent I restant dues après application de la réduction prévue au I de l’article L. 241-13 du code de la sécurité sociale ou de toute autre exonération de cotisations sociales ou de taux spécifiques, d’assiettes et de montants forfaitaires de cotisations, à hauteur de :
« 1° 100 % pour les entreprises qui ont constaté une baisse de chiffre d’affaires en 2020 d’au moins 60 % par rapport à l’année précédente ;
« 2° 50 % pour les entreprises qui ont constaté une baisse de chiffre d’affaires en 2020 d’au moins 40 % par rapport à l’année précédente ;
« 3° 25 % pour les entreprises qui ont constaté une baisse de chiffre d’affaires en 2020 d’au moins 20 % par rapport à l’année précédente.
« Une remise peut être accordée par le directeur de l’organisme de recouvrement dont relèvent les travailleurs à ceux des employeurs dont l’activité a été réduite au cours de la période d’activité par rapport à la même période de l’année précédente et qui ne peuvent pas bénéficier du présent dispositif d’exonération. Le niveau de la remise ne peut excéder le sixième des sommes dues au titre de l’année 2020.
« La réduction d’activité est appréciée selon les modalités définies par décret pour le bénéfice du fonds de solidarité à destination des entreprises particulièrement touchées par les conséquences économiques, financières et sociales de la propagation de l’épidémie de covid-19.
« III. - Les conditions de la mise en œuvre du présent article sont fixées par décret. »
II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Victoire Jasmin.
Mme Victoire Jasmin. Une fois de plus, je commencerai mon propos en répétant que l’abus d’alcool est dangereux pour la santé. Loin de moi donc l’idée de défendre la consommation d’alcool et d’y inciter nos concitoyens. Il s’agit simplement de sauver des filières qui utilisent de la main-d’œuvre locale dans nos départements de Guadeloupe et de Martinique.
La filière canne-sucre-rhum nécessite que l’on prenne en compte à la fois les difficultés des entreprises, mais aussi le taux de chômage dans nos territoires.
Cet amendement vise à mettre en place une exonération de la charge patronale pour les entreprises qui pourront justifier d’une véritable perte de recettes et de chiffre d’affaires. Le salon de l’agriculture a dû être annulé à un moment où tout le monde pensait pouvoir non seulement écouler une partie de sa marchandise, mais aussi prendre des contacts.
Comme l’a fait remarquer M. le ministre, un certain nombre d’événements n’ont pu avoir lieu, dans nos différents territoires, comme les mariages. Les restaurants et les bars ont dû rester fermés, ce qui a entraîné, de manière évidente, des pertes de recettes considérables.
Mon amendement vise à ce que les entreprises puissent bénéficier d’une exonération de charges, dès lors qu’elles produiront des éléments prouvant qu’elles ont subi des pertes. Beaucoup d’entre elles ont eu du mal à maintenir leur niveau d’activité, par rapport à l’année dernière, pas seulement dans nos territoires, mais aussi partout ailleurs.
Monsieur le ministre, la commission a demandé l’avis du Gouvernement. J’espère donc que vous prendrez en compte ces difficultés.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Je souhaite effectivement entendre l’avis du Gouvernement. Les difficultés sont les mêmes que dans la viticulture. Pourquoi donc, à perte de chiffre d’affaires égale, les employeurs du secteur de la canne à sucre devraient-ils recevoir une compensation différente de celle dont bénéficient les autres employeurs du pays ?
En outre, le système proposé n’est pas forcément plus avantageux que celui du droit commun, défini à l’article 6 ter. Par conséquent, nous nous heurtons à une difficulté constitutionnelle, comme je l’ai déjà dit au sujet de la viticulture. Cependant, alors que l’amendement précédent reste cohérent avec ce que nous avons voté préalablement, nous en viendrions, si nous continuions dans la voie de celui-ci, à créer des systèmes spécifiques pour toutes les filières agricoles. Or je ne suis pas certain que cela soit plus avantageux que le dispositif de droit commun défini à l’article 6 ter.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre délégué. Le Gouvernement partage les interrogations de M. le rapporteur général.
De plus, indépendamment de l’article 6 ter et du dispositif de droit commun applicable à toutes les activités économiques, la filière de la canne à sucre bénéficie aussi d’actions spécifiques en sa faveur. Le Gouvernement mobilise en effet 75 millions d’euros sur les fonds de l’Union européenne, dont 30,4 millions d’euros à destination des sucreries des départements d’outre-mer, et 56 millions d’euros pour aider spécifiquement les producteurs de cannes à sucre. S’y ajoute une aide d’État de 38 millions d’euros, réservée exclusivement aux sucreries des départements d’outre-mer qui fabriquent du sucre destiné à être raffiné.
Par conséquent, le montant total des aides que reçoit la filière de la canne à sucre avoisine les 200 millions d’euros de crédits d’intervention, dont – je le répète– 75 millions prélevés sur des fonds européens et 125 millions qui sont des fonds d’État.
Ces dispositions sectorielles nous paraissent plus justifiées et plus pertinentes qu’une mesure dérogatoire en matière d’exonération, qui ne manquerait pas de susciter des inquiétudes et des interrogations d’ordre juridique, comme l’a rappelé M. le rapporteur général et comme je l’ai déjà indiqué lors de la discussion d’amendements portant sur d’autres filières.
Le Gouvernement demande donc le retrait de cet amendement, faute de quoi il émettra un avis défavorable.
Mme le président. La parole est à M. Dominique Théophile, pour explication de vote.
M. Dominique Théophile. Je voterai l’amendement de Mme Jasmin. Les dispositions que M. le ministre a citées s’appliquent depuis longtemps pour aider la filière, en situation normale. Or nous vivons une situation exceptionnelle, dans laquelle les producteurs de canne à sucre, et ceux d’autres produits locaux, font face à des handicaps redoublés.
La fermeture quasi totale des frontières affecte le tourisme, qui constitue un débouché important pour la filière, que ce soit pour les achats de rhum ou pour les visites de distilleries.
De plus, alors qu’aucun Gouvernement ne résisterait à un taux de 25 % de chômage en France, c’est pourtant ce que nous vivons. Par conséquent, toutes les situations doivent être examinées de très près, quel que soit le secteur concerné.
Dans la mesure où les outre-mer sont dans la périphérie, certaines situations qui les caractérisent ne peuvent pas entrer dans le champ global de la normalité. Tel est l’objet de ces discussions. Il faut « toucher du doigt » la situation, il faut venir voir comment les choses se passent !
Nous « résistons » parce que nous sommes des combattants, et parce que nous savons que ce grand pays qu’est la France nous soutient. Cependant, nous sommes amenés parfois, et même souvent, à nous débrouiller seuls et à ne compter que sur notre travail.
Par conséquent, je vous invite à sortir du cliché global pour envisager notre situation comme un cliché spécifique, à la périphérie.
Mme le président. La parole est à Mme Catherine Conconne, pour explication de vote.
Mme Catherine Conconne. Je soutiendrai l’amendement de Victoire Jasmin tout comme l’intervention de Dominique Théophile.
En effet, qui mieux que nous peut connaître la situation de nos pays ? Nous, nous la connaissons à fond ! Nous venons dans cet hémicycle, chaque fois pleins d’enthousiasme, après avoir « fait la tournée » des réalités de ces pays-là. Dans ce que nous exprimons devant vous, pas de vue de l’esprit, pas d’impressions, ni de coquetterie, mais tout traduit notre travail assidu sur le terrain, bottes aux pieds, pour aller au plus près des exploitations, avant de passer des heures en réunion.
On peut bien faire étalage des dizaines de millions de ceci ou de cela… La réalité sur le terrain est tout autre ! Le délai d’instruction des dossiers est de deux ans et demi, et je ne parle pas des nombreux blocages de l’administration : on demande et on redemande les mêmes documents, les mêmes papiers et les mêmes procédures, toute la journée, aux mêmes exploitants.
Dans la canne à sucre, une saison, c’est six mois. Il faut que « ça pousse » en six mois, et que ce soit récolté ! Pourtant, celui qui aura planté en 2018 devra attendre jusqu’à 2020 ou 2021 pour toucher les fameuses aides que M. le ministre vient d’énumérer. Voilà la réalité !
Pendant ce temps, il faut payer les salariés et maintenir une activité touristique, car toutes les distilleries ont su développer, avec excellence, le « spiritourisme ». Face aux difficultés, la seule réponse du Gouvernement, c’est qu’il y a déjà des aides.
Cette année est exceptionnelle. En pleine saison touristique, on a arrêté toute desserte de nos destinations. La mesure n’a rien d’anormal et nous la comprenons, car nous sommes en confinement, pour faire face à une épidémie mondiale inédite.
Cependant tout un secteur s’est écroulé. Nous demandons donc, aujourd’hui, une contribution au quotidien pour passer l’orage et franchir la difficulté. Encore une fois, je dois me résigner, car je m’attends à l’avis défavorable, à ce que cet amendement soit rejeté. Encore une fois, je vous dirai : « au suivant » !
Mme le président. La parole est à M. Victorin Lurel, pour explication de vote.
M. Victorin Lurel. Non, monsieur le ministre, le droit commun n’est pas plus favorable que ce que prévoit cet amendement. J’ai passé la majeure partie de ma vie professionnelle à travailler dans le secteur de la canne à sucre, comme dirigeant d’une chambre consulaire. Les crédits que vous mentionnez – M. Théophile l’a très bien dit – correspondent à des aides accordées en temps normal, période pendant laquelle la fiscalité des exploitations agricoles dans les outre-mer s’exerce souvent au forfait. En effet, le régime du bénéfice agricole forfaitaire continue de prévaloir et s’applique quelle que soit la conjoncture. Des exceptions existaient pour les exploitations de bananes d’une superficie supérieure à dix hectares, mais elles ont été supprimées.
Le programme d’options spécifiques à l’éloignement et à l’insularité (Poséi) représente une aide d’environ 130 millions d’euros, dont l’essentiel va à d’autres cultures que la canne à sucre.
Depuis quinze ans, le prix de la tonne de canne est pratiquement bloqué, diminuant d’autant ce qui revient aux producteurs. Ces derniers sont arrivés au bout des efforts de productivité qu’ils peuvent fournir pour dégager une marge. La seule solution reste d’alléger le compte d’exploitation, ce qui implique de supprimer ou d’exonérer pour un temps les cotisations.
Monsieur le ministre, vous mentionnez plus de 200 millions d’euros d’aides. Très sincèrement, j’aimerais voir le détail de ces chiffres, car ils ne correspondent pas à ceux qui nous sont communiqués.
Dans un souci d’égalité de traitement et par symétrie avec les mesures que nous avons votées au sujet d’un certain nombre de spéculations agricoles, il serait de bonne politique d’aider la filière agricole, en particulier la filière de la canne à sucre.
Mme le président. La parole est à Mme Victoire Jasmin, pour explication de vote.
Mme Victoire Jasmin. J’aurais aimé dire quelques mots sur le Poséi que M. Lurel a mentionné.
Cependant, mes chers collègues, je veux surtout que vous preniez la mesure de l’amendement que nous examinons, car il concerne des territoires où il n’y a pas beaucoup d’emplois. Il ne s’agit ni de pleurer ni de tendre la main pour mendier. Nous demandons simplement que les rares entreprises qui font appel à la main-d’œuvre locale puissent bénéficier d’un « petit souffle » en 2020, année où les difficultés ont été exceptionnelles, notamment en matière de tourisme, comme l’a expliqué le sénateur Théophile.
Le Gouvernement a donné un avis défavorable à mon amendement. Mes chers collègues, je fais appel à vous au nom de tous ces jeunes Ultramarins qui viennent chercher du travail en métropole, faute de trouver un emploi local. La canne à sucre est l’un des rares secteurs où les entreprises font appel à la main-d’œuvre locale. Il faut les encourager, c’est une évidence. C’est pourquoi je vous demande de voter cet amendement.
Mme le président. Quel est donc l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. La commission a émis un avis de sagesse sur cet amendement, qui s’inscrit en symétrie avec l’article 13 bis.
Mme le président. La parole est à Mme Micheline Jacques, pour explication de vote.
Mme Micheline Jacques. Au plus fort de la crise, la production de gel hydroalcoolique a principalement été réservée aux besoins de la métropole. Outre-mer, les distilleries se sont mobilisées pour produire l’alcool à 90 degrés nécessaire à la fabrication, sur place, de ce gel à destination des populations ultramarines. Par conséquent, nous pourrions, en contrepartie, faire un geste exceptionnel en faveur de cette filière. Je voterai l’amendement de Mme Jasmin.
Mme le président. Je mets aux voix l’amendement n° 490 rectifié.
(L’amendement est adopté.) – (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
Mme le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 13 bis.
L’amendement n° 974, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 13 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le chapitre 2 du titre 4 du livre 2 du code de la sécurité sociale est complété par une section ainsi rédigée :
« Section…
« Contribution des revenus financiers des sociétés financières et non financières
« Art. L. 242-… – Les revenus financiers des sociétés tenues à l’immatriculation au registre du commerce et des sociétés conformément à l’article L. 123-1 du code de commerce, entendus comme la somme des dividendes bruts et assimilés et des intérêts bruts perçus, sont assujettis à une contribution dont le taux est égal à la somme des taux des cotisations patronales assises sur les rémunérations ou gains perçus par les travailleurs salariés ou assimilés. »
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. Selon l’Observatoire des multinationales, un tiers des entreprises du CAC 40 ont distribué des dividendes pendant la crise sanitaire, soit près de 30 milliards d’euros ainsi versés.
Certes, c’est moitié moins qu’en 2019, où le montant atteignait 64,5 milliards d’euros, mais, contrairement à la crise sanitaire, la crise économique ne touche pas tout le monde de la même façon.
Pourtant, le Gouvernement avait annoncé avoir demandé à ces entreprises de ne pas verser de dividendes et de ne pas racheter d’actions dans le cas où elles auraient reçu des aides de l’État. Je rappelle, en effet, que ces entreprises du CAC 40 ont bénéficié de près de 300 milliards d’euros de prêts garantis par l’État, de 110 milliards d’euros dans le cadre du plan d’urgence, de baisses d’impôts, d’une aide de 100 milliards d’euros dans le cadre du plan de relance, du chômage partiel pour 31 milliards d’euros, des reports ou annulations de cotisations sociales et de charges fiscales pour 76 milliards d’euros.
Aider les entreprises en période de crise se justifie quand il s’agit des plus fragiles, mais pas de celles du CAC 40 qui profitent de la crise pour réaliser encore plus de bénéfices. L’indécence de telles aides se ressent d’autant plus fort que nous sommes amenés, au cours de l’examen de ce texte, à discuter d’amendements qui portent sur des secteurs particulièrement en difficultés, comme la viticulture ou l’agriculture.
Dans la mesure où ces entreprises ont bénéficié du filet de sécurité de notre sécurité sociale, il serait parfaitement logique de soumettre à cotisations sociales leurs revenus financiers.
Face à l’urgence sanitaire et à la nécessité de trouver de nouvelles recettes pour financer notre système de santé, nous proposons donc de mettre à contribution les montants versés aux actionnaires aux taux actuels des cotisations sociales employeurs de la sécurité sociale.
Il s’agit aussi d’une incitation forte pour les entreprises à privilégier le facteur travail.
Mes chers collègues, ces nouvelles recettes sont importantes. Elles éviteraient de priver notre caisse de sécurité sociale de milliards d’euros d’exonérations de cotisations. Je vous invite à voter cet amendement majoritairement, voire unanimement.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Le résultat net sur lequel les sociétés sont taxées prend en compte les revenus financiers au même titre que les autres revenus, et il tient aussi compte des charges. Contrairement à ce qu’indique l’objet de cet amendement, il n’est pas calculé à partir de la somme des dividendes versés aux actionnaires, lesquels – je le rappelle – s’acquittent de la CSG et de la CRDS.
Par conséquent, la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre délégué. Le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement pour les mêmes raisons que celles qui ont été mentionnées par M. le rapporteur général.
Mme le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.
Mme Nathalie Goulet. Comme chaque année, je voterai cet amendement qui est présenté à peu près au même endroit du texte et sur le même dispositif. En effet, le débat revient chaque fois, parfois aussi lors de l’examen du projet de loi de finances, ou dans celui du projet de loi de finances rectificative.
Le président-directeur général d’Air France a bénéficié de 760 000 euros de bonus cette année. S’il a affirmé qu’il ne prendrait pas ce bonus, il a quand même perçu celui de 2019, avec l’accord du Gouvernement. En situation de crise, il est important d’envoyer un signal à ceux qui en ont besoin.
De plus, nous avions voté au Sénat un dispositif qui interdisait les aides aux entreprises dont les établissements ou filiales sont établis dans des territoires non coopératifs. Cette disposition, supprimée en commission mixte paritaire, a été reprise dans une circulaire. Vous conviendrez qu’au niveau de la hiérarchie des normes une circulaire n’a pas exactement le même poids que la loi.
Par conséquent, il n’y a de contrôle ni sur les dividendes ni sur les bonus, et il n’y en aura vraisemblablement pas non plus sur les parachutes dorés. Quant au contrôle des liens que les entreprises peuvent nouer dans les territoires non coopératifs, il reste inopérant.
J’aurai l’occasion de revenir plus en détail sur l’exemple de cette société qui gère des Ehpad et qui pratique massivement la fraude et l’évasion fiscale, tout en continuant à bénéficier de la publicité d’une grande chaîne de télévision. Je trouve absolument scandaleux que le Gouvernement ne donne pas un signal aux gens qui en ont besoin. (Mmes Émilienne Poumirol et Laurence Cohen applaudissent.)
Mme le président. La parole est à M. Fabien Gay, pour explication de vote.
M. Fabien Gay. Laurence Cohen a raison : toutes les entreprises du CAC 40 ont été aidées. Que ce soit grâce à la baisse des impôts de production, au chômage partiel, aux aides de la Banque centrale, aux plans sectoriels ou aux prêts garantis par l’État, 100 % d’entre elles ont reçu des aides, dont deux tiers ont versé des dividendes et dont huit ont réalisé l’exploit d’augmenter les dividendes dans la période.
Pour répondre à nos interrogations, vous vous contentez de rappeler que le résultat pris en compte est celui de 2019.
Par conséquent, nous vous reposons la question et nous ne cesserons de le faire, comme Mme Goulet l’a dit, avec raison : allez-vous interdire le versement des dividendes en 2021 sur l’exercice 2020, puisque toutes les entreprises du CAC 40 ont touché des aides ?
Mme Goulet a également rappelé, avec raison, que nous avions adopté un amendement qui prévoit qu’aucune entreprise ne touchera des aides si elle a des filiales basées dans les paradis fiscaux. Le ministre de l’économie, des finances et de la relance, Bruno Le Maire, avait dit à la radio que c’était un bon amendement. Il ne cesse de le répéter lors de ses auditions à la commission des finances ou à celle des affaires économiques.
La mesure n’est pas difficile à appliquer, car la liste des nombreuses entreprises qui ont des filiales basées dans les paradis fiscaux et qui ont touché des aides circule dans la presse. Laissez-nous vous aider : Total a 168 filiales basées dans les paradis fiscaux ; Sanofi – il faudra dire un mot de l’accès au vaccin universel et gratuit pour tous – a 24 filiales basées dans les paradis fiscaux ; Schneider en a 56 ; Renault, qui réalise même l’exploit d’avoir des administrateurs de l’État, en a 25 ; Thales en a 6 ; Danone en a 94 ; Air Liquide en a 65 ; et la liste est longue.
Encore une fois, que ferez-vous concrètement pour arrêter ce procédé, y compris lorsque des représentants de l’État siègent dans les conseils d’administration et valident, de fait, les schémas d’optimisation ou d’évasion fiscale ?
Mme le président. Je mets aux voix l’amendement n° 974.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 13 ter (nouveau)
Le II de l’article L. 242-1 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigé :
« II. – Par dérogation au I, sont exclus de l’assiette des cotisations de sécurité sociale :
« 1° Les sommes allouées au salarié au titre de l’intéressement prévu à l’article L. 3312-4 du code du travail ;
« 2° Les sommes réparties au titre de la réserve spéciale de participation conformément aux dispositions de l’article L. 3324-5 du même code ;
« 3° Les sommes versées par l’employeur à un plan d’épargne en application de l’article L. 3332-11 du même code et de l’article L. 224-21 du code monétaire et financier ;
« 4° Les contributions des employeurs destinées au financement des prestations de protection sociale complémentaire entrant dans le champ des articles L. 911-1 et L. 911-2 du présent code, servies au bénéfice de leurs salariés, anciens salariés et de leurs ayants droit par des institutions de prévoyance, par des institutions de gestion de retraite supplémentaire, par des mutuelles et unions pratiquant des opérations d’assurance et de capitalisation, par des entreprises régies par le code des assurances ou par tout gestionnaire d’un plan d’épargne retraite mentionné à l’article L. 224-8 du code monétaire et financier, lorsque les garanties revêtent un caractère obligatoire et bénéficient à titre collectif à l’ensemble des salariés ou à une partie d’entre eux, sous réserve qu’ils appartiennent à une catégorie établie à partir de critères objectifs déterminés par décret en Conseil d’État :
« a) Dans des limites fixées par décret, pour les contributions au financement de prestations de retraite supplémentaire déterminées par décret. L’abondement de l’employeur à un plan d’épargne pour la retraite collectif exonéré aux termes de l’article L. 3334-6 du code du travail et à un plan d’épargne retraite d’entreprise exonéré aux termes du 3° du présent II sont pris en compte pour l’application de ces limites ;
« b) Dans des limites fixées par décret, pour les contributions au financement de prestations complémentaires de prévoyance, à condition, lorsque ces contributions financent des garanties portant sur la prise en charge de frais de santé, que ces garanties soient conformes aux dispositions de l’article L. 871-1 du présent code. L’exclusion d’assiette est aussi applicable au versement de l’employeur mentionné à l’article L. 911-7-1.
« Les dispositions du présent 4° ne sont pas applicables lorsque les contributions des employeurs se substituent à d’autres revenus d’activité qui ont été soumis à cotisations en application du I du présent article et versés au cours des douze derniers mois ;
« 5° La contribution de l’employeur d’une entreprise de moins de cinquante salariés à l’acquisition des chèques-vacances, dans les conditions fixées aux articles L. 411-9 et L. 411-10 du code du tourisme ;
« 6° Les avantages mentionnés au I des articles 80 bis et 80 quaterdecies du code général des impôts. L’avantage correspondant à la différence définie au II de l’article 80 bis du même code est pris en compte dans la détermination de l’assiette définie au I du présent article lors de la levée de l’option ;
« 7° Dans la limite de deux fois le montant annuel du plafond défini à l’article L. 241-3 du présent code, les indemnités versées à l’occasion de la rupture du contrat de travail ou de la cessation forcée des fonctions de mandataires sociaux, dirigeants et personnes mentionnées à l’article 80 ter du code général des impôts qui ne sont pas imposables en application de l’article 80 duodecies du même code. Toutefois, sont intégralement assujetties à cotisations les indemnités versées à l’occasion de la cessation forcée des fonctions de mandataires sociaux, dirigeants et personnes mentionnées à l’article 80 ter du même code d’un montant supérieur à cinq fois le montant annuel du plafond défini à l’article L. 241-3 du présent code, ainsi que celles versées à l’occasion de la rupture du contrat de travail d’un montant supérieur à dix fois le montant de ce même plafond. En cas de cumul d’indemnités versées à l’occasion de la cessation forcée des fonctions et de la rupture du contrat de travail, il est fait masse de l’ensemble de ces indemnités ; lorsque le montant de celles-ci est supérieur à cinq fois le montant annuel du plafond défini à l’article L. 241-3, ces indemnités sont intégralement assujetties à cotisations. »
Mme le président. La parole est à M. Michel Savin, sur l’article.
M. Michel Savin. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’article 13 ter vise à encourager la pratique du sport en entreprise. Cette pratique est largement prônée, depuis plusieurs années, par l’ensemble des acteurs de l’entreprise, et par ceux du sport, mais aussi par le Gouvernement.
Il me semble pertinent de rappeler quelques chiffres. En effet, l’activité physique en milieu professionnel diminue de 32 % les arrêts de travail, soit une économie potentielle de 4,2 milliards d’euros par an. Elle diminue les troubles musculo-squelettiques et augmente la productivité de 12 %.
Il y a quelques mois, le Sénat a adopté un dispositif visant à ne pas reconsidérer comme un avantage en nature les moyens mis à la disposition des salariés, par le chef d’entreprise, pour pratiquer un sport. Ce fut le cas dans le PLFSS précédent et dans le projet de loi d’accélération et de simplification de l’action publique (ASAP), avec notamment l’adoption, en mars dernier, de l’article 37 bis.
En septembre dernier, les députés ont adopté conforme ce dispositif sans que le Gouvernement fasse de quelconque remarque.
Le jour des débats en commission mixte paritaire, quelle ne fut pas notre surprise d’apprendre le dépôt d’un amendement du Gouvernement, et l’ajout de l’article 13 ter au PLFSS qui vient tout simplement effacer le dispositif adopté par les deux chambres : quel mépris à l’encontre du Parlement !
Après discussion avec l’ensemble des parties, nous avons travaillé à une nouvelle rédaction plus précise et, surtout, plus efficace du dispositif. Le Gouvernement s’est engagé, en séance, à l’Assemblée nationale, à aboutir à un accord.
Je tiens à vous remercier pour votre écoute et votre engagement, monsieur le ministre. Je remercie aussi vos collaborateurs pour la qualité de nos échanges, qui ont abouti à la rédaction de ce nouvel amendement.
J’espère que les amendements de suppression seront retirés pour permettre l’adoption du dispositif que je présente dans un amendement que soutiennent des collègues issus de différents groupes politiques de notre assemblée. Ce dispositif doit être pleinement effectif dès le début de 2021. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Olivier Dussopt, ministre délégué. Dans un premier temps, je voudrais revenir sur la chronologie et l’adoption des dispositions. M. Savin a rappelé que la mesure qui a donné lieu à l’article 37 bis du projet de loi ASAP a été adoptée au Sénat – de mémoire – contre l’avis du Gouvernement. Le compte rendu des débats mentionne que vous aviez alors indiqué, monsieur Savin, que la navette parlementaire devait permettre d’améliorer le texte. Nous étions, en effet, en désaccord sur la notion d’avantage sportif qui restait difficile à préciser en droit, sur la progressivité des aides accordées par les instances sociales des entreprises et sur le plafonnement éventuel de ce type d’avantage.
Cependant, le Gouvernement doit au Parlement un mea culpa, comme je l’ai dit aux députés. En effet, à l’occasion de l’examen du projet de loi ASAP à l’Assemblée nationale, nous aurions dû faire preuve de plus de vigilance et approfondir ce travail de navette parlementaire auquel nous avions souscrit ensemble, lors de l’examen du texte au Sénat. Cette attention nous a manqué et la disposition que vous évoquiez a été adoptée conforme, ce qui a rendu impossible son retrait en commission mixte paritaire, commission dont je suis, par ailleurs, très heureux qu’elle ait abouti.
Cela nous a conduits à une situation inconfortable lors de l’examen du PLFSS en première lecture à l’Assemblée nationale. Il nous a fallu, en effet, demander aux députés d’adopter un article qui « écraserait » une disposition prévue dans un texte non encore publié, tout cela par manque de précision, comme je l’ai déjà dit.
Dans un second temps, j’aimerais vous remercier de vos remerciements, mais surtout vous remercier tout court, puisque, grâce à un travail commun, nous sommes parvenus au dispositif que prévoit votre amendement n° 1 rectifié bis, dont vous avez rappelé qu’il était soutenu par les membres d’autres groupes du Sénat.
Je le dis d’emblée, le Gouvernement émettra évidemment un avis favorable sur cet amendement qui satisfait une exigence de précision juridique, en améliorant la définition de ce que le dispositif cible, et qui garantit le caractère progressif de sa mise en œuvre et les possibilités de plafonnement.
Même si ce travail aurait dû être mené entre l’examen du texte ASAP au Sénat et son adoption à l’Assemblée nationale, nous sommes finalement parvenus à un dispositif équilibré, qui répond à l’objectif de promotion du sport dans l’entreprise.
J’en suis très heureux, bien que, encore une fois, je regrette notre manque de vigilance. Cependant, si vous me permettez de voir le verre à moitié plein, l’essentiel reste que nous puissions aboutir à un dispositif directement opérationnel et sécurisé juridiquement.
Mme le président. Je suis saisie de quatre amendements identiques.
L’amendement n° 215 rectifié bis est présenté par MM. Karoutchi et Regnard, Mme Micouleau, MM. Cambon et Daubresse, Mme Jacques, MM. del Picchia, Reichardt, Houpert et Chaize, Mme Belrhiti, MM. Rietmann, Perrin, Sido, Menonville et Courtial, Mme M. Mercier, M. Pellevat, Mme Deromedi, M. Vogel, Mmes Garriaud-Maylam et Dumas, M. Sautarel, Mmes Raimond-Pavero et L. Darcos, MM. Levi et D. Laurent, Mme de La Provôté, MM. Frassa et Chauvet, Mmes Joseph et Estrosi Sassone, MM. de Nicolaÿ, Lefèvre et B. Fournier, Mme Férat, MM. Calvet, Grosperrin et Bacci, Mme Richer, MM. Decool, Bonnus et Belin, Mme Delmont-Koropoulis, MM. Saury, Le Gleut et Cuypers, Mmes Lherbier et Morin-Desailly, MM. Piednoir, Boré, Somon et Bonhomme, Mme Guidez, MM. Bouchet, C. Vial, Charon, Wattebled, Capus, Darnaud, Duplomb, Brisson, Segouin, E. Blanc et H. Leroy, Mme Ventalon, MM. Rapin, Bouloux, P. Martin, Gremillet et Mandelli, Mme Di Folco et M. Longeot.
L’amendement n° 716 rectifié est présenté par MM. Kanner, Lozach et Jomier, Mmes Lubin, Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Jasmin, Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Antiste, Bouad et J. Bigot, Mme Bonnefoy, MM. Durain et Gillé, Mme Harribey, M. P. Joly, Mme G. Jourda, M. Leconte, Mme Lepage, MM. Lurel, Marie et Mérillou, Mme Monier, MM. Montaugé et Pla, Mme S. Robert, MM. Sueur, Temal et Tissot, Mmes Préville, Briquet et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L’amendement n° 877 rectifié quater est présenté par Mme Guillotin, MM. Artano, Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère, M. Corbisez, Mme N. Delattre, MM. Fialaire, Gold, Guérini et Guiol, Mme Pantel, MM. Requier et Roux, Mme Mélot et MM. Lagourgue, A. Marc, Chasseing et Malhuret.
L’amendement n° 914 est présenté par Mme Poncet Monge, M. Benarroche, Mme Benbassa, M. Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon et Mme Taillé-Polian.
Ces quatre amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Antoine Lefèvre, pour présenter l’amendement n° 215 rectifié bis.
M. Antoine Lefèvre. Cet amendement vise à rétablir la mesure qui fait sortir de l’assiette des prélèvements sociaux tout avantage accordé par un employeur ou un comité d’entreprise lorsque celui-ci se rattache à des activités sportives.
Lors de l’examen à l’Assemblée nationale, le Gouvernement a supprimé cette mesure qui avait été introduite par un amendement sénatorial au projet de loi ASAP. Cette suppression est préjudiciable et constitue un frein supplémentaire au développement de la pratique du sport par les salariés.
Mme le président. La parole est à M. Patrick Kanner, pour présenter l’amendement n° 716 rectifié.
M. Patrick Kanner. Monsieur le ministre, nous allons « atterrir », tant mieux ! Cependant, quel message adressons-nous au monde du sport dans ce pays ? Objectivement, on se demande si la France est une grande nation sportive. On se demande si elle va vraiment organiser les jeux Olympiques en 2024. On se demande si le secteur associatif, qui a été matraqué par la perte des emplois aidés, pourra se sortir de la crise sanitaire.
Et puis, il y a eu cet amendement du Gouvernement pour « écraser », avez-vous dit, une disposition d’un autre texte. La formule est juste, mais reste d’autant plus dure à entendre que la politique sportive que vous menez est très au-dessous des ambitions que notre pays nourrissait, en la matière, il y a encore quelques années.
Certes, vous n’êtes pas ministre des sports, je l’ai bien compris, monsieur Dussopt. Cependant, pour développer le sport en entreprise, il faut l’encourager, y compris sur le plan fiscal.
L’accord auquel vous êtes parvenus, grâce à un amendement piloté par M Savin et cosigné par M. Lozach, est bon. J’en suis très heureux, mais, pendant plusieurs jours, voire plusieurs semaines, une forme de désordre s’est installée, qui est un très mauvais message envoyé au monde du sport français. Nous ne pouvons que le regretter.
Monsieur le ministre, vous avez reconnu un manque de vigilance et je vous en donne acte. Le désordre dont je viens de parler constitue néanmoins une crainte pour le monde sportif. Même si le PLF contribuera à améliorer le budget du sport, il bénéficiera essentiellement aux équipements sportifs liés aux jeux Olympiques. Or il faut aussi encourager la pratique du sport, partout où on le peut, y compris en milieu scolaire.
Au nom de mon groupe, je retire mon amendement au profit de celui de M. Savin. Nous resterons vigilants sur la suite.
Mme le président. L’amendement n° 716 rectifié est retiré.
La parole est à M. Stéphane Artano, pour présenter l’amendement n° 877 rectifié quater.
M. Stéphane Artano. Je remercie M. le ministre des précisions qu’il nous a apportées. Je remercie également notre collègue Savin pour l’amendement qu’il a bien voulu présenter.
Pour défendre celui de Véronique Guillotin, je citerai l’étude réalisée par le cabinet de conseil Goodwill-management, en 2015, et intitulée L’impact économique de l’activité physique et sportive sur l’entreprise, le salarié et la société civile. En effet, le sport y est reconnu comme un facteur qui permet de réduire l’absentéisme de 30 % à 40 % dans les entreprises, ce qui est loin d’être neutre. Cela a pour conséquence de diminuer le turnover de 35 %, pour une économie de 300 euros par salarié pour la société civile, et de 30 euros pour le salarié lui-même. L’âge de la dépendance recule, en outre, de six ans.
En politique, il faut de la cohérence. Au moment où une réforme structurelle de la santé au travail se prépare, supprimer l’avantage lié à la pratique du sport en entreprise ne pouvait être qu’un mauvais message. Je vous remercie d’avoir corrigé la situation.
Nous retirerons donc notre amendement au profit de celui de M. Savin, que nous soutiendrons de toutes nos forces.
Mme le président. L’amendement n° 877 rectifié quater est retiré.
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour présenter l’amendement n° 914.
Mme Raymonde Poncet Monge. Je ne répéterai pas l’historique de cette exonération, cela vient d’être fait.
En déposant cet amendement, nous souhaitions rétablir l’exemption supprimée. La menace de cette suppression était d’autant plus regrettable que nous sommes en pleine période de confinement, qui accroît le risque de sédentarité, surtout avec le recours au télétravail. Il est donc particulièrement important de ne pas menacer, voire de favoriser, la pratique du sport.
Du reste, la Haute Assemblée ne cesse de multiplier, parallèlement, les exonérations. Or le lien de celle-ci, non avec la reprise économique, mais avec la santé, est manifeste, et la santé, c’est la sécurité sociale.
Ainsi, dans une optique de prévention, de santé publique, afin de favoriser la pratique sportive de tous, il nous semblait important de maintenir cette disposition. C’est pourquoi, une fois n’est pas coutume, le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires défend une exonération de prélèvements sociaux, non sa création, mais son maintien.
D’autres mesures allant en ce sens seront les bienvenues dans le projet de loi de finances, afin d’encourager la pratique du sport, mais, en attendant, il nous paraissait pertinent de maintenir cette exonération.
Néanmoins, à l’instar des collègues qui viennent de s’exprimer, je retire mon amendement, madame la présidente.
Mme le président. L’amendement n° 914 est retiré.
La parole est à Mme la présidente de la commission.
Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales. Sans vouloir contraindre le débat, je veux rappeler que nous n’avons examiné que treize amendements en une heure ; il en reste près de cinq cent quarante. Par conséquent, même si ces sujets sont très importants, il serait bon d’accélérer légèrement.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 215 rectifié bis ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Je me réjouis que la plupart de ces amendements identiques aient été retirés. La commission avait également retiré le sien.
J’invite tout le monde à se rallier à l’amendement de M. Savin, qui me paraît pertinent. En outre, dans la mesure où le Gouvernement l’a validé, je pense que cet amendement a toutes les chances de prospérer.
La commission demande donc le retrait de cet amendement.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre délégué. Le Gouvernement demande le retrait de cet amendement, au profit de celui de M. Savin.
Mme le président. Monsieur Lefèvre, l’amendement n° 215 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Antoine Lefèvre. Non, je le retire bien volontiers, madame la présidente.
Mme le président. L’amendement n° 215 rectifié bis est retiré.
Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 1 rectifié bis, présenté par MM. Savin et Piednoir, Mme Lavarde, M. Kern, Mme L. Darcos, MM. Hugonet, Lozach, Calvet et Levi, Mme Thomas, MM. Sol, Grosperrin et Lefèvre, Mmes Eustache-Brinio et Puissat, MM. Chatillon, D. Laurent, Bonne et Bacci, Mmes Berthet et Deromedi, MM. de Nicolaÿ, Houpert, Bonnus, Gremillet et Pointereau, Mme Morin-Desailly, M. Lafon, Mmes Estrosi Sassone et Micouleau, M. Laugier, Mme Sollogoub, MM. Courtial, Bazin et Vogel, Mme Lassarade, M. Bouchet, Mme Delmont-Koropoulis, M. Pellevat, Mmes N. Delattre, Raimond-Pavero et Noël, MM. Perrin, Rietmann et Wattebled, Mme Malet, M. Sido, Mmes Lopez et M. Mercier, MM. Capus et Darnaud, Mme Ventalon, M. Cardoux, Mme Joseph, MM. Canevet et Brisson, Mme Gruny, M. Paccaud, Mme Billon, M. Longuet, Mmes Borchio Fontimp et Boulay-Espéronnier, MM. Saury, Cambon et Belin, Mme de La Provôté, MM. Genet et Duplomb, Mme Bonfanti-Dossat et MM. Bouloux, H. Leroy, E. Blanc, J.M. Boyer, Charon, P. Martin, Hingray et Mandelli, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
I. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Le f du 4° du III de l’article L. 136-1-1 est ainsi rétabli :
« f) Afin de favoriser le développement du sport en entreprise, les avantages que représentent pour ses salariés la mise à disposition par l’employeur d’équipements sportifs à usage collectif et le financement de prestations sportives à destination de l’ensemble de ses salariés, dans des conditions et limites prévues par décret ; »
2° Le 8° du II de l’article L. 242-1, dans sa rédaction résultant de l’article 37 bis de la loi n° … du … d’accélération et de simplification de l’action publique, est abrogé.
II. – Le I entre en vigueur à une date fixée par décret et au plus tard le 1er mars 2021.
III. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Michel Savin.
M. Michel Savin. Je serai bref, afin de répondre aux attentes de la présidente de la commission.
Je tiens à remercier chacun des groupes ayant déposé un amendement de suppression d’avoir accepté de le retirer. C’est une bonne initiative ; cela nous permet d’avancer dans le soutien à l’activité sportive.
Comme M. le ministre l’a rappelé, cette disposition aurait dû être retravaillée dans le cadre de la navette parlementaire sur le projet de loi ASAP, mais il y a eu quelques ratés. Ainsi, la rédaction que je propose dans cet amendement est plus ambitieuse que la disposition équivalente du texte ASAP, puisqu’elle prévoit une exemption d’assiette sur l’ensemble des prélèvements sociaux : CSG, CRDS, cotisations sociales patronales et salariales.
Par ailleurs, le Gouvernement s’est engagé à prendre le décret d’application au plus tard le 1er mars 2021, monsieur le ministre. Aussi, à l’instar de mon collègue Patrick Kanner, je tiens à préciser d’ores et déjà que nous serons extrêmement vigilants, afin que l’ambition de ce dispositif ne soit pas amoindrie par ce décret.
Mme le président. L’amendement n° 595 rectifié bis, présenté par MM. Lozach et Antiste, Mme Lepage, M. Magner, Mmes Harribey, Van Heghe, Artigalas et G. Jourda, M. Redon-Sarrazy, Mme Le Houerou et MM. Tissot et Dagbert, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
I. – Le II de l’article L. 242-1 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« …° Dans la limite de deux fois le montant mensuel du plafond défini au même article L. 241-3, par an et par salarié, les avantages fournis par l’employeur afin de favoriser la pratique sportive en entreprise ou au nom de l’entreprise ainsi que la pratique du sport-santé, notamment la mise à disposition à l’ensemble des salariés d’un accès à des équipements dédiés à la réalisation d’activités sportives ainsi que l’organisation de cours de sport ou d’activités physiques. »
II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Christian Redon-Sarrazy.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Je l’ai dit, la commission a émis un avis favorable sur l’amendement de M. Savin.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.
Mme Laurence Cohen. Le groupe communiste républicain citoyen et écologiste votera l’amendement n° 1 rectifié bis.
Par ailleurs, comme nous y incite Mme la présidente de la commission des affaires sociales, je serai brève, mais je veux tout de même profiter de ce moment pour attirer votre attention sur un point, mes chers collègues. C’est la première fois que nous avons aussi peu de temps pour examiner le budget de la sécurité sociale, puisque, mardi, nous avons levé la séance à 18 heures et que, mercredi, nous n’avons pas siégé. Or on nous dit maintenant qu’il faut aller au galop !
Il faut plutôt anticiper : ouvrons une séance de nuit et ouvrons la séance de samedi prochain.
M. Victorin Lurel. Exactement !
Mme Laurence Cohen. Je ne vois pas pourquoi l’examen de ce budget de la sécurité sociale au Sénat serait bâclé. (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE et SER.)
Des mesures ont été prises à l’Assemblée nationale pour pouvoir examiner correctement le budget de l’État. Or le budget de la sécurité sociale est aussi important que celui de l’État. Aussi, je demande que l’on prenne également des mesures. Sans quoi, que va-t-il se passer ? Eh bien, à la fin de l’examen du PLFSS, quand on examinera les amendements relatifs à l’hôpital et aux Ehpad, qui sont au cœur de notre système de santé, il y aura très peu de monde dans l’hémicycle et l’on nous demandera de nous dépêcher !
Par conséquent, je demande que l’on anticipe les choses, afin de consacrer le temps nécessaire à l’examen de ce budget. (Très bien ! et applaudissements sur les travées des groupes CRCE et SER.)
Mme le président. Le Gouvernement lève-t-il le gage, monsieur le ministre ?
Mme le président. Il s’agit donc de l’amendement n° 1 rectifié ter.
Je le mets aux voix.
(L’amendement est adopté.)
Mme le président. En conséquence, l’article 13 ter est ainsi rédigé et l’amendement n° 595 rectifié bis n’a plus d’objet.
Article 13 quater (nouveau)
I. – À la fin du 1° du B du III de l’article L. 752-3-2 du code de la sécurité sociale, les mots : « et de la production audiovisuelle » sont supprimés.
II. – Le I s’applique aux cotisations et contributions dues au titre des périodes d’emploi courant à compter du 1er janvier 2021.
Mme le président. Je suis saisie de sept amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L’amendement n° 551 est présenté par M. Lurel, Mmes Jasmin et Conconne, MM. Antiste et P. Joly, Mme G. Jourda, M. Assouline, Mme Préville et MM. Montaugé et Temal.
L’amendement n° 866 rectifié ter est présenté par MM. Patient, Buis et Dennemont, Mme Duranton, M. Hassani, Mme Havet, M. Iacovelli, Mme Phinera-Horth, M. Rohfritsch, Mme Schillinger et M. Théophile.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
I. - Alinéa 1
Après les mots :
les mots : «
insérer les mots :
à l’exception des secteurs du bâtiment et des travaux publics
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Victorin Lurel, pour présenter l’amendement n° 551.
M. Victorin Lurel. Cet amendement constitue un véritable SOS en faveur du secteur du bâtiment et des travaux publics (BTP). Depuis la crise de 2008-2009 et plus encore depuis le déclenchement de la crise sanitaire actuelle, les collectivités locales des outre-mer – M. le ministre connaît parfaitement leur situation financière –, qui sont normalement des donneuses d’ordres, ne peuvent plus passer commande ; il n’y a pratiquement plus de commandes publiques.
La grosse enveloppe du logement, qui diminue depuis de longues années, la ligne budgétaire unique (LBU), le crédit d’impôt, la défiscalisation : tout cela a été mis à bas. Il y a peu de constructions ; je le rappelle, nous devions construire 10 000 logements par an dans les outre-mer et on n’en fait pas la moitié…
En outre, la défiscalisation ayant été « dévirilisée », si vous me pardonnez cette expression vulgaire – c’est trivial, mais ça exprime bien les choses –, elle n’a plus l’efficacité que l’on a connue. Il n’y a plus de construction de logements intermédiaires, et les particuliers et les primo-arrivants ne sont plus financés. Bref, c’est un secteur sinistré.
D’autre part, il y a une inégalité de traitement entre les secteurs. L’an dernier, on a étendu le régime d’exonération dit « renforcé » à l’audiovisuel et à la presse. Une demande avait été faite pour étendre ce régime au BTP, sans parler du régime « innovation et croissance ».
Nous demandons donc au Sénat, au travers de cet amendement, d’intégrer le BTP dans le régime de « compétitivité renforcée » ; du reste, nous en avions déjà décidé ainsi, me semble-t-il, mais notre disposition avait été supprimée en commission mixte paritaire.
Mme le président. La parole est à M. Dominique Théophile, pour présenter l’amendement n° 866 rectifié ter.
M. Dominique Théophile. Il est défendu, madame la présidente !
Mme le président. L’amendement n° 110 rectifié ter, présenté par Mmes Malet, Dindar, Dumas et Gruny, MM. Gremillet et Savary, Mmes Deromedi et Delmont-Koropoulis, MM. B. Fournier, Rapin et Poadja, Mme Petrus, M. Genet, Mme Jacques et MM. Charon et Lagourgue, est ainsi libellé :
I. - Après l’alinéa 1
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
…. – Le 1° du B du III de l’article L. 752-3-2 du code de la sécurité sociale est complété par une phrase ainsi rédigée : « Le montant de l’exonération calculé selon les modalités prévues au dernier alinéa du présent B est applicable aux employeurs relevant des secteurs du bâtiment et des travaux publics pour le paiement des cotisations et contributions mentionnées au I de l’article L. 241-13 dues sur les années 2021 et 2022 ; ».
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Viviane Malet.
Mme Viviane Malet. Cet amendement va un peu dans le même sens, puisqu’il a pour objet de placer les entreprises « domiennes » du secteur du bâtiment et des travaux publics dans le barème renforcé du régime d’exonération de charges sociales patronales spécifique applicable aux entreprises ultramarines, pendant une durée de deux années – du 1er janvier 2021 au 31 décembre 2022 –, qui correspond à la durée effective du plan de relance et du plan Logement outre-mer (PLOM). Ce secteur est en effet frappé de plein fouet par la crise, mon collègue Victorin Lurel l’a rappelé.
J’illustrerai mon propos par quelques exemples frappants. Le chiffre d’affaires de la filière réunionnaise du BTP a chuté de 40 % en dix ans jusqu’à atteindre son plus bas niveau depuis vingt ans. Côté emploi, les chiffres de 2020 ne sont pas bons : le secteur a perdu 1 000 salariés pendant le mois d’avril et l’intérim a enregistré une baisse de 40 %.
Il serait préjudiciable à notre économie que ces entreprises disparaissent, licencient ou ne puissent pas embaucher les jeunes qui s’apprêtent à entrer sur le marché du travail. Si nous ne faisons pas cet effort, nombre d’entreprises locales ne seront plus présentes au moment du lancement des programmes et ne pourront pas répondre aux appels d’offres des collectivités, de CDC Habitat ou d’Action Logement. Par conséquent, le plan Logement et le plan de relance mis en place par le Gouvernement ne produiront pas les effets escomptés.
Mme le président. Les deux amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 111 rectifié ter est présenté par Mmes Malet, Dindar, Dumas et Gruny, MM. Gremillet, Savary et Bascher, Mmes Deromedi et Delmont-Koropoulis, MM. B. Fournier, Rapin et Poadja, Mme Petrus, M. Genet, Mme Jacques et MM. Charon et Lagourgue.
L’amendement n° 812 rectifié ter est présenté par MM. Théophile, Iacovelli et Rohfritsch, Mme Schillinger, M. Dennemont, Mme Duranton, MM. Buis et Patient et Mme Havet.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
I. - Après l’alinéa 1
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
…. – Le 1° du B du III de l’article L. 752-3-2 du code de la sécurité sociale est complété par une phrase ainsi rédigée : « Le montant de l’exonération calculé selon les modalités prévues au dernier alinéa du présent B est applicable aux employeurs relevant des secteurs du bâtiment et des travaux publics pour le paiement des cotisations et contributions mentionnées au I de l’article L. 241-13 dues sur l’année 2021 ; ».
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Viviane Malet, pour présenter l’amendement n° 111 rectifié ter.
Mme Viviane Malet. C’est un amendement de repli.
Il s’agit de faire bénéficier les entreprises ultramarines de BTP du régime de compétitivité renforcée pour le paiement des cotisations dues pour l’année 2021, afin de maintenir l’outil productif et de sauvegarder les emplois dans l’attente d’une reprise de l’activité, espérée pour 2022.
Mme le président. La parole est à M. Dominique Théophile, pour présenter l’amendement n° 812 rectifié ter.
M. Dominique Théophile. Il est défendu.
Mme le président. L’amendement n° 560 rectifié, présenté par M. Lurel, Mmes Conconne et Jasmin, MM. Antiste, Assouline et P. Joly et Mme G. Jourda, est ainsi libellé :
I. - Après l’alinéa 1
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
… – Le 1° du B de l’article L. 752-3-2 du code de la sécurité sociale est complété par une phrase ainsi rédigée : « Toutefois, les employeurs des secteurs du bâtiment et des travaux publics sont concernés pour le paiement des cotisations et contributions mentionnées au I de l’article L. 241-13 du présent code dues au titre de la seule année 2021. »
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Victorin Lurel.
M. Victorin Lurel. Ce sujet mérite un minimum d’explications et de discussion.
Les premiers amendements tendaient à intégrer le BTP dans le secteur dit « de compétitivité renforcée », de façon pérenne. Le présent amendement est un amendement de repli, visant à intégrer ce secteur dans le régime renforcé pendant une année, contre deux avec l’amendement de ma collègue Viviane Malet.
En tout cas, il faut faire quelque chose avant l’effondrement total.
Mme le président. L’amendement n° 867 rectifié ter, présenté par MM. Patient, Buis et Dennemont, Mme Duranton, M. Hassani, Mme Havet, M. Iacovelli, Mme Phinera-Horth, M. Rohfritsch, Mme Schillinger et M. Théophile, est ainsi libellé :
I. - Après l’alinéa 1
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
…. – Par dérogation au 1° du B du III de l’article L. 752-3-2 du code de la sécurité sociale, le montant de l’exonération applicable aux employeurs relevant des secteurs du bâtiment et des travaux publics pour le paiement des cotisations et contributions mentionnées au I de l’article L. 241-13 dues pour l’année 2021 est calculé selon les modalités prévues au dernier alinéa de ce même B.
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Dominique Théophile.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Aux yeux de la commission, le dispositif issu de la loi du 27 mai 2009 pour le développement économique des outre-mer (Lodéom), simple et déjà très favorable – il s’agit, je le rappelle, d’un allégement total de charges jusqu’à 1,3 SMIC et dégressif entre ce seuil et 2,2 SMIC –, est adapté au secteur du BTP d’outre-mer.
En outre, les employeurs concernés ne me paraissent pas subir une concurrence internationale importante ; il n’est donc pas nécessaire d’améliorer leur compétitivité.
Ce secteur subit incontestablement, comme le BTP en métropole, le contrecoup de la crise ou, du moins, un ralentissement de la mise en chantier de certaines constructions, mais les dispositifs applicables en métropole valent aussi pour l’outre-mer ; M. le ministre le confirmera sans doute.
Par conséquent, la commission a émis un avis défavorable sur ces amendements.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre délégué. Le débat sur les allégements dits « Lodéom » a lieu chaque année, tant au Sénat qu’à l’Assemblée nationale, lors de l’examen du PLFSS. De manière générale, le Gouvernement partage les positions de la commission à ce sujet. Aussi, sauf exception, je vous prierai de considérer, mesdames, messieurs les sénateurs, que l’avis du Gouvernement est le même que celui de la commission ; je me rangerai derrière celui-ci sans prendre la parole longuement, afin d’obéir à la consigne donnée précédemment par Mme la présidente de la commission.
Sur la question particulière du bâtiment, je souscris aux propos du rapporteur général ; j’ajouterai néanmoins quelques éléments, notamment à l’intention de M. Lurel.
Tout d’abord, dans le cadre des travaux de rénovation de l’immobilier de l’État, nous veillons à tenir compte de la situation des outre-mer. Pour ce qui concerne cet appel à projets, ouvert le 7 octobre dernier et dont nous publierons les projets sélectionnés à la fin du mois de novembre ou au début du mois de décembre, je veille personnellement, avec la direction de l’immobilier de l’État, à ce que tous les territoires de métropole et d’outre-mer soient justement représentés, de façon au moins proportionnelle à la surface des bâtiments d’État qu’ils représentent.
Ensuite, pour faciliter et accélérer la mise en œuvre des chantiers de rénovation, nous avons relevé provisoirement à 70 000 euros le plafond en deçà duquel les consultations sont extrêmement simplifiées. En outre, Bruno Le Maire et moi-même avons donné instruction à la direction de l’immobilier de l’État de privilégier les petits projets, afin de favoriser une mise en œuvre rapide. Pour les plus gros projets, nous avons facilité le recours à la procédure de conception-réalisation, de manière à permettre, tant en métropole qu’outre-mer, à des collectivités ou à des administrations ne disposant pas des capacités d’ingénierie suffisantes de les mettre en œuvre.
Enfin, je termine en soulignant que, au cours des semaines qui viennent, vous aurez l’occasion d’examiner des dispositions sur « MaPrimeRénov’ » permettant d’élargir sensiblement le champ de ce mécanisme et de susciter ainsi de l’activité. Ce dispositif vaut, là encore, dans l’ensemble des territoires de la République.
Pour toutes ces raisons, le Gouvernement a émis un avis défavorable sur ces amendements. Par ailleurs, je le répète, sur tous les amendements relatifs aux dispositifs Lodéom, la position du Gouvernement sera la même que celle de la commission ; par conséquent, ne vous offusquez pas, mesdames, messieurs les sénateurs, si j’émets des avis lapidaires, en me rangeant aux arguments de M. le rapporteur général.
Mme le président. La parole est à M. Victorin Lurel, pour explication de vote.
M. Victorin Lurel. Je vous entends, monsieur le ministre, et je vous remercie de vos explications. Je ne les trouve pas sommaires, elles me paraissent claires, même si je ne suis pas d’accord avec vous et que je ne peux les approuver.
Il existait auparavant les régimes que vous avez appelés Lodéom. Ils étaient beaucoup plus favorables que le régime actuel, mais, entre-temps, il y a eu le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE), qui a engendré des écarts qui n’ont pas pu être compensés ; on parlait à l’époque de presque 9 points de plus, mais cela ne s’est pas traduit dans la réalité. Ainsi, aujourd’hui, il y a un déficit de compétitivité et de commandes.
J’entends bien ce que vous dites à propos du plan de relance, à savoir que les outre-mer seront traités également – il me semble d’ailleurs que le préfet saura ce soir comment appliquer ce plan, lors d’une visioconférence –, et il y a aussi la formule des « appels à projets », que beaucoup d’élus n’aiment pas beaucoup.
Toutefois, on a parfois l’impression que les choses se font un peu à la tête du client ; ainsi, 7 millions d’euros ont été inscrits dans la LBU pour l’ingénierie, mais on aimerait savoir comment cet argent est utilisé, s’il l’est efficacement et quels projets ont été réalisés. En outre, 1,7 milliard d’euros de crédits ne sont pas consommés, ni dans le logement ni ailleurs.
C’est la raison pour laquelle nous proposons que, s’agissant de projets automatiques, gérés en autonomie par les entreprises, les ménages, les associations et les collectivités, le BTP soit intégré dans le régime renforcé, soit de manière pérenne, soit pour quelques années.
Nous maintenons donc nos amendements.
Mme le président. La parole est à Mme Catherine Conconne, pour explication de vote.
Mme Catherine Conconne. J’irai bien évidemment dans le même sens que ce qu’on dit tous mes collègues sur cette question.
Rendez-vous compte, mes chers collègues, nous franchissons des milliers de kilomètres, en plein confinement, pour venir au Sénat. La Martinique aussi est confinée, comme la France ; tout est fermé parce que nous avons des taux de covid très importants. Nous franchissons donc qui l’Atlantique, qui l’océan Indien. Et pourquoi le faisons-nous ? Parce que nous sommes au fait d’une certaine réalité, qui n’apparaît pas dans les descriptions qui nous sont proposées. Il y a, d’un côté, ce qui est écrit ou dit et, de l’autre, la réalité, et il existe un fossé énorme entre les deux !
Si nous prenons la peine de venir ici, dans un hémicycle pourtant clairsemé – certains collègues habitent tout près mais ne sont pas présents –, si nous nous astreignons à venir, si nous nous faisons fouiller le nez chaque fois que nous rentrons chez nous – je me suis déjà fait tester sept fois ! –, pensez-vous que ce soit par coquetterie ? Non, c’est parce que la situation est difficile, parce que nous avons besoin d’une écoute particulière.
Or l’inactivité coûte plus cher à l’État que l’activité : faites le calcul ! L’État ne perd pas autant en faisant passer un seuil d’exonération de 1,2 SMIC à 1,7 SMIC qu’avec un travailleur au chômage. Les allocations chômage et le nombre de chômeurs explosent, de même que le nombre de bénéficiaires du RSA. Lorsqu’une personne est au RSA, elle bascule, le plus souvent, dans la CMU ; ainsi, quelqu’un qui perd son emploi ou qui n’a pas d’activité coûte quatre ou cinq fois plus cher à l’État que l’élargissement de la fourchette d’exonération ; faites les comptes !
À quel moment ferons-nous ces calculs ? À quel moment nous assoirons-nous raisonnablement autour d’une table pour comprendre que l’inactivité, dans ladite « outre-mer », coûte beaucoup plus cher que l’activité ?
Lorsque nous demandons ces boîtes à outils pour régler au mieux les dispositifs, c’est parce que nous sommes conscients de tout ça. C’est pour cela que nous franchissons des milliers de kilomètres pour venir ici, afin de faire entendre nos voix et de dire à l’État de refaire ses calculs.
Victorin Lurel vient de le dire, il y a des lignes budgétaires qui ne sont pas consommées, y compris parmi les aides aux entreprises, autrement dit, les exonérations de charges. Quel est le problème ? Posons-nous la question, soyons réalistes et cessons de nous envoyer au visage, comme des tartes à la crème, des millions d’euros par-ci, des millions d’euros par-là et des appels à projets ; cela ne fonctionne pas !
Mme le président. La parole est à Mme Viviane Malet, pour explication de vote.
Mme Viviane Malet. Sans vouloir allonger les débats, il y a un plan de relance pour l’outre-mer – on vient d’en parler – et des millions d’euros sont posés sur la table, mais s’il n’y a plus d’entreprises locales pour répondre aux appels d’offres, on devra faire venir des entreprises d’Europe ou de l’Hexagone…
Mme le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 551 et 866 rectifié ter.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme le président. En conséquence, les amendements nos 111 rectifié ter, 812 rectifié ter, 560 rectifié et 867 rectifié ter n’ont plus d’objet.
Je mets aux voix l’article 13 quater, modifié.
(L’article 13 quater est adopté.)
Articles additionnels après l’article 13 quater
Mme le président. L’amendement n° 114 rectifié bis, présenté par Mmes Malet, Dindar, Dumas et Gruny, MM. Gremillet et Savary, Mmes Deromedi et Delmont-Koropoulis, MM. B. Fournier, Rapin et Poadja, Mme Petrus, M. Genet, Mme Jacques et MM. Charon et Lagourgue, est ainsi libellé :
Après l’article 13 quater
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le II de l’article L. 752-3-2 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« …° À La Réunion et à Mayotte, aux employeurs des établissements de santé privés. »
II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Viviane Malet.
Mme Viviane Malet. Cet amendement a pour objet de permettre aux établissements privés de santé d’être soumis au barème renforcé du régime d’exonération de charges sociales patronales spécifique applicable aux entreprises ultramarines, pour une durée de deux années – du 1er janvier 2021 au 31 décembre 2022 –, dans une logique de différenciation, afin de tenir compte des difficultés spécifiques rencontrées par la filière réunionnaise depuis plusieurs années.
En effet, en matière d’offre de soins, La Réunion est dans une situation de rattrapage par rapport à la métropole. Sur ce territoire ultramarin et insulaire, où l’offre de soins est déjà insuffisante et fragile, il est risqué d’imposer les mêmes efforts et les mêmes mutations qu’en métropole. Or, compte tenu de l’actualité, La Réunion doit pouvoir être autonome en matière d’offre de soins.
Il s’agit en outre de maintenir l’attractivité des établissements privés de santé de ce territoire et de rétablir leur capacité financière à investir et à résister.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Il ne paraît pas opportun à la commission d’élargir encore ce régime très dérogatoire, qui permet d’appliquer des abattements importants sur les salaires élevés. En outre, les employeurs concernés ne nous semblent pas subir particulièrement une concurrence internationale rendant nécessaire l’amélioration de leur compétitivité.
Pour toutes ces raisons, la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme le président. Je mets aux voix l’amendement n° 114 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme le président. Je suis saisie de deux amendements identiques.
L’amendement n° 113 rectifié bis est présenté par Mmes Malet, Dindar, Dumas, Gruny et Lopez, MM. Rapin, Gremillet et Savary, Mmes Deromedi et Delmont-Koropoulis, MM. B. Fournier et Moga, Mme Guidez, MM. Lagourgue et Charon, Mme Jacques, M. Genet, Mme Petrus et M. Poadja.
L’amendement n° 493 rectifié est présenté par Mmes Jasmin et Conconne, M. Antiste, Mme Meunier, M. Temal, Mme Préville et MM. P. Joly et Tissot.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 13 quater
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le 1° du B du III de l’article L. 752-3-2 du code de la sécurité sociale est complété par une phrase ainsi rédigée : « Pour les entreprises de ces secteurs exerçant leur activité principale dans le secteur de l’environnement ou qui réalisent au moins 50 % de leur chiffre d’affaires à l’exportation en dehors de leur territoire d’implantation, la condition relative au chiffre d’affaires et au nombre de salariés du présent B ne s’applique pas ; ».
II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Viviane Malet, pour présenter l’amendement n° 113 rectifié bis.
Mme Viviane Malet. Le présent amendement va dans le même sens, mais pour les entreprises de taille intermédiaire établies outre-mer.
Ces entreprises de plus de 250 salariés ou de plus de 50 millions d’euros de chiffre d’affaires, fortement créatrices d’emploi, ne peuvent pas toujours, paradoxalement, bénéficier du régime renforcé d’exonération de charges sociales patronales, alors que leur domaine d’activité le leur permettrait.
En outre, qu’elles interviennent sur des marchés d’exportation ou sur des marchés de biens ou services consommés localement, ces quelques entreprises restent d’une taille extrêmement modeste par rapport à celle de leurs concurrents hexagonaux ou étrangers.
Dans le contexte actuel, tant conjoncturel que structurel, cet effet de seuil, qui prive les entreprises de taille intermédiaire, dans les secteurs prioritaires, du bénéfice du principal régime d’aide en faveur de la compétitivité et de l’emploi, constitue un non-sens économique et social.
Je vous demande donc de voter cet amendement pour que ces entreprises ne disparaissent pas de nos territoires.
Mme le président. La parole est à Mme Victoire Jasmin, pour présenter l’amendement n° 493 rectifié.
Mme Victoire Jasmin. Le Président de la République a déclaré, le 21 janvier dernier, qu’il fallait plus d’entreprises de taille intermédiaire en France.
Mon amendement est identique à celui de Mme Malet. Nous évoluons dans un système concurrentiel et compétitif et chacun, dans son territoire, doit contribuer à l’existence d’entreprises capables non seulement d’embaucher localement, mais aussi, et surtout, de faire travailler les sous-traitants, nécessaires dans de nombreux domaines. Sans cela, les quelques entreprises de nos territoires qui appartiennent à cette catégorie auront le plus grand mal à produire.
Je souhaite donc que le Gouvernement ait une approche particulière à ce sujet.
Je veux également revenir sur ce qu’a dit ma collègue Catherine Conconne ; aider ces entreprises, c’est diminuer le nombre de chômeurs. Or, elle l’a dit, et je suis tout à fait d’accord, le chômage coûte très cher, beaucoup plus cher.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Je suis désolé, je vais répéter les mêmes arguments…
On ne peut pas indéfiniment étendre un régime d’abattements très dérogatoire et assécher indéfiniment, de ce fait, les ressources de la sécurité sociale. Il s’agit, ici, de l’environnement ; il s’agira, ensuite, du transport aérien…
La commission comprend qu’il puisse y avoir des difficultés, elle ne les ignore pas, mais elle a émis un avis défavorable sur ces amendements.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme le président. La parole est à M. Victorin Lurel, pour explication de vote.
M. Victorin Lurel. Mon intervention tendra moins à défendre l’amendement qu’à répondre à ce que vient de dire notre excellent rapporteur général.
Si l’on réfléchit quelques instants et que l’on prend connaissance de la réalité économique des outre-mer, on comprend qu’il faut, comme je l’avais écrit au moment de l’examen de la loi du 28 février 2017 de programmation relative à l’égalité réelle outre-mer, un big-bang économique et social. Cela vous choquera peut-être, mais, selon moi, il faudrait même carrément que ces territoires soient des zones franches pendant au moins quinze ans, en supprimant les charges patronales, voire les charges salariales. D’ailleurs, toutes les îles de la Caraïbe le feront, à l’exemple de l’export processing zone de Saint-Domingue.
Notre pacte est aujourd’hui monodirectionnel, nous sommes orientés vers l’Hexagone, vers la métropole, mais les autres, eux, avancent. Nous sommes entrés dans l’Organisation des États de la Caraïbe orientale (OECO), mais nos coûts sont trop élevés ; les salaires ne sont pas les mêmes et, à bien y regarder, nous ne sommes pas un pays développé.
Le discours selon lequel « le droit commun suffit » explique le dépôt, par la majorité sénatoriale, d’une proposition de loi constitutionnelle et d’une proposition de loi organique pour le plein exercice des libertés locales, textes qui ont d’ailleurs été adoptés. L’article 6 de la proposition de loi constitutionnelle, qu’il faudrait retravailler, était bon ; il donnerait quelques libertés et libérerait les énergies.
J’aimerais que l’on abandonne ce cliché : « On en a déjà assez fait et, comptablement, ce n’est pas supportable. » Non, ce n’est pas vrai, mais il faut une petite révolution dans les têtes…
Mme le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 113 rectifié bis et 493 rectifié.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme le président. Je suis saisie de deux amendements identiques.
L’amendement n° 322 rectifié bis est présenté par Mmes Conconne et Jasmin, M. Antiste, Mme Artigalas, M. Assouline, Mme Conway-Mouret et M. Montaugé.
L’amendement n° 869 rectifié bis est présenté par MM. Patient, Buis et Dennemont, Mme Duranton, M. Hassani, Mme Havet, M. Iacovelli, Mme Phinera-Horth, M. Rohfritsch, Mme Schillinger et M. Théophile.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 13 quater
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Après le 3° du B du III de l’article L. 752-3-2 du code de la sécurité sociale, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« …° Soit relèvent du 3° du II du présent article. »
II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Catherine Conconne, pour présenter l’amendement n° 322 rectifié bis.
Mme Catherine Conconne. On est dans le même registre et, à un moment, il faudra peut-être se demander : « Pourquoi donc défilent-ils tous au micro pour dire les mêmes choses ? »
Le collègue Lurel vient de pousser un cri : tôt ou tard, il faudra arrêter. Nous allons nous épuiser à « charrier de l’eau dans panyen », comme on dit chez nous, c’est-à-dire à transporter de l’eau dans des paniers ! Chaque fois, on réessaie de faire comprendre une réalité et, chaque fois, M. le rapporteur général, que j’aime bien, nous ressort, très sereinement, le même argument.
Monsieur le rapporteur général, je vais vous inviter à faire la grande tournée de ladite « outre-mer » et, dans un élan de grande lucidité, vous déchirerez les arguments que vous venez de nous lire, vous verrez. Cela ne tient pas, monsieur le rapporteur général ! Faites-nous confiance, écoutez-nous, soyez à notre écoute et dites-vous que nous sommes les meilleurs spécialistes de ces pays, parce que nous y vivons, depuis des décennies. Nous sommes élus municipaux ou communautaires, nous sommes des élus des territoires et nous sommes confrontés, au quotidien, non à des difficultés – je n’aime pas ce mot –, mais à une réalité : on ne joue pas dans la même cour…
On me parle des dérogations, mais il faudrait aussi chercher à comprendre pourquoi, malgré tant de millions d’euros distribués, le pays qui est le mien compte encore, sur 360 000 habitants, plus de 50 000 personnes au RSA et 49 000 inscrites à Pôle emploi ! Il faudra un jour faire un arrêt sur image et se demander ce qui ne fonctionne pas. Nous pourrons vous l’expliquer.
Notre amendement n° 322 rectifié bis va dans le même sens que les précédents.
Notre géographie est enclavée. Il faut pouvoir aller d’un territoire à un autre. Par exemple, en Guadeloupe, l’insularité est double. En Polynésie française, elle est multiple ! Il faut pouvoir voyager.
Alors que, en ce moment, les compagnies aériennes locales assument ce service dans des conditions difficiles, à cause de l’épidémie, on limite l’exonération à 1,2 SMIC. Comment, dans ces conditions, payer une hôtesse de l’air ? Comment payer un commandant de bord ? C’est incompréhensible ! Aidez-les à passer la tempête.
Mme le président. La parole est à M. Dominique Théophile, pour présenter l’amendement n° 869 rectifié bis.
M. Dominique Théophile. Il est défendu, madame la présidente.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Chère collègue Catherine Conconne, j’entends bien ce que vous dites.
Nous avons tous des attaches avec un territoire particulier, dont nous connaissons les problèmes, sur lequel nous avons éventuellement été élus locaux. Cependant, nous devons tous être solidaires. C’est la sécurité sociale de tous qui doit être alimentée ! Si l’on crée des dérogations partout, il n’y aura plus de sécurité sociale.
Votre amendement porte, en l’occurrence, sur le transport aérien. Vous appuyant sur la gravité de la crise actuelle, vous en appelez à un dispositif pérenne. Cela me paraît d’ailleurs un peu contradictoire : c’est par des dispositifs ponctuels que l’on répond aux crises.
Il me semble, du reste, que le Gouvernement agit pour soutenir spécifiquement le transport aérien. M. le ministre pourra peut-être le repréciser rapidement.
Quoi qu’il en soit, la commission a émis un avis défavorable.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre délégué. Comme je l’ai indiqué, le Gouvernement est défavorable à ces amendements.
Effectivement, monsieur le rapporteur général, le transport aérien a fait l’objet de dispositions particulières. Je pense notamment au plan de soutien à la filière aéronautique. Nous avons également veillé à ce que ce secteur, comme le transport maritime de passagers, soit spécifiquement et explicitement intégré dans le périmètre du décret relatif aux exonérations, à la suite des débats que nous avons eus tout au long du printemps.
Nous voulons accompagner, par des exonérations, ce secteur particulier, du fait de la baisse d’activité qu’il connaît pendant la période épidémique.
Mme le président. La parole est à M. Victorin Lurel, pour explication de vote.
M. Victorin Lurel. Monsieur le rapporteur général, nous sommes peut-être à égalité de traitement. Nous devons tous faire des efforts dans le cadre de la République. Nous en sommes tous d’accord.
Mais, à l’exception de la Guyane, les outre-mer sont des îles. Nous sommes enclavés. Nous sommes éloignés.
Je rappelle que, durant le premier confinement, ne volaient qu’un ou deux avions au plus chaque semaine. Aujourd’hui, les grandes compagnies touchent des aides, ce qui est normal. J’ai moi-même voté en faveur de ces mesures.
Ce que nous voulons, ce n’est pas simplement renforcer le haut de bilan, comme cela a été fait pour Air France et comme l’ont fait les Pays-Bas. Ce que nous voulons, c’est diminuer durablement les coûts d’exploitation et corriger les inégalités structurelles. Bien sûr, la crise est conjoncturelle, mais la réalité demeure.
Mme le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 322 rectifié bis et 869 rectifié bis.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme le président. L’amendement n° 863 rectifié, présenté par MM. Patient, Buis et Dennemont, Mme Duranton, M. Hassani, Mme Havet, M. Iacovelli, Mmes Phinera-Horth et Schillinger et MM. Rohfritsch et Théophile, est ainsi libellé :
Après l’article 13 quater
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Aux première et deuxième phrases du C du III de l’article L. 752-3-2 du code de la sécurité sociale, le taux : « 70 % » est remplacé par le taux : « 100 % ».
II. – La perte de recettes résultant du I pour les organismes de sécurité sociale est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Dominique Théophile.
M. Dominique Théophile. Cet amendement vise à rendre cohérents les différents dispositifs d’exonération de charges applicables dans les outre-mer avec les taux du régime dit « de compétitivité renforcée ». Ce régime représente le niveau intermédiaire d’exonération de charges entre celui, plus faible, dit « de compétitivité » et celui, plus fort, dit « innovation et croissance ».
Le seuil de rémunération avant lequel les exonérations sont totales et à partir duquel elles deviennent dégressives a été porté, l’année dernière, en loi de financement de la sécurité sociale pour 2020, à 2 SMIC pour le régime « de compétitivité renforcée ».
Or ce même seuil, en régime « innovation et croissance », reste, lui, à 1,7 SMIC. Autrement dit, le régime d’exonération qui se veut le plus favorable ne l’est en fait pas pour les salaires compris entre 1,7 SMIC et 2 SMIC.
Par cohérence, il convient donc de rehausser ce seuil pour le régime dit « innovation et croissance » et de le porter également à 2 SMIC.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Alors qu’il existe déjà des avantages, on propose de porter de 1,6 à 1,7 les allégements généraux.
Comme vous vous en doutez, la commission est défavorable à cet amendement, pour à peu près les mêmes raisons que celles que j’ai évoquées précédemment.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme le président. La parole est à Mme Catherine Conconne, pour explication de vote.
Mme Catherine Conconne. Le mot « avantage » me pose un problème d’ordre sémantique : j’aimerais que ce terme soit définitivement banni du lexique lorsque l’on évoque des régimes dérogatoires destinés à restituer de l’équité. Nous devons fournir cet effort de lucidité.
Ce que nous demandons n’est pas un avantage, car nous ne voulons pas quelque chose en plus. Non ! Nous défendons l’idée d’une boîte à outils essentielle pour restituer de l’équité.
Je répète une fois de plus qu’on ne joue pas dans la même cour. Nos marchés sont petits, contraints. Ils connaissent des difficultés structurelles séculaires, qui, pour l’instant, ont du mal à bouger.
Mme le président. La parole est à M. Victorin Lurel, pour explication de vote.
M. Victorin Lurel. Il s’agit d’un amendement de cohérence.
Pour compléter ce qu’a déclaré mon collègue Dominique Théophile sur le sujet, dont je reconnais qu’il est quelque peu ésotérique, je rappelle que le seuil a déjà été porté à 2 SMIC. Selon qu’il s’agisse du régime de compétitivité renforcée ou du régime de compétitivité simple, le taux qui s’élevait précédemment à 2,7 a été porté à 2,2 et le taux de 1,7, à 1,2.
Il s’agit maintenant de porter le régime « innovation et croissance » à 2 SMIC. C’est donc un amendement de cohérence que nous demandons au Sénat de voter.
Mme le président. Je suis saisie de cinq amendements identiques.
L’amendement n° 129 rectifié ter est présenté par M. Bazin, Mmes Eustache-Brinio, Belrhiti, Chauvin et V. Boyer, MM. Houpert et Lefèvre, Mme Chain-Larché, MM. Courtial et Chatillon, Mme Deromedi, MM. Anglars, Bouchet, Bonne, B. Fournier, Paccaud, Calvet, Le Gleut, Laménie, Piednoir et Bonhomme, Mme Lavarde, MM. Babary, Segouin et H. Leroy, Mmes Dumas et Raimond-Pavero et M. Gremillet.
L’amendement n° 284 rectifié quater est présenté par MM. Milon, Grand et Burgoa, Mme Berthet, MM. Brisson, Charon, Dallier et de Legge, Mme Garriaud-Maylam, MM. D. Laurent et Mandelli, Mme Richer, MM. Sautarel et Savary, Mme Delmont-Koropoulis et M. Regnard.
L’amendement n° 466 rectifié sexies est présenté par Mmes Lassarade, Bonfanti-Dossat et Lherbier et M. Cuypers.
L’amendement n° 668 rectifié quinquies est présenté par MM. Marie, Bourgi, Jeansannetas et Lozach, Mmes Van Heghe et Lepage, M. Cardon, Mme Blatrix Contat et MM. P. Joly, Antiste, Kerrouche et Tissot.
L’amendement n° 692 est présenté par M. Michau.
Ces cinq amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 13 quater
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – L’article L. 646-3 du code de sécurité sociale est abrogé.
II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Arnaud Bazin, pour présenter l’amendement n° 129 rectifié ter.
M. Arnaud Bazin. Il s’agit de la taxe additionnelle de 3,25 % qui s’applique pour la cotisation maladie, maternité et décès des professionnels indépendants.
Cette surtaxe, qui s’ajoute au régime de base de 6,5 %, a pour motif de sanctionner les dépassements d’honoraires abusifs. Malheureusement, elle s’applique aussi aux pédicures-podologues, dont les prestations ne sont pas prises en compte par l’assurance maladie ou le sont à des niveaux extrêmement faibles et qui se trouvent donc pénalisés par cette surcotisation qui, a priori, ne devrait pas les viser.
Il est donc proposé de mettre fin à cette situation qui est très mal ressentie par ces professionnels auxiliaires de santé.
Mme le président. La parole est à M. Alain Milon, pour présenter l’amendement n° 284 rectifié quater.
M. Alain Milon. Il est défendu, madame la présidente.
Mme le président. La parole est à Mme Florence Lassarade, pour présenter l’amendement n° 466 rectifié sexies.
Mme Florence Lassarade. Il est défendu, madame la présidente.
Mme le président. La parole est à M. Didier Marie, pour présenter l’amendement n° 668 rectifié quinquies.
M. Didier Marie. Il est défendu, madame la présidente.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Le dispositif, qui vise à dissuader les dépassements d’honoraires, s’applique non seulement aux pédicures-podologues, mais aussi, en réalité, à tout le monde.
Cela pose évidemment problème, raison pour laquelle la commission a émis un avis défavorable.
Le maintien de l’article L. 646-3 du code de sécurité sociale semble aller dans l’intérêt des patients.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre délégué. Le Gouvernement est lui aussi défavorable à ces amendements.
J’ajoute que cette contribution additionnelle de 3,25 % applicable aux seuls dépassements d’honoraires et aux revenus non conventionnés est aussi une contrepartie à la participation financière de l’assurance maladie au paiement des cotisations sociales dues par ces praticiens au titre de leurs revenus conventionnés.
Il nous semble donc qu’adopter ces dispositions irait contre ce système de régulation.
Mme le président. La parole est à M. Arnaud Bazin, pour explication de vote.
M. Arnaud Bazin. Je comprends parfaitement la position de M. le rapporteur général, mais il y a quand même une différence entre les revenus issus de dépassements d’honoraires abusifs que pratiquent certains praticiens et l’activité quotidienne, à un tarif normal et raisonnable, des pédicures-podologues !
Nous voulons, par cet amendement, interroger le Gouvernement sur cette situation pour qu’une solution puisse être trouvée – je pense que c’est aussi l’intention des auteurs des autres amendements.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Nous sommes bien d’accord !
Mme le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Olivier Dussopt, ministre délégué. J’entends l’interpellation de M. Bazin.
Nous sommes prêts à trouver une solution, mais je ne saurais dire ici et maintenant en quoi elle consistera.
Je ne suis pas certain que l’amendement que vous proposez, du fait des « défauts » que M. le rapporteur général et moi-même avons évoqués, soit la réponse adaptée. Je suis même convaincu du contraire !
Qu’il faille travailler est une évidence, mais revenir sur un dispositif qui participe à la régulation nous paraît inopportun. C’est la raison de notre avis défavorable.
Mme le président. La parole est à M. Didier Marie, pour explication de vote.
M. Didier Marie. Vous l’avez signalé, monsieur le ministre, cette taxe concerne aussi d’autres professionnels de santé. Ceux-ci sont tout aussi pénalisés, notamment pour des missions telles que la formation continue obligatoire des professionnels de santé ou les activités qu’ils peuvent avoir au sein d’unions régionales de santé ou encore lorsqu’ils sont maîtres de stage ou en formation conventionnelle et syndicale.
L’ensemble de ces professionnels sont aujourd’hui victimes d’un traitement inéquitable.
La suppression de cette taxe irait dans le sens de ce que vous souhaitez, à savoir l’harmonisation des cotisations sur les revenus d’activité et un alignement des droits entre les professions.
Mme le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 129 rectifié ter, 284 rectifié quater, 466 rectifié sexies et 668 rectifié quinquies.
(Les amendements sont adoptés.)
Mme le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 13 quater.
Article 13 quinquies (nouveau)
I. – L’article 17 de la loi n° 90-1067 du 28 novembre 1990 relative à la fonction publique territoriale et portant modification de certains articles du code des communes est ainsi modifié :
1° À la fin du premier alinéa, les mots : « ainsi que pour les retenues pour pension dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État » sont supprimés ;
2° L’avant-dernier alinéa est ainsi rédigé :
« L’indemnité de feu est assujettie aux retenues et contributions supportées sur les pensions par les intéressés et leurs collectivités employeurs dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État. La retenue pour pension supportée par les intéressés peut, en tant que de besoin, être majorée dans les mêmes conditions pour couvrir les dépenses supplémentaires résultant des dispositions de la présente loi pour la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales. » ;
3° Le dernier alinéa est supprimé.
II. – Le I est applicable aux indemnités perçues à compter du 1er janvier 2021.
Mme le président. Je suis saisie de quatorze amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
Les trois premiers sont identiques.
L’amendement n° 709 rectifié est présenté par M. Kanner, Mme G. Jourda, MM. Temal et Jomier, Mmes Lubin, Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Jasmin, Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Antiste, Bouad et J. Bigot, Mme Bonnefoy, MM. Durain et Gillé, Mme Harribey, MM. P. Joly et Leconte, Mme Lepage, MM. Lozach, Lurel, Marie et Mérillou, Mme Monier, MM. Montaugé et Pla, Mme S. Robert, MM. Sueur et Tissot, Mmes Préville, Briquet et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L’amendement n° 915 est présenté par Mme Poncet Monge, M. Benarroche, Mme Benbassa, M. Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon et Mme Taillé-Polian.
L’amendement n° 1038 est présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly, Lienemann et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
I. - Alinéas 3 et 4
Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :
2° L’avant-dernier alinéa est supprimé ;
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Patrick Kanner, pour présenter l’amendement n° 709 rectifié.
M. Patrick Kanner. Le 27 août dernier, le ministre de l’intérieur s’est engagé auprès des syndicats de sapeurs-pompiers à mettre fin à leur surcotisation perçue par la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales, plus connue sous le sigle CNRACL.
Cette suppression est réclamée depuis longtemps par les syndicats et les départements, afin d’aider à financer la revalorisation de la prime de feu, sur laquelle il y a eu beaucoup d’engagements publics, comme chacun le sait ici.
L’annulation de cette surcotisation permettrait, en effet, de dégager une enveloppe de 40 millions à 45 millions d’euros pour les employeurs et, ainsi, d’aider à financer la revalorisation de la prime de feu de 19 % à 25 %. La recette deviendrait en quelque sorte un avantage pour les sapeurs-pompiers.
Monsieur le ministre, par son amendement à l’Assemblée nationale, le Gouvernement n’est pas allé au bout de son engagement à supprimer la surcotisation : il a simplement accepté de supprimer la part employeur dont s’acquittent les SDIS, c’est-à-dire essentiellement les départements, avec pour objectif d’améliorer les finances départementales et d’augmenter le pouvoir d’achat des sapeurs-pompiers professionnels.
Bien évidemment, nous souscrivons à ces objectifs – on prend ce qui est déjà donné –, mais nous voulons aller plus loin et supprimer la part salariale de cette surcotisation, qui n’a désormais plus de justification et qui représente, en moyenne, 55 euros par mois sur les fiches de paie.
C’est l’objet de cet amendement du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, dans un contexte où l’action des sapeurs-pompiers se heurte à de plus en plus de violences exercées par nos concitoyens. Je vous renvoie aux événements malheureux qui ont eu lieu voilà quelques jours à Bron.
Je pense que ce geste serait très apprécié par les acteurs de la sécurité civile dans notre pays, qui méritent une reconnaissance.
Puisque les salaires sont bloqués, tâchons, par cet amendement, de leur donner un peu d’espoir sur le plan du pouvoir d’achat.
Mme le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour présenter l’amendement n° 915.
Mme Raymonde Poncet Monge. Je tiens à dire, au préalable, que M. Parigi, sénateur de la Haute-Corse, a présenté quasiment le même amendement. Notre groupe Écologiste – Solidarité et Territoires n’interviendra donc qu’une fois sur cet article, ce qui raccourcira les débats.
Pour compléter les propos de M. Kanner, je veux insister sur le fait que la surcotisation était jusqu’alors assumée, pour un tiers, par les salariés et, pour deux tiers, par les employeurs, ce qui a du sens. Son objet était de financer l’intégration de la prime de feu.
En première lecture, le Gouvernement a supprimé la part employeur de façon un peu rapide et sans véritable concertation – les SDIS et leurs salariés auraient alors exprimé leur opposition à ce pas insuffisant.
Il est vrai que le budget des services départementaux d’incendie et de secours pèse de plus en plus sur les conseils départementaux et que les concours de l’État sont urgents et nécessaires. Cela n’est pas mis en cause, mais, pour des raisons de cohérence, d’équité et de justice, notre amendement tend à supprimer également la part salariale de la surcotisation, actant ainsi la suppression totale de celle-ci, qui, d’ailleurs, aurait dû avoir lieu depuis 2003 et qui est demandée depuis plusieurs années par les sapeurs-pompiers comme par les SDIS. Ce sont 45 millions d’euros qui sont en jeu.
En tout état de cause – ce n’est pas un amendement de repli –, il aurait été bon de respecter la répartition entre part salariale et part patronale en attendant d’aller jusqu’au bout de la suppression de la surcotisation et d’acter sa fin, par le biais de l’amendement gouvernemental, à hauteur de 70 millions d’euros.
En conclusion, je tiens à dire qu’il est vraiment insupportable que l’on modifie ainsi la répartition entre cotisations salariales et cotisations patronales. Ce genre d’amendement n’a ni sens ni cohérence. Nous demandons la suppression en totalité de la surcotisation, ou, au moins, un respect de cette répartition.
Mme le président. La parole est à Mme Céline Brulin, pour présenter l’amendement n° 1038.
Mme Céline Brulin. Notre amendement vise aussi à supprimer la surcotisation salariale.
Je partage ce qui vient d’être dit sur le fait que le Gouvernement n’est pas allé au bout – l’Assemblée nationale non plus, du reste.
Je rappelle à mon tour que cette surcotisation a été instituée en 1990 pour financer l’intégration progressive de la prime de feu dans les pensions de retraite des sapeurs-pompiers. Alors qu’elle avait vocation à s’éteindre en 2003, elle a perduré jusqu’à aujourd’hui. L’intégration de la prime de feu est désormais effective, le nombre de cotisants a progressé de 10 000 et le nombre de ceux qui partent à la retraite sans avoir cotisé au titre de cette prime de feu diminue : il n’y a donc pas de problème proprement financier, me semble-t-il.
Aujourd’hui, le Gouvernement, après de très fortes mobilisations des sapeurs-pompiers, a décidé de revaloriser la prime de feu, ce qui est une très bonne chose.
La suppression de la surcotisation patronale est aussi très positive : elle va permettre d’abonder les finances des départements, qui financent les SDIS pour l’essentiel, de manière à revaloriser cette prime de feu.
Toutefois, je considère qu’il faut également supprimer la part salariale. C’est une demande de l’ensemble des syndicats des sapeurs-pompiers et, me semble-t-il, de l’Assemblée des départements de France. Le nombre d’amendements que nous défendons en ce sens aujourd’hui montre l’existence d’un accord très large sur une mesure qui ne serait que justice, en apportant une revalorisation salariale à ceux qui risquent leur vie au quotidien pour protéger la nôtre.
Pour terminer, monsieur le ministre, lors de l’examen de précédents amendements, vous avez mis en avant le risque d’inconstitutionnalité de certaines exonérations de cotisations, au titre de la rupture d’égalité. Je crois que nous sommes, là aussi, dans ce cas de figure. Il faudrait y revenir de manière urgente.
Mme le président. L’amendement n° 148, présenté par M. Vanlerenberghe, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Alinéa 4, première phrase
Remplacer les mots :
sur les
par les mots :
au titre des
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Il s’agit d’un amendement rédactionnel.
Mme le président. L’amendement n° 258 rectifié, présenté par M. Maurey, Mme Gatel, M. Delcros, Mmes Vermeillet, Loisier et Billon, MM. S. Demilly et Détraigne, Mmes Vérien et Guidez, MM. Kern et Mizzon, Mme N. Goulet, M. Louault, Mmes de La Provôté et Canayer, MM. A. Marc, Bouchet, D. Laurent et de Nicolaÿ, Mme Garriaud-Maylam, MM. Le Nay, Hingray, Decool, Guerriau, Laugier, Daubresse, Paccaud, Poadja et Levi, Mme Noël et M. Vogel, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 4, seconde phrase
Supprimer cette phrase.
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
.… – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Jocelyne Guidez.
Mme Jocelyne Guidez. Cet amendement a été bien défendu.
Il est certain que les sapeurs-pompiers ont été très surpris que la suppression ne concerne pas la part salariale.
Supprimer celle-ci leur garantirait un gain de pouvoir d’achat bienvenu. Cela constituerait également un message de soutien à cette profession, qui démontre au quotidien son dévouement, en particulier en cette période de crise sanitaire.
Mme le président. L’amendement n° 259 rectifié bis, présenté par M. Lefèvre, Mmes Chauvin et Estrosi Sassone, MM. Pellevat et Karoutchi, Mmes Raimond-Pavero et Bellurot, MM. D. Laurent et Brisson, Mmes Jacques, Puissat et Dumas, M. Cambon, Mme Belrhiti, M. Bonnus, Mmes F. Gerbaud et Micouleau, M. Pointereau, Mme Garriaud-Maylam, MM. Bacci et Vogel, Mme Dumont, MM. Frassa, Chatillon, Calvet et Grosperrin, Mmes Deromedi et Richer, M. Charon, Mme L. Darcos, MM. B. Fournier, Cuypers et Longuet, Mme Canayer, M. Husson, Mme Drexler, MM. Laménie et Genet, Mme Bonfanti-Dossat, MM. H. Leroy, Piednoir et Rapin et Mmes Chain-Larché, Renaud-Garabedian et de Cidrac, est ainsi libellé :
I. - Alinéa 4, seconde phrase
Remplacer cette phrase par deux phrases ainsi rédigées :
La retenue supplémentaire assise sur la somme du traitement indiciaire et de l’indemnité de feu des sapeurs-pompiers professionnels pour bonification du cinquième du temps de service effectivement accompli en cette qualité est maintenue. La retenue supplémentaire assise sur la somme du traitement indiciaire et de l’indemnité de feu des sapeurs-pompiers professionnels bénéficiaires de l’indemnité de feu est supprimée.
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
.… – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Antoine Lefèvre.
M. Antoine Lefèvre. L’amendement est défendu, madame la présidente.
Mme le président. Les huit amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 109 rectifié quinquies est présenté par Mme N. Delattre, MM. Artano, Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère, MM. Corbisez, Fialaire, Gold et Guérini, Mme Guillotin, M. Guiol, Mme Pantel, M. Requier, Mme F. Gerbaud et M. H. Leroy.
L’amendement n° 311 rectifié bis est présenté par M. Darnaud, Mme Ventalon, MM. Perrin, Rietmann et Rapin, Mme Di Folco, MM. C. Vial et Sautarel, Mmes Petrus et Bellurot, M. Bas, Mmes Berthet, Belrhiti et Thomas, MM. Cambon, J.M. Boyer, Duplomb, Courtial, Cuypers et D. Laurent, Mmes Dumas et Goy-Chavent, MM. Hugonet et Grand, Mmes Puissat et Lopez, MM. Bouchet, Houpert, Bacchi et Vogel, Mme Malet, MM. Grosperrin et Anglars, Mme Estrosi Sassone, MM. Chaize, Chatillon, Frassa et B. Fournier, Mmes Dumont, Deromedi et Demas, MM. Tabarot, de Nicolaÿ et Bazin, Mmes Raimond-Pavero et Delmont-Koropoulis, M. Le Gleut, Mmes Noël et Primas, M. Reichardt, Mme Muller-Bronn, M. Piednoir, Mme M. Mercier, MM. Panunzi et Regnard, Mme Borchio Fontimp, MM. Somon et Nougein, Mme Canayer, M. Longuet, Mme Pluchet, MM. Genet, Pointereau et Savin, Mmes Drexler et de Cidrac et MM. Charon et Brisson.
L’amendement n° 338 rectifié ter est présenté par MM. P. Martin et Chauvet, Mme Morin-Desailly, MM. Bonnecarrère et Détraigne, Mme Loisier, MM. Laugier, Janssens et Prince, Mmes Sollogoub et Doineau, MM. Mizzon et Bonneau, Mme Gatel, MM. Cigolotti, Canevet et Moga, Mme Billon, M. Cazabonne, Mme Guidez, M. Delcros, Mme C. Fournier, M. Duffourg, Mmes Perrot et Létard et MM. Capo-Canellas et Longeot.
L’amendement n° 339 rectifié ter est présenté par MM. Verzelen et Chasseing, Mme Mélot et MM. A. Marc, Lagourgue, Menonville, Wattebled et Guerriau.
L’amendement n° 448 est présenté par Mme N. Goulet.
L’amendement n° 543 rectifié bis est présenté par Mme Joseph, MM. Laménie et Burgoa, Mme Bonfanti-Dossat, MM. Bouloux, Meurant, Bonhomme, Favreau et Mandelli et Mme Garriaud-Maylam.
L’amendement n° 621 est présenté par M. Roux.
L’amendement n° 861 est présenté par MM. Parigi, Gontard et Benarroche, Mme Benbassa, M. Fernique, Mme de Marco, MM. Dossus, Labbé et Salmon, Mmes Poncet Monge et Taillé-Polian et M. Dantec.
Ces huit amendements sont ainsi libellés :
I. – Alinéa 4
1° Seconde phrase
Remplacer les mots :
La retenue pour pension supportée par les intéressés peut, en tant que de besoin, être majorée dans les mêmes conditions
par les mots :
Les intéressés ont une retenue pour pension majorée à hauteur de 2 %
2° Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Le prélèvement du taux de 1,8 % pour le financement de l’intégration de la prime de feu est supprimé.
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Stéphane Artano, pour présenter l’amendement n° 109 rectifié quinquies.
M. Stéphane Artano. La revalorisation de la prime de feu est évidemment une bonne nouvelle.
Cette annonce faite par le Gouvernement restait pourtant à la seule charge des conseils départementaux. Il nous a été proposé de supprimer la surcotisation employeur de 3,6 %. C’est une bonne chose, mais demeure le second volet : la suppression de la surcotisation salariale.
Depuis 1991, les sapeurs-pompiers d’active surcotisaient pour pouvoir partir à la retraite décemment, puisqu’ils n’avaient jusqu’alors pas cotisé pour intégrer la prime de feu dans le calcul de leur retraite.
Du fait de l’évolution de l’équilibre entre le nombre de sapeurs-pompiers qui sont aujourd’hui en activité et qui cotisent et ceux, encore vivants, qui sont à la retraite et n’avaient pas suffisamment cotisé, la surcotisation s’élève à 1,8 %. Elle ne se justifie plus depuis des années. D’ailleurs, la CNRACL enregistre des excédents non neutres. De notre point de vue, rien ne justifie aujourd’hui de conserver cette surcotisation. Sa suppression permettrait, d’ailleurs, de revaloriser, même modestement – probablement aux alentours de 50 euros par mois –, le revenu des sapeurs-pompiers d’active. Ce serait donc doublement positif.
C’est pourquoi, mes chers collègues, nous nous demandons de soutenir cet amendement présenté par ma collègue Nathalie Delattre.
Mme le président. La parole est à Mme Frédérique Puissat, pour présenter l’amendement n° 311 rectifié bis.
Mme Frédérique Puissat. Il est défendu, madame la présidente.
Mme le président. La parole est à M. Pascal Martin, pour présenter l’amendement n° 338 rectifié ter.
M. Pascal Martin. Je veux naturellement m’associer aux propos tenus par mes collègues.
Je rappelle simplement que le Président de la République et le ministre de l’intérieur ont, voilà quelques semaines, évoqué une juste récompense de la qualité des services rendus par les sapeurs-pompiers en général et par les sapeurs-pompiers professionnels en particulier.
La suppression de la part salariale de la surcotisation est attendue par l’ensemble des sapeurs-pompiers professionnels. Cette demande date de dix-sept ans, puisqu’elle remonte à 2003.
Mme le président. La parole est à Mme Colette Mélot, pour présenter l’amendement n° 339 rectifié ter.
Mme Colette Mélot. L’amendement a été défendu, madame la présidente.
Je m’associe à tout ce qui vient d’être dit.
Mme le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour présenter l’amendement n° 448.
Mme Nathalie Goulet. L’amendement a d’ores et déjà été largement défendu sur toutes les travées de cet hémicycle, madame la présidente.
Mme le président. La parole est à Mme Else Joseph, pour présenter l’amendement n° 543 rectifié bis.
Mme Else Joseph. Cet amendement a lui aussi été largement défendu.
Je veux cependant insister sur l’impact sur les SDIS : dans le département où je suis élue, cette charge supplémentaire s’élèverait, pour eux, à 140 000 euros.
Le vote de cet amendement permettrait, surtout, d’envoyer un message aux pompiers.
Mme le président. L’amendement n° 621 n’est pas soutenu.
L’amendement n° 861 a été précédemment défendu.
Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. La commission propose de s’en remettre à la sagesse du Sénat.
Plusieurs amendements sont à peu près identiques. Quelques imprécisions dans leur rédaction nous conduisent à privilégier l’amendement n° 258 rectifié de M. Maurey, qui nous paraît plus favorable sur le plan légistique.
Madame la présidente, en application de l’article 44, alinéa 6, de notre règlement, je demande le vote en priorité de cet amendement.
Mme le président. Je suis donc saisie par la commission des affaires sociales d’une demande de priorité de vote de l’amendement n° 258 rectifié.
Je rappelle que, aux termes de l’article 44, alinéa 6, du règlement du Sénat, lorsqu’elle est demandée par la commission saisie au fond, la priorité est de droit, sauf opposition du Gouvernement.
Quel est l’avis du Gouvernement sur cette demande de priorité formulée par la commission ?
M. Olivier Dussopt, ministre délégué. Le Gouvernement s’est engagé à augmenter la prime de feu pour les sapeurs-pompiers. Le décret a été signé par le ministre de l’intérieur. Le relèvement du plafond de 19 % à 25 % permet une augmentation de la rémunération nette de 100 euros.
Dans la discussion avec l’Assemblée des départements de France, la question du financement de cette augmentation a été posée. Le Gouvernement, par la voix du ministre de l’intérieur, s’est engagé à supprimer la surcotisation patronale, ce que nous avons fait à l’Assemblée nationale, ce qui représente une économie de 47 millions d’euros pour les départements, à comparer avec le coût, très légèrement supérieur à 80 millions d’euros, de l’augmentation de la prime de feu.
Considérant que la surcotisation salariale a un caractère contributif, le Gouvernement était favorable à l’amendement n° 148 de M. le rapporteur général, qui vise à rappeler cette dimension de la prime de feu. Il était défavorable à la totalité des autres amendements. Cela dit, j’entends que M. le rapporteur général a demandé le vote en priorité de l’amendement n° 258 rectifié. J’y suis naturellement favorable, madame la présidente, une position contraire étant inélégante et inutile.
Je souligne simplement que le Gouvernement considère que l’engagement d’augmenter la prime de feu a été tenu, que la suppression de la surcotisation patronale est un élément de financement de cette augmentation, qui est à la charge des SDIS, et que la suppression de la surcotisation salariale ne nous paraît pas opportune, compte tenu de sa dimension contributive.
Mme le président. La priorité est ordonnée.
La parole est à M. Bruno Retailleau, pour explication de vote.
M. Bruno Retailleau. On voit bien que les sénateurs de toutes les travées convergent sur cette question.
Mathieu Darnaud, qui a déposé un excellent amendement, pourra peut-être s’exprimer sur le dispositif proposé par Hervé Maurey, qui nous paraît à nous aussi peut-être plus précis.
Bien évidemment, nous sommes tous favorables à l’augmentation de la prime de feu, mais la décision du Gouvernement crée un double déséquilibre.
Premièrement, vous avez décidé de compenser le surcoût sur l’employeur, à savoir les départements et les SDIS. Le problème est que, ce faisant, vous avez privé la CNRACL d’une rentrée d’argent qui ne sera pas compensée par l’État. Vous avez donc creusé le déficit, déjà important, de cette caisse.
Deuxièmement, les sapeurs-pompiers ont vécu l’allégement de la part patronale, notamment des départements, comme une forme d’injustice et de déséquilibre.
C’est ce qui amène les membres de mon groupe à soutenir l’amendement d’Hervé Maurey, dans le droit fil, d’ailleurs, de l’amendement qu’a déposé notre collègue Mathieu Darnaud. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)
Mme le président. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.
M. René-Paul Savary. Effectivement, il semble que l’amendement de M. Maurey soit un peu plus précis.
Il ne faudrait pas que l’on interprète la mesure comme une suppression des cotisations et de la surcotisation. Il faut rester prudent, parce que les cotisations sont tout à fait légitimes. D’ailleurs, je rappelle que les surcotisations visaient à compenser un certain nombre de dispositions adoptées entre 1991 à 2003 pour prendre en compte la prime de feu des sapeurs-pompiers professionnels qui n’avaient pas cotisé sur cette prime. C’était un arriéré.
Le problème est qu’il faut maintenant liquider les 55 millions de pensions versées tous les ans. Or ce sont environ 42 millions d’euros qui vont disparaître avec la suppression de la part patronale de la surcotisation.
Si cet amendement semble tout à fait légitime au regard de l’avancée du Gouvernement, c’est encore la part complémentaire qui est visée. La suppression de la moitié de cette somme va entraîner une hausse des dépenses de la CNRACL, déjà largement déficitaire, qui regroupe à la fois les agents des collectivités territoriales et les agents hospitaliers. Cette décision aura donc des répercussions sur l’ensemble des primes – cotisations salariales et patronales – des collectivités et des établissements hospitaliers.
En tant que rapporteur de la branche vieillesse, je ne peux supporter une telle situation. Avant-hier, un amendement visait déjà à permettre à l’État de taper dans les réserves – certes importantes – de la Caisse d’assurance maladie des industries électriques et gazières (Camieg). Je m’étais abstenu sur le principe. Et là, l’État paierait indirectement les pompiers en tapant, cette fois, dans la caisse de la CNRACL !
Je ne peux donc soutenir cet amendement, même si je comprends la légitimité de la demande des sapeurs-pompiers professionnels. Il fallait d’ailleurs s’y attendre, monsieur le ministre : le Gouvernement doit assumer ses décisions et aller jusqu’au bout pour donner satisfaction aux sapeurs-pompiers. Et il me semble que cela relève davantage de votre responsabilité que de la nôtre. (Mme Florence Lassarade applaudit.)
Mme le président. La parole est à M. Mathieu Darnaud, pour explication de vote.
M. Mathieu Darnaud. Le président Retailleau a déjà évoqué les raisons qui m’avaient conduit, avec un grand nombre de mes collègues, à déposer l’amendement n° 311 rectifié bis. M. René-Paul Savary vient à l’instant d’ajouter des éléments importants.
Nous avons conscience que nos positions convergent et nous nous rallierons donc à l’amendement de M. Maurey.
Mme le président. La parole est à Mme Émilienne Poumirol, pour explication de vote.
Mme Émilienne Poumirol. Je rappelle, comme plusieurs de mes collègues l’ont déjà souligné, que la surcotisation devait s’arrêter en 2003. Et si j’entends les arguments de M. Savary, il n’en reste pas moins que la CNRACL touche, depuis 2003, des cotisations « indues » des sapeurs-pompiers, puisque l’équilibre devait être atteint en 2003.
Par ailleurs, en fin d’année dernière, le Gouvernement a cédé, à la suite d’un mouvement de grève extrêmement important de nos sapeurs-pompiers. Il lui était d’autant plus facile de céder que ce sont les départements, pour l’essentiel, mais aussi les communes et les intercommunalités, qui vont payer au final.
Je m’étonne d’entendre aujourd’hui qu’il ne faudrait pas supprimer la part salariale. C’est une question d’équilibre. Tous les sapeurs-pompiers de France sont à l’écoute des travaux de l’Assemblée nationale et du Sénat sur cette surcotisation. Sa suppression leur offrirait une hausse de pouvoir d’achat d’environ 50 euros tous les mois. Ce ne serait que justice, sachant qu’ils ont surcotisé depuis dix-sept ans pour rien.
M. Bernard Jomier. Tout à fait !
Mme le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Olivier Dussopt, ministre délégué. Monsieur Retailleau, je mesure bien la convergence que vous soulignez et je sais quel sort votre assemblée réservera à l’amendement de M. Maurey.
Au-delà, je voudrais dire que nos divergences n’enlèvent rien à la considération que nous portons aux sapeurs-pompiers. Les engagements que le Gouvernement a pris dans leur direction, tant pour les volontaires que pour les professionnels, en témoignent.
Toutefois, je voudrais souligner la cohérence de notre action en matière d’exonérations : nous avons veillé, dans tous les dispositifs – et je crois que vous pouvez nous en donner acte –, à alléger systématiquement – de manière définitive ou de manière provisoire, pour faire face à la crise – les cotisations patronales. Nous respectons en cela les différentes jurisprudences qui disposent que les cotisations salariales sont des éléments du revenu, notamment de par leur capacité contributive. Nous en sommes donc restés à cette ligne de conduite de suppression, ou d’exonération temporaire, de la seule part patronale.
Cette volonté a même créé une forme de complexité dans la mesure où nous avons mis en place un système de crédits de cotisations sur la masse salariale versée pendant la période de crise plutôt que d’exonérations de cotisation salariales, quand bien même cette période aurait un caractère très exceptionnel.
J’entends tout ce qui a été dit et je prends acte, par avance, du vote du Sénat sur l’amendement de M. Maurey. Toutefois, sans vouloir inciter M. le rapporteur général à rouvrir le débat sur le caractère hermétique, ou étanche, des débats entre le projet de loi de finances – et donc les finances de l’État – et le projet de loi de financement de la sécurité sociale, je voudrais revenir sur les propos de Mme Poumirol : vous avez affirmé, madame la sénatrice, que le Gouvernement aurait cédé à la mobilisation des sapeurs-pompiers. Je peux vous assurer que cette mobilisation était légitime et que la demande d’augmentation de la prime de feu – je ne parle pas du dispositif d’exonération – était très largement défendue par les présidents de département et les élus départementaux. Presque tous ont soutenu cette revendication des sapeurs-pompiers. (Mme Émilienne Poumirol en convient.)
Dans ce domaine-là, comme dans celui de l’aide à domicile, convenez avec moi que nous voyons se multiplier – dans ce PLFSS comme dans le projet de loi de finances pour 2021 et dans tous nos débats financiers – les cas où l’on demande à l’État d’assumer, parfois intégralement, les conséquences de décisions ou de revendications portées par d’autres et pour des personnels qui ne relèvent pas directement de sa responsabilité – les sapeurs-pompiers relèvent des SDIS, les aides à domicile relèvent d’associations, des départements ou d’employeurs privés… Nous avons tous participé à ce phénomène et j’ai certainement dû le faire, moi aussi, quand j’étais parlementaire.
Le principe même de la décentralisation – quoi qu’on en pense – des sapeurs-pompiers devrait logiquement amener les employeurs que sont les SDIS à supporter l’intégralité des décisions prises. J’ose même dire, à titre personnel, que la discussion et le dialogue social entre les sapeurs-pompiers professionnels et leurs employeurs ne devraient s’établir qu’entre les sapeurs-pompiers et les élus des SDIS, l’État n’ayant pas à intervenir. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.) Je le répète, c’est une position personnelle.
Sans vouloir réveiller de nouveau ce débat, nous devrons encore mener, dans les semaines, dans les mois et dans les années qui viennent, un travail de réflexion sur ce qui relève de l’étanchéité quand il s’agit de prendre une décision et ce qui relève d’une forme de porosité quand il s’agit de l’accompagner et de la financer.
Mme le président. La parole est à M. Pascal Martin, pour explication de vote.
M. Pascal Martin. Monsieur le ministre, les services départementaux d’incendie et de secours sont des établissements publics, distincts des départements, financés par les conseils départementaux, les communes et les intercommunalités, mais c’est le préfet, représentant de l’État, qui en assure la direction opérationnelle. Pour l’essentiel, les financements des SDIS sont assurés par des collectivités locales. Le principe « qui paie commande » n’est donc pas véritablement appliqué au quotidien dans ce cas précis. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC. – Mme Émilienne Poumirol applaudit également.)
Mme le président. En conséquence, les amendements nos 709 rectifié, 915, 1038, 259 rectifié bis, 109 rectifié quinquies, 311 rectifié bis, 338 rectifié ter, 339 rectifié ter, 448, 543 rectifié bis et 861 n’ont plus d’objet.
Je mets aux voix l’amendement n° 148.
(L’amendement est adopté.)
Mme le président. Je mets aux voix l’article 13 quinquies, modifié.
(L’article 13 quinquies est adopté.)
Article additionnel après l’article 13 quinquies
Mme le président. L’amendement n° 596 rectifié ter, présenté par MM. Lozach, Kanner, P. Joly, Montaugé, Tissot et Kerrouche, Mmes Meunier et Artigalas, MM. Bourgi, Fichet, Magner, Redon-Sarrazy et Gillé, Mme Jasmin, M. Vaugrenard, Mmes Van Heghe, G. Jourda, Monier, Briquet, Bonnefoy et Le Houerou et M. Dagbert, est ainsi libellé :
Après l’article 13 quinquies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – À la première phrase du premier alinéa de l’article 1679 A du code général des impôts, après les mots : « utilité publique, », sont insérés les mots : « les sociétés coopératives d’intérêt collectif gérant un centre de santé en application de l’article L. 6323-1-3 du code de la santé publique ».
II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
III. – La perte de recettes résultant pour les collectivités territoriales du I est compensée, à due concurrence, par une majoration de la dotation globale de fonctionnement.
IV. – La perte de recettes résultant pour l’État du paragraphe précédent est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Michelle Meunier.
Mme Michelle Meunier. C’est au nom de mon collègue Jean-Jacques Lozach, qui en est le premier signataire, que je présente cet amendement visant à développer les centres de santé.
Il s’agit d’une réponse alternative à l’organisation territoriale des soins à la fois innovante et souvent intéressante dans les zones de désertification médicale.
Ces centres sont des lieux de santé de proximité qui assurent des activités de soins sans hébergement et participent à des actions de santé publique, de prévention et d’éducation pour la santé. Une approche globale de la santé est favorisée autour des médecins, de l’ensemble des professionnels médicaux et paramédicaux, des patients et des citoyens. La gestion administrative est mutualisée.
À l’heure actuelle, ces centres sont gérés sous la forme associative ou relèvent des collectivités locales. Pourtant, en 2016, la loi de modernisation de notre système de santé a permis la création de centres de santé sous la forme de sociétés coopératives d’intérêt collectif (SCIC). Cette possibilité a ensuite été précisée par l’ordonnance du 12 janvier 2018.
La gouvernance multipartite du statut coopératif permet d’associer les professionnels de santé, le personnel et les patients à la gestion, instaurant ainsi une démocratie sanitaire locale tout à fait intéressante.
Dans la réalité, il est nécessaire de compléter le cadre législatif en adoptant des dispositifs fiscaux assurant l’équilibre financier de ces entreprises coopératives non lucratives. Nous proposons donc d’aligner leur cadre fiscal sur celui des associations gérant ces mêmes centres. En effet, sous statut coopératif, les centres de santé permettent le bénéfice de la décote pour la taxe sur les salaires dont bénéficient les associations, soit, en 2020, un montant de 21 044 euros par établissement.
Cet amendement vise donc à instaurer deux dispositions qui permettront aux centres de santés établis sous statut de SCIC d’atteindre leur équilibre financier, condition nécessaire de leur développement.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. La commission pensait que cet amendement serait déclaré irrecevable et ne l’a donc pas examiné.
Il s’agit d’une exonération de taxe sur les salaires pour les centres de santé coopératifs… Je m’en remettrai à la sagesse du Sénat sur cette question pour ne pas outrepasser mon pouvoir.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre délégué. Initialement, cet amendement avait pour objet d’exonérer les centres de santé de la cotisation foncière des entreprises et constituait certainement un cavalier. Il a été rectifié pour viser la taxe sur les salaires.
Le statut de société coopérative d’intérêt collectif constitue une forme sociale commerciale spécifique. C’est l’ordonnance du 12 janvier 2018 relative aux conditions de création et de fonctionnement des centres de santé qui a permis à ces derniers de se constituer sous la forme de SCIC.
Ces centres de santé, comme tous les acteurs du secteur hospitalier et médico-social, sont soumis à la taxe sur les salaires. Compte tenu de leur forme juridique, ils ne peuvent bénéficier de l’abattement de cotisations de 21 044 euros auquel sont éligibles les associations relevant de la loi de 1901.
Je crois savoir l’importance des centres de santé et je comprends l’intérêt, pour eux, d’adopter un statut coopératif. Toutefois, il n’est pas envisageable pour nous d’étendre à leur bénéfice l’abattement de la taxe sur les salaires qui vise principalement les organismes à but non lucratif dans la mesure où les SCIC ne sont pas spécifiquement des organismes à but non lucratif.
Une telle extension à des structures constituées sous une forme commerciale, certes particulière, fragiliserait le mécanisme au regard du principe d’égalité devant les charges publiques et pourrait créer des distorsions de concurrence vis-à-vis d’employeurs qui n’ont pas cette forme juridique, mais qui réalisent des activités identiques et dans des conditions comparables, comme les établissements de santé publics ou privés.
Les exonérations en matière fiscale doivent, selon nous, viser des objectifs spécifiques sans porter atteinte à la cohérence des prélèvements. Le Gouvernement est donc défavorable à cet amendement dont l’adoption pourrait entraîner des distorsions de concurrence.
Mme le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. L’avis du Gouvernement me paraît assez clair et je réitère mon avis de sagesse. À titre personnel, je suis tenté de suivre le Gouvernement…
Mme le président. Je mets aux voix l’amendement n° 596 rectifié ter.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme le président. Mes chers collègues, si la commission et le Gouvernement en sont d’accord, je vous propose de prolonger nos débats jusqu’à treize heures trente.
La parole est à M. le ministre délégué.
M. Olivier Dussopt, ministre délégué. Madame la présidente, le Gouvernement est par définition à la disposition du Parlement et la question de mon accord ne se pose pas.
Toutefois, ayant un engagement qu’il me serait difficile de repousser, accepteriez-vous de suspendre la séance entre treize heures vingt et treize heures vingt-cinq, afin de me permettre de gagner quelques précieuses minutes ?
Mme le président. Nous prolongerons donc nos débats jusqu’à treize heures vingt, monsieur le ministre délégué.
M. Bruno Retailleau. Merci, monsieur le ministre ! (Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.)
Article 13 sexies (nouveau)
I. – Après le 5° du C du V de l’article 8 de la loi n° 2017-1836 du 30 décembre 2017 de financement de la sécurité sociale pour 2018, il est inséré un 5° bis ainsi rédigé :
« 5° bis À la fraction de revenus mentionnés au 7° du II de l’article L. 136-7 du code de la sécurité sociale attachés aux sommes versées antérieurement au 1er janvier 2018, acquise ou constatée avant la date du transfert prévu au 6° du I et aux IV et VI de l’article L. 224-40 du code monétaire et financier ou de la transformation prévue au V du même article L. 224-40 d’un plan d’épargne pour la retraite collectif mentionné à l’article L. 3334-1 du code du travail vers un plan d’épargne retraite d’entreprise collectif mentionné à l’article L. 224-14 du code monétaire et financier, lorsque ce transfert est opéré avant le 1er janvier 2023 ; ».
II. – La fraction de revenus mentionnée au 5° bis du C du V de l’article 8 de la loi n° 2017-1836 du 30 décembre 2017 de financement de la sécurité sociale pour 2018, les sommes versées auxquelles elles se rattachent, les années de leur constatation ainsi que les montants des prélèvements sociaux sur les revenus du capital qui s’y attachent, tels que calculés en application du même 5° bis, sont consignés par l’assureur ou le gestionnaire du contrat.
En cas de changement d’assureur ou de gestionnaire, l’assureur ou le gestionnaire d’origine communique à l’assureur ou au gestionnaire destinataire les informations mentionnées au premier alinéa du présent II.
Mme le président. L’amendement n° 913 rectifié, présenté par Mme Poncet Monge, M. Benarroche, Mme Benbassa, M. Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon et Mme Taillé-Polian, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
L’article 8 de la loi n° 2017-1836 du 30 décembre 2017 de financement de la sécurité sociale pour 2018 est abrogé.
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Mme Raymonde Poncet Monge. Cet amendement, qui est peut-être mal placé dans la mesure où il opère un petit retour en arrière, vise à mettre fin à l’allégement des cotisations patronales d’assurance maladie au titre du CICE.
Cet allégement représente une perte de recettes annuelle de 22 milliards d’euros pour l’assurance maladie. Compensé en partie, il est accordé aux entreprises sans contrepartie. Malgré son coût, ce dispositif s’est révélé tout à fait inopérant. Le dernier rapport d’évaluation de France Stratégie fait état de seulement 100 000 emplois créés entre 2013 et 2017 pour des dépenses publiques annuelles de 20 milliards d’euros. Je n’ose vous rappeler la promesse d’un dirigeant patronal de créer un million d’emplois…
Alléger sans contrepartie, sans condition, c’est le plus court chemin vers l’effet d’aubaine ; et l’effet d’aubaine, c’est le plus court chemin vers l’inefficacité. En tout état de cause, il aurait fallu demander des contreparties aux entreprises.
En période normale, le « toujours plus » d’allégements de cotisations sociales a un soubassement idéologique, celui du coût du seul facteur travail, et un point aveugle, celui du coût du capital, notamment du capital financier.
Nous avons des propositions pour taxer le capital, et bien sûr le capital financier, avec un rendement bien supérieur. Le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires a aussi des propositions à faire en matière de fiscalité écologique et environnementale. Il ne souscrit absolument pas à ces allégements sans aucune conditionnalité, synonymes d’effet d’aubaine et d’inefficacité.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. La commission est défavorable à cet amendement. Nous avons déjà débattu de cette question : une telle abrogation entraînerait une forte augmentation du coût du travail.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme le président. Je mets aux voix l’article 13 sexies.
(L’article 13 sexies est adopté.)
Articles additionnels après l’article 13 sexies
Mme le président. Je suis saisie de cinq amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 657 rectifié bis, présenté par Mmes Renaud-Garabedian, Garriaud-Maylam et Gruny, MM. D. Laurent, de Nicolaÿ, Houpert, Sido, H. Leroy, Rapin, Belin et Charon et Mme Raimond-Pavero, est ainsi libellé :
Après l’article 13 sexies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° L’article L. 136-6 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa du I, les mots « fiscalement domiciliées en France au sens de l’article 4 B du code général des impôts » sont remplacés par les mots « qui sont à la fois redevables de l’impôt sur le revenu en France à raison de certains de leurs revenus et simultanément assujettis à quelque titre que ce soit à un régime obligatoire français d’assurance-maladie » ;
b) Les I bis et I ter sont abrogés ;
c) À la première phrase du premier alinéa du III, la première occurrence du mot : « à » est remplacée par le mot : « et » ;
2° L’article L. 136-7 est ainsi modifié :
a) Le I est ainsi modifié :
- au premier alinéa, les mots : « fiscalement domiciliées en France au sens de l’article 4 B du code général des impôts » sont remplacés par les mots : « qui sont à la fois redevables de l’impôt sur le revenu en France à raison de certains de leurs revenus et simultanément assujettis, à quelque titre que ce soit, à un régime obligatoire français d’assurance-maladie » ;
- à la première phrase du 1°, les mots : « fiscalement domiciliées en France au sens de l’article 4 B du code général des impôts » sont remplacés par les mots : « qui sont à la fois redevables de l’impôt sur le revenu en France, à raison de l’origine de certains de leurs revenus et simultanément assujettis à un régime obligatoire français d’assurance-maladie » ;
b) Les I bis et I ter sont abrogés ;
c) Le deuxième alinéa du VI est supprimé.
II. – L’ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale est ainsi modifiée :
1° Au premier alinéa du I de l’article 15, les références : « aux I et I bis » sont remplacées par la référence : « au I » ;
2° À la première phrase du I de l’article 16, les références : « aux I et I bis » sont remplacées par la référence : « au I ».
III. – Le 1° du I s’applique aux revenus perçus à compter du 1er janvier 2021.
IV. – Le 1° du même I s’applique aux plus-values réalisées au titre des cessions intervenues à compter du 1er janvier 2021.
V. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Évelyne Renaud-Garabedian.
Mme Évelyne Renaud-Garabedian. Depuis 2012, les revenus perçus en France par des non-résidents, qu’il s’agisse de revenus fonciers ou de plus-values immobilières, sont assujettis à des prélèvements sociaux alors même que ces non-résidents ne bénéficient d’aucune couverture sociale.
La Cour de justice de l’Union européenne a considéré que cette imposition n’était pas conforme au droit européen. La loi de financement de la sécurité sociale pour 2019 a donc exonéré de cotisation sociale généralisée (CSG) et de contribution pour le remboursement de la dette sociale (CRDS) les non-résidents assujettis payant des cotisations sociales dans un pays de l’Union européenne, de l’Espace économique européen et en Suisse.
Pour autant, les non-résidents continuent d’être assujettis à l’imposition à hauteur de 17,2 % et paient également, dans les pays de résidence, une cotisation de sécurité sociale alors qu’ils ont besoin de cette couverture.
Cette situation est à l’origine d’une inégalité fiscale très importante entre nos compatriotes résidents à l’étranger. On a ainsi créé, monsieur le ministre, deux catégories de non-résidents : les Européens et les autres.
Cet amendement vise notamment à exonérer totalement les non-résidents du paiement de la CSG et de la CRDS sur les revenus du patrimoine, quelle que soit leur situation géographique.
Monsieur le ministre, je crains que nous ne soyons contraints de discuter de cette question tous les ans : tant que le Gouvernement n’aura pas compris qu’il faut exonérer les non-résidents du paiement de ces prélèvements sociaux, nous n’arriverons pas à trouver de solution.
Mme le président. L’amendement n° 453 rectifié bis, présenté par MM. Yung, Iacovelli, Buis et Hassani, Mme Schillinger et MM. Dennemont et Patient, est ainsi libellé :
Après l’article 13 sexies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° L’article L. 136-6 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa du I, après le mot : « impôts », sont insérés les mots : « et à la charge, à quelque titre que ce soit, d’un régime obligatoire de sécurité sociale français » ;
b) Le I bis est complété par les mots : « et qui sont à la charge, à quelque titre que ce soit, d’un régime obligatoire de sécurité sociale français » ;
c) Le I ter est abrogé ;
2° L’article L. 136-7 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa du I, après le mot : « impôts », sont insérés les mots : « et à la charge, à quelque titre que ce soit, d’un régime obligatoire de sécurité sociale français » ;
b) À la première phrase du 1° du I, après le mot : « impôts », sont insérés les mots : « et à la charge, à quelque titre que ce soit, d’un régime obligatoire de sécurité sociale français » ;
c) Le I bis est complété par les mots : « qui sont à la charge, à quelque titre que ce soit, d’un régime obligatoire de sécurité sociale français » ;
d) Le I ter est abrogé.
II. – L’ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale est ainsi modifiée :
1° Le premier alinéa du I de l’article 15 est complété par les mots : « qui sont à la charge, à quelque titre que ce soit, d’un régime obligatoire de sécurité sociale français » ;
2° La première phrase du I de l’article 16 est ainsi modifiée :
a) Après la première occurrence du mot : « sociale », sont insérés les mots : « et payés à des personnes physiques à la charge, à quelque titre que ce soit, d’un régime obligatoire de sécurité sociale français, » ;
b) Les mots : « et de ceux perçus par les personnes mentionnées au I ter du même article L. 136-7 » sont supprimés.
III. – 1° Le 1° du I et le 1° du II s’appliquent aux revenus perçus à compter du 1er janvier 2021 ;
2° Le 2° du I et le 2° du II s’appliquent aux plus-values réalisées au titre des cessions intervenues à compter du 1er janvier 2021.
IV. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale des I à III est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Richard Yung.
M. Richard Yung. Cet amendement revient chaque année, sans que nous arrivions à avancer.
Les choses sont claires : une décision de la Cour de justice de l’Union européenne exonère de CSG et de CRDS les résidents de l’Union européenne, de l’Espace économique européen et de la Suisse. Mais cette décision ne s’applique pas en dehors de l’Union européenne, alors même qu’il s’agit de la même situation, ce qui entraîne une injustice fiscale tout à fait déplorable.
Je ne souscris pas au dispositif proposé par Mme Renaud-Garabedian qui rend cumulatifs les critères de résidence et d’affiliation au régime obligatoire français. Ce n’est pas une bonne chose : un tel dispositif aurait pour effet d’exonérer de CSG et de CRDS les revenus immobiliers de tous les non-résidents, y compris ceux qui relèvent d’un régime obligatoire de sécurité sociale français. Concrètement, cela reviendrait à exonérer les personnes qui ont effectué toute leur carrière professionnelle en France et qui s’expatrient en Espagne ou au Maroc, par exemple, au moment de leur retraite.
La solution de M. Cadic n’est pas non plus satisfaisante, puisqu’il propose non seulement d’exonérer de CSG et de CRDS les non-résidents qui sont à la charge d’un régime obligatoire de sécurité sociale français, mais aussi de remettre en cause l’application de la jurisprudence dite de Ruyter et d’assujettir de nouveau à la CSG des résidents qui relèvent du régime obligatoire de sécurité sociale d’un pays de l’Union européenne. Cette solution ne me semble pas très raisonnable.
Pour ces raisons, je vous propose d’adopter le présent amendement.
Mme le président. L’amendement n° 426 rectifié, présenté par MM. Cadic, Regnard et del Picchia, Mme Tetuanui, MM. Détraigne, Delahaye, Henno, Canevet, Kern et Cazabonne, Mmes Saint-Pé, Billon et Guidez, M. P. Martin, Mmes C. Fournier et Létard et MM. Poadja et Le Nay, est ainsi libellé :
Après l’article 13 sexies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° L’article L. 136-6 est ainsi modifié :
a) Le I bis et le I ter sont abrogés ;
b) À la première phrase du premier alinéa du III, la première occurrence du mot : « à » est remplacée par le mot : « et » ;
2° L’article L. 136-7 est ainsi modifié :
a) Le I bis et le I ter sont abrogés ;
b) Le second alinéa du VI est supprimé.
II. - L’ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale est ainsi modifiée :
1° Au premier alinéa du I de l’article 15, les références : « aux I et I bis » sont remplacées par la référence : « au I » ;
2° À la première phrase du I de l’article 16, les références : « aux I et I bis » sont remplacées par la référence : « au I ».
III. - Le 1° du I s’applique aux revenus perçus à compter du 1er janvier 2021.
IV. - Le 2° du même I s’applique aux plus-values réalisées au titre des cessions intervenues à compter du 1er janvier 2021.
V. - La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Damien Regnard.
M. Damien Regnard. Cet amendement, déposé par mon collègue Olivier Cadic, sénateur des Français établis hors de France, vise à exonérer de prélèvements sociaux – CSG et CRDS – sur les revenus du patrimoine de source française l’ensemble des non-résidents et non-affiliés à un régime français de sécurité sociale, sans distinction géographique.
Cela fait six ans que nous défendons cette idée chaque année dans l’hémicycle. La Cour de justice de l’Union européenne a d’ailleurs jugé cette disposition contraire au droit européen.
La loi du 22 décembre 2018 de financement de la sécurité sociale pour 2019 a abrogé ces cotisations pour les seuls résidents de l’Union européenne, de l’Espace économique européen et de la Suisse. Cette fiscalité à deux vitesses est vécue comme une terrible injustice par les Français de l’étranger demeurant assujettis. Surtout, elle est constitutive d’une discrimination violant le principe constitutionnel d’égalité devant la loi fiscale.
Cet amendement du sénateur Cadic vise donc à mettre le droit positif en cohérence avec nos principes constitutionnels en exonérant de prélèvements sociaux – CSG, CRDS et autres – sur les revenus du patrimoine de source française l’ensemble des 3,5 millions de Français non résidents non affiliés à un régime français de sécurité sociale, sans distinction géographique.
Je terminerai en soulignant que ces cinq amendements en discussion commune ont été cosignés par plus d’une centaine de sénateurs issus de différents groupes. Il est temps que nos votes soient en adéquation avec les amendements que nous cosignons.
Mme le président. L’amendement n° 792 rectifié bis, présenté par MM. Leconte et Jomier, Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Jasmin, Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Antiste et J. Bigot, Mme Bonnefoy, MM. Bouad, Durain et Gillé, Mme Harribey, M. P. Joly, Mmes G. Jourda et Lepage, MM. Lozach, Lurel, Marie et Mérillou, Mme Monier, MM. Montaugé et Pla, Mme S. Robert, MM. Sueur, Temal et Tissot, Mmes Préville, Briquet et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 13 sexies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° L’article L. 136-6 est ainsi modifié :
a) Le I ter est ainsi rédigé :
« I ter. – Par dérogation aux I et I bis, ne sont pas redevables de la contribution les personnes qui ne sont pas à la charge d’un régime obligatoire de sécurité sociale français. » ;
b) À la première phase du premier alinéa du III, la première occurrence du mot : « à » est remplacée par le mot : « et ».
II. – L’ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale est ainsi modifiée :
1° Le dernier alinéa du I de l’article 15 est supprimé ;
2° À la première phrase du I de l’article 16, les références : « aux I et I bis » sont remplacées par la référence : « au I ».
III. – Le 1° du I du présent article s’applique aux revenus perçus à compter du 1er janvier 2012.
IV. – Le 1° du II du même article s’applique aux revenus perçus à compter du 1er janvier 2012.
V. – Le 2° du même II s’applique aux plus-values réalisées au titre des cessions intervenues à compter du 1er janvier 2012.
VI. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale des I à IV est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Monique Lubin.
Mme Monique Lubin. Il s’agit d’un amendement déposé par notre collègue Jean-Yves Leconte.
Le Gouvernement a proposé dans le PLFSS pour 2019 la suppression de l’assujettissement à la CSG et à la CRDS des revenus du capital des personnes non résidentes fiscales, mais installées dans l’Espace économique européen et en Suisse.
En effet, le principe d’unicité de la législation applicable posé par l’article 11 du règlement n° 883/2004 engendrait pour l’État un risque contentieux important si les dispositions existantes n’étaient pas modifiées.
Toutefois, la subsistance d’un impôt visant exclusivement certains non-résidents et non d’autres en fonction de leur lieu de résidence heurte le principe constitutionnel d’égalité devant l’impôt.
Il est donc proposé d’étendre la suppression de l’assujettissement à l’ensemble des non-résidents non assujettis à un régime de protection sociale français, comme le réclament nombre de Français non installés dans l’Espace économique européen ou en Suisse et devant faire face à ce prélèvement injuste.
Rappelons enfin que cet amendement a été voté en première lecture au Sénat comme article 21 de la proposition de loi relative aux Français établis hors de France présentée par le sénateur Retailleau. Il est donc cohérent que cet amendement soit aussi voté dans le cadre de ce PLFSS.
Mme le président. L’amendement n° 90 rectifié ter, présenté par Mme Deromedi, MM. Retailleau, Frassa et del Picchia, Mme Garriaud-Maylam, MM. Le Gleut et Regnard, Mmes Lavarde et Belrhiti, MM. Karoutchi et Pellevat, Mme L. Darcos, MM. D. Laurent et Grand, Mme Berthet, MM. Bonne, Bazin et Courtial, Mmes Dumas et Raimond-Pavero, M. Lefèvre, Mmes Lassarade, Dumont et Gruny, M. Dallier, Mme Procaccia, M. Panunzi, Mme Malet, MM. Daubresse et Bonhomme, Mme Canayer, MM. Piednoir, Charon, Chaize et Cuypers, Mmes Thomas et Lherbier, M. Milon, Mme M. Mercier, MM. Bouchet, B. Fournier et de Nicolaÿ, Mme Boulay-Espéronnier, MM. Darnaud, Babary, H. Leroy, Bouloux et Rapin, Mme Lopez, M. Gremillet et Mme Di Folco, est ainsi libellé :
Après l’article 13 sexies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Après le I ter de l’article L. 136-6, il est inséré un I quater ainsi rédigé :
« I quater. – Par dérogation aux I et I bis du présent article, ne sont pas redevables de la contribution les personnes, fiscalement domiciliées dans un pays autre que ceux mentionnés au premier alinéa du I ter, qui relèvent en matière d’assurance maladie d’une législation d’un pays étranger et qui ne sont pas à la charge d’un régime obligatoire de sécurité sociale français.
« Pour l’application du premier alinéa du présent I quater aux gains mentionnés à l’article 150-0 B bis du code général des impôts et aux plus-values mentionnées au I de l’article 150-0 B ter du même code, la condition d’affiliation à un autre régime obligatoire de sécurité sociale s’apprécie à la date de réalisation de ces gains ou plus-values. » ;
2° Après le I ter de l’article L. 136-7, il est inséré un I quater ainsi rédigé :
« I quater. – Par dérogation aux I et I bis, ne sont pas redevables de la contribution les personnes, fiscalement domiciliées dans un pays autre que ceux mentionnés au premier alinéa du I ter, qui relèvent en matière d’assurance maladie d’une législation d’un pays étranger et qui ne sont pas à la charge d’un régime obligatoire de sécurité sociale français.
« L’établissement payeur mentionné au 1 du IV ne prélève pas la contribution assise sur les revenus de placement dès lors que les personnes titulaires de ces revenus justifient, selon des modalités définies par décret, des conditions définies au premier alinéa du présent I quater.
« En cas de prélèvement indu par l’établissement payeur, ce dernier peut restituer le trop-perçu à la personne concernée et régulariser l’opération sur sa déclaration ou la personne concernée peut solliciter auprès de l’administration fiscale la restitution de la contribution prélevée par l’établissement payeur.
« La contribution assise sur les plus-values mentionnées au 2° du I n’est pas due dès lors que les personnes titulaires de ces plus-values justifient, selon des modalités définies par décret, des conditions définies au premier alinéa du présent I quater. »
II. – À la première phrase du I de l’article 16 de l’ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale, les mots : « au I ter » sont remplacés par les mots : « aux Ier ter et Ier quater ».
III. – Le présent article s’applique aux revenus perçus à compter du 1er janvier 2021 et aux plus-values réalisées au titre de cessions intervenues à compter de cette même date.
IV. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Jacky Deromedi.
Mme Jacky Deromedi. Comme ceux de mes collègues qui viennent de s’exprimer, j’ai défendu cet amendement un certain nombre de fois. Il a même été voté lors de l’adoption de la proposition de loi de Bruno Retailleau, le 19 mai 2020, dont il est devenu l’article 21, sans aucune opposition.
Je suis au regret d’allonger les débats, mais je souhaite revenir sur quelques points : la CSG-CRDS, c’est 17,2 % dont 9,2 % pour la CSG, 0,5 % pour la CRDS et 7,5 % pour le prélèvement de solidarité. Or les Français résidant hors de France ne bénéficient ni de la sécurité sociale, ni de l’école gratuite, ni de l’assurance chômage, ni des allocations familiales, ni de la retraite.
En revanche, ils payent des impôts sur leurs salaires, retraites et pensions d’origine française, ce qui est normal. Ils paient également des impôts sur leurs revenus immobiliers, c’est-à-dire sur l’appartement qu’ils ont en France et qu’ils ont loué pour rembourser leur crédit en attendant qu’il puisse leur servir à payer leur retraite.
Ils payent donc un impôt de 30 % sur leurs revenus français, ce qui, encore une fois, est normal. Cependant, on essaie d’ajouter 17,2 % à ce taux, ce qui représente un prélèvement total de 47,2 %. Alors qu’ils ne bénéficient de rien en France, leur revenu est tout de même réduit de moitié.
Les Français résidant à l’étranger dans l’Union européenne, en Suisse et dans l’Espace économique européen ont dû aller devant la Cour de justice de l’Union européenne pour obtenir d’être exonérés de CSG-CRDS. Mais les Français de l’étranger résidant hors de l’Union européenne, de la Suisse et de l’Espace économique européen ne sont toujours pas entendus. C’est une injustice flagrante, une situation totalement discriminatoire.
Je compte donc sur vous tous, mes chers collègues, pour nous aider à réparer cette injustice et voter la suppression de la CSG-CRDS sur les revenus mobiliers de tous les Français résidant hors de France.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission sur ces cinq amendements ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. La position de la commission a toujours été constante sur cette question dont nous ne débattons effectivement pas pour la première fois.
Nous sommes plutôt opposés à ces amendements, même si une proposition de loi que M. Retailleau connaît bien et qui porte exactement sur le même sujet a été votée par le Sénat.
Il faut être très clair : si ces amendements ont été déposés par nos collègues représentant les Français de l’étranger, ils ne concernent pas uniquement les Français, mais tous les non-résidents et tous les revenus du patrimoine et des produits de placements réalisés en France par des non-résidents.
Hier, notre collègue Laurent Duplomb évoquait les achats de terres agricoles par des étrangers. L’adoption de ces amendements reviendrait donc à exonérer les revenus tirés de ces terres par des non-résidents ou ceux, par exemple, tirés des placements dans des immeubles des beaux quartiers de Paris.
Pour les Français résidant à l’étranger, la commission a toujours considéré que cette question ne peut se régler que par la négociation de règles relatives aux doubles impositions, comme cela a été fait avec les États-Unis, ou par le renoncement de la France à une partie de sa fiscalité, qui coûterait 300 millions d’euros.
Mme Catherine Procaccia. C’est rien du tout !
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Vous évoquez un prélèvement sans contrepartie. Or la CSG n’ouvre aucun droit à la sécurité sociale. Aucune prestation n’est servie en contrepartie de la CSG, qui est un impôt pesant sur tous les revenus, ceux des Français résidant en France comme ceux des non-résidents, pour peu qu’ils aient un patrimoine en France.
Vous parlez également d’une inégalité de traitement entre les pays de l’Union européenne et ceux qui n’appartiennent pas à l’Union. La résidence dans un État membre est une différence de situation objective. La Cour de justice de l’Union européenne a émis un avis, que nous avons suivi.
La mesure que vous soutenez irait totalement à rebours des tentatives visant à taxer les revenus réalisés en France et à lutter contre le rétrécissement de notre base fiscale.
C’est la raison pour laquelle la commission des affaires sociales, qui a toujours émis un avis défavorable sur ces différentes propositions, reste fidèle à sa position. Au Sénat de se déterminer.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre délégué. Le Gouvernement est également défavorable à ces amendements, pour les mêmes raisons que celles qui viennent d’être évoquées par M. le rapporteur général.
J’ajoute que la situation particulière des contribuables ou assujettis résidant au sein de l’Union européenne a été créée en application d’une décision de la Cour de justice de l’Union européenne, laquelle, vous l’avez bien compris, ne relevait pas d’une initiative du Gouvernement.
Mme Évelyne Renaud-Garabedian l’a dit, c’est un débat que nous avons chaque année. Et chaque année, nous avons la même position, à savoir le respect de la jurisprudence de Ruyter, sans aller au-delà. C’est la raison pour laquelle le Gouvernement est défavorable à ces amendements.
Je saisis l’occasion qui m’est donnée, pour souligner une disposition adoptée à l’Assemblée nationale, qui devrait, me semble-t-il, satisfaire l’ensemble des parlementaires représentant les Français de l’étranger. Il s’agit de supprimer le moratoire adopté l’an dernier par le Parlement pour la mise en œuvre de la dernière étape de la réforme de l’impôt sur le revenu des contribuables non résidents, qui revenait à supprimer le caractère partiellement libératoire de la retenue à la source spécifique sur les revenus des non-résidents.
Nous avons en effet considéré que la suppression de cette retenue à la source partiellement libératoire aurait eu des conséquences très importantes et très négatives pour les revenus les plus bas, c’est-à-dire ceux compris entre 27 000 et 44 000 euros, la situation étant différente en deçà de ces montants.
Cette décision fait suite aux demandes unanimes des sénateurs représentant les Français de l’étranger. Elle a été adoptée au cours de l’examen d’un amendement de la députée Anne Genetet par l’Assemblée nationale.
Mme le président. La parole est à Mme Évelyne Renaud-Garabedian, pour explication de vote.
Mme Évelyne Renaud-Garabedian. Vous considérez, monsieur le rapporteur général, que la CSG est un impôt et non pas un prélèvement, alors même que la Cour de justice de l’Union européenne dit l’inverse. Le sujet n’est donc pas clos ! Je vous le rappelle, en 2014, le Conseil d’État a rendu un arrêt relatif à une vente d’immeuble en SCI par des non-résidents d’un pays tiers à l’Union européenne, qui devaient s’acquitter des prélèvements libératoires de 33,33 %. Les non-résidents européens ayant à payer un taux inférieur à celui des pays tiers, le Conseil d’État a estimé que cette différence de traitement constituait une restriction aux mouvements de capitaux. Il semble donc que le sujet puisse encore, monsieur le ministre, évoluer.
Mme le président. La parole est à M. Bruno Retailleau, pour explication de vote.
M. Bruno Retailleau. Je comprends la constance de la commission et de M. le rapporteur général. Mais c’est au nom de la même constance que je voterai ces amendements.
Nous les avons votés dans le cadre d’une proposition de loi. Je considère qu’il y a une discrimination en fonction de la géographie et que nos compatriotes résidant à l’étranger ont été, ces dernières années, les victimes d’une sorte de matraquage fiscal et social. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)
Mme le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 13 sexies, et les amendements nos 453 rectifié bis, 426 rectifié, 792 rectifié bis et 90 rectifié ter n’ont plus d’objet.
L’amendement n° 975, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 13 sexies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Aux cinquième et neuvième alinéas de l’article L. 137-11-1 du code de la sécurité sociale, le taux : « 21 % » est remplacé par le taux : « 34 % ».
La parole est à M. Fabien Gay.
M. Fabien Gay. Cet amendement vise à augmenter significativement la taxation des retraites chapeaux les plus importantes, supérieures à 24 000 euros par mois. Entre 1,5 million et 2 millions de Français perçoivent une retraite chapeau moyenne de 470 euros par mois.
Je citerai tout d’abord Nicolas Sarkozy, alors président de la République, qui disait en substance, pourfendant le capitalisme, que le salarié d’une entreprise n’avait pas droit à une retraite chapeau ou à un parachute doré.
Ensuite, le 18 novembre 2014, le ministre de l’économie Emmanuel Macron, affirmait, à l’Assemblée nationale, qu’il voulait la peau des retraites chapeaux, dénonçant des montants incompréhensibles et indéfendables.
Cet amendement, dont les dispositions sont loin d’être révolutionnaires, prévoit que, pour des montants supérieurs à 24 000 euros par mois, la contribution des bénéficiaires passe de 21 % à 34 %. Pour reprendre les mots du ministre de l’économie de 2014, la situation est incompréhensible. Je pense notamment aux retraites chapeaux qui ont fait débat, celles d’Airbus, de Carrefour, à hauteur, à l’époque, de 500 000 euros, ou à celle de Didier Lombard, ex-dirigeant de France Télécom, à hauteur de 346 000 euros.
Dans la période que nous traversons, il paraît juste socialement de demander à ceux qui touchent plus de 24 000 euros mensuels de retraite chapeau de contribuer plus fortement à l’effort national.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Défavorable.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme le président. L’amendement n° 497 rectifié, présenté par M. Canevet, Mme N. Goulet, MM. Bonnecarrère, Le Nay et Cadic, Mme Vermeillet, MM. Kern, Delcros et Moga, Mme Billon et MM. P. Martin, Longeot et Cazabonne, est ainsi libellé :
Après l’article 13 sexies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – L’article L. 137-15 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° À l’avant-dernier alinéa, les mots : « ne sont pas soumises à l’obligation de mettre en place un dispositif de participation des salariés aux résultats de l’entreprise prévue à l’article L. 3322-2 du même code » sont remplacés par les mots : « emploient moins de deux cent cinquante salariés » ;
2° Le dernier alinéa est supprimé.
II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Michel Canevet.
M. Michel Canevet. Notre collègue Fabien Gay vient à l’instant de fustiger les retraites chapeaux. Il y a d’autres façons d’améliorer la situation des salariés en ces temps de crise sanitaire et de crise économique conjuguées. Un certain nombre de dispositifs permettent aux salariés de bénéficier des fruits de l’expansion de l’entreprise, c’est-à-dire de la valeur ajoutée par l’entreprise. Je pense, d’une part, à l’intéressement et, d’autre part, à la participation aux résultats de l’entreprise.
On constate que, dans les entreprises de petite taille – les PME de moins de 250 salariés et, singulièrement, les entreprises de moins de 50 salariés – ces dispositions sont encore très peu usitées. Or on voit bien qu’il serait conforme à l’intérêt général que le pouvoir d’achat des uns et des autres soit amélioré, et ces outils sont des vecteurs intéressants pour agir en ce sens.
Ainsi, pour encourager le recours à ces dispositifs, je propose de supprimer le forfait social pour les entreprises de moins de 250 salariés s’agissant de la participation aux fruits de l’expansion de l’entreprise et de l’intéressement.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Je rejoins mon collègue Michel Canevet pour ce qui concerne l’intéressement, la participation, les plans d’épargne retraite, et tout ce qui peut favoriser le pouvoir d’achat des salariés dans les entreprises.
Mme Laurence Cohen. Taxer les profits, ce n’est pas le moment ! Revaloriser les salaires, ce n’est pas le moment !
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Cet amendement vise à supprimer le forfait social, qui constitue une ressource de la sécurité sociale et représente à ce titre un filet de sécurité. La question posée est celle de l’opportunité d’une telle mesure : le moment est-il bien choisi pour favoriser, par ce biais – il existe peut-être d’autres moyens – l’intéressement ?
Pour ma part, je suis favorable à la participation et au fait d’associer les travailleurs à la gestion de l’entreprise. (Exclamations ironiques sur les travées du groupe CRCE.) Je le sais, cette idée n’est pas partagée par tout le monde. Quoi qu’il en soit, c’est ma conviction, et ce depuis fort longtemps.
La commission demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, elle se verra contrainte d’émettre un avis défavorable.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre délégué. L’avis du Gouvernement vaudra également pour les deux amendements suivants, qui s’inscrivent dans la même logique.
Le Gouvernement et la majorité ont fait beaucoup pour favoriser la participation et l’intéressement : nous avons simplifié les procédures et diminué le forfait social et les prélèvements qui pèsent sur ces sommes. Nous considérons avoir atteint un niveau d’incitation compatible avec l’équilibre nécessaire en matière de recettes pour la sécurité sociale, rappelé par M. le rapporteur général.
Le Gouvernement est donc défavorable aux amendements nos 497 rectifié, 499 rectifié et 498 rectifié, considérant qu’il n’est pas utile, à ce stade, d’aller plus loin en matière d’intéressement et de participation.
M. Michel Canevet. Je retire l’amendement n° 497 rectifié, madame la présidente.
Mme le président. L’amendement n° 497 rectifié est retiré.
L’amendement n° 499 rectifié, présenté par M. Canevet, Mme N. Goulet, M. Bonnecarrère, Mme Saint-Pé, MM. Le Nay et Cadic, Mme Vermeillet, MM. Kern et Moga, Mme Billon et MM. P. Martin, Longeot et Cazabonne, est ainsi libellé :
Après l’article 13 sexies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° L’article L. 137-15 est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« Par dérogation au premier alinéa du présent article, ne sont pas assujettis à cette contribution les versements des entreprises prévus à l’article L. 3332-11 du code du travail lorsque l’entreprise abonde les versements annuels visés à l’article L. 3332-10 du même code réalisés par le salarié ou la personne mentionnée à l’article L. 3332-2 dudit code pour l’acquisition d’actions ou de certificats d’investissement émis par l’entreprise ou par une entreprise incluse dans le même périmètre de consolidation ou de combinaison des comptes au sens de l’article L. 3344-1 dudit code. Il en est de même pour l’abondement de l’employeur visé au 1° de l’article L. 3332-11 du code du travail.
« Par dérogation au premier alinéa du présent article, ne sont pas assujettis à cette contribution les versements des entreprises prévus au titre III du livre III du code du travail lorsque l’entreprise abonde les versements volontaires mentionnés au 1° de l’article L. 224-2 du code monétaire et financier quel que soit le support sur lequel ces sommes sont investies. » ;
2° L’article L. 137-16 est ainsi modifié :
a) Au troisième alinéa, les mots : « la contribution versée » sont remplacés par les mots : « les sommes versées au titre de la participation aux résultats de l’entreprise mentionnée au titre II du livre III de la troisième partie du code du travail et au titre de l’intéressement mentionné au titre Ier du même livre III » ;
b) Au dernier alinéa, après le mot : « financier », sont insérés les mots : « , à l’exception des versements des entreprises mentionnés au dernier alinéa de l’article L. 137-15 du présent code ».
II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Michel Canevet.
M. Michel Canevet. Cet amendement vise à exonérer du forfait social les versements des entreprises dans le cadre de l’abondement, par les salariés, des plans d’épargne retraite ou de l’achat de titres d’entreprises. Bien entendu, il s’agit d’inciter l’entreprise à faire un effort supplémentaire aux côtés du salarié.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Défavorable.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Michel Canevet. Je retire cet amendement, madame la présidente.
Mme le président. L’amendement n° 499 rectifié est retiré.
L’amendement n° 498 rectifié, présenté par M. Canevet, Mme N. Goulet, M. Bonnecarrère, Mme Saint-Pé, MM. Le Nay et Cadic, Mme Vermeillet, MM. Kern, Delcros et Moga, Mme Billon et MM. P. Martin, Longeot et Cazabonne, est ainsi libellé :
Après l’article 13 sexies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le troisième alinéa de l’article L. 137-16 du code de la sécurité sociale est complété par une phrase ainsi rédigée : « Il en est de même pour les versements effectués par l’entreprise mentionnés aux 1° et 2° de l’article L. 3332-11 du même code. »
II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Michel Canevet.
M. Michel Canevet. Je ne retirerai pas cet amendement, dont l’adoption ne coûterait rien.
Il s’agit de favoriser l’abondement par les entreprises des dispositifs dont bénéficient les salariés. S’ils ne peuvent pas avoir de retraite chapeau, il est indispensable qu’ils bénéficient d’une amélioration de leur pouvoir d’achat, et en particulier qu’ils puissent recueillir les fruits de l’expansion de l’entreprise.
Or, aujourd’hui, les versements de l’entreprise sont taxés à 20 %, alors que ceux des salariés le sont à 10 %. Pour inciter les entreprises à abonder ces dispositifs, il conviendrait de retenir un même taux de 10 %.
Une telle mesure ne coûte rien, puisque, si la taxation est trop élevée, les entreprises n’abonderont pas. Il faut donc trouver des systèmes permettant de favoriser l’abondement des entreprises. L’effort sera ainsi partagé. Dès lors que les entreprises abondent ces dispositifs de façon volontaire, elles apportent des financements : ainsi 10 % du forfait social viendra compléter chaque versement.
Monsieur le ministre, vous l’avez rappelé justement, un effort a été fait par le Gouvernement et le Parlement en faveur de l’intéressement et de la participation, notamment dans le cadre de la loi Pacte. Il convient toutefois de bien intégrer le fait que nous traversons actuellement une période particulièrement difficile : la crise sanitaire a un impact économique extrêmement fort sur les revenus de nombreux ménages. Il importe donc de trouver des solutions pour améliorer leur situation.
Par ailleurs, M. le rapporteur général l’a dit, les salariés devraient être beaucoup plus associés à la vie de l’entreprise. Je milite en ce sens. C’est la raison pour laquelle je maintiens cet amendement, dont l’adoption, je le répète, ne coûterait rien.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. J’entends bien les arguments de Michel Canevet. Si j’ai bien compris, l’amendement vise à faire passer le taux du forfait social de 20 % à 10 %. L’alignement sur le taux de l’abondement en actionnariat salarié ne paraît pas souhaitable, mettant sur le même plan l’amplification d’un effort du salarié et un complément de rémunération versé sur la seule initiative de l’entreprise. Je ne suis pas sûr que ce soit exactement ce que recherche Michel Canevet. En effet, si le salarié n’abonde pas, l’entreprise peut toujours le faire.
M. Michel Canevet. Non !
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Pour ma part, j’en reste à l’objectif fixé par la loi Pacte sur ce sujet. La commission demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, elle se verra contrainte d’émettre un avis défavorable.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre délégué. Le Gouvernement demande également le retrait de cet amendement ; à défaut, il émettra un avis défavorable.
Je le précise, cet amendement met en évidence une rédaction divergente entre le code du travail et le code de la sécurité sociale. Dans le cadre du projet de loi de finances, un amendement sera présenté à l’Assemblée nationale sur ce point, et vous aurez donc à débattre de ces dispositions dans le cadre de l’examen des articles non rattachés. Il s’agit de clarifier les deux rédactions, dans l’esprit de la loi Pacte, en précisant que les versements unilatéraux de l’employeur, qui sont possibles, M. le rapporteur l’a rappelé, bénéficient d’un taux réduit de 10 %.
Sur ce point, l’amendement sera donc satisfait, monsieur Canevet. En revanche, le champ de l’amendement allant au-delà de cette mesure, le Gouvernement en sollicite le retrait. À défaut, il se verra contraint d’émettre un avis défavorable.
Mme le président. L’amendement n° 966 rectifié, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 13 sexies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 241-2 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigé :
« Art. L. 241-2. – I. – Les ressources des assurances maladie, maternité, invalidité et décès sont également constituées par des cotisations assises sur :
« 1° Les avantages de retraite, soit qu’ils aient été financés en tout ou partie par une contribution de l’employeur, soit qu’ils aient donné lieu à rachat de cotisations ainsi que les avantages de retraite versés au titre des articles L. 381-1 et L. 742-1, à l’exclusion des bonifications ou majorations pour enfants autres que les annuités supplémentaires ;
« 2° Les allocations et revenus de remplacement mentionnés à l’article L. 131-2 ;
« 3° Le produit de la contribution additionnelle à la contribution sociale de solidarité à la charge des sociétés, prévue par l’article L. 245-13 ;
« 4° Le produit de la contribution mentionnée à l’article L. 137-15.
« Des cotisations forfaitaires peuvent être fixées par arrêté ministériel pour certaines catégories de travailleurs salariés ou assimilés.
« Les cotisations dues au titre des assurances maladie, maternité, invalidité et décès sont à la charge des employeurs et des travailleurs salariés et personnes assimilées ainsi que des titulaires des avantages de retraite et des allocations et revenus de remplacement mentionnés aux 1° et 2° du présent I.
« II. – Les ressources des assurances maladie, maternité, invalidité et décès sont en outre constituées par une fraction égale à 38,81 % du droit de consommation prévu à l’article 575 du code général des impôts. »
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. Le Gouvernement a transformé le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi en suppression définitive des cotisations des entreprises à la branche famille de la sécurité sociale.
Cette décision a entraîné la perte de 20 milliards d’euros de cotisations, la remise en cause de la parité des cotisations des employeurs et des travailleuses et travailleurs, renforçant ainsi la mainmise de l’État, qui vient compenser les pertes de recettes par la CSG.
Alors que le CICE a coûté près de 125 milliards d’euros, il serait temps de s’interroger sur l’utilité de ces exonérations de cotisations sociales pour l’emploi. En décembre 2018, l’Insee a estimé que la bascule du CICE vers l’exonération totale de cotisations patronales permettrait de créer 40 000 emplois en 2019, 70 000 en 2020 et 40 000 en 2021, soit 150 000 emplois supplémentaires pour 60 milliards d’euros en 2021. Cela représente tout de même 400 000 euros pour la création d’un seul emploi !
Le Conseil d’analyse économique avait d’ailleurs été bien plus sévère sur l’effet de la transformation du CICE. Permettez-moi de le citer : « Le gain pour les entreprises est nul, car seule change la forme. »
Pour toutes ces raisons, nous proposons de rétablir les cotisations patronales à la branche famille, les exonérations étant loin d’avoir démontré leur utilité, à l’inverse de la politique familiale de la sécurité sociale, qui pourrait, avec ces 20 milliards d’euros supplémentaires, financer par exemple 100 000 places en crèche, bien nécessaires et très attendues.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. La commission est défavorable à cet amendement.
Il s’agit de créer de nouvelles ressources pour l’assurance maladie. Nous sommes bien d’accord, madame Cohen, nous devrons nous atteler à la tâche consistant à trouver de nouvelles ressources ! Pour autant, je ne suis pas sûr que la mesure proposée par les auteurs de cet amendement constitue la bonne solution. Nous devrons rester cohérents, et ne pas exonérer sans compenser.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre délégué. Le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
J’ajoute, pour le compte rendu, même si Mme Cohen semble considérer que le fait est entendu, que cette exonération a été compensée à la sécurité sociale, ce qui explique la forte augmentation de la fraction de TVA versée. Vous ne partagez pas la logique de ce dispositif. Toutefois, je le répète, la perte de ressources pour la sécurité sociale a été compensée.
Mme le président. L’amendement n° 871 rectifié ter, présenté par MM. Mouiller, Retailleau et Favreau, Mme Deromedi, M. Frassa, Mme Puissat, MM. Hugonet et Cambon, Mme Dumas, MM. Grosperrin, Reichardt et Pellevat, Mme L. Darcos, MM. Bonne, D. Laurent et Savary, Mme Canayer, MM. Milon, Boré, Houpert, Panunzi, Le Gleut et B. Fournier, Mme Richer, M. Daubresse, Mme Deseyne, M. Calvet, Mme Thomas, MM. J.M. Boyer, Bascher, de Legge, Piednoir, H. Leroy, Somon, Rietmann, Bas, Duplomb et Brisson, Mme M. Mercier, M. Dallier, Mmes Bonfanti-Dossat et Gruny, M. Babary, Mmes Raimond-Pavero et Drexler, MM. Mandelli, Bonhomme, Saury, Bouloux, Chatillon et Laménie, Mmes Boulay-Espéronnier et Estrosi Sassone, M. Belin, Mme Lherbier et MM. Genet, Pointereau et Cuypers, est ainsi libellé :
Après l’article 13 sexies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Le premier alinéa de l’article L. 382-31 du code la sécurité sociale est complété par une phrase ainsi rédigée : « Toutefois, si ce dépassement résulte d’un cumul d’indemnités et que le montant de l’indemnité principale est inférieur à ce seuil, il n’est pas tenu compte de l’indemnité au montant le plus faible dans le calcul du montant total. »
II. - La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Philippe Mouiller.
M. Philippe Mouiller. L’article L. 382-31 du code de la sécurité sociale prévoit que les indemnités de fonction des élus des collectivités territoriales et des délégués de ces collectivités membres d’un EPCI sont assujetties aux cotisations de sécurité sociale lorsque leur montant total est supérieur à une fraction, fixée par décret, de la valeur du plafond de la sécurité sociale, ce afin de protéger les indemnités des élus des plus petites communes.
Parfois, ces mêmes élus, qui assurent la représentation de leur commune dans les intercommunalités perçoivent également des indemnités de fonction. Dans ce cas, le calcul de l’assujettissement se fait sur l’ensemble des indemnités.
La situation est donc compliquée, avec des effets de seuil qui font que, parfois, des maires de petites communes perçoivent un montant d’indemnités moindre que celui qu’ils auraient perçu en leur seule qualité de maire, alors qu’ils assurent des missions supplémentaires et doivent effectuer plus de déplacements.
Cet amendement aura un effet important, en particulier à la suite du vote intervenu l’année dernière visant à permettre l’augmentation des indemnités des maires des petites communes. Il vise à corriger ces effets de seuil.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. La commission s’en remet à la sagesse de la Haute Assemblée sur cet amendement, dont M. Mouiller vient d’expliquer l’intérêt pour les maires des petites communes.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre délégué. Le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement, dont l’adoption aurait pour conséquence de renforcer une inégalité de situation entre des niveaux et des éléments de rémunération.
Par ailleurs, une telle mesure priverait les élus en question des droits acquis par leurs cotisations, qui relèvent aussi de la protection du statut.
Mme le président. La parole est à Mme Corinne Féret, pour explication de vote.
Mme Corinne Féret. Je soutiendrai cet amendement. En effet, dans les petites communes du Calvados, les élus ont fait part de leur incompréhension. Après avoir salué l’augmentation possible des indemnités dans les petites communes, plusieurs d’entre eux se sont retrouvés, comme l’a expliqué notre collègue Philippe Mouiller, dans une situation inverse.
J’avais interpellé Mme la ministre Jacqueline Gourault sur ce sujet, mais j’espère que, par le vote de cet amendement, les choses pourront être corrigées.
Mme le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 13 sexies.
L’amendement n° 89 rectifié bis, présenté par Mmes Procaccia et Deroche, MM. Milon, Savary, Karoutchi, Cambon et Dallier, Mmes L. Darcos, Duranton, Noël et Lavarde, MM. D. Laurent et Reichardt, Mme Micouleau, MM. Houpert, Vogel, Charon, Lefèvre et Regnard, Mmes Deromedi et Puissat, MM. Gremillet et Le Gleut, Mmes Lassarade, M. Mercier, Raimond-Pavero et Gruny, M. Sol, Mmes Imbert, Malet, de Cidrac, Lopez et Eustache-Brinio, MM. Rapin, Piednoir et Frassa, Mmes Dumas et Canayer, M. Perrin, Mmes F. Gerbaud et Chauvin, MM. Sido et Brisson, Mme Berthet, M. Bascher et Mme Garriaud-Maylam, est ainsi libellé :
A. – Après l’article 13 sexies
I. - À titre expérimental et pendant une durée de trois ans à compter de l’entrée en vigueur de la présente loi, tout mineur âgé de seize ans révolus est attributaire d’un numéro d’identification valant, le cas échéant, immatriculation pour l’exercice à titre de travailleur indépendant au sens de l’article L. 631-1 du code de la sécurité sociale, jusqu’à son vingt-cinquième anniversaire et dans la limite de d’un chiffre d’affaires annuel ne dépassant pas 12 000 €, d’une activité soumise au régime défini à l’article 50-0 du code général des impôts.
Pour l’application du I de l’article L. 613-7 du code de la sécurité sociale, le taux global des cotisations et contributions de sécurité sociale dont sont redevables les travailleurs indépendants dont l’activité relève du premier alinéa du présent article est fixé à 5 %.
Les dispositions du présent article s’appliquent sans préjudice des dispositions de l’article 388-1-2 du code civil.
Le numéro d’identification est communiqué au mineur au moins deux mois avant son seizième anniversaire. À cette occasion, le mineur est informé de sa possibilité d’exercer une activité de travailleur indépendant dans les conditions prévues par les trois premiers alinéas du présent article ; il lui est précisé que, en cas de dépassement de la limite mentionnée au premier alinéa, et en tout état de cause à compter de son vingt-cinquième anniversaire, la poursuite de son activité sous le régime de l’article 50-0 du code général des impôts est subordonnée aux conditions d’immatriculation prévues par les lois et règlements et que le taux global des cotisations et contributions de sécurité sociale dont il est redevable à ce titre est celui fixé par le décret prévu au premier alinéa du I de l’article L. 631-1 du code de la sécurité sociale. Ces éléments relatifs à la poursuite de son activité à compter de son vingt-cinquième anniversaire lui sont rappelés au plus tard six mois avant cette échéance.
Six mois au moins avant le terme de l’expérimentation, le Gouvernement adresse au Parlement un rapport procédant à son évaluation.
Un décret en Conseil d’État fixe les modalités d’application du présent article.
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
III. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts
B. – En conséquence, faire précéder cet article d’une division additionnelle et de son intitulé ainsi rédigé :
Chapitre …
Encourager l’activité des jeunes et faciliter leur insertion sur le marché de l’emploi
La parole est à Mme Catherine Procaccia.
Mme Catherine Procaccia. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, cet amendement est le premier que je défends sur ce texte.
J’ai déposé une proposition de loi, cosignée par plus de cinquante personnes, visant à créer un statut de junior entrepreneur pour tous les jeunes de 16 ans à 25 ans.
La situation des jeunes par rapport à l’emploi étant vraiment très difficile, leur immatriculation immédiate, dès 16 ans, sous le statut de junior entrepreneur leur permettrait, s’ils en avaient envie, d’exercer une activité compatible avec leur statut d’étudiant ou d’apprenti.
Un tel dispositif se calque sur celui des autoentrepreneurs. Surtout, il s’inscrit dans le plan d’action gouvernemental en faveur des jeunes.
Ce statut induit des cotisations sociales moindres que celles des autoentrepreneurs, eu égard à un chiffre d’affaires bien inférieur.
J’espère que M. le ministre souscrira à cet amendement, dont je viens de résumer brièvement le dispositif.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Je partage tout à fait l’intention de notre collègue Catherine Procaccia, qui souhaite simplifier le régime de la microentreprise pour les jeunes, afin de favoriser leur esprit d’entreprise.
J’émets simplement un doute sur l’opportunité d’adopter une telle mesure par amendement. L’examen de la proposition de loi déposée par notre collègue permettrait de préciser et d’améliorer le dispositif, tout en recueillant le soutien du Gouvernement.
Néanmoins, la commission, qui souhaite favoriser l’expérience de l’entreprise par les jeunes, a émis un avis favorable sur cet amendement.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre délégué. Le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
Nous considérons que les taux proposés sont trop faibles en termes de constitution de droits. Par ailleurs, les efforts faits en matière de simplification des déclarations et des assujettissements pour des revenus dits annexes, tels qu’ils apparaissent à l’article 14, nous semblent plus opportuns à ce stade.
Mme le président. La parole est à Mme Monique Lubin, pour explication de vote.
Mme Monique Lubin. Ce sujet mérite d’être discuté.
Nous nous inscrivons en faux contre cette proposition. Tout d’abord, le statut d’autoentrepreneur est parfaitement discutable. Nous espérons avoir un jour une discussion sur ce sujet. Nous savons qu’il conduit à une précarité de plus en plus prégnante. À cet égard, je pense notamment aux livreurs.
Faire en sorte que l’accession à ce statut soit possible de plus en plus tôt tend à offrir de drôles de perspectives à nos jeunes. Bien que je ne doute pas des intentions de notre collègue, je suis totalement défavorable à la recette qu’elle propose.
Mme le président. La parole est à Mme Céline Brulin, pour explication de vote.
Mme Céline Brulin. Nous sommes également défavorables à cet amendement. Je vous rejoins, ma chère collègue, concernant l’alerte que vous lancez sur la manière dont les jeunes vivent et subissent la situation actuelle, qui est effectivement terrible. Toutefois, la réponse apportée ici n’est pas la bonne.
De nombreux dispositifs permettent d’ores et déjà de s’initier à l’autoentreprenariat. Par exemple, certains enseignements, dans les lycées ou dans le cadre d’initiatives périscolaires, incitent nos jeunes à devenir des entrepreneurs.
Je rejoins M. le rapporteur sur un point : il s’agit d’un débat de fond, que nous avons déjà abordé, d’ailleurs, dans l’hémicycle et qui ne devrait pas se faire au détour d’un amendement. Chaque fois, nous nous sommes retrouvés sur l’idée que nous vivons un changement de société important, qui voit, peu à peu, le salariat traditionnel remplacé par des statuts indépendants, avec des protections sociales extrêmement rabougries.
Par ailleurs, très rapidement, et peut-être de façon caricaturale, je souhaite insister sur le point suivant : l’immatriculation, même symbolique, même au travers d’une expérimentation, dès 16 ans, pour devenir travailleur indépendant signifie que, avant même de devenir des citoyens, des électeurs ou des assurés sociaux, nos jeunes seront des entrepreneurs. C’est un drôle de sens des priorités et une drôle de vision du monde d’après. (Mme Catherine Procaccia s’exclame.)
Cela mérite que nous nous penchions sur cette question. Je le rappelle, nos jeunes sont d’abord victimes de la précarité. Ce n’est pas leur rendre service que de l’amplifier.
Mme Catherine Deroche, président de la commission des affaires sociales. C’est toujours mieux qu’être au chômage !
Mme le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 13 sexies.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à treize heures trente, est reprise à quinze heures, sous la présidence de M. Gérard Larcher.)
PRÉSIDENCE DE M. Gérard Larcher
M. le président. La séance est reprise.
3
Questions d’actualité au Gouvernement
M. le président. L’ordre du jour appelle les réponses à des questions d’actualité au Gouvernement.
Mes chers collègues, je vous rappelle que notre séance est retransmise en direct sur Public Sénat et sur notre site internet.
Au nom du bureau du Sénat, j’appelle chacun de vous à observer, au cours de nos échanges, l’une des valeurs essentielles de notre institution : le respect, celui du temps comme celui des uns et des autres.
Je ne rappellerai pas les consignes sanitaires. J’indique seulement que les sorties de la salle des séances s’effectueront, pour les sénateurs, par les portes situées au pourtour de l’hémicycle ; quant aux membres du Gouvernement, ils prendront les portes de devant – pardonnez-moi cette allusion historique à des événements qui se sont déroulés à Rambouillet… (Sourires.)
vaccin contre la covid-19
M. le président. La parole est à Mme Véronique Guillotin, pour le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)
Mme Véronique Guillotin. Ma question s’adresse à M. le Premier ministre.
Un laboratoire pharmaceutique américain et son partenaire allemand ont annoncé lundi de premiers résultats très encourageants concernant les tests de leur vaccin contre la covid-19. Cette nouvelle est incontestablement une lueur d’espoir dans le quotidien très assombri où sont plongés nos concitoyens depuis le début de l’année.
Néanmoins, il faut rester prudent et rappeler que ces résultats sont des résultats intermédiaires ; un long processus est encore nécessaire avant une possible mise sur le marché. Cette attente, monsieur le Premier ministre, doit être synonyme d’anticipation.
Le conseil scientifique a publié, le 9 juillet dernier, une note stratégique sur la vaccination contre la covid-19. C’est précisément sur cette stratégie que je souhaite vous interroger.
Outre les défis de l’achat et de la production, nous en aurons plusieurs autres à relever, en matière de stockage et de distribution des doses, de mobilisation des personnels chargés de les administrer, mais aussi de définition des publics cibles. Il est clair en effet que, malgré les injonctions de certains, toute la population ne pourra pas être vaccinée tout de suite.
J’en viens par là même à une autre problématique : toute la population ne voudra pas être vaccinée. Les résistances sont importantes et les théories complotistes vont déjà bon train. Sans pédagogie, sans transparence, sans confiance, aucun vaccin ne viendra à bout de ce virus.
J’aimerais donc savoir quelle est, à ce stade, la stratégie vaccinale du Gouvernement. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État chargé de l’enfance et des familles.
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargé de l’enfance et des familles. Madame la sénatrice, les annonces faites par le laboratoire Pfizer et par son partenaire européen ont suscité – vous l’avez dit – une grande lueur d’espoir ; nous devons nous réjouir que des perspectives sur le front de la recherche s’offrent aujourd’hui à nous. Je tiens à le rappeler, dès le début de l’épidémie, le Président de la République, Emmanuel Macron, avait été l’un des moteurs, dans le cadre de l’Union européenne, pour qu’en termes de financement la recherche puisse aller le plus rapidement possible.
Pour autant, comme vous l’avez dit également, une grande prudence est de mise. Le laboratoire n’en est qu’à la phase 3 de l’évaluation et du test de ce vaccin. Un certain nombre de tests doivent encore être effectués dans les semaines et les mois à venir, notamment pour évaluer les effets secondaires éventuels du vaccin. Viendra ensuite le temps de la récolte des informations par les autorités sanitaires américaines puis européennes, avant une éventuelle mise sur le marché, la problématique devenant alors celle de la production du vaccin puis de sa distribution au sein de la population. Vous avez dû noter que l’Union européenne a d’ores et déjà précommandé 200 millions de doses de ce vaccin auprès du laboratoire Pfizer.
M. Roger Karoutchi. 300 millions, non ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Les questions que vous soulevez, madame la sénatrice, sont pertinentes.
D’une part – vous le savez probablement –, la Haute Autorité de santé a été saisie par le Gouvernement aux fins de formuler des recommandations quant à la stratégie que nous devrons adopter pour diffuser ce vaccin auprès de populations prioritaires parmi les Français.
D’autre part, comme vous l’avez très bien dit – souvenez-vous des débats que nous avions eus à l’occasion de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018 autour de l’extension de l’obligation de couverture vaccinale des enfants –, la question de l’acceptation sociale des vaccins pour nos concitoyens est importante. Nous devrons, vous comme nous, faire montre de pédagogie envers eux.
Pour ce qui est des aspects plus concrets, techniques et opérationnels, sachez que, en matière de stockage et de distribution, le Gouvernement est d’ores et déjà pleinement mobilisé. Nous engageons par exemple la commande de seringues et d’aiguilles ainsi que de réfrigérateurs à moins 80 degrés, puisque, vous le savez, les conditions de conservation du vaccin l’exigent. Toutes ces questions sont très complexes et nécessitent de travailler en amont. C’est ce que fait le Gouvernement.
M. le président. La parole est à Mme Véronique Guillotin, pour la réplique.
Mme Véronique Guillotin. Je vous remercie, monsieur le secrétaire d’État, de vos réponses. Je les entends et ne doute en aucun cas de votre sincérité. Mais on ne peut s’empêcher de penser aux pénuries de médicaments et de vaccins dont le rythme s’accélère maintenant depuis plusieurs années – ainsi des approvisionnements chaotiques du vaccin contre la grippe, alors même que l’enjeu était connu et la demande en forte augmentation.
Concernant la vaccination anti-covid-19, monsieur le secrétaire d’État, nous ne pouvons pas nous « louper », tant les conséquences sur la santé de nos concitoyens et sur l’économie de notre pays – vous l’avez dit – sont lourdes. Le défi est grand ; nous serons à vos côtés pour le relever. La situation est complexe, mais elle appelle un travail collectif que seule la concertation, dont le respect du Parlement fait partie, rendra possible. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE. – Mme Élisabeth Doineau ainsi que MM. Bernard Bonne et Alain Richard applaudissent également.)
renforcement du protocole sanitaire dans les lycées
M. le président. La parole est à M. Thomas Dossus, pour le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)
M. Thomas Dossus. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports.
Monsieur le ministre, en août dernier, vous affirmiez : « Nous sommes préparés à tout. » Depuis, tout le monde a pu constater que vous êtes plus dans l’improvisation que dans l’anticipation. Face à la deuxième vague, trois jours avant la rentrée de novembre, vous avez proposé un nouveau protocole sanitaire dit « renforcé ». Ce protocole s’est avéré inapplicable, voire inefficace, dans de nombreux établissements ; des lycéens et lycéennes se sont mobilisés et, après leur avoir répondu par la matraque, vous êtes tout de même convenu d’un ajustement substantiel en généralisant les demi-groupes dans les lycées.
Mardi, le corps enseignant du secondaire s’est mobilisé pour demander un soutien renforcé de l’État, notamment dans les collèges. Du point de vue de la sécurité des enseignants, en effet, comment expliquer que l’obligation d’enseignement présentiel soit fixée à 50 % dans les lycées et maintenue à 100 % dans les collèges ? Et comment allez-vous, à l’avenir, assurer cette sécurité ou pérenniser les demi-groupes, alors que 1 800 postes seront supprimés dans le secondaire à la rentrée de 2021, cette suppression n’étant compensée que par des heures supplémentaires ?
L’épidémie met à mal un certain nombre de piliers de notre République : celui de l’éducation, au fondement même de notre contrat social, est fortement touché.
Monsieur le ministre, les écologistes s’accordent avec la volonté de votre ministère d’assurer la continuité pédagogique, y compris dans la filière professionnelle ; la fermeture totale des établissements serait catastrophique. Mais votre gestion politique laisse encore trop d’enseignants, de personnels et d’élèves exposés à la pandémie. Ce que les enseignants et le personnel pédagogique appellent de leurs vœux, ce sont des mesures sanitaires spécifiques, mais surtout un soutien constant, notamment budgétaire, pour assurer pleinement leurs missions de service public dans un contexte certes complexe, mais appelé à durer.
Les solutions existent ; elles sont mises en œuvre dans d’autres pays : recrutement massif de personnels enseignants, allégement des classes, investissement dans l’aération, soutien matériel au téléenseignement et, surtout, généralisation au collège des classes en demi-groupes.
Monsieur le ministre, ma question est la suivante : allez-vous enfin rapidement mettre en œuvre des mesures pour assurer la sécurité de tous les enseignants, personnels et élèves ? (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports.
M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports. Monsieur le sénateur Dossus, à écouter votre intervention, je me dis que nous pourrions tomber d’accord si nous étions dans un pays plus consensuel : nous partageons, en effet, les mêmes objectifs. Vous l’avez dit : vous êtes pour que les élèves aillent à l’école. Vous avez dit aussi que vous étiez pour des protocoles sanitaires stricts. Un jour, des historiens feront le bilan de tout ce qui a été dit, dans les hémicycles des deux chambres, sur ces sujets ; nous verrons, alors, où est la cohérence… (Oh ! sur des travées des groupes GEST, SER, CRCE et Les Républicains.)
Mme Pascale Gruny. Quelle agressivité !
M. Jean-Michel Blanquer, ministre. Pour ce qui est du protocole sanitaire, il a été élaboré au mois de juillet. Il est public depuis lors. Sa logique est celle d’un curseur ; autrement dit, nous sommes capables d’en accentuer certains éléments ou, au contraire, de revenir en arrière en fonction de la situation épidémique. C’est ainsi qu’un « protocole sanitaire 1 » a été mis en œuvre en septembre et octobre. Ce protocole – je l’affirme – a été un succès. Il fait de nous l’un des rares pays qui ont réussi à faire revenir en classe tous leurs professeurs et tous leurs élèves. Regardez les courbes épidémiques récentes, y compris celles de Santé publique France : c’est pendant les périodes de vacances que la contamination est la plus forte. Et c’est justement en septembre et octobre que nous avons pu obtenir le succès dont je viens de parler, grâce au travail de tous – il ne s’agit pas de la personne du ministre : ce sont les un million de personnels de l’éducation nationale qui ont fait respecter le protocole sanitaire et ont permis ces résultats.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Tout va bien !
M. Jean-Michel Blanquer, ministre. Avec l’accélération de la circulation du virus, nous prenons, à la rentrée, des mesures plus strictes encore. Dès la rentrée, j’ai dit que des assouplissements seraient possibles ; nous avons d’ailleurs mis en œuvre de tels assouplissements la semaine dernière.
Évidemment, ce genre de situations présente des inconvénients, qu’il est assez facile, pour une opposition, de souligner. Néanmoins, sur le terrain, nous avons réussi à ce que la plupart des écoles, des collèges et des lycées puissent continuer à fonctionner de façon aussi normale que possible.
Vous dites qu’il y a une contestation ? Il y a eu 8,38 % de grévistes la semaine dernière. Je sais bien que vous pensez que, en période de crise sanitaire, il faut créer davantage de conflictualité politique ;… (Protestations sur les travées du groupe SER, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. Christian Cambon. Ces propos sont de trop !
M. Jean-Michel Blanquer, ministre. … j’aimerais, moi, qu’il y en ait moins et que vous regardiez les performances de la France, qui sont, au contraire de ce que vous dites, bien meilleures que celles de la plupart des pays comparables. (Protestations sur des travées des groupes GEST, SER et Les Républicains. – Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à M. Thomas Dossus, pour la réplique.
M. Thomas Dossus. Monsieur le ministre, les chiffres de Santé publique France sont bien supérieurs aux chiffres de votre ministère. Donnez-vous enfin les moyens budgétaires de faire appliquer les protocoles et d’assurer l’indispensable service public de l’éducation, « quoi qu’il en coûte » ! (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)
nouvelles mesures sanitaires envisagées dans les lycées
M. le président. La parole est à Mme Colette Mélot, pour le groupe Les Indépendants – République et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)
Mme Colette Mélot. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports.
Monsieur le ministre, la deuxième vague est là, et les Français sont inquiets. Des mesures fortes ont été prises ; les établissements scolaires, lycées, collèges, écoles, restent ouverts pour assurer la continuité des enseignements et permettre aux élèves de préparer leur avenir malgré l’épidémie. Nous considérons que cette continuité éducative est essentielle, pour la raison évidente que je viens d’évoquer, mais aussi pour permettre aux parents de continuer à travailler, que ce soit à distance ou, dans les situations qui l’exigent, en présentiel.
Pour autant, le risque sanitaire ne peut être éludé. Les établissements scolaires restent parmi les principaux lieux de diffusion du virus, en particulier lors des temps de restauration, durant lesquels les élèves de différentes classes sont en contact rapproché sans masques.
Pour résoudre cette difficile équation et faire en sorte d’avoir tous les bénéfices de la scolarité sans les risques de transmission du virus aux familles, le directeur général de l’Assistance publique – Hôpitaux de Paris (AP-HP) annonce être prêt à contribuer au dépistage des lycéens via des tests rapides. En effet, les études scientifiques sont formelles : si les adolescents sont moins menacés par la covid-19, ils sont susceptibles de transmettre le virus tout autant que les adultes, mais seraient asymptomatiques dans 50 % des cas. Ces informations nous conduisent à envisager des campagnes de dépistage massif parmi les lycéens et collégiens.
Monsieur le ministre, vous avez annoncé le déploiement de un million de tests destinés aux enseignants. Pour que cette deuxième vague s’estompe rapidement, pour que les commerces de proximité et la vie sociale retrouvent leurs droits, pour que les effets du confinement ne soient pas neutralisés par la diffusion du virus dans les établissements scolaires et, par ce biais, dans les familles, nous pensons qu’il faut aller plus loin. La présidente de la région Île-de-France a d’ores et déjà annoncé la mise à disposition prochaine de 100 000 tests rapides dans les lycées afin de tester les personnels, ainsi que les élèves disposant d’une autorisation parentale.
Le Gouvernement est-il prêt, monsieur le ministre, à envisager une campagne de dépistage généralisé auprès des lycéens et des collégiens, en partenariat avec les hôpitaux et les collectivités locales volontaires ? (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports.
M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports. Madame la sénatrice Mélot, la politique de tests est bel et bien l’un des points importants de notre stratégie sanitaire pour les écoles, les collèges et les lycées. Nous ne partons pas de zéro : il y a déjà une politique de tests qui permet de tracer et d’alerter les membres d’une chaîne de contamination. C’est cette politique que nous avons mise en œuvre en septembre et en octobre, je le rappelle ; c’est sur ce fondement que nous avons fermé régulièrement des écoles, des collèges et des lycées.
Dans le nouveau contexte, nous voulons approfondir cette politique de tests. Avec le ministre de la santé et des solidarités, nous avons annoncé – vous l’avez rappelé – le déploiement prioritaire de un million de tests dans le milieu scolaire, de façon que, avec toute une série d’outils complémentaires, ceux de l’administration de la santé, mais aussi de l’éducation nationale, voire des collectivités locales, nous puissions ensemble, donc, aller plus loin. Ces outils sont en train d’être déployé en ce moment même. Dès à présent, vous allez voir le nombre de tests augmenter.
Il est important que nous continuions à travailler avec les collectivités locales ; il est important aussi que chacun, dans son champ de compétences, fasse ce qu’il a à faire en matière de sécurité sanitaire. Rappelons que tout ce qui a trait au nettoyage, à l’hygiène, au brassage d’air, relève des collectivités locales, en étroite collaboration avec l’éducation nationale. J’appelle surtout les régions et les départements à être très actifs sur ces enjeux, y compris sur l’équipement informatique, domaine dans lequel nous avons fait de très belles avancées ces derniers mois et ces dernières semaines grâce à cette coopération.
Concernant les tests, tout doit être fait, évidemment, en lien avec les agences régionales de santé. Les bonnes volontés sont bienvenues, mais nous avons les moyens de développer les tests nécessaires tout au long des prochaines semaines. Je suis confiant dans cet aspect des choses, et je rappellerai – cela a souvent été dit – qu’il n’y a pas une seule réponse à la crise, mais une série d’éléments de réponse. Les tests en font partie – c’est un point important –, de même que les mesures barrières, que nous avons renforcées dans le « protocole sanitaire 2 » ou le dédoublement, quand il est nécessaire. Rappelons par ailleurs que chaque établissement est un cas particulier ; d’où les souplesses locales que nous avons prévues. (Applaudissements sur des travées du groupe RDPI.)
situation des producteurs de fleurs coupées
M. le président. La parole est à M. Jean Pierre Vogel, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Jean Pierre Vogel. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’économie, des finances et de la relance.
Monsieur le ministre, le secteur de l’horticulture représente 3 300 entreprises et 20 000 emplois. Il pèse 1,64 milliard d’euros de chiffres d’affaires, mais l’horticulture française est aujourd’hui en danger de mort.
En effet, le gouvernement français est le seul en Europe à avoir interdit la vente de fleurs coupées, tous créneaux de distribution confondus.
Non contents d’avoir fermé nos fleuristes et commerces de proximité, vous interdisez aux grandes surfaces de vendre des fleurs, bien que celles-ci soient des produits agricoles.
Dans mon département, l’entreprise Bigot, premier producteur de fleurs coupées en France, se bat au quotidien pour sa survie et celle de ses 200 emplois. Le recours au chômage partiel est faible, car il faut continuer à entretenir les cultures. Déjà fragilisée par le premier confinement, l’entreprise est très préoccupée par la gravité de la situation.
Entendez-vous, monsieur le ministre, le cri de détresse de ces chefs d’entreprise et de leurs salariés ?
Sans débouchés, l’entreprise Bigot détruit un million de tiges de fleurs par semaine. Pensez-vous que cela soit tenable, économiquement et humainement ? Le ministre de l’agriculture annonçait, en juin, un dispositif d’aide exceptionnelle de 25 millions d’euros pour le maintien de la filière. Aujourd’hui, pas un euro n’a été versé aux entreprises concernées, et ce dispositif ciblé n’est pas reconduit à l’occasion du second confinement, qui va causer des pertes abyssales. Sans intervention rapide, c’est la mort assurée pour les entreprises de ce secteur !
Monsieur le ministre, envisagez-vous de lever sans délai cette interdiction afin de sauver cette filière agricole ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé des petites et moyennes entreprises.
M. Alain Griset, ministre délégué auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance, chargé des petites et moyennes entreprises. Monsieur le sénateur Vogel, comme vous l’avez dit, les producteurs de fleurs coupées représentent environ 3 000 entreprises et plus de 20 000 salariés. Bien que leur activité n’ait jamais cessé pendant le confinement, ils se retrouvent aujourd’hui dans une situation très difficile – nous le savons –, car ils continuent à produire et n’ont presque plus de débouchés de vente.
Face à cette situation, les producteurs sont obligés de détruire une partie des fleurs – vous l’avez dit, monsieur le sénateur –, ce qui est effectivement regrettable en tous points. Nous suivons leur situation de manière très régulière. Ce matin même, sans savoir que j’aurais l’occasion de vous répondre, mes équipes se sont entretenues avec l’entreprise Bigot, leader en France des fleurs coupées, installée dans votre département. Je tiens à rappeler que les producteurs bénéficient des mesures exceptionnelles mises en place par l’État : activité partielle, prêt garanti par l’État, exonérations de cotisations sociales et, pour les entreprises dont l’effectif est inférieur ou égal à 50 salariés – Bigot n’est pas dans ce cas –, fonds de solidarité.
Notre objectif est de trouver des solutions pour que les producteurs puissent reprendre une activité de vente. Je me suis d’ailleurs entretenu à ce sujet mardi dernier avec Christiane Lambert, la présidente de la Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles (FNSEA). Mon collègue Julien Denormandie est à l’écoute de la filière pour lui apporter un accompagnement et une aide spécifiques, à l’exemple de ce qui a été fait avec les producteurs de pommes de terre, les producteurs de cidre et les brasseurs. Des échanges sont prévus dans les prochains jours. Je me suis entretenu également avec la branche des fleuristes afin que, dès la reprise, priorité soit donnée à la filière française.
M. le président. La parole est à M. Jean Pierre Vogel, pour la réplique.
M. Jean Pierre Vogel. J’entends bien, monsieur le ministre, mais la fleur-tige est le seul produit agricole périssable qui aujourd’hui n’est pas autorisé à la vente. Ce qui n’est pas vendu va à la poubelle !
La fleur coupée doit rapidement réintégrer les circuits de distribution, à sa place habituelle, chez les fleuristes et au milieu des rayons de fruits et légumes, faute de quoi nous allons tout droit vers un désastre économique pour tous ces producteurs qui œuvrent au cœur de nos territoires et qui perpétuent une filière d’excellence. En campant sur vos positions, vous aurez la lourde responsabilité d’envoyer les salariés à l’abattoir et les entreprises à l’équarrissage ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
respect du parlement et exemple de la couronne malgache
M. le président. La parole est à Mme Annick Billon, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
Mme Annick Billon. Ma question s’adresse à M. le Premier ministre.
Le 8 juillet dernier, le président de notre groupe, Hervé Marseille, vous interrogeait sur votre volonté de rendre au Parlement sa place centrale au sein de nos institutions. Vous vous étiez voulu rassurant. Depuis, peu de changements. Le recours aux ordonnances bat des records – c’est l’évitement permanent. Pour ce qui concerne l’état d’urgence sanitaire, le Sénat avait demandé que le Parlement puisse au moins approuver le recours au confinement – nouvelle fin de non-recevoir.
Le transfert discret à Madagascar d’une couronne jusqu’à présent conservée au musée de l’Armée illustre une nouvelle fois ce mépris. En effet, le principe d’inaliénabilité des biens publics impose l’intervention du législateur pour tout transfert de ce type. Or nous avons appris le retour de cette couronne le lendemain de l’adoption par le Sénat du projet de loi entérinant le retour de certains biens culturels au Bénin et au Sénégal. Le prince dispose, le Parlement entérine !
Comment voulez-vous que le Parlement ne s’inquiète pas ? Des décisions cruciales ont été prises ce matin en conseil de défense, nouvelle instance qui court-circuite désormais le conseil des ministres. Vous êtes devant nous cet après-midi, mais nous ne prendrons connaissance de ces décisions que ce soir, en regardant la télévision.
Monsieur le Premier ministre, tout cela nous conduit malheureusement à devoir de nouveau vous poser la question que nous vous posions à votre entrée en fonctions : dans votre pratique institutionnelle, quand allez-vous permettre aux assemblées de jouer leur rôle ? Quand allez-vous vous appuyer sur les élus, qui sont les représentants des citoyens ? (Bravo ! et applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains, ainsi que sur des travées des groupes SER, CRCE et GEST.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre de la culture.
Mme Roselyne Bachelot, ministre de la culture. Madame la sénatrice, je vous répondrai sur la question de la restitution de l’ornement du dais de la reine Ranavalona III de Madagascar. Comme ancienne parlementaire, élue et réélue cinq fois (Murmures sur les travées du groupe Les Républicains.), je crois avoir à cœur autant que vous le respect des droits du Parlement, et je me suis toujours employée à les respecter. Le travail que nous avons fait ensemble sur la restitution de biens culturels au Sénégal et au Bénin a été particulièrement fructueux ; je vous remercie d’ailleurs pour le vote unanime qui a été exprimé dans les deux chambres, grâce à un travail de concertation extrêmement fourni et approfondi.
Pour ce qui concerne cet ornement de dais, un petit mot d’histoire, peut-être, pour dire qu’il ne s’agit pas d’une couronne de valeur précieuse : il n’y a aucun joyau sur cette couronne.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Répondez à la question !
Mme Roselyne Bachelot, ministre. C’est l’ornement en zinc d’un auvent sous lequel la reine Ranavalona III a appelé les Malgaches à la révolte contre les colonisateurs français puis a reconnu sa défaite.
Cet objet a donc surtout une valeur symbolique pour le peuple malagasy. Il ne s’agit en aucun cas d’une restitution, mais d’une convention de dépôt (Ah ! sur les travées du groupe Les Républicains.), selon un processus dont je me suis longuement expliquée. Rien n’a été caché au Parlement ; rien n’a été caché au Sénat. J’ai d’ailleurs écrit à nouveau au président de votre commission de la culture, Laurent Lafon. Et je m’en suis une nouvelle fois expliquée en défendant le projet de loi de finances.
Bien entendu, le principe d’inaliénabilité sera respecté. Si nous devions décider d’une restitution au gouvernement de Madagascar, cette question reviendrait devant vous, car seule une loi peut contrevenir à ce principe. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à Mme Annick Billon, pour la réplique.
Mme Annick Billon. Merci, madame la ministre, pour votre réponse.
Il n’était bien sûr pas question pour moi de remettre en cause votre travail ni celui de notre rapporteure, Catherine Morin-Desailly, sur ce sujet. Et je dois dire que la qualité des œuvres et des biens culturels ne se mesure évidemment pas, à mes yeux, au poids d’or ou à la quantité de diamants qu’ils contiennent.
Mme Annick Billon. Je voudrais quand même rappeler que la liste des dysfonctionnements qui émaillent les relations entre le Parlement et l’exécutif est extrêmement longue. Je ne nie pas la gravité de la situation économique, financière et sociale ; néanmoins, monsieur le Premier ministre, pour qu’une décision soit acceptée et appliquée, elle doit être cohérente, débattue, partagée et conforme aux procédures. Cela est valable pour le retour de biens culturels comme pour tous les sujets dont nous débattons dans cet hémicycle. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains.)
perspectives de vaccination contre la covid-19
M. le président. La parole est à M. Gérard Lahellec, pour le groupe communiste républicain citoyen et écologiste. (M. Pierre Laurent applaudit.)
M. Gérard Lahellec. Ma question s’adresse à M. le ministre des solidarités et de la santé.
Comme cela a été dit il y a un instant, la découverte d’un vaccin contre la covid-19 fait naître une lueur d’espoir dans le climat pesant que nous continuons de traverser.
Il est sûrement trop tôt pour confirmer tous les effets bénéfiques qui en sont attendus, mais la course est lancée ; il faut qu’à l’arrivée il y ait assez de doses pour tout le monde, avec une méthode et une approche permettant d’établir un climat de confiance ne laissant personne sur le bord de la route.
Quelle que soit la manière dont s’organisera la diffusion du vaccin, il faut anticiper en tirant tous les enseignements des erreurs du passé.
La Haute Autorité de santé a formulé, en juillet, ses recommandations pour la mise en place d’une stratégie vaccinale. Il faut donc maintenant se préparer. Et quand on voit les errements qui ont caractérisé la gestion du vaccin contre la grippe, je dois dire que nous ne sommes pas complètement rassurés…
Ma question est simple : puisqu’il faut anticiper l’arrivée sur le marché d’un vaccin contre la covid-19, que pensez-vous de notre proposition visant à mettre en place un pôle public de distribution du vaccin ? Et, en tout cas, quelles sont les dispositions que vous envisagez pour garantir la sécurité, la transparence, l’absence de spéculation des marchés financiers et, surtout, la prise en charge à 100 % par la sécurité sociale du coût des doses de ce vaccin ? (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE et sur des travées du groupe SER.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État chargé de l’enfance et des familles.
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargé de l’enfance et des familles. Monsieur le sénateur, vous l’avez rappelé, la Haute Autorité de santé a émis, ces derniers mois, des recommandations pour l’élaboration d’une stratégie quant à la diffusion de ce vaccin. Elle aura de nouveau l’occasion de se prononcer et de formuler des recommandations qui nous permettront de définir la politique publique en la matière en tenant compte notamment de la disponibilité des vaccins. Si aujourd’hui, en effet, nous parlons du vaccin développé par un laboratoire en particulier, vous n’êtes pas sans savoir que d’autres laboratoires en sont à une phase avancée, autrement dit à la phase 3, du développement d’un vaccin – je pense à AstraZeneca, avec lequel la Commission européenne avait passé dès l’été un contrat de précommande de doses, ou à Johnson & Johnson.
La Haute Autorité de santé devra donc, dans son avis, tenir compte de la disponibilité de chacun de ces vaccins, mais également de leur profil spécifique – deux doses pour Pfizer, une seule dose pour un certain nombre d’autres vaccins.
Vous voyez qu’il y a encore un certain nombre de paramètres que nous ne connaissons pas, que nous ne maîtrisons pas, et sur lesquels la Haute Autorité de santé aura à se prononcer afin d’élaborer cette stratégie que, comme nous, vous appelez de vos vœux. Le Gouvernement – je vous l’ai déjà dit – anticipe, concernant notamment tous les aspects opérationnels et techniques. J’évoquais la précommande de matériel permettant de maintenir à moins 80 degrés ce vaccin développé par Pfizer – les autres vaccins ne seront d’ailleurs peut-être pas sujets à de telles conditions de conservation ; nous attendons les résultats des recherches.
Permettez-moi enfin, monsieur le sénateur, d’ouvrir un petit peu le champ de votre question à l’international. La question de la disponibilité et de l’universalité de ce vaccin au niveau mondial est aussi une préoccupation que le Président de la République a exprimée dès le 24 avril dernier en parlant de « bien public mondial ». Telle est la voie que nous nous évertuerons à suivre et à promouvoir au niveau international.
M. le président. La parole est à M. Gérard Lahellec, pour la réplique.
M. Gérard Lahellec. Un mot pour dire qu’il est temps de se préparer ! Nous attendons des dispositions très précises. Évitons – je vous en supplie – d’avoir de nouveau un train de retard. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE.)
chavirage de canots de clandestins au large de cayenne
M. le président. La parole est à Mme Marie-Laure Phinera-Horth, pour le groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
Mme Marie-Laure Phinera-Horth. Ma question s’adresse au ministre de l’intérieur et porte sur l’immigration clandestine en Guyane.
La semaine dernière, une embarcation de fortune transportant une vingtaine de passagers clandestins a chaviré au large de Cayenne. Si certains d’entre eux ont pu regagner le rivage par leurs propres moyens avant de disparaître dans la nature, il a fallu l’intervention de l’armée, de la Marine nationale et des pompiers pour porter secours aux autres occupants de l’embarcation, parfois très jeunes. Je tiens d’abord à saluer l’intervention rapide des militaires et des pompiers, qui ont permis d’éviter un véritable drame ; mais pour combien de temps encore ?
Personne ne peut ignorer que la Guyane est victime d’une forte immigration, en raison de ses 378 kilomètres de littoral et de ses frontières fluviales avec le Suriname et le Brésil. À l’instar de ceux qui tentent de traverser la Méditerranée, beaucoup de clandestins entrent en Guyane au péril de leur vie. Nous avons déjà connu des drames.
Bien qu’attachés à notre tradition d’accueil, nous ne pouvons plus absorber cet afflux massif. En effet, les structures d’accueil, comme les écoles, déjà en nombre insuffisant pour nos compatriotes, ne peuvent plus faire face. Les squats et bidonvilles, dans lesquels cohabitent l’insalubrité, la violence et souvent la mort, ne peuvent être le quotidien de nos compatriotes exaspérés.
Monsieur le ministre, nous avons bien compris que les différentes mesures prises jusqu’à présent pour juguler l’immigration en Guyane n’ont pu pleinement porter leurs fruits et que les moyens mis en œuvre pour garantir l’éloignement des personnes expulsées sont d’une portée limitée face à l’étendue de ces flux. C’est pourquoi je souhaiterais savoir, monsieur le ministre, comment le Gouvernement entend réaffirmer les pouvoirs régaliens de l’État en Guyane et ainsi mieux y contrôler l’immigration clandestine. Je vous remercie.
M. le président. La parole est à M. le ministre des outre-mer.
M. Sébastien Lecornu, ministre des outre-mer. Madame la sénatrice, vous avez rappelé les faits terribles du 3 novembre dernier. À mon tour, au nom du Gouvernement, de rendre hommage aux forces armées, aux forces de sécurité intérieure, aux pompiers et aux services de secours qui se sont déployés avec beaucoup d’efficacité. J’informe également le Sénat que le procureur de la République de Cayenne a ouvert une information judiciaire et qu’une personne a été placée en garde à vue, puis en détention provisoire. Je l’affirme ici, au Sénat : la réponse de l’État de droit, c’est aussi que justice sera faite contre ces passeurs, qui, malheureusement et encore trop souvent – vous l’avez rappelé –, monnayent leurs services.
Ces éléments m’amènent à évoquer, de manière plus générale, la réponse de l’État en matière de lutte contre l’immigration en Guyane. Un enjeu, que vous connaissez mieux que quiconque, madame la sénatrice, est celui de l’échelle du territoire : avec pratiquement 1 300 kilomètres de frontières, ce département français est aussi grand que le Portugal. Pour autant, la maîtrise de la frontière est inédite ces derniers mois, et pour cause ! Nous avons fermé la frontière de manière totale, à la suite de la crise du covid-19. Jamais un gouvernement n’avait déployé autant de forces sur ses frontières, expliquant les 2 500 refus d’entrée sur le territoire français au seul premier semestre de cette année, contre 111 en 2018 – retenez ce chiffre ! L’effort est constant et il produit ses effets.
Néanmoins, nous devons, à l’avenir, aller plus loin. Premièrement, il nous faut reprendre l’opération Harpie à haute intensité. L’orpaillage constitue l’un des motifs de l’immigration irrégulière. Depuis maintenant plusieurs semaines, le programme Harpie est de nouveau opérationnel.
Deuxièmement, nous devons améliorer la réponse sur l’action de l’État en mer, puisque lorsque nous tenons bien les frontières terrestres, nous constatons, malheureusement, des tentatives de contournement par le grand large, comme ce fut le cas le 3 novembre dernier. Voilà qui pose aussi la question de la lutte contre la pêche illégale. Sur ce point aussi, les forces armées sont déployées avec des instructions claires, qui ont été données pour organiser des opérations spécifiques, notamment sur les embouchures de l’Oyapock.
La coopération diplomatique avec les États de la zone compte tout autant. J’ai demandé au préfet de Guyane de réunir les maires de votre territoire pour informer l’ensemble des élus municipaux, notamment les nouveaux maires, des actions qui seront entreprises en la matière.
protocole sanitaire dans les écoles
M. le président. La parole est à M. Christian Redon-Sarrazy, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. Christian Redon-Sarrazy. Nous venons d’apprendre la fermeture du site Bridgestone de Béthune. Permettez-moi, avant toute chose, d’exprimer, au nom du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, notre soutien et notre solidarité envers les 863 salariés qui vont être durement frappés par cette mesure. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
Ma question s’adresse à monsieur le ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports.
Monsieur le ministre, comme les petits commerçants ou les libraires, les personnels éducatifs, en plus de devoir faire face à la menace terroriste, payent eux aussi le manque de cohérence et l’impréparation du Gouvernement dans sa réponse à cette seconde vague. Il était indispensable d’assurer la continuité pédagogique durant le confinement, afin de n’aggraver ou de ne créer aucune inégalité.
Malheureusement, les récents appels à la grève, provenant pour beaucoup des collèges, et les nombreux témoignages d’enseignants désemparés traduisent bien un ratage de plus dans votre méthode. Le monde éducatif déplore des directives inadaptées, et surtout un total manque de temps pour les mettre en œuvre. Les chefs d’établissements comme les collectivités n’ont eu parfois que vingt-quatre heures avant la rentrée des vacances de la Toussaint pour se conformer aux nouveaux protocoles sanitaires. Les mesures de distanciation ou le suivi des règles d’hygiène sont difficiles, voire impossibles à appliquer. La présence en alternance des élèves, évoquée pour le lycée, n’est pas envisagée au collège, où pourtant le brassage des élèves est tout aussi important, et les enfants tout aussi contagieux.
Le risque de devoir fermer des classes et de devoir renvoyer les élèves chez eux est réel. In fine, ce sont eux, et particulièrement les plus défavorisés, qui pâtissent de vos décisions. Dans les quartiers et les zones rurales qui n’offrent pas d’activités périscolaires ou qui manquent de moyens numériques, cela ne fera que creuser les inégalités.
À l’impossible nul n’est tenu, monsieur le ministre. Pour assurer cette continuité pédagogique, le recrutement de personnels supplémentaires et de remplacement apparaît comme une évidence, afin de restaurer la confiance entre votre gouvernement et la communauté éducative, et d’éviter ainsi à celle-ci l’épuisement que connaissent actuellement nos équipes soignantes. Pourtant, vous ne l’avez pas envisagé, contrairement à ce qu’ont décidé les collectivités locales, qui une fois de plus sont le dernier rempart face aux défaillances de l’État. Monsieur le ministre, faudra-t-il une troisième vague pour que ce Gouvernement mette enfin en œuvre la concertation que la communauté éducative et les élus attendent ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports.
M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports. Monsieur le sénateur, dans toute la traversée de cette crise sanitaire, il est assez aisé d’insister sur les inconvénients, alors même que, par définition, les inconvénients font partie de nos vies quotidiennes. A contrario, comparer les faits à l’échelle européenne, ou même à l’échelle mondiale, me semble une démarche plus intéressante.
Je le répète : nous avons réussi à rescolariser tous les élèves. (Protestations sur les travées des groupes SER et CRCE.) Les statistiques sur le décrochage en 2020 sont même positives et présentent une amélioration par rapport à 2019. Le service public de l’éducation nationale a tenu. Avec de telles critiques, vous pensez attaquer le ministre ; en réalité, c’est la maison dans son ensemble qui doit être remerciée de ce qui a été accompli depuis six mois. (Protestations sur les travées du groupe SER.) Oui ! Comparez avec les autres pays, voyez ce qui se passe ! On me cite parfois des pays qui recrutent ; je ne les nommerai pas pour des raisons diplomatiques, mais la situation y est bien plus mauvaise qu’en France ! Comparez donc ! Au-delà des deux minutes dont je dispose, nous pourrons en discuter. (Exclamations sur les travées du groupe SER.)
Vous prenez la grève comme un signe de désapprobation. J’ai déjà cité le chiffre de la participation : 8,38 %. En aucun cas vous ne pouvez dire que cette désapprobation est massive, parce que les professeurs de notre pays comprennent bien la situation, et je veux les en remercier. Ils sont dévoués, ils sont engagés et ils comprennent que la scolarisation est vitale pour le pays et pour les enfants. C’est bien ce qui se passe actuellement.
Nous avons réalisé les assouplissements nécessaires, comme au lycée. Au collège, nous sommes capables, parfois au cas par cas, d’appliquer une approche différenciée. Nous accordons beaucoup d’autonomie aux établissements, pour leur permettre de tenir compte de la situation. La coopération avec les collectivités locales est complète. Il ne sert à rien de dire que, d’un côté, les collectivités locales agiraient parfaitement et, d’un autre côté, que l’éducation nationale serait défaillante. Les choses sont plus complexes, et heureusement plus positives et plus constructives.
L’éducation nationale recrute. Nous avons ouvert tout récemment des recrutements d’assistants d’éducation. Comme des personnes vulnérables ne peuvent se rendre à l’école, de nouveaux supports seront créés. Nous avons créé 1 800 postes en cette rentrée, à l’école primaire, alors même qu’il y a moins d’élèves. Oui, nous engageons des moyens supplémentaires, cela se voit aussi dans le budget pour l’année prochaine. Puisque vous avez soutenu d’autres gouvernements dans le passé, je vous rappelle un chiffre : 6 milliards d’euros d’augmentation budgétaire pour l’éducation sous ce quinquennat, contre 2 milliards d’euros sous le quinquennat précédent. Faites la comparaison ! (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
réouverture des lieux de culte
M. le président. La parole est à M. Pierre Cuypers, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Pierre Cuypers. Ma question s’adresse à M. le Premier ministre.
La laïcité à la française, à laquelle nous sommes tous attachés, a deux versants. Pour le premier, la religion n’a pas à s’immiscer dans les affaires de l’État, conformément à la séparation du spirituel et du temporel ; la loi de 1905 est la loi de séparation des Églises et de l’État. L’autre versant de la laïcité est l’obligation faite à l’État de respecter toutes les croyances et de ne pas intervenir dans les convictions de chacun : l’État doit assurer la liberté de culte, qui a rang, dans notre pays, de liberté fondamentale.
Votre décision de limiter ce qui est essentiel à la fréquentation des grandes surfaces a restreint cette liberté fondamentale : le Conseil d’État, au travers d’une jurisprudence constante, qui s’attache à examiner la proportionnalité de la mesure, a confirmé votre décision ; voilà qui est surprenant ! En quoi est-il plus dangereux de prendre les transports en commun que de se rendre dans un lieu de culte, où les règles de distanciation sociale peuvent être parfaitement respectées ?
Monsieur le Premier ministre, vous avez choisi la technique pour oublier la peur, quitte à priver les croyants de l’indispensable recueillement qu’imposent les traumatismes de la pandémie. Faire autrement n’est qu’une question de volonté, et je sais que vous pouvez le faire. Le Conseil d’État vous a demandé de préciser les conditions dans lesquelles les fidèles ont la possibilité de se rendre individuellement dans un lieu de culte. Peuvent-ils s’y rendre lorsque celui-ci est distant de plus d’un kilomètre ?
Le Conseil d’État vous a également enjoint de réexaminer votre décision à la mi-novembre – nous y sommes – en lien avec les représentants des cultes. Expliquez-vous sur les mesures de concertation et d’assouplissement que vous comptez prendre ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État, porte-parole du Gouvernement.
M. Gabriel Attal, secrétaire d’État auprès du Premier ministre, porte-parole du Gouvernement. Monsieur le sénateur Cuypers, je vous prie tout d’abord d’excuser l’absence de mon collègue Gérald Darmanin, qui se trouve en déplacement officiel en Russie. Monsieur le sénateur – je vous le dis d’emblée, très directement et clairement –, nous sommes très sensibles à la situation des croyants dans notre pays, particulièrement dans cette période de crise, si difficile et éprouvante pour l’ensemble du pays, et qui conduit nécessairement les croyants à vouloir se retrouver, à vouloir se recueillir, à vouloir prier peut-être plus encore. Comment ne pas avoir une pensée pour nos compatriotes catholiques, après l’attentat de Nice ?
La situation sanitaire nous a conduits à prendre une décision difficile, celle du confinement, pour limiter les risques de contamination, avec une fermeture des établissements recevant du public, pour des raisons sanitaires, pour protéger tous les Français.
Pour autant, parce que nous sommes attachés au respect des libertés, notamment au respect de la liberté de culte, nous avons décidé de maintenir les lieux de culte ouverts et de permettre que les cérémonies religieuses y soient célébrées, pour être diffusées à distance. J’ai bien conscience que cette situation est très imparfaite et qu’elle ne permet pas à tous d’accéder à ces cérémonies. Nous avons souhaité aussi autoriser les cérémonies d’enterrement dans la limite de trente personnes, évolution notable par rapport au premier confinement, afin que chacun puisse vivre dignement son deuil.
Cette situation reste imparfaite, nous le savons. Le Conseil d’État l’a confirmé. Nous savons que les restrictions sont dures, et croyez bien que notre souhait est qu’elles puissent être levées dès que possible. C’est la raison pour laquelle je peux vous annoncer qu’une réunion se tiendra au ministère de l’intérieur, dès le début de la semaine prochaine, probablement dès lundi prochain, en présence des représentants des cultes. L’objectif de cette réunion sera non seulement d’aborder les précisions que vous avez évoquées, et qui sont demandées par le Conseil d’État, mais également de dessiner ensemble, dès maintenant, les conditions dans lesquelles les lieux de culte pourront à nouveau recevoir du public, dès lors qu’un assouplissement sera possible. Nous devons mener ce travail dès maintenant, car, dès que cela sera possible, nous avons le souhait de pouvoir permettre aux croyants de rejoindre ces lieux de culte. Nous sommes extrêmement mobilisés, et nous allons construire ces solutions avec les représentants des cultes.
M. le président. La parole est à M. Pierre Cuypers, pour la réplique.
M. Pierre Cuypers. Dois-je vous rappeler que sous prétexte d’irrégularités constatées par vidéo sur le respect des consignes sanitaires dans deux diocèses, à savoir Bayonne et la Martinique, le Conseil d’État englobe dans sa décision tous les autres lieux de culte ? Jusqu’à ce jour, il n’y a pas eu de cluster déclaré en ces lieux. Aucun ! (Murmures sur les travées du groupe SER.)
Nos concitoyens ont perdu la confiance. C’est dommage, c’est triste ! Ce n’est pas à l’honneur de la République ! Alors ne leur imposez pas de perdre leur espérance ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
situation au haut-karabakh
M. le président. La parole est à M. Gilbert-Luc Devinaz, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. Gilbert-Luc Devinaz. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’Europe et des affaires étrangères.
Monsieur le ministre, vous disiez la semaine dernière vouloir que la France tienne sa place dans la médiation du conflit en Artsakh. La France et l’Union européenne sont hors-jeu. L’accord signé lundi sous l’égide de la Russie montre notre incapacité à compter. La communauté internationale, en ne s’opposant pas à cette irruption de la force militaire dans un conflit séculaire, renonce dans le Caucase, mais aussi dans tout le Proche-Orient, à la possibilité d’une gestion diplomatique des conflits et à la protection des droits humains, laissant ainsi les mains libres aux ambitions de M. Erdogan. Ce conflit, dit « gelé », a trouvé une issue par la force, la violence et la haine.
Cette évolution en plein cœur du sud du Caucase est une catastrophe. Plusieurs milliers de jeunes appelés ont trouvé la mort. Jusqu’à 90 000 personnes pourraient être contraintes à l’exode. M. Poutine a déclaré que les termes de l’accord permettent aux personnes déplacées de retourner au Haut-Karabakh, alors que le président Aliev s’est félicité d’avoir « chassé les Arméniens de nos terres comme des chiens ». Dans ces conditions, comment les populations déplacées peuvent-elles y retourner ?
Dans le groupe de Minsk, quelle est la place exacte de la France ? Allons-nous continuer à nous cacher derrière notre coprésidence ? Aurions-nous totalement perdu la mémoire et sacrifié nos valeurs de démocratie et de liberté ? Qu’est-ce que votre gouvernement compte faire pour protéger les populations et garantir la stabilité de cette région ? Avons-nous les moyens d’établir la réalité des accusations sur l’usage par l’Azerbaïdjan de bombes à fragmentation et au phosphore ? Si tel était le cas, allez-vous proposer des sanctions face à ces crimes de guerre ? (Applaudissements sur les travées des groupes SER, INDEP, UC et Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’Europe et des affaires étrangères.
M. Jean-Yves Le Drian, ministre de l’Europe et des affaires étrangères. Monsieur le sénateur Devinaz, je voudrais m’inscrire en faux contre certains de vos propos. Je viens de m’entretenir avec M. Mnatsakanyan, mon homologue arménien. Cela doit être la dixième ou la quinzième fois que je m’entretiens avec lui sur la situation. Son message – vous pouvez l’interroger – est clair : il demande à la France de rester dans le cadre de ses responsabilités de coprésidente du groupe de Minsk, parce que l’Arménie a besoin d’elle. Pour ma part, je travaille avec M. Mnatsakanyan.
Vous avez raison de souligner l’existence d’un cessez-le-feu. Il importe qu’il soit respecté. Cette guerre a été meurtrière ; cette guerre a été d’une très grande brutalité ; elle a été dramatique. Les combats ont maintenant cessé, il faut que le cessez-le-feu soit respecté totalement, par toutes les parties.
Doivent maintenant s’ouvrir les discussions, sur la base du cessez-le-feu, pour en définir les différents paramètres, pour faire en sorte qu’un vrai règlement du conflit dans le Haut-Karabakh puisse avoir lieu, sur le long terme. Cette discussion se fera sur l’initiative des trois coprésidents, que sont M. Lavrov, M. Pompeo et moi-même, à Moscou, la semaine prochaine, puis à New York, au siège des Nations unies. Cette initiative reçoit l’appui des autorités arméniennes.
D’ici là, il faut s’assurer non seulement que le cessez-le-feu soit totalement respecté, mais aussi que les combattants étrangers soient exclus de la zone et que les réfugiés puissent revenir dans leur lieu d’habitation. Ces mesures font partie des accords de cessez-le-feu, il faut les appliquer. Par ailleurs, il importera que l’énorme effort humanitaire que la France veut déployer à l’égard des Arméniens se mette en œuvre. Les opérations ont déjà commencé ; d’autres initiatives seront prises, vous le constaterez dans l’après-midi, à la suite d’une rencontre au plus haut niveau entre les autorités de l’État français, les ONG et la communauté arménienne de France, pour que la France soit réellement présente auprès de l’Arménie et qu’elle réponde à l’urgence humanitaire, en même temps qu’à l’urgence diplomatique.
situation du secteur de l’événementiel
M. le président. La parole est à Mme Catherine Dumas, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Catherine Dumas. Ma question s’adresse à M. le ministre délégué auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance, chargé des petites et moyennes entreprises.
Monsieur le ministre, l’impact économique et social de la fermeture des établissements qui reçoivent du public et l’interdiction d’organiser tout rassemblement ou événement placent le secteur de l’événementiel dans une situation dramatique. Il s’agit pourtant d’une filière qui est essentielle pour l’attractivité de notre pays, pour l’attractivité des territoires et pour notre secteur touristique. En France, chaque année, sont organisés 1 200 foires et salons, 2 800 congrès et 380 000 événements d’entreprises et d’institutions. Plus de 77 millions de participants sont ainsi accueillis chaque année, dont 10 % de participants d’origine étrangère.
Au cœur de la crise se trouvent notamment les traiteurs, organisateurs de réception, qui travaillent avec une clientèle tant de professionnels que de particuliers. Depuis le printemps, plus de 17 000 entreprises sont ainsi à l’arrêt, inquiètes pour leur avenir économique, y compris les entreprises phares du secteur.
Je voudrais aussi terminer cette intervention en évoquant le sort des extras, les 70 000 intermittents de la restauration, monsieur le ministre ! Les entrepreneurs de foire, de salons, de congrès, les traiteurs, les extras de la restauration ont-ils, dans un futur proche, un avenir autre que la faillite ou le RSA ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé des petites et moyennes entreprises.
M. Alain Griset, ministre délégué auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance, chargé des petites et moyennes entreprises. Madame la présidente, vous avez raison, l’événementiel est un secteur primordial pour notre pays. Jean-Baptiste Lemoyne et moi-même, depuis plusieurs mois, faisons ce que nous pouvons pour envisager, avec les professionnels, des solutions. Ce secteur est très complexe dans sa diversité. Nous avons pris suffisamment de temps pour inscrire ces professionnels dans les catégories S1 et S1 bis, de façon à essayer d’éviter qu’ils ne soient oubliés.
Par ailleurs, vous nous parlez des traiteurs. J’ai personnellement reçu à sept reprises les représentants des traiteurs, les Traiteurs de France, les Traiteurs de Paris, pour examiner une situation qui est – vous avez raison – très difficile : ils ont perdu entre 90 % et 95 % de leur chiffre d’affaires.
Depuis quelques semaines, Bruno Le Maire et moi-même avons demandé à Bpifrance et au Comité interministériel de restructuration industrielle (CIRI), le service de Bercy spécialement chargé d’étudier les situations particulières, d’appeler les traiteurs. Deux cents traiteurs sont appelés individuellement pour examiner leur situation, quitte à leur apporter une partie de fonds propres pour qu’ils puissent passer cette période difficile.
Madame la sénatrice, nous faisons ce que nous pouvons pour accompagner ces professionnels. J’espère comme vous que nous pourrons assez rapidement les autoriser à reprendre leur activité, essentielle pour notre pays, parce que ce sont eux qui nous permettent d’organiser les meilleurs événements.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Dumas, pour la réplique.
Mme Catherine Dumas. Merci, monsieur le ministre, de votre réponse. Je vous le répète : nous avons besoin d’un plan de sauvegarde massif spécifique à ces secteurs ! L’événementiel est un écosystème de PME qui ne survivront pas si nous ne les aidons pas. Nous avons un rôle collectif à jouer pour sauver ces pépites, qui sont emblématiques de la France. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
impact du confinement sur le niveau des élèves
M. le président. La parole est à Mme Sonia de La Provôté, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
Mme Sonia de La Provôté. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports.
Ma question porte sur les évaluations en cours préparatoire (CP), cours élémentaire première année (CE1) et classe de sixième. Elles mettent en évidence une stabilité en sixième et une baisse des résultats en CP et CE1. Dans les trois niveaux, l’écart se creuse entre les élèves en éducation prioritaire et les autres. Pour les sixièmes, l’évaluation a lieu à la fin du cours moyen deuxième année (CM2) et confirme ainsi la différence de niveau en défaveur des élèves de primaire en réseau d’éducation prioritaire (REP) et REP+. Le confinement a donc eu pour eux un effet négatif.
Nous constatons aussi que les élèves du cycle 2 ont été plus fragilisés que ceux de sixième. Plus âgés, ces derniers sont probablement plus autonomes vis-à-vis des outils de l’école à distance, et moins touchés par une absence de présence à l’école et de contact avec leurs professeurs. Enfin, si le dédoublement des classes de CP et CE1 avait eu un effet positif, la crise l’a clairement annulé. Cela confirme le rôle essentiel du temps personnalisé passé par l’enseignant aux côtés de chaque élève. Les déterminants liés à un environnement socio-économique défavorable sont bien compensés par l’école de la République, encore faut-il qu’elle soit physiquement présente. D’où l’importance du rôle des enseignants et de l’école comme structure sociale et éducative pour effacer les différences.
Monsieur le ministre, dès lors, plusieurs questions se posent. Bon nombre d’élèves ont été déscolarisés ou sous-scolarisés pendant et après le confinement. Ont-ils bien tous été identifiés ? Quels moyens avez-vous mis en place pour remédier individuellement à ces effets négatifs ?
Par ailleurs, ces résultats vont-ils conduire à une réflexion plus large pour le cycle 2 ? La présence de l’enseignant aux côtés de l’élève y est essentielle. Ce deuxième confinement, avec écoles ouvertes, vous amène-t-il déjà à envisager, en cas d’aggravation de la crise, à maintenir cette présence pour eux ?
Enfin, cette cohorte d’élèves a vécu une expérience inédite aux nombreuses conséquences, sur le plan des acquis et sur le plan psychologique. Va-t-elle faire l’objet d’un suivi et d’une évaluation spécifiques renforcés dans le temps, tant au niveau pédagogique que par la médecine scolaire ? Je vous remercie. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports.
M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports. Madame la sénatrice Sonia de la Provôté, votre question porte sur un sujet absolument fondamental. Je souhaite en souligner l’importance devant l’ensemble des sénateurs et sénatrices. Il s’agit de la situation de l’école primaire, alors même que nous vivons cette crise sanitaire. Dans un contexte mondial, où on ne dira jamais assez qu’une catastrophe éducative est possible à cause du confinement, l’objectif doit bel et bien être de garder ouverts les écoles, les collèges et, autant que possible, les lycées.
Cette enquête est extrêmement intéressante. Tout d’abord, la France a désormais, depuis trois ans, un outil unique au monde, c’est-à-dire la possibilité d’évaluer au début de l’année scolaire 800 000 enfants de CP, 800 000 enfants de CE1 et 800 000 enfants de sixième. Ce dispositif unique nous a permis, premièrement, en ce début d’année, d’avoir une évaluation personnalisée pour chaque enfant et donc de connaître ses faiblesses et ses forces, et ainsi d’aider chaque élève. Deuxièmement, ce dispositif permet de dresser un portrait de la Nation.
Vous avez parfaitement résumé la situation, avec ce que j’appellerai une demi-mauvaise nouvelle et une bonne nouvelle. Premièrement, la demi-mauvaise nouvelle est que – nous nous y attendions – les élèves de CP, l’année dernière, ont pâti du confinement. Cependant, le progrès constaté de 2018 à 2019 vient relativiser cette mauvaise nouvelle : la régression de 2019 à 2020 nous ramène au niveau de 2018. Nous avons régressé, mais à un niveau que nous pourrions qualifier de raisonnable. Nous pouvons espérer désormais que les mesures que nous prenons, comme le dédoublement des classes, pour les élèves qui ont le plus pâti du confinement, permettront de rattraper ce retard en 2021.
Deuxièmement, les élèves, l’année dernière, ont pu surcompenser les problèmes en CM2 ; ils sont arrivés cette année en sixième avec un meilleur niveau que l’année précédente. Nous devons nous en réjouir. Les mesures prises, comme les vacances apprenantes, le dispositif « Je rentre en sixième », le travail des professeurs, tout simplement, ont permis de véritables progrès. Nous devons rester vigilants, parce que beaucoup trop d’élèves arrivent en sixième avec une lecture qui n’est pas assez fluide. Néanmoins, les efforts portent leurs fruits ; l’école primaire a bien tenu le choc et nous allons pouvoir continuer à aller de l’avant.
données scientifiques et fermetures des commerces
M. le président. La parole est à M. Jean-Baptiste Blanc, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Jean-Baptiste Blanc. Monsieur le président, ma question s’adresse à M. le Premier ministre et porte sur la gestion du covid-19.
Monsieur le Premier ministre, vous êtes encore appelé, ce soir, à annoncer des mesures qui portent atteinte, d’une manière inédite en temps de paix, à nos libertés fondamentales.
Si, dans son principe, le Parlement a parfaitement admis, quoi que vous en disiez, la nécessité d’une action rapide en la matière, une difficulté majeure se pose quant à la proportionnalité et à la justification des mesures ainsi adoptées.
En effet, vous disposez de nombreuses informations précises sur la situation et les risques sanitaires, mais ni la représentation nationale, ni les commissions indépendantes – je ne citerai que la Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH) –, ni nos concitoyens, ni les élus locaux n’en disposent, ce qui place notre pays dans un état d’incompréhension, de sidération et de colère sans précédent.
Il nous semble ainsi que trois correctifs doivent être apportés sans délai.
En premier lieu, vous pourriez intégrer les bureaux des deux chambres dans toutes les boucles de diffusion des informations internes, qu’elles soient destinées à préparer les décisions ou à les adopter.
En deuxième lieu, il serait grand temps que l’État s’engage enfin à documenter et à motiver en droit ses décisions – je pense notamment à toutes les mesures réglementaires restrictives de libertés qui sont adoptées.
En troisième lieu, il serait aussi grand temps de comprendre que vous pouvez vous appuyer sur les maires de France. Ils pourraient ainsi adopter des mesures complémentaires de police administrative adaptées aux circonstances locales qu’ils connaissent mieux que personne.
Je voudrais enfin évoquer une étude publiée dans Nature et évoquée avant-hier dans le New York Times et aujourd’hui dans Le Figaro. Cette étude nous apprend que tous les types de commerce ne se valent pas en termes de sources de contamination et que tous les commerces ne présentent pas de risques sévères à ce titre. En effet, il ressort de cette étude que les librairies, les magasins qui vendent des fleurs ou des jouets, les salons de coiffure et tant d’autres sont quinze fois moins dangereux que d’autres catégories de commerce, ce qui tend à prouver une certaine forme d’inutilité de vos choix hétéroclites pris dans l’urgence, sous la pression d’un virus qui mène la danse.
Pour conclure, monsieur le Premier ministre, il faudra mieux préparer les choses pour éviter une troisième vague. Cela ne pourra se faire sans des dépistages de masse, par dizaines de millions, et sans un bouclage strict, zone par zone, pour éradiquer la circulation du virus. Quand comptez-vous être transparent et réagir ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État chargé de l’enfance et des familles.
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargé de l’enfance et des familles. Monsieur le sénateur, votre question comporte plusieurs aspects.
Tout d’abord, le contrôle du Parlement, Assemblée nationale comme Sénat, a été constant depuis le début de cette crise à travers l’ensemble des outils dont les parlementaires disposent, par exemple les questions d’actualité au Gouvernement, moment que nous sommes en train de vivre à l’heure actuelle, ou les débats qui ont lieu à l’occasion de l’examen des différents projets de loi d’instauration ou de prolongation de l’état d’urgence sanitaire. Il existe aussi des outils spécifiques ; ainsi, l’un de ces projets de loi a prévu, sur proposition du Gouvernement, que le président du Sénat et celui de l’Assemblée nationale soient informés chaque mois de l’ensemble des dispositions et ordonnances prises par le Gouvernement en application de cet état d’urgence.
Ensuite, sur la question de la concertation et de la coopération avec les collectivités locales, vous savez que le Premier ministre, accompagné de plusieurs ministres, a réuni à plusieurs reprises l’ensemble des forces politiques et les représentants des élus locaux afin de les associer et de les tenir informés, en toute transparence, de l’évolution de la situation sanitaire et des mesures que nous allions prendre.
Vous avez enfin évoqué, monsieur le sénateur, une étude publiée récemment dans Nature. Cette étude menée par une équipe de Stanford sur la mobilité de 98 millions d’Américains dans les grandes métropoles montre effectivement que certains lieux sont plus propices à la dissémination du virus – les bars, les restaurants, les salles de sport, etc. Pour autant, si vous relisez bien cette étude, monsieur le sénateur, tous les commerces, y compris ceux que vous citez, ont un R0, ce fameux critère de dissémination, supérieur à 1.
Pour ce deuxième confinement, contrairement au premier, la stratégie du Gouvernement a été de fixer des règles nationales pour éviter les brassages de population et la dissémination du virus sur notre territoire. C’est la stratégie que nous avons proposée, en toute transparence, au Parlement et aux Français.
dysfonctionnement de l’établissement français du sang en guadeloupe
M. le président. La parole est à Mme Victoire Jasmin, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
Mme Victoire Jasmin. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, ma question s’adresse à M. le Premier ministre et concerne la situation du centre de transfusion sanguine de l’établissement français du sang (EFS) de Guadeloupe et Guyane. Ce centre a une dimension interrégionale et couvre aussi Saint-Martin et Saint-Barthélemy.
Depuis un certain temps déjà, l’EFS de Guadeloupe-Guyane connaît un turnover important parmi les biologistes de son laboratoire : dix mouvements en cinq ans ! Pourtant, aucune cause de ce turnover n’a été recherchée.
Même si ce laboratoire, son personnel et ses équipements sont parfaitement accrédités et travaillent conformément à la législation en vigueur, la direction nationale de l’EFS propose un plan de continuité de l’activité. Il n’y aura en effet plus de biologistes à partir du 1er décembre prochain, sauf la directrice qui va, semble-t-il, assurer toutes les fonctions… Selon ce plan, l’ensemble des tubes collectés en Guadeloupe sera envoyé à un autre laboratoire situé dans l’Hexagone, soit un transport de 8 000 kilomètres – huit heures de vol, puis trois heures de voiture !
Monsieur le Premier ministre, je vous demande de prendre toutes les mesures nécessaires, y compris le recrutement de biologistes – deux suffiraient –, pour que cet établissement puisse fonctionner correctement et qu’il réponde aux besoins de la population de la Guadeloupe, de la Guyane, de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy et de tous ceux qui visitent nos territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État chargé de l’enfance et des familles.
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargé de l’enfance et des familles. Madame la sénatrice Victoire Jasmin, avant de répondre précisément à votre question, je voudrais d’abord dire de manière générale que le bon exercice de ses missions par l’Établissement français du sang est une priorité pour le Gouvernement – j’ai d’ailleurs évoqué cette question la semaine dernière ici même à l’occasion d’une question posée par la sénatrice Élisabeth Doineau. Ce sujet est particulièrement prégnant en période de crise, les opérations indispensables qui ne relèvent pas de l’épidémie devant absolument continuer. Je le répète, grâce à la mobilisation constante de l’Établissement français du sang pour maintenir une collecte suffisante, il n’y a aucune inquiétude à ce jour sur les stocks.
Pour revenir plus précisément sur la situation de l’EFS de Guadeloupe-Guyane, son activité est évidemment incontournable, puisqu’il collecte, prépare et distribue les produits sanguins prélevés dans l’archipel.
Comme vous l’avez indiqué, trois biologistes médicaux qui exercent des responsabilités essentielles dans l’établissement de Pointe-à-Pitre ont décidé récemment et quasiment simultanément de quitter leur poste. Cette décision a évidemment suscité des inquiétudes et chacun peut aisément mesurer à quel point une telle décision peut altérer la continuité d’activité de ce site.
Le Gouvernement est parfaitement conscient de la nécessité d’agir pour assurer cette continuité, mais, vous le savez, le recrutement et la formation de nouveaux agents peuvent prendre entre six mois et un an. Or nous n’avons pas le temps d’attendre. C’est la raison pour laquelle, afin de pallier toute difficulté, l’établissement de Guadeloupe se prépare à transférer des échantillons habituellement traités à Pointe-à-Pitre vers d’autres laboratoires agréés de l’Hexagone.
Ce dispositif, uniquement temporaire, ne remet absolument pas en cause les emplois de techniciens et nous y veillerons – je sais que ce point a suscité des inquiétudes sur place. (M. Victorin Lurel s’exclame.)
Je réaffirme avec force que les directions régionale et nationale tiennent au maintien de l’activité de qualification biologique des dons au sein de l’EFS de Guadeloupe-Guyane. L’établissement, l’agence régionale de santé et le Gouvernement sont pleinement mobilisés pour apporter des réponses rapides.
En attendant le prochain recrutement de biologistes que vous appelez de vos vœux, des rencontres ont lieu avec tous les acteurs pour préciser les attentes et les perspectives. Les élus, dont vous-même, je n’en doute pas, et les personnels seront évidemment très attentifs à l’évolution de la situation.
M. le président. La parole est à Mme Victoire Jasmin, pour la réplique.
Mme Victoire Jasmin. Je rappelle que, lors du premier confinement, le transport aérien n’était pas opérationnel. Je suis vraiment très inquiète, parce que les drépanocytaires ou les malades du cancer ont régulièrement besoin de poches de sang, notamment de plaquettes dont la durée de conservation est limitée. Ce qui est proposé n’est donc pas acceptable ! Monsieur le secrétaire d’État, je vous demande de prendre la mesure de notre inquiétude. Nous ne devons être collectivement ni responsables ni coupables ! (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
effets psychologiques du confinement
M. le président. La parole est à Mme Brigitte Lherbier, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Brigitte Lherbier. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, depuis le 29 octobre à minuit, un nouveau confinement a été mis en place sur l’ensemble du territoire national, tant la situation est tendue dans nos hôpitaux. La deuxième vague est là. Nos personnels soignants sont sur le front. Nos concitoyens font preuve de civisme et respectent très majoritairement les mesures visant à limiter la propagation du coronavirus.
Cependant, nous vous entendons très peu sur la prise en compte des conséquences humaines de ces périodes de confinement. Une bonne santé mentale permet aux personnes de mieux surmonter les tensions normales de la vie, mais en cette période de crise sanitaire, nous sommes confrontés à une situation anormale. Contraindre toute une population à limiter pendant plusieurs semaines tous ses contacts sociaux et physiques, quand il ne s’agit pas de les interdire, a inévitablement un impact néfaste sur la santé mentale de tous.
Les Français ont subi un premier confinement qui a laissé des traces : stress, ennui, frustration, perte inédite de liberté, isolement, peur de tomber malade, baisse de l’activité physique ont déjà laissé des séquelles qui risquent encore de s’aggraver.
Avez-vous répertorié précisément ces troubles ? Pouvez-vous porter à notre connaissance une analyse précise de l’état mental de la population ?
Beaucoup de Français vous reprochent de ne pas bien gérer l’après-confinement. Les annonces, souvent contradictoires, ont elles aussi suscité de l’angoisse et un manque de confiance chez nos concitoyens. Gouverner, c’est prévoir. Et pour prévoir, il faut connaître exactement l’évolution de l’épidémie, certes, mais aussi les impacts psychiques sur la population.
Monsieur le ministre, le premier confinement était une expérience. Il a eu lieu il y a plus de cinq mois. Disposez-vous d’éléments chiffrés et êtes-vous en mesure d’évaluer l’impact des confinements et couvre-feux sur la santé mentale de nos concitoyens ?
M. le président. Il faut conclure !
Mme Brigitte Lherbier. Avez-vous échangé avec les maires, les élus locaux et les professionnels de santé sur les troubles mentaux constatés à la suite du confinement ? Avez-vous anticipé un soutien au secteur psychiatrique pour l’après-crise sanitaire ? (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État chargé de l’enfance et des familles.
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargé de l’enfance et des familles. Madame la sénatrice, votre question s’adresse au ministre de la santé, mais je suis heureux en tant que secrétaire d’État à l’enfance et aux familles de pouvoir y répondre.
Au regard de l’état de la pédopsychiatrie dans notre pays, cette question me tient déjà particulièrement à cœur en temps normal ; c’est encore plus vrai en cette période de crise et de confinement, parce que les effets sur les enfants sont tout aussi notables que sur la population en général. J’ai d’ailleurs été auditionné la semaine dernière par la commission d’enquête de l’Assemblée nationale sur la question des conséquences du confinement sur les enfants, notamment d’un point de vue psychologique.
Dès le 23 mars dernier, Santé publique France a lancé l’enquête CoviPrev pour suivre l’évolution des comportements et de la santé mentale des Français. Une autre enquête récente de Santé publique France révèle, chez nos concitoyens, une augmentation de plus de cinq points des troubles dépressifs en octobre par rapport au mois précédent, avec une persistance des troubles du sommeil. Les impacts psychologiques de la crise touchent tous les Français et trois grands types de vulnérabilité ont été identifiés concernant, d’abord, la population générale, ensuite, les professionnels de santé et, enfin, les personnes déjà suivies dans des établissements.
La politique que nous menons depuis 2018 offre le cadre général des réponses aux besoins de ces trois publics. Elle implique l’ensemble du secteur de la psychiatrie – j’en profite pour saluer l’engagement de tous ses professionnels – via notamment les cellules d’écoute spécialisée, les cellules d’urgence médico-psychologique et les centres régionaux du psychotraumatisme que nous allons continuer de déployer sur le territoire.
Les professionnels ont su s’adapter à ces circonstances difficiles via notamment l’augmentation de l’ambulatoire – c’est l’un des axes de notre stratégie – et des consultations dématérialisées, l’ensemble contribuant à ce fameux « aller vers » que nous souhaitons développer de manière générale.
Les réponses innovantes seront soutenues et prolongées via l’appel à projets, en cours, du fonds d’innovation organisationnelle en psychiatrie. Cette refondation s’inscrit dans les projets territoriaux de santé mentale, dont la mise en œuvre se poursuit. Nous avons d’ailleurs inclus les personnels concernés dans le Ségur de la santé et nous avons aussi prévu, de mémoire, la création de 103 postes de coordinateurs pour ces projets territoriaux de santé mentale et de 120 psychologues pour les centres médico-psychologiques (CMP) – il est vrai que les délais d’attente en pédopsychiatrie sont bien trop longs, même hors période de crise.
Voilà, madame la sénatrice, l’ensemble des mesures que nous mettons en place pour traiter cette question qui nous préoccupe également.
perspectives d’un déconfinement
M. le président. La parole est à M. Michel Bonnus, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Michel Bonnus. Monsieur le président, mes chers collègues, ma question s’adresse à M. le Premier ministre.
Compte tenu de la situation très inquiétante dans laquelle se trouvent aujourd’hui nos hôpitaux, j’ai approuvé la décision prise par le Gouvernement de procéder à un nouveau confinement, malgré les conséquences pour nos entreprises. Or, depuis cette décision, ordres et contrordres n’ont cessé de me perturber. De graves incohérences et de profondes injustices ruinent, dans l’esprit des Français, la raison d’être de cette mesure.
Votre prise de parole de ce soir, monsieur le Premier ministre, est à ce titre très attendue. Nous sommes inquiets, mais le pire serait que le futur déconfinement, que nous attendons tous, connaisse les mêmes errements que le premier – je pense notamment à l’absence d’obligation de porter un masque que rien ne pouvait justifier.
Nos entreprises, nos commerçants devront une nouvelle fois improviser et découvrir le dispositif au dernier moment, dans la confusion et l’urgence, sans avoir le temps de s’y préparer. Nous avons besoin d’une stratégie de déconfinement précise et connue de tous à l’avance, d’un protocole clair avec des interlocuteurs spécifiques. Le protocole d’ouverture d’un salon de coiffure ou d’un restaurant ne peut pas être pensé comme celui d’une librairie ou d’une salle de sport.
Monsieur le Premier ministre, ce que nous voulons – c’est le restaurateur qui vous parle –, c’est travailler ! Nous sommes en train de perdre notre patrimoine, notre retraite. Nous ne voulons pas être sous perfusion, même si nous avons bien sûr besoin des aides de l’État ; nous voulons surtout travailler et faire travailler nos collaborateurs dans le respect des règles sanitaires et de la santé de chacun.
Donnez-nous des perspectives ! Une concertation entre les préfets, les maires, les forces vives du territoire et les soignants doit permettre, dès à présent, d’ajuster localement les protocoles. Il faut un déconfinement sur mesure.
Monsieur le Premier ministre, êtes-vous en mesure de nous apporter des assurances en termes de calendrier pour anticiper ces protocoles localisés et d’engagement de l’État sur une communication claire et accessible en direction des acteurs concernés ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État chargé de l’enfance et des familles.
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargé de l’enfance et des familles. Monsieur le sénateur, je ne vais pas m’exprimer avant que le Premier ministre ne le fasse ce soir. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.) Nous essayons de faire les choses dans l’ordre et cela serait probablement un très mauvais calcul de ma part… (Mêmes mouvements.)
Mme Sophie Primas. Nous sommes au Parlement !
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Madame la sénatrice, un certain nombre de données sont encore en cours de consolidation ; elles permettront de fonder les décisions qui seront présentées plus tard dans la journée. Ce calendrier avait été annoncé au Parlement et à l’ensemble des Français il y a quinze jours, au moment de l’annonce du reconfinement.
Avant que le Premier ministre ne réactualise les chiffres ce soir, je voudrais vous rappeler, monsieur le sénateur, que notre pays connaît encore un taux de positivité très élevé – 19,5 % – et que plus de 4 800 patients sont en réanimation. Le nombre des décès dépasse à ce jour 42 430, ce qui est un bilan terrible.
Nous partageons tous les jours, avec l’ensemble de la communauté nationale, les différents indicateurs de suivi de l’épidémie et, vous le savez, ils montrent tous la persistance d’une pression épidémique de haut niveau. Par ailleurs, un certain nombre d’établissements sociaux et médico-sociaux – je pense notamment aux Ehpad – sont, encore aujourd’hui, touchés fortement par l’épidémie.
Dans cette situation, notre première préoccupation à tous, à vous comme à nous, doit être de tout mettre en œuvre pour que notre système sanitaire tienne bon. C’est ce à quoi nous nous employons depuis le début de cette crise et c’est tout le sens des mesures que nous prenons : augmentation progressive des capacités en réanimation, formation de nouveaux personnels médicaux ou encore coordination interrégionale et internationale pour pouvoir transférer des patients dans d’autres régions ou pays.
L’un des axes majeurs de cette anticipation réside dans les mesures de freinage qui ont été décidées : un premier couvre-feu le 17 octobre, son extension le 24, puis le confinement le 30 octobre, il y a quinze jours. La réévaluation de ces mesures avait été annoncée pour aujourd’hui – c’est l’objet de l’intervention du Premier ministre ce soir – et il y aura une nouvelle échéance au 1er décembre prochain. Il existe donc un calendrier qui est connu de tous et nous le respectons.
Le suivi épidémiologique et sanitaire est un élément essentiel pour analyser l’évolution des contaminations. (Marques d’impatience sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. Il faut conclure !
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Ce suivi se poursuit sur tout le territoire grâce à l’action de milliers d’hommes et de femmes que je salue ici et je vous garantis, monsieur le sénateur, que ce soir nous serons en mesure de dresser les perspectives, en fonction de la situation sanitaire que connaît aujourd’hui notre pays, pour les jours et les semaines qui viennent. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. Michel Bonnus, pour la réplique.
M. Michel Bonnus. Monsieur le secrétaire d’État, j’ai envie d’y croire et de me battre avec vous, mais si vous répondez à côté, nous n’allons pas nous en sortir, nous ne ferons que subir et nous allons tous au-devant de graves désillusions ! Pensez aux restaurateurs qui vont déposer le bilan, aux personnes qui seront au chômage ! Et je ne parle même pas des emplois indirects…
Alors, donnez-nous envie de nous rassembler autour de vous et de nous battre ! Je vous le dis franchement, vous n’avez pas du tout répondu à ma question, alors que tous les restaurateurs attendent la même chose : ils ont besoin d’aide, pas d’un discours à la télévision ou d’une interview dans la presse écrite !
Monsieur le secrétaire d’État, nous avons besoin de vous ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées des groupes RDSE et SER.)
M. le président. Monsieur le Premier ministre, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, nous en avons terminé avec les questions d’actualité au Gouvernement.
Je vous rappelle que les prochaines questions d’actualité au Gouvernement auront lieu le mercredi 18 novembre 2020, à quinze heures.
Nous allons maintenant interrompre nos travaux quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures vingt, est reprise à seize heures trente, sous la présidence de M. Pierre Laurent.)
PRÉSIDENCE DE M. Pierre Laurent
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
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Financement de la sécurité sociale pour 2021
Suite de la discussion d’un projet de loi
M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, de financement de la sécurité sociale pour 2021.
Candidatures à une éventuelle commission mixte paritaire
M. le président. J’informe le Sénat que des candidatures pour siéger au sien de l’éventuelle commission mixte paritaire chargée d’élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion de ce projet de loi ont été publiées. Ces candidatures seront ratifiées si la présidence n’a pas reçu d’opposition dans le délai d’une heure prévue par notre règlement.
Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus, au sein du titre Ier de la troisième partie, au chapitre II.
TROISIÈME PARTIE (suite)
DISPOSITIONS RELATIVES AUX RECETTES ET À L’ÉQUILIBRE DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR L’EXERCICE 2021
TITRE IER (SUITE)
DISPOSITIONS RELATIVES AUX RECETTES, AU RECOUVREMENT ET À LA TRÉSORERIE
Chapitre II
Poursuivre les simplifications pour les acteurs de l’économie
Article 14
I. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° A (nouveau) Le cinquième alinéa de l’article L. 114-19 est complété par deux phrases ainsi rédigées : « Les données ainsi obtenues peuvent faire l’objet d’une interconnexion avec les données des organismes mentionnés à l’article L. 213-1 au titre de l’accomplissement de leurs missions de contrôle et de lutte contre le travail dissimulé. Les modalités de l’interconnexion sont définies par décret en Conseil d’État, pris après avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés. » ;
1° Au III de l’article L. 131-6-4, après le mot : « cotisations », sont insérés les mots : « , ni avec celui prévu au 37° de l’article L. 311-3, » ;
2° L’article L. 311-3 est ainsi modifié :
a) À la première phrase du 35°, les mots : « les seuils mentionnés aux a et b du 1° du I de l’article 293 B » sont remplacés par les mots : « le seuil mentionné au premier alinéa du 1 de l’article 102 ter » ;
b) Après le 36°, il est inséré un 37° ainsi rédigé :
« 37° Les particuliers qui vendent des biens neufs qu’ils ont confectionnés ou achetés pour les revendre ou qui fournissent des services rémunérés de manière ponctuelle et qui exercent l’option pour relever du régime général, dès lors que leurs recettes annuelles ne dépassent pas un montant de 1 500 €. Les cotisations et contributions de sécurité sociale dues par ces personnes sont calculées sur une assiette constituée de leurs recettes diminuées d’un abattement forfaitaire fixé par décret, qui ne peut pas être inférieur à l’abattement prévu au premier alinéa du 1 de l’article 102 ter du code général des impôts ni supérieur au plus élevé des abattements prévus à la première phrase du cinquième alinéa du 1 de l’article 50-0 du même code. Lorsque le montant mentionné à la première phrase du présent 37° est dépassé au titre de deux années consécutives, ou le triple de ce montant au titre d’une même année, l’option cesse d’être applicable à compter de l’année suivante. » ;
3° Au 6° de l’article L. 611-1, les mots : « au 7° » sont remplacés par les mots : « au 5° » et les mots : « 1° du » sont supprimés.
II. – Le 37° de l’article L. 311-3 du code de la sécurité sociale est applicable aux cotisations et contributions dues au titre des périodes courant à compter du 1er janvier 2022.
M. le président. L’amendement n° 830 rectifié bis, présenté par MM. Decool, Capus, Guerriau et Menonville, Mmes Mélot et Paoli-Gagin, MM. Verzelen, Wattebled, Daubresse et Lefèvre, Mme Vermeillet, MM. Pellevat, Panunzi et B. Fournier, Mme Noël, M. Laménie, Mmes Gatel et Garnier, M. Vogel, Mme V. Boyer, MM. Longuet, Cazabonne, Longeot, Cadic et H. Leroy, Mmes Lherbier et N. Delattre et M. Poadja, est ainsi libellé :
Alinéa 2, avant la dernière phrase
Insérer une phrase ainsi rédigée :
Le cotisant est informé de cette interconnexion.
La parole est à Mme Colette Mélot.
Mme Colette Mélot. Cet amendement concerne la protection des données personnelles. Il s’agit de rendre la procédure transparente en informant le cotisant de l’utilisation de ses données.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. La commission a émis un avis défavorable sur cet amendement. L’interconnexion proposée entre la sécurité sociale et les données fiscales au titre du droit à la communication de l’information risquerait d’introduire un vice dans le système. Il ne me paraît pas souhaitable de donner une information à des personnes suspectées de fraude.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargé de l’enfance et des familles. Avis défavorable, pour les mêmes raisons que M. le rapporteur général.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 830 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. L’amendement n° 149, présenté par M. Vanlerenberghe, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 7, première phrase
Remplacer les mots :
pour relever du régime général
par les mots :
mentionnée au 1° de l’article L. 611-1 du présent code
II. – Alinéa 8
Remplacer cet alinéa par trois alinéas ainsi rédigés :
3° L’article L. 611-1 est ainsi modifié :
a) Le 1° est complété par les mots : «, sauf option contraire de ces personnes lors de l’affiliation pour relever du régime général dans les conditions prévues au 37° de l’article L. 311-3 du présent code » ;
b) Au 6° , la référence : « 7° » est remplacée par la référence : « 5° » et les mots : « 1° du » sont supprimés.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Amendement rédactionnel.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Avec votre permission, monsieur le rapporteur général, je considère que cet amendement n’est pas exclusivement rédactionnel. Il me semble en effet que son adoption aurait pour conséquence de restreindre le champ d’application du dispositif.
L’article 14 a pour objet de permettre aux particuliers réalisant des activités économiques sur les plateformes numériques de bénéficier d’un dispositif social ultra-simplifié : cotiser en s’inscrivant sur un service en ligne unique, sans aucune formalité, dès lors que l’activité produit des recettes annuelles inférieures à 1 500 euros.
Or, sauf erreur de notre part, vous proposez de réserver le recours au dispositif social ultra-simplifié aux particuliers qui auraient dû relever du régime social des travailleurs indépendants. Cela exclurait en pratique certaines activités relevant théoriquement d’autres régimes, allant ainsi à l’encontre de la démarche de simplification que nous souhaitons.
C’est pourquoi le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Nous nous sommes fondés sur une position de l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale (Acoss), qui est tout de même un organisme de référence.
Toutefois, après vous avoir écouté, je suis tenté de me rallier à votre avis, monsieur le secrétaire d’État. Je retire donc cet amendement.
M. le président. L’amendement n° 149 est retiré.
L’amendement n° 755 rectifié, présenté par Mme Féret, M. Jomier, Mme Lubin, M. Kanner, Mme Conconne, M. Fichet, Mmes Jasmin, Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Antiste et J. Bigot, Mme Bonnefoy, MM. Bouad, Durain et Gillé, Mme Harribey, M. P. Joly, Mme G. Jourda, M. Leconte, Mme Lepage, MM. Lozach, Lurel, Marie et Mérillou, Mme Monier, MM. Montaugé et Pla, Mme S. Robert, MM. Sueur, Temal et Tissot, Mmes Préville, Briquet et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – Le b du 2° du I du présent article n’est pas applicable aux activités non salariées et salariées agricoles visées aux articles L. 722-1 et suivants et L. 722-20 et suivants du code rural et de la pêche maritime.
La parole est à Mme Corinne Féret.
Mme Corinne Féret. Cet amendement vise à préciser que l’article 14 ne serait pas applicable aux activités non salariées et salariées agricoles. En effet, l’ouverture aux particuliers de la possibilité de déclarer de manière très simplifiée leurs revenus pourrait avoir des conséquences sur des activités de service comme les travaux de jardinage, qui relèvent du régime agricole. Ces activités présentent potentiellement un risque important d’accidentologie, qui nécessite un exercice professionnel et une prévention des risques professionnels adaptés.
Nous proposons donc d’exclure du dispositif les activités relevant du régime agricole. Je le précise, nous avons travaillé avec la Caisse centrale de la Mutualité sociale agricole.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Nous avons bien conscience du caractère particulier de certaines activités agricoles. Mais le seuil retenu, c’est-à-dire 1 500 euros annuels, et la référence au caractère ponctuel de l’activité doivent nous inciter à choisir le dispositif le plus lisible pour les particuliers soumis au nouveau régime.
En cas d’adoption de cet amendement, le régime s’appliquerait aux activités de bricolage, mais pas aux activités de jardinage. Or celles-ci peuvent être réalisées par la même personne ; d’ailleurs, c’est souvent le cas. Le système perdrait en cohérence.
C’est pourquoi l’avis de la commission est défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Le Gouvernement souscrit totalement à l’analyse de la commission. Avis défavorable.
M. le président. Je mets aux voix l’article 14.
(L’article 14 est adopté.)
Articles additionnels après l’article 14
M. le président. L’amendement n° 325 rectifié bis, présenté par MM. Chasseing et Decool, Mme Mélot, MM. Menonville, Lagourgue et Médevielle, Mme Paoli-Gagin, MM. A. Marc, Guerriau, Wattebled, Capus, Verzelen et Daubresse, Mme Joseph, MM. Pellevat, Longeot, Guérini et Reichardt, Mme Guillotin, M. E. Blanc, Mmes Garriaud-Maylam et N. Delattre et MM. Fialaire et Gremillet, est ainsi libellé :
Après l’article 14
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le second alinéa du I de l’article L. 133-1 du code de la sécurité sociale est complété par les mots : « et contresigné par le directeur de l’organisme effectuant le recouvrement ».
La parole est à M. Daniel Chasseing.
M. Daniel Chasseing. Cet amendement a pour objet d’apporter un surcroît de formalisme face au travail dissimulé. Nous proposons que le procès-verbal soit contresigné par le directeur de l’organisme effectuant le recouvrement, en vue d’améliorer le dialogue dans la procédure de contrôle.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Je sollicite le retrait de cet amendement, faute de quoi l’avis de la commission serait défavorable. Un tel surcroît de formalisme serait une contrainte supplémentaire pour les agents chargés du contrôle sans réelle valeur ajoutée pour autant ; la possibilité de contester en cas de désaccord existe aujourd’hui.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Même avis que la commission, pour les mêmes raisons que la commission.
M. Daniel Chasseing. Je retire cet amendement.
M. le président. L’amendement n° 325 rectifié bis est retiré.
L’amendement n° 84 rectifié bis, présenté par Mme N. Goulet, est ainsi libellé :
Après l’article 14
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le III de l’article L. 133-1 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« L’Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales peut prendre des mesures conservatoires préventives lorsque des profils de fraudeurs sont détectés. »
La parole est à Mme Nathalie Goulet.
Mme Nathalie Goulet. Cet amendement a déjà été retoqué l’année dernière, mais je le représente tout de même : c’est une « victoire de l’optimisme sur l’expérience », comme le disait Henri VIII à son sixième mariage ! (Rires.)
Il y a eu le rapport que j’ai remis avec ma collègue Carole Grandjean sur la fraude aux prestations sociales, le dernier rapport de la Cour des comptes sur le même sujet et l’excellent rapport de notre collègue Pascal Brindeau, auquel participait Valérie Boyer, alors députée. Nous avons tout de même identifié un certain nombre de sujets complémentaires qui pourraient faire l’objet de rustines dans ce PLFSS en matière de la lutte contre la fraude. Le dispositif que cet amendement vise à mettre en place en fait partie. Il s’agit de permettre à l’Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales (Urssaf) de prendre des mesures conservatoires, évidemment préventives, lorsque les profils des fraudeurs sont détectés. C’est bien en lien avec l’article L. 133-1 du code de la sécurité sociale.
En matière de détection précoce, le traditionnel duo redressement-recouvrement, qui est identique en matière de fraude fiscale, est totalement dépassé lorsque les sociétés contrôlées organisent leur insolvabilité soit sur une liquidation soit en cas d’engagement de contrôle. C’est aussi le cas des entreprises éphémères. Le rapport de la Cour des comptes du mois de novembre 2019 sur le sujet est tout de même assez sévère.
L’idée de pouvoir donner à l’Urssaf des garanties lorsque la fraude est déjà détectée dans le cadre d’un article traitant expressément de la fraude ne me paraît donc pas complètement incongrue.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Nous entendons la position de Nathalie Goulet. Nous aurons d’ailleurs l’occasion d’entendre de nouveau notre collègue sur l’article 43 A et le suivant.
Mme Nathalie Goulet. J’espère que ce n’est pas un reproche ! (Sourires.)
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Nous sommes tout à fait d’accord sur la nécessité d’adopter des mesures contre la fraude. Toutefois, cet amendement nous semble manquer de précision tant sur les mesures conservatoires que sur les « profils » de fraudeurs ; ce n’est pas parce que l’on a un « profil » de fraudeur que l’on en est forcément un !
Il y aura un important volet anti-fraude aux prestations dans la quatrième partie, notamment à partir de l’article 43. Nous aurons ainsi l’occasion de revenir de manière plus précise sur le sujet.
La commission propose donc le retrait de cet amendement. À défaut, l’avis de la commission serait défavorable, pour des raisons non pas de fond, mais de forme.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. C’est un sujet important. Il fait l’objet de débats réguliers. Nous partageons évidemment la préoccupation que Mme Goulet a exprimée. Mais nous pensons qu’une telle mesure n’a pas de réelle utilité.
D’abord, les Urssaf disposent déjà de prérogatives importantes pour prendre des mesures conservatoires dès lors qu’une fraude est commise et dûment constatée. Elles disposent de procédures bien plus rapides que les outils de droit commun.
Ensuite, en cas d’adoption d’un tel amendement, les Urssaf ne pourraient engager aucune action supplémentaire.
Enfin, je le rappelle, une mesure de saisie est une prérogative de puissance publique importante. Elle doit reposer sur des faits établis. À cet égard, je rejoins M. le rapporteur général : l’énoncé est un peu flou. Qu’est-ce que la détection de « profils de fraudeurs » ? Un constat sur une personne ? Un simple soupçon sur une entreprise du fait d’un doute sur sa situation ? Il n’est pas possible de justifier de mesures conservatoires potentiellement très lourdes pour les entreprises sur la base d’un cadre juridique insuffisamment précis, du moins à nos yeux.
Pour ces raisons, l’avis du Gouvernement est défavorable.
M. le président. Madame Goulet, l’amendement n° 84 rectifié bis est-il maintenu ?
Mme Nathalie Goulet. Non, je vais le retirer, monsieur le président.
Toutefois, je souhaite apporter une précision. Mon amendement s’inscrit dans le cadre de l’article L. 133-1 du code de la sécurité sociale, qui commence par les mots : « Lorsqu’un procès-verbal de travail dissimulé a été établi ». En l’occurrence, la fraude est donc déjà constatée, puisqu’il y a un procès-verbal.
Je suis plus sensible à l’argument selon lequel les Urssaf disposent déjà des prérogatives nécessaires.
Je vais retravailler le sujet d’ici à l’année prochaine. Dans l’immédiat, je retire cet amendement.
M. le président. L’amendement n° 84 rectifié bis est retiré.
L’amendement n° 622 rectifié bis, présenté par MM. Henno et P. Martin, Mme Dindar, MM. Kern, Janssens, Delcros et Moga, Mme Guidez, M. Levi, Mme Vermeillet, MM. Laugier, S. Demilly, Hingray, Lafon et Chauvet, Mme Morin-Desailly et MM. Cazabonne et Le Nay, est ainsi libellé :
Après l’article 14
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Après le d du 4° du III de l’article L. 136-1-1 du code de la sécurité sociale, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« …) La carte accordée par nécessité de service aux salariés des opérateurs de transports publics urbains, en application d’une convention collective nationale ; ».
II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Olivier Henno.
M. Olivier Henno. Cet amendement, à la différence du précédent, avait été adopté l’année dernière, mais sa durée de vie avait été un peu identique à celle de certaines femmes d’Henri VIII – je pense à Anne Boleyn (Sourires.) –, puisqu’il n’avait pas survécu, en raison du sort que le Sénat avait réservé au PLFSS pour 2020.
Il s’agit de clarifier la caractérisation comme outil professionnel de la carte accordée par nécessité de service aux 55 000 salariés relevant de la convention collective nationale du transport urbain. Cela concerne tous les opérateurs de transports publics. Pendant près de dix ans, et jusqu’à récemment, toutes les caisses d’Urssaf ont systématiquement assimilé la carte de service à un outil de travail en suivant une doctrine basée sur le droit social et la réalité d’usage de celle-ci. Or certains contrôles se sont récemment affranchis de cette doctrine, ce qui soulève un certain nombre de difficultés.
Nous proposons de sécuriser le dispositif et de faire en sorte que la carte soit assimilée à un véritable outil de travail et à une obligation.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Un tel amendement a effectivement été débattu l’an dernier. M. Dussopt nous avait indiqué que l’évaluation de ce qui relevait d’un avantage devant être assujetti à cotisation était complexe. On n’en doute pas… Il avait déclaré que le sujet devait relever d’un traitement réglementaire alors en cours d’examen par la ministre de la transition écologique de l’époque.
J’aimerais savoir quelles évolutions le dossier a connues depuis l’année dernière. Le problème ne me semble pas encore résolu, à en croire nos collègues et les entreprises de transports urbains concernées, qui parlent d’insécurité juridique. J’aimerais qu’il puisse être réglé et que nous n’ayons pas à inscrire de telles dispositions dans le code de la sécurité sociale.
Nous avons besoin de garanties. Si le Gouvernement nous en apporte, je demanderai le retrait de cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Le Gouvernement n’est pas favorable à cet amendement. Pour autant, nous vous proposons de travailler ensemble sur le sujet. Nous n’avons pas pu avancer depuis l’année dernière, faute d’avoir réussi à lancer le sujet avec les villes. Or, vous le savez bien, la question est celle de l’hétérogénéité des tarifs pratiqués et de la valeur des avantages. Il faut travailler quasiment au cas par cas avec les différentes villes.
Nous avons réussi à avancer très concrètement sur des problématiques analogues, comme celle des remontées mécaniques utilisées par les professeurs de ski dans les stations de sports d’hiver.
Je suggère de travailler à l’évaluation de la valeur d’un tel avantage, qui est aujourd’hui hétérogène sur le territoire. Cela permettrait de sécuriser juridiquement le dispositif et d’adopter une mesure comme celle que vous prônez.
À ce stade, je demande le retrait de cet amendement, faute de quoi l’avis serait défavorable.
M. le président. La parole est à M. Olivier Henno, pour explication de vote.
M. Olivier Henno. Je remercie M. le secrétaire d’État de sa réponse. Je rappelle cependant que cet amendement avait été voté à l’unanimité l’année dernière. Il a été redéposé, parce que la négociation avec l’Acoss, qui aurait pu être une solution, a été bloquée par la SNCF et la RATP, ces deux entreprises ne souhaitant pas ouvrir la discussion dans ce cadre.
J’attends l’avis définitif du rapporteur général. Nous sommes dans une situation de blocage. Encore une fois, revenir à la situation antérieure ne coûterait pas un euro au contribuable.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Monsieur le secrétaire d’État, j’entends bien votre argument selon lequel l’on n’a pas encore suffisamment discuté avec les différentes communes ou autorités de transports concernées. Mais une année s’est tout de même écoulée.
Nous devons, me semble-t-il, signifier aux Urssaf que nous sommes d’accord sur le principe pour considérer le montant auquel l’avantage doit s’évaluer. Pour l’instant, on est dans le flou.
C’est pourquoi je préfère émettre un avis de sagesse sur cet amendement.
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.
Mme Nathalie Goulet. Nous voterons évidemment cet amendement des deux mains. D’une part, le Sénat ne doit pas se déjuger. D’autre part, une année s’est écoulée, et je crois qu’il faut donner un signal fort pour parvenir à une solution pérenne et acceptable.
On nous reproche souvent le moindre rôle joué par le Parlement. En l’occurrence, nous sommes complètement dans notre rôle, mais nous sommes face à des blocages injustifiés.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 14.
L’amendement n° 949, présenté par Mme Poncet Monge, M. Benarroche, Mme Benbassa, M. Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon et Mme Taillé-Polian, est ainsi libellé :
Après l’article 14
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
À la première phrase du 6° de l’article L. 611-1 du code de la sécurité sociale, les mots : « au seuil mentionné au 2° du 2 du IV de l’article 155 du code général des impôts » sont remplacés par les mots : « à 20 % du montant annuel du plafond mentionné à l’article L. 241-3 du présent code ».
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge
Mme Raymonde Poncet Monge. Cet amendement vise à mettre fin à la distorsion de concurrence entre les professionnels de la location de biens meublés selon qu’ils passent par des plateformes numériques d’échange de biens ou non.
Nous proposons de clarifier le cadre social applicable aux loueurs professionnels louant des biens meublés sur ces plateformes en faisant contribuer à la solidarité sociale nationale les professionnels du tourisme qui les utilisent au même titre que les acteurs de l’économie traditionnelle.
Le seuil retenu pour l’assujettissement des loueurs aux cotisations sociales, qui est aujourd’hui fixé à 23 000 euros par an, nous semble excessif. En effet, un loueur louant sa résidence principale jusqu’au seuil maximum de 120 jours par an à un prix moyen de 80 euros la nuit peut gagner jusqu’à 9 600 euros par an sans que ces revenus soient soumis au moindre euro de cotisation sociale. En revanche, les loueurs de biens dits meubles, comme des voitures ou des tondeuses, sont assujettis aux cotisations sociales dès le dépassement du seuil de 20 % du plafond annuel de la sécurité sociale, soit 8 104,80 euros en 2019. Il y a donc deux catégories de loueurs, selon le type de bien loué. Nous proposons de supprimer cette distorsion de concurrence en nous appuyant sur l’existant. Le même seuil de déclenchement de paiement des cotisations sociales, soit 20 % du plafond de la sécurité sociale, s’appliquerait qu’il s’agisse de biens meubles ou de biens meublés.
Par ailleurs, l’adoption de notre amendement permettrait de cibler spécifiquement les activités commerciales de location, sans viser les activités dites d’appoint – encore que ! – des particuliers, souvent inférieures au seuil de 20 % du plafond de la sécurité sociale.
Nous avons donc deux objectifs : rééquilibrer la concurrence et impliquer davantage tous les acteurs dans le financement de la sécurité sociale. Rappelons que le secteur de l’hôtellerie est particulièrement mis à mal par la crise actuelle.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Ma chère collègue, la comparaison que vous faites me semble avoir ses limites : louer sa maison, ce n’est pas la même chose que louer sa voiture ou sa tondeuse ! Et ce ne sont pas non plus les mêmes niveaux de revenus potentiels. La différence de seuils entre les activités de location me paraît donc justifiée.
Par ailleurs, le seuil que vous proposez, substantiellement plus bas, ne semble pas pertinent. Les seuils actuels résultent d’un équilibre que je crois nécessaire de préserver. L’appréciation de la nature professionnelle de l’activité doit être proportionnée.
La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 916, présenté par Mme Poncet Monge, M. Benarroche, Mme Benbassa, M. Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon et Mme Taillé-Polian, est ainsi libellé :
Après l’article 14
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – L’article L. 613-6 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Le deuxième alinéa est ainsi modifié :
a) Après le mot : « relèvent », sont insérés les mots : « du 6° de l’article L. 611-1, » ;
b) Les mots : « peuvent autoriser » sont remplacés par le mot : « autorisent » ;
2° Au début de la première phrase du troisième alinéa, les mots : « Dans ce cas, » sont supprimés.
II. – L’article 242 bis du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Au dixième alinéa, après la référence : « 3° », sont insérés les mots : « et au 4° » ;
2° Après le onzième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« 4° D’adresser par voie électronique aux unions de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales mentionnées par l’article L. 213-1 du code de la sécurité sociale, au plus tard le 31 janvier de l’année suivant celle au titre de laquelle les informations sont données, un document récapitulant l’ensemble des informations mentionnées au 2°. » ;
3° Aux douzième et treizième alinéas, la référence : « 3° » est remplacée par la référence : « 4° ».
La parole est à M. Guillaume Gontard.
M. Guillaume Gontard. Cet amendement, comme le précédent, porte sur les plateformes de location de biens et de services. Il vise à fluidifier et à clarifier la transmission des informations entre les plateformes de location, les loueurs et les Urssaf. Il s’agit ainsi de faciliter le contrôle de l’activité de location de locaux d’habitation meublés à titre lucratif.
Dans son principe, une telle mesure est similaire à l’obligation de déclaration auprès du fisc qui figure dans la loi du 23 octobre 2018 relative à la lutte contre la fraude. Nous souhaitons faire en sorte que ces plateformes transmettent systématiquement aux Urssaf les informations collectées sur les revenus issus des locations de biens meublés. Les plateformes de mise en relation deviendraient ainsi des tiers déclarants, comme peuvent déjà l’être aujourd’hui les associations et centres de gestion ou les cabinets d’expertise comptable, via la déclaration sociale nominative. Elles seraient également chargées du versement des cotisations et des contributions sociales.
En règle générale, nous sommes particulièrement vigilants à l’égard des disparités de traitement entre les plateformes et les acteurs du commerce plus traditionnel, qui subissent encore aujourd’hui le manque d’adaptation de la loi à ces nouvelles formes de concurrence. Il s’agit d’un amendement de bon sens, qui permet de clarifier la transmission des informations et de limiter la fraude, combat cher à notre Haute Assemblée.
Mme Nathalie Goulet. Très cher !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Nous ne sommes pas favorables à cet amendement, mais nous considérons qu’une telle idée mériterait d’être creusée et expertisée dans le cadre d’un prochain texte.
En l’état, cet amendement ne nous paraît pas opérationnel. En effet, le I a pour objet de transformer une autorisation possible du travailleur indépendant en une autorisation postulée, qui perd tout sens et aboutit à ce que les plateformes réalisent elles-mêmes la déclaration et le paiement des cotisations. Le II vise à prévoir la transmission par les plateformes des données concernant, notamment, l’utilisateur et les transactions réalisées, reprenant la transmission automatique qui est faite à l’administration fiscale.
Nous pensons qu’il faut continuer à réfléchir à un dispositif plus opérationnel au plan légal. Nous demandons donc le retrait de cet amendement. À défaut, l’avis serait défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 204 rectifié, présenté par Mme N. Goulet et les membres du groupe Union Centriste, est ainsi libellé :
Après l’article 14
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – À titre expérimental et pour une durée de trois ans à compter de la promulgation de la présente loi, pour les besoins de la recherche et de la constatation des fraudes en matière sociale énumérées à l’article L. 114-16-2 du code de la sécurité sociale, les agents de l’État ou des organismes de sécurité sociale peuvent, chacun pour ce qui les concerne, collecter et exploiter au moyen de traitements informatisés et automatisés n’utilisant aucun système de reconnaissance faciale les contenus, librement accessibles sur les sites internet des opérateurs de plateforme en ligne mentionnés au 2° du I de l’article L. 111-7 du code de la consommation, manifestement rendus publics par leurs utilisateurs.
Les traitements mentionnés au premier alinéa du présent I sont mis en œuvre par les agents mentionnés au premier alinéa de l’article L. 114-16-1 du code de la sécurité sociale spécialement habilités à cet effet par leur directeur ou directeur général de leur organisme ou administratif respectif et ayant le grade de contrôleur ou équivalent, dans les conditions précisées par décret en Conseil d’État. Les agents concourant à la conception et à la mise en œuvre des traitements en cause sont tenus au secret professionnel.
Les données à caractère personnel mentionnées au même premier alinéa ne peuvent faire l’objet d’une opération de collecte, de traitement et de conservation de la part d’un sous-traitant, à l’exception de la conception des outils de traitement des données.
Les données sensibles, au sens du I de l’article 6 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés, et les autres données manifestement sans lien avec les infractions mentionnées au premier alinéa du présent I sont détruites au plus tard cinq jours ouvrés après leur collecte.
Lorsqu’elles sont de nature à concourir à la constatation des manquements et infractions mentionnés au même premier alinéa, les données collectées strictement nécessaires sont conservées pour une période maximale d’un an à compter de leur collecte et sont détruites à l’issue de cette période. Toutefois, lorsqu’elles sont utilisées dans le cadre d’une procédure administrative ou pénale, ces données peuvent être conservées jusqu’au terme de la procédure.
Les autres données sont détruites dans un délai maximum de trente jours à compter de leur collecte.
Lorsque les traitements réalisés permettent d’établir qu’il existe des indices qu’une personne a pu commettre un des manquements énumérés au premier alinéa, les données collectées sont transmises au service compétent de l’administration ou de l’organisme pour corroboration et enrichissement.
Ces données ne peuvent être opposées à cette personne que dans le cadre d’une procédure de contrôle garantissant le respect du principe du contradictoire et des droits de la défense.
Le droit d’accès aux informations collectées s’exerce auprès du service d’affectation des agents habilités à mettre en œuvre les traitements mentionnés au deuxième alinéa du présent I dans les conditions prévues par l’article 105 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés.
Le droit d’opposition prévu à l’article 110 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 précitée ne s’applique pas aux traitements mentionnés au deuxième alinéa du présent I.
Les modalités d’application du présent I sont fixées par décret en Conseil d’État, pris après avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés. Ce décret précise les conditions dans lesquelles la mise en œuvre des traitements mentionnés au premier alinéa du présent I est, à toutes les étapes de celle-ci, proportionnée aux finalités poursuivies. Il précise également en quoi les données sont adéquates, pertinentes et, au regard des finalités pour lesquelles elles sont traitées, limitées à ce qui est strictement nécessaire.
II. – L’expérimentation prévue au I fait l’objet d’une analyse d’impact relative à la protection des données à caractère personnel dont les résultats sont transmis à la Commission nationale de l’informatique et des libertés, dans les conditions prévues à l’article 62 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 précitée.
III. – L’expérimentation prévue au I du présent article fait l’objet d’une première évaluation dont les résultats sont transmis au Parlement ainsi qu’à la Commission nationale de l’informatique et des libertés au plus tard dix-huit mois avant son terme.
Un bilan définitif de l’expérimentation est transmis au Parlement ainsi qu’à la Commission nationale de l’informatique et des libertés au plus tard six mois avant son terme.
La parole est à M. Michel Canevet.
M. Michel Canevet. Cet amendement, qui a été déposé sur l’initiative de Nathalie Goulet, vise à recourir au traitement informatisé et automatisé pour lutter contre la fraude sociale, comme cela existe déjà s’agissant de la fraude fiscale.
Ainsi que nous le répétons depuis le début de l’après-midi, il importe d’intensifier les actions de lutte contre la fraude sociale. À cette fin, nous avons besoin de recourir aux nouvelles technologies, notamment via les réseaux sociaux.
Nous proposons donc de donner à titre expérimental de nouveaux outils aux agents chargés du contrôle. Cela permettrait d’avancer significativement et d’envoyer des signes positifs.
Mme Nathalie Goulet. Très bien !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. La commission n’a pas pu expertiser en profondeur une telle mesure, qui apparaît à la fois complète et complexe, avec de réels enjeux en matière de libertés publiques.
Je souhaite donc entendre l’avis du Gouvernement sur la mise en œuvre d’un tel dispositif par l’administration fiscale et sur son éventuelle extension aux organismes de protection sociale.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Le dispositif institué par l’article 154 de la loi de finances pour 2020 permet aux administrations fiscales et douanières, à titre expérimental et pour une durée de trois ans, de collecter et d’exploiter au moyen de traitements informatisés et automatisés les données rendues publiques sur les sites internet des réseaux sociaux et des opérateurs de plateformes pour faciliter la recherche des infractions graves à la réglementation fiscale et douanière.
Un rapport doit être remis au Parlement six mois avant la fin de l’expérimentation. Nous pourrons ainsi décider s’il convient de pérenniser la mesure, voire de l’étendre au champ de la fraude social, comme le souhaitent les auteurs de cet amendement. Faisons les choses dans l’ordre que nous avions défini ensemble.
Le Gouvernement demande donc le retrait de cet amendement, faute de quoi l’avis serait défavorable.
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.
Mme Nathalie Goulet. J’entends bien votre argument, monsieur le secrétaire d’État. Mais le dispositif dont vous parlez s’applique en matière fiscale. Or nous travaillons sur la fraude sociale. C’est comme jouer au basket avec les règles du football ! (Sourires.) On ne prend pas la mesure de l’enjeu !
Les cas de fraude sont multiples. Par exemple, des personnes n’habitent pas à l’adresse indiquée ; souvenons-nous de ce ministre des Comores qui a été condamné parce qu’il continuait de toucher le revenu de solidarité active (RSA) en France. Je pourrais également évoquer le travail dissimulé ; certains ont un train de vie absolument disproportionné par rapport aux revenus qu’ils déclarent.
Le mécanisme est clair ; nous l’avons adopté l’an dernier en loi de finances. Il a déjà été mis en place en matière fiscale. Nous pourrions également l’appliquer, là aussi à titre expérimental, en matière sociale. Nous aurions ainsi deux expérimentations au lieu d’une.
Nous maintenons notre amendement.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. J’entends bien les arguments des uns et des autres. M. le secrétaire d’État évoque l’expérimentation que l’administration fiscale mène actuellement et indique que l’on en tirera les conséquences pour, éventuellement, l’étendre au champ de la protection sociale dans trois ans. Ne peut-on pas faire tout de suite une expérimentation en matière sociale ? La réalité des fraudes dans ce domaine me semble incontestable. Le rapport de la Cour des comptes en atteste, même si le phénomène n’est pas chiffré.
J’émets à titre personnel – je ne suis pas habilité à me prononcer au nom de la commission – un avis de sagesse sur cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote.
M. Daniel Chasseing. Bien qu’ayant déjà présenté un amendement visant à renforcer le dialogue avec les personnes faisant l’objet d’un contrôle, je voterai évidemment l’amendement de nos collègues. En effet, on entend beaucoup parler de fraude. Là aussi, il faut qu’il y ait des sanctions.
M. le président. La parole est à Mme Nadia Sollogoub, pour explication de vote.
Mme Nadia Sollogoub. Que risque-t-on à adopter un tel dispositif ? Dans le pire des cas, on se rendra compte qu’il est peu opérant. Je doute que le ministre des Comores auquel il a été fait allusion porte plainte !
M. le président. La parole est à M. Michel Canevet, pour explication de vote.
M. Michel Canevet. Il faut, me semble-t-il, accentuer les efforts pour lutter contre la fraude sociale – Nathalie Goulet ne cesse de le répéter –, qui discrédite l’ensemble de nos politiques sociales. Nous l’avons encore vu récemment avec le mécanisme de chômage partiel visant à accompagner les entreprises dans la crise sanitaire actuelle : des entreprises en profitent indûment.
Pour que les politiques publiques soient acceptées par nos concitoyens, il faut qu’elles soient fiables. Nos concitoyens n’acceptent plus tous les abus liés à nos politiques sociales. Ils se demandent où va leur argent.
Il est temps de prendre des mesures pour être efficients et aller plus vite. Nombre de rapports en ont souligné la nécessité. (Applaudissements sur des travées du groupe UC.)
M. le président. La parole est à Mme Frédérique Puissat, pour explication de vote.
Mme Frédérique Puissat. Je voterai cet amendement, mais je m’inscris en faux contre une assertion qui figure dans son exposé des motifs. Je ne vais pas défendre le Gouvernement à sa place, mais on ne peut pas affirmer qu’il n’y a pas de contrôle a posteriori du chômage partiel. Les services de l’État en font, même si ce n’est pas aussi massif que nous pourrions le souhaiter.
Nous avons été les premiers à appeler à la prudence accrue, en soulignant les risques et en demandant de ne pas aller trop vite compte tenu des contraintes qui s’imposent aux les entreprises.
Mais il faut rétablir la vérité : il y a tout de même des contrôles sur l’activité partielle.
Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales. Très bien !
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Je remercie Mme Puissat de cette précision.
Monsieur Canevet, nous partageons votre point de vue, et nous connaissons l’engagement de Mme Goulet sur le sujet. Mais il y a un principe de réalité : les décisions que vous prenez ici, dans votre pleine et entière souveraineté, ont des conséquences opérationnelles très concrètes.
Vous avez décidé qu’une expérimentation serait menée sur toutes les fraudes fiscales et douanières. Un rapport doit être remis au Parlement, ainsi qu’à la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) six mois avant la fin de l’expérimentation, afin de vérifier l’efficacité et la proportionnalité du dispositif, entre détection de la fraude et respect de la vie privée ; vous êtes certainement sensibles à cet aspect.
Les mesures sont assez novatrices. Il est intéressant pour nous d’en observer l’efficacité, dans un objectif de renforcement de la lutte contre la fraude.
Ne pouvant pas prendre d’engagement s’agissant d’une question qui relève de la responsabilité d’un de mes collègues, je ne vais pas certifier que nous ne nous opposerons pas à l’extension à la fraude sociale. Gardons simplement à l’esprit que de tels dispositifs sont lourds à mettre en œuvre : il ne faudrait pas ralentir l’expérience en cours en cherchant à en mener une deuxième de front ! (Exclamations sur les travées du groupe UC.) Ne voyez pas de malignité dans mes propos ! Vous le savez bien, des administrations travaillent ; il y a des process à mettre en place. Ce n’est pas aussi simple que de dire : « Deux expérimentations valent mieux qu’une ! » Celle qui a été lancée est déjà lourde et a un certain nombre d’implications opérationnelles. Elle est nécessaire. Nous voulons, comme vous, améliorer la lutte contre la fraude, qu’elle soit fiscale, sociale ou douanière. Nous sommes tous impatients de savoir si nous allons ainsi disposer, dans le respect de la vie privée des individus, d’un outil supplémentaire. Pour autant, cela a des conséquences opérationnelles lourdes. C’est pourquoi nous avons considéré l’année dernière que la démarche par étapes était la plus appropriée.
Si la Haute Assemblée veut émettre un avis différent aujourd’hui, c’est évidemment son droit. Je voulais simplement expliquer notre position. Gardons à l’esprit que ces dispositifs ont quelques implications personnelles non neutres, même si ce n’est pas, tant s’en faut, un argument pour ne rien faire.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Je maintiens mon avis de sagesse, mais il s’agit d’une sagesse plutôt favorable.
Monsieur le secrétaire d’État, j’entends bien vos propos, mais il faut faire les efforts nécessaires, sous peine d’entretenir la suspicion sur les démarches de l’administration. Je ne doute pas de sa bonne volonté. Alors, agissons ! On a trop longtemps attendu. J’ai pu le mesurer s’agissant des suspicions de fraude à l’inscription pour des étrangers : il a fallu dix ans pour se doter d’une réglementation très précise, afin de pouvoir agir efficacement.
Il faut aller plus vite. C’est ce que nous vous demandons. Cela me paraît assez légitime.
M. le président. La parole est à Mme Françoise Gatel, pour explication de vote.
Mme Françoise Gatel. Monsieur le secrétaire d’État, vous avez raison de ne pas vouloir promettre des choses qui vous semblent impossibles ou, à tout le moins, prématurées.
Toutefois, si le Parlement légifère, contrôle et évalue le Gouvernement, il lui arrive également de le stimuler. Je crois qu’en matière de fraude sociale, dans un moment de crise de confiance extrêmement aiguë dans ce pays, nous devons être extrêmement vigilants sur le seuil d’intolérance de nos concitoyens.
Vous devez vous montrer ambitieux sur le sujet. C’est essentiel tant du point de vue financier qu’au regard de la nécessité de démontrer en amont par des signes très forts qu’il n’y a pas d’impunité ! (Applaudissements sur des travées du groupe UC.)
M. le président. La parole est à M. Fabien Gay, pour explication de vote.
M. Fabien Gay. Nous sommes d’accord : il faut mener la lutte contre toutes les fraudes ; toutes sans exception ! Il faut donc toutes les évoquer.
Nous cherchons.
Si l’on cherche des milliards d’euros, on peut effectivement s’attaquer à la fraude au RSA – elle existe, c’est vrai –, qui représente 800 millions d’euros. Mais la fraude à l’impôt sur les sociétés, c’est 27 milliards d’euros ! (On évoque également l’ISF sur les travées du groupe SER.)
Vous parlez des cotisations sociales ? La principale fraude en la matière – arrêtez-moi si je me trompe, monsieur le secrétaire d’État –, ce sont les 14 milliards d’euros qui ne sont pas acquittés par les sociétés ! Voilà le véritable problème !
On aurait aussi aimé voir le Gouvernement s’attaquer à la fraude fiscale. Là encore, je ne peux citer que des estimations : en matière de fraude, il est toujours difficile de connaître les chiffres précis ; nous n’avons que des ordres de grandeur. L’évasion fiscale, c’est 80 milliards d’euros !
Il faut un vrai débat au Parlement et des solutions pérennes permettant d’aller chercher l’argent partout où il se trouve, en s’attaquant au premier lieu aux 80 milliards d’euros de l’évasion fiscale. Combien de personnels de Bercy y sont dédiés ? Selon les différents membres du Gouvernement que nous interrogeons, il y en a moins qu’il y a dix ans.
Il faut tout remettre à plat ! Les schémas d’optimisation fiscale sont insupportables pour le plus grand nombre de nos concitoyens. Ils voient bien que de grandes entreprises touchent des aides publiques et licencient, qu’elles continuent de bénéficier des plans d’aide, comme Amazon, en engrangeant des milliards d’euros et en jouissant de ces schémas !
Certes, il est complexe de régler tout cela en un amendement ; ce n’est jamais le bon moment… Mais il me semble que le Parlement devrait avoir un vrai temps d’échanges pour trouver des solutions pérennes contre l’ensemble des fraudes, à commencer par les plus chères. Vous ne les citez pas toujours…
M. le président. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour explication de vote.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Je n’ai rien à ajouter aux propos de Fabien Gay sur la nécessité d’évaluer l’ensemble de la fraude et d’élaborer une stratégie de combat cohérente.
L’essentiel de la fraude sociale provient des mauvaises déclarations, intentionnelles ou non – quand il s’agit de fraude, c’est intentionnel – des entreprises qui sous-estiment leurs versements de cotisations.
L’argument central de nos collègues est que les Français sont très sensibles au problème. Simplement, il faut bien expliquer à nos concitoyens – ils sont sensibles à toutes les fraudes – que le cœur de cible prioritaire est bien la non-déclaration par un certain nombre d’entreprises. Il y a évidemment des réseaux ; nous les connaissons. Comme le montre le rapport de Mme Goulet, ils sont bien organisés. Il faut les combattre !
Mais je vois bien comment, par le discours sur la « sensibilité » de nos concitoyens, on entretient le mythe du bouc émissaire, de celui qui profiterait indûment et massivement des aides sociales. (Protestations sur des travées du groupe UC.) Et j’entends très peu parler des cotisations non versées par les entreprises, qui représentent pourtant le gros du paquet !
Ayons donc une vision de la fraude globale, équilibrée et proportionnée à sa nature !
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Je ne voudrais pas que mes propos puissent faire subsister la moindre suspicion sur la volonté du Gouvernement. Nous luttons clairement contre toute triche sociale, fiscale et douanière.
Je ne peux pas non plus laisser dire que le Gouvernement n’a rien fait depuis le début du quinquennat contre la fraude et l’évasion fiscales. Nous sommes ravis quand le Parlement nous stimule, mais il nous arrive de faire preuve de volontarisme !
En tout cas, le Gouvernement n’a aucune opposition de principe, tant s’en faut, au fait de disposer de tous les outils de lutte contre la fraude fiscale, sociale et douanière.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 14.
Article 14 bis (nouveau)
Au 3° de l’article L. 142-1 du code de la sécurité sociale, après la référence : « L. 3253-18, », est insérée la référence : « L. 5212-9, ».
M. le président. L’amendement n° 150, présenté par M. Vanlerenberghe, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Cet amendement a pour objet de supprimer l’article 14 bis, qui ne nous semble pas avoir sa place dans une loi de financement de la sécurité sociale.
En effet, cet article rétablit l’attribution au contentieux général de la sécurité sociale des litiges susceptibles de naître lors du recouvrement de la contribution liée à l’obligation d’emploi de travailleurs handicapés, qui finance l’Association de gestion du fonds pour l’insertion professionnelle des personnes handicapées (Agefiph). Cette association n’entre pas dans le périmètre des lois de financement de la sécurité sociale. Il en est de même du champ de compétence des juridictions.
C’est pourquoi nous demandons la suppression de l’article.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Cet article contribue à l’harmonisation du recouvrement opéré au sein de la sphère sociale que prévoit l’article 18 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2020. Assurer un parcours de recouvrement et de contentieux unifié pour les cotisants et les Urssaf a une incidence directe non seulement pour les cotisants en termes de simplicité, mais aussi pour les Urssaf en termes de gestion et de coûts. L’unicité du parcours contentieux a des incidences sur le recouvrement social. Par ailleurs, il nous semble que des modifications en la matière sont possibles dans un projet de loi de financement de la sécurité sociale.
Le Gouvernement est donc défavorable à la suppression de cet article.
M. le président. En conséquence, l’article 14 bis est supprimé.
Article 14 ter (nouveau)
Après l’article L. 713-12 du code de la sécurité sociale, il est inséré un article L. 713-13 ainsi rédigé :
« Art. L. 713-13. – Les articles L. 376-1 à L. 376-4 et L. 454-1 à L. 454-2 sont applicables pour les assurés qui relèvent du présent régime. » – (Adopté.)
Article 15
I. – A. – L’article L. 731-13-2 du code rural et de la pêche maritime est ainsi rédigé :
« Art. L. 731-13-2. – I. – Les personnes mentionnées aux articles L. 722-4 et L. 731-23 ont l’obligation de déclarer par voie dématérialisée les éléments nécessaires au calcul de leurs cotisations et contributions sociales dans le cadre de la souscription de la déclaration prévue à l’article 170 du code général des impôts selon les modalités déterminées au même article 170. Dans les cas où la déclaration mentionnée audit article 170 n’est pas souscrite dans les conditions mentionnées à la première phrase du présent alinéa, les personnes mentionnées aux articles L. 722-4 et L. 731-23 du présent code sont tenues d’effectuer la déclaration pour le calcul de leurs cotisations et contributions sociales par voie dématérialisée auprès des caisses de mutualité sociale agricole dont elles relèvent.
« Les caisses de mutualité sociale agricole mentionnées à l’article L. 723-1 reçoivent de l’administration fiscale, à leur demande ou à celle des personnes mentionnées au premier alinéa du présent I, les informations nominatives nécessaires au calcul des cotisations et contributions.
« Le numéro d’inscription au répertoire national d’identification des personnes physiques peut être utilisé pour les échanges prévus au présent I. Les modalités selon lesquelles ces échanges sont réalisés sont déterminées par un décret en Conseil d’État.
« II. – Les personnes mentionnées au premier alinéa du I procèdent par voie dématérialisée au versement des cotisations et contributions sociales.
« III. – La méconnaissance de l’obligation de déclaration ou de versement par voie dématérialisée définie au premier alinéa du I et au II du présent article entraîne l’application de la majoration prévue, dans l’un ou l’autre cas, au II de l’article L. 133-5-5 du code de la sécurité sociale. »
B. – L’article L. 731-13-2 du code rural et de la pêche maritime dans sa rédaction résultant du présent I est applicable à compter des déclarations transmises en 2022 au titre des revenus de l’année 2021.
II. – A. – Après le deuxième alinéa du IV de l’article 19 de la loi n° 2019-1446 du 24 décembre 2019 de financement de la sécurité sociale pour 2020, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« À Saint-Barthélemy, les mêmes articles L. 613-2 et L. 613-5 restent applicables, dans leur rédaction antérieure à la présente loi, jusqu’aux déclarations transmises en 2022 au titre des revenus de l’année 2021. »
B. – Au troisième alinéa de l’article L. 752-1 du code de la sécurité sociale, la référence : « L. 611-1, » est supprimée.
III. – L’article L. 613-2 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2019-1446 du 24 décembre 2019 de financement de la sécurité sociale pour 2020, est complété par un IV ainsi rédigé :
« IV. – La méconnaissance de l’obligation de déclaration ou de versement par voie dématérialisée définie au premier alinéa du I et aux II et III du présent article entraîne l’application de la majoration prévue, dans l’un ou l’autre cas, au II de l’article L. 133-5-5 du code de la sécurité sociale. »
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 763 rectifié, présenté par Mme Féret, M. Jomier, Mme Lubin, M. Kanner, Mme Conconne, M. Fichet, Mmes Jasmin, Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Antiste et J. Bigot, Mme Bonnefoy, MM. Bouad, Durain et Gillé, Mme Harribey, M. P. Joly, Mme G. Jourda, M. Leconte, Mme Lepage, MM. Lozach, Lurel, Marie et Mérillou, Mme Monier, MM. Montaugé et Pla, Mme S. Robert, MM. Sueur, Temal et Tissot, Mmes Préville, Briquet et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéas 2, première et seconde phrases, 5, 6 et 12
Supprimer les mots :
par voie dématérialisée
La parole est à Mme Corinne Féret.
Mme Corinne Féret. Cet article prévoit qu’il sera procédé à l’unification des déclarations sociales et fiscales de revenus des non-salariés agricoles (NSA) à compter de 2022.
L’obligation de procéder à ces déclarations par voie numérique est regrettable. Elle ne tient pas compte des non-salariés agricoles qui résident en zones blanches et ne peuvent pas recourir au versement dématérialisé en raison de contraintes techniques liées au fonctionnement du réseau de communication.
En outre, à l’occasion de l’examen en séance publique du projet de loi d’accélération et de simplification de l’action publique, un amendement visant à interdire la contrainte de recourir à des procédures et à des communications dématérialisées dans les relations avec l’administration avait été retoqué, sous le prétexte suivant : « L’utilisation de procédures dématérialisées n’est jamais une obligation ; il existe toujours des moyens matériels d’accéder aux services publics. »
L’article 15, dans sa formulation actuelle, vient contredire ce principe, mais aussi les préconisations exprimées par le Défenseur des droits dans son rapport de 2019 intitulé Dématérialisation et inégalités d’accès aux services publics, qui proposait systématiquement des solutions de replacement aux démarches dématérialisées, en raison des inégalités d’accès aux services numériques et des préjudices pouvant en résulter.
M. le président. L’amendement n° 1039, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly, Lienemann et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Alinéas 6 et 12
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. Fabien Gay.
M. Fabien Gay. Voici un amendement de bon sens : on ne peut pas pénaliser les gens parce qu’ils ne font pas leur déclaration sur internet. Monsieur le secrétaire d’État, comme élu de terrain, vous savez sans doute que 17 % des gens disent ne pas avoir accès à l’outil informatique aujourd’hui. Rendre obligatoire la déclaration par internet serait pénaliser près d’un travailleur sur cinq, en l’occurrence des travailleurs agricoles.
Par ailleurs, la dématérialisation éloigne des services publics nos concitoyens les plus fragiles s’agissant du numérique. En plus, cela accroît le non-recours aux droits.
C’est très bien qu’internet et la déclaration dématérialisée existent. Mais permettons à celles et ceux qui n’y ont pas accès de faire leur déclaration autrement.
M. le président. L’amendement n° 1062, présenté par M. Vanlerenberghe, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 2
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Toutefois, peuvent procéder à ces mêmes formalités sur support papier les personnes qui, en application de l’article 1649 quater B quinquies du code général des impôts, ne sont pas tenues d’effectuer par voie dématérialisée la déclaration prévue à l’article 170 du même code.
La parole est à M. le rapporteur général, pour présenter cet amendement et donner l’avis de la commission sur les amendements nos 763 rectifié et 1039.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Nous partageons la préoccupation des auteurs des deux amendements précédents. Je propose de prévoir de la possibilité d’un envoi papier en cas d’impossibilité manifeste de satisfaire l’obligation de déclaration par voie dématérialisée. Cette procédure me paraît normale ; il faut la généraliser.
Les deux amendements qui viennent d’être présentés sont similaires. Simplement, je propose à leurs auteurs de se rallier au nôtre, dont le dispositif a le mérite d’être simple et déjà appliqué, et d’avoir un objet plus général que celui des non-salariés agricoles.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Avis défavorable. (Protestations sur les travées des groupes SER et CRCE.) Laissez-moi développer mes arguments !
L’obligation de dématérialisation des déclarations fiscales et sociales des exploitants agricoles est déjà une réalité.
M. Fabien Gay. Ce n’est pas obligatoire !
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. En application de l’article 1649 quater B quater du code général des impôts, les professionnels non salariés, comme les exploitants agricoles et les travailleurs indépendants non agricoles, sont d’ores et déjà soumis à une obligation de dématérialisation pour la déclaration de leurs revenus fiscaux professionnels, résultats ou TVA. Dans leur majorité, les exploitants agricoles confient leur déclaration à un expert-comptable ou à un conseil.
M. Fabien Gay. Pas tous !
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Le plus souvent, ce professionnel est le déclarant réel. Or la dématérialisation ne lui pose aucun problème.
À ce jour, seule la déclaration fiscale personnelle de revenus ne fait pas encore l’objet d’une obligation généralisée de dématérialisation, compte tenu des difficultés rencontrées par certains déclarants. Toutefois, il est important de rappeler que la possibilité d’effectuer cette déclaration sur papier prendra fin pour tout le monde en 2024, soit deux ans seulement après l’entrée en vigueur de l’article.
Et n’ayons pas une image complètement faussée de la réalité. Permettez-moi de vous faire part d’une anecdote personnelle. Dans ma vie passée, j’ai eu l’occasion de faire une présentation devant des éleveurs bovins. En bon Parisien – c’est ce qu’ils m’ont dit –, je me faisais d’eux une sorte d’image d’Épinal. L’un d’eux m’avait interrompu pour m’expliquer qu’il suivait en direct sur son ordinateur les cours de la bourse de Chicago ! Aujourd’hui, les éleveurs et les agriculteurs, c’est cela ; ce n’est pas du tout l’image de nappe à carreaux que vous vous en faites ! (Exclamations et marques d’ironie sur les travées des groupes SER et CRCE.)
M. Fabien Gay. C’est une caricature !
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Mais non ! Ce ne sont peut-être pas ceux que l’on croit qui sont dans la caricature.
Aujourd’hui, le taux de dématérialisation pour les déclarations de revenus comprenant un revenu agricole est déjà de 98,8 %. C’est la réalité des chiffres ! Le millésime 2020 affiche un taux de 99 % de déclarations dématérialisées pour les exploitants agricoles. Il n’y a plus que – certes, ce n’est pas négligeable – 3 000 déclarations papier.
J’en viens à la question de la sanction. Vous en conviendrez, quand il y a une obligation, il faut bien qu’il y ait une sanction. Pour autant, il faut qu’elle soit appliquée avec bon sens et discernement. C’est la raison pour laquelle, pour les personnes résidant dans les zones blanches ou ne disposant pas de l’équipement nécessaire, une logique de bienveillance et de bonne gestion sera appliquée, comme c’est le cas depuis 2015. La Mutualité sociale agricole continuera d’accompagner les exploitants et mettra en place une tolérance pour ceux qui seront dans l’incapacité de remplir l’obligation de dématérialisation de cette déclaration unifiée, en n’appliquant pas les sanctions prévues.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Quel est l’intérêt de faire des interdits que l’on n’applique pas ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. C’est déjà une réalité, madame la sénatrice. C’est ce qui est en train de se passer pour l’ensemble des déclarations.
Le Gouvernement émet un avis défavorable sur ces trois amendements. Mais si l’un d’eux devait être adopté, c’est sur l’amendement de la commission que l’avis du Gouvernement serait un peu moins défavorable.
M. le président. La parole est à Mme Victoire Jasmin, pour explication de vote.
Mme Victoire Jasmin. M. le secrétaire d’État a évoqué les zones blanches. Le dernier rapport du Défenseur des droits sur les outre-mer souligne l’existence de très grandes disparités.
Monsieur le secrétaire d’État, tous les agriculteurs n’ont pas recours à des experts-comptables. Je pense en particulier à ceux qui ont de très petits revenus.
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.
Mme Nathalie Goulet. Dans certains territoires avec des zones blanches, il y a de très grandes difficultés.
Je me réjouis que les sanctions prévues ne soient pas appliquées, mais ce n’est pas ce qui figure dans le texte ! La situation des territoires ruraux est catastrophique. Les agriculteurs sont touchés par la crise sanitaire actuelle.
Et voilà que vous proposez de fixer une telle obligation en expliquant que cela devra de toute manière se faire en 2024 ! Je ne sais pas si je serai toujours ici en 2024, mais je parie volontiers que le délai sera prolongé ; on ne pourra pas avoir de dématérialisation complète à cette date. C’est à peine possible dans certains territoires, dont le mien, avec des populations qui vieillissent et qui n’ont pas les moyens de se mettre à niveau en la matière.
Soyons prudents, en particulier s’agissant de prestations sociales. C’est la base forte du soutien à une population qui reste dans l’ensemble fragile, même s’il existe des cas particuliers de personnes qui suivent la bourse de Chicago ! À moins qu’une disposition ne vienne préciser que les sanctions ne seront pas appliquées ou qu’il y aura une tolérance, je reste très réservée sur une telle mesure.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour explication de vote.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Le Gouvernement a une vision punitive du numérique ! (Sourires sur certaines travées du groupe CRCE.)
Pour 2 % de citoyens qui ne sont aujourd’hui pas dans les clous en matière d’utilisation du numérique, on met des sanctions au marteau-pilon. Pourtant, c’est le Gouvernement qui s’oppose d’ordinaire aux sanctions, notamment s’il s’agit de grandes entreprises, en disant qu’il faut être « incitatifs ». D’ailleurs, « incitatif », il l’est à propos de l’égalité salariale entre les hommes et les femmes. Là, il n’y a aucune sanction pour ceux qui ne font rien, et il y a même des « incitations » et des bonus pour ceux qui font quelque chose ! Faisons donc de même !
Le comble du comble est qu’un représentant Gouvernement propose de faire une loi, mais de ne pas l’appliquer ou de l’appliquer « à la tête du client ». Et vous vous étonnez ensuite que les gens n’aient pas confiance dans nos lois ! De deux choses l’une : soit on applique la loi, soit on n’en fait pas. Mais on ne peut pas faire une loi et se demander ensuite s’il faut l’appliquer en fonction des réalités. On peut refixer des critères ; la bureaucratie est bien capable d’en inventer… Mais, pour 2 % de la population, ce n’est pas la peine.
Inutile de vous le dire, ceux qui n’utilisent pas le numérique n’ont pas exactement le profil de la personne qui, tout en ayant la possibilité de se connecter à la bourse de Chicago, ferait preuve d’un peu de mauvaise volonté… Ce sont des gens qui, pour des raisons d’adaptation ou de connexion, ne peuvent pas ou ne savent pas utiliser l’outil.
Honnêtement, vous nous donnez une image pitoyable du rapport à la loi ! Elle est punitive et vous nous dites que vous ne l’appliquerez pas ! Nous ne pouvons pas accepter cela. Il nous faut voter ces amendements.
M. le président. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote.
M. Daniel Chasseing. Vous indiquez que le phénomène concerne seulement 2 % des personnes.
Je dois être dans une zone fragile. Beaucoup d’éleveurs de mon territoire sont âgés et n’ont pas trouvé de successeur. Ils continuent donc leur activité. Or ils se trouvent dans une grande difficulté pour remplir leurs déclarations. France Services n’est pas présent partout. La Mutualité sociale agricole (MSA) est à cinquante kilomètres. On me fait part de nombreuses autres difficultés dans le département.
Le conseil départemental fait bien les choses. En principe, la fibre devrait être déployée partout en 2022. Mais ce n’est pas le cas aujourd’hui, et des gens sont encore en difficulté.
Je voterai donc ce qui nous est proposé.
M. le président. La parole est à Mme Corinne Féret, pour explication de vote.
Mme Corinne Féret. Monsieur le secrétaire d’État, je ne doute pas que vous connaissiez votre département, comme d’ailleurs chacune et chacune d’entre nous connaît le sien.
Cependant, je refuse d’avoir une vision extrêmement clivée entre, d’une part, les exploitants agricoles ultramodernes capables de se raccorder au réseau wifi depuis un tracteur et, d’autre part, seulement 2 % d’individus « déconnectés » ou non connectés.
Je vous invite à venir dans mon département, le Calvados,…
Mme Nathalie Goulet. En passant par l’Orne ! (Sourires.)
Mme Corinne Féret. … où trop de zones blanches existent encore. Les exploitants agricoles non salariés, comme beaucoup d’autres citoyens, ne peuvent pas procéder aux déclarations par internet. Ce n’est pas par manque de culture ou de modernité : c’est tout simplement parce qu’il n’y a pas de connexion ! Et vous voudriez les pénaliser simplement parce qu’ils ne peuvent pas se connecter et remplir leur déclaration dans les délais !
Comme cela a été indiqué, les 2 % concernés ne doivent pas être laissés sur le bord du chemin sous prétexte que les 98 % qui restent pourraient se conformer aux règles.
Notre amendement a été travaillé avec la MSA. Vous indiquez qu’elle serait prête à réaliser un accompagnement spécifique ? Elle nous disait justement regretter que les zones blanches ne soient pas évoquées dans le texte !
M. le président. La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.
M. Bernard Jomier. J’anticipe sur les amendements à venir sur les marins ou le secteur du spectacle vivant, car c’est la même problématique.
D’une manière générale, il est étonnant d’expliquer qu’une obligation ne sera pas réellement appliquée alors qu’une sanction réelle existe en cas de non-motivation de l’absence d’utilisation des moyens numériques.
Par ailleurs, le pendant du numérique, c’est l’accessibilité pour toutes les personnes. Or, selon un rapport de l’année dernière, la majorité des sites publics ne sont pas accessibles à celles qui sont en situation de handicap.
Il est tout de même incongru d’être extrêmement invasif pour faire appliquer une obligation à 100 % de la population quand l’État ne rend toujours pas accessibles ses propres sites numériques alors que la loi lui en fait obligation depuis bien longtemps !
Vous ne tolérez pas que 2 % échappent à la règle, mais vous acceptez que celle qui concerne l’accessibilité des personnes en situation de handicap ne s’applique pas, et sur le long terme !
Votre manière de légiférer est brutale ! Il est brutal de rejeter des amendements tendant simplement à apporter un peu de souplesse au profit des personnes dont la situation l’exige. Notre solution ne consiste nullement à renoncer à un principe général et à l’utilité du numérique.
Je comprends de mieux en mieux les échecs que l’on rencontre en proposant des outils numériques à la population si l’on s’y prend ainsi ! Ce n’est pas étonnant, mais c’est regrettable. Nous souscrivons tous ici à l’intérêt des outils numériques.
J’appelle donc à voter ces amendements, qui sont simplement justes.
M. le président. La parole est à Mme Élisabeth Doineau, pour explication de vote.
Mme Élisabeth Doineau. Mes chers collègues, dans cet hémicycle comme ailleurs, faisons preuve de nuance : entre la bourse de Chicago et le misérabilisme que certains expriment, il y a toute une palette !
S’il est une profession qui s’est remise en cause ces dernières années, c’est bien celle des agriculteurs ! Ils ont fortement avancé et ont fait leur révolution numérique ; je veux les saluer !
En revanche, il ne faut pas oublier que l’illectronisme existe dans toutes les professions et toutes les générations. Une mission d’information menée par Jean-Marie Mizzon a montré combien certaines populations pouvaient être difficulté par rapport à l’outil numérique dans nos territoires.
C’est pourquoi le réseau des maisons France Services vient aussi en appui. De nombreux autres partenaires sur les territoires nous offrent également des solutions pour accompagner les personnes en difficulté.
Il faut des nuances. L’amendement de la commission me convient tout à fait.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. J’ai demandé le retrait des deux autres au profit du nôtre, qui répond à vos préoccupations sur les articles 15 quater et 15 quinquies, monsieur Jomier.
Nous sommes pour la dématérialisation, mais nous demandons une dérogation quand elle n’est pas possible. C’est simple et de bon sens. D’ailleurs, cela figure dans d’autres articles du PLFSS.
Je vous propose donc d’adopter l’amendement de la commission.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Ne caricaturez pas mes propos ; je n’ai jamais dit que les agriculteurs étaient tous connectés à la bourse de Chicago. Je voulais d’abord mettre en lumière la perception erronée que j’en avais moi-même. Je suis un élu des Hauts-de-Seine ; ce n’est pas un département très rural. Comme le disait Mme Doineau, méfions-nous de nos propres perceptions.
Sur le fond, la réalité est que 99 % des déclarations s’effectuent aujourd’hui par voie dématérialisée. Une grande majorité de travailleurs indépendants, dont les exploitants agricoles, ont recours à des experts-comptables, qui ne sont pas soumis à la problématique des zones blanches. Mais j’entends vos remarques sur le sujet. Nous y travaillons, de même que nous travaillons sur l’illectronisme ou la question de l’accès aux sites publics. Vous avez raison, monsieur Jomier ; les difficultés d’accès sont inadmissibles. C’est l’une des priorités de ma collègue Amélie de Montchalin.
Les déclarations sont dans leur quasi-totalité d’ores et déjà dématérialisées. Il en est une qui fait exception : la déclaration fiscale personnelle de revenus pour les particuliers, correspondant au formulaire n° 2042. Nous vous proposons d’unifier les procédures. Ce n’est ni plus ni moins qu’une proposition de simplification pour les administrés.
Je confirme l’avis défavorable du Gouvernement sur les deux premiers amendements et son avis un peu moins défavorable sur l’amendement de la commission.
M. le président. Je mets aux voix l’article 15, modifié.
(L’article 15 est adopté.)
Article additionnel après l’article 15
M. le président. L’amendement n° 1063, présenté par M. Vanlerenberghe, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Après l’article 15
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 133-4-2 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa du III, après la référence : « l’article L. 8224-2 du code du travail », sont insérés les mots : « ou quand les faits de travail dissimulé sont commis en bande organisée » ;
2° Le IV est complété par une phrase ainsi rédigée : « Le plafond de la dissimulation partielle de salariés s’apprécie au regard de l’activité. »
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Cet amendement vise à limiter la possibilité laissée aux organismes de sécurité sociale de moduler les annulations de réductions de cotisations lorsque le travail dissimulé reste très réduit.
Nous proposons d’interdire toute possibilité de moduler la sanction lorsque l’infraction est commise en bande organisée et de préciser que le plafond de l’activité dissimulée permettant la modulation est le même quel que soit le nombre de salariés concernés.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 15.
Article 15 bis (nouveau)
I. – L’article L. 725-3 du code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :
1° Après le mot : « recouvrement », la fin du deuxième alinéa est ainsi rédigée : « : » ;
2° Après le même deuxième alinéa, sont insérés trois alinéas ainsi rédigés :
« a) Des cotisations dues pour la couverture des prestations d’assurance maladie et maternité prévues par le statut national des industries électriques et gazières mentionné à l’article 47 de la loi n° 46-628 du 8 avril 1946 sur la nationalisation de l’électricité et du gaz, pour les salariés des sociétés d’intérêt collectif agricole relevant du 6° de l’article L. 722-20 du présent code ;
« b) Des cotisations dues pour la couverture des prestations du régime d’assurance vieillesse, invalidité, décès, accidents du travail et maladies professionnelles des industries électriques et gazières mentionné à l’article 16 de la loi n° 2004-803 du 9 août 2004 relative au service public de l’électricité et du gaz et aux entreprises électriques et gazières.
« Les caisses de mutualité sociale agricole sont chargées du recouvrement des majorations et pénalités de retard afférentes à ces cotisations. »
II. – Le XI et le 1° du XII de l’article 18 de la loi n° 2019-1446 du 24 décembre 2019 de financement de la sécurité sociale pour 2020 sont abrogés.
III. – Le I est applicable aux cotisations dues au titre des périodes d’activité courant à compter du 1er janvier 2021 pour la couverture des prestations en nature d’assurance maladie et maternité et au titre des périodes d’activité courant à compter du 1er janvier 2022 pour la couverture des autres prestations.
M. le président. L’amendement n° 151, présenté par M. Vanlerenberghe, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 5
Compléter cet alinéa par les mots :
, pour les salariés des sociétés d’intérêt collectif agricole relevant du 6° de l’article L. 722-20 du présent code
II. – Après l’alinéa 6
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
…. – À la seconde phrase du quatrième alinéa de l’article L. 724-11 du même code, le mot : « quatrième » est remplacé par le mot : « septième ».
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Cet amendement de coordination vise à préciser que la compétence de la MSA en matière de recouvrement de cotisations vieillesse concerne seulement les salariés des sociétés d’intérêt collectif agricole d’électricité (Sicae), et non l’ensemble des salariés des industries électriques et gazières (IEG).
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’article 15 bis, modifié.
(L’article 15 bis est adopté.)
Article 15 ter (nouveau)
I. – Aux deuxième et dernier alinéas de l’article L. 781-5 du code rural et de la pêche maritime, après le mot : « assermentés », sont insérés les mots : « et agréés ».
II. – Le chapitre II du titre V du livre VII du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° L’article L. 752-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Le directeur général de la Caisse centrale de la mutualité sociale agricole agrée les agents de contrôle assermentés des caisses générales de sécurité sociale en charge du contrôle des non-salariés des professions agricoles, les agents de contrôle assermentés de la caisse de mutualité sociale agricole mentionnée aux troisième et quatrième alinéas du présent article et les agents de contrôle assermentés de la caisse de mutualité sociale agricole mentionnée à l’article L. 781-44 du code rural et de la pêche maritime, dans des conditions définies par arrêté conjoint des ministres chargés de l’agriculture et de la sécurité sociale. » ;
2° L’article L. 752-5 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, le mot : « trois » est remplacé par le mot : « quatre » ;
b) Il est ajouté un 4° ainsi rédigé :
« 4° À la gestion des non-salariés des professions agricoles. » – (Adopté.)
Article 15 quater (nouveau)
I. – La section 1 du chapitre III bis du titre III du livre Ier du code de la sécurité sociale est ainsi modifiée :
1° À la fin de l’intitulé, les mots : « au regard des employeurs » sont supprimés ;
2° Après l’article L. 133-5-9, il est inséré un article L. 133-5-9-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 133-5-9-1. – Un dispositif simplifié obligatoire de déclaration et de paiement des cotisations et contributions sociales d’origine légale ou conventionnelle est utilisé par les marins non-salariés mentionnés au 3° de l’article L. 5511-1 du code des transports exerçant une activité directement liée à l’exploitation du navire ainsi que par leur conjoint collaborateur mentionné à l’article L. 5556-1 du même code.
« Ce dispositif permet de satisfaire les formalités :
« 1° D’immatriculation auprès de l’organisme désigné à l’article L. 133-5-10 du présent code ;
« 2° De déclaration des éléments nécessaires à la détermination des assiettes et des taux des cotisations et contributions sociales applicables ;
« 3° De paiement des cotisations et contributions sociales d’origine légale ou conventionnelle prévues par la loi ainsi que, le cas échéant, dans des conditions fixées par convention, d’autres cotisations et contributions sociales.
« Toute personne utilisant le dispositif simplifié mentionné au premier alinéa est tenue d’effectuer ces formalités par voie dématérialisée, au plus tard à une date fixée par décret.
« Toutefois, peuvent procéder à ces mêmes formalités sur support papier les personnes qui, en application de l’article 1649 quater B quinquies du code général des impôts, ne sont pas tenues d’effectuer par voie dématérialisée la déclaration prévue à l’article 170 du même code.
« Le non-respect de l’obligation de procéder par voie dématérialisée à ces différentes formalités entraîne l’application de la majoration prévue à l’article L. 133-5-5 du présent code. » ;
3° Le premier alinéa de l’article L. 133-5-10 est ainsi modifié :
a) Les mots : « employeurs ou par les particuliers » sont remplacés par le mot : « redevables » ;
b) La référence : « à l’article L. 133-5-6 » est remplacée par les références : « aux articles L. 133-5-6 et L. 133-5-9-1 ».
II. – Le I du présent article est applicable aux cotisations et contributions dues au titre des périodes courant à compter du 1er janvier 2021.
M. le président. L’amendement n° 83 rectifié, présenté par Mme N. Goulet et les membres du groupe Union Centriste, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 2
Insérer neuf alinéas ainsi rédigés :
…° Après l’article L. 133-5-4, il est inséré un article L. 133-5-4-… ainsi rédigé :
« Art. L. 133-5-4-…. – Nonobstant l’article L. 133-5-3 et le code des relations entre le public et l’administration, un employeur est tenu d’accomplir sans délai auprès des administrations et organismes chargés des missions mentionnées au second alinéa du I de l’article L. 133-5-3 du présent code qui en font la demande les formalités déclaratives mentionnées au II du même article L. 133-5-3 lorsqu’il existe des présomptions graves et concordantes qu’il a contrevenu, contrevient ou va contrevenir à ses obligations à l’égard de ces administrations ou organismes ou à l’égard de ses salariés.
« L’existence de présomptions graves et concordantes est notamment considérée comme établie lorsque l’employeur dirige ou dirigeait une personne morale réunissant au moins trois des conditions suivantes :
« 1° Elle a été créée depuis moins de douze mois ;
« 2° Elle a mis fin à son activité moins de six mois après sa création ;
« 3° Elle utilise ou utilisait les services d’une entreprise de domiciliation au sens de l’article L. 123-11-2 du code de commerce ;
« 4° Son siège est ou était situé hors d’un État membre de l’Union européenne ou partie à l’accord sur l’Espace économique européen ;
« 5° Elle comptait plus de dix associés ou salariés dès le premier mois suivant sa création ou plus de vingt dès le deuxième mois.
« En cas de retard injustifié dans l’accomplissement d’une formalité déclarative relevant du premier alinéa, d’omission de données devant y figurer, d’inexactitude des données déclarées ou d’absence de correction dans le cas prévu au deuxième alinéa de l’article L. 133-5-3-1 du présent code, il est fait application des deux derniers alinéas de l’article L. 133-5-4. » ;
La parole est à Mme Nathalie Goulet.
Mme Nathalie Goulet. Cet amendement vise à lutter contre les entreprises éphémères, qui constituent une violation non seulement de règles multiples et variées, mais aussi du principe de concurrence loyale sur nos territoires.
Dans notre rapport remis au Premier ministre l’an dernier, Carole Grandjean et moi avons formulé un certain nombre de propositions. Il n’y a pas de lien entre les tribunaux de commerce et les Urssaf. Il n’y a pas de clignotant permettant d’anticiper un certain nombre de faits et d’empêcher ces entreprises de continuer à embaucher.
Les entreprises éphémères posent de très nombreux problèmes. Nous avions notamment pris l’exemple de la Banque carrefour de la sécurité sociale, en Belgique, qui avait identifié des signaux d’alerte, afin de pouvoir réduire les risques qu’elles posent.
L’amendement vise à mettre en place plusieurs clignotants, comme la possibilité pour un tribunal de commerce de suspendre les droits à la déclaration sociale nominative (DSN) pour des entreprises constituées avec un faible capital social, usant de services de domiciliation et comptant un nombre important de salariés. Il s’agit de stopper l’hémorragie.
Deux rapports de l’organisme Traitement du renseignement et action contre les circuits financiers clandestins (Tracfin) sur les entreprises éphémères, principal outil pour blanchir des fonds illicites, soutiennent cette demande de détection précoce.
Il n’y a pas que des fraudes aux prestations. Il existe également des fraudes aux cotisations. C’est un phénomène que nous ne parvenons pas à endiguer, faute de le détecter suffisamment tôt.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. La commission demande le retrait de cet amendement. C’est le retour de la référence au « profil » des fraudeurs. Encore une fois, on n’est pas nécessairement un fraudeur parce qu’on a un « profil » de fraudeur !
La simplification des démarches administratives est évidemment d’intérêt général. Mais il apparaît excessif d’introduire d’emblée le principe des soupçons à l’égard d’entrepreneurs sur le fondement de signaux faibles dont aucun ne révèle une pratique illégale.
Je comprends votre volonté de traquer la fraude. Mais je ne pense pas que l’on y parviendra par de telles démarches, sauf à rompre avec le principe de légalité, voire de légitimité.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Il est proposé de permettre aux organismes de sécurité sociale d’interdire aux entreprises de réaliser la DSN à laquelle elles sont normalement tenues en leur demandant de remplir à la place des déclarations séparées auprès de chaque organisme destinataire de la DSN qui le demanderait. Nous partageons évidemment la volonté de lutter contre la fraude, mais une telle proposition semble nuire à l’objectif.
La DSN est déjà obligatoire pour les employeurs du secteur privé depuis le 1er janvier 2017 selon une périodicité mensuelle correspondant au versement des salaires. En cas de fraude, les entreprises doivent immédiatement remplir ou corriger toutes les déclarations manquantes. L’amendement est donc sans effet sur ce point.
De manière générale, nous n’avons pas intérêt à empêcher les entreprises à risque de fraude de réaliser des déclarations selon les modalités habituelles. L’objectif est plutôt qu’elles les remplissent, pas que chaque organisme reçoive des informations séparées peu exploitables.
Je le rappelle, la DSN permet aux organismes sociaux de disposer de données mutualisées et partagées. Elle est la déclaration la plus sécurisée, la plus riche et la plus précise. Elle constitue par elle-même un outil efficace pour lutter contre la fraude. Il serait donc contreproductif d’en dispenser une entreprise.
Enfin, il est proposé d’exposer les entreprises aux sanctions et pénalités de droit commun si elles ne respectent pas la demande qui leur est faite. Or ces pénalités applicables en situation normale sont en réalité très faibles et beaucoup moins fortes que celles qui sont appliquées en cas de travail dissimulé ou de fraude. Le dispositif envisagé est donc peu dissuasif.
Par conséquent, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.
Mme Nathalie Goulet. Monsieur le secrétaire d’État, il y a tout de même un problème. Lorsqu’une entreprise éphémère continue d’embaucher alors qu’un certain nombre de signaux faibles se cumulent, elle augmente sa capacité de non-paiement des cotisations et de l’ensemble des prélèvements obligatoires.
Je vous renvoie aux travaux de Tracfin ou au rapport de la Cour des comptes sur la fraude aux cotisations. Il y a un véritable sujet. J’espère que nous pourrons travailler sur un mécanisme permettant aux tribunaux de commerce d’obtenir un peu plus d’informations.
Cela étant, je retire mon amendement.
M. le président. L’amendement n° 83 rectifié est retiré.
L’amendement n° 779 rectifié, présenté par M. Jomier, Mmes Féret et Lubin, M. Kanner, Mme Conconne, M. Fichet, Mmes Jasmin, Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Antiste et J. Bigot, Mme Bonnefoy, MM. Bouad, Durain et Gillé, Mme Harribey, M. P. Joly, Mme G. Jourda, M. Leconte, Mme Lepage, MM. Lozach, Lurel, Marie et Mérillou, Mme Monier, MM. Montaugé et Pla, Mme S. Robert, MM. Sueur, Temal et Tissot, Mmes Préville, Briquet et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéas 9, 10 et 11
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. Bernard Jomier.
M. Bernard Jomier. Il est nécessaire de ne pas entraîner l’automaticité de la majoration d’une telle pénalité. J’entends bien les garanties présentées par M. le secrétaire d’État. Mais si nous gravons un tel principe dans la loi, il sera très compliqué de produire une doctrine contraire.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. La commission demande le retrait de l’amendement, qui me semble satisfait par l’article.
Le Gouvernement pourra peut-être confirmer que le dispositif a reçu la concertation des entreprises du secteur maritime, y compris dans son aspect dématérialisé. L’alinéa 5 précise que si les entreprises ne peuvent pas procéder aux formalités prévues au présent article, elles peuvent le faire autrement. Nous maintenons la dématérialisation, mais nous pouvons aussi donner la possibilité de le faire par voie postale ou par télécopie.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Le Gouvernement demande le retrait de l’amendement ou, à défaut, émet un avis défavorable.
Nous proposons la création de ce dispositif spécifiquement pour les marins non-salariés dans un objectif de simplification.
M. le président. Je mets aux voix l’article 15 quater.
(L’article 15 quater est adopté.)
Article 15 quinquies (nouveau)
I. – La section 5 du chapitre III bis du titre III du livre Ier du code de la sécurité sociale est ainsi modifiée :
1° L’article L. 133-9 est ainsi modifié :
a) Après le mot : « procèdent », sont insérés les mots : « par voie dématérialisée » et, après le mot : « État », sont insérés les mots : « aux déclarations prévues à l’article L. 7122-23 du même code et » ;
b) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Toutefois, peuvent procéder aux formalités prévues au présent article par voie postale ou télécopie les personnes qui, en application de l’article 1649 quater B quinquies du code général des impôts, ne sont pas tenues d’effectuer par voie dématérialisée la déclaration prévue à l’article 170 du même code. » ;
2° Après le premier alinéa du 2° de l’article L. 133-9-2, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« La méconnaissance de l’obligation de déclaration ou de versement par voie dématérialisée définie à l’article L. 133-9 du présent code entraîne l’application de la majoration prévue, dans l’un ou l’autre cas, au II de l’article L. 133-5-5. »
II. – Le présent article entre en vigueur le 1er janvier 2021.
M. le président. L’amendement n° 780 rectifié, présenté par M. Jomier, Mmes Féret et Lubin, M. Kanner, Mme Conconne, M. Fichet, Mmes Jasmin, Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Antiste et J. Bigot, Mme Bonnefoy, MM. Bouad, Durain et Gillé, Mme Harribey, M. P. Joly, Mme G. Jourda, M. Leconte, Mme Lepage, MM. Lozach, Lurel, Marie et Mérillou, Mme Monier, MM. Montaugé et Pla, Mme S. Robert, MM. Sueur, Temal et Tissot, Mmes Préville, Briquet et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Bernard Jomier.
M. Bernard Jomier. Cet amendement est défendu.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Pour les mêmes raisons que précédemment, la commission demande le retrait de cet amendement, qui concerne le spectacle vivant. Comme je l’ai déjà indiqué, le texte apporte déjà des réponses. M. le secrétaire d’État l’a d’ailleurs confirmé.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Le Gouvernement demande le retrait de cet amendement. À défaut, l’avis serait défavorable.
M. le président. Je mets aux voix l’article 15 quinquies.
(L’article 15 quinquies est adopté.)
Articles additionnels après l’article 15 quinquies
M. le président. L’amendement n° 837 rectifié, présenté par MM. Iacovelli, Lévrier, Théophile, Patriat, Bargeton, Buis et Dennemont, Mmes Duranton et Evrard, MM. Gattolin et Hassani, Mme Havet, MM. Haye, Kulimoetoke, Marchand, Mohamed Soilihi et Patient, Mme Phinera-Horth, MM. Rambaud, Richard et Rohfritsch, Mme Schillinger, M. Yung et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants, est ainsi libellé :
Après l’article 15 quinquies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - L’article L. 133-4-11 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° À la première phrase, les mots : « sociales, les » sont remplacés par les mots : « sociales, le paiement est prioritairement imputé sur la créance due au principal, puis le cas échéant sur les majorations de retard et pénalités restant dues et sur les frais de justice. Pour l’affectation du paiement partiel aux sommes dues à titre principal. Les » ;
2° La seconde phrase est ainsi modifiée :
a) Après le mot : « affecté », sont insérés les mots : « au prorata du montant de chaque créance » ;
b) Les mots : « selon un ordre fixé par décret » sont remplacés par les mots et une phrase ainsi rédigés : « salariales, puis patronales et enfin aux autres contributions patronales. Toutefois, pour ces dernières, l’imputation est prioritairement effectuée sur les dettes les plus anciennes. »
II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Dominique Théophile.
M. Dominique Théophile. Poursuivre la démarche d’harmonisation des procédures de recouvrement est essentiel, afin d’en rapprocher les modalités pour les sphères fiscales et sociales. La règle la plus favorable aux redevables est toujours d’imputer d’abord les versements sur les dettes dues à titre principal pouvant faire courir des intérêts et des pénalités de retard. Elle doit être sécurisée dans la loi et devenir identique en matière sociale et en matière fiscale.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Avis favorable.
Le dispositif proposé permet de clarifier l’ordre d’imputation des cotisations et contributions sociales en cas de recouvrement partiel, afin de préserver la garantie des assurés : d’abord, les cotisations salariales ; ensuite, les cotisations patronales ; enfin, les autres contributions patronales.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Avis favorable, pour les mêmes raisons de lisibilité et de cohérence.
M. le président. Monsieur le secrétaire d’État, acceptez-vous de lever le gage ?
M. le président. Il s’agit donc de l’amendement n° 837 rectifié bis.
Je le mets aux voix.
(L’amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 15 quinquies.
L’amendement n° 787 rectifié, présenté par MM. Temal et Jomier, Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Jasmin, Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Antiste et J. Bigot, Mme Bonnefoy, MM. Bouad, Durain et Gillé, Mme Harribey, M. P. Joly, Mme G. Jourda, M. Leconte, Mme Lepage, MM. Lozach, Lurel, Marie et Mérillou, Mme Monier, MM. Montaugé et Pla, Mme S. Robert, MM. Sueur et Tissot, Mmes Préville, Briquet et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 15 quinquies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – 1° L’examen d’éligibilité ainsi que l’accord sur un ou plusieurs droits et prestations mentionnés au 2° du présent article entraîne automatiquement l’examen d’éligibilité ainsi que, le cas échéant, l’accord sur l’ensemble des droits et prestations mentionnés au 2° du présent article.
2° Le 1° du présent article est applicable aux bénéficiaires des droits et prestations suivants :
- l’allocation aux adultes handicapés, et le complément de ressources prévus aux articles L. 821-1 et L. 821-2 du code de la sécurité sociale et à l’article L. 821-1-1 dans sa rédaction antérieure au 1er décembre 2019 ;
- la prime d’activité telle que définie au titre 4 du livre 8 du code de la sécurité sociale ;
- le revenu de solidarité active tel que défini à l’article L. 262-2 du code de l’action sociale et des familles ;
- les aides personnelles au logement telles que définies à l’article L. 821-1 du code de la construction et de l’habitation ;
- l’allocation prévue aux articles 35 et 35-1, dans sa rédaction antérieure au 1erdécembre 2019, de l’ordonnance n° 2002-411 du 27 mars 2002 relative à la protection sanitaire et sociale à Mayotte ;
- l’allocation d’éducation de l’enfant handicapé et ses compléments prévus à l’article L. 541-1 du code de la sécurité sociale ;
- l’allocation d’éducation de l’enfant handicapé et ses compléments prévus à l’article 10-1 de l’ordonnance n° 2002-149 du 7 février 2002 relative à l’extension et à la généralisation des prestations familiales et à la protection sociale dans la collectivité de Mayotte ;
- l’allocation d’éducation de l’enfant handicapé et ses compléments prévus au 9° de l’article 11 de l’ordonnance n° 77-1102 du 26 septembre 1977 portant extension et adaptation au département de Saint-Pierre-et-Miquelon de diverses dispositions relatives aux affaires sociales ;
- la carte mobilité inclusion prévue à l’article L. 241-3 du code de l’action sociale et des familles ;
- la prestation de compensation du handicap prévue à l’article L. 245-1 du même code affectée aux charges mentionnées au 1° , 4° et 5° de l’article L. 245-3 dudit code ;
- tous les autres droits ou prestations mentionnés à l’article L. 241-6 du même code relevant de la compétence de la commission mentionnée à l’article L. 146-9 du même code.
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
III. – La perte de recettes résultant pour les collectivités territoriales du I est compensée, à due concurrence, par une majoration de la dotation globale de fonctionnement.
IV. – La perte de recettes résultant pour l’État du paragraphe précédent est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
V. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Bernard Jomier.
M. Bernard Jomier. Cet amendement a pour objet de lutter contre le non-recours aux aides existantes, qui constitue un réel problème pour les populations concernées. Il s’agit de faire en sorte que l’accès à un dispositif déclenche automatiquement l’examen d’éligibilité aux autres. Cela permettra d’améliorer concrètement la prise en charge des bénéficiaires.
Une étude récente de la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees) sur le taux de non-recours montre des taux extrêmement élevés, notamment en matière de santé. Le taux serait compris entre 32 % et 44 % pour la couverture maladie universelle (CMU) et entre 53 % et 67 % pour l’aide à la complémentaire santé (ACS). Il est inférieur à 10 % pour les aides aux familles, mais reste significatif.
Parmi les raisons du non-recours, la méconnaissance du public des dispositifs existants arrive de très loin en tête, le coût et la complexité d’accès aux aides occupant la deuxième place. À eux seuls, ces motifs représentant 70 % de l’ensemble des cas.
Aussi, nous proposons que l’accès à une prestation entraîne automatiquement l’étude des droits d’accès à une autre. Un tel amendement, qui nous aurait paru important en temps normal pour répondre à cette problématique, l’est d’autant plus en ces temps de crise sociale profonde ; ce sont bien les populations les plus précaires qui sont les plus touchées. Il nous paraît particulièrement important de permettre aux personnes y ayant droit d’accéder aux prestations légales, et ce afin de lutter contre le phénomène de misère sociale qui se développe.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. La commission comprend une telle demande. Les non-recours sur un certain nombre de prestations sociales sont manifestes.
Mais est-ce automatiquement aux caisses d’allocations familiales (CAF), d’examiner les autres prestations auxquelles ces personnes auraient droit ? Sur le principe, il est toujours possible de les consulter ou de s’y rendre, éventuellement en prenant rendez-vous, pour connaître ses droits.
Il ne s’agit ici non pas d’introduire un droit nouveau – il existe déjà –, mais de l’automatiser. Cela induit évidemment une charge différente de travail. Mais cette demande me paraît néanmoins intéressante.
La commission souhaite donc connaître l’avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Nous partageons évidemment pleinement l’objectif de lutte contre le non-recours aux prestations sociales, déjà en temps normal et plus encore en cette période de crise, dont vous avez rappelé qu’elle affectait au premier chef les plus modestes de nos concitoyens.
Pour autant, le dispositif proposé se heurte à un certain nombre d’impossibilités matérielles.
Ce qui existe aujourd’hui, c’est la réponse apportée par les CAF à travers les rendez-vous des droits, qui sont proposés aux allocataires et qui permettent d’étudier leur éligibilité aux différentes prestations sociales. Par ailleurs, le portail numérique www.mesdroitssociaux.gouv.fr, à défaut de résoudre toutes les situations, contribue aussi à informer les allocataires et à leur permettre de simuler leurs droits à de nombreuses prestations. Ces rendez-vous des droits se multiplient dans les territoires au sein des différentes CAF. Ces solutions, dont vous avez dressé l’état des lieux, sont encore insuffisantes pour répondre à l’ampleur de l’enjeu qu’est la lutte contre le non-recours.
C’est la raison pour laquelle le Gouvernement s’est prononcé en faveur de l’amendement de la députée Christine Cloarec-Le Nabour sur l’article 40 bis, qui viendra très prochainement en discussion dans cet hémicycle et qui étend les missions des organismes de sécurité sociale à la lutte contre le non-recours aux droits et aux prestations. Les échanges d’informations entre les organismes seront ainsi autorisés pour détecter, par des techniques dites de data mining, les personnes éligibles aux différentes prestations et les informer de leurs droits, afin qu’elles puissent en faire la demande. Voilà qui constitue une avancée importante.
À l’inverse, l’examen systématique de l’éligibilité à d’autres prestations lorsqu’un allocataire demande le bénéfice d’une première prestation, comme vous le proposez, ne semble pas atteignable. En effet, les organismes n’ont pas accès à toutes les données nécessaires de l’allocataire, par exemple ses ressources, sa situation familiale ou la gravité de son handicap, qui conditionnent le montant d’un certain nombre de prestations. Il faudrait systématiquement demander ces données à l’allocataire, parfois inutilement, puisqu’elles ne se révéleraient pas pertinentes. Cela reviendrait à engager des démarches supplémentaires pouvant ralentir l’ouverture des droits demandés, allant ainsi à rebours de l’objectif que nous visons tous ici.
Il existe une impossibilité matérielle à mettre en place un tel dispositif pouvant créer des effets de bord contreproductifs, et vous allez être amenés à améliorer les dispositifs existants, notamment en permettant aux organismes de sécurité sociale de s’attaquer au problème du non-recours aux prestations sociales en coopération avec les caisses d’allocations familiales. C’est pourquoi le Gouvernement demande le retrait de cet amendement. À défaut, l’avis serait défavorable.
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.
Mme Nathalie Goulet. Monsieur le secrétaire d’État, votre réponse est très intéressante. La difficulté d’échange de données entre les différentes caisses pose problème, que ce soit pour la fraude ou pour l’accès aux prestations. En revanche, répondre au problème du non-recours par un portail numérique ne me semble pas une solution. Vous indiquez que les allocataires ont accès à un certain nombre de documents sur le portail numérique. Or j’ai étudié le problème du non-recours aux prestations l’année dernière avec Carole Grandjean ; il concerne des personnes dont la situation est telle qu’elles ne peuvent même pas savoir à quoi elles ont droit.
La réponse n’est pas forcément législative. Elle peut être apportée par les organismes ou associations – Banque alimentaire, Restos du cœur… – qui sont en premier lieu en contact avec ces personnes. Sur le modèle du guide de l’usager de l’administration, on pourrait imaginer un guide facilitant la connaissance de l’éventail très large de prestations accessibles aux personnes vulnérables.
Peut-être que la mesure proposée dans cet amendement n’est pas conforme à ce que souhaite le Gouvernement et qu’elle pourrait nuire au dispositif voté à l’Assemblée nationale, mais, là, nous sommes face à une difficulté qui, je le répète, ne se règle pas uniquement d’un point de vue législatif ; c’est aussi un problème d’accès à la connaissance par un public fragile. Il faut la voir comme une mesure d’information qui se généralise par les organismes sociaux. C’est aussi une question de comportement. Il faut aller vers ces publics fragiles, qui se trouvent aujourd’hui dans des situations extrêmement difficiles.
M. le président. La parole est à Mme Michelle Meunier, pour explication de vote.
Mme Michelle Meunier. Je voterai cet amendement, car le non-recours aux prestations, avec ses implications en termes de non-accès aux droits, est un sujet très important.
Monsieur le rapporteur général, avec tout le respect que j’ai pour vous, je pense que cela fait très longtemps que vous n’êtes pas allé dans une caisse d’allocations familiales. Dans celle de la Loire-Atlantique, quasiment tout se fait par automate et en guichet ; ce n’est qu’en dernier recours que l’on peut avoir un rendez-vous. À chaque convention d’objectifs et de gestion, la Caisse nationale des allocations familiales (CNAF) doit rendre des postes.
Il n’était donc sans doute pas judicieux de prendre la CAF comme exemple…
Mme Laurence Rossignol. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.
M. Bernard Jomier. Monsieur le secrétaire d’État, je vous remercie de votre réponse. L’article 40 bis, introduit par l’Assemblée nationale, prévoit la mise en place d’un échange d’information et de traitement de données personnelles entre les différents prestataires dans un délai de trois ans, afin de permettre la lutte contre le non-recours aux prestations.
Ce que nous demandons dans cet amendement respecte le droit existant. Quand l’examen des droits à d’autres prestations n’est pas possible parce que le droit existant ne le permet pas, il n’a pas lieu. Il n’est écrit nulle part que l’examen s’effectue de manière exorbitante du droit existant ; il est simplement demandé de le mettre en œuvre. Si l’échange d’informations n’est pas possible, il ne se fera pas. Dont acte.
Cet amendement n’est pas la solution ultime au non-recours. De toute façon, il ne peut pas en exister pour un phénomène aussi complexe, qui a de multiples portes d’entrée, comme vient de le rappeler Michèle Meunier.
L’article 40 bis instaure une solution qui n’est pas plus satisfaisante. Il prévoit un échange d’informations pendant un délai de trois ans. Pour le reste, il fait partie de ces articles un peu déclamatoires, à l’instar de certains discours en séance. Or c’est du normatif qu’il faut faire figurer dans la loi ! Dans ses premiers alinéas, cet article manque de normativité : il fait part d’une intentionnalité, sans fournir aucun outil concret permettant de la mettre en œuvre.
Certes, on peut considérer que l’amendement ne résumera pas la politique de lutte contre le non-recours, qu’il n’est pas parfait, qu’il se heurtera à des obstacles et que certaines prestations resteront impossibles à mettre en œuvre. Dont acte. Mais cela ne l’invalide pas pour autant. C’est un outil que nous proposons et que nous souhaitons voir adopté par le Sénat.
M. le président. La parole est à Mme Corinne Féret, pour explication de vote.
Mme Corinne Féret. Je rebondis sur les propos de Bernard Jomier. Cet amendement est un outil supplémentaire pour lutter contre le non-recours ; il ne résoudra pas toutes les situations. Reste que, si l’on ne propose pas de solution, à tout le moins des outils complémentaires, la situation n’évoluera pas dans le bon sens.
Aujourd’hui encore, entre 7 % et 8 % des allocataires ne recourent pas à leurs droits, malgré la mise en place dès 2014 des rendez-vous des droits à la CAF, qui ont été étendus aux demandeurs d’emploi à partir de 2017. Cette situation est souvent due à la méconnaissance des dispositifs, à la complexité d’accès à ces aides, mais aussi à l’effet stigmatisant du recours aux aides sociales. Il faut l’entendre et le reconnaître et donner suite à cet amendement, encore plus dans le contexte actuel de crise sociale, économique et sanitaire. Je le rappelle, le Secours catholique vient d’alerter sur l’augmentation très forte des personnes en situation de pauvreté et de grande pauvreté. Cela nous oblige à apporter des solutions.
M. le président. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote.
M. Daniel Chasseing. J’ai croisé au cours de ma carrière deux personnes qui s’étaient marginalisées, alors que j’étais persuadé qu’elles percevaient une retraite. L’une d’entre elles était pourtant dans une administration où il y avait des assistantes sociales. Je ne m’y attendais pas du tout. Je voterai donc cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Alain Milon, pour explication de vote.
M. Alain Milon. Je voterai également cet amendement, que je trouve juste, généreux et de surcroît respectueux du droit existant, ce qui me semble le plus important.
Monsieur le secrétaire d’État, si j’ai bien compris vos propos, il existerait localement des problèmes de mise en œuvre du droit existant dans les CAF pour les personnes qui peuvent prétendre à tous ces droits. Voilà quelques mois, quelqu’un de haut placé déclarait que des mesures devaient être adoptées « quoi qu’il en coûte ».
Permettez-moi de rappeler que le rôle du Parlement n’est pas de reconnaître qu’on n’a pas les moyens de mettre en place le droit existant ; il est de dire que le droit doit être respecté « quoi qu’il en coûte ». (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe CRCE.)
M. le président. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour explication de vote.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Nous voterons aussi cet amendement.
Il y a une crise de la confiance dans l’État et la puissance publique. Si l’État ne s’impose rien à lui-même en matière de droits devant être garantis aux plus fragiles, il n’est pas à la hauteur de l’espérance républicaine ! Des droits existent ; il ne faut pas attendre que les gens viennent les réclamer ! Ces droits doivent pouvoir s’appliquer automatiquement, en particulier quand ils concernent un public qui, on le sait, a de grandes difficultés à y accéder.
À l’occasion d’un porte-à-porte, quelqu’un m’a dit : « Mon voisin touche le RSA alors qu’il travaille seulement le samedi dans un garage. » Il imaginait que l’immigré avait droit à tout et que lui n’avait droit à rien. Je lui ai expliqué qu’il s’agissait du RSA complémentaire et j’ai découvert que lui aussi avait des problèmes et se trouvait dans une situation comparable. Quand je lui ai demandé pourquoi il ne sollicitait pas cette allocation, il m’a répondu : « Je ne passe pas ma vie chez les assistantes sociales ! »
On en revient à ce qu’a souligné Corinne Féret : pour certains de nos concitoyens, il y a une forme de honte à aller demander une aide. Or ce n’est pas une aide ; c’est un droit. Et ce droit doit être déclenché automatiquement. (Mme Esther Benbassa applaudit.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. L’article 40 bis est incontestablement intéressant, car il pose bien le problème, par exemple s’agissant de la consultation de la CNIL. Nous en sommes conscients. Vous indiquez qu’il faut trois ans. Je pense qu’il faudra aussi un peu de temps pour mettre cela en œuvre au niveau des CAF !
Pour l’heure, la commission s’en remet à la sagesse de la Haute Assemblée.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Je ne voudrais pas que mes propos soient mal interprétés ou déformés.
Monsieur Milon, je n’ai pas parlé de problèmes de mise en œuvre ; j’ai signalé l’impossibilité matérielle à atteindre l’objectif, non pas parce qu’il y aurait un problème de dernier kilomètre, mais parce que les administrations ne disposent pas aujourd’hui d’un certain nombre d’informations qui leur sont nécessaires pour apprécier si un allocataire a droit à une prestation et pour la lui proposer. Je pense à la situation de la personne, par exemple la gravité de son handicap, à son niveau de ressources ou à sa situation familiale. Il faudra donc demander au cas par cas, ce qui pourra ralentir l’ouverture de droits.
C’est à cette impossibilité matérielle que se heurte la promesse de systématisation prévue dans l’amendement. Ce ne sera pas aussi systématique.
Par ailleurs, madame Goulet, je n’ai jamais dit qu’un simple portail allait tout résoudre. Mais c’est ce qui existe aujourd’hui. La loi ne peut pas toujours tout ; c’est un ancien parlementaire qui vous parle ! Là, il est question de données personnelles et de vie privée ; la loi doit rendre possible l’interconnexion entre des fichiers pour déceler les situations où certains droits ne sont pas attribués. C’est ce que permet l’article 40 bis.
Enfin, madame Meunier, peut-être n’y a-t-il pas de rendez-vous des droits en Loire-Atlantique – je viendrai avec plaisir visiter avec vous la CAF de ce département, car, moi aussi, j’en visite beaucoup –, mais on dénombre 300 000 par an dans notre pays. Ce n’est pas négligeable : cela signifie que 0,5 % de la population française en bénéficie chaque année. Cet accompagnement humain, auquel nous sommes tous attachés, permet d’examiner la situation de l’allocataire, de passer en revue sa situation familiale, ses ressources, son handicap et de voir de quelles prestations il pourrait bénéficier. Une fois encore, cela ne résout pas toutes les situations, mais j’aimerais valoriser ce dispositif et le travail formidable qu’accomplissent les CAF.
Je maintiens donc la position du Gouvernement sur cet amendement.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Très bien !
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 15 quinquies.
L’amendement n° 454 rectifié, présenté par MM. Yung et Iacovelli, Mme Havet, MM. Buis et Hassani, Mme Schillinger et MM. Dennemont et Patient, est ainsi libellé :
Après l’article 15 quinquies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – L’article L. 131-9 du code de la sécurité sociale est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« Par dérogation au premier alinéa du présent article, aucune cotisation d’assurance maladie, maternité, invalidité et décès n’est due au titre des avantages de retraite servis aux personnes dont le montant des revenus de l’avant-dernière année tels que définis au IV de l’article 1417 du code général des impôts n’excède pas le seuil mentionné à la première phrase du 1° du III de l’article L. 136-8 du présent code.
« Par dérogation au premier alinéa du présent article, les avantages de retraite servis aux personnes dont le montant des revenus de l’avant-dernière année tels que définis au IV de l’article 1417 du code général des impôts, d’une part, excède le seuil mentionné à la première phrase du 1° du III de l’article L. 136-8 du présent code et, d’autre part, est inférieur au seuil mentionné à la première phrase du 2° du III du même article L. 136-8 se voient appliquer un taux réduit fixé par décret. »
II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Richard Yung.
M. Richard Yung. Cet amendement porte sur un problème de fiscalité que rencontrent les Français établis hors de France – cela ne vous surprendra pas (Sourires) –, en l’occurrence les retraités à la fois fiscalement domiciliés à l’étranger et affiliés à un régime obligatoire de sécurité sociale français, ayant souvent accompli une partie de leur carrière en France. Contrairement aux retraités résidant en France, ils ne sont pas assujettis à la contribution sociale généralisée (CSG) et à la contribution pour le remboursement de la dette sociale (CRDS) au titre de leur pension. Ils doivent cependant acquitter une cotisation d’assurance maladie (Cotam), en contrepartie de laquelle leur est garanti l’accès aux services de la sécurité sociale en cas de séjour ou de retour en France. Les pensions de base sont actuellement taxées à 3,2 % et les pensions complémentaires à 4,2 %.
La Cotam s’applique de manière uniforme, sans distinction du montant de la pension, que celui-ci soit important ou faible, alors que les retraités résidant en France dont les pensions sont inférieures à certains plafonds bénéficient d’un taux réduit ou d’une exonération.
Une telle situation ne paraît pas juste. Aussi convient-il d’introduire de la progressivité dans l’application de la Cotam, d’une part, en exonérant les retraités dont les revenus de l’année n-2 sont inférieurs ou égaux à 11 128 euros, d’autre part, en soumettant à un taux réduit les retraités dont les revenus de l’année n-2 sont compris entre 11 128 euros et 14 548 euros.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. La commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
La cotisation concernée constitue la quote-part des intéressés au financement du système de santé, que vous ne mettez pas en cause. Ceux-ci peuvent bénéficier de prestations, notamment quand ils viennent en France.
Pour autant, je m’interroge. Combien payent-ils ? Vous dites que le montant de cette cotisation est uniforme et non progressif, c’est-à-dire calculé au prorata de leur pension. Monsieur le secrétaire d’État, avez-vous une idée de ce que ces retraités sont amenés à payer au titre de la Cotam ?
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Sur le fond, cet amendement vise à introduire une forme de progressivité de la Cotam due par les retraités à la fois fiscalement domiciliés à l’étranger et affiliés à un régime obligatoire de sécurité sociale français, donc à la charge de la sécurité sociale française.
Vous souhaitez appliquer cette progressivité en fonction du revenu fiscal de référence des personnes concernées, comme cela est le cas pour la CSG acquittée par les résidents. Toutefois, par définition, ces personnes ne disposent pas d’un revenu fiscal de référence au sens du droit fiscal français, dans la mesure où elles n’ont pas leur résidence fiscale en France. Il serait donc impossible d’appliquer un tel barème. En effet, même si certaines d’entre elles déclarent une partie de leurs revenus en France, cela ne permet pas d’apprécier l’ensemble de la capacité contributive des titulaires des revenus de remplacement. Dès lors, le montant total de leurs revenus est inconnu.
Par ailleurs, il ne paraît pas non plus possible d’introduire une forme de progressivité sur leur pension de source française, car, même si ses revenus sont connus, ils ne constituent là encore qu’une partie de leurs ressources. Il n’est pas certain que cette voie soit conforme à l’égalité devant l’impôt, à laquelle, vous le savez, le Conseil constitutionnel est particulièrement attaché.
Enfin, monsieur le sénateur, comme vous le soulignez, le niveau de prélèvements sur ces pensions est plus faible que la CSG de droit commun, qui s’établit à un niveau trois fois supérieur. Par conséquent, même si cette cotisation n’est pas progressive, elle ne peut pas être comparée avec la CSG, et elle reste dans la quasi-totalité des cas beaucoup plus faible que la CSG prélevée sur les résidents.
C’est pourquoi, même si le Gouvernement comprend l’esprit de cet amendement, la mesure que vous proposez semble inopérante. C’est la raison pour laquelle le demande le retrait de cet amendement ; à défaut, l’avis serait défavorable.
M. le président. Monsieur Yung, l’amendement n° 454 rectifié est-il maintenu ?
M. Richard Yung. Non, je le retire, monsieur le président, sachant que nous pourrons retravailler cette question avec le ministère. Je comprends les arguments que M. le secrétaire d’État a avancés. Différentes réponses peuvent être apportées. Le sujet est un peu sensible pour les Français de l’étranger.
M. le président. L’amendement n° 454 rectifié est retiré.
L’amendement n° 455 rectifié, présenté par MM. Yung et Iacovelli, Mme Havet, MM. Buis et Hassani, Mme Schillinger et MM. Dennemont et Patient, est ainsi libellé :
Après l’article 15 quinquies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport relatif à la protection sociale des conjoints inactifs des retraités établis hors de France. Ce rapport évalue la possibilité de modifier l’article L. 160-3 du code de la sécurité sociale, en vue de permettre la prise en charge des conjoints dont les frais de santé ne sont pas couverts par le droit européen ou international.
La parole est à M. Richard Yung.
M. Richard Yung. Depuis l’entrée en vigueur de la protection universelle maladie, la PUMa, les ayants droit majeurs des pensionnés non résidents du régime général français, essentiellement les époux ou épouses et les enfants, ne peuvent pas bénéficier de la prise en charge de leurs frais de santé lors de leurs séjours temporaires en France. Ils sont par ailleurs soumis au délai de carence de trois mois en cas de retour définitif en France, qui a été renouvelé récemment.
Cette mesure continue de susciter beaucoup d’incompréhension parmi les Français établis hors de France. Elle alimente aussi un sentiment d’injustice.
Dans son rapport sur la mobilité internationale des Français, la députée de la onzième circonscription des Français établis hors de France, Anne Genetet, propose de modifier le code de la sécurité sociale en vue de permettre la prise en charge des conjoints dont les frais de santé ne sont pas couverts par le droit européen ou international.
Dans la mesure où, au regard de l’article 40 de la Constitution, le Parlement n’a pas la possibilité d’élargir le champ d’application du code de la sécurité sociale, cet amendement vise à faire en sorte que le Gouvernement remette au Parlement un rapport évaluant la possibilité de concrétiser la proposition formulée par Mme Genetet.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. La commission n’a pas pour habitude d’appuyer les demandes de rapport. Je ne vais pas déroger à la règle. En revanche, la question est pertinente. Je pense que vous aurez à cœur d’y répondre, monsieur le secrétaire d’État. Vous avez indiqué être prêt à dialoguer : c’est l’occasion d’ajouter cette question, qui me paraît légitime !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Monsieur le sénateur, vous le savez probablement : le travail de concertation et de réflexion a déjà eu lieu.
Au-delà de la demande de rapport, cet amendement vise à revenir sur une mesure adoptée dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2019 après une large concertation avec les représentants des Français établis hors de France. Cette mesure constitue, nous semble-t-il, un point d’équilibre entre, d’un côté, la contributivité à la sécurité sociale française et, de l’autre, le bénéfice de droit à l’assurance maladie pour des soins en France.
Le sujet a fait l’objet d’une instruction ministérielle au mois de juillet 2019 visant à faciliter la transition pour les personnes concernées. L’équilibre trouvé à l’époque nous semble le bon. Nous ne souhaitons pas revenir dessus.
Le Gouvernement émet par conséquent un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 455 rectifié.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Chapitre III
Créer la nouvelle branche Autonomie
Article 16
I. – Le code de l’action sociale et des familles est ainsi modifié :
1° L’article L. 14-10-1 est ainsi rédigé :
« Art. L. 14-10-1. – La Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie gère la branche mentionnée au 5° de l’article L. 200-2 du code de la sécurité sociale et, à cet effet, a pour rôle :
« 1° De veiller à l’équilibre financier de cette branche. À ce titre, elle établit les comptes de celle-ci et effectue le règlement et la comptabilisation de toute opération relevant de cette branche. Elle est chargée de la gestion du risque ;
« 2° De piloter et d’assurer l’animation et la coordination, dans le champ des politiques de soutien à l’autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées, des acteurs participant à leur mise en œuvre en vue de garantir l’équité, notamment territoriale, la qualité et l’efficience de l’accompagnement des personnes concernées. À ce titre, elle assure la collecte et la valorisation des données relatives aux besoins et à l’offre de services et de prestations. Elle conçoit et met en œuvre des systèmes d’information pouvant comporter l’hébergement de données de santé en lien avec le groupement public prévu à l’article L. 1111-24 du code de la santé publique. Elle met à disposition une expertise technique et veille au développement de la formation auprès des professionnels de l’aide à l’autonomie ;
« 3° De contribuer, en assurant une répartition équitable sur le territoire national, au financement de la prévention de la perte d’autonomie, des établissements et services sociaux et médico-sociaux, des prestations individuelles d’aide à l’autonomie et des dispositifs mis en place aux niveaux national ou local en faveur de l’autonomie et des proches aidants et de contribuer au financement de l’investissement dans le champ du soutien à l’autonomie. Pour l’exercice de ces missions, la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie peut confier la réalisation d’opérations aux organismes des régimes obligatoires de sécurité sociale, dans des conditions faisant l’objet de conventions entre la caisse et ces organismes ;
« 4° De contribuer à l’information des personnes âgées, des personnes handicapées et de leurs proches aidants, notamment en créant des services numériques et en favorisant la mise en place de guichets uniques au niveau départemental permettant de faciliter leurs démarches administratives et le suivi personnalisé de leurs parcours ;
« 5° De contribuer à la recherche et à l’innovation dans le champ du soutien à l’autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées ;
« 6° De contribuer à la réflexion prospective sur les politiques de l’autonomie et de proposer toute mesure visant à améliorer la couverture du risque ;
« 7° (nouveau) De contribuer à l’attractivité des métiers participant à l’accompagnement et au soutien à l’autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées, notamment au travers de ses actions en faveur de la formation et de la professionnalisation des professionnels. » ;
2° Le dernier alinéa de l’article L. 14-10-2 est supprimé ;
3° L’article L. 14-10-3 est ainsi modifié :
a) Le deuxième alinéa du III est ainsi rédigé :
« 1° Les orientations de la convention d’objectifs et de gestion prévue à l’article L. 227-1 du code de la sécurité sociale ; »
b) Après le sixième alinéa du même III, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Le conseil peut être saisi par les ministres chargés de la sécurité sociale, des personnes handicapées, des personnes âgées et de la santé de toute question relative à la politique de soutien à l’autonomie. » ;
c) Les trois derniers alinéas du III sont remplacés par un alinéa ainsi rédigé :
« Le conseil délibère également, sur proposition du directeur, sur les budgets nationaux de gestion et d’intervention. » ;
d) Le VI est abrogé ;
4° L’article L. 14-10-4 est ainsi rédigé :
« Art. L. 14-10-4. – Les ressources de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie comprennent :
« 1° Les contributions prévues aux articles L. 137-40 et L. 137-41 du code de la sécurité sociale ;
« 2° Une fraction du produit de la contribution sociale généralisée, dans les conditions fixées à l’article L. 131-8 du même code ;
« 3° Des produits divers, dons et legs ;
« 4° Des dotations des autres branches mentionnées à l’article L. 200-2 dudit code destinées à couvrir des dépenses relevant des missions définies à l’article L. 14-10-1 du présent code. » ;
5° L’article L. 14-10-5 est ainsi rédigé :
« Art. L. 14-10-5. – La Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie assure :
« 1° Le financement des établissements ou services sociaux et médico-sociaux mentionnés à l’article L. 314-3-1 ;
« 2° Le financement des aides à l’investissement au bénéfice de ces établissements et services, ainsi que de l’habitat inclusif mentionné à l’article L. 281-1. Les dépenses d’aides à l’investissement immobilier des établissements mentionnés au 6° du I de l’article L. 312-1 sont conditionnées à l’adaptation des bâtiments à la transition démographique ;
« 3° Le financement des concours versés aux départements, destinés à couvrir une partie :
« a) Du coût de l’allocation personnalisée d’autonomie mentionnée à l’article L. 232-1 ;
« b) Du coût de la prestation de compensation mentionnée à l’article L. 245-1 ;
« c) Des coûts d’installation ou de fonctionnement des maisons départementales des personnes handicapées ;
« d) Du coût des actions de prévention prévues aux 1°, 2°, 4°, 5° et 6° de l’article L. 233-1 ;
« 4° Le financement des autres dépenses d’intervention en faveur des personnes handicapées, des personnes âgées dépendantes et des proches aidants entrant dans le champ des missions de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie définies à l’article L. 14-10-1. À cette fin, elle peut contribuer au financement du fonds prévu à l’article L. 1435-8 du code de la santé publique pour le soutien à des actions, des expérimentations, des dispositifs ou des structures qui participent à la prise en charge des personnes âgées et des personnes handicapées ;
« 5° Le financement de la gestion administrative. » ;
6° Après le même article L. 14-10-5, il est inséré un article L. 14-10-5-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 14-10-5-1. – I. – Le montant global du concours mentionné au a du 3° de l’article L. 14-10-5 est limité à 7,70 % des contributions mentionnées aux 1° et 2° de l’article L. 14-10-4.
« Le montant de la seconde part mentionnée au 2° du I de l’article L. 14-10-6 est limité à 61,4 % du produit de la contribution mentionnée à l’article L. 137-41 du code de la sécurité sociale.
« II. – Le montant du concours mentionné au b du 3° de l’article L. 14-10-5 est limité à 2,00 % des contributions mentionnées aux 1° et 2° de l’article L. 14-10-4. » ;
7° Le I de l’article L. 14-10-6 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, la référence : « II » est remplacée par la référence : « a du 3° » ;
b) Au premier alinéa du 1°, les mots : « dans la limite des ressources mentionnées au a du 1° du même II » sont supprimés ;
c) Le dernier alinéa du même 1° est supprimé ;
d) À la fin du 2°, la référence : « b du 1° du II de l’article L. 14-10-5 » est remplacée par la référence : « second alinéa du I de l’article L. 14-10-5-1 » ;
8° L’article L. 14-10-7 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa du I, au début, les mots : « Les concours mentionnés au III de l’article L. 14-10-5 sont répartis » sont remplacés par les mots : « Le concours mentionné au b du 3° de l’article L. 14-10-5 est réparti » et le mot : « décrets » est remplacé par le mot : « décret » ;
b) Au premier alinéa du II, les mots : « même III » sont remplacés par la référence : « I » ;
c) Au premier alinéa du III, les mots : « et le concours mentionné au III de l’article L. 14-10-5 pour l’installation et le fonctionnement des maisons départementales des personnes handicapées sont répartis » sont remplacés par les mots : « est réparti » ;
d) Les quatre derniers alinéas du III sont supprimés ;
9° À l’article L. 14-10-7-1, qui devient l’article L. 14-10-7-1-1, la référence : « et L. 14-10-7 » est remplacée par les références : « , L. 14-10-7 et L. 14-10-7-1 » ;
10° L’article L. 14-10-7-1 ainsi rétabli :
« Art. L. 14-10-7-1. – I. – Le concours mentionné au c du 3° de l’article L. 14-10-5 est réparti en fonction de tout ou partie des critères mentionnés aux a à f du III de l’article L. 14-10-7 selon des modalités fixées par décret en Conseil d’État pris après avis de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie.
« II. – En l’absence de potentiel fiscal prévu à l’article L. 3543-1 du code général des collectivités territoriales, le concours mentionné au c du 3° de l’article L. 14-10-5 du présent code est déterminé en retenant, pour les collectivités concernées, une valeur nulle de ce même potentiel.
« Le versement du concours relatif à l’installation et au fonctionnement des maisons départementales s’effectue dans des conditions prévues par la convention mentionnée à l’article L. 14-10-7-2.
« Le concours attribué pour l’installation et le fonctionnement de la maison des personnes handicapées compétente sur les territoires du département du Rhône et de la métropole de Lyon est calculé et versé dans des conditions tenant compte des modalités particulières d’exercice de la compétence prévue à l’article L. 146-3 par la métropole de Lyon et le département du Rhône.
« Le concours attribué pour l’installation et le fonctionnement de la maison des personnes handicapées compétente sur le territoire de la collectivité de Corse est calculé et versé dans des conditions tenant compte des modalités particulières d’exercice de la compétence prévue à l’article L. 146-3 par la collectivité de Corse.
« III. – La caisse verse également la subvention mentionnée au troisième alinéa de l’article L. 146-4-2, dont le montant est fixé et réparti par arrêté conjoint des ministres chargés du budget et des affaires sociales. » ;
11° L’article L. 14-10-7-3 est ainsi rédigé :
« Art. L. 14-10-7-3. – La Caisse nationale de la solidarité pour l’autonomie signe avec toute métropole exerçant ses compétences à l’égard des personnes âgées une convention pluriannuelle fixant leurs engagements réciproques sur les modalités de répartition des crédits entre les actions de prévention relevant des 1°, 2°, 4° et 6° de l’article L. 233-1. » ;
12° Les articles L. 14-10-8, L. 14-10-9 et L. 14-10-10 sont abrogés ;
13° Le I de l’article L. 314-3 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, les mots : « de celles des prestations » sont supprimés et sont ajoutés les mots : « fixé chaque année par arrêté des ministres chargés de la sécurité sociale, des affaires sociales et du budget » ;
b) Le deuxième alinéa est supprimé ;
c) À la première phrase du troisième alinéa, les mots « des prestations » sont supprimés.
II. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° À la première phrase du premier alinéa de l’article L. 114-5, les mots : « , ainsi que la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie » sont supprimés ;
2° À la première phase du premier alinéa de l’article L. 114-8, les mots : « et ceux de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie » sont supprimés ;
3° Le chapitre VII du titre III du livre Ier est complété par une section 14 ainsi rédigée :
« Section 14
« Contribution de solidarité pour l’autonomie et contribution additionnelle de solidarité pour l’autonomie
« Art. L. 137-40. – Est instituée une contribution de solidarité pour l’autonomie au taux de 0,3 %, due par les employeurs privés et publics. Cette contribution a la même assiette que les cotisations patronales d’assurance maladie affectées au financement des régimes de base de l’assurance maladie.
« Elle est recouvrée dans les mêmes conditions et sous les mêmes garanties que les cotisations mentionnées au premier alinéa du présent article.
« Art. L. 137-41. – I. – Est instituée une contribution additionnelle de solidarité pour l’autonomie au taux de 0,3 %, assise sur les avantages de retraite et d’invalidité ainsi que sur les allocations de préretraite qui ne sont pas assujettis aux prélèvements mentionnés à l’article 235 ter du code général des impôts et qui sont perçus par les personnes physiques désignées à l’article L. 136-1 du code de la sécurité sociale.
« II. – Par dérogation au I du présent article, sont exclus de l’assiette de la contribution les revenus suivants :
« 1° Les pensions de retraite et d’invalidité des personnes dont le montant des revenus de l’avant-dernière ou de l’antépénultième année tels que définis au IV de l’article 1417 du code général des impôts n’excède pas les seuils mentionnés au 2° du III de l’article L. 136-8 du présent code ;
« 2° Les pensions mentionnées au a du 4° et aux 12°, 14° et 14°bis de l’article 81 du code général des impôts et les personnes titulaires d’un avantage de vieillesse ou d’invalidité non contributif attribué par le service mentionné au deuxième alinéa de l’article L. 815-7 du présent code ou par un régime de base de sécurité sociale sous les conditions de ressources mentionnées à l’article L. 815-9.
« La contribution est recouvrée et contrôlée selon les même règles, garanties et sanctions que celles prévues pour les revenus mentionnés à l’article L. 136-5. » ;
4° La seconde phrase de l’article L. 168-11 est supprimée ;
5° À la première phrase du premier alinéa de l’article L. 200-3, après le mot : « familiales », sont insérés les mots : « , la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie » ;
6° Au premier alinéa de l’article L. 225-1, après le mot : « maladie », sont insérés les mots : « , par la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie » ;
7° Le I de l’article L. 227-1 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, après le mot : « familiales », sont insérés les mots : « , la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie » ;
b) Au deuxième alinéa, les références : « aux 1°, 2°, 3° et 4° de l’article L. 200-2 » sont remplacées par la référence : « à l’article L. 200-2 » ;
c) Le 2° bis est complété par les mots : « ou, pour la branche mentionnée au 5° de l’article L. 200-2, les objectifs d’amélioration de la coordination des acteurs participant à la mise en œuvre des politiques en faveur de l’autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées » ;
d) À la fin du 3°, les mots : « et de lutte contre l’exclusion » sont remplacés par les mots : « , de lutte contre l’exclusion et de soutien à l’autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées » ;
e) À la fin du 4°, les mots : « et de prévention » sont remplacés par les mots : « , de prévention et de soutien à l’autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées » ;
f) Au 5°, après le mot : « échéant, », sont insérés les mots : « et à l’exception de la branche mentionnée au 5° de l’article L. 200-2, » ;
8° Au premier alinéa de l’article L. 227-3, après la première occurrence du mot : « gestion », sont insérés les mots : « des branches mentionnées aux 1° à 4° de l’article L. 200-2 » ;
9° Le chapitre Ier du titre IV du livre V est complété par un article L. 541-5 ainsi rédigé :
« Art. L. 541-5. – L’allocation et son complément éventuel mentionnés à l’article L. 541-1 sont servis et contrôlés par les organismes débiteurs des prestations familiales pour le compte de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie, contre remboursement. »
III. – Dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution, le Gouvernement est habilité à prendre par voie d’ordonnance, dans un délai de douze mois à compter de la promulgation de la présente loi, afin de mettre en œuvre la création de la cinquième branche du régime général de la sécurité sociale relative à l’autonomie, toute mesure relevant du domaine de la loi visant à :
1° Codifier, à droit constant, dans le code de la sécurité sociale les dispositions relatives à la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie prévues au code de l’action sociale et des familles ;
2° Mettre en cohérence les dispositions du code de l’action sociale et des familles ou d’autres codes et textes législatifs avec la nouvelle codification mentionnée au 1° ;
3° Modifier les dispositions des livres Ier et II du code de la sécurité sociale pour les étendre, en tant que de besoin, à la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie.
Un projet de loi de ratification est déposé devant le Parlement dans un délai de six mois à compter de la publication de l’ordonnance.
IV. – Le I, sous réserve des dispositions du second alinéa du présent IV, et le II entrent en vigueur le 1er janvier 2021.
Le I de l’article L. 14-10-8 du code de l’action sociale et des familles dans sa rédaction en vigueur à la date de la promulgation de la présente loi demeure applicable jusqu’au renouvellement de la convention d’objectifs et de gestion de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie mentionné au 1° du III de l’article L. 14-10-3 du même code dans sa rédaction résultant de la présente loi, et au plus tard jusqu’au 30 juin 2022.
M. le président. La parole est à M. Daniel Chasseing, sur l’article.
M. Daniel Chasseing. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, la loi du 7 août 2020 relative à la dette sociale et à l’autonomie a créé la cinquième branche de la sécurité sociale, dédiée à la prise en charge de l’autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées. La gestion de cette branche est confiée à la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA).
C’est pour nous une réforme majeure. Nous la soutenons. Elle fait prendre en charge l’autonomie par la collectivité nationale. Elle doit ainsi assurer une meilleure équité territoriale dans l’offre d’accompagnement. En effet, certains départements ruraux ayant une proportion de personnes âgées dépendantes très importante seront confrontés à des problèmes économiques, notamment avec une augmentation des personnes accédant au RSA, et à de graves soucis financiers pour prendre correctement en charge la dépendance en établissement et à domicile. Cette branche intègre aussi l’allocation d’éducation de l’enfant handicapé (AEEH). Nous sommes donc parfaitement en phase avec les objectifs de la loi.
Le problème est que, dans de nombreux établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad), le groupe iso-ressources (GIR) moyen pondéré, ou GMP, est à 750. Il manque donc de nombreux soignants pour prendre en charge correctement les pensionnaires et avoir un peu de temps de dialogue avec eux. Le nombre de soignants devrait progressivement doubler, pour passer de 0,3 équivalent temps plein (ETP) de soignant par pensionnaire à 0,6 ETP, mais au moins rapidement passer de 0,3 ETP à 0,4 ETP.
Le financement de l’économie dans le texte est de 31 milliards d’euros. Il est en fait l’addition du regroupement des financements de 2019 et de l’augmentation des salaires du Ségur de la santé, que je salue.
En effet, 31 milliards d’euros, c’est 24 milliards d’euros pour les personnes âgées et personnes handicapées, 3 milliards d’euros de la pluriannualité budgétaire (PAB), 2 milliards d’euros du Ségur de la santé, 1 milliard d’euros de l’AEEH, 2 milliards d’euros pour la prestation de compensation du handicap (PCH). Il reste 200 millions d’euros pour 7 000 Ehpad, soit un demi-emploi par Ehpad.
Monsieur le secrétaire d’État, je comprends les problèmes financiers très graves causés par le covid, et je salue la revalorisation du personnel à hauteur de 183 euros mensuels. Cependant, malgré cette crise, nous devons rapidement mobiliser 2 milliards d’euros pour la prise en charge des personnes âgées, afin d’avoir en moyenne au moins 4 emplois de plus par Ehpad, et non 0,5 !
J’insiste aussi sur le domicile, même si nous saluons les 150 millions d’euros supplémentaires affectés aux départements.
L’attractivité des métiers d’aides-soignants et d’infirmiers en Ehpad, c’est le salaire, mais aussi un nombre suffisant de personnels pour pouvoir dialoguer un peu avec les résidents et prendre en charge correctement les pensionnaires très dépendants avec un GMP moyen à 750.
Cela nécessite aussi de renforcer le maintien à domicile. En effet, le nombre de personnes dépendantes va doubler en vingt ans.
M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue.
M. Daniel Chasseing. Le guichet unique départemental est une bonne chose, mais la formation des aides-soignantes et des infirmières est urgente.
M. le président. La parole est à Mme Michelle Meunier, sur l’article.
Mme Michelle Meunier. Nous allons discuter de la cinquième branche de la sécurité sociale, chargée de l’autonomie, mesure annoncée comme un marqueur de ce PLFSS. Le groupe SER a acté la création de cette branche l’été dernier, même si celle-ci est adossée au transfert de la dette covid aux organismes de la sécurité sociale.
À l’époque, le rapport confié à M. Laurent Vachey promettait de répondre aux nombreuses questions subsistantes, et ce avant l’automne. Nous y sommes. Si une intention a été clarifiée, les interrogations subsistent.
Ce qui est plus clair, c’est que cette branche autonomie doit s’adresser à toutes les personnes en situation de dépendance, quelle que soit l’origine : vieillissement ou handicap. Cette incertitude levée – et c’est tant mieux –, il faudra remettre plusieurs fois l’ouvrage sur le métier pour achever la convergence des politiques de prise en charge de l’âge et du handicap. Nous veillerons à encourager la portée universaliste de la prise en charge au travers d’amendements. Nous le savons, la barrière d’âge à 60 ans crée des inégalités de traitement que plus rien ne justifie.
Au-delà du périmètre de la branche, les enjeux résident dans son mode de gestion et son besoin de financement. Outre les transferts de CSG, fiscalité proportionnelle, aucune ressource n’est mobilisée pour assurer l’équilibre de cette branche et répondre aux besoins à venir. Nous proposerons donc de faire contribuer les revenus du capital et les successions, tout comme nous veillerons aussi à diminuer le reste à charge des assurés.
Nous allons le voir, le projet du Gouvernement pour l’autonomie est bien incomplet avec ce PLFSS ; c’est une première étape. Elle devra être suivie de la loi Grand âge et autonomie, texte annoncé depuis si longtemps que nous l’attendons impatiemment.
Nous présenterons des propositions concrètes, et nous espérons pouvoir nous faire entendre.
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, sur l’article.
Mme Laurence Cohen. Je me fais le relais de ma collègue Cathy Apourceau-Poly, qui défend les salariés de Bridgestone dans son département.
Au mois de septembre, M. Vachey a remis son rapport relatif à la création de la branche autonomie, après l’adoption du texte relatif à la dette sociale et à l’autonomie, qui a créé un nouveau risque et une nouvelle branche consacrés à l’autonomie au sein de la sécurité sociale ; la gestion en sera confiée à la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie, la CNSA.
Le rapport Vachey formulait des propositions de financement de la branche perte d’autonomie, dont certaines étaient très dangereuses, comme la création d’une deuxième journée de solidarité travaillée par les salariés, mais dont d’autres – il faut le dire – étaient plus justes, par exemple en faisant contribuer le capital et les dividendes des actionnaires.
Nous regrettons que le PLFSS entérine la création d’une cinquième branche de la sécurité sociale financée uniquement par l’impôt. Cette cinquième branche est une nouvelle étape vers une étatisation de la sécurité sociale – c’est d’ailleurs le cas dans les pays anglo-saxons –, qui n’assure qu’un minimum pour les plus précaires et ouvre la porte aux assurances privées.
Le financement par une ponction de la contribution sociale généralisée va renforcer la confusion des comptes de la sécurité sociale et de l’État. Même si la prise en charge actuelle de la perte d’autonomie n’est pas acceptable, la réforme proposée va aggraver les injustices. Pour nous, la perte d’autonomie en soi n’est en rien un risque ; c’est un aléa de la vie qui justifie une prise en charge par le régime général de l’assurance maladie, et non par une branche spécifique, comme le propose le Gouvernement.
Le traitement de la perte d’autonomie va bien au-delà. C’est un problème de projet de société qui nous concerne toutes et tous. Ne soyons pas naïfs : le doublement d’ici à 2060 du nombre de personnes âgées dépendantes représente un bien juteux marché, notamment pour les assurances privées. Nous proposons donc à l’inverse de mettre à contribution les revenus financiers, les dividendes, pour financer une prise en charge de l’autonomie assurée à 100 % par l’assurance maladie. Nous regrettons que cela se produise au travers d’un article du PLFSS, au lieu d’attendre la fameuse loi qui nous est promise depuis tant de mois.
Pour toutes ces raisons, nous voterons contre l’article 16.
M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary, sur l’article.
M. René-Paul Savary. Je souhaite exprimer notre position globale sur cette nouvelle branche, précédemment introduite dans un texte relatif à l’amortissement de la dette sociale.
En l’occurrence, nous avons l’impression qu’il s’agit plus d’un affichage que d’une réelle volonté. Un cadre est défini ; on change le financement de certaines dispositions en faveur des personnes dépendantes. Il n’est d’ailleurs pas soutenu de manière unanime. Je pense à l’allocation d’éducation de l’enfant handicapé, l’AEEH, qui va passer de la branche famille à la branche autonomie. Quelle révolution ! Quelle avancée ! Cela manque de précisions. La territorialisation de la loi va remettre en cause des dispositifs qui commencent à être bien rodés. La place du département n’est pas forcément définie. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle plusieurs gouvernements se sont cassé les dents à propos de cette loi sur l’autonomie.
En 2010, la création de la cinquième branche fut abandonnée face au déficit de la sécurité sociale, jugé prohibitif. À l’époque, il s’élevait à 28 milliards d’euros ; aujourd’hui, il atteint 49 milliards d’euros. Malgré cela, l’on continue à créer une branche, un cadre, à susciter des espoirs, mais le financement n’est pas assuré. La manière de délivrer des prestations nouvelles n’est pas encore définie.
C’est la raison pour laquelle nous sommes tout à fait favorables à l’avancement du dispositif, mais tout aussi attentifs aux réponses que vous apporterez ; des questions se posent encore sur la création de ce nouveau cadre.
M. le président. La parole est à M. Bernard Bonne, sur l’article.
M. Bernard Bonne. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, l’annonce de la création de cette cinquième branche au mois d’août avait suscité une grande surprise et une grande joie. Nos espoirs ont été déçus par le présent PLFSS. On nous avait annoncé des mesures immédiates pour 2021. On peut parler d’avancées dans la mesure où plus de 2 milliards d’euros sont consacrés à l’augmentation des traitements du personnel dans les Ehpad. C’est bien – c’était nécessaire –, mais cela ne résout pas le problème du manque évident de personnel dans ces établissements.
J’étais tout à l’heure avec un collectif de médecins du CHU de Saint-Étienne. Ils sont heureux de recevoir des primes traduisant la reconnaissance du travail supplémentaire qu’ils ont accompli pendant cette période très difficile, qui n’est d’ailleurs pas terminée. Mais cela ne leur suffit pas : il faut reconnaître le manque de personnel et toutes les difficultés qui en résultent. Elles ne sont pas résolues.
Le domicile a été le grand oublié. Certes, 200 millions d’euros sont distribués pour le domicile au niveau des départements, avec l’obligation de contribuer à même hauteur, mais c’est très peu. Pour le département de la Loire, cela représente environ 2 millions d’euros supplémentaires. C’est notoirement insuffisant !
La création de cette cinquième branche pour l’autonomie a pour objet de permettre au maximum le maintien à domicile. Pour ce faire, il faut du personnel compétent qui ait envie de travailler à domicile. Cela suppose donc de favoriser ce type de travail. C’est ce que l’on attend de la création de cette cinquième branche. Or les missions de la CNSA, chargée de sa mise en place, n’ont pas été précisées, que ce soit dans le champ de la formation, de la prévention, de l’innovation numérique, etc. Ces éléments ne figurent pas dans le PLFSS. J’espère que l’année 2021 apportera enfin les réponses que beaucoup attendent.
M. le président. La parole est à Mme Monique Lubin, sur l’article.
Mme Monique Lubin. Cette branche autonomie est une coquille vide, comme tout le monde l’a souligné lorsqu’elle nous a été présentée voilà quelques semaines. Les mesures qui figurent dans ce PLFSS auraient pu ne pas être raccrochées à la création d’une branche autonomie qui n’en est d’ailleurs pas une.
L’idée d’une telle suscite énormément d’espoir. Nous attendons donc avec impatience la loi sur le grand âge et l’autonomie. J’espère que nous aurons le temps d’y travailler et que le rôle du Parlement ne sera pas réduit à la portion congrue, comme on vous le reproche sur d’autres sujets. C’est une question très attendue, qui répond à des besoins évidents et relève d’une véritable gageure dans un avenir immédiat. Notamment, comment envisagez-vous la prise en charge du vieillissement de la population dans les quelques années à venir, qu’il s’agisse du maintien à domicile, de résidences autonomie à mi-chemin entre le domicile et l’Ehpad ou des Ehpad ? Comment finance-t-on ces derniers ? Comment les personnes modestes les financent-elles ? Comment s’assurer que les Ehpad privés, dont je ne suis absolument pas adepte, en plus de pratiquer des tarifs prohibitifs, accueillent les personnes âgées dans des conditions dignes, ce qui n’a pas été le cas, on l’a vu, l’été dernier ?
Ce sont des questions étendues sur lesquelles nous attendons des réponses. Nous souhaitons participer au débat.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, sur l’article.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Beaucoup de mes collègues l’ont dit, ce chapitre est une coquille vide. Il ouvre un débat, mais n’apporte en fait quasiment aucune réponse significative attendue, excepté les quelques revalorisations salariales bienvenues du Ségur. Tout le monde en est conscient, c’est à des années-lumière des besoins immédiats dans les Ehpad, des besoins à moyen terme pour consolider, comme l’a souligné Mme Lubin, le maintien à domicile et une stratégie d’entrée progressive dans les Ehpad lorsque cela devient incontournable et souhaité.
Comme le groupe CRCE, je voterai pour la suppression de cet article, parce que nous sommes dans un théâtre d’ombres nuisible à notre démocratie. La plupart de nos concitoyens se réjouissent de la création d’une cinquième branche et de la prise en compte de la question de l’autonomie, qu’elle soit due au vieillissement ou au handicap. En réalité, nous sommes dans un brouillard total, sans moyens significatifs. Les conclusions du rapport d’information sur les Ehpad réalisé à l’Assemblée nationale par Mmes Fiat et Iborra ne sont nullement traduites dans ce PLFSS. Donc, on ne fait pas ce qu’on pourrait et devrait faire, et on crée une illusoire cinquième branche qui sert en quelque sorte de paravent à une forme d’impuissance collective.
M. le président. La parole est à Mme Élisabeth Doineau, sur l’article.
Mme Élisabeth Doineau. Pour ma part, je suis plus optimiste ! Conseillère départementale depuis vingt ans, j’ai vu la création de l’allocation personnalisée d’autonomie, l’APA, de la prestation de compensation du handicap, la PCH, et l’énorme montée en charge de leurs bénéficiaires. J’ai participé à je ne sais combien de colloques où nous appelions tous de nos vœux la création de cette cinquième branche. Nous avons tous fait preuve de procrastination, comme l’a souligné Dominique Libault lorsqu’il est venu présenter son rapport en commission.
Si j’attendais ce dispositif, je me pose évidemment des questions sur son financement. Nous ne trouverons pas comme cela les milliards nécessaires pour répondre aux problématiques du vieillissement de la population et de la perte d’autonomie.
Il faut entrer dans le XXIe siècle : les personnes âgées d’aujourd’hui ne sont pas celles d’hier. Nous avons besoin de repenser l’accueil et l’accompagnement des personnes âgées comme des personnes handicapées. Nous devons absolument nous tourner vers l’avenir et avoir des projets.
Il est vrai que l’on aurait pu commencer par penser le financement avant de créer cette cinquième branche, mais l’on pourrait encore attendre des années… Il faudra aussi prioriser, opérer peut-être des choix cruels, construire moins de ronds-points, moins de salles, mais agir pour l’autonomie. Les collectivités territoriales, les départements ont cette compétence et y participeront, et ils devront également faire des choix. Le gouvernement qui a créé l’APA n’a pas alloué aux départements l’argent pour la financer. Aujourd’hui, le financement de cette cinquième branche pour l’autonomie ne tombe pas du ciel ; mais c’est aussi à nous de trouver des moyens, de travailler sur des contributions nouvelles, et peut-être de prioriser les projets dans nos départements et collectivités.
M. le président. L’amendement n° 1040, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. Je l’ai indiqué, nous proposons la suppression de l’article 16.
Le budget de l’autonomie, évalué à 40 milliards d’euros, est supporté par les familles et les personnes âgées elles-mêmes pour 10 milliards d’euros. La prise en charge des 30 milliards d’euros restants est partagée entre la sécurité sociale, à plus de 50 %, et les collectivités. Comme nous l’avons souligné, avec nombre de nos collègues, les financements nous laissent plus que dubitatifs et s’apparentent à une coquille vide. Cet article ne prend pas du tout en compte la globalité du problème et surtout l’embauche des personnels, leur salaire, la reconnaissance de leur formation et leur accompagnement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Mouiller, rapporteur de la commission des affaires sociales pour l’autonomie. Vous avez eu l’occasion, les uns et les autres, d’exprimer votre sentiment sur la création de la cinquième branche, à la fois sur la méthode et sur son contenu. Quoi qu’il en soit, cette cinquième branche est aujourd’hui créée. La commission des affaires sociales salue le fait qu’elle soit gérée par la CNSA.
Nous émettons très naturellement un avis défavorable sur cet amendement de suppression.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Madame Cohen, vous proposez de supprimer l’article 16, car vous estimez que le risque lié à la perte d’autonomie des personnes âgées et des personnes en situation de handicap doit être couvert par l’assurance maladie.
Comme l’a rappelé le rapporteur, la loi du 7 août 2020 relative à la dette sociale et à l’autonomie a affirmé l’existence de ce nouveau risque et a créé la cinquième branche de la sécurité sociale, dont la gestion sera confiée à la CNSA. Nous pouvons donc tous nous réjouir ici, contrairement à ce qui a été évoqué, que la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale permette d’alimenter ce que sera effectivement cette cinquième branche, déjà promise en 2007, puis en 2012 par des gouvernements auxquels certains d’entre vous ont pu participer. Nous allons la mettre en œuvre et la nourrir aujourd’hui.
L’ambition de cette cinquième branche est d’assurer une meilleure équité territoriale dans l’accès aux droits des personnes âgées et des personnes handicapées, d’améliorer l’offre d’accompagnement à destination de ces publics et de renforcer les politiques transversales du handicap et du grand âge. C’est une nécessité. Elle porte également en elle une promesse de démocratie, puisqu’à compter de cette année, un examen annuel de la politique de l’autonomie et de son financement à long terme sera opéré dans le cadre des lois de financement de la sécurité sociale. Je pense que, là aussi, les parlementaires que vous êtes ne peuvent que s’en réjouir.
L’article 16 du PLFSS 2021 tire donc les conséquences de ces évolutions nécessaires. Il vise à organiser le fonctionnement de cette nouvelle branche et à en garantir un financement autonome équilibré. C’est la raison pour laquelle nous sommes défavorables à sa suppression.
M. le président. L’amendement n° 1011, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 5, première phrase
Remplacer le mot :
équité
par le mot :
égalité
La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Nous proposons de remplacer le mot : « équité » par le mot : « égalité ». Cela peut paraître formaliste, mais cela recouvre toute une philosophie de l’intervention publique et une certaine idée de l’action républicaine. En l’occurrence, nous considérons que la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie doit avoir pour vocation de garantir l’égalité des droits, et non pas simplement un juste traitement.
L’égalité des droits ne signifie pas l’uniformité de la réponse apportée pour faire vivre l’égalité. Les principes sont les mêmes pour tous, mais des paramètres dépendent du niveau de la dépendance et de toute une série de circonstances.
Ce glissement sémantique est justement l’une des thèses qui séparent le modèle anglo-saxon du modèle républicain. Par exemple, la question de savoir s’il faut un traitement équitable des femmes ou l’égalité hommes-femmes est débattue à l’ONU. Il est clair pour tout le monde que l’égalité hommes-femmes n’est pas la même chose qu’un traitement équitable des femmes.
Donc, derrière les mots, il faut faire attention à ne pas glisser vers un projet politique et culturel qui ne correspond ni à notre histoire, encore moins à celle de la création de la sécurité sociale par le Conseil national de la Résistance, ni même à l’affirmation de la promesse républicaine, dont chacun est conscient aujourd’hui qu’il faut lui redonner toute sa force.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Mouiller, rapporteur. Cet amendement dispose que la CNSA garantit l’égalité, et non l’équité, dans l’accompagnement des personnes.
L’égalité impliquerait le même accompagnement pour tous, sans considération des différences de situations ou de besoins. Il semble plus correct à la commission de parler d’équité, ce qui renvoie à l’idée d’un traitement juste, car adapté à la situation de chacun.
L’avis de la commission est donc défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Une fois n’est pas coutume, madame la sénatrice, derrière les débats sémantiques, dont vous avez raison de préciser l’importance, je pense que nous sommes d’accord sur l’objectif. Nous souhaitons, comme vous, que les personnes en perte d’autonomie bénéficient du même niveau de prestations lorsqu’elles se trouvent dans des situations comparables, quel que soit le territoire où elles habitent.
Je souhaite vous préciser les intentions du Gouvernement. Nous avons émis un émis favorable sur un amendement adopté en première lecture à l’Assemblée nationale – vous l’avez d’ailleurs retrouvé en commission, et nous en débattrons ici – visant à renforcer le rôle de la CNSA en matière d’équité territoriale. Nous avons également déposé un amendement tendant à préciser la mission de la CNSA en matière de soutien aux maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) et aux maisons départementales de l’autonomie (MDA) pour permettre l’accès aux droits des personnes, et donc renforcer l’équité du dispositif que nous mettons en place.
Pour autant, l’avis du Gouvernement sera défavorable.
M. le président. Je suis saisi de six amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 152, présenté par M. Vanlerenberghe, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Alinéa 5, dernière phrase
Rédiger ainsi cette phrase :
Elle met son expertise technique à la disposition des personnes publiques et des professionnels de l’aide à l’autonomie et soutient le développement de la formation dans ce domaine.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Mouiller, rapporteur. Il s’agit d’une précision rédactionnelle visant à mentionner l’« expertise technique » parmi les missions de la CNSA.
M. le président. L’amendement n° 619 rectifié, présenté par Mme Guidez, M. Henno, Mmes Doineau, Sollogoub et Jacquemet, M. Duffourg et les membres du groupe Union Centriste, est ainsi libellé :
Alinéa 5
1° Dernière phrase
Supprimer les mots :
et veille au développement de la formation
2° Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Elle assure également, notamment en vue de garantir la qualité de service et de veiller à l’équité du traitement des demandes de compensation du handicap et d’aide à l’autonomie, un rôle d’accompagnement et d’appui aux maisons départementales de l’autonomie mentionnées à l’article L. 149-4 et aux maisons départementales des personnes handicapées mentionnées à l’article L. 146-3.
La parole est à Mme Jocelyne Guidez.
Mme Jocelyne Guidez. À l’occasion de la création de la cinquième branche de la sécurité sociale, les missions de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie, la CNSA, ont été clarifiées, afin de réaffirmer son rôle, notamment en termes de gestion et de financement du risque, de pilotage, d’animation et d’appui aux différents acteurs des politiques de soutien à l’autonomie.
Dans ce cadre, le rôle d’appui et d’accompagnement de la CNSA auprès des maisons départementales des personnes handicapées et des maisons départementales de l’autonomie, chargées de l’évaluation et de l’ouverture des droits aux prestations, doit être réaffirmé, en particulier s’agissant de la qualité de service et de l’équité de traitement.
M. le président. Les deux amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 420 est présenté par Mme Guidez, M. Henno, Mmes Doineau, Sollogoub et Jacquemet, M. Duffourg et les membres du groupe Union Centriste.
L’amendement n° 479 rectifié ter est présenté par Mme Lubin, M. Antiste, Mmes Van Heghe, Lepage et Jasmin, MM. Jeansannetas et Kerrouche, Mme Préville, M. Vaugrenard, Mmes Féret et Poumirol, MM. Bourgi, Montaugé, Tissot, Cozic, Redon-Sarrazy, Temal et Dagbert, Mme Monier et M. P. Joly.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 5, dernière phrase
1° Après le mot :
formation
insérer les mots :
initiale et continue
2° Compléter cette phrase par lest mots :
en lien avec les établissements du 1° de l’article L. 711-2 du code de l’éducation, notamment concernant les compétences relatives à la coordination interprofessionnelle
La parole est à Mme Jocelyne Guidez, pour présenter l’amendement n° 420.
Mme Jocelyne Guidez. Cet amendement vise à préciser le rôle de la CNSA au regard des besoins d’évolution dans les différents champs relatifs au grand âge et à l’autonomie. Plus précisément, il prévoit de renforcer le rôle des universités dans la formation des professionnels de l’autonomie. L’implication de l’université, garante de la formation tant initiale que continue, semble essentielle dans le rôle de la formation des professionnels de l’autonomie.
De plus, les besoins de formation de ces professionnels sont particulièrement centrés sur la coordination entre professionnels, afin de permettre une véritable prise en charge interprofessionnelle autour du patient. Les différentes évolutions récentes des structures de coordination ont complexifié la lecture du maillage territorial pour les professionnels de terrain. Ce n’est notamment que par une formation adaptée que ceux-ci pourront s’emparer de tels outils.
M. le président. La parole est à Mme Monique Lubin, pour présenter l’amendement n° 479 rectifié ter.
Mme Monique Lubin. Il est défendu.
M. le président. L’amendement n° 1012, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 5
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Elle assure un rôle d’accompagnement et d’appui aux maisons départementales de l’autonomie mentionnées à l’article L. 149-4 du présent code ainsi qu’un rôle d’évaluation de leur contribution à la politique de l’autonomie des personnes handicapées et des personnes âgées.
La parole est à Mme Céline Brulin.
Mme Céline Brulin. Cet amendement vise à réintroduire une référence aux maisons départementales de l’autonomie dans l’alinéa relatif aux missions de la CNSA. Le fait que ces établissements n’y figurent plus inquiète un certain nombre d’associations œuvrant dans le domaine du handicap.
On nous répond que l’examen du PLFSS n’a pas pour objet de définir les missions précises de la CNSA. Néanmoins, ces maisons ont aujourd’hui une mission d’accompagnement des maisons départementales de l’autonomie. On peut donc tout à fait comprendre l’inquiétude de ceux qui s’étonnent de ne plus les voir mentionnées.
M. le président. L’amendement n° 801 rectifié, présenté par Mmes Lubin et Meunier, MM. Jomier et Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Jasmin, Le Houerou, Poumirol et Rossignol, MM. Antiste, Bouad et J. Bigot, Mme Bonnefoy, MM. Durain et Gillé, Mme Harribey, M. P. Joly, Mme G. Jourda, M. Leconte, Mme Lepage, MM. Lozach, Lurel, Marie et Mérillou, Mme Monier, MM. Montaugé et Pla, Mme S. Robert, MM. Sueur, Temal et Tissot, Mmes Préville, Briquet et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 6
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Elle assure un rôle d’accompagnement et d’appui aux maisons départementales de l’autonomie mentionnées à l’article L. 149-4 du présent code ainsi qu’un rôle d’évaluation de leur contribution à la politique de l’autonomie des personnes handicapées et des personnes âgées.
La parole est à Mme Monique Lubin.
Mme Monique Lubin. Le PLFSS modifie les missions de la CNSA. Si les missions initiales de la CNSA sont globalement reprises dans le nouvel article, on n’y retrouve pourtant pas le rôle de la Caisse pour accompagner, appuyer, mais aussi évaluer les maisons départementales des personnes handicapées. Le Collectif Handicaps, qui a suscité cet amendement, est pourtant attaché à ce rôle. Nous proposons de rétablir une telle mention.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Mouiller, rapporteur. L’amendement n° 619 rectifié vise à préciser la mission d’accompagnement dévolue à la CNSA. Sa rédaction semble en partie satisfaite : l’équité dans le traitement des personnes est prévue à l’alinéa 5. Pour ce qui est de l’accompagnement des maisons départementales de l’autonomie, l’amendement n° 1012 semble mieux rédigé. Nous émettons donc un avis défavorable sur l’amendement n° 619 rectifié.
Les amendements identiques nos 420 et 479 rectifié ter ont pour objet de préciser que le rôle de soutien à la formation dévolu à la CNSA s’exerce en lien avec les universités. Contrairement à ce qui est indiqué dans leur objet, ils ne renforcent pas le rôle de l’université dans la formation des professionnels de l’autonomie. Ils tendent simplement à indiquer que la CNSA exerce sa mission en lien avec les universités. Il ne semble pas utile de lister toutes les entités avec lesquelles la CNSA doit juger bon d’exercer sa mission. L’avis est donc défavorable.
L’amendement n° 1012 vise à préciser que la CNSA joue un rôle d’accompagnement et d’appui aux maisons départementales de l’autonomie et évalue leur contribution à la politique de l’autonomie des personnes handicapées et des personnes âgées. La CNSA, pour l’heure, finance les MDPH et labellise leur transformation en MDA. L’article 16 ne reprend explicitement que les dispositions relatives au financement des MDPH. Son rôle à leur égard pourrait donc être précisé et, éventuellement, complété. Cet amendement constitue un premier pas. Nous y sommes donc favorables.
L’amendement n° 801 rectifié a le même objet, mais l’amendement n° 1012 nous semble mieux positionné. La commission en demande donc le retrait.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. L’amendement n° 152, relatif à la mise à disposition des personnes publiques de l’expertise technique de la CNSA, nous semble satisfait. La rédaction actuelle nous semble en outre plus claire et plus large que celle qui est proposée dans cet amendement, dont nous sollicitons en conséquence le retrait.
Nous partageons les avis exprimés sur les trois amendements relatifs au rôle de la CNSA auprès des maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) et des maisons départementales de l’autonomie (MDA). Ce texte peut être l’occasion de préciser un certain nombre de choses. C’est pourquoi nous émettons un avis favorable sur l’amendement n° 619 rectifié. Nous demanderons en conséquence aux auteurs des amendements nos 1012 et 801 rectifié de bien vouloir les retirer au profit de celui-ci.
Enfin, nous sommes défavorables aux amendements identiques nos 420 et 479 rectifié ter, relatifs aux missions de la CNSA en matière de formation et ses liens avec les universités. La CNSA est d’ores et déjà chargée de contribuer à l’attractivité des métiers, en particulier par ses actions en faveur de la formation et de la professionnalisation. Un amendement a été adopté à cet effet en première lecture à l’Assemblée nationale. La Caisse aura pour mission de développer des liens avec tous les acteurs de la formation, au premier rang desquels figurent évidemment les régions. En revanche, la mention des universités ne semble pas la plus pertinente, compte tenu de la nature des emplois dans le secteur de l’autonomie. Nous avons surtout besoin, comme vous le savez, d’auxiliaires de vie, d’aides-soignants ou encore d’infirmiers.
M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.
M. René-Paul Savary. Ces premiers amendements font apparaître d’emblée un défaut de cadrage, avec des interprétations différentes des missions de la CNSA. M. le rapporteur a bien fait de préciser la nature des expertises.
L’amendement n° 1012 met l’accent sur les MDPH et les MDA. Mais faut-il rappeler que ces maisons, quand elles existent, sont davantage financées par les départements que par la dotation de la CNSA ? Il ne faut pas décourager le financement par les départements, mais ces derniers n’ont pas la maîtrise des dispositifs ; c’était encore vrai, en tout cas, voilà quelques années.
Les associations avaient par ailleurs trouvé leur place dans les MDPH, car elles étaient largement associées à leurs conseils d’administration.
Enfin, la représentation des personnes âgées est moins organisée que celle des personnes handicapées. Il faudra leur trouver des représentants et les associer véritablement aux dispositifs.
M. le président. En conséquence, les amendements nos 619 rectifié, 420 et 479 rectifié ter n’ont plus d’objet.
Je mets aux voix l’amendement n° 1012.
(L’amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l’amendement n° 801 rectifié n’a plus d’objet.
L’amendement n° 401 rectifié, présenté par Mme Boulay-Espéronnier, MM. Bonhomme et Brisson, Mme Deromedi, MM. Pellevat, Sautarel et Gremillet, Mmes Joseph, Bonfanti-Dossat et Garriaud-Maylam, M. Regnard, Mme Noël, MM. de Nicolaÿ, Houpert et Sido et Mmes Renaud-Garabedian et Lherbier, est ainsi libellé :
Alinéa 6, première phrase
1° Remplacer les mots :
financement de la
par les mots :
financement et au pilotage d’une politique de
2° Après les mots :
perte d’autonomie
insérer les mots :
et de lutte contre l’isolement
La parole est à Mme Christine Bonfanti-Dossat.
Mme Christine Bonfanti-Dossat. Cet amendement est défendu.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Mouiller, rapporteur. Cet amendement tend à préciser que la CNSA pilote une politique de prévention de la perte d’autonomie et de lutte contre l’isolement. Plus de 20 % des financements attribués aux départements par les conférences des financeurs de la prévention de la perte d’autonomie sont déjà destinés à de telles politiques. La CNSA a également noué un partenariat avec l’association Monalisa.
Conférer à la Caisse un rôle de pilote est en effet une idée intéressante. Dans son rapport du 16 juillet dernier, Jérôme Guedj faisait déjà cette proposition ; mais l’inscrire dans la loi sans en tirer de conséquences opérationnelles me semble un peu prématuré. Voyons plutôt cela à l’occasion des débats de fond qui se tiendront plus opportunément lors de l’examen de la loi sur le grand âge, et demandons un calendrier pour chaque intervention.
La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Mouiller, rapporteur. L’avis défavorable de la commission se justifiait par la crainte que le Gouvernement ne soit pas prêt pour confier de telles missions à la CNSA. Si vous nous dites aujourd’hui que vous êtes opérationnels, je peux alors émettre un avis favorable à titre personnel.
M. le président. L’amendement n° 722 rectifié, présenté par Mmes Lubin et Meunier, MM. Jomier et Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Jasmin, Le Houerou, Poumirol et Rossignol, MM. Antiste, Bouad et J. Bigot, Mme Bonnefoy, MM. Durain et Gillé, Mme Harribey, M. P. Joly, Mme G. Jourda, M. Leconte, Mme Lepage, MM. Lozach, Lurel, Marie et Mérillou, Mme Monier, MM. Montaugé et Pla, Mme S. Robert, MM. Sueur, Temal et Tissot, Mmes Préville, Briquet et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 6
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« …° De veiller à garantir l’accès aux prestations d’autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées et de contribuer à la recherche d’innovations sociales pour réduire les restes à charge des assurés ;
La parole est à Mme Monique Lubin.
Mme Monique Lubin. Cet amendement vise à confier à la CNSA la mission d’assurer le libre accès aux prestations d’autonomie des personnes âgées et des personnes en situation de handicap. Il tend également à demander à la CNSA de rechercher des solutions innovantes pour réduire le reste à charge des assurés en matière de dépendance et de perte d’autonomie.
Les rapports Libault et El Khomri font état d’un besoin de financement important pour l’autonomie, s’élevant à 6 milliards d’euros par an à partir de 2024, et évoquent des restes à charge substantiels. Aussi, il apparaît nécessaire de donner mission à la CNSA de rechercher des solutions, afin d’améliorer l’accès aux prestations d’autonomie pour les personnes âgées et les personnes handicapées.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Mouiller, rapporteur. Cet amendement a pour objet de préciser que la CNSA veille à garantir l’accès aux prestations d’autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées et contribue à la recherche d’innovations sociales pour réduire le reste à charge des assurés.
La mission de veiller à garantir l’accès aux prestations n’est pas très précise ; elle et sans doute incluse dans la mission d’information prévue à l’alinéa 7.
La mission de contribuer à la recherche d’innovations est déjà prévue à l’alinéa 8.
En conséquence, la commission sollicite le retrait de cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Avis défavorable.
La question des restes à charge en établissement est évidemment cruciale. C’est une préoccupation importante des Français, comme l’a montré la concertation sur le grand âge et l’autonomie.
C’est aussi, comme vous le savez, une problématique complexe. Les différents rapports produits sur le sujet ont avancé un certain nombre de solutions, mais les conséquences financières sont importantes. Cette question sera discutée dans le cadre du Laroque de l’autonomie, annoncé par Mme la ministre Brigitte Bourguignon.
Pour l’heure, je vous rappelle que la création de la branche s’accompagne de plus de 2,5 milliards d’euros de mesures nouvelles pour améliorer l’offre d’accompagnement, en augmentant le taux d’encadrement en Ehpad et en revalorisant dès ce PLFSS les salaires des professionnels.
M. le président. Madame Lubin, l’amendement n° 722 rectifié est-il maintenu ?
Mme Monique Lubin. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 722 rectifié est retiré.
L’amendement n° 905 rectifié, présenté par MM. Roux, Artano, Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère, M. Corbisez, Mme N. Delattre, MM. Fialaire, Gold et Guérini, Mme Guillotin, M. Guiol, Mme Pantel et M. Requier, est ainsi libellé :
Alinéa 7
Après le mot :
numériques
insérer les mots :
, en assurant des permanences dans les maisons France Services
La parole est à Mme Véronique Guillotin.
Mme Véronique Guillotin. L’article 16 précise les moyens attribués au fonctionnement de la nouvelle CNSA. Ce nouveau service public est particulièrement attendu par les bénéficiaires potentiels, qui auront sans nul doute besoin d’un accompagnement personnalisé pour accomplir leurs démarches.
N’oublions pas que la CNSA s’adresse en particulier à des personnes fragilisées, peu mobiles pour certaines du fait de leur handicap et pas très au fait des procédures dématérialisées pour d’autres.
Aussi, cet amendement, déposé par mon collègue Jean-Yves Roux, vise à préciser à l’alinéa 7 que des permanences physiques pourront être prévues de droit dans les maisons France Services, en complément des procédures numériques et d’un guichet départemental.
Les auteurs de l’amendement insistent par ailleurs sur le fait que ces permanences peuvent aussi donner lieu à des formations in situ aux procédures dématérialisées. Ils mettent en avant la nécessité de prévoir un accès renforcé pour les différentes situations de handicap, que ce soit des déficits visuels et auditifs ou des difficultés de mobilité.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Mouiller, rapporteur. Cet amendement tend à préciser que le rôle d’information de la CNSA comprend des permanences dans les maisons France Services. L’article 16 du PLFSS se borne à rationaliser et clarifier la présentation des missions de la Caisse, à droit constant.
Il est un peu prématuré, et sans doute pas de niveau législatif, de prévoir avec ce niveau de détails la mise en œuvre de la mission d’information de la CNSA, en anticipant sur les débats qu’ouvrira la loi relative au grand âge et à l’autonomie.
La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Sophie Cluzel, secrétaire d’État auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées. Améliorer et rapprocher l’information est bien évidemment un enjeu d’importance aujourd’hui. Mais cette compétence relève des conseils départementaux, via les MDPH. La CNSA contractualise avec les conseils départementaux. La feuille de route MDPH 2022 témoigne de sa volonté d’investir massivement dans l’information des bénéficiaires et des familles, mais la CNSA ne peut pas se substituer aux départements pour assurer directement cette information.
C’est pourquoi l’avis du Gouvernement sur cet amendement est défavorable.
M. le président. Madame Guillotin, l’amendement n° 905 rectifié est-il maintenu ?
Mme Véronique Guillotin. Non, je le retire, monsieur le président. Nous voyons l’importance des enjeux de proximité et d’accès au numérique des personnes fragilisées. La complexification des systèmes ne va pas dans le bon sens.
M. le président. L’amendement n° 905 rectifié est retiré.
L’amendement n° 921, présenté par Mme Poncet Monge, M. Benarroche, Mme Benbassa, M. Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon et Mme Taillé-Polian, est ainsi libellé :
Alinéa 7
Supprimer les mots :
et en favorisant la mise en place de guichets uniques au niveau départemental
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Mme Raymonde Poncet Monge. Cet amendement vise à supprimer la notion de « guichets uniques au niveau départemental », introduite par l’Assemblée nationale.
Il me semble que l’on discute un peu dans le vide et que l’on ne fait pas les choses dans l’ordre. Il aurait fallu débattre d’abord de la loi relative au grand âge et à l’autonomie.
La branche autonomie est-elle soluble dans la branche maladie ? Est-elle au contraire transversale, car le sujet concerne plusieurs branches ? Pour ma part, je défends la création de cette nouvelle branche, souhaitée également par les acteurs de l’autonomie depuis de nombreuses années.
Nous sommes bien entendu favorables au principe du guichet unique pour faciliter les démarches des usagers et simplifier le rapport à l’administration. Mais l’insertion sans discussion de cette notion dans le PLFSS souffre d’une certaine confusion et d’un manque de précision à l’heure de la création de la cinquième branche pour l’autonomie.
Surtout, ces guichets uniques pourraient se déployer dans les départements en s’ajoutant aux maisons départementales de l’autonomie, qui sont déjà des structures d’accueil, d’information, de conseil, d’orientation et, le cas échéant, d’évaluation des besoins, d’instruction des demandes et d’élaboration des plans d’aide au profit des personnes âgées et des personnes en situation de handicap ; la notion d’autonomie fera tomber la barrière d’âge.
Notons qu’on peut déjà mettre en place les dispositifs d’appui à la coordination amorcés par la loi Santé, avec l’objectif de simplifier et de faire converger les dispositifs d’appui.
Citons aussi les plateformes territoriales d’appui et, sur certains territoires, le programme « personnes âgées en risque de perte d’autonomie ».
On n’a pas encore la loi, mais on ajoute déjà un guichet unique. C’est un vrai millefeuille !
C’est pourquoi nous souhaitons supprimer cet article. À notre sens, il est source de confusion et de nature à favoriser la constitution de doublons, en attendant une discussion enfin sérieuse avec le texte sur le grand âge et l’autonomie.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Mouiller, rapporteur. Cet amendement vise à supprimer la précision ajoutée à l’Assemblée nationale par laquelle la CNSA favorise la création du guichet unique au niveau départemental. Les auteurs de l’amendement craignent que de tels guichets ne concurrencent les structures existantes.
Cette notion semble au contraire suffisamment large pour permettre la mise en place de partenariats et de concertations. Elle n’empiète donc pas sur les précisions qui seront apportées par la loi Grand âge et autonomie.
La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Sophie Cluzel, secrétaire d’État. Permettez-moi juste de préciser que notre objectif majeur est bien de simplifier l’accès aux droits des personnes âgées ou en situation de handicap, afin de réduire au maximum le non-recours aux prestations destinées à aider ces personnes.
L’investissement dans le fonctionnement des MDPH est important, à hauteur de 25 millions d’euros. La feuille de route MDPH 2022, que nous déployons depuis début octobre et qui a été signée avec l’Assemblée des départements de France, projette justement ce déploiement et pose les premiers jalons d’un service commun d’instruction des aides aux personnes handicapées ou âgées.
Les maisons de l’autonomie, qui n’existent pour l’instant que dans vingt-cinq départements, n’ont pas encore toutes les outils souhaitables, notamment en termes de personnalité juridique, pour devenir le guichet unique de l’accès aux droits et prestations qui seront regroupés dans la cinquième branche.
L’objet de la disposition que vous souhaitez supprimer est au contraire de rendre possible, après une démarche de réflexion et de concertation, une généralisation progressive et un renforcement de ces guichets uniques.
C’est pourquoi je suis défavorable à cet amendement.
M. le président. L’amendement n° 844 rectifié, présenté par MM. Gremillet et Bonnus, Mme Demas, MM. Calvet, Bacci, Cambon, B. Fournier, Brisson et Duplomb, Mmes M. Mercier, Goy-Chavent et Micouleau, MM. Bonne et Chaize, Mme Gruny, MM. D. Laurent et Bouloux, Mmes Berthet et Malet, MM. Piednoir, H. Leroy et Perrin, Mme Drexler, MM. Bascher et Paccaud, Mme Thomas, M. Rietmann, Mmes Chauvin, Deromedi, L. Darcos et Estrosi Sassone, MM. Mandelli, Belin, de Nicolaÿ et Savin, Mmes Raimond-Pavero, Garriaud-Maylam et Ventalon, M. Darnaud, Mme Di Folco, MM. Regnard, Houpert, Chevrollier et Pointereau, Mme Dumont, MM. Cuypers et Babary et Mme Noël, est ainsi libellé :
Alinéa 7
Compléter cet alinéa par les mots :
, et au sein des établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes territoriaux de valoriser le référentiel de métiers en assouplissant les modalités d’accès des personnels soignants au concours de la fonction publique territoriale
La parole est à M. Pierre Cuypers.
M. Pierre Cuypers. Les Ehpad territoriaux connaissent actuellement une hausse des demandes de détachement vers la fonction publique hospitalière, mais aussi vers les établissements privés associatifs.
Le constat est clair : le statut de fonctionnaire territorial ne semble plus suffisamment attractif et valorisé. Certains agents choisissent même d’abandonner leur statut de fonctionnaire pour aller travailler dans les établissements privés associatifs.
Avec le maintien du concours de la fonction publique territoriale pour les personnels, le risque est grand de voir nos soignants partir vers l’hôpital. Dans le contexte actuel de pénurie de personnels diplômés – je pense aux infirmières diplômées d’État et aux aides-soignantes –, les Ehpad risquent à terme de disparaître.
Dans les Ehpad territoriaux, les agents sont obligés de passer un concours pour pouvoir être titularisés, alors qu’au sein de la fonction publique hospitalière, le personnel est titularisé ou peut bénéficier d’un contrat à durée indéterminée.
Plus généralement, nous notons à l’heure actuelle que les instituts de formation des aides-soignants ne séduisent plus. Après le concours d’entrée, les promotions sont incomplètes et beaucoup d’apprenants abandonnent dès les premiers mois d’enseignement.
Nous proposons donc d’inscrire dans la loi le principe d’une évolution prochaine des modalités de recrutement au sein de la fonction publique territoriale, en vue d’obtenir à terme une meilleure reconnaissance et valorisation des métiers.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Mouiller, rapporteur. Cet amendement est important. Il tend à préciser que le rôle d’information de la CNSA s’étend à la valorisation du référentiel des métiers en Ehpad, au moyen d’un assouplissement des modalités d’accès des personnels soignants aux concours de la fonction publique territoriale.
L’idée est intéressante, mais une telle précision n’est sans doute pas à sa place dans un alinéa relatif à l’information des personnes en perte d’autonomie par la CNSA.
Pour ne pas risquer d’ajouter de confusion dans l’article, nous sollicitons le retrait de cet amendement, du fait de difficultés de positionnement. Mais, sur le fond, j’espère que nous aurons l’occasion de revenir sur ce sujet très important au moment de la loi grand âge.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.
M. René-Paul Savary. Voilà un sujet intéressant, dont on peut débattre tout de suite, même si le PLFSS n’est sans doute pas le bon véhicule. On n’a pas le personnel, mais on peut toujours commencer par créer un guichet unique…
La réflexion de nos collègues me semble très pertinente : on ne va quand même pas organiser le territoire depuis Paris ! Faire un guichet unique par département, avec l’ensemble des parties prenantes qui gèrent le dispositif, c’est une redoutable épreuve. Au final, on risque d’obtenir une accumulation de guichets uniques si l’on n’associe pas les partenaires sur le terrain, en leur disant comment on s’organise, qui paye, etc.
Aujourd’hui, le plus souvent, les présidents de département sont à la tête de la conférence des financeurs. Demain, est-ce que ce sera le représentant de la CNSA ? Où seront les associations ? Et quelle place auront les caisses d’assurance retraite et de la santé au travail (Carsat), qui mènent des actions, certes extralégales, mais fort importantes, pour les groupes iso-ressources (GIR) 5 et 6 ?
Si l’on veut réunir tous ces acteurs autour d’un projet collectif, encore faut-il les associer à sa création.
Ce n’est pas le bon véhicule, car le PLFSS n’est pas le bon véhicule pour traiter de l’autonomie. Nous attendons tous la loi Autonomie avec une grande impatience !
M. le président. La parole est à Mme Pascale Gruny, pour explication de vote.
Mme Pascale Gruny. J’aurais voulu entendre le Gouvernement sur le sujet. Le simple fait d’émettre un avis défavorable ne nous rassure pas du tout. Les personnels des Ehpad territoriaux sont inquiets. Pour les mêmes métiers, il existe de vraies inégalités, alors même que c’est souvent encore moins facile dans les Ehpad qu’à l’hôpital. Monsieur le secrétaire d’État, vous devez vous engager à revenir sur cette question.
M. le président. La parole est à M. Olivier Henno, pour explication de vote.
M. Olivier Henno. Cet amendement est très pertinent. On le voit sur le terrain : il y a urgence. La question de la cinquième branche est complexe. Celle-ci a été annoncée et reportée à plusieurs reprises.
J’ai voté la création d’une cinquième branche à l’occasion d’un projet de loi destiné initialement à transférer des moyens à la Caisse d’amortissement de la dette sociale (Cades).
Aujourd’hui, on aborde le PLFSS, mais on arrive vraiment au bout de l’exercice. Il faudra bien, à un moment ou à autre, clarifier le périmètre de cette cinquième branche et le mode de gouvernance de la CNSA. Il faudra s’interroger aussi sur la place des élus, des départements, du paritarisme – ce mot est trop souvent oublié – et sur le financement.
Le mérite des auteurs de cet amendement est de poser une question d’une grande urgence, même si l’on comprend bien que ce n’est pas forcément l’objet du PLFSS.
M. le président. Monsieur Cuypers, l’amendement n° 844 rectifié est-il maintenu ?
M. Pierre Cuypers. Non, monsieur le président. Dans l’attente du bon véhicule législatif, qui devrait arriver prochainement, je retire cet amendement.
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Les départements sont représentés au conseil d’administration de la CNSA et ne sont donc pas totalement exclus des discussions en cours.
Sur le fond, un certain nombre d’amendements visent à diversifier les missions de la CNSA pour renforcer son rôle d’acteur territorial de l’autonomie. C’est une bonne chose, mais la question de l’assouplissement des conditions d’accès aux concours de la fonction publique territoriale relève du domaine de la loi, pas des missions d’un opérateur. C’est ce qui explique cet avis défavorable.
M. le président. Je suis saisi de cinq amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 902 rectifié, présenté par MM. Corbisez, Artano, Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère, MM. Fialaire, Gold et Guérini, Mme Guillotin, M. Guiol, Mme Pantel et MM. Requier et Roux, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 7
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« …° D’impulser et piloter une politique de prévention contre l’isolement ;
La parole est à M. Stéphane Artano.
M. Stéphane Artano. Cet amendement vise à asseoir le rôle de la CNSA comme acteur de la prévention en lui confiant la mission de piloter une politique de lutte contre l’isolement. Il rappelle aussi l’importance de la prévention, partie intégrante d’un accompagnement global, dans une logique de « parcours » qui permet d’éviter les situations de rupture et de réduire les inégalités.
Avant la crise sanitaire, la stratégie de prévention de la perte d’autonomie pour vieillir en bonne santé, présentée le 16 janvier 2020, avait retenu la lutte contre l’isolement comme un élément à part entière de la prévention de la perte d’autonomie.
Dans son rapport intitulé Déconfinés mais toujours isolés ? La lutte contre l’isolement, c’est tout le temps !, remis en juillet dernier, Jérôme Guedj a pointé les problématiques de l’isolement des personnes âgées. Il a établi une sorte de feuille de route pour une politique pérenne de lutte contre l’isolement des personnes âgées et prône notamment un pilotage national de cette lutte par la CNSA.
M. le président. L’amendement n° 245 rectifié quater, présenté par M. Chasseing, Mme Mélot, MM. Capus, Decool, Guerriau, Lagourgue, A. Marc, Médevielle et Menonville, Mme Paoli-Gagin, MM. Verzelen et Wattebled, Mme Garriaud-Maylam, M. E. Blanc, Mme Joseph, M. Daubresse, Mmes F. Gerbaud et Berthet et MM. Pellevat, Fialaire et Gremillet, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 10
Après le mot :
faveur
insérer les mots :
de la promotion des métiers,
II. – Après l’alinéa 10
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« …° D’impulser et de piloter une politique de prévention et de lutte contre l’isolement. » ;
La parole est à Mme Colette Mélot.
Mme Colette Mélot. Cet amendement vise à préciser les missions de la CNSA sur deux points : la promotion des métiers participant à l’accompagnement et au soutien à l’autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées et la prévention et la lutte contre l’isolement de ces personnes.
M. le président. Les trois amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 641 est présenté par M. Bonhomme.
L’amendement n° 720 rectifié est présenté par Mmes Meunier et Lubin, MM. Jomier et Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Jasmin, Le Houerou, Poumirol et Rossignol, MM. Antiste, Bouad et J. Bigot, Mme Bonnefoy, MM. Durain et Gillé, Mme Harribey, M. P. Joly, Mme G. Jourda, M. Leconte, Mme Lepage, MM. Lozach, Lurel, Marie et Mérillou, Mme Monier, MM. Montaugé et Pla, Mme S. Robert, MM. Sueur, Temal et Tissot, Mmes Préville, Briquet et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L’amendement n° 920 est présenté par Mme Poncet Monge, M. Benarroche, Mme Benbassa, M. Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon et Mme Taillé-Polian.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Après l’alinéa 10
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« …° D’impulser et piloter une politique de prévention ; de contribuer et d’assurer le pilotage d’une politique de lutte contre l’isolement et d’assurer le renforcement de sa déclinaison sur l’ensemble des territoires. » ;
L’amendement n° 641 n’est pas soutenu.
La parole est à Mme Michelle Meunier, pour présenter l’amendement n° 720 rectifié.
Mme Michelle Meunier. Cet amendement vise également les missions de prévention et de lutte contre l’isolement. C’est aussi l’objet d’un travail que nous sommes en train de réaliser avec mon collègue Bernard Bonne et que nous remettrons prochainement à Mme la ministre Brigitte Bourguignon. Les éléments ont été donnés. En regardant de près, j’ai l’impression qu’ils sont presque satisfaits : nous avons voté l’amendement n° 401 rectifié, qui portait aussi sur ces thématiques de lutte contre l’isolement et de prévention de la perte d’autonomie.
M. le président. L’amendement n° 920, présenté par Mme Poncet Monge, M. Benarroche, Mme Benbassa, M. Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon et Mme Taillé-Polian, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 10
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« … ° D’impulser et piloter une politique de prévention ; de contribuer et d’assurer le pilotage d’une politique de lutte contre l’isolement et d’assurer le renforcement de sa déclinaison sur l’ensemble des territoires. » ;
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Mme Raymonde Poncet Monge. Je n’ai pas compris en quoi l’adoption de l’amendement n° 401 rectifié résolvait le problème.
Cet amendement, qui concerne la prévention, fait écho aux demandes des acteurs de la solidarité et de l’autonomie. Il vise à réaffirmer l’importance de la prévention, partie intégrante d’un accompagnement global dans une logique dite de parcours, pour éviter les situations de rupture et réduire les inégalités.
Dans le champ des personnes âgées – c’est tout l’intérêt de cette branche autonomie, qui va aligner les personnes âgées dans un même mouvement avec les personnes en situation de handicap – et au niveau national, la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie pilote et anime déjà des conférences de financeurs de la prévention de la perte d’autonomie. Il s’agit d’étendre cette capacité au secteur des personnes en situation de handicap.
Le dispositif des conférences de financeurs de la prévention de la perte d’autonomie est efficient, même si l’on peut en regretter l’annualité, qui prive la prévention d’une de ses conditions d’efficacité, à savoir le moyen terme. Cette évolution faisait partie des recommandations du rapport Déconfinés mais toujours isolés ? La lutte contre l’isolement, c’est tout le temps ! Il s’agit d’apporter des précisions en matière de prévention en pointant davantage le risque devant l’isolement. Tout à l’heure, il était question de sémantique entre égalité et équité. Les acteurs de l’autonomie ne parlent plus de dépendance depuis l’abandon de la prestation spécifique dépendance, la PSD, mais de perte d’autonomie. Cette lutte contre l’isolement, c’est « tout le temps ! », pour reprendre le titre du rapport. Il importe donc de mettre l’accent sur cette lutte dès le PLFSS.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Mouiller, rapporteur. L’avis général de la commission sur les amendements en discussion commune est défavorable.
L’amendement n° 902 rectifié est satisfait par le vote de l’amendement n° 401 rectifié. Il en est de même de l’amendement n° 245 rectifié quater, qui porte sur l’alinéa 10. Et je demande l’avis du Gouvernement sur les amendements identiques nos 720 rectifié et 920.
Quoi qu’il en soit, je profite de cette prise de parole pour insister sur la difficulté que nous avons dans notre travail de parlementaires a bien cerner le périmètre des missions de la CNSA. On a évoqué sur toutes les travées la méthode qui consiste à avoir d’abord défini le cadre et à avoir ensuite, au fur et à mesure, sans réelle concertation avec les parlementaires et sans connaître les moyens financiers, arrêté les missions. Nous venons de voter un amendement que vous avez approuvé, monsieur le secrétaire d’État, concernant la politique sur l’isolement. Avec quels moyens financiers ? Dans quel périmètre ? Avec quels outils ? Toutes ces questions se posent.
On est en train de faire un inventaire à la Prévert de ce que l’on va donner ou pas à la CNSA, ce qui suscite beaucoup d’inquiétudes sur la suite des événements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Je demande le retrait de l’ensemble de ces amendements, car ils sont satisfaits. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.
Mme Meunier l’a souligné, l’adoption de l’amendement n° 401 rectifié intègre la question du dépistage de l’isolement dans les missions de la CNSA. Il en va de même de l’amendement n° 920 de Mme Poncet Monge. Par ailleurs, la prévention est d’ores et déjà une des missions de la CNSA. Puisqu’il est question d’isolement, je profite de l’occasion pour saluer à mon tour l’engagement de l’association Monalisa et de son délégué national, Jean-François Serres.
M. le président. Monsieur Artano, l’amendement n° 902 rectifié est-il maintenu ?
M. Stéphane Artano. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 902 rectifié est retiré.
Madame Mélot, l’amendement n° 245 quater est-il maintenu ?
Mme Colette Mélot. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 245 quater est retiré.
Madame Meunier, l’amendement n° 720 rectifié est-il maintenu ?
Mme Michelle Meunier. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 720 rectifié est retiré.
Madame Poncet Monge, l’amendement n° 920 est-il maintenu ?
Mme Raymonde Poncet Monge. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 920 est retiré.
L’amendement n° 721 rectifié, présenté par Mme Jasmin, M. Jomier, Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Antiste, Bouad et J. Bigot, Mme Bonnefoy, MM. Durain et Gillé, Mme Harribey, M. P. Joly, Mme G. Jourda, M. Leconte, Mme Lepage, MM. Lozach, Lurel, Marie et Mérillou, Mme Monier, MM. Montaugé et Pla, Mme S. Robert, MM. Sueur, Temal et Tissot, Mmes Préville, Briquet et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 9
Après le mot :
autonomie
insérer les mots :
, leurs possibles adaptations territoriales
La parole est à Mme Victoire Jasmin.
Mme Victoire Jasmin. Cet amendement vise à introduire une différenciation pour certains territoires. Il existe en effet une grande hétérogénéité et une diversité des problématiques suivant que les territoires sont ruraux, urbains ou insulaires.
Les données démographiques permettent d’argumenter cette proposition. Dans les territoires ultramarins, Mayotte et la Guyane enregistrent une explosion des naissances alors que les Antilles, la Guadeloupe et la Martinique sont confrontées à un vieillissement de la population, avec une migration des jeunes. Les données n’étant pas identiques d’un territoire à l’autre, il conviendrait d’établir une différenciation et de prévoir des propositions adaptées à chacun.
Le rapport présenté par Dominique Libault l’année dernière n’a pas pris en compte ces données démographiques pourtant évidentes. Il s’agit pour nous de prévoir une expérimentation dans nos territoires, afin de ne pas procéder de manière uniforme dans tous les départements.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Mouiller, rapporteur. Cet amendement vise à prévoir que la contribution à la réflexion prospective de la CNSA comprend les « possibles adaptations territoriales » des politiques de l’autonomie. C’est une dimension importante de cette politique déjà prise en compte par la CNSA. La précision trouverait peut-être mieux sa place dans la convention d’objectifs et de gestion que dans la loi. Au regard de l’enjeu, je demande l’avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Sophie Cluzel, secrétaire d’État. Madame la sénatrice, vous demandez que la CNSA introduise dans ses réflexions prospectives sur les politiques de l’autonomie leurs possibles adaptations territoriales. La rédaction proposée des missions de la CNSA prévoit d’ores et déjà qu’elle prend en compte les spécificités de tous les territoires et ne la limite pas dans ses réflexions prospectives. Cela lui permet de proposer, le cas échéant, des adaptations territoriales.
La CNSA développe activement des actions d’accompagnement spécifiques aux régions, collectivités ou territoires d’outre-mer, pour répondre déjà leurs besoins. Je partage la nécessité d’apporter une réponse adaptée à chaque situation en tenant compte du contexte spécifique et des besoins d’autonomie de la personne. Pour qu’il n’y ait aucune ambiguïté sur le fait que nous partageons la même ambition, j’émets un avis de sagesse.
M. le président. L’amendement n° 723 rectifié, présenté par Mme Rossignol, M. Jomier, Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Jasmin, Le Houerou, Meunier et Poumirol, MM. Antiste, Bouad et J. Bigot, Mme Bonnefoy, MM. Durain et Gillé, Mme Harribey, M. P. Joly, Mme G. Jourda, M. Leconte, Mme Lepage, MM. Lozach, Lurel, Marie et Mérillou, Mme Monier, MM. Montaugé et Pla, Mme S. Robert, MM. Sueur, Temal et Tissot, Mmes Préville, Briquet et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 9
Compléter cet alinéa par les mots :
, en prenant notamment en considération les inégalités liées au sexe afin d’élaborer des mesures correctives
La parole est à Mme Michelle Meunier.
Mme Michelle Meunier. Cet amendement vise à tenir compte des inégalités entre les femmes et les hommes. La Drees a montré dernièrement les conséquences de ces inégalités dans le couple vieillissant. Lorsque l’homme est aidant, le recours à des prestations extérieures est plus rapide. C’est l’inverse lorsque la femme aide son partenaire.
La politique de prévention que nous souhaitons confier à la CNSA devrait idéalement s’intéresser aux différences de genre et considérer les inégalités liées au sexe, afin d’élaborer des mesures correctives.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Mouiller, rapporteur. Il s’agit de préciser que la réflexion prospective de la CNSA prend en considération les inégalités liées au sexe afin d’élaborer des mesures correctives. C’est un aspect important, qui trouvera toutefois plus sa place dans la convention d’objectifs et de gestion que dans la loi. Avis défavorable, même si je ne méconnais pas l’importance du sujet.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Nous partageons évidemment votre préoccupation, madame la sénatrice. Nous ne nions pas l’importance des inégalités sexuées dans le secteur des personnes âgées et handicapées, mais nous ne sommes pas non plus totalement en désaccord avec le rapporteur quand il souligne que cet aspect trouvera peut-être davantage sa place dans la convention d’objectifs et de gestion que dans la loi. Par ailleurs, cela m’embête de restreindre les missions de prospective de la CNSA à ce seul sujet.
Néanmoins, j’émets un avis de sagesse sur cet amendement.
M. le président. L’amendement n° 482 rectifié ter, présenté par Mme Lubin, M. Antiste, Mmes Van Heghe, Lepage et Jasmin, MM. Jeansannetas et Kerrouche, Mme Préville, M. Vaugrenard, Mme Féret, M. Marie, Mme Poumirol, MM. Bourgi, Montaugé, Tissot, Cozic, Redon-Sarrazy, Temal et Dagbert, Mme Monier et M. P. Joly, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 9
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« À ce titre, elle rédige un cahier des charges national relatif à la création de maisons des aînés et des aidants départementales et accompagne leur développement sur l’ensemble du territoire. La définition juridique de ces structures est définie par décret.
La parole est à Mme Monique Lubin.
Mme Monique Lubin. De nombreuses structures d’accompagnement des personnes âgées dans le champ médico-social ont vu le jour ces dernières années. Celles-ci, tout en permettant d’offrir un meilleur soutien à cette population, ont complexifié la lecture du maillage territorial tant pour les patients que pour les professionnels de santé.
Afin de pouvoir faciliter les recours, le rapport Libault du mois de mars 2019 proposait la mise en place d’un guichet unique départemental regroupant l’ensemble des acteurs, afin de limiter le fonctionnement en silo. Ces structures, nommées maisons des aînés et des aidants, existent déjà sur certains territoires.
Cet amendement vise à confier à la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie la responsabilité d’en définir le champ et d’accompagner leur développement sur le territoire.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Mouiller, rapporteur. Cet amendement vise à prévoir que la CNSA rédige un cahier des charges national relatif aux missions des aînés et des aidants et soutienne leur développement sur le territoire.
À l’instar des précisions sur le rôle des maisons départementales de l’autonomie, il est sans doute un peu tôt pour préciser dans le budget de la sécurité sociale le maillage territorial fin des guichets d’information en matière d’autonomie, qui fera l’objet de débats lors de l’examen de la loi grand âge.
L’emplacement et la rédaction de l’amendement pourraient en outre sans doute être ajustés. De nouveau, il s’agit d’un sujet important dont nous débattrons, mais pas à ce stade de l’examen du PLFSS.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 482 rectifié ter.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. L’amendement n° 412, présenté par Mme Guidez, M. Henno, Mmes Doineau, Sollogoub et Jacquemet, M. Duffourg et les membres du groupe Union Centriste, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 10
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« …° De favoriser l’essor de la démocratie médico-sociale en assurant l’association des représentants d’usagers dans le champ des politiques de soutien à l’autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées au niveau local. » ;
La parole est à Mme Jocelyne Guidez.
Mme Jocelyne Guidez. Cet amendement vise à inscrire dans les missions de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie la nécessité de garantir l’essor de la démocratie médico-sociale en assurant l’association des représentants d’usagers dans le champ des politiques de soutien à l’autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées à l’échelon local.
Il est indispensable que les usagers puissent contribuer aux côtés des professionnels aux travaux liés au soutien à l’autonomie, à l’accompagnement de la dépendance et du handicap. Par ailleurs, pour que la démocratie médico-sociale soit particulièrement vivante, il est nécessaire de favoriser l’essor des réseaux associatifs sur l’ensemble des territoires.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Mouiller, rapporteur. Cet amendement vise à préciser que la CNSA contribue à l’association des usagers et à la conduite des politiques de soutien à l’autonomie au niveau local.
La CNSA est le « parlement de l’autonomie » au niveau national. La composition de son conseil en témoigne. Il est utile qu’elle favorise l’expression des souhaits et besoins des usagers au niveau local, par exemple en soutenant le tissu associatif, qui contribue grandement à cette politique. La commission émet donc un avis favorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Sophie Cluzel, secrétaire d’État. Madame la sénatrice, je soutiens pleinement la démocratie médico-sociale et la représentation des usagers dans les instances nationales ou locales. Cette démocratie existe déjà à l’échelon régional, avec les conférences régionales de la santé et de l’autonomie, et à l’échelon départemental, avec les conseils départementaux de la citoyenneté et de l’autonomie, créés par la loi de 2015 relative à l’adaptation de la société au vieillissement et dont le premier collège représente des usagers : personnes handicapées, personnes âgées et aidants.
La participation des usagers est recherchée dans le champ médico-social. Ainsi la Haute Autorité de santé mène-t-elle une enquête de grande ampleur auprès des usagers du secteur.
Cependant, les évolutions à apporter pour favoriser l’essor de la démocratie médico-sociale relèvent du domaine de la loi, et non des orientations données par une caisse de sécurité sociale. C’est pourquoi, tout en partageant votre ambition, j’émets un avis défavorable sur votre amendement.
M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.
M. René-Paul Savary. Madame la secrétaire d’État, je partage pour une fois votre point de vue. Effectivement, cette démocratie est déjà bien organisée au niveau des territoires. C’est bien à cet échelon que les choses doivent se faire. C’est incontournable ! Il existe d’ailleurs déjà un certain nombre d’acteurs locaux. Si l’on veut qu’ils travaillent ensemble et s’organisent en collectif, comme cela se pratique dans certains départements, il faut les laisser faire. C’est aux hommes et aux femmes sur le terrain de construire ce type de dispositif.
C’est comme pour le guichet unique proposé tout à l’heure : aux territoires de s’organiser. Naturellement, l’un d’entre eux sera chef de file, mais ils se mettront d’accord, et ils réussiront à ouvrir un guichet unique. À quoi bon créer une structure de plus ? On a déjà les MAIA, les Paerpa, les CLIC, les instances de coordination gérontologique… Tout ça pour régler les décisions à travers la CDA prises par la MDPH. On est encore dans une série de sigles qui montre bien que l’articulation est difficile dans ce secteur !
Laissons donc faire les territoires. N’en rajoutons pas. Ils s’organiseront par eux-mêmes. Ce sera beaucoup plus efficace.
M. le président. L’amendement n° 1013, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 22
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« …° Une contribution de solidarité pour l’autonomie au taux de 0,5 % assise sur les encours constitués par les personnes physiques au titre d’un contrat d’assurance vie conclu auprès d’organismes relevant du code des assurances ou du code de la mutualité, d’établissements de crédit, de la Banque de France, d’un comptable public compétent ou de sociétés de gestion de portefeuille et ce quelle que soit la nature du support de compte. Le prélèvement n’est applicable qu’aux encours supérieurs ou égaux à 100 000 € à la date précitée ;
La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Cet amendement vise à mobiliser la solidarité des ménages les plus aisés pour financer la politique en faveur de l’autonomie. Il est en effet nécessaire et urgent de créer une nouvelle ressource pour la cinquième branche autonomie, alors que le présent projet de loi n’est pas à la hauteur des besoins de financement identifiés par le rapport Libault de mars 2019, à savoir 6,5 milliards d’euros en 2024.
Alors que l’encours des produits d’assurance vie représentait plus de 1 800 milliards d’euros début 2020, même une faible mobilisation de ces réserves permettrait d’obtenir un rendement intéressant, de l’ordre de 2 milliards d’euros.
Le présent amendement vise donc à mettre en place un prélèvement exceptionnel de 0,5 % sur ces encours. Toutefois, afin de ne pas pénaliser les ménages de la classe moyenne, le prélèvement est limité aux personnes physiques ayant des encours d’assurance vie supérieurs ou égaux à 100 000 euros.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. L’idée est intéressante, mais n’anticipons pas les conclusions de la conférence des financeurs qui va être réunie et organisée sous l’égide de la CNSA. Avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Comme nous entrons dans une série d’amendements portant sur l’importante question du financement, avec notamment la création d’un certain nombre de nouveaux prélèvements obligatoires, je ferai une réponse générale.
Je le rappelle, ce projet de loi de financement de la sécurité sociale comporte un ensemble de mesures nouvelles, à hauteur de plus de 2,5 milliards d’euros pour 2021. C’est donc tout sauf une coquille vide, contrairement à ce qui a pu être affirmé.
Plusieurs mesures sont ainsi financées par ce biais. Mme Lienemann a évoqué le rapport Iborra-Fiat. Or 1,5 milliard d’euros sont consacrés à la revalorisation salariale dans les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes, les Ehpad, et 300 millions d’euros à l’amélioration du taux d’encadrement dans ces établissements. Par ailleurs, 200 millions d’euros sont destinés à la revalorisation des salariés du domicile dans le cadre d’un cofinancement avec les conseils départementaux, et 400 millions d’euros à l’investissement dans l’immobilier, l’équipement et le numérique en faveur du médico-social. Enfin, un ensemble de mesures en faveur du handicap viennent traduire les engagements de la Conférence nationale du handicap pilotée par Mme la secrétaire d’État.
Pour financer une grande partie de ces dispositifs, la CNSA bénéficie désormais, à compter de ce PLFSS, d’un financement autonome grâce à des recettes propres. En tout, ce sont 28 milliards d’euros de CSG qui seront déjà affectés à la branche. Au total, vous le savez, la branche autonomie représente des dépenses à hauteur de 31 milliards d’euros.
Bien entendu, tout cela n’épuise pas le sujet du financement de la branche. L’effet démographique que nous connaissons et les ambitions de la loi Grand âge et autonomie devront être financés. Une solution existe déjà : à compter de 2024, la loi relative à la dette sociale et à l’autonomie votée en août dernier prévoit d’affecter une fraction de CSG supplémentaire à la branche à hauteur de 2 milliards d’euros.
Au-delà de ces dispositions, plusieurs pistes de financement sont envisageables. Elles ont été mises à plat par le rapport Vachey, qui vous a été remis mi-septembre, rapport aussi riche qu’exhaustif.
Vous le savez, l’équation est difficile. Entre les transferts, les économies et les nouveaux prélèvements obligatoires, la voie de passage n’est pas simple. Elle l’est peut-être encore moins aujourd’hui, en période de crise. Ne faisons donc pas comme si le sujet était aisé, et ne laissons pas croire que nous ne faisons rien. Bien au contraire, nous prenons ce sujet à bras-le-corps dans le cadre de la préparation de l’examen de la loi sur le grand âge et l’autonomie, qui sera présentée en 2021.
À ce stade, j’émettrai un avis défavorable sur l’ensemble des amendements relatifs au financement de la branche, dont l’amendement n° 1013.
M. le président. La parole est à Mme Monique Lubin, pour explication de vote.
Mme Monique Lubin. Cela prouve bien que les choses ont été faites à l’envers. Nous avons conscience que nos amendements n’ont pas réellement leur place dans le cadre d’un PLFSS. Si nous avions discuté avant de la manière de créer la branche autonomie, nous y aurions certainement intégré tous ces éléments, et nous aurions parlé du reste ensuite !
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. Je suis inquiète quand j’entends dire qu’il y aura 2 milliards d’euros supplémentaires, ce qui est vrai. Vous avez évoqué le Ségur pour les Ehpad, le taux d’encadrement, etc. Nous parlons de 2021. Or une loi Grand âge et autonomie est annoncée pour 2021 ; vous vous y engagez, et j’en suis ravie, car cela fait plus de deux ans que c’est reporté. L’autonomie subit des reports dilatoires ; ce n’est jamais le moment. Mais il va être grand temps de s’y atteler ! Il faudra donc, sauf si la loi est votée en novembre, allouer dès 2021 des ressources nouvelles !
Quand on rappelle que le rapport Libault parle de 6 milliards d’euros en 2024 et de 9 milliards d’euros à l’horizon de 2030, si j’ai bonne mémoire, cela ne signifie pas que l’année prochaine, il n’y a besoin de rien ! Cela signifie simplement qu’il estime que c’est financé, mais dans un périmètre donné : celui que vous êtes en train d’évoquer. Par conséquent, vous ne pourrez rien faire pour améliorer l’attractivité des métiers du prendre soin dès l’année prochaine : vous allez donc encore sinistrer davantage le secteur. Autrement, si vous voulez agréer des avenants – il est souvent question de l’avenant 43 de la branche de l’aide à domicile –, vous savez bien qu’il faudra y consacrer plus de 200 millions d’euros !
Vous prévoyez de n’allouer l’année prochaine que 150 millions d’euros au secteur, car la mesure ne sera applicable qu’au 1er avril. Rayer d’un trait trois mois, c’est ne pas prendre la mesure du secteur du domicile, totalement sinistré aujourd’hui. Vous accordez 150 millions pour l’année prochaine, mais vous savez très bien que 600 millions à 800 millions d’euros seraient nécessaires.
Qu’est-ce à dire ? Que vous allez demander aux départements de financer les deux tiers de l’agrément d’un avenant, qui, je l’espère, interviendra avant la fin de l’année, faute de quoi il ne sera applicable qu’en 2022, ce qui serait complètement irresponsable ? Dans ce cas, il faut l’annoncer maintenant très clairement et dire aux départements qu’ils devront payer les deux tiers de la branche !
Je trouve dramatique, eu égard à la situation actuelle, d’avoir annoncé 200 millions d’euros, mais de n’en avoir débloqué que 150 millions pour l’année prochaine au motif que la mesure ne sera applicable qu’au 1er avril. Faut-il rappeler que plus personne n’est embauché dans cette branche et qu’une prestation sur cinq ne peut pas être délivrée à cause du manque de personnel ?
M. le président. L’amendement n° 984, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 23
Rédiger ainsi cet alinéa :
« 2° Une contribution de solidarité des actionnaires d’un taux de 2 % sur l’ensemble des dividendes des entreprises ;
La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Nous aurions dû discuter du projet de loi Autonomie avant le PLFSS ; nous en sommes tous convaincus. Par ailleurs, nous venons de comprendre – mais on le verra encore mieux avec ce deuxième amendement – que vous avez une fois de plus complètement renoncé à faire payer les plus riches de ce pays. Quoi qu’il en soit, nous allons continuer à vous faire des propositions, afin de trouver des recettes pour le budget de la sécurité sociale, dont vous vous plaignez toujours du déficit.
En pleine période de pandémie et de confinement du pays, les multinationales du CAC 40 ont tenté de se faire discrètes dans la publication de leurs résultats, conscientes que ces annonces ne seraient pas perçues favorablement par l’opinion. Les pouvoirs publics et les organisations professionnelles ont multiplié les appels à la modération. Le gouvernement français a consenti à faire du non-versement des dividendes et de rachat d’actions une condition pour bénéficier d’un prêt garanti de l’État ou d’un report de cotisations, mais pas pour bénéficier du chômage partiel ou de l’appui des banques centrales.
Au final, un petit tiers du CAC 40 a annulé ou suspendu le versement des dividendes initialement prévu, essentiellement les grandes banques, qui ont été indirectement obligées de pouvoir avoir accès au refinancement bancaire via la Banque centrale européenne, la BCE, ainsi que de grands groupes ayant un urgent besoin d’aides publiques pour survivre à la période. Plusieurs n’ont pas totalement abandonné l’idée de verser un dividende plus tard dans l’année.
Au final, au titre de l’exercice 2019, les actionnaires ont reçu 34 milliards d’euros alors même que la pandémie sévissait, que l’économie était à l’arrêt et que des millions de salariés étaient placés en chômage partiel.
Alors que le vieillissement de la société impose de dégager de nouvelles recettes pour la sécurité sociale, nous proposons que la branche « perte d’autonomie » bénéficie d’une contribution des dividendes versés aux actionnaires à hauteur de 2 %. Cette mesure permettrait de rapporter 2 milliards d’euros pour financer la branche en 2021.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Encore une fois, attendons les propositions de la conférence des financeurs. (Marques d’ironie sur les travées du groupe CRCE) L’idée est certainement intéressante, comme toutes les idées : le rapport Vachey en contient d’ailleurs à profusion. Je suis certain que nous en aurons d’autres encore, et pas forcément les mêmes que les vôtres. Avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 419 rectifié bis, présenté par Mmes Guidez et Jacquemet, M. Henno, Mmes Doineau et Sollogoub, M. Duffourg et les membres du groupe Union Centriste, est ainsi libellé :
I. – Après l’alinéa 23
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« …° Les versements effectués par la Caisse des dépôts et consignations ;
II. – Après l’alinéa 96
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
… – L’article L. 132-27-2 du code des assurances est ainsi modifié :
1° Après le II, il est inséré un paragraphe ainsi rédigé :
« …. – La Caisse des dépôts et consignations verse chaque année à la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie un montant correspondant à 5 % de l’encours total, au 31 décembre de la pénultième année, des sommes dont elle est dépositaire en application du présent article. Le montant ainsi reversé donne lieu à une réduction en volume à due concurrence du produit attendu en application du 2° de l’article L. 14-10-4 du code de l’action sociale et des familles ; il est procédé, en tant que de besoin, à l’adaptation en conséquence des taux mentionnés à l’article L. 131-8 du code de la sécurité sociale dès la première loi de financement de la sécurité sociale » ;
2° Au premier alinéa du III, le mot : « déposées » est remplacé par les mots : « demeurant en dépôt ».
La parole est à Mme Jocelyne Guidez.
Mme Jocelyne Guidez. L’article 16 prévoit que le financement de la branche autonomie repose principalement sur une part de CSG. Cela pose-t-il problème ? Pas nécessairement, mais cela interroge surtout au regard des besoins futurs. Nul doute que la sécurité sociale aura du mal à résister aux transferts toujours plus importants de la CSG vers la branche d’autonomie dans les années à venir.
Cet amendement vise à prévoir un élément supplémentaire dans le financement de la branche. Ces nouvelles ressources – j’insiste sur ce point – viendront en déduction de la part de CSG transférée à la CNSA. Le Gouvernement et notre rapporteur général devraient y voir un moyen de participer au rétablissement des comptes de la sécurité sociale. Ce financement ne repose sur aucune nouvelle taxe ou cotisation, mais sur les contrats en déshérence placés à la Caisse des dépôts et consignations, la CDC.
Monsieur le rapporteur général, vous allez certainement redévelopper vos remarques concernant le droit de propriété. Je répondrai par anticipation.
Sur le droit de propriété, la CDC est dépositaire des fonds et doit donc les rendre quand on les lui réclame, comme une banque. Cela n’empêche cependant pas nos banques d’utiliser notre argent pour des opérations de toutes sortes. L’essentiel, au final, est qu’elles soient en mesure de nous le rendre quand on le réclame. En l’occurrence, je comprends qu’il en va de même pour la CDC. D’ailleurs, j’appelle votre attention sur le taux de 5 % de reversement que nous proposons. On exige ainsi de la CDC un ratio prudentiel de 95 %.
C’est un record absolu et sans commune mesure avec les exigences de Bâle. Pour parler d’atteinte à la propriété, il faudrait que la Caisse fasse don du contrat d’un individu bien identifié. Mais, en l’espèce, nous sommes en présence d’un bien fongible. Bref, le reversement n’emporte aucun transfert de propriété des fonds sur un contrat déterminé, pas plus que l’argent de ses clients utilisé par une banque n’emporte dépossession de ceux-ci.
Cet amendement, qui ne porte pas atteinte au droit de propriété et tend à contribuer au redressement des comptes de la sécurité sociale, ne présente que des avantages.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Mme Guidez a anticipé l’avis de la commission. L’argent que vous placez en banque reste vôtre, même si des crédits lui sont adossés. La situation est comparable. Cela consiste à anticiper des dépenses en considérant que la Caisse des dépôts et consignations pourra les compenser. À titre d’illustration, les encours d’assurance vie dont la Caisse des dépôts est rendue dépositaire chaque année sont de l’ordre de 130 millions d’euros. Mieux vaut attendre la conférence des financeurs.
La commission demande donc le retrait de cet amendement, faute de quoi elle émettrait un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 419 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
5
Modifications de l’ordre du jour
M. le président. Mes chers collègues, par lettre en date de ce jour, le Gouvernement demande l’inscription à l’ordre du jour du samedi 14 novembre, le matin, l’après-midi et le soir, de la suite éventuelle du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2021.
Acte est donné de cette demande.
Au vu du nombre d’amendements restant à examiner, nous pourrions également d’ores et déjà ouvrir la nuit du vendredi 13 novembre.
Y a-t-il des observations ?…
Il en est ainsi décidé.
Par ailleurs, par lettre en date de ce jour, le Gouvernement sollicite du Sénat l’inscription de la lecture des conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi de programmation de la recherche pour les années 2021 à 2030 à l’ordre du jour du vendredi 20 novembre, le matin.
Nous pourrions fixer le début de l’examen de ce texte à onze heures et la durée de la discussion générale à quarante-cinq minutes.
Y a-t-il des observations ?…
Il en est ainsi décidé.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à vingt heures, est reprise à vingt et une heures trente, sous la présidence de Mme Nathalie Delattre.)
PRÉSIDENCE DE Mme Nathalie Delattre
vice-présidente
Mme la présidente. La séance est reprise.
Mes chers collègues, vous allez malgré vous devoir inaugurer ce soir ma première présidence de séance. Je vous remercie par avance de votre indulgence. (Applaudissements.)
6
Rappel au règlement
Mme la présidente. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, pour un rappel au règlement.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Mon rappel au règlement se fonde sur l’article 36 de notre règlement. Il concerne la proposition de contrepartie aux aides publiques que nous avions formulée dans le cadre des débats sur les déficits de la sécurité sociale.
L’entreprise Bridgestone, établie à Béthune, dans le Pas-de-Calais, a touché des fonds publics et a bénéficié du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE). La direction du groupe, située au Japon, refuse aujourd’hui de reprendre le site et laisse tomber les 863 salariés de l’entreprise, alors que les habitants du Pas-de-Calais vivent déjà une situation bien compliquée. On sait qu’un emploi industriel représente trois à quatre emplois perdus, sans compter la détresse des familles.
Cependant, tout espoir n’est pas perdu : quatre groupes industriels, situés le premier en Turquie, le deuxième en Chine, et les deux deniers en Inde, ont fait des propositions pour reprendre le site, car ils souhaitent asseoir leur position en Europe dans le secteur du pneumatique.
Nous demandons à l’État de prendre complètement la main sur ce dossier. J’ai formulé cette demande auprès de la ministre déléguée, chargée de l’industrie, qui est venue ce matin rencontrer les élus du territoire. Nous comptons sur l’État pour garantir le sérieux des propositions de reprise, pour continuer la prospection et pour contraindre Bridgestone à accepter la cession du site pour un euro symbolique.
Mme la présidente. Acte est donné de votre rappel au règlement.
7
Financement de la sécurité sociale pour 2021
Suite de la discussion d’un projet de loi
Mme la présidente. Nous reprenons la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2021.
Dans la discussion des articles, nous sommes parvenus, au sein de l’article 16, à l’examen de l’amendement n° 483 rectifié ter.
TROISIÈME PARTIE (suite)
DISPOSITIONS RELATIVES AUX RECETTES ET À L’ÉQUILIBRE DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR L’EXERCICE 2021
TITRE IER (SUITE)
DISPOSITIONS RELATIVES AUX RECETTES, AU RECOUVREMENT ET À LA TRÉSORERIE
Chapitre III (suite)
Créer la nouvelle branche Autonomie
Article 16 (suite)
Mme la présidente. L’amendement n° 483 rectifié ter, présenté par Mme Lubin, M. Antiste, Mmes Van Heghe, Lepage et Jasmin, MM. Jeansannetas et Kerrouche, Mme Préville, M. Vaugrenard, Mme Féret, M. Marie, Mme Poumirol, MM. Bourgi, Montaugé, Tissot, Cozic, Redon-Sarrazy, Temal et Dagbert, Mme Monier et M. P. Joly, est ainsi libellé :
Alinéa 28
Compléter cet alinéa par les mots :
, comprenant notamment les rénovations des établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes publics définis au I de l’article L. 313-12 du code de l’action sociale et des familles, le développement d’accueils de jour au sein de ceux-ci, la création de résidences autonomie comme définies au III de l’article L. 313-12 du même code ainsi que de structures de répit au sens du 7° du I de l’article L. 312-1 dudit code, sur l’ensemble du territoire
La parole est à Mme Monique Lubin.
Mme Monique Lubin. Selon une enquête menée par la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees), en 2015, la construction ou dernière rénovation des bâtiments des établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) dataient de plus de vingt-cinq ans dans 23 % des cas. De plus, les éléments de confort différaient entre les établissements publics et privés : si les Ehpad privés offraient quasiment exclusivement des chambres individuelles avec sanitaires privatifs, 11 % des places en Ehpad étaient en chambre partagée et 25 % n’avaient pas de douche privative.
Par conséquent, cet amendement vise à faciliter la rénovation de ces structures en allouant des financements à cette mission, que nous souhaiterions voir attribuer à la CNSA.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Mouiller, rapporteur de la commission des affaires sociales pour l’autonomie. Cet amendement tend à prévoir que, dans la mesure où la CNSA finance les établissements médico-sociaux, elle a aussi pour rôle de contribuer à leur rénovation, à la création d’accueils de jour, de résidences autonomie et de structures de répit.
Cependant, la CNSA contribue déjà à de telles actions, via les plans d’aide à l’investissement.
De plus, la réécriture de l’article 16 à l’occasion de ce PLFSS vise surtout à clarifier le code de l’action sociale et des familles pour permettre à la CNSA d’exercer sa mission de gestionnaire de la branche.
Par conséquent, et bien qu’elle soit sensible aux difficultés qui sont mentionnées, la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargé de l’enfance et des familles. Cet amendement est satisfait. En effet, l’alinéa 29 prévoit d’ores et déjà le financement par la CNSA des aides à l’investissement, pour l’ensemble des établissements et services médico-sociaux.
Par ailleurs, la rénovation des Ehpad reste une priorité pour le Gouvernement, qui a prévu à cet effet une enveloppe de 2,1 milliards d’euros sur cinq ans, dans le Ségur de la santé.
Le Gouvernement demande donc le retrait de cet amendement, faute de quoi l’avis serait défavorable.
Mme la présidente. Madame Lubin, l’amendement n° 483 rectifié ter est-il maintenu ?
Mme Monique Lubin. Non, je le retire, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° 483 rectifié ter est retiré.
L’amendement n° 153, présenté par M. Vanlerenberghe, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Alinéa 35, seconde phrase
Après les mots :
elle peut contribuer
insérer les mots :
au financement d’actions contractualisées avec les conseils départementaux et les métropoles pour la transformation inclusive de l’offre médico-sociale ou d’autres formes d’habitat dans leurs domaines de compétence, ainsi qu’
La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Mouiller, rapporteur. L’article 16 reprend les dispositions actuelles donnant à la CNSA la compétence de contribuer au financement de l’habitat inclusif. Ce financement prend aujourd’hui la forme du forfait pour l’habitat inclusif, attribué à la personne morale chargée d’assurer le projet de vie sociale et partagée.
La CNSA doit également pouvoir accompagner les initiatives des conseils départementaux et des métropoles dans leurs responsabilités de transformation de l’offre médico-sociale ou d’autres formes d’habitat pour les personnes vulnérables. Elle doit même pouvoir évoluer vers le pilotage d’une politique de l’habitat en leur faveur, comme le suggère le rapport de Denis Piveteau et Jacques Wolfrom, publié au mois de juin dernier.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Sophie Cluzel, secrétaire d’État auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées. Monsieur le rapporteur, vous demandez d’étendre les dépenses d’intervention de la CNSA au financement des initiatives déployées par les conseils départementaux et les métropoles en faveur de l’habitat inclusif. Je rejoins votre souhait de poursuive le développement de cette nouvelle forme d’habitat, qui a initié un profond changement de perspective. Désormais, la lutte contre l’isolement, la pluralité de l’offre et, surtout, le maintien du lien social sont des outils à part entière de la prévention de la perte d’autonomie.
De nombreux porteurs de projets et acteurs institutionnels sont prêts. C’est pourquoi le Gouvernement émet un avis de sagesse sur cet amendement.
De façon complémentaire, l’amendement gouvernemental n° 601, sur lequel la commission des affaires sociales a émis un avis favorable, vise à déployer dès le 1er janvier le dispositif proposé dans le rapport de Denis Piveteau et Jacques Wolfrom.
Mme la présidente. L’amendement n° 154, présenté par M. Vanlerenberghe, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 65
Insérer trois alinéas ainsi rédigés :
…° Au deuxième alinéa de l’article L. 233-2, les mots : « mentionné au 2° de l’article L. 14-10-10 » sont remplacés par les mots : « correspondant aux autres actions de prévention mentionnées aux 1° , 4° et 6° de l’article L. 233-1 » ;
…° Au troisième alinéa du III de l’article L. 313-12, les mots : « et dans la limite des crédits correspondants attribués en application de l’article L. 14-10-10 » sont supprimés ;
…° L’article L. 521-2, le 1° de l’article L. 531-1, l’article L. 581-10 et le X de l’article L. 541-4 sont abrogés.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Mouiller, rapporteur. Amendement de coordination.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Cet amendement vise à modifier certaines dispositions du code de l’action sociale et des familles pour les mettre en cohérence avec la nouvelle codification mise en place à l’article 16 du PLFSS.
Je rappelle qu’une disposition habilitant le Gouvernement à prendre une ordonnance a précisément été prévue à cet effet. Elle a vocation à basculer les dispositions relatives à la CNSA du code de l’action sociale et des familles vers le code de la sécurité sociale. La codification sera réalisée à droit constant.
Cette ordonnance permettra aussi de regrouper l’ensemble des dispositions relatives aux caisses nationales du régime général de la sécurité sociale au sein d’un même code, à savoir le code de la sécurité sociale.
Les dispositions du code de l’action sociale et des familles concernées par cette codification seront modifiées en cohérence.
Par conséquent, monsieur le rapporteur, si vous en êtes d’accord, je vous proposerai de retirer cet amendement, qui me semble satisfait, puisque les actions de coordination entre le code de la sécurité sociale et le code de l’action sociale et des familles sont prévues par le recours à ordonnance.
Mme la présidente. Monsieur le rapporteur, l’amendement n° 154 est-il maintenu ?
M. Philippe Mouiller, rapporteur. La commission a décidé de proposer de supprimer les recours aux ordonnances. Par cohérence, je maintiens cet amendement.
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.
L’amendement n° 130 rectifié ter est présenté par Mme Guidez, M. Le Nay, Mmes de La Provôté et Canayer, M. Bonhomme, Mme Bonfanti-Dossat, M. Louault, Mme Billon, MM. Decool et Cigolotti, Mmes Férat et Sollogoub, MM. S. Demilly et Henno, Mmes Micouleau, Thomas, F. Gerbaud, L. Darcos, Dindar et Gatel, MM. Guerriau, Détraigne, Milon, Kern et Menonville, Mme V. Boyer, MM. Bonne, Pellevat, Gremillet et Rapin, Mme Jacquemet, MM. Delcros, Duffourg et Poadja et Mme Di Folco.
L’amendement n° 1014 est présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 72, première phrase
Remplacer le taux :
0,3 %
par le taux :
0,6 %
La parole est à Mme Jocelyne Guidez, pour présenter l’amendement n° 130 rectifié ter.
Mme Jocelyne Guidez. Cet amendement vise à financer la branche autonomie de la sécurité sociale en rehaussant la contribution de solidarité pour l’autonomie (CSA). Le doublement de cette contribution permettra d’abonder la branche de près de 3 milliards d’euros. En conséquence, davantage d’actions en faveur de l’autonomie des personnes âgées ou handicapées prévues par cette cinquième branche pourront être financées.
La branche autonomie, créée à l’été 2020, ne bénéficie pas de financement pérenne, mais d’un simple redéploiement de crédit. Le rapport Libault a mis en avant le fait que 10 milliards d’euros annuels seraient nécessaires pour financer correctement la dépendance et la perte d’autonomie.
Cet amendement vise donc à pérenniser les financements de la branche autonomie de la sécurité sociale en remplaçant, de manière strictement proportionnelle, une partie de la fraction de CSG allouée au financement des recettes de la CNSA.
À ce jour, la CSA est due dans le cadre de la « journée de solidarité », journée supplémentaire de travail non rémunérée pour les salariés. Elle rapporte près de 3 milliards d’euros annuels. En 2020, la journée de solidarité devrait permettre de collecter 2,948 milliards d’euros au profit de la CNSA. Le doublement de la CSA de 0,3 % à 0,6 % permettra ainsi d’obtenir des financements directs pour la cinquième branche.
Mme la présidente. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, pour présenter l’amendement n° 1014.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Depuis la création de la CNSA, les contributions reposent majoritairement sur les retraités, via la CSG et la contribution additionnelle de solidarité pour l’autonomie. Nous dénonçons cet état de fait à chaque PLFSS, car il est inacceptable que la solidarité intergénérationnelle ne soit pas mobilisée s’agissant de l’autonomie.
Cette année, l’article 16 du texte introduit de la nouveauté en créant la cinquième branche. Il n’en reste pas moins que ce sont toujours les retraités qui contribuent à l’autonomie, à hauteur de 90 %.
Cette situation n’est digne ni des ambitions affichées dans le rapport Libault ni de celles du Gouvernement.
Le groupe CRCE propose depuis des années qu’une contribution additionnelle de solidarité pour l’autonomie prise sur les revenus des actionnaires et de la finance soit mise en place. Une telle mesure contribuerait à faire de l’autonomie un enjeu de société. Le principe des quatre branches de la sécurité sociale est : à chacun selon ses moyens, à chacun selon ses besoins. Il semblerait que la cinquième branche, à peine créée, dérogerait déjà à cet impératif.
Augmenter le taux de prélèvement de 0,3 % à 0,6 % serait une mesure de justice et d’équité.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Relever le taux de la CSA aurait pour effet d’augmenter la contribution des employeurs, ce qui se traduira automatiquement par une augmentation du coût du travail. Est-ce la bonne direction ? On peut se poser la question.
Les employeurs ne sont pas favorables à l’idée de participer à cette nouvelle branche. Une conférence des financeurs est prévue. Nous aurons bientôt à examiner la loi Grand âge et autonomie. Mieux vaut donc attendre d’avoir débattu entre nous et avec les partenaires sociaux avant de prendre des décisions en matière de financement.
Pour toutes ces raisons, la commission a émis un avis défavorable sur ces deux amendements identiques.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 130 rectifié ter et 1014.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.
L’amendement n° 718 rectifié est présenté par Mmes Meunier et Lubin, MM. Jomier et Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Jasmin, Le Houerou, Poumirol et Rossignol, MM. Antiste, Bouad et J. Bigot, Mme Bonnefoy, MM. Durain et Gillé, Mme Harribey, M. P. Joly, Mme G. Jourda, M. Leconte, Mme Lepage, MM. Lozach, Lurel, Marie et Mérillou, Mme Monier, MM. Montaugé et Pla, Mme S. Robert, MM. Sueur, Temal et Tissot, Mmes Préville, Briquet et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L’amendement n° 918 rectifié est présenté par Mmes Poncet Monge et Benbassa, M. Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon et Mme Taillé-Polian.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’alinéa 78
Insérer cinq alinéas ainsi rédigés :
« Section …
« Contribution sur les successions et les donations
« Art. L. 137-…. – Il est créé une contribution dont la mission est de financer une partie des besoins de dépense en autonomie.
« Cette contribution est dénommée contribution sur les successions et les donations et son taux est fixé, dès le premier euro, à 1 % sur l’actif net taxable. Les modalités de recouvrement sont réalisées dans les conditions déterminées par l’article 750 ter du code général des impôts.
« La contribution sur les successions et les donations est affectée à la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie telle que mentionnée à l’article L. 14-10-1 du code de l’action sociale et des familles. » ;
La parole est à Mme Michelle Meunier, pour présenter l’amendement n° 718 rectifié.
Mme Michelle Meunier. Je pense connaître le sort qui sera réservé à cet amendement ; M. le rapporteur général évoquera probablement la conférence des financeurs !
Cependant, cet amendement tend à mettre en place une contribution de 1 % sur les successions et les donations.
Nous n’avons de cesse de le répéter depuis le début de l’examen de l’article 16 : même si la création de la cinquième branche est une étape historique, son financement n’est pas satisfaisant.
L’amendement vient compléter la rubrique des solutions de ressources propres, en prévoyant une contribution qui a l’avantage de ne pas taxer les actifs, pour financer des prestations sociales qui concernent majoritairement des personnes âgées. Cela pourrait rapporter près de 3 milliards d’euros à la branche et contribuer ainsi, en partie seulement, à répondre aux besoins.
Mme la présidente. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour présenter l’amendement n° 918 rectifié.
Mme Raymonde Poncet Monge. On nous dit qu’il faut attendre la conférence des financeurs pour arbitrer parmi les propositions du rapport Libault.
Cependant, vous vous êtes engagés à ouvrir les travaux du Laroque de l’autonomie, et vous avez promis une loi Grand âge et autonomie sans prévoir de ressource en 2021. Les conclusions n’ont pas pu être incluses dans le Ségur de la santé, ce qui est très dommageable. Comme d’habitude, le social et le médico-social doivent attendre. Espérons que ces conclusions arriveront en 2021 et qu’elles induiront un coût.
Cet amendement prévoit de financer le surcroît de dépenses de 2021 par une contribution assise sur les droits de succession et de donation.
Le Ségur de la santé a prévu une enveloppe de 2,1 milliards d’euros pour financer les Ehpad, qu’il s’agisse de la revalorisation des salaires, de l’achat d’équipements ou de l’amélioration du taux d’encadrement. C’est la raison pour laquelle vous avez demandé que des amendements soient retirés, considérant qu’ils étaient satisfaits.
Pour autant, cette enveloppe ne pourra pas servir à financer les mesures que préconiseront les conclusions des travaux du Laroque, ni celles de la loi Grand âge et autonomie. Il faut donc annoncer cartes sur table qu’en 2021 il n’y aura aucun financement de plus que ceux qui ont déjà été donnés aux établissements médico-sociaux. Le secteur devra s’en contenter, ainsi que des 150 millions d’euros qui lui ont été alloués.
Voilà pourquoi il est essentiel de trouver des ressources supplémentaires pour 2021.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Nous pourrions passer toute la soirée à annoncer de nouvelles mesures de financement. Le champ est ouvert. Je pourrais d’ailleurs vous réciter le rapport Vachey.
Cependant, le moment est-il bien choisi pour tout « mettre à plat » alors que la conférence des financeurs n’a pas encore eu lieu ? En effet, tout le monde n’est pas forcément d’accord avec toutes les mesures préconisées dans ce rapport. Nous ne pouvons pas procéder en sélectionnant en fonction des préférences de chacun.
Je reste profondément convaincu que nous arriverons à définir un périmètre beaucoup plus ambitieux que celui qui est aujourd’hui proposé ; il se limite à faire le constat de ce qui existe. Il faut forcément de l’ambition pour créer une cinquième branche. J’attends d’avoir l’avis du Gouvernement sur ce point. Quoi qu’il en soit, la loi Grand âge et autonomie ne s’inscrira évidemment pas dans le même périmètre que ce que nous votons ce soir.
Si l’on a créé la cinquième branche, c’est pour aller jusqu’au bout. Voilà des années qu’on y pense ! Même sous la présidence de M. Giscard d’Estaing, on parlait déjà de cinquième branche ou de cinquième risque. Les gouvernements se sont succédé, de droite comme de gauche, et ont laissé l’idée en plan. Aujourd’hui, je salue celui qui a eu le courage de commencer ; nous continuerons.
Pour autant, la commission a émis un avis défavorable sur ces amendements.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Je tiens à remercier M. le rapporteur général de ses propos, et à vous confirmer toute l’ambition du Gouvernement. Je ne peux que me réjouir et être optimiste, tout comme Mme Doineau tout à l’heure, sur le fait que nous initions tous ensemble un chantier qui a été longtemps repoussé, mais qui n’en est pas moins nécessaire.
L’ambition du Gouvernement est bien là. Les investissements que nous faisons en témoignent. Madame Poncet Monge, le Ségur consacre 1,5 milliard d’euros par an à la revalorisation des salaires dans les Ehpad, auxquels s’ajoutent 2,5 milliards d’euros sur cinq ans pour les investissements nécessaires.
Toutefois, pour les raisons que j’ai pu exposer, le Gouvernement émet un avis défavorable sur ces deux amendements.
Mme la présidente. La parole est à M. Alain Milon, pour explication de vote.
M. Alain Milon. Cela a été rappelé, c’est dans le cadre d’un texte relatif à la dette sociale, prévoyant notamment de reprendre une partie de la dette des hôpitaux, qu’on nous a proposé au mois de juillet dernier, au détour d’un amendement, la création de la cinquième branche. Le Gouvernement a aussitôt précisé qu’il s’agissait d’une coquille vide qu’il faudrait remplir, et qu’il ferait le nécessaire pour cela.
Voilà qu’au cours de l’examen du PLFSS, cet article extrêmement intéressant nous offre l’occasion de réfléchir à la manière dont nous pourrions remplir la coquille. Nous vous faisons des propositions, mais dès qu’il s’agit de prévoir des solutions financières, vous repoussez toutes nos solutions, qu’elles soient acceptables ou pas, en nous disant d’attendre la conférence des financeurs. Pourquoi donc soumettre ce texte à notre examen si nous n’avons rien le droit de dire ? (Applaudissements sur des travées des groupes SER et CRCE.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Corinne Féret, pour explication de vote.
Mme Corinne Féret. Le chapitre III crée la nouvelle branche autonomie. Nous sommes en plein examen du texte, et les propositions quant au financement de cette branche sont nombreuses. Il s’agissait en effet initialement d’une coquille vide, que nous devions remplir. C’est la raison pour laquelle nous vous proposons des sources de financement. Vous les rejetez systématiquement au motif qu’il faudra attendre la conférence des financeurs.
Je suis sans doute un peu novice au Sénat, mais j’avais cru comprendre que c’était lors de l’examen du budget que nous pouvions faire des propositions de recettes ou de dépenses. Les nombreux renvois que vous faites à la conférence des financeurs signifient-ils que nous devons envisager l’examen d’un PLFSS rectificatif, assez rapidement, pendant l’année 2021, où nous pourrions enfin aborder la question du financement de la branche autonomie ?
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 718 rectifié et 918 rectifié.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente. L’amendement n° 717 rectifié, présenté par Mmes Meunier et Lubin, MM. Jomier et Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Jasmin, Le Houerou, Poumirol et Rossignol, MM. Antiste, Bouad et J. Bigot, Mme Bonnefoy, MM. Durain et Gillé, Mme Harribey, M. P. Joly, Mme G. Jourda, M. Leconte, Mme Lepage, MM. Lozach, Lurel, Marie et Mérillou, Mme Monier, MM. Montaugé et Pla, Mme S. Robert, MM. Sueur, Temal et Tissot, Mmes Préville, Briquet et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 78
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Art. L. 137-…. – Il est institué une contribution de solidarité de la finance pour l’autonomie au taux de 1 % assise sur les revenus distribués au sens des articles 109 et 120 du code général des impôts. » ;
La parole est à Mme Michelle Meunier.
Mme Michelle Meunier. Je ne remonterai pas le temps jusqu’à la présidence de Valéry Giscard d’Estaing ! (Sourires.) Simplement, au mois d’octobre dernier, la commission des affaires sociales auditionnait Mme la ministre Brigitte Bourguignon en salle Monory. Celle-ci nous a affirmé que ce PLFSS, débattu au Parlement, ne signerait nullement la fin des travaux sur cette branche, qu’il s’agisse de son périmètre ou de son financement.
Cet amendement vise à créer une contribution de 1 % assise sur les revenus des capitaux mobiliers pour financer la cinquième branche. Son rendement attendu serait de 1,5 milliard d’euros.
Puisque la prise en charge digne des personnes âgées et des personnes handicapées le nécessite, nous demandons au Gouvernement de renoncer à sa doctrine : refuser d’opérer des prélèvements supplémentaires tout en plafonnant l’imposition des plus aisés avec la flat tax.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. La commission a émis un avis défavorable sur cet amendement, pour les mêmes raisons que précédemment.
Peut-être a-t-on mis la charrue avant les bœufs. C’est possible. Quoi qu’il en soit, il me semble préférable, en termes de méthode, d’organiser une conférence des financeurs et d’en revenir au rapport Vachey pour aboutir à un bouquet de propositions dont nous pourrons débattre et dont certaines pourront peut-être faire l’objet d’un avis favorable de la part du Gouvernement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Je ne suis pas d’accord quand j’entends dire que nous avons pris les choses à l’envers. En créant la cinquième branche, nous posons d’abord les fondations, sur lesquelles nous allons, ensemble, construire les différents étages d’une maison solide et qui tiendra longtemps.
Monsieur Milon, le texte n’est pas totalement dénué de sens, puisque, d’une part, un certain nombre de vos amendements ont été adoptés, notamment sur le périmètre des missions de la CNSA, et, d’autre part, ce texte consacre 2,5 milliards d’euros au financement de cette branche. Ce n’est pas tous les jours, ni même tous les ans – même si, moi aussi, je suis assez novice, madame la présidente – que l’on est en mesure de proposer ce type de dispositif.
Vous avez raison, madame Meunier, le périmètre et le financement de cette branche prennent corps au cours des débats, mais cela ne s’arrêtera pas là. Au travers de la conférence de financement et du projet de loi sur l’autonomie, nous aurons l’occasion, avec l’ensemble des acteurs, de poursuivre ces discussions et d’enrichir la cinquième branche, qui, à mesure que le temps passe, est de moins en moins une coquille vide.
Le Gouvernement est donc défavorable à cet amendement.
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour explication de vote.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. J’ai l’impression qu’on est hors sol, là ! On n’est pas en train de faire un exercice sur la façon de construire, dans l’absolu, hors du réel, une cinquième branche ! Dans le réel, il y a besoin d’argent pour la dépendance, pour le fonctionnement des Ehpad et pour l’ensemble des politiques à mener dans ce domaine ! Par conséquent, le renvoi permanent à la conférence des financeurs est une mesure dilatoire. Rien n’empêcherait de voter des recettes et de continuer le chemin pour améliorer le dispositif, même si – cela a été dit précédemment – on a complètement inversé la donne.
Vous êtes très content des montants que vous annoncez, mais cela ne permettra pas de créer les postes nécessaires. Que cela améliore les rémunérations, c’est très bien, mais les problèmes dans les Ehpad ne font que s’accroître,…
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Il n’y a pas seulement les Ehpad…
Mme Marie-Noëlle Lienemann. … sans parler des autres éléments de la politique de l’autonomie.
La réalité, c’est que le Gouvernement – et peut-être aussi nos collègues de la majorité sénatoriale – est arcbouté sur l’idée de n’augmenter aucun impôt. Je ne sais donc pas par quel miracle, par quelle opération du Saint-Esprit, on trouvera des ressources abondantes pour répondre aux besoins de la dépendance, car, quand on cherche des recettes, en général, excusez-moi, ça s’appelle l’impôt…
Vous ne voulez pas faire ce choix ; vous préférez laisser en l’état un service dysfonctionnant, qui pose de graves problèmes, pour des raisons idéologiques. C’est ça, la réalité ! Basta !
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Le réel, c’est 183 euros par mois en plus pour le personnel de tous les Ehpad ; le réel, c’est 400 millions d’euros d’investissement ; le réel, c’est 300 millions d’euros destinés à augmenter le taux d’encadrement ; le réel, c’est 200 millions d’euros consacrés à l’aide à domicile !
Vous pouvez dire que tout cela est hors sol, madame la sénatrice, mais ces chiffres sont très concrets et auront un impact pour la vie des salariés et des résidents. Vous ne pouvez pas le nier, ce sont des faits !
Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Bonne, pour explication de vote.
M. Bernard Bonne. J’en viens à me demander si l’on n’aurait pas dû voter la suppression de l’article… (Sourires approbateurs sur les travées des groupes SER et CRCE.) En effet, tout ce qui est proposé ne consiste qu’en des mesures d’appoint. On prévoit effectivement 2,1 milliards d’euros, non pas pour recruter du personnel dans ces établissements, mais pour donner un plus au personnel existant ; c’était normal, mais cela ne résout absolument pas les difficultés que vivent aujourd’hui tous les établissements.
Quant aux 200 millions d’euros affectés à l’aide à domicile, je l’ai dit précédemment, cela ne répond pas non plus aux difficultés que l’on aura, demain, pour maintenir les personnes à leur domicile.
C’est donc vraiment une coquille vide, répétons-le, et chaque proposition d’affecter un peu d’argent à la nouvelle cinquième branche est refusée. Vous avez demandé un rapport – le rapport Vachey –, mais on n’en utilise absolument pas les conclusions.
Je commence donc à regretter un peu de ne pas avoir voté la suppression de l’article… (Applaudissements sur des travées des groupes Les Républicains et SER.)
Mme la présidente. L’amendement n° 155, présenté par M. Vanlerenberghe, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Alinéa 80
Avant les mots :
la Caisse
insérer le mot :
de
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Il s’agit d’un amendement rédactionnel.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je suis saisie de sept amendements identiques.
L’amendement n° 131 rectifié quater est présenté par Mme Guidez, M. Le Nay, Mmes de La Provôté, Canayer et Bonfanti-Dossat, MM. Louault et Moga, Mme Billon, MM. Decool, Delahaye et Cigolotti, Mmes Férat et Sollogoub, MM. S. Demilly et Henno, Mmes Micouleau, Puissat, L. Darcos, Dindar et Gatel, MM. Guerriau, Détraigne, Milon, Kern, Menonville et Pellevat, Mmes C. Fournier et Jacquemet et MM. Gremillet, H. Leroy, Poadja et Duffourg.
L’amendement n° 458 rectifié quater est présenté par Mmes Lassarade et Deseyne, M. B. Fournier, Mmes Deromedi et Dumas, MM. Panunzi, Brisson et D. Laurent, Mme Raimond-Pavero, MM. Mandelli et Savary, Mmes Lherbier, Garriaud-Maylam et Delmont-Koropoulis et MM. Regnard et Cuypers.
L’amendement n° 477 rectifié ter est présenté par Mme Lubin, MM. Tissot et Antiste, Mmes Van Heghe, Lepage et Jasmin, MM. Jeansannetas et Kerrouche, Mme Préville, M. Vaugrenard, Mme Féret, MM. Marie, Montaugé et Bourgi, Mme Poumirol, MM. Cozic, Redon-Sarrazy et Dagbert, Mme Monier et M. P. Joly.
L’amendement n° 640 est présenté par M. Bonhomme.
L’amendement n° 674 rectifié bis est présenté par Mme V. Boyer, MM. Boré, Le Rudulier, Frassa, Bascher et Daubresse, Mme Joseph, MM. Anglars et Bouchet, Mme F. Gerbaud, M. Houpert, Mmes Drexler et Thomas et MM. Segouin, Genet, Charon et Bouloux.
L’amendement n° 919 est présenté par Mme Poncet Monge, M. Benarroche, Mme Benbassa, M. Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon et Mme Taillé-Polian.
L’amendement n° 1030 est présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Ces sept amendements sont ainsi libellés :
Alinéas 90 et 91
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Jocelyne Guidez, pour présenter l’amendement n° 131 rectifié quater.
Mme Jocelyne Guidez. Il s’agit d’un sujet sensible.
Aux termes de l’article 5 de la loi du 7 août 2020 relative à la dette sociale et à l’autonomie, la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie gère la cinquième branche de la sécurité sociale consacrée au financement de la politique de soutien à l’autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées. Plus précisément, cet article prévoit que la CNSA gère un nombre limité d’enveloppes, sans recettes affectées, correspondant à de grandes catégories de dépenses. Celles-ci recouvrent la totalité des dépenses actuellement dans le périmètre de la CNSA, dont l’OGD, l’objectif global de dépenses, et les concours versés aux départements au titre de l’allocation personnalisée d’autonomie (APA) et de la prestation de compensation du handicap (PCH), mais également l’allocation d’éducation de l’enfant handicapé (AEEH).
L’allocation d’éducation de l’enfant handicapé est une prestation en espèces de la branche famille destinée à « toute personne qui assume la charge d’un enfant handicapé […], si l’incapacité permanente de l’enfant est au moins égale à un taux déterminé.
« Un complément d’allocation est accordé pour l’enfant atteint d’un handicap dont la nature ou la gravité exige des dépenses particulièrement coûteuses ou nécessite le recours fréquent à l’aide d’une tierce personne. Son montant varie suivant l’importance des dépenses supplémentaires engagées ou la permanence de l’aide nécessaire. »
Afin de faire évoluer cette prestation, l’IGAS a été chargée d’une mission relative à la compensation pour les enfants en situation de handicap, dont l’objectif premier était d’aboutir à une « évolution de l’AEEH et de la PCH Enfant et de leur articulation ». Le rapport de cette mission, remis par Daniel Lenoir en juin 2019, identifiait les problématiques et proposait des scénarios, qui n’ont pas fait l’objet de concertations à ce stade.
Le rapport de Laurent Vachey préconise le transfert de l’AEEH à la branche autonomie, ce que traduit cet article, qui acte ce transfert et le motive, dans le dossier de presse, par le fait que cela « permettra de simplifier les démarches des familles en poursuivant le rapprochement entre cette allocation et la prestation de compensation du handicap ».
Or l’AEEH constitue une allocation familiale correspondant à une situation de la famille, au même titre que l’allocation de soutien familial permet de prendre en compte le fait d’être un parent isolé ou que l’allocation de rentrée scolaire permet de tenir compte du fait d’avoir un enfant scolarisé. Certains éléments des compléments de l’AEEH relèvent néanmoins de besoins de compensation – aides humaines ou techniques, frais spécifiques ou autres –, quand d’autres permettent à un parent de réduire ou de cesser son activité professionnelle afin de s’occuper de l’enfant ou d’avoir recours à l’embauche d’une tierce personne rémunérée. Certains éléments pourraient donc être transférés dans la branche autonomie pour créer une véritable PCH Enfant. Néanmoins, cela ne pourrait se faire qu’après les concertations attendues depuis la remise de rapport de l’IGAS.
C’est pourquoi cet amendement vise à supprimer les alinéas organisant ce transfert, afin de repousser cette décision au terme des concertations qui décideront d’intégrer l’AEEH, en tout ou partie, au travers de l’ordonnance prévue par le III de l’article visé. Cette suppression doit s’accompagner de l’engagement du Gouvernement à entamer des concertations sur le sujet.
Mme la présidente. La parole est à Mme Florence Lassarade, pour présenter l’amendement n° 458 rectifié quater.
Mme Florence Lassarade. Je me contenterai de résumer ce qu’a déjà indiqué ma collègue, qui a largement détaillé le sujet.
L’allocation d’éducation de l’enfant handicapé est une prestation familiale, comme il en existe d’autres. D’autres éléments composant l’AEEH relèvent de besoins de compensation, qui pourraient être transférés dans la branche autonomie, afin de créer une véritable prestation de compensation Enfant.
Il s’agit donc de susciter une réflexion, d’engager une concertation avec les associations, qui a commencé mais qui doit s’approfondir, pour transférer cette AEEH, ou non, au sein de la branche autonomie.
Mme la présidente. La parole est à Mme Monique Lubin, pour présenter l’amendement n° 477 rectifié ter.
Mme Monique Lubin. Il est défendu.
Mme la présidente. L’amendement n° 640 n’est pas soutenu.
La parole est à Mme Valérie Boyer, pour présenter l’amendement n° 674 rectifié bis.
Mme Valérie Boyer. Cet amendement vise à supprimer la reprise, par la nouvelle branche autonomie, de l’allocation d’éducation de l’enfant handicapé, ce qui rejoint la position des associations familiales et des associations intervenant dans le champ du handicap.
L’évolution dont on parle nécessite une concertation préalable avec les familles et les associations intervenant dans le champ du handicap, qui n’a pas eu lieu pour l’instant. En effet, la compensation des charges et la conciliation entre vie familiale et vie professionnelle sont deux objectifs majeurs de la politique familiale.
L’allocation d’éducation de l’enfant handicapé vise à compenser les dépenses liées à une situation de handicap d’un enfant et les pertes de salaires subies par les parents, qui sont bien souvent dans l’obligation de réduire leur activité professionnelle. J’aurai donc deux questions : pourquoi écarter ces parents d’une politique familiale globale ? Cette mesure ne risque-t-elle pas de dissocier handicap et dimension familiale ?
Si l’on suivait cette logique jusqu’au bout, ce serait l’ensemble des dépenses liées au handicap et intégrées dans le champ des prestations familiales qui devrait alors être pris en charge par la branche autonomie. Ce serait ainsi le cas d’autres prestations familiales, comme le complément de libre choix du mode de garde, majoré pour les parents d’enfants en situation de handicap, ou encore le bonus inclusion handicap pour l’équipement d’accueil d’un jeune enfant.
Pour conclure, je veux rappeler que maintenir cette allocation dans le périmètre des prestations familiales garantirait aux familles une équité de traitement sur l’ensemble du territoire, contrairement à ce qui est parfois reproché aux MDPH.
J’insiste en outre sur la nécessité d’une concertation avec les familles de personnes handicapées. En 2021, il devra y avoir des concertations pour vérifier et pour justifier l’intérêt et la pertinence d’un transfert total ou partiel de cette allocation vers la branche autonomie.
Il faut donc supprimer les alinéas 90 et 91 de cet article, afin de se laisser le temps de la réflexion.
Mme la présidente. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour présenter l’amendement n° 919.
M. Guillaume Gontard. Je souhaite juste préciser que, par lettre en date du 15 décembre 2018, la ministre des solidarités et de la santé et la secrétaire d’État auprès du Premier ministre chargée des personnes handicapées avaient chargé l’IGAS d’une mission relative à la compensation pour les enfants en situation de handicap, dont l’objectif premier était d’aboutir à une « évolution de l’AEEH et de la PCH Enfant et de leur articulation ».
Le rapport remis en juin 2019, établi par Daniel Lenoir, inspecteur général des affaires sociales, a identifié les problématiques, mais n’a pas trouvé de solution. Avant de prendre, de manière précipitée, toute décision structurante, l’AEEH et ses compléments ainsi que leur articulation avec la PCH doivent faire, selon nous, l’objet de concertation et de travaux préalables en 2021, afin de vérifier et de justifier de la pertinence d’un transfert partiel ou total vers la branche autonomie.
En d’autres termes, il est urgent d’attendre. Nous demandons un peu de patience avant de prendre une telle décision de transfert, qui nous semble, ainsi qu’aux acteurs du handicap, tout à fait prématurée.
Mme la présidente. La parole est à Mme Céline Brulin, pour présenter l’amendement n° 1030.
Mme Céline Brulin. J’essaierai d’être brève, parce que nos collègues ont déjà développé un certain nombre d’arguments.
Il y a, dans l’allocation d’éducation de l’enfant handicapé, un volet pouvant être considéré comme correspondant à une prestation de compensation du handicap, mais il y a aussi une part très importante qui relève de la politique familiale.
Il nous semble également tout à fait prématuré de décider de transférer l’AEEH vers la branche autonomie. Cela mérite un approfondissement de l’ensemble des sujets et – d’autres l’ont dit, et c’est très juste – une concertation avec les familles concernées.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Mouiller, rapporteur. Au début de l’analyse de ce texte, je me suis posé beaucoup de questions, je dois l’avouer, sur la pertinence de ce transfert. Or j’ai eu l’occasion, en tant que rapporteur, d’entendre en audition les associations, notamment celles du monde du handicap, et celles-ci ont émis, d’une façon à peu près générale, au début de mes consultations, un avis favorable ou neutre sur cette évolution. Pourquoi ? Parce que leur motivation première était avant tout la coordination entre la PCH et l’AEEH, dans une période où le chantier concernant la PCH était engagé, avec une vraie volonté d’accélérer.
Par ailleurs, quand le rapport Vachey, qui comportait un certain nombre de préconisations, a été présenté, tout le monde a regretté l’absence de mesures issues de ce rapport. Or nous avons là une décision qui est issue de ce rapport et qui est motivée par la coordination de deux dispositifs.
Enfin, il y a une semaine ou dix jours, certaines associations ont commencé à émettre un avis différent sur ce rapprochement, parce qu’elles pensaient pouvoir négocier, de façon plus générale, un certain nombre de concertations et accélérer les discussions autour de la PCH.
Ainsi, sur le fondement des analyses et des rapports, et en considérant l’avis global des associations émis dans la durée et non la veille de la lecture du PLFSS, la commission a émis – même si l’on peut entendre les arguments des uns et des autres – un avis défavorable sur ces amendements de suppression, de façon à accélérer les choses sur la question de la prise en charge du handicap et en ayant en tête l’intérêt de l’enfant dans sa globalité.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Sophie Cluzel, secrétaire d’État. Je vous remercie, monsieur le rapporteur, d’avoir séquencé les différents avis des uns et des autres ; c’est bien ce qu’il s’est passé, en effet.
Ces amendements visent à supprimer l’intégration de l’allocation d’éducation de l’enfant handicapé au sein du périmètre de la branche autonomie. Cette allocation, parce qu’elle s’adresse aux familles dont l’un des enfants est handicapé, se trouve naturellement, dans l’esprit de beaucoup, à la frontière entre la branche famille et la branche autonomie. La prestation de compensation du handicap, elle, est bien une prestation de compensation par nature, donc elle est attachée à la branche autonomie.
Dès lors, pour nous donner les moyens d’articuler ces deux prestations, déjà liées, d’ailleurs, par un droit d’option, très complexe pour les familles, nous les avons rapprochées au sein de la cinquième branche. Je dis bien « rapprochées » et non pas « fondues », car les logiques de prestation familiale et de compensation du handicap ont une nature différente, et les acteurs sont particulièrement attachés à cette distinction.
Je veux vous rassurer, mesdames, messieurs les sénateurs, ainsi que les associations, l’allocation de base de l’AEEH conserve ses mécanismes et ses critères d’attribution ; elle est bien instruite par les MDPH, de même que ses compléments et que la PCH. Le rôle des CAF dans le versement de l’AEEH ne sera pas modifié. Le fonctionnement et les attributions de cette allocation ne sont nullement remis en question par son rattachement à la cinquième branche. D’ailleurs, dans le cadre du comité prévu par la loi du 20 mars dernier et que j’installerai début décembre, je continuerai de mener les réflexions et d’apporter les adaptations nécessaires au droit à la compensation et, surtout, au droit d’option, afin de répondre aux besoins spécifiques des enfants.
Ainsi, cette disposition représente bien un vecteur potentiel de simplification. Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur ces amendements.
Mme la présidente. La parole est à Mme Jocelyne Guidez, pour explication de vote.
Mme Jocelyne Guidez. Nous nous connaissons bien, madame la secrétaire d’État, nous discutons assez souvent du handicap, et, sur le fondement de vos explications et de celles de M. Mouiller, je retire mon amendement.
Toutefois, j’espère qu’il y aura un peu plus de discussions sur cette question, car nous avons eu des retours en ce sens tant des parents que des associations. D’ailleurs, si j’ai bien compris ce que vous avez dit, monsieur le rapporteur, il y a eu des changements à ce propos.
Un certain nombre de personnes nous ont contactés, et je pense qu’il s’agissait peut-être aussi d’une question de symbole. Certaines familles avaient l’impression – c’est comme ça que je l’ai compris – que, quelque part, on enlevait l’enfant de la famille parce qu’il était handicapé ; voyez-vous ce que je veux dire ? Il fera partie non plus de la branche famille mais de la branche autonomie. Elles avaient donc le sentiment, que je peux comprendre, qu’on les excluait de cette branche, alors même qu’il s’agit de leur enfant.
J’avais aussi ce sentiment, et je voulais le partager avec vous. J’espère donc qu’il y aura des discussions à ce sujet.
Mme la présidente. L’amendement n° 131 rectifié quater est retiré.
Mme Florence Lassarade. Je retire également mon amendement !
Mme la présidente. L’amendement n° 458 rectifié quater est retiré.
La parole est à Mme Valérie Boyer, pour explication de vote.
Mme Valérie Boyer. Au regard des explications données, je retire mon amendement, mais j’aimerais que l’on ait des garanties sur la non-exclusion des enfants handicapés de la branche famille.
Mme la présidente. L’amendement n° 674 rectifié bis est retiré.
Je mets aux voix les amendements identiques nos 477 rectifié ter, 919 et 1030.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente. L’amendement n° 156, présenté par M. Vanlerenberghe, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Alinéas 92 à 96
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Cet amendement vise à supprimer des alinéas qui habilitent le Gouvernement à légiférer par ordonnances afin de mettre le code de l’action sociale et des familles en cohérence avec le code de la sécurité sociale.
Une telle habilitation est d’autant moins nécessaire que le Gouvernement nous annonce l’examen imminent d’une grande réforme de la prise en charge de la perte d’autonomie. Il paraît donc naturel à la commission d’attendre de pouvoir traiter ce sujet directement dans la loi.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. L’avis est défavorable.
Il s’agit, au travers de ces ordonnances, de tirer les conséquences très techniques de ce dont nous sommes en train de débattre. On ne peut pas mettre sur le même plan, monsieur le rapporteur général, ces dispositions et les dispositions de fond qui seront effectivement débattues en 2021, dans le cadre du projet de loi Grand âge et autonomie.
Nous avons besoin de légiférer par ordonnances pour mettre en conformité les deux codes. Il s’agit de dispositions extrêmement techniques, et les ordonnances nous semblent être le véhicule approprié.
Mme la présidente. La parole est à M. Alain Milon, pour explication de vote.
M. Alain Milon. Je vais voter l’amendement du rapporteur général, parce que je le trouve cohérent. Excusez-moi, monsieur le secrétaire d’État, mais l’attitude du Gouvernement me paraît – le mot est peut-être un peu fort – un peu méprisante à l’égard du Parlement.
Depuis tout à l’heure – c’était particulièrement criant avec l’AEEH –, vous répondez à toutes nos propositions que ce n’est pas le moment, qu’il y aura une grande réflexion et une grande loi et que nous allons travailler tous ensemble pour la construire. Mais, en même temps, vous nous dites : « on va construire cette grande loi, mais sous la forme d’ordonnances, donc taisez-vous ! »
Cela commence à être insupportable. Je voterai donc l’amendement de M. le rapporteur général avec beaucoup de joie.
Au bout du compte, je me demande, comme Bernard Bonne, ce que fait cet article 16 dans le PLFSS. Pourquoi nous faites-vous voter un article sur l’autonomie qu’on devra revoter par la suite, dans le cadre d’une grande loi, que, d’ailleurs, on ne votera pas, puisque vous procéderez par ordonnances ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe SER.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour explication de vote.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Je vais ajouter un argument à ce que vient de dire M. Milon.
L’actuel gouvernement, tout le monde l’aura constaté, est le recordman, toutes catégories confondues, des ordonnances, sous prétexte que ça va plus vite et que ça permet de mieux légiférer.
Prenons un sujet comparable : le logement. Rappelez-vous l’histoire d’Action Logement, mes chers collègues : une ordonnance a été prise et mise en œuvre, mais jamais on ne l’a fait ratifier par le Parlement, et ça va faire trois ans qu’elle s’applique ! On voit donc, avec ce précédent, qu’on peut totalement shunter le Parlement.
Ils se sentent tellement géniaux avec leurs ordonnances que, lorsqu’ils se rendent compte, deux ans après, que ça ne va pas et qu’il faut refaire une réforme, que proposent-ils ? De procéder par ordonnances ! Génial !
Aussi, je vous le dis tout net : sur des sujets aussi importants que ceux-là, on peut essayer de nous faire le coup selon lequel c’est une affaire technique, neutre et sans importance, mais nous ne sommes pas dupes ! Ainsi, au-delà de l’argumentaire déjà très pertinent de M. Milon, nous ne pouvons pas voter une habilitation à légiférer par ordonnances.
Mme la présidente. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.
M. René-Paul Savary. Monsieur le secrétaire d’État, vous parlez d’un grand projet de loi, que tout le monde attend et qui doit répondre à une grosse préoccupation sociétale, mais, dès son annonce, vous multipliez les déceptions : du Parlement, des associations – on l’a vu avec les amendements précédents sur l’AEEH – et, demain, des départements, quand ils comprendront qu’ils sont juste bons à payer et qu’ils sont dépouillés de leurs prérogatives.
Vous vous y prenez mal. Il y a sans doute des choses à faire, mais elles ne peuvent être réalisées que dans la concertation, et la concertation doit se faire dans les territoires !
Les collectifs associatifs ont, à juste titre, une puissance extraordinaire, notamment dans le domaine du handicap ; cela a été bien dit par ma collègue. Ce sont des gens particulièrement affectifs, nous n’avons pas le droit de les décevoir ; on ne peut pas être dans l’affichage et leur faire des promesses qui ne seront pas tenues. C’est avec eux qu’il faut relancer la discussion.
Ce soir, vous entendez un signal d’alerte, madame la secrétaire d’État. Le Gouvernement aurait tout intérêt à en tenir largement compte. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. J’entends bien vos propos, monsieur le secrétaire d’État. Vous dites qu’il faut des ordonnances, tout de suite, pour mettre en conformité les deux codes. Soit ! Mais, à l’alinéa 92 de l’article 16, il est précisé que « le Gouvernement est habilité à prendre par voie d’ordonnance, dans un délai de douze mois à compter de la promulgation de la présente loi, » un certain nombre de mesures. Or j’espère bien que, d’ici à douze mois, le Parlement aura adopté la loi sur le grand âge et l’autonomie. Il n’y a donc pas besoin d’ordonnances ; nous voterons la loi directement.
Faites un peu confiance au Parlement, il sait travailler rapidement, pour peu que le Gouvernement le saisisse. Il est trop facile de dire que l’on prendra des ordonnances. En outre, cela a été rappelé, elles sont parfois longues à venir, et, trois ans plus tard, on attend toujours la loi de ratification.
On ne fait pas suffisamment confiance au Parlement, et je le regrette. Nous avons accepté d’adopter la création de la cinquième branche, parce que nous nous sommes dit qu’il y avait là une chance inespérée d’accélérer le cours de l’histoire. En effet, cela faisait des années que l’on nous parlait de cette branche et qu’on ne la faisait pas. Vous avez décidé de la créer, avec l’aide de l’Assemblée nationale ; bravo ! Mais, maintenant, il faut aller au bout. Nous attendons donc non des ordonnances, mais une loi, qui ne soit pas renvoyée aux calendes grecques, mais que l’on examine au début de l’année prochaine. En tout cas, c’est ce que nous espérons.
Mme la présidente. La parole est à M. Olivier Henno, pour explication de vote.
M. Olivier Henno. Certains ont indiqué qu’ils s’étonnaient qu’on discute de cet article 16.
À l’occasion du vote du transfert de la dette sociale à la Cades, j’ai voté pour la création de la cinquième branche de la sécurité sociale ; j’ai même eu cette expression : « on ne va pas faire la fine bouche. »
On discute maintenant de l’article 16 du PLFSS. Or, quand il y a des propositions sur la gouvernance, on nous répond qu’il faut attendre le projet de loi sur l’autonomie ; quand il y a des propositions sur les financements – une proposition de financement émanant de parlementaires ne relève d’ailleurs pas de la démagogie –, on nous dit qu’il est trop tôt, qu’il faut attendre la conférence de financement ; quand on aborde la question du périmètre, on nous indique que ce n’est pas possible. Maintenant, on nous explique qu’on ne doit pas restreindre le champ des ordonnances…
Monsieur le secrétaire d’État, malgré tout le respect que je vous porte, permettez-moi de m’interroger sur la marge de manœuvre dont vous disposez quand vous venez devant le Parlement. Elle est, au fond, extrêmement faible, et c’est tout le problème de nos débats.
Je comprends bien qu’il faille cadrer les débats, mais un peu de liberté et de dialogue tout de même ! Sincèrement, nous en venons à douter de l’utilité de nos débats si tout est décidé par avance. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Bonne, pour explication de vote.
M. Bernard Bonne. Je vais répéter ce que j’ai déjà dit.
J’ai évoqué la difficulté que nous posait l’article 16. Cependant, nous allons le voter. En revanche, nous voterons aussi très fortement le présent amendement, parce qu’il est inconcevable que l’on nous traite de cette façon. Nous n’avons pas eu la possibilité de discuter directement avec le ministre Olivier Véran des propositions qui nous sont faites dans le cadre de cet article 16 sur la cinquième branche. Il n’y a aucune possibilité de négocier.
Comment voulez-vous que nous acceptions aujourd’hui que le Gouvernement nous présente une ordonnance dans les mois qui viennent, compte tenu de toutes les propositions que nous aurions pu faire nous-mêmes ? Pensez-vous vraiment que le Sénat n’aura pas la capacité de formuler des propositions sur la cinquième branche lors de l’examen du projet de loi Grand âge ?
Je pense que nous ne pouvons pas continuer ainsi à travailler sur une cinquième branche complètement vide, sur laquelle vous ne nous donnez, aujourd’hui, aucune possibilité de faire des propositions et sur laquelle vous ne nous en donnerez peut-être pas davantage demain.
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Monsieur le sénateur, pensez-vous vraiment que c’est cela que prévoit l’article ? Comme Mme Lienemann, vous me donnez l’impression d’avoir lu l’alinéa 92 de l’article 16, mais pas le 93 : il s’agit d’habiliter le Gouvernement à « codifier, à droit constant, dans le code de la sécurité sociale les dispositions relatives à la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie prévues au code de l’action sociale et des familles ».
Monsieur le rapporteur général, il s’agit là de mesures de légistique, visant simplement à ce que certaines dispositions du code de l’action sociale et des familles passent dans le code de la sécurité sociale. Si cela vous fait plaisir, nous pourrons, lors de l’examen du projet de loi Grand âge et autonomie, qui traitera de sujets cruciaux et que nous appelons tous de nos vœux, passer une grande partie de notre temps à débattre de dispositions tendant à transférer tel article ou tel alinéa du code de l’action sociale et des familles dans le code de la sécurité sociale…
Quoi qu’il en soit, la comparaison que vous avez faite, madame Lienemann avec Action Logement est totalement hors de propos. Relisez l’alinéa 93 : il s’agit juste de tirer les conséquences, à droit constant, du transfert d’un code à l’autre.
Mme Éliane Assassi. C’est tout de même important !
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Mesdames, messieurs les sénateurs, il ne s’agit pas d’habiliter le Gouvernement à faire figurer dans des ordonnances toutes les propositions que vous avez faites ici et sur lesquelles, d’ailleurs, vous votez souverainement. Vous reprochez au Gouvernement de refuser vos propositions, mais le Sénat est souverain lorsqu’il vote, comme le Gouvernement est souverain dans les avis qu’il émet sur les amendements. Je ne voudrais pas qu’il y ait de mauvaises interprétations, quelle qu’en soit la sincérité, à ce sujet.
Relisez bien les alinéas 92 et 93. Nous avons besoin, dans le cadre strict que je viens de vous exposer, de ces mesures de pure légistique. Si vous voulez que nous en débattions de nouveau lors de l’examen du projet de loi Grand âge et autonomie, soit !
Mme la présidente. L’amendement n° 157, présenté par M. Vanlerenberghe, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 96
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
…. – Le code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :
1° L’article L. 722-8 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, le mot : « quatre » est remplacé par le mot : « cinq » ;
b) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« 5° La branche autonomie. » ;
2° L’article L. 722-27 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, le mot : « trois » est remplacé par le mot : « quatre » ;
b) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« 4° La branche autonomie. »
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. La création de la cinquième branche dans le régime général de la sécurité sociale n’a pas trouvé son pendant au sein du code rural et de la pêche maritime.
Cet amendement tend à confirmer le rôle de partenaire de la CNSA et d’acteur de la mise en œuvre de la cinquième branche sur les territoires que joue le réseau des caisses de MSA. Une convention avec la CNSA précisera le cadre de ce partenariat.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. L’avis est défavorable.
La nouvelle branche que vous avez créée doit couvrir l’ensemble de la population, dont les salariés et les non-salariés agricoles. La CNSA, chargée de la gestion de la branche autonomie depuis la loi du 7 août 2020 relative à la dette sociale et à l’autonomie, a ainsi vocation à agir comme aujourd’hui pour l’ensemble des personnes âgées et des personnes handicapées, qui sont toutes rattachées au régime général pour la couverture de ce risque.
L’amendement que vous nous proposez, monsieur le rapporteur général, aboutirait, nous semble-t-il, à remettre en cause la visée universaliste de la nouvelle branche. Il aurait ainsi pour effet de complexifier par avance le pilotage de la politique en matière d’autonomie.
La solution que nous proposons n’empêche nullement la MSA de continuer à exercer un rôle dans le cadre de ses attributions et sans concurrence avec celles de la CNSA.
Mme la présidente. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.
M. René-Paul Savary. Je suis stupéfait de la position du Gouvernement. Même dans le projet de loi de réforme des retraites, il était proposé que la MSA reste une caisse de retraite, malgré l’universalité du dispositif. Pourquoi de telles dispositions figurent-elles dans certains textes de loi et pas dans d’autres ?
La MSA est un guichet unique dans les territoires pour les prestations qu’elle réalise. Nous prônions des guichets uniques, organisés de façon locale. C’était l’occasion de maintenir un système universel, décliné au niveau de caisses d’antériorité différente et tenant compte de la territorialité.
En plus des départements, des associations et des parlementaires, c’est le monde agricole que vous allez vous mettre à dos… Félicitations, monsieur le secrétaire d’État ! (Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme la présidente. L’amendement n° 798 rectifié, présenté par Mmes Lubin et Meunier, MM. Jomier et Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Jasmin, Le Houerou, Poumirol et Rossignol, MM. Antiste, Bouad et J. Bigot, Mme Bonnefoy, MM. Durain et Gillé, Mme Harribey, M. P. Joly, Mme G. Jourda, M. Leconte, Mme Lepage, MM. Lozach, Lurel, Marie et Mérillou, Mme Monier, MM. Montaugé et Pla, Mme S. Robert, MM. Sueur, Temal et Tissot, Mmes Préville, Briquet et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – Afin de satisfaire aux exigences du paritarisme régissant les modes de gouvernance de la sécurité sociale, dans les deux mois suivant la promulgation de la présente loi, le Gouvernement prévoit les modalités de mise en place d’une concertation par décret, afin de définir les modalités d’un paritarisme de représentation et de gestion au sein de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie.
La parole est à Mme Monique Lubin.
Mme Monique Lubin. La gestion paritaire apporte une contribution significative à la cohésion sociale et au progrès social, en même temps qu’elle est un pilier de la démocratie française.
Comme le rapport de la mission d’information sur le paritarisme de l’Assemblée nationale, dont le rapporteur était le député Jean-Marc Germain, l’a rappelé en 2016, « le paritarisme résiste aussi à toute approche simplificatrice du modèle social français. Alors que la France est parfois hâtivement dépeinte comme le lieu du conflit social permanent et d’une étatisation excessive – quand ce n’est pas prédatrice –, il s’avère que notre pays a confié près d’un quart de sa protection sociale, 150 milliards d’euros, aux représentants des salariés et des employeurs parce qu’ils semblaient les mieux à même de s’occuper de certains sujets touchant à la vie de tous les jours, pour le salarié et sa famille : les retraites complémentaires, le chômage, la prévoyance, la santé au travail, la formation professionnelle, le logement ou l’insertion des personnes handicapées sont aujourd’hui l’affaire des partenaires sociaux au moins autant que de l’État ».
Le rapport précise également que, « partout où les partenaires sociaux se sont vu confier ou se sont saisis de véritables responsabilités, cette confiance dans des corps intermédiaires pourtant très critiqués s’est traduite par une gestion consensuelle et sérieuse des cotisations des salariés et des employeurs ».
La création d’une cinquième branche de la sécurité sociale ne peut, de fait, se concevoir sans la mise en place d’une organisation paritaire, sauf à retomber dans une logique jacobine centralisatrice sur cet enjeu majeur pour la société française, ce qui serait le meilleur moyen de fragiliser encore davantage notre modèle social. La société française souffre d’un légitime sentiment de dépossession de son pouvoir de décision et de sa souveraineté sur les questions qui la concernent au premier chef. Nous n’avons pas les moyens de continuer à la fracturer en minorant le rôle des partenaires sociaux dans la gestion de la cinquième branche de la sécurité sociale qu’est destinée à devenir la branche autonomie ni à faire l’économie de la négociation collective sur les enjeux majeurs de notre temps.
La construction de la cinquième branche nécessite un travail de concertation sérieux et de longue haleine, concentré sur le paritarisme, d’autant plus que « le fait que des représentants des salariés et des employeurs, comptés en nombre égal, se réunissent pour créer de la norme, pour l’interpréter et pour gérer les institutions et les droits qui en sont issus est un procédé aussi simple à comprendre que difficile à mettre en œuvre ».
La loi doit prévoir les modalités de la mise en place du paritarisme au sein de la branche autonomie de la sécurité sociale. Tel est l’objet du présent amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Mouiller, rapporteur. Nous souscrivons à l’importance de la mise en place d’une organisation paritaire. C’est un point essentiel. Néanmoins, la commission a émis un avis défavorable, compte tenu à la fois de la rédaction de l’amendement, du délai de deux mois qu’il prévoit, mais également de l’importante question de la coordination avec l’organisation de la CNSA, qui nous pose clairement une difficulté de méthode.
Notre avis défavorable se fonde sur ces éléments, mais je répète qu’il était essentiel que le paritarisme soit évoqué. Je salue cette initiative.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Je vous remercie, madame la sénatrice, de célébrer le modèle français de protection sociale, qui, historiquement, comme vous l’avez évoqué, s’est construit de façon spécifique, en conférant une place majoritaire aux partenaires sociaux. Pour autant, le Gouvernement émet un avis défavorable sur votre amendement.
Vous n’êtes pas sans savoir comment fonctionne la CNSA aujourd’hui. Dès lors que siègent au conseil d’administration de la CNSA les associations et les conseils départementaux, pour le plus grand plaisir de M. le sénateur Savary, on ne peut pas parler de jacobinisme ! Par ailleurs, vous savez probablement que les partenaires sociaux siègent d’ores et déjà au conseil d’administration de la CNSA, même si, je le concède, ce n’est pas de façon majoritaire.
L’équilibre ayant présidé à la constitution et à la création de la CNSA, qui associe l’ensemble des parties prenantes à cette politique de l’autonomie, nous semble un bon équilibre. Des débats auront peut-être lieu à son sujet lors de l’examen du prochain projet de loi Grand âge et autonomie, mais nous ne souhaitons pas y toucher à ce stade.
Mme la présidente. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote sur l’article.
Mme Nathalie Goulet. Je vais vous faire une proposition de financement, monsieur le secrétaire d’État.
En France, 7 436 établissements d’hébergement accueillent à peu près 605 000 personnes âgées dépendantes. Il se trouve qu’un certain nombre de ces établissements pratiquent la fraude et l’évasion fiscales de façon absolument remarquable. Ainsi, le groupe DomusVi, qui a pour partenaires la Caisse des dépôts ainsi qu’un fonds émirati appelé Mubadala, a réalisé une évasion fiscale d’à peu près 1 800 milliards d’euros ces dernières années, avec des ramifications au Luxembourg, à Jersey et dans d’autres pays.
Lancez donc une inspection conjointe de l’IGAS et de l’IGS sur la gestion des Ehpad, surtout quand ils bénéficient de financements publics, ce qui est évidemment le cas partout, de façon à mettre un terme aux évasions fiscales et aux montages financiers. L’argent que vous récupérerez de la fraude fiscale servira à payer la cinquième branche, que l’on a manifestement du mal à financer. (Mme Raymonde Poncet Monge applaudit.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Nadège Havet, pour explication de vote sur l’article.
Mme Nadège Havet. Certains se disent déçus. D’autres évoquent une coquille vide. Nous ne sommes pas d’accord.
Face à ces sentiments exprimés tout au long des débats sur l’article 16, je veux simplement souligner une chose : le PLFSS donne des moyens à cette nouvelle branche, afin qu’elle puisse justement ne pas rester cette coquille vide tant critiquée.
Les débats continuent d’enrichir la cinquième branche. Les échanges en première lecture à l’Assemblée nationale l’ont démontré. La CNSA aura désormais, par exemple, la mission de contribuer à l’amélioration des conditions de travail des personnes exerçant les métiers participant à l’accompagnement et au soutien à l’autonomie des personnes âgées et des personnes atteintes de handicap et à la valorisation de ces derniers. Voilà des évolutions concrètes !
Ces évolutions, mes chers collègues, sont possibles, parce que cette nouvelle branche est créée. Elle existe aujourd’hui, parce que le Gouvernement a transformé des discussions passées en une réalité. Elle saura devenir essentielle à notre pays. Depuis combien d’années l’espérions-nous ? Combien de discussions n’avaient-elles pas été suivies de réalisations ? Le PLFSS propose de passer enfin à l’action.
Aujourd’hui, nous voulons insister sur cette amélioration ainsi que sur les engagements du Gouvernement. Si, pour agir, nous attendons que toutes les mains se lèvent, nous attendrons longtemps !
Avec ce PLFSS, la cinquième branche se dessine. Les missions de la CNSA sont essentielles pour répondre aux besoins de tant de citoyens. Nous saluons cet article, que nous voterons. Il représente l’action, il marque une amélioration pour de nombreux citoyens et, surtout, engage l’avenir. Nous nous en félicitons.
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Mouiller, rapporteur. Le vote de cet article est, pour nous, un exercice difficile. Les interventions des uns des autres vous le montrent, monsieur le secrétaire d’État. Je pense notamment à l’intervention de Bernard Bonne, qui s’est fortement interrogé sur la pertinence de cet article.
Comme nous l’avons évoqué tout au long du débat, pendant la discussion générale et, déjà, l’année dernière, lorsque l’on a créé cette cinquième branche, il y a véritablement un problème de méthode, puisqu’a été défini un cadre dépourvu de contenu. Nous ne connaissions que les intentions. Tout a été renvoyé au rapport Vachey.
Nous attendions un certain nombre de propositions à l’issue de ce rapport. Nous voyons qu’une seule mesure a été reprise et que les sujets qui restent sur la table n’ont ni véritable contour ni réelle orientation financière. Nous pouvions entendre que le dossier ne pouvait pas forcément être clos, mais nous aurions apprécié de disposer au moins d’une orientation et de pistes de travail, assorties d’un calendrier, pour pouvoir mesurer les évolutions. Or, aujourd’hui, on nous demande de voter un certain nombre de décisions dans le cadre du PLFSS.
Nous entendons vos propositions financières, mais nous rappelons que, dans les 2,5 milliards d’euros de moyens supplémentaires, 1,9 milliard d’euros sont dédiés principalement au rattrapage sur les primes. On en reste donc essentiellement aujourd’hui au transfert à la branche autonomie de moyens financiers existants. Ainsi, l’AEEH a été transféré de la branche famille à la branche autonomie. On modifie également les règles de financement en faisant appel à la CSG, avec une incidence directe sur l’assurance maladie, mais, globalement, aucune ambition concrète n’est donnée à la politique menée, en dehors du titre et des bonnes intentions. Nous restons donc aujourd’hui sur notre faim, avec beaucoup d’interrogations.
En supprimant le principe du recours à l’ordonnance, nous avons voulu vous montrer que le Parlement souhaitait débattre. Nous allons être conduits, à l’article additionnel après l’article 16, à voter une conférence des financeurs. Il en a beaucoup été question durant le débat, mais il faut savoir que c’est le Sénat qui en est à l’initiative. Ce n’est pas du tout le Gouvernement !
Le Gouvernement nous assure simplement que les travaux avanceront. Le projet de loi Autonomie va arriver sans calendrier précis, dans un contexte que l’on sait extrêmement compliqué. Nous pouvons donc avoir beaucoup de doutes sur les échéances à venir.
C’est parce que le Parlement est responsable que nous avons voulu vous dire, ce soir, que, premièrement, nous souhaitons participer à la rédaction pleine et entière de la loi et que nous refusons les ordonnances et que, deuxièmement, le débat sur les moyens financiers que nous n’avons pas eu ce soir et qui pose des difficultés pour un certain nombre de parlementaires puisse avoir lieu selon un calendrier que nous voulons fixer. C’est la responsabilité du Sénat.
Cela étant, le groupe majoritaire vous suivra sur cet acte, mais vous devez entendre cette demande formelle : nous souhaitons être impliqués, parce qu’une réforme de cette ampleur doit recueillir une forme de consensus généralisé. Ce soir, vous ne l’avez pas ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Félicitons-nous que les choses avancent enfin – je ne reviendrai pas sur les épisodes passés –, alors que notre société est plus que jamais confrontée au défi du grand âge et de l’autonomie !
Le Gouvernement a privilégié une méthode, qui ne recueille pas le consensus. Il s’agit de créer une cinquième branche, puis de la nourrir à l’occasion des débats : on commence à préciser les missions de la CNSA, à apporter des financements.
Monsieur le rapporteur, 1,9 milliard d’euros de primes pour les personnels, ce n’est pas rien !
M. Alain Milon. C’est le Ségur !
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. De fait, le Ségur fait partie de la méthode, tout comme le Laroque, qui va aussi venir enrichir le contenu de la cinquième branche. Suivra le projet de loi Grand âge et autonomie.
Réjouissons-nous que les choses avancent ! Ne ratons pas ensemble le moment historique de faire enfin avancer ce sujet dans notre pays ! À cet égard, je ne peux pas imaginer que le Sénat puisse, ce soir, supprimer l’article 16, qui, j’y insiste, constitue une avancée majeure très attendue par l’ensemble de nos concitoyens.
Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote sur l’article.
Mme Laurence Cohen. Plusieurs de nos collègues, de différentes sensibilités politiques, s’insurgent, à juste titre, comme nous l’avons fait dès le départ en demandant la suppression de l’article 16, contre le fait que la cinquième branche n’est pas financée, que l’on ne connaît rien de sa gouvernance et que le Gouvernement cherche à nous « rassurer » en nous disant qu’il compte légiférer par ordonnance, réduisant le rôle du Parlement à son minimum. Je suis assez admirative que ceux-là même finissent par voter, promettant qu’ils seront très attentifs…
Cette branche devait être financée par l’impôt. Elle va finalement être financée par des déplacements d’argent d’une branche à une autre. Telle est la réalité !
Depuis le début de l’examen du PLFSS, nous disons que la sécurité sociale supporte déjà des charges qui ne lui incombent pas, même si, avec la covid, le Gouvernement a pallié les exonérations qu’il avait décidées. Il n’empêche que de telles recettes ne fonctionnent toujours pas.
Nous avons un peu l’impression d’une course en avant. Pour notre groupe, le rôle démocratique des parlementaires que nous sommes est totalement nié, pour ne pas dire piétiné. Ceux qui pensent que nous pourrons peut-être décider lors de l’examen de la loi Grand Âge sont très naïfs. À moins qu’ils ne soient pas franchement en désaccord avec ce que propose le Gouvernement…
Au groupe CRCE, nous sommes logiques. Depuis le départ, nous avons dénoncé les choses. Nous avons donné des pistes de financement. Chaque fois, on nous répond que ce n’est pas le moment, que ce n’est pas le bon tempo… Nous voterons contre l’article 16.
Mme la présidente. La parole est à Mme Michelle Meunier, pour explication de vote sur l’article.
Mme Michelle Meunier. Il est vrai que, dans cet hémicycle, les votes ne coïncident pas toujours avec les discours.
Nous pourrions reprendre à notre compte les réserves que vient d’exprimer Laurence Cohen. Nous l’avons d’ailleurs déjà fait au travers de nos amendements. Néanmoins, le groupe socialiste votera l’article 16. Au mois de juillet, nous avions déjà acté la création de la cinquième branche de la sécurité sociale. Pour nous, celle-ci est très importante, même si je répète que le compte n’y est pas : c’est insuffisant et insatisfaisant. Je pense toutefois que la politique de la chaise vide est pire que tout.
Les parlementaires du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain ont des propositions à formuler. Pour l’instant, elles ne sont pas entendues, mais nous continuerons à les soutenir, pour aller vers la création de la branche autonomie.
Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Bonne, pour explication de vote sur l’article.
M. Bernard Bonne. Personnellement, je voterai l’article 16 sans aucune difficulté, surtout maintenant que l’amendement de M. le rapporteur général a été adopté.
Cela étant, je veux vous poser une question, monsieur le secrétaire d’État, les yeux dans les yeux (Exclamations amusées sur les travées du groupe Les Républicains.) : pensez-vous vraiment que le projet de loi Grand Âge sortira en 2021 ? (Non ! sur les travées du groupe CRCE.) La création de la cinquième branche n’a aucun intérêt si elle n’est pas suivie de ce texte, avec tout ce qu’il comporte ! Je voudrais que vous me répondiez sincèrement.
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour explication de vote sur l’article.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Je dois dire que je suis très étonnée par votre vote, mes chers collègues. S’il faut laisser un message à l’opinion en faveur de la création de la cinquième branche, je le dis : j’y suis favorable, et je l’ai toujours été. Je fais d’ailleurs remarquer que nous avons déjà voté ce dispositif précédemment. Le texte d’aujourd’hui ne change donc rien.
Vous nous dites que c’est une coquille vide. M. Bonne, à juste titre, pose la question de la date à laquelle nous sera présenté le projet de loi Grand Âge. Franchement, croyez-vous que nous le verrons en 2021 ? Pour ma part, je crois que l’article 16 de ce PLFSS vise à créer un effet d’annonce pour se dispenser de voter les dépenses en 2021, autrement dit avant la prochaine élection présidentielle. (Marques d’approbations sur les travées du groupe CRCE.) On nous expliquera alors que le covid coûte très cher, que le déficit est déjà à son maximum, que l’on ne peut pas aller plus loin et que le sujet est renvoyé après la prochaine présidentielle.
M. Fabien Gay. Voilà !
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Vous pouvez faire semblant de ne pas le voir, mais sachez que les Français ne sont pas dupes. Ils attendent du sonnant et du trébuchant, du concret, de l’opérationnel. Ils attendent une vision globale de l’avenir pour notre vieillesse. Cette question est source d’angoisse pour la société française, qui sait que c’est l’un des grands défis qu’elle devra relever.
On ne règle rien sur le fond. On ne règle rien stratégiquement. On ne règle rien financièrement. On croit qu’un effet d’annonce suffira à convaincre l’opinion, alors que vous n’êtes vous-mêmes pas convaincus.
Un peu de vérité dans vos votes, mes chers collègues ! Je demande à chacun de réfléchir en conscience. Sur un tel sujet, on ne peut pas faire semblant !
Mme la présidente. La parole est à M. Alain Milon, pour explication de vote sur l’article.
M. Alain Milon. J’aimerais, monsieur le secrétaire d’État, que vous nous reprécisiez les chiffres, que je n’ai pas tous notés. Au reste, comme je l’ai dit, je ne dispose peut-être pas de l’intelligence suffisante pour tout comprendre dans les détails.
Vous avez dit que la CNSA serait dotée de 2,5 milliards d’euros. Or, grâce à la journée de solidarité, la CNSA disposait déjà de ce montant avant la création de la cinquième branche.
Vous nous avez également dit, sauf erreur de ma part, que les revalorisations salariales consécutives au Ségur s’élevaient à 1,7 milliard ou 1,9 milliard d’euros. Or ces sommes auraient été mises sur la table même si la cinquième branche n’avait pas existé.
Restent 200 millions d’euros pour l’aide à domicile, ce qui est une bonne chose, et 400 millions d’euros pour les investissements. Par conséquent, l’incidence financière de la création de la cinquième branche ne s’élève, pour l’instant, qu’à 600 millions d’euros. Le reste existait déjà ou était en passe d’être créé du fait du Ségur.
J’aimerais obtenir quelques précisions sur le sujet.
Mme la présidente. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote sur l’article.
Mme Raymonde Poncet Monge. Nous demandons un engagement sur le projet de loi Grand âge et autonomie. Nous demandons également un engagement rapide sur les travaux du Laroque, qui, comme je le dis depuis un moment, auraient dû avoir lieu en même temps que le Ségur.
Le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires est favorable à la création de la cinquième branche, mais je serai très intéressée par un débat sur sa pertinence. Nous demandons aussi que sa gestion soit paritaire, alors que le paritarisme a reçu de nombreux coups de boutoir ces dernières années.
Je vous invite à écouter le conseil de la CNSA.
La CNSA fait partie de ceux qui soutiennent la création de la cinquième branche et qui s’en réjouissent, mais elle déplore le peu d’ambition en matière de financement. Selon elle, le Ségur du médico-social a créé une concurrence fâcheuse avec d’autres acteurs et professionnels du « prendre soin », notamment de l’aide à domicile, même si les 150 millions d’euros ont permis de rattraper un peu les choses – on parle de 200 millions, mais, au 1er avril, il s’agit bien de 150 millions…
J’aimerais donc savoir quand seront mises en œuvre les recommandations du Laroque et comment elles seront financées, puisque rien n’est prévu en dehors du Ségur de la santé.
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Madame la sénatrice, le Gouvernement ne triche pas. Je vous ai déjà opposé des arguments très réels, très concrets, voilà quelques instants. Je vais faire de même en précisant les points que M. Milon n’a pas eu le temps de noter, même si j’en doute un peu…
Cette branche représente en tout 31 milliards d’euros, dont 2,5 milliards d’euros de mesures nouvelles dans ce PLFSS, parmi lesquels 1,5 milliard d’euros de revalorisations.
Monsieur Milon, je ne comprends pas votre raisonnement : auriez-vous souhaité que le Ségur n’intègre pas ces mesures pour les personnels des Ehpad ? Réjouissons-nous du contraire : 400 millions d’euros d’investissement, 300 millions d’euros pour l’amélioration des taux d’encadrement et 200 millions d’euros pour tout ce qui a trait à l’aide à domicile et quelques mesures en direction des personnes handicapées qu’évoquera Sophie Cluzel dans quelques instants.
Monsieur Bonne, dans la constante lignée des propos du Président de la République et du Premier ministre, le projet de loi Grand âge et autonomie sera bien présenté en 2021. Si je ne vous le dis pas « les yeux dans les yeux », c’est que cette expression n’a pas porté chance au dernier qui l’a employée. (Sourires.)
Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Sophie Cluzel, secrétaire d’État. Je voudrais apporter quelques précisions, en soulignant l’extension de la prestation de compensation du handicap, dotée de 200 millions d’euros, à la parentalité dès le 1er janvier 2021. C’est une grande avancée, attendue par les parents et par les personnes en situation de handicap depuis des années.
Nous accélérons le déploiement des solutions d’accueil et d’accompagnement adaptées pour plus de 100 millions d’euros. Nous soutenons les MDPH, avec 25 millions d’euros supplémentaires. Je pense aussi à la consolidation de la stratégie nationale pour l’autisme avec le déploiement du forfait des 7-12 ans et à la poursuite du plan de prévention des départs en Belgique. Nous disposons également de 20 millions d’euros pour déployer l’habitat inclusif, dont nous débattrons dans quelques instants.
Oui, la cinquième branche a des traductions concrètes pour améliorer le quotidien des personnes handicapées ! Cette cinquième branche est une grande avancée, et nous allons pouvoir capitaliser sur des réponses communes personnes âgées-personnes handicapées sur le bien vivre chez soi afin de leur permettre d’opérer un véritable choix de vie.
Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote sur l’article.
M. Bernard Jomier. Je partage de nombreuses critiques et réserves émises par mes collègues de l’opposition. Ce qui nous est présenté est insatisfaisant. Je ne vais pas tout reprendre, sauf à épuiser mon temps de parole…
Il s’agit d’un choix premier de la vie politique : à qui confier la gestion de ce risque ? Nous connaissons tous l’alternative : soit c’est à la sécurité sociale, et nous pouvons discuter de tout – mes collègues ont présenté des amendements sur le financement et sur la gestion paritaire de cette nouvelle branche, mais le Gouvernement a fermé toutes les portes pour le moment ; soit c’est au secteur privé, ce dont rêvent beaucoup.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Évidemment !
M. Bernard Jomier. C’est cela que vous voulez ? Si l’on arrête le processus et que l’on rejette l’article 16, autant donner tout de suite les clés de la cinquième branche à Axa et consorts. (Protestations sur les travées du groupe CRCE.) Et nous ne nous résolvons pas à prendre un tel risque !
Nous approuverons, avec toutes les réserves que mes collègues ont portées, cet article 16, car il est temps de passer à la définition des financements, des contenus et du mode de gestion de ce qui se doit d’être un progrès social, à savoir la gestion par la sécurité sociale du risque autonomie.
Mme la présidente. La parole est à M. Pierre-Jean Verzelen, pour explication de vote sur l’article.
M. Pierre-Jean Verzelen. Je participe pour la première fois au débat sur le PLFSS. Je ne suis pas un grand spécialiste du sujet, mais j’ai beaucoup entendu parler de la création de la cinquième branche. Je vais voter pour, mais j’ai l’impression d’être piégé.
Le Gouvernement nous propose la création d’une branche autonomie, qui n’a justement aucune autonomie financière pour le moment. Je suis donc assez mal à l’aise : cela fait tellement longtemps que l’on entend parler de cette branche que l’on peut difficilement, en tant que responsable politique, voter contre. Notre groupe votera cet article.
Je suis un jeune sénateur, et j’ai pris le temps d’écouter les uns et les autres. Je fais le choix de vous faire confiance, monsieur le secrétaire d’État. J’espère qu’il y aura du contenu et que nous pourrons discuter des financements dans un futur projet de loi, dès le début de l’année prochaine.
Mme la présidente. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote sur l’article.
M. René-Paul Savary. C’est cette approche très particulière qui induit ces divergences d’état d’esprit, d’arguments, alors que nous voulons tous répondre à la même finalité : faire mieux encore pour l’autonomie des personnes âgées et handicapées. Le malaise ressenti sur toutes les travées montre bien que le Gouvernement n’a pas choisi une approche consensuelle, à même de rassembler le plus largement possible.
Forts de toutes ces critiques, nous pourrions refuser de vous accorder notre confiance, monsieur le secrétaire d’État. Ce n’est pas notre façon de faire : maintenant que nous avons mis le pied dans la porte, nous espérons que vous allez tenir compte de nos demandes, et nous continuerons de discuter. Mais, prenez garde, vous avez une responsabilité : vous avez pris des engagements qu’il faudra tenir devant le Parlement et devant les Français.
Tout cela paraît compliqué, mal engagé. Nous ne sommes pas là pour empêcher un progrès social, mais pour le favoriser. Or la question des financements est particulièrement difficile. L’imposition étant plus élevée en France que dans les autres pays européens, envisager des financements privés ne me semble pas rédhibitoire. (Exclamations sur les travées du groupe CRCE.) Pourquoi pas ? Mettons au moins la question sur la table et comparons les avantages des financements privés et des financements publics. Il faudra bien s’inscrire dans la complémentarité pour mettre en œuvre une politique ambitieuse.
Tout doit être mis sur la table : raison pour laquelle nous voterons cet article 16.
Mme la présidente. La parole est à M. Olivier Henno, pour explication de vote sur l’article.
M. Olivier Henno. Notre choix de voter cette cinquième branche reflétait à la fois notre éthique de conviction et notre éthique de responsabilité.
Notre état d’esprit est aujourd’hui un peu différent : nous allons bien voter l’article 16, car je ne crois évidemment pas qu’il faille jeter le bébé avec l’eau du bain, mais nous le faisons davantage par éthique de responsabilité que par éthique de conviction.
La dernière fois, nous doutions déjà de la méthode ; cette fois, nous doutons du fond. Comment imaginez-vous cette cinquième branche ? Est-ce vraiment autre chose qu’un effet d’annonce ? Nous vous faisons encore confiance en votant l’article 16, mais notre état d’esprit est totalement différent de celui qui prévalait lors du vote du transfert de la dette à la Cades.
Vous évoquiez la pose des fondations de la cinquième branche, monsieur le secrétaire d’État. Il nous semble qu’il reste encore beaucoup de sable et que le sol est un peu meuble… Nous voterons donc cet article 16 au nom de l’éthique de responsabilité, avec l’ombre d’un doute sur l’avenir, la pérennité et les engagements que vous avez pris.
Mme la présidente. La parole est à M. Martin Lévrier, pour explication de vote sur l’article.
M. Martin Lévrier. Ce débat me rappelle indirectement celui de la grande réforme de l’apprentissage, voilà deux ans et demi. J’entendais alors sur toutes les travées le même genre de discours que ce soir : on ne peut vous faire confiance, vous allez déshabiller les régions, nous courons à la catastrophe, l’éducation nationale n’aura plus la main… (Exclamations sur les travées du groupe CRCE) Je vois que mes collègues du groupe CRCE s’en souviennent bien !
Aujourd’hui, on a ouvert la voie. L’article 16 est lancé, vous voulez tous le voter, ce dont je suis très fier. Bien sûr, il y a énormément à faire, mais c’est notre boulot, et je me réjouis de tout le travail que nous allons accomplir ensemble ! J’y crois et j’ai confiance.
Mme la présidente. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, pour explication de vote sur l’article.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Je rejoins les propos qu’ont tenus mes collègues Marie-Noëlle Lienemann et Laurence Cohen. Nous, nous ne voterons pas cet article 16. Comme souvent, on entend des cris de-ci de-là, mais tout le monde va finalement voter ! C’est toujours le même constat : tout le monde hurle, crie et lève ses bras au ciel, mais quand il faut voter, tout le monde lève la main !
Cela étant dit, un rappel s’impose : aujourd’hui, l’autonomie et le handicap sont déjà pris en charge par la sécurité sociale. Or personne ne le dit. À écouter nos débats, on a l’impression que la cinquième branche va régler le problème et prendre en charge le financement de l’autonomie et du handicap.
Vous avez tous souligné que cette cinquième branche était une coquille vide sans financement ni gouvernance. Vous avez tous dit qu’il aurait fallu discuter du projet de loi Grand âge et autonomie avant ce PLFSS. Finalement, vous vous apprêtez tous à voter et à faire confiance au Gouvernement. Quant à nous, nous n’avons pas confiance, et nous ne voterons pas l’article 16.
Mme la présidente. La parole est à Mme Pascale Gruny, pour explication de vote sur l’article.
Mme Pascale Gruny. Je remercie M. Lévrier de ses propos, car, justement, les comptes n’y sont pas en matière d’apprentissage. Dans les régions, dans les CFA, dans les écoles, dans les lycées, dans les branches professionnelles, dans les entreprises, il manque de l’argent pour la formation professionnelle. Merci, monsieur Lévrier, de nous confirmer qu’on ne peut faire confiance à ce gouvernement ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Éliane Assassi applaudit également.)
En ce qui concerne la dépendance, l’autonomie, le grand âge, j’en ai vu passer, moi qui suis une vieille parlementaire. (Sourires.) Le vrai sujet, c’est toujours celui de l’argent, du financement. Vous êtes plus malins que les autres : vous faites des tours de passe-passe et faites passer l’argent par un tuyau, puis par un autre. Mais, au final, c’est toujours pareil.
Vous n’entendez pas la colère du peuple. Ici, monsieur le secrétaire d’État, nous représentons les grands électeurs et, derrière eux, la population. Les Français en ont assez de vos mensonges perpétuels. Aujourd’hui – je ne dirai pas « les yeux dans les yeux » –, nous attendons quelque chose, car la situation est très grave. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 16, modifié.
J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 18 :
Nombre de votants | 344 |
Nombre de suffrages exprimés | 332 |
Pour l’adoption | 317 |
Contre | 15 |
Le Sénat a adopté.
Articles additionnels après l’article 16
Mme la présidente. L’amendement n° 158, présenté par M. Mouiller, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Après l’article 16
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie réunit une conférence des financeurs de la politique de soutien à l’autonomie qui remet au Parlement, avant le 1er avril 2021, des propositions relatives aux financements nouveaux que requiert l’organisation, par la branche autonomie et les collectivités territoriales, d’une prise en charge des personnes en perte d’autonomie privilégiant le maintien à domicile.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Mouiller, rapporteur. Lors de l’examen de l’article 16, nous avons évoqué la méthode du Gouvernement et nos inquiétudes en matière de financement.
Monsieur le secrétaire d’État, nous avons bien entendu votre annonce concernant un projet de loi Grand âge et autonomie en 2021, mais le Sénat souhaite marquer de son empreinte ce rendez-vous sur le débat financier. Cet amendement vise donc à réunir une conférence des financeurs de la politique de soutien à l’autonomie, sous l’égide de la CNSA, pour faire des propositions relatives aux financements nouveaux que requiert l’organisation par la branche autonomie et les collectivités territoriales d’une prise en charge des personnes en perte d’autonomie privilégiant le maintien à domicile.
La promesse d’une grande réforme de la dépendance à fêter son deuxième anniversaire récemment, puisque la constatation Grand âge et autonomie a été lancée le 1er octobre 2018. Depuis, des travaux utiles ont été publiés, mais peu de mesures concrètes ont été décidées, en particulier sur la délicate question du financement d’une meilleure prise en charge des personnes âgées et des personnes handicapées, c’est-à-dire d’un virage domiciliaire. Cet amendement vise à catalyser la prise de décision ou, au moins, à maintenir le sujet à l’agenda politique.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Le rapport Vachey, cité à plusieurs reprises ce soir, vous a été remis en septembre. Il met à plat les différentes pistes de financement et a fait l’objet d’une large concertation de l’ensemble des parties prenantes.
Il nous semble que le temps n’est plus aux rapports, mais à l’analyse des débats que nous aurons dans le cadre du projet de loi Grand âge et autonomie. Pour autant, si vous pensez indispensable de disposer d’un rapport supplémentaire, le Gouvernement s’en remettra à la sagesse du Sénat.
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 16.
Je suis saisie de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L’amendement n° 724 rectifié est présenté par Mmes Meunier et Lubin, MM. Jomier et Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Jasmin, Le Houerou, Poumirol et Rossignol, MM. Antiste, Bouad et J. Bigot, Mme Bonnefoy, MM. Durain et Gillé, Mme Harribey, M. P. Joly, Mme G. Jourda, M. Leconte, Mme Lepage, MM. Lozach, Lurel, Marie et Mérillou, Mme Monier, MM. Montaugé et Pla, Mme S. Robert, MM. Sueur, Temal et Tissot, Mmes Préville, Briquet et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L’amendement n° 922 est présenté par Mme Poncet Monge, M. Benarroche, Mme Benbassa, M. Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon et Mme Taillé-Polian.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 16
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement une étude d’impact sur la mise en œuvre d’une prestation universelle de compensation à l’autonomie.
La parole est à Mme Michelle Meunier, pour présenter l’amendement n° 724 rectifié.
Mme Michelle Meunier. Au début de l’examen de l’article 16, j’ai souligné la nécessité que cette cinquième branche réponde à la demande d’universalité qu’exigent les personnes en perte d’autonomie. Tout doit être mis en œuvre pour faire converger les politiques de l’âge et du handicap. Cette branche devra s’y atteler, et la future loi est d’ores et déjà sertie de promesses.
Nous le déplorons en ce moment, selon que le handicap survient avant ou après 60 ans, les personnes ont accès soit à la prestation compensatoire du handicap, soit à l’allocation personnalisée d’autonomie versée aux personnes âgées dépendantes. Ces deux prestations sont d’une nature et d’un montant différents.
Le secteur associatif du handicap estime que le chantier de la cinquième branche doit permettre d’abroger définitivement « la barrière d’âge des 60 ans » et rappelle qu’il est temps de réduire le morcellement des dispositifs et de sortir de la logique de catégorisation des publics. Nous proposons donc de mesurer, par une étude d’impact, les hypothèses concrètes de la mise en œuvre de cette cinquième branche, en préalable à l’examen de la future loi Grand âge et autonomie.
Mme la présidente. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour présenter l’amendement n° 922.
Mme Raymonde Poncet Monge. À côté des acteurs du handicap, les personnes âgées réclament également le dispositif prévu par cet amendement tant les différences sont importantes entre APA et PCH.
Rompre avec cette barrière d’âge participerait du changement de regard sur le vieillissement et la dépendance – mot à bannir – qui surviendrait après 60 ans. La dépendance serait comme un sous-produit de la compensation d’une situation de handicap en raison de l’âge. L’abolition de cette barrière me semble essentielle.
Mme la présidente. L’amendement n° 903 rectifié, présenté par MM. Corbisez, Artano, Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère, MM. Fialaire, Gold et Guérini, Mme Guillotin, M. Guiol, Mme Pantel et MM. Requier et Roux, est ainsi libellé :
Après l’article 16
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans un délai d’un an à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement une étude d’impacts sur la mise en œuvre d’une prestation universelle de compensation à l’autonomie.
La parole est à M. Stéphane Artano.
M. Stéphane Artano. L’amendement est défendu.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Mouiller, rapporteur. Ces amendements abordent des points fondamentaux pour les personnes âgées et les personnes handicapées. Je vous invite à lire un certain nombre de rapports sur ces sujets, dont un très intéressant sur l’évolution de la prestation compensatoire, rédigé par votre serviteur… (Sourires.)
Toutefois, nous n’en sommes plus à l’heure des rapports : nous sommes dans l’urgence. Il faut maintenant entrer dans la partie opérationnelle de la loi. Je pense, madame la présidente de la commission, que nous pourrions travailler sur ces sujets très rapidement de façon à pouvoir alimenter le débat lorsque nous examinerons le projet de loi Grand âge et autonomie.
Si je suis défavorable à ces trois amendements en ce qu’ils demandent un nouveau rapport, il s’agit de sujets fondamentaux. Au-delà des financements, l’enjeu le plus important est d’envisager une prise en charge globale des personnes dépendantes.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Sophie Cluzel, secrétaire d’État. Le Gouvernement partage l’avis de la commission.
J’ajoute que nous travaillons à l’amélioration de la prestation compensatoire du handicap, dont je rappelle qu’elle s’étendra, à compter du 1er janvier, aux besoins relatifs à la parentalité.
Les personnes en situation de handicap sont très attachées à la PCH, très individualisée et très différente selon qu’il s’agit d’une personne âgée ou d’un enfant en devenir d’autonomie.
Nous ouvrons aussi plus largement les droits à compensation aux personnes les plus âgées avec l’ouverture du droit à la PCH au-delà de 75 ans pour les personnes répondant aux critères d’éligibilité de la PCH avant 60 ans.
L’heure est en effet davantage aux travaux d’amélioration de la PCH qu’aux rapports, raison pour laquelle le Gouvernement est défavorable à ces trois amendements.
Mme la présidente. La parole est à Mme la présidente de la commission.
Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales. Je voudrais juste répondre au vice-président de la commission des affaires sociales, M. Mouiller, et lui dire que ce sujet pourra bien évidemment être abordé. Le bureau de la commission doit justement se réunir prochainement pour fixer nos travaux du premier semestre de 2021.
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 724 rectifié et 922.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente. Je vais mettre aux voix l’amendement n° 903 rectifié.
M. Stéphane Artano. Je le retire !
Mme la présidente. L’amendement n° 903 rectifié est retiré.
L’amendement n° 601, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Après l’article 16
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 281-2 du code de l’action sociale et des familles, il est inséré un article L. 281-2-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 281-2-1. Le règlement mentionné à l’article L. 121-3 peut prévoir que les habitants d’un habitat inclusif auquel n’est pas attribué le forfait mentionné à l’article L. 281-2 bénéficient d’une aide à la vie partagée leur permettant de financer le projet de vie sociale et partagée, versée directement à la personne morale chargée d’assurer le projet de vie sociale et partagée.
« Le bénéfice de l’aide est subordonné à la signature, au titre des logements concernés, d’une convention entre le département et cette personne morale.
« Un accord pour l’habitat inclusif, passé entre le département et la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie, fixe les conditions, portant notamment sur le montant de l’aide et ses conditions d’attribution, qui ouvrent droit au versement par la caisse, au titre du 4° de l’article L. 14-10-5, d’un concours pour le financement des dépenses départementales d’aide à la vie partagée.
« Cet accord peut prévoir d’autres engagements en matière de développement de l’habitat inclusif ou de politiques venant à son soutien. À ce titre, il peut être également signé par le représentant de l’État dans le département ou le directeur général de l’agence régionale de santé.
« À titre transitoire, l’accord prévoit que, pour tout ou partie des conventions mentionnées au deuxième alinéa qui sont signées avant le 31 décembre 2022, le concours mentionné au troisième alinéa garantit, pour la durée de la convention, la couverture des dépenses d’aide à la vie partagée à un taux, fixé par l’accord, d’au moins 80 % de la dépense du département. »
La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Sophie Cluzel, secrétaire d’État. Cet amendement vise à accélérer le développement de l’habitat inclusif dans nos territoires pour sortir du dilemme vécu par les personnes lorsque la vie « chez soi comme avant » n’est plus possible et que la vie collective en établissement n’est ni souhaitée ni nécessaire.
Le récent rapport de Denis Piveteau et Jacques Wolfrom montre que l’essor de ces formules de plus en plus plébiscitées appelle un financement plus fluide de la fonction d’animation du lieu de vie. Il propose ainsi d’instaurer une aide à la vie partagée, octroyée à tout habitant d’un habitat inclusif dont le bailleur ou l’association gestionnaire a passé pour cet habitat une convention avec le département.
Cet amendement vise à permettre la mise en œuvre de cette aide à la vie partagée dans le règlement départemental d’action sociale en assurant une couverture partagée de son coût entre le département, signataire de la convention, et la CNSA.
Pour donner une impulsion forte, la CNSA garantira la couverture de tout ou partie des conventions signées par les départements avant fin 2022 à un taux d’au moins 80 %. Le montant prévisionnel atteindra 20 millions d’euros dès 2022, ce qui correspond au financement d’environ 500 projets de cinq à dix logements sur l’ensemble du territoire.
La création de cette aide à la vie partagée permettra de mener sur vingt-quatre mois un véritable test in vivo, nouvelle étape vers le déploiement d’une offre de logements réellement adaptés au projet d’autonomie des personnes. C’est là une grande avancée de cette cinquième branche.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Mouiller, rapporteur. Cet amendement vise à autoriser les règlements départementaux d’aide sociale à prévoir une aide à la vie partagée à l’attention des habitants d’une formule d’habitat inclusif dont le financement serait coassuré par la CNSA à hauteur de 80 % pour des conventions signées avant fin 2022.
Ce mécanisme serait une première application concrète d’une proposition du rapport Piveteau-Wolfrom. Pour avoir débattu de ces questions, notamment lors de l’examen de la loi ÉLAN, nous attendions cette aide de vie commune. La commission a donc émis un avis très favorable sur cet amendement.
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 16.
L’amendement n° 970, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 16
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – À la quatrième phrase du premier alinéa du 1 de l’article 231 du code général des impôts, après le mot : « communaux, » sont insérés les mots : « des établissements publics de santé et des établissements publics d’hébergement pour personnes âgées dépendantes, ».
II. – Le I s’applique à la taxe sur les salaires due à raison des rémunérations versées à compter du 1er janvier 2020.
III. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. Cet amendement vise à exonérer les établissements publics de santé et les Ehpad publics de la taxe sur les salaires, comme cela se fait déjà pour l’État et les collectivités territoriales. Alors que les personnels hospitaliers réclament de nouveaux moyens financiers et humains d’ampleur, cette mesure permettrait de déployer 5 milliards d’euros dans l’activité hospitalière dès 2020.
Certains nous opposeront que, si les hôpitaux et les Ehpad publics paient une taxe sur les salaires, c’est parce qu’ils ne sont pas astreints à payer la TVA. Mais je peux vous citer des établissements publics qui ne sont pas astreints à payer la TVA et qui sont exonérés de la taxe sur les salaires. Je pense notamment aux collectivités locales et à leurs régies, aux centres d’action sociale, aux centres de formation des personnels communaux, aux établissements d’enseignement supérieur. Finalement, seuls les hôpitaux et les Ehpad publics ne sont pas concernés !
Un autre argument est invoqué pour contrer notre amendement, à savoir la mise en concurrence avec les établissements privés. Il ne tient pas davantage, sachant que ces derniers bénéficient déjà de l’exonération de la taxe sur les salaires, par le biais du CITS. On peut donc considérer qu’il existe actuellement une situation déloyale à l’encontre des hôpitaux et des Ehpad publics.
Sur le fond, l’importance du service public de santé ne justifie-t-il pas, à vos yeux, une situation fiscale plus favorable des hôpitaux et des Ehpad publics ?
Enfin, s’agissant des conséquences du manque à gagner, à hauteur de 5 milliards d’euros, pour la sécurité sociale, il est étonnant de constater que ce débat a lieu en réponse à notre proposition, alors qu’il n’a jamais eu lieu lors de la création du CICE, du CITS, du CIR et autres exonérations de cotisations. Selon le principe de la loi Veil – faut-il le rappeler ici ? –, l’État doit compenser intégralement les pertes de recettes en cas d’exonération de cotisations sociales. Si on supprime une taxe de l’État, c’est à lui de trouver les ressources ailleurs pour financer les exonérations de cotisations sociales. Il l’a d’ailleurs fait dans le cadre de la lutte contre l’épidémie de Covid.
Mes chers collègues, ne serait-il pas souhaitable d’abandonner la taxe sur les salaires pour donner un peu d’oxygène à l’hôpital, qui en a bien besoin ?
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Mouiller, rapporteur. La commission a émis un avis défavorable sur cet amendement, qui pèse lourd : 5 milliards d’euros !
Nous ne sommes pas favorables au mécanisme proposé, même si la question du financement des établissements publics constitue un vrai sujet. Nous en avons souvent débattu avec M. Milon : la sécurité sociale doit-elle financer les murs et les investissements des établissements publics ? La situation doit être comparée avec d’autres secteurs, en particulier celui de l’éducation nationale. C’est un sujet global sur lequel nous devrons faire des propositions.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. L’amendement n° 570, présenté par Mme Lienemann, est ainsi libellé :
Après l’article 16
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement remet, dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, un rapport évaluant l’impact sur les finances sociales d’un transfert de charges depuis le forfait hébergement vers les deux autres forfaits socialisés en vue de diminuer le reste à charge. Ce rapport évalue en outre les effets directs anticipés de ce transfert en ce qui concerne l’évolution des recettes et des dépenses de la sécurité sociale.
La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Je m’étonne que cet amendement n’ait pas été jugé irrecevable…
Le financement des établissements d’hébergement pour personnes âgées se fait via trois sections budgétaires : le panier « hébergement », le panier « dépendance » et le panier « soins ».
Dans le cadre des réflexions qui se font jour concernant la prise en charge du grand âge, il convient de lutter contre les restes à charge astronomiques des résidents des Ehpad. Comme l’observe le rapport de mars 2018 des députées Iborra et Fiat, une telle évolution nécessite de transférer certains postes, aujourd’hui financés par le résident, de la section « hébergement » vers les sections qui bénéficient des financements publics.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Mouiller, rapporteur. La commission a émis un avis défavorable sur cet amendement, qui vise à prévoir un rapport supplémentaire.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 570.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Chapitre IV
Assurer la soutenabilité des dépenses de médicaments
Article 17
I. – L’article L. 138-13 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Le premier alinéa est ainsi modifié :
a) À la première phrase, les mots : « à L. 162-16-5 » sont remplacés par les mots : « , L. 162-16-4-1, L. 162-16-5 » ;
b) À la seconde phrase, les mots : « prévue à l’article L. 5121-12 du code de la santé publique ou pris en charge en application de l’article L. 162-16-5-2 » sont remplacés par les mots : « ou d’un cadre de prescription compassionnelle mentionnés aux articles L. 5121-12 et L. 5121-12-1 du code de la santé publique et de la prise en charge associée mentionnée aux articles L. 162-16-5-1 et L. 162-16-5-2 » ;
2° Le second alinéa est ainsi modifié :
a) La première phrase est supprimée ;
b) Au début de la seconde phrase, les mots : « À défaut, » sont supprimés ;
c) À la même seconde phrase, le taux : « 80 % » est remplacé par le taux : « 95 % » ;
3° Sont ajoutés deux alinéas ainsi rédigés :
« Par dérogation au deuxième alinéa, pour une entreprise redevable de la contribution qui a accepté, par convention conclue avec le Comité économique des produits de santé au titre des articles L. 162-16-4, L. 162-16-4-1, L. 162-16-5 ou L. 162-16-6, une baisse du prix net d’une ou plusieurs spécialités qu’elle exploite, prenant effet au cours de l’année au titre de laquelle la contribution est due, le taux mentionné au même deuxième alinéa peut être fixé entre 80 % et 95 %. Le taux mentionné à la première phrase du présent alinéa applicable à chaque entreprise est déterminé selon un barème fixé par arrêté des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale en fonction du montant des économies réalisées par l’assurance maladie du fait de la baisse du prix net de ces spécialités pour l’année au titre de laquelle la contribution est due ainsi que du chiffre d’affaires de l’entreprise calculé selon les modalités définies à l’article L. 138-11.
« Le prix net mentionné au troisième alinéa du présent article est calculé en défalquant les remises mentionnées aux articles L. 162-17-5, L. 162-18 et L. 162-22-7-1 du prix de vente au public mentionné aux articles L. 162-16-4 et L. 162-16-4-1, minoré des marges prévues par la décision mentionnée à l’article L. 162-38 et des taxes en vigueur, du prix de cession au public mentionné à l’article L. 162-16-5 ou du tarif de responsabilité mentionné à l’article L. 162-16-6. »
II. – Pour l’année 2021, le montant M mentionné à l’article L. 138-10 du code de la sécurité sociale est fixé à 23,99 milliards d’euros.
III. – Pour l’année 2021, le montant Z mentionné à l’article L. 138-19-8 du code de la sécurité sociale est fixé à 2,09 milliards d’euros.
Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Cohen, sur l’article.
Mme Laurence Cohen. À l’occasion de la discussion de cet article, je souhaite rappeler que, depuis des années, notre groupe politique demande le rétablissement d’une politique publique de production et de distribution des médicaments en France et en Europe. Nous constatons que, si nous étions peu nombreux au départ, la multiplication des pénuries de médicaments et la crise sanitaire de la covid-19 ont convaincu de nombreuses associations, des professionnels de santé et des citoyennes et citoyens que l’État devait reprendre la main.
L’État ne peut plus rester sans rien faire et dépendre des stratégies des laboratoires, qui ont délocalisé la production de médicaments vers les pays d’Asie. Je pense également aux comportements de certains grossistes-répartiteurs, qui préfèrent vendre leurs stocks de médicaments aux pays les plus offrants, ainsi qu’aux tensions sur les approvisionnements, volontairement créées par les laboratoires pour faire augmenter les prix.
Les autorités publiques sont sommées d’agir pour garantir un service essentiel, à savoir l’accès universel aux soins de santé et aux médicaments. Pour rappel, en 2019, ce sont plus de 1 200 médicaments d’intérêt thérapeutique majeur qui ont été concernés par des tensions ou une rupture d’approvisionnement, contre 800 en 2018.
L’obligation pour les industriels de constituer un stock de sécurité votée l’an dernier était un premier pas – je reviendrai sur les lacunes du dispositif, en particulier sur le décret du ministre de la santé limitant à deux mois la couverture des besoins en médicaments. À nos yeux, il est temps d’aller plus loin. C’est ce que nous proposerons au mois de décembre, lorsque nous examinerons notre proposition de loi portant création d’un pôle public du médicament et des produits médicaux.
Sachant que le contexte sanitaire doit nous amener à réfléchir dans les mois à venir sur le choix du mode de production du futur vaccin contre la covid-19, nous proposerons, dans le cadre de ce débat, une production publique du vaccin permettant de garantir le respect des meilleures conditions de sécurité et de transparence, ainsi qu’un tarif ne créant pas une dépense excessive pour la sécurité sociale. En réalité, nous voulons que ce vaccin soit accessible à toutes et tous sur l’ensemble de la planète, qu’il soit gratuit et, pour ce qui concerne la France, qu’il soit remboursé à 100 % par la sécurité sociale.
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Nous entamons l’examen d’une série d’articles consacrés, comme chaque année, à la fiscalité du médicament et des dispositifs médicaux, au travers d’un mécanisme désormais bien connu des spécialistes : la clause de sauvegarde.
La commission des affaires sociales a débattu de plusieurs amendements portant sur quatre thèmes distincts, que les aléas de la discussion nous feront tour à tour aborder, mais qu’il convient de ne pas confondre.
Premièrement : la clause de sauvegarde des médicaments. Il s’agit d’un mécanisme fiscal qui vise à juguler en dernier recours les dépenses d’assurance maladie en matière de médicaments et qui soulève depuis plusieurs années les contestations des acteurs pharmaceutiques.
Deuxièmement : la clause de sauvegarde des dispositifs médicaux. Créée l’année dernière, cette clause aboutit à des résultats décevants, comme l’affirme elle-même la Cour des comptes dans son rapport sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale. Toutefois, la commission propose de la redessiner sur le modèle de celle qui est appliquée aux médicaments.
Troisièmement : la fixation du prix des médicaments. Un amendement de nos collègues René-Paul Savary et Bruno Retailleau visera à prendre en compte les évolutions industrielles en matière de médicaments dans l’Union européenne.
Enfin, quatrièmement : la fiscalité de la répartition pharmaceutique. C’est un sujet qui ne peut plus être différé, eu égard à son urgence.
Tels sont, mes chers collègues, les points dont nous aurons à débattre dans le cadre d’un certain nombre d’amendements.
Mme la présidente. L’amendement n° 216 rectifié, présenté par Mmes Delmont-Koropoulis, Deromedi et Dumas, M. Dallier, Mme Gruny, MM. Savary, Lefèvre et Charon, Mmes Bonfanti-Dossat et Berthet, MM. Bascher, H. Leroy, E. Blanc et Piednoir et Mme Lavarde, est ainsi libellé :
Alinéa 10, première phrase
Remplacer le nombre :
95
par le nombre :
90
La parole est à Mme Annie Delmont-Koropoulis.
Mme Annie Delmont-Koropoulis. Les dispositions de l’article 17 s’inscrivent pleinement dans la stratégie gouvernementale de rationalisation des dépenses de santé. Le Gouvernement a donc aménagé la clause de sauvegarde, en minorant le taux d’abattement dont les laboratoires bénéficiaient jusqu’à présent, le faisant passer de 20 % à 5 %.
Il est normal que les entreprises pharmaceutiques soient mises à contribution et s’impliquent dans la politique de baisse des prix des produits de santé menée par le CEPS. C’est pourquoi le Gouvernement leur offre la possibilité de s’acquitter de leur contribution par le biais d’une baisse du prix de leurs médicaments, avec cette fois-ci une fenêtre d’abattement plus importante. Il n’en reste pas moins que la minoration de l’abattement de base à 5 % est grandement préjudiciable, non seulement pour les petites structures avec des moyens moins importants, mais également pour l’attractivité de notre territoire s’agissant des investissements et des expérimentations cliniques dont tant de patients atteints de pathologies rares et lourdes ont besoin.
À défaut de trouver de meilleures solutions, il convient que ce nouveau mécanisme de pression à la baisse des prix soit incitatif pour les entreprises. Il doit être plus intéressant pour les laboratoires de répercuter leur contribution sur leurs prix, ce qui fera baisser le niveau de l’Ondam (objectif national de dépenses d’assurance maladie), plutôt que de s’acquitter de cette contribution l’année fiscale suivante. Aussi, afin de garantir l’attractivité de cet aménagement de la clause de sauvegarde, le présent amendement vise à ramener le taux d’abattement minimum à 10 %, dans le cadre de la politique de baisse des prix des médicaments.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Avec le droit en vigueur, les entreprises dont il est ici question peuvent être exonérées de la clause si elles affichent pour l’ensemble du chiffre d’affaires un taux de conventionnement avec le Comité économique des produits de santé supérieur à 80 %. L’article élève ce taux à 95 %, ce qui revient, comme vous le dites, ma chère collègue, en vision miroir, à baisser le taux d’abattement à 5 %. En contrepartie, il aménage un régime d’exonération individuelle pour toute entreprise ayant consenti à une baisse de son prix net de référence.
Une telle individualisation de la négociation, bien qu’elle ait suscité la perplexité, puis les doutes, du secteur présente au moins, selon moi, l’intérêt de tenter l’expérience. C’est pourquoi l’économie générale de l’article 17 a été jugée satisfaisante par la commission, qui a donc émis un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Pour des raisons similaires, le Gouvernement est également défavorable à cet amendement.
Mme la présidente. La parole est à Mme Annie Delmont-Koropoulis, pour explication de vote.
Mme Annie Delmont-Koropoulis. Nous avons déjà perdu notre place de leader européen en matière de recherche. Nous risquons désormais d’être à la traîne des autres pays. En effet, il n’y aura plus aucune attractivité pour les laboratoires qui s’occupent de la recherche et de l’amélioration de la santé de nos patients.
Les procédés actuels nécessitent énormément de recherches. Selon moi, le nivellement par le bas n’est pas la bonne solution.
Mme la présidente. La parole est à Mme la présidente de la commission.
Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales. J’entends ce que dit Mme Delmont-Koropoulis. Nous avons évoqué le sujet rapidement au moment de l’examen des amendements en commission.
Lorsque nous avons rédigé, avec Véronique Guillotin et Yves Daudigny, un rapport sur l’accès précoce à l’innovation, nous avons bien vu quels étaient les freins pour les entreprises.
Qu’il y ait une régulation des prix et des négociations serrées entre les laboratoires et le CEPS, c’est normal. Nous devons maîtriser les prix, notamment par rapport à leur impact sur les comptes sociaux. Néanmoins, cet article introduit une modification importante du dispositif.
Mme Delmont-Koropoulis propose quelque chose d’intermédiaire entre ce qui existait avant et ce qui est prévu par le texte. Sa proposition me semble équilibrée. Pour ma part, je serais plutôt favorable à cet amendement.
Mme la présidente. L’amendement n° 217 rectifié, présenté par Mmes Delmont-Koropoulis, Deromedi, Lassarade et Dumas, M. Dallier, Mme Gruny, MM. Savary, Lefèvre et Charon, Mmes Bonfanti-Dossat et Berthet, MM. Bascher, H. Leroy, E. Blanc et Piednoir et Mme Lavarde, est ainsi libellé :
Alinéa 10, seconde phrase
Remplacer les mots :
arrêté des ministres chargés de la santé et
par les mots :
l’accord-cadre mentionné au premier alinéa de l’article L. 162-17-4 du code
La parole est à Mme Annie Delmont-Koropoulis.
Mme Annie Delmont-Koropoulis. La politique de négociation conventionnelle sur les prix entre le CEPS et les entreprises pharmaceutiques repose sur la confiance et la responsabilité de chaque partie. Chacune d’elle sait que le coût de l’innovation est justement évalué et qu’il permettra un accès équitable de chacun aux produits de santé. C’est d’ailleurs sur ce fondement que près de 95 % des laboratoires ont conventionné avec le CEPS.
La relation contractuelle entre le CEPS et les entreprises pharmaceutiques a permis à la France d’être leader en matière de production de médicaments en Europe et d’être un important créateur d’emplois industriels, ce qui risque de ne plus être le cas désormais.
Il est essentiel que la politique conventionnelle soit protégée et promue par le législateur. Les garanties apportées par cette méthode sont importantes pour que chaque patient puisse avoir accès à des stratégies thérapeutiques de qualité et, pour ceux qui le nécessitent, ciblées. C’est la raison pour laquelle cet amendement vise à confier la fixation du barème mesurant le taux d’avancement de la contribution due au titre de la clause de sauvegarde à un accord-cadre négocié entre le CEPS et les syndicats des entreprises pharmaceutiques plutôt qu’à un arrêté ministériel.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Avis favorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.
Mme Laurence Cohen. J’aurais bien aimé que le Gouvernement argumente.
Sur ce genre d’amendement, prenons garde ! En effet, à l’heure actuelle, avec l’épidémie de covid, la pression sur les médicaments, ainsi que sur les vaccins, est forte. Il est absolument nécessaire de ne pas céder au lobby pharmaceutique.
Sanofi est en train de licencier à tour de bras dans des sites orientés vers la recherche que je connais bien, puisqu’ils sont implantés dans le Val-de-Marne, tout en versant des dividendes à ses actionnaires, au détriment de la recherche pour le bien-être des patientes et des patients et de l’approvisionnement en médicaments.
Comme le rappelait voilà quelques jours l’association UFC-Que Choisir, les pénuries explosent : plus de 1 200 médicaments étaient concernés en 2019, et l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé prévoit le double pour 2020, notamment du fait de la crise sanitaire.
Au-delà des ruptures, c’est la durée d’attente qui est inquiétante. En 2017, les usagers ont dû attendre en moyenne quatorze semaines avant de constater un retour à la normale de l’approvisionnement de leurs médicaments. Les vaccins sont les plus touchés : ils sont en moyenne indisponibles pendant 179 jours, soit près de six mois. En 2020, la durée médiane des ruptures d’approvisionnement en officine a été de huit mois. Ici, au Sénat, nous avons fait des rapports extrêmement intéressants sur la pénurie des médicaments, accompagnés de recommandations bien plus drastiques que ce que nous avons voté dans le cadre de l’amendement précédent et ce que nous nous apprêtons à voter.
J’appelle votre attention, mes chers collègues, sur ce point : veillons à la mise en œuvre d’une maîtrise publique. La possibilité, pour le Gouvernement, d’intervenir constitue une arme. Je suis donc défavorable, avec l’ensemble de mon groupe, à cet amendement.
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour explication de vote.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Ce que vous nous proposez, ma chère collègue, c’est une dérégulation : on retire à l’État sa capacité d’arbitrage. Je ne pense pas que l’État soit bête au point de tordre le cou des industries du médicament, en ne tenant absolument pas compte de leurs arguments. Il s’agit de trouver le juste équilibre entre l’intérêt général et la production et l’innovation sur notre territoire. Considérer que l’État n’a plus rien à voir dans cette affaire, c’est quand même très dangereux en cette période.
On peut certes réfléchir sur l’avenir de la stratégie industrielle du médicament en France. Il y a certainement des choses à faire. On peut débattre de la durée entre la fin de la recherche et la mise en vente du produit.
La réalité, c’est l’existence d’aides en faveur de la recherche et l’innovation. Le crédit d’impôt recherche est particulièrement utilisé par l’industrie du médicament. Cela l’empêche-t-elle de délocaliser ? Malgré le CICE et le crédit d’impôt recherche, elle délocalise non pas simplement la production dans des pays à bas coût, mais aussi ses laboratoires de recherche et développement. Il n’y en a jamais assez ! Il faut encore remettre de l’argent et de la dérégulation et les laisser gérer les prix, tout ça payé par la sécurité sociale, qui est ensuite déficitaire !
C’est tout de même le rôle de l’État d’être l’arbitre, en dernier ressort, entre l’industrie et l’intérêt général. Je ne comprends pas que, dans la période actuelle, pleine d’incertitudes, notamment pour ce qui concerne la manière dont les marchés régulent l’approvisionnement des médicaments et l’implantation de la production, vous proposiez d’abandonner cette régulation.
Pour notre part, nous sommes favorables à un pôle public du médicament, et nous aurons un débat sur ce sujet.
Mme la présidente. La parole est à Mme Annie Delmont-Koropoulis, pour explication de vote.
Mme Annie Delmont-Koropoulis. C’est toujours le même discours…
Avec cet amendement, il s’agit simplement de négociations conventionnelles entre le CEPS – s’il n’a pas de lien avec le Gouvernement, je me demande qui peut en avoir… – et les syndicats des entreprises pharmaceutiques.
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. J’ai donné l’avis de la commission, qui est un avis favorable.
Personnellement, j’entends bien ce que dit Mme Lienemann. Le contenu de l’accord-cadre, qui n’a d’ailleurs qu’une existence facultative, est de normer le plus légèrement possible les négociations entre l’industriel et le CEPS au moment de la définition des remises. Il ne me paraît pas souhaitable d’y faire figurer un élément susceptible d’infléchir a posteriori le montant de ces dernières.
Il convient de remettre les choses en place. Chacun son rôle ! Est-ce à l’accord-cadre de définir ce qui relève de l’impôt ? Car les exonérations relèvent effectivement de l’État et, donc, du Gouvernement.
Pour autant, je m’en remets à la commission, n’ayant pas la science infuse. Dans la mesure où il s’agit d’un sujet délicat et compliqué, j’écoute les uns et les autres. Toutefois, à un moment donné, il faut bien trancher. Ce qui existe aujourd’hui me paraît de qualité. On peut toujours l’amender, si vous le voulez, mais faites attention à ne pas modifier les responsabilités.
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Je réitère l’avis défavorable du Gouvernement.
Le texte proposé dans l’article dont nous discutons prévoit que le taux d’abattement sera fixé par un barème déterminé par voie d’arrêté. Celui-ci permettra seulement de cadrer dans les grandes largeurs, par des fourchettes, ce taux d’abattement, qui doit rester, cela nous semble important, fixé par la loi. Il donnera de la clarté et de la prévisibilité, conformément aux attentes des entreprises.
Pour autant, une souplesse dans la modulation des taux d’abattement sera conservée, pour chaque entreprise pharmaceutique concernée par le déclenchement de la clause de sauvegarde. Ainsi, ces taux seront bien fixés au travers de négociations conventionnelles entre les syndicats représentatifs des entreprises du médicament et le Comité économique des produits de santé.
Comme le dit M. le rapporteur général, chacun son rôle. L’équilibre actuel, qui nous semble le bon, ne doit pas être modifié.
Mme la présidente. L’amendement n° 355 rectifié, présenté par MM. Savary et Bascher, Mmes Berthet et Bonfanti-Dossat, MM. Bonne, Boré, Bouchet, Brisson, Calvet, Cardoux, Chaize, Charon et Cuypers, Mmes L. Darcos et Delmont-Koropoulis, M. de Nicolaÿ, Mme Deromedi, M. Détraigne, Mmes Di Folco, Estrosi Sassone et Férat, M. B. Fournier, Mme Garriaud-Maylam, M. Genet, Mme Goy-Chavent, M. Gremillet, Mmes Gruny et Lavarde, MM. Le Gleut, Lefèvre, H. Leroy et Longuet, Mme Malet, M. Mandelli, Mme M. Mercier, M. Milon, Mme Muller-Bronn et MM. Paccaud, Pellevat, Piednoir, Pointereau, Rapin, Sautarel, Savin, Sido, Sol, Tabarot et Vogel, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – Le III de l’article L. 162-17-3 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Ce rapport inclut un état des lieux de l’industrie du médicament et des produits de santé en France, indiquant notamment le nombre d’emplois créés et supprimés dans l’année, ainsi que les éventuelles ouvertures et fermetures de sites industrie. »
La parole est à M. René-Paul Savary.
M. René-Paul Savary. Le CEPS doit inclure, dans son rapport d’activité, des éléments supplémentaires.
Nous avons entendu le plaidoyer de Mme Lienemann, qui n’a pas tort. Si les laboratoires pharmaceutiques se sont éloignés de la France, c’est parce que les discussions n’aboutissaient pas, ce qui nuisait à la rentabilité économique. On allait voir ailleurs, où on était mieux rémunéré.
Il nous paraît donc important que le CEPS, qui fixe le prix des médicaments, la clause de sauvegarde et les remises, prenne en compte les efforts des entreprises qui ont leur siège social en France et qui créent des emplois. C’est la raison pour laquelle nous souhaitons que figurent au sein de son rapport annuel d’activité un certain nombre d’explications concernant ses décisions. Ces dernières doivent tenir compte du nombre d’emplois créés ou supprimés dans l’année, ainsi que des éventuelles ouvertures et fermetures de sites industriels. Dans le cadre de la crise sanitaire actuelle, il paraît logique que ces éléments soient pris en considération.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. L’avis de la commission est plutôt favorable, mais je demande, une fois n’est pas coutume, l’avis du Gouvernement sur cet amendement, qui vise à préciser le contenu du rapport remis chaque année au Parlement par le Comité économique des produits de santé en demandant qu’y soient inclus des éléments relatifs à la politique industrielle du médicament. L’enjeu est de taille – René-Paul Savary vient de le rappeler – s’agissant de la localisation, des fermetures et des ouvertures de sites industriels.
Il serait intéressant de savoir, monsieur le secrétaire d’État – j’espère que vous pourrez nous donner des éclaircissements –, si le CEPS est ou non le bon véhicule. Il est en tout cas important, dans la phase actuelle, de pouvoir disposer d’un état des lieux sur l’avenir de l’industrie pharmaceutique.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Le CEPS ne nous semble pas le bon véhicule pour aborder ce sujet crucial, qui est une priorité du Gouvernement. Cette instance, vous le savez, a pour mission, fixée par la loi, de déterminer les prix des médicaments et les tarifs des dispositifs médicaux à usage individuel pris en charge par l’assurance maladie. Il nous semble donc que les éléments supplémentaires que vous souhaitez voir figurer dans son rapport dépassent largement la mission qui lui a été confiée.
Si je dis « largement », c’est parce que ce sujet crucial doit faire l’objet d’une approche globale qui va bien au-delà des seules compétences et du seul champ d’intervention du CEPS. Cette question relève davantage des compétences du ministre de l’économie, qui, au nom du Gouvernement, a d’ores et déjà pu faire adopter un certain nombre de mesures, depuis le début du quinquennat, pour favoriser l’implantation des entreprises en France.
L’implantation des entreprises en France ne dépend pas que du niveau auquel est fixé le prix des médicaments ; il ne faudrait pas qu’un tel amalgame s’instaure : elle dépend de beaucoup d’autres facteurs, des financements offerts aux projets de recherche, par exemple, des mesures prises en soutien aux essais cliniques, du crédit d’impôt recherche ou encore des questions de main-d’œuvre et des taxes applicables aux entreprises, autant de champs sur lesquels le Gouvernement est intervenu, depuis le début de ce quinquennat, pour soutenir les industries en France.
Pour toutes ces raisons, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est maintenant l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Si j’ai bien compris, monsieur le secrétaire d’État, vous nous dites que le Comité économique des produits de santé ne peut pas fournir à notre intention les éléments que nous cherchons à recueillir. En conséquence, il ne s’agit pas du bon véhicule. Mais il faut nous dire quel est le bon véhicule ! Si c’est Bercy, dont acte ! Mais nous aimerions que Bercy nous communique ces éléments.
Jusqu’à présent, nous n’avons pas le sentiment que tout soit clair et net. C’est pourtant très important. Les interrogations sont nombreuses, aujourd’hui, sur les pénuries de médicaments notamment, sans parler des autres dispositifs médicaux. Nous souhaiterions donc savoir où trouver ces informations, si vous en disposez.
Mme la présidente. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.
M. René-Paul Savary. Merci, monsieur le rapporteur général, de rester fidèle à votre engagement et de continuer à soutenir cet amendement.
J’entends bien, monsieur le secrétaire d’État : le CEPS n’est certainement pas le bon véhicule. Mais j’ai l’impression que, ce soir, vous recourez à cet argument sur beaucoup d’amendements…
Que nous disent les laboratoires quand nous les rencontrons ? Catherine Deroche le sait tout aussi bien que moi, puisque, travaillant activement, nous avons notamment organisé, avec Corinne Imbert, avec d’autres, un certain nombre d’auditions de biotechs, grandes et petites, et essayé de promouvoir des dispositifs comme celui de l’utilisation testimoniale – vous voyez que nous essayons.
Or que nous disent ces sociétés ? Qu’en France elles rencontrent des difficultés, du point de vue de la recherche notamment. Ailleurs, des milliards sont mis sur la table pour la recherche ; en France, le compte n’y est pas. Souvent, quand une société française trouve une molécule, les essais cliniques sont devenus d’une complexité telle qu’elle les fait faire dans d’autres pays. Si on ajoute à ce tableau l’intervention très serrée du CEPS, dont la vision est strictement économique – on peut le comprendre, il est payé pour ça : faire des économies pour la sécurité sociale –, le résultat auquel on parvient est que ces entreprises vont s’installer ailleurs.
Il s’agit souvent de multinationales ; même lorsque le siège est en France, le dirigeant français finit par se dire, après qu’il est allé frapper à la porte d’autres pays où il voit que les choses se passent différemment : « En France, c’est trop compliqué ? Alors, délocalisons ! » Et la tarification fixée par le CEPS entre en ligne de compte dans les critères utilisés par ces entreprises pour décider si elles restent ou non en France. L’arbitrage dépasse en effet largement le cadre français, et même le cadre européen : il est mondial.
Il faut donc aller plus loin, et trouver le bon véhicule. Je souhaite malgré tout que cet article soit amendé afin que la discussion puisse avoir lieu en commission mixte paritaire et qu’on nous dise quelles perspectives on peut avoir pour l’avenir s’agissant de faire cesser ce départ d’entreprises vers d’autres pays.
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Vous pouvez tout à fait adopter cet amendement et demander au CEPS d’inclure dans son rapport tous ces éléments, mais, sans vouloir parler pour lui, il ne sera tout simplement pas en mesure de vous faire un état des lieux exhaustif de l’impact de la politique du médicament, car il n’en aura qu’une vision parcellaire.
Ce dont nous parlons relève bien du prix, mais pas uniquement : il y va également – vous l’avez dit vous-même –, plus globalement, de la politique de recherche que nous menons. Certains éléments concernent le CEPS, d’autres concernent le ministère que je représente aujourd’hui, celui des solidarités et de la santé, d’autres encore le ministère de l’économie et des finances – un certain nombre de dispositions, d’ailleurs, se trouvent plutôt dans le projet de loi de finances que dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale. Cette politique se trouve donc en différents endroits.
Je me garderai bien de donner des conseils à la Haute Assemblée, mais elle dispose, me semble-t-il, d’un certain nombre d’instruments, d’outils, d’évaluation des politiques publiques menées par le Gouvernement. La commission des affaires sociales peut ainsi déclencher des missions d’information pour avoir un regard sur cette question, qui est importante et qui constitue, je l’ai dit, une priorité du Gouvernement.
Je dis simplement, en tout cas, que le CEPS ne sera pas en mesure de vous donner l’ensemble des informations dont vous souhaitez disposer, car ce sujet dépasse très largement son seul champ de compétences, c’est-à-dire la question du prix des médicaments.
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour explication de vote.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Notre collègue Savary pose une question tout à fait importante. Le bon vecteur est-il celui qu’il propose ? Ce n’est pas certain. Néanmoins, autant je suis critique sur toute une série de régulations et sur le rôle de l’État en général, autant je pense que nous devons réfléchir, dans ce pays, à des stratégies de filière pour le médicament. Bien sûr, dans certains cas, seul est en cause l’appât du gain – on connaît ça… –, mais il existe aussi des blocages, qu’il faut analyser – certains ont été cités.
J’espère que le haut-commissaire au plan, M. Bayrou, va s’attaquer à des débats comme celui-ci : comment planifier la filière du médicament en France ? Comment lui donner tous les moyens de se développer, de ne pas délocaliser, et même de relocaliser ? Il y a là des sujets majeurs.
Il est vrai néanmoins que, parmi d’autres critères, celui des conditions de la recherche notamment, il y a le critère du prix. Or je ne suis pas sûre que l’obsession du moindre coût du médicament, indifféremment produit en France ou ailleurs, donne toujours le bon résultat. Là où il s’agit de construire des systèmes d’évaluation et de fixation des taux de remboursement et des prix, il me semble qu’avec un peu d’ingéniosité, sans tomber dans le protectionnisme étroit, on pourrait quand même, du point de vue des remboursements, favoriser un juste prix pour ce qui est produit en France et être plus exigeant pour ce qui ne l’est pas. Or, paradoxalement, c’est plutôt l’inverse qui se passe : comme on nous dit que les autres pays ne veulent pas nous vendre à moins de nous vendre cher, nous acceptons de payer cher à l’importation et nous serrons le kiki aux entreprises françaises.
C’est un travail assez pointu qui doit être entrepris ; il nécessite des outils publics de précision, au plus près des entreprises partenaires.
Je ne crois pas que l’adoption de l’amendement de M. Savary puisse régler tous ces problèmes ; je le prends comme un amendement d’alerte. Il faut, collectivement, le Gouvernement, le haut-commissaire au plan, l’ensemble de celles et de ceux qui espèrent maintenir et développer une filière du médicament dans ce pays, se mettre autour de la table pour trouver une solution avec les partenaires sociaux. Je note d’ailleurs que, dans la structure proposée, les partenaires sociaux sont quasi absents : les salariés, ça n’existe pas… C’est déjà une carence ! En tout cas, l’enjeu est extrêmement important et urgent.
Mme la présidente. La parole est à Mme Martine Berthet, pour explication de vote.
Mme Martine Berthet. Je soutiendrai cet amendement. Si une évaluation dans le cadre du rapport du CEPS ne réglera pas tout, celui-ci n’étant pas forcément en mesure de tout prendre en compte, ce sera déjà, néanmoins, un premier pas, qu’il est important de faire. Cessons de nous contenter de dire que nous ne voulons plus voir nos industries pharmaceutiques délocalisées, et donnons des signaux !
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 17, modifié.
(L’article 17 est adopté.)
Articles additionnels après l’article 17
Mme la présidente. Je suis saisie de sept amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 607 rectifié ter, présenté par Mmes Monier, Blatrix Contat, Jasmin, Préville et Conway-Mouret et MM. Tissot, Redon-Sarrazy et Stanzione, est ainsi libellé :
Après l’article 17
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Au a de l’article L. 138-2 du code de la sécurité sociale, le taux : « 1,75 % » est remplacé par le taux : « 1 % ».
II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Victoire Jasmin.
Mme Victoire Jasmin. L’initiative de cet amendement proposé par Mme Monier revient à la chambre syndicale de la répartition pharmaceutique. Dans le cadre de la situation d’urgence, les grossistes-répartiteurs proposent, en attendant la refonte de leur marge et de leur fiscalité, de réduire le taux de la contribution due par chaque entreprise du secteur à 1 % du chiffre d’affaires. La somme dégagée serait de 40 millions d’euros pour ce secteur, qui représente 12 000 emplois en France.
Mme la présidente. Les six amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 276 rectifié quater est présenté par M. Milon, Mmes Deromedi et Dumas, MM. Grand, Burgoa, Calvet, Brisson, Charon, Dallier et de Legge, Mme Garriaud-Maylam, MM. D. Laurent, H. Leroy et Mandelli, Mme Richer, M. Sautarel, Mme L. Darcos, MM. J.B. Blanc et Bonne, Mmes Puissat et Malet, MM. Sol, Rapin, Piednoir, Pointereau et Houpert, Mme Delmont-Koropoulis et MM. Gremillet, Regnard et Babary.
L’amendement n° 411 rectifié est présenté par M. Henno, Mmes Guidez, Doineau, Sollogoub et Jacquemet, MM. Duffourg, Le Nay et Cazabonne, Mme Morin-Desailly et les membres du groupe Union Centriste.
L’amendement n° 633 est présenté par M. Bonhomme.
L’amendement n° 675 rectifié quater est présenté par Mme V. Boyer, MM. Boré, Le Rudulier et Frassa, Mme Micouleau, M. Daubresse, Mmes Procaccia et Joseph, MM. Pemezec, B. Fournier et Bouchet, Mmes F. Gerbaud, Drexler et Thomas et MM. Cuypers et Genet.
L’amendement n° 853 rectifié ter est présenté par Mme Berthet, M. Bonneau, Mmes Lassarade et Gruny, MM. Savary et Belin, Mmes Imbert et Chauvin, MM. Saury, Chasseing et Decool, Mme Di Folco et M. Bouloux.
L’amendement n° 878 rectifié quinquies est présenté par Mme Guillotin, MM. Artano, Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère, M. Corbisez, Mme N. Delattre, MM. Fialaire, Gold et Guérini, Mme Pantel, MM. Requier, Roux et Menonville, Mme Mélot et MM. Lagourgue, A. Marc, Wattebled et Malhuret.
Ces six amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 17
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Au a de l’article L. 138-2 du code de la sécurité sociale, le taux : « 1,75 % » est remplacé par le taux : « 1,4 % ».
II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Alain Milon, pour présenter l’amendement n° 276 rectifié quater.
M. Alain Milon. Il est défendu.
Mme la présidente. La parole est à M. Olivier Henno, pour présenter l’amendement n° 411 rectifié.
M. Olivier Henno. Défendu.
Mme la présidente. L’amendement n° 633 n’est pas soutenu.
La parole est à Mme Valérie Boyer, pour présenter l’amendement n° 675 rectifié quater.
Mme Valérie Boyer. La crise sanitaire de la covid-19 est venue percuter très fortement l’organisation de notre système de soins, avec une intensité et une violence inédites. La chaîne d’approvisionnement en médicaments, dont les entreprises de la répartition pharmaceutique, bien qu’ignorées du grand public, sont pourtant la cheville ouvrière, a été en première ligne et mise à très rude épreuve.
Dans ce contexte exceptionnel, le secteur de la répartition a fait preuve d’une mobilisation sans précédent pour répondre à l’ensemble des demandes des pouvoirs publics dans la gestion de la crise sanitaire, en assurant notamment, avec les pharmaciens, la distribution de plus de 600 millions de masques chirurgicaux et FFP2.
Outre ces missions supplémentaires assurées tout au long de la crise, les entreprises de la répartition pharmaceutique jouent au quotidien un rôle crucial dans la chaîne du médicament en assurant l’approvisionnement des 21 000 pharmacies françaises, sur l’ensemble du territoire. Leurs missions font l’objet d’obligations de service public encadrées par l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé : elles doivent disposer d’un stock de médicaments correspondant à au moins quinze jours de consommation habituelle, livrer l’ensemble des pharmacies d’officine dans un délai de vingt-quatre heures maximum après chaque commande et disposer d’au moins neuf médicaments sur dix commercialisés en France.
Si je rappelle tous ces éléments, c’est parce qu’aujourd’hui cette profession est pénalisée par une taxe qui est devenue antiéconomique et confiscatoire. Son poids est de 185 millions d’euros, à rapprocher du montant des pertes annuelles du secteur : 23 millions d’euros en 2017, 46 millions d’euros en 2018, 65 millions d’euros en 2019 – les pertes de 2020 devraient être elles aussi significatives, alors que plusieurs entreprises ont déjà dû mettre en place des plans de sauvegarde de l’emploi.
Depuis plusieurs années maintenant, les professionnels de la répartition alertent sur la situation économique de leur secteur, qui s’aggrave chaque année et en est aujourd’hui à un point très critique. Ils accumulent les pertes en raison d’une rémunération réglementée qui ne correspond plus aux coûts que le secteur doit supporter, à quoi s’ajoute, comme je le disais, un modèle fiscal antiéconomique et confiscatoire.
Pourtant, des discussions existent avec les pouvoirs publics depuis l’automne 2018 ; elles ont notamment permis de définir de nouvelles règles de rémunération, mais elles ne corrigent que très partiellement ces déséquilibres et laissent le secteur dans une situation de précarité.
Ces derniers jours, les pouvoirs publics sont de nouveau confrontés à la difficulté de devoir assurer en urgence la distribution de produits tels que les tests antigéniques de dépistage du covid-19 et les stocks de vaccin antigrippal, qui manquent un petit peu partout.
Mme la présidente. Votre temps de parole est écoulé, ma chère collègue.
Mme Valérie Boyer. Nous proposons donc de diminuer le taux de la taxe à laquelle sont assujettis les grossistes-répartiteurs.
Mme la présidente. La parole est à Mme Martine Berthet, pour présenter l’amendement n° 853 rectifié ter.
Mme Martine Berthet. Je veux juste rappeler combien il est important de soutenir le secteur de la répartition pharmaceutique ; ce soutien permet le maintien des pharmacies rurales et de ce maillage si important dans un contexte de désertification médicale.
Mme la présidente. La parole est à Mme Véronique Guillotin, pour présenter l’amendement n° 878 rectifié quinquies.
Mme Véronique Guillotin. Il est défendu.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Il s’agit du taux de la taxe sur le chiffre d’affaires des grossistes-répartiteurs. Je rappelle qu’en 2018 ce chiffre d’affaires était à peu près de 17 milliards d’euros ; il se traduisait pour la profession par un excédent brut d’exploitation de 200 millions d’euros.
Les grossistes-répartiteurs estiment aujourd’hui qu’un allégement du taux de cette fiscalité sur leur chiffre d’affaires à 1,4 % représenterait un signal encourageant. La commission a donc émis un avis favorable sur les amendements qui visent à instaurer un tel taux et un avis défavorable sur celui de Mme Monier, qui tend à fixer ce taux à 1 %.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Je demande le retrait de l’ensemble de ces amendements ; à défaut, l’avis sera défavorable.
Il y a deux aspects à envisager concernant ce secteur : les mesures d’urgence qu’il convient de prendre et les difficultés plus structurelles, dont le Gouvernement a totalement conscience.
Rappelons, vous l’avez fait, le rôle qu’ont joué les grossistes-répartiteurs dans le cadre de la crise sanitaire que nous traversons. Ils ont apporté leur contribution sur des missions exceptionnelles, comme la sénatrice Valérie Boyer, dont je salue l’arrivée au Sénat, le rappelait : la livraison des masques ou encore de certains médicaments aux officines, afin d’éviter les déplacements de patients.
Ces missions ont donné lieu à des prises en charge spécifiques. Les missions relatives aux masques ont engendré, pour les grossistes-répartiteurs, des frais importants, que nous avons décidé de couvrir par une augmentation des indemnités : l’indemnité versée pour la distribution de chaque boîte de cinquante masques passe à 1,75 euro et une indemnité de 15 000 euros par semaine est prévue pour leurs missions de livraison de médicaments entre hôpitaux et officines.
Afin de compenser leur baisse d’activité alors qu’ils subissent des coûts fixes, une mesure d’urgence de 30 millions d’euros a en outre été décidée, via une revalorisation des marges, dans l’arrêté publié le mois dernier. Cette revalorisation s’appliquera dès le dernier trimestre de 2020. Ce montant a d’ores et déjà été pérennisé pour les années suivantes. Il y a là, typiquement, à la fois une mesure d’urgence, destinée à compenser les pertes de chiffres d’affaires alors que les coûts fixes, eux, n’ont pas disparu, et, d’ores et déjà, une mesure structurelle destinée à faire face aux difficultés structurelles du secteur.
Nous n’ignorons pas ces difficultés structurelles ; nous apportons des réponses pour y remédier. Outre ces 30 millions d’euros annuels, qui sont donc pérennisés, nous étudions différentes pistes pour rendre la marge de ces acteurs moins sensible à l’évolution du prix des médicaments, notamment par la mise en place d’une rémunération par forfait pour certaines missions importantes. La baisse de contribution qu’un certain nombre d’entre vous proposent viendrait percuter ces travaux plus globaux et, par ailleurs, affecterait les ressources de l’assurance maladie sans forcément constituer une solution pérenne aux difficultés du secteur, puisqu’une telle baisse bénéficierait tant à la vente directe qu’aux grossistes-répartiteurs.
Sachez enfin que nous rencontrerons la semaine prochaine, comme nous nous y étions engagés, la chambre syndicale de la répartition pharmaceutique, afin de continuer à travailler sur ces mesures structurelles de soutien au secteur.
Voilà le cadre global, mesures d’urgence et mesures structurelles, que le Gouvernement met en place.
Mme la présidente. La parole est à Mme Valérie Boyer, pour explication de vote.
Mme Valérie Boyer. Si j’ai bien compris ce que vous venez de dire, monsieur le secrétaire d’État, vous entendez nos propositions, mais vous déciderez la semaine prochaine, en dehors du Parlement, avec les grossistes-répartiteurs, de faire quelque chose qui échappe à la décision que nous allons prendre aujourd’hui. La décision ne va donc pas se faire au Parlement ; elle va se faire ailleurs.
Cela signifie que nous sommes obligés de rouvrir la longue discussion que nous avons eue tout à l’heure sur le rôle du Parlement. Vous nous dites que vous entendez les efforts qui ont été faits par les grossistes-répartiteurs, que vous entendez ce que nous proposons, mais que vous allez plutôt discuter avec la profession, la semaine prochaine, et que, peut-être, si nous sommes gentils, vous nous tiendrez au courant ! À quoi cela sert-il, dans ces conditions, que nous proposions des amendements sur lesquels nous avons travaillé ?
Je ne suis pas du tout d’accord avec cette façon de travailler ; sur toutes les travées de cet hémicycle, mes collègues sont intervenus pour dire que ces méthodes de travail devaient cesser. Il faut respecter le Parlement !
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Ce n’est pas ce que j’ai dit, madame la sénatrice. J’ai dit, d’une part, que le Gouvernement a d’ores et déjà pris un certain nombre de mesures – merci de le rappeler – et, d’autre part, que des discussions et des réflexions sont déjà cours avec les personnes concernées. Je dis juste, donc, qu’il y a peut-être d’autres solutions possibles que celles proposées par les sénateurs, qui d’ailleurs n’imposent pas de passer par la loi, car tout ne passe pas forcément par la loi, et qui peuvent être émises ou partagées par les premiers concernés, ou naître de discussions avec eux. Je n’ai rien dit de plus, et ce dans le plus grand respect de la représentation nationale.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 607 rectifié ter.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 276 rectifié quater, 411 rectifié, 675 rectifié quater, 853 rectifié ter et 878 rectifié quinquies.
(Les amendements sont adoptés.)
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 17.
L’amendement n° 287 rectifié quinquies, présenté par M. Milon, Mmes V. Boyer, Deromedi et Dumas, MM. Grand, Burgoa et Calvet, Mme Berthet, MM. Brisson, Charon, Dallier et de Legge, Mme Garriaud-Maylam, MM. D. Laurent, H. Leroy et Mandelli, Mme Richer, MM. Sautarel, Piednoir et Savary, Mme Delmont-Koropoulis et MM. Regnard et B. Fournier, est ainsi libellé :
Après l’article 17
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Les deux premiers alinéas de l’article L. 138-19-10 du code de la sécurité sociale, sont ainsi rédigés :
« Le montant total de la contribution est calculé comme suit :
«
Montant remboursé par l’assurance maladie pour l’ensemble des entreprises redevables (MR) |
Taux de la contribution (exprimé en % de la part du montant remboursé) |
Montant remboursé par l’assurance maladie supérieur à Z et inférieur ou égal à Z multiplié par 1,01 |
40 % |
Montant remboursé par l’assurance maladie supérieur à Z multiplié par 1,01 et inférieur ou égal à Z multiplié par 1,02 |
50 % |
Montant remboursé par l’assurance maladie supérieur à Z multiplié par 1,02 |
60 % |
».
II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Alain Milon.
M. Alain Milon. Monsieur le secrétaire d’État, mes remarques ne sont nullement tournées contre vous. Je vous tiens en grande estime et amitié. Cependant, je regrette profondément que, dans toutes ces discussions qui ont trait à la santé, nous n’ayons pas en face de nous, à vos côtés, le ministre de la santé.
J’en viens à mon amendement.
L’article 17 précise le montant du taux Z pour 2021 concernant la clause de sauvegarde sur la liste en sus des dispositifs médicaux. Toutefois, le dispositif mis en place à l’occasion de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2020 ne prévoit pas de mécanisme permettant une graduation du taux de contribution en fonction de plusieurs seuils de dépassement du taux Z, adaptée au tissu économique du secteur du dispositif médical, constitué en majorité de PME, TPE et ETI.
Le présent amendement vise à intégrer ce point en instaurant une progressivité de la contribution pour la clause de sauvegarde relative aux dispositifs médicaux de la liste en sus.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. La commission des affaires sociales a émis un avis favorable sur l’amendement de M. Milon visant à instaurer un barème progressif.
L’argument d’un parallélisme avec la clause de sauvegarde des médicaments, souligné dans l’exposé des motifs, est certes séduisant, mais nous fait oublier que, contrairement aux médicaments, la dynamique de dépenses des dispositifs médicaux est beaucoup plus importante et nettement supérieure au barème de l’Ondam. La Cour des comptes, dans son récent rapport, a souligné l’importance de ce sujet et nous a conviés à la plus grande vigilance. Ce dispositif, selon elle, est incomplet, faiblement efficace, mais présente le mérite de réguler les dépenses des hôpitaux.
Pour toutes ces raisons, et tout en tenant compte des réserves de la Cour des comptes, je le répète, nous émettons un avis favorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Monsieur le sénateur Milon, je vais essayer d’être aussi clair et convaincant que M. le ministre des solidarités et de la santé.
Cet amendement vise à intégrer une progressivité dans le déclenchement de la clause de sauvegarde sur les dispositifs médicaux. Cette mesure avait fait l’objet, déjà l’année dernière – vous l’avez évoqué de manière incidente –, de nombreux débats. Le Gouvernement avait émis un avis défavorable, et cet amendement avait été rejeté. Par souci peut-être de constance, l’avis du Gouvernement sera également défavorable cette année, pour des raisons de fond que je me permets d’exposer à nouveau.
Vous faites une analogie avec le médicament. Les principes et objectifs sont évidemment les mêmes. Dispositifs médicaux et médicaments diffèrent cependant sur des points majeurs.
Tout d’abord, la clause sur les dispositifs médicaux porte sur des montants remboursés et non sur le chiffre d’affaires. Ensuite, elle vise un champ restreint, à savoir les dispositifs médicaux onéreux de la liste en sus seulement, contrairement aux médicaments, dont la clause porte sur une base très large. Le ministre avait lui-même renoncé à l’extension du périmètre de la clause, notamment pour préserver le secteur. Enfin, la clause sur les dispositifs médicaux fixe un taux de déclenchement à 3 %, tandis qu’il s’élève à 0,5 % pour le médicament. La comparaison nous semble rencontrer sa limite. Il est par ailleurs peu probable que la clause ne se déclenche en 2020.
Pour autant, je partage avec vous la volonté d’engager avec le secteur des dispositifs médicaux des échanges un peu plus structurés que ceux que nous avions, encore aujourd’hui même, de façon un peu informelle mais bien réelle. Il s’agirait d’examiner dans quelle mesure nous pourrions proposer des évolutions. Aujourd’hui, le Gouvernement et les acteurs n’ont pas trouvé de consensus. Nous proposons donc d’engager des discussions plus structurées pour évoquer la question de la régulation des dispositifs médicaux.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 287 rectifié quinquies.
(L’amendement est adopté.)
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 17.
Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 351 rectifié ter, présenté par MM. Savary, Retailleau et Bascher, Mmes Berthet et Bonfanti-Dossat, MM. Bonne, Boré, Bouchet, Brisson, Calvet, Cardoux, Chaize, Charon et Cuypers, Mmes L. Darcos, Delmont-Koropoulis et Deromedi, MM. Détraigne et Duplomb, Mme Estrosi Sassone, M. B. Fournier, Mme Garriaud-Maylam, M. Genet, Mme Goy-Chavent, M. Gremillet, Mme Gruny, MM. D. Laurent, Le Gleut, Le Rudulier, Lefèvre, H. Leroy et Longuet, Mme Malet, M. Mandelli, Mme M. Mercier, M. Milon, Mme Noël, MM. Pellevat, Piednoir et Pointereau, Mmes Procaccia et Puissat et MM. Rapin, Regnard, Reichardt, Saury, Sautarel, Savin, Sido et Sol, est ainsi libellé :
Après l’article 17
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le premier alinéa du I de l’article L. 162-16-4 du code de la sécurité sociale est complété par une phrase ainsi rédigée : « La fixation de ce prix tient compte également de considérations de politique industrielle, tels les investissements pour le maintien, la modernisation et le développement de l’outil de production dans l’Union européenne, au Royaume-Uni et en Suisse, les étapes de fabrication des médicaments ou des dispositifs médicaux, dans des sites de production situés dans l’Union européenne, au Royaume-Uni et en Suisse pour les médicaments ou produits de dispositifs médicaux libérés en France et les exportations. »
La parole est à M. René-Paul Savary.
M. René-Paul Savary. Je reviens à la charge avec le CEPS, non plus sur les emplois, mais plutôt pour prendre en considération les politiques industrielles menées par les entreprises. Il s’agit d’élargir le cadre de nos réflexions et de prendre en compte les implantations autour de nous, en Europe et au-delà, puisqu’il nous faut aussi y intégrer le Royaume-Uni et la Suisse, qui ne font pas partie de l’Union européenne.
Nous sommes passés, en dix ans, de la première à la quatrième place des producteurs européens de médicaments. Mme Lienemann l’a bien dit. À force de contracter les prix et de ne pas prendre en compte l’ensemble de la filière économique, les médicaments sont fabriqués ailleurs et nous les rachetons à un prix plus élevé. Quel est le bilan ? Nous sommes perdants. À vouloir trop contracter les prix, nous perdons, et le coût en est plus élevé pour la sécurité sociale.
Je souhaite que la fixation de ce prix tienne compte de considérations de politique industrielle, telles que les investissements pour le maintien, la modernisation et le développement de l’outil de production, dans l’Union européenne, le Royaume-Uni et en Suisse, ainsi que les étapes de fabrication des médicaments ou des dispositifs médicaux – il nous faut prévoir dès maintenant les élargissements à venir – dans des sites de production voisins.
Mme la présidente. L’amendement n° 261 rectifié quinquies, présenté par M. Milon, Mmes V. Boyer, Deromedi et Dumas, MM. Grand, Burgoa et Calvet, Mme Berthet, MM. Brisson, Charon, Dallier et de Legge, Mme Garriaud-Maylam, MM. D. Laurent, H. Leroy et Mandelli, Mme Richer, M. Sautarel, Mme L. Darcos, MM. J.B. Blanc et Bonne, Mmes Puissat et Malet, MM. Sol, Rapin, Piednoir, Savary, Pointereau et Houpert, Mmes Di Folco et Delmont-Koropoulis et MM. Gremillet, Regnard, Babary et B. Fournier, est ainsi libellé :
Après l’article 17
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le premier alinéa du I de l’article L. 162-16-4 du code de la sécurité sociale est complété par une phrase ainsi rédigée : « La fixation de ce prix tient compte également de considérations de politique industrielle, tels les investissements pour le maintien, la modernisation et le développement de l’outil de production dans l’Union européenne, les étapes de fabrication des médicaments dans des sites de production situés dans l’Union européenne pour les médicaments libérés en France et les exportations. »
La parole est à M. Alain Milon.
M. Alain Milon. Mon amendement est sensiblement le même que celui de M. Savary, mais il se limite à l’Union européenne, tandis que celui de M. Savary inclut le Royaume-Uni et la Suisse. Je retire donc mon amendement au profit du sien.
Mme la présidente. L’amendement n° 261 rectifié quinquies est retiré.
Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 351 rectifié ter ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Avis favorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Nous sommes contre l’idée qui consiste à consacrer de nouveaux critères de fixation des prix pour les produits de santé. Vous le savez, monsieur le sénateur, la tarification des produits de santé repose sur la valeur thérapeutique et l’apport clinique pour les patients.
Instaurer le schéma que vous proposez risquerait de nous conduire à des surcoûts indus pour l’assurance maladie, dans la mesure où la fixation des prix reposerait sur des déclarations des entreprises qui ne pourraient faire l’objet de contre-expertises. Les laboratoires seraient incités à déclarer dans notre système, pour le seul maintien de leur implantation, des investissements de plus en plus élevés. Il faudrait ne pas payer cher un médicament inutile, au seul motif que le laboratoire qui le produit aurait investi dans l’Union européenne.
À l’inverse, la localisation de production en France peut aider à la sécurisation des approvisionnements, ce qui est, comme nous le voyons au cours de cette crise, un enjeu majeur.
Votre amendement fait cependant un lien direct entre fixation du prix et implantation des entreprises en France. Une fois encore, la question de l’implantation des entreprises en France dépend de beaucoup d’autres leviers qu’actionne le Gouvernement : le financement des projets de recherche, le soutien des essais cliniques, le crédit d’impôt recherche, etc. L’enjeu des implantations nationales et de leur impact pour la sécurisation des approvisionnements sera travaillé dans l’accord-cadre en cours de négociation avec l’industrie.
Le Gouvernement, pour toutes ces raisons, émet un avis défavorable.
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 17.
Mes chers collègues, nous avons examiné 145 amendements au cours de la journée ; il en reste 406.
La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.
8
Ordre du jour
Mme la présidente. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd’hui, vendredi 13 novembre 2020 :
À neuf heures trente-cinq, quatorze heures trente et le soir :
Suite du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, de financement de la sécurité sociale pour 2021 (texte n° 101, 2020-2021).
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
(La séance est levée le vendredi 13 novembre 2020, à zéro heure trente-cinq.)
nomination de membres d’une éventuelle commission mixte paritaire
La liste des candidats désignés par la commission des affaires sociales pour faire partie de l’éventuelle commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2021 a été publiée conformément à l’article 8 quater du règlement.
Aucune opposition ne s’étant manifestée dans le délai d’une heure prévu par l’article 8 quater du règlement, cette liste est ratifiée. Les représentants du Sénat à cette éventuelle commission mixte paritaire sont :
Titulaires : Mme Catherine Deroche, M. Jean-Marie Vanlerenberghe, Mme Corinne Imbert, MM. René-Paul Savary, Bernard Jomier, Mme Monique Lubin et M. Martin Lévrier ;
Suppléants : M. Philippe Mouiller, Mmes Pascale Gruny, Chantal Deseyne, Élisabeth Doineau, Corinne Féret, Véronique Guillotin et Laurence Cohen.
Pour la Directrice des comptes rendus du Sénat,
le Chef de publication
ÉTIENNE BOULENGER