Sommaire
Présidence de M. Gérard Larcher
Secrétaires :
Mmes Valérie Létard, Catherine Tasca.
2. Éloge funèbre de Michel Houel, sénateur de Seine-et-Marne
Suspension et reprise de la séance
PRÉSIDENCE DE M. Jean-Claude Gaudin
3. Démission et remplacement d'un sénateur
4. Demande d’avis sur un projet de nomination
6. Engagement de la procédure accélérée pour l’examen d'une proposition de loi et d’un projet de loi
9. Candidatures à des commissions
10. Saisine du Conseil constitutionnel
11. Communications du Conseil constitutionnel
12. Composition de la cour d'assises spéciale. – Discussion d'une proposition de loi dans le texte de la commission
Discussion générale :
M. Philippe Bas, auteur de la proposition de loi
M. Michel Mercier, rapporteur de la commission des lois
M. Jean-Jacques Urvoas, garde des sceaux, ministre de la justice
13. Souhaits de bienvenue à une délégation parlementaire
14. Composition de la cour d'assises spéciale. – Suite de la discussion et adoption d’une proposition de loi dans le texte de la commission
Clôture de la discussion générale.
Adoption de l’article unique de la proposition de loi dans le texte de la commission.
15. Autorités administratives indépendantes et autorités publiques indépendantes. – Discussion en troisième lecture et adoption définitive d’une proposition de loi et d’une proposition de loi organique dans les textes de la commission
Discussion générale commune :
M. Jacques Mézard, rapporteur de la commission des lois
Clôture de la discussion générale commune.
Article 1er et annexe – Adoption.
Articles 4, 8, 9, 11 et 17 – Adoption.
Amendement n° 1 de M. Roland Courteau. – Rejet.
Adoption de l’article.
Adoption définitive de la proposition de loi dans le texte de la commission.
Adoption définitive, par scrutin public, de la proposition de loi organique dans le texte de la commission.
16. Nominations à des commissions
17. Retrait d’une question orale
Suspension et reprise de la séance
PRÉSIDENCE DE M. Jean-Pierre Caffet
18. Où va l’État territorial ? Le point de vue des collectivités – Débat organisé à la demande de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation
M. Éric Doligé, rapporteur de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation
M. Bruno Le Roux, ministre de l'intérieur
19. Ordre du jour
compte rendu intégral
Présidence de M. Gérard Larcher
Secrétaires :
Mme Valérie Létard,
Mme Catherine Tasca.
1
Procès-verbal
M. le président. Le compte rendu intégral de la séance du 21 décembre 2016 a été publié sur le site internet du Sénat.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté.
2
Éloge funèbre de Michel Houel, sénateur de Seine-et-Marne
M. le président. Monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, mesdames, messieurs, Michel Houel nous a quittés le 30 novembre dernier. (Mmes et MM. les sénateurs, ainsi que M. le secrétaire d'État chargé de la réforme de l'État et de la simplification, se lèvent.) Le 10 décembre, nous étions rassemblés en la collégiale Notre-Dame de l’Assomption pour une cérémonie émouvante devant une assistance nombreuse. Le temps était gris comme nos cœurs.
Michel Houel était un sénateur chaleureux et estimé de chacune et chacun d’entre nous ; de même, il avait été, durant des décennies, un maire et un élu local apprécié et toujours réélu par ses concitoyens.
Au milieu de ses proches et de ceux qui lui étaient chers, j’ai alors exprimé, en votre nom à tous, notre profonde et commune tristesse. Plusieurs d’entre vous étaient présents : le président du groupe Les Républicains, Bruno Retailleau, nos collègues et anciens collègues sénateurs de Seine-et-Marne, mais aussi des sénateurs d’autres départements, ainsi que Pierre Cuypers, à qui revient désormais la charge de succéder à Michel Houel dans notre hémicycle.
Il m’appartient aujourd’hui de prolonger cet adieu au Palais du Luxembourg, dans notre salle des séances, en présence de sa famille et de ses amis.
Michel Houel était né le 8 novembre 1942, dans le village de Condé-Sainte-Libiaire, dont il fut le premier magistrat de 1977 à 2001. Il connut une enfance heureuse dans ce bourg où il venait en aide à ses parents, qui tenaient le restaurant du village. Il aimait à rappeler, quelques années plus tard, ses débuts professionnels dans de grands restaurants parisiens, où il servit de nombreuses célébrités avant de reprendre le restaurant familial, en 1981, puis de créer son entreprise à Paris.
Cette belle carrière professionnelle n’allait toutefois pas tarder à aller de pair avec un engagement public et politique. À qui l’interrogeait sur ceux qui l’avaient guidé en politique, Michel Houel citait en réponse le général de Gaulle, mais aussi sa mère. Marie-Louise Houel, en effet, avait été élue conseillère municipale dès que les femmes avaient obtenu le droit de vote et d’éligibilité. C’est donc presque naturellement que, suivant ses traces, Michel devint à son tour conseiller municipal de Condé-Sainte-Libiaire en 1971, avant d’en être élu maire six ans plus tard.
Quant au général de Gaulle, Michel Houel était très lié aux gaullistes sociaux et plaidait inlassablement pour l’idée forte de la participation, à laquelle il était très attaché.
Michel Houel, dont l’ambition véritable était d’aider ses concitoyens, était d’abord un élu de proximité. Selon lui, le mandat de maire était celui « qui permet de rester ancré dans la réalité et de toucher du doigt les difficultés rencontrées par les gens ».
Il fut ainsi, pendant vingt-quatre ans, maire de son village natal, avant de devenir, pour quatorze ans, de 2001 à 2015, maire de la belle ville médiévale de Crécy-la-Chapelle, où lui a été rendu hommage, voici un mois, au milieu des siens. Maire passionné, efficace et pragmatique, Michel Houel ne mésestimait pas les difficultés de la tâche.
En tant que président de l’union départementale des maires de Seine-et-Marne, fonction qu’il occupa de 2001 à 2014, il exprimait ainsi ce qui constituait à ses yeux les grandeurs et les servitudes de la fonction de maire : « La difficulté de la fonction est d’être l’homme à tout faire de la République. Les maires doivent être à la fois gestionnaires, bâtisseurs, imaginatifs, sociaux et éducateurs. Mais ce qui est gratifiant et ce que j’apprécie personnellement, c'est de pouvoir redonner de l’espoir à certains. Comme pour les parlementaires, un des rôles du maire est d’être la relation de celui qui n’en a pas. »
Cette proximité essentielle que nos compatriotes attendent, Michel Houel considérait qu’elle était l’essence même du mandat de maire. Il fut un élu local complet, puisqu’il fut aussi membre du conseil général de Seine-et-Marne, dès 1992, où il représentait le canton de Crécy-la-Chapelle ; il fut en outre vice-président de l’assemblée départementale entre 1994 et 2004. Il fut également, de 1993 à 1995, membre du Conseil économique et social, où il siégea avec beaucoup d’intérêt et de compétence à la section des relations économiques extérieures.
C’est donc naturellement que l’élu local dynamique et enthousiaste qu’était Michel Houel se tourna bientôt vers le Parlement. Il en fit une première approche dans le sillage de Guy Drut, député de Seine-et-Marne, dont il fut le suppléant de 1997 à 2002.
C’est le 26 septembre 2004 qu’il nous rejoignit au Palais du Luxembourg. Il fut élu, puis réélu en 2011, sénateur de Seine-et-Marne, aux côtés de Colette Mélot, sur la liste alors conduite par notre ancien collègue Jean Jacques Hyest, auquel Anne Chain-Larché a succédé lors de son entrée au Conseil constitutionnel.
L’élu local pragmatique et réaliste chercha aussitôt à se transformer en un sénateur ayant le sens du concret chevillé au corps. Michel Houel, il l’avouait, connut un certain temps d’adaptation lors de son arrivée au Sénat. Voici comment il décrivait ce qui lui arriva ensuite : « Je me suis aperçu qu’on pouvait faire des lois pour aider les gens. J’ai créé un groupe “artisanat et services” avec quarante sénateurs et je suis retombé dans le concret. J’ai ainsi pu aider les photographes, les taxis, etc. »
Oui, le concret, l’efficace, le vrai : voilà la marque de ce qu’était la manière d’agir de Michel Houel.
Il fut durant plus de douze ans – chacun d’entre nous s’en souvient – un collègue particulièrement actif et estimé. Participant à de nombreux groupes d’études, il fut un membre fidèle et assidu de notre commission des affaires économiques, à laquelle – je puis en porter témoignage – il offrait sa connaissance du terrain, son sens du concret et son pragmatisme.
Ses avis budgétaires annuels sur la recherche et l’enseignement supérieur étaient attendus et appréciés, comme le furent plusieurs de ses travaux de contrôle. Il écrivit ainsi, en 2009, avec notre collègue Marc Daunis, un rapport d’information sur les pôles de compétitivité, dessinant des perspectives qui sont toujours d’actualité pour mettre ces pôles au service d’une politique industrielle qui définisse des secteurs stratégiques pour notre pays.
Il rédigea, plus récemment, un document d’information sur la TVA à taux réduit dans la restauration – domaine qu’il connaissait parfaitement –, pour démontrer que cette disposition n’avait pas été vaine et constituait une avancée significative dans ce secteur professionnel.
Michel Houel fut, cette année encore, le rapporteur convaincu et efficace du projet de loi destiné à rationaliser le maillage territorial des chambres de commerce et d’industrie, ainsi que des chambres des métiers et de l’artisanat.
Ce sens de l’action concrète, qui ne quittait jamais son esprit et qui donnait à sa perception des choses une vision juste des problèmes du pays, était avant tout, j’y insiste, celui d’un humaniste.
Michel Houel, qui souhaitait œuvrer chaque jour au service de ses concitoyens, a consacré à ses mandats d’élu local et de parlementaire l’essentiel de sa vie. Pour cet homme de terrain, l’action politique ne pouvait se concevoir qu’à partir d’un enracinement dans cette « Venise briarde » à laquelle il était tant attaché.
Michel Houel était un élu de référence et une personnalité attachante. Je souhaite redire ici notre émotion au groupe Les Républicains du Sénat, une nouvelle fois endeuillé, ainsi qu’à ses collègues de la commission des affaires économiques.
En cet instant de mémoire, j’exprime aussi à son épouse, à son fils, qui a partagé, lors de la cérémonie du 10 décembre, un remarquable témoignage sur son père, à toute la famille de Michel Houel, ainsi qu’à leurs proches, l’émotion et les condoléances attristées du Sénat de la République, ainsi que ma profonde tristesse personnelle.
La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. André Vallini, secrétaire d’État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, mesdames, messieurs, c’est avec beaucoup de tristesse que nous avons appris, le 30 novembre dernier, que Michel Houel nous avait brutalement quittés, à l’âge de 74 ans.
Né à Condé-Sainte-Libiaire, petite ville de Seine-et-Marne dont il fut le maire pendant plus de vingt ans, Michel Houel eut un parcours riche et diversifié. Formé aux métiers du tourisme, il commença sa carrière en reprenant et en développant le restaurant familial des bords de Marne, dont il fit un établissement réputé et chaleureux. Cette activité professionnelle exigeante ne l’empêcha pas de s’engager activement pour le développement économique de son territoire, en devenant, dès 1967, membre du conseil d’administration de la Fédération hôtelière de la Brie et en cofondant la chambre économique du nord de la Seine-et-Marne.
Devenu conseiller municipal, puis maire de Condé-Sainte-Libiaire et, par la suite, de Crécy-la-Chapelle, il fut un précurseur des politiques locales d’aménagement du territoire. Ainsi, il élabora l’un des tout premiers plans d’occupation des sols du département et il présida le comité départemental d’habitat et d’aménagement rural, la commission de l’environnement du conseil général, ainsi que le conseil d’administration du centre de ressources, d’expertise et de performances sportives d’Île-de-France.
Cet engagement dans la vie locale lui valut d’être élu, en 1992, conseiller général du canton de Crécy-la-Chapelle. Il devint par la suite vice-président du conseil général de Seine-et-Marne, en charge de l’aménagement du territoire et de l’action économique, puis membre du Conseil économique et social. Michel Houel a ainsi beaucoup œuvré pour l’attractivité de son territoire, par une politique active d’accompagnement et d’incitation à l’implantation et au développement des entreprises.
Élu sénateur de Seine-et-Marne en 2004, il poursuivit dans le cadre de ce mandat national son action au service du développement et du maintien de l’activité économique sur tous les territoires, en particulier celle des artisans et commerçants ; il a notamment beaucoup soutenu les professions de photographe ou de chauffeur de taxi.
Fervent défenseur de l’apprentissage, dont il connaissait par expérience toutes les vertus, Michel Houel a également toujours porté un grand intérêt à l’artisanat d’art, allant jusqu’à lui consacrer un salon permanent dans sa commune de Crécy-la-Chapelle. Grand amateur d’art, il a aussi fait de cette commune un lieu d’ouverture culturelle, par l’organisation de nombreuses manifestations réputées.
Mesdames, messieurs les sénateurs, le parcours de Michel Houel démontre une force d’engagement et une personnalité qu’il faut aujourd’hui saluer. Humaniste – vous l’avez souligné, monsieur le président –, toujours à la recherche du meilleur consensus, Michel Houel était unanimement apprécié, tout d’abord par ses concitoyens, qui le décrivent tous comme un homme chaleureux, simple, accessible et à l’écoute, mais également par tous ses collègues élus : il a été, pendant près de quinze ans, président de l’union des maires de Seine-et-Marne, qui regroupait la quasi-totalité des maires de ce grand département francilien – plus de 500 élus au total.
Cette personnalité appréciée de tous, d’une grande expérience et d’une vive ouverture d’esprit, a ainsi profondément marqué son territoire, son département et le Sénat. Il a admirablement servi notre pays comme son département.
À son épouse, à son fils, à ses amis, à ses collaborateurs, à l’ensemble de ses concitoyens, j’adresse, au nom du Gouvernement, mes condoléances les plus attristées.
M. le président. Monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, mesdames, messieurs, je vous invite maintenant à partager un moment de recueillement à la mémoire de Michel Houel. (Mmes et MM. les sénateurs, ainsi que M. le secrétaire d'État, observent une minute de silence.)
Conformément à notre tradition, en signe d’hommage à Michel Houel, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à quatorze heures cinquante, est reprise à quinze heures, sous la présidence de M. Jean-Claude Gaudin.)
PRÉSIDENCE DE M. Jean-Claude Gaudin
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
3
Démission et remplacement d'un sénateur
M. le président. M. le Président du Sénat a reçu une lettre de M. Jacques Gautier par laquelle celui-ci se démet de son mandat de sénateur des Hauts-de-Seine, à compter du samedi 31 décembre à minuit.
En application de l’article L.O. 320 du code électoral, il est remplacé par Mme Marie France de Rose, dont le mandat de sénateur des Hauts-de-Seine a commencé le dimanche 1er janvier 2017, à zéro heure.
Au nom du Sénat tout entier, je lui souhaite la plus cordiale bienvenue.
4
Demande d’avis sur un projet de nomination
M. le président. Conformément aux dispositions de la loi organique n° 2010-837 et de la loi n° 2010-838 du 23 juillet 2010 relatives à l’application du cinquième alinéa de l’article 13 de la Constitution et en application de l’article L. 161-42 du code de la sécurité sociale, M. le Premier ministre, par lettre en date du 23 décembre 2016, a demandé à M. le Président du Sénat de lui faire connaître l’avis de la commission du Sénat compétente en matière de santé publique sur le projet de renouvellement du mandat de Mme Agnès Buzin aux fonctions de présidente de la Haute Autorité de santé.
Cette demande d’avis a été transmise à la commission des affaires sociales.
5
Ordre du jour
M. le président. Par lettres en date du 20 décembre 2016, M. Didier Guillaume, président du groupe socialiste et républicain, et M. Jacques Mézard, président du groupe du RDSE, ont fait connaître les sujets qu’ils souhaitaient voir inscrits à l’ordre du jour réservé à leurs groupes du mercredi 1er février 2017.
Acte est donné de ces demandes.
En conséquence, l’ordre du jour du mercredi 1er février 2017 s’établit comme suit :
Mercredi 1er février
De 14 heures 30 à 18 heures 30 :
Ordre du jour réservé au groupe socialiste et républicain :
- Proposition de loi tendant à renforcer les obligations comptables des partis politiques ;
- Nouvelle lecture de la proposition de loi relative au devoir de vigilance des sociétés mères et des entreprises donneuses d’ordre.
De 18 heures 30 à 20 heures et de 21 heures 30 à minuit :
Ordre du jour réservé au groupe du RDSE :
- Proposition de loi visant à mettre en place une stratégie nationale d’utilisation du transport sanitaire héliporté ;
- Débat sur le thème : « Faut-il supprimer l’École nationale d’administration ? »
M. Alain Bertrand. Oui !
M. le président. Nous sommes ici un certain nombre à n'y être jamais entrés… (Sourires.)
Conformément au droit commun, le temps attribué aux orateurs des groupes dans la discussion générale est fixé à une heure.
Le délai limite de dépôt d’amendements de séance sur les propositions de loi est fixé au lundi 30 janvier, à midi.
6
Engagement de la procédure accélérée pour l’examen d'une proposition de loi et d’un projet de loi
M. le président. En application de l’article 45, alinéa 2, de la Constitution, le Gouvernement a engagé la procédure accélérée pour :
- d’une part, l’examen de la proposition de loi relative à la lutte contre l’accaparement des terres agricoles et au développement du biocontrôle, déposée sur le bureau de l’Assemblée nationale le 21 décembre 2016 ;
- d’autre part, l’examen du projet de loi ratifiant l’ordonnance n° 2016-1519 du 10 novembre 2016 portant création au sein du service public de l’emploi de l’établissement public chargé de la formation professionnelle des adultes, déposé sur le bureau de l’Assemblée nationale le 4 janvier 2017.
7
Commission mixte paritaire
M. le président. M. le Président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre la demande de réunion d’une commission mixte paritaire chargée d’élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi ratifiant les ordonnances n° 2016-301 du 14 mars 2016 relative à la partie législative du code de la consommation et n° 2016-351 du 25 mars 2016 sur les contrats de crédit aux consommateurs relatifs aux biens immobiliers à usage d’habitation et simplifiant le dispositif de mise en œuvre des obligations en matière de conformité et de sécurité des produits et services.
Il sera procédé à la nomination des représentants du Sénat à cette commission mixte paritaire selon les modalités prévues par l’article 12 du règlement.
8
Dépôt de documents
M. le président. M. le Président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre :
- le rapport portant sur l’évaluation des contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens ;
- le rapport de contre-expertise de l’évaluation socio-économique du projet d’augmentation de puissance du supercalculateur de Météo-France, accompagné de l’avis du commissariat général à l’investissement ;
- l’avenant n° 5 à la convention du 29 juillet 2010 entre l’État et l’Agence nationale de la recherche, relative au programme d’investissements d’avenir, action « Valorisation – Instituts Carnot » ;
- le rapport d’évaluation de la contribution au titre des médicaments destinés au traitement de l’hépatite C (dispositif W) ;
- le rapport relatif à l’application de la loi n° 2015-1779 du 28 décembre 2015 relative à la gratuité et aux modalités de réutilisation des informations du secteur public ;
- le rapport recensant au 31 décembre de l’année précédente le volume des emprunts structurés souscrits par les collectivités territoriales et les organismes publics ;
- l’avenant au contrat d’objectifs et de moyens de Radio-France pour la période 2015-2019 ;
- le tableau de programmation des mesures d’application de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique ;
- le projet de contrat d’objectifs et de moyens 2017-2019 de l’Institut français.
Acte est donné du dépôt de ces rapports.
Ils ont été transmis aux commissions permanentes compétentes.
9
Candidatures à des commissions
M. le président. J’informe le Sénat que le groupe Les Républicains a fait connaître à la présidence le nom des candidats qu’il propose pour siéger :
- à la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, en remplacement des M. Jacques Gautier, dont le mandat a cessé ;
- à la commission de la culture, de l’éducation et de la communication, en remplacement de M. Pascal Allizard, démissionnaire.
Ces candidatures ont été publiées et les nominations auront lieu conformément à l’article 8 du règlement.
10
Saisine du Conseil constitutionnel
M. le président. Le Conseil constitutionnel a informé le Sénat qu’il avait été saisi le 27 décembre 2016, en application de l’article 61, alinéa 2, de la Constitution, par plus de soixante sénateurs et par plus de soixante députés, de la loi relative à l’égalité et à la citoyenneté.
Le texte de la saisine est disponible au bureau de la distribution.
Acte est donné de cette communication.
11
Communications du Conseil constitutionnel
M. le président. Le Conseil constitutionnel a communiqué au Sénat, par courriers en date des 22 et 29 décembre 2016, les textes de décisions statuant sur la conformité à la Constitution :
- de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2017 ;
- de la loi de finances rectificative pour 2016 ;
- et de la loi de finances pour 2017.
Acte est donné de ces communications.
Le Conseil constitutionnel a informé le Sénat, les lundi 26 et vendredi 29 décembre 2016, que, en application de l’article 61-1 de la Constitution, le Conseil d’État lui avait adressé cinq décisions de renvoi de questions prioritaires de constitutionnalité portant :
- sur l’article 1736 du code général des impôts (amende en cas de non-respect des obligations de déclaration des constitutions, modifications ou extinctions de trusts ; 2016-618 QPC) ;
- sur l’article L. 6362-7-1 du code du travail (procédure applicable aux employeurs ne pouvant justifier de la réalité d’actions de formation ; 2016-619 QPC) ;
- sur les termes « ou aux régisseurs de messages publicitaires » figurant au II de l’article 302 bis KG du code général des impôts (inclusion dans l’assiette de la taxe due par les éditeurs de services de télévision des sommes reçues par leurs régisseurs de messages publicitaires ; 2016-620 QPC) ;
- sur l’article L. 8253-1 du code du travail dans sa rédaction issue de la loi du 29 décembre 2012 de finances pour 2013 (cumul de la contribution spéciale et de sanctions pénales en cas d’emploi d’étrangers non autorisés à travailler ; 2016-621 QPC) ;
- et portant sur le I de l’article L. 2333-70 du code général des collectivités territoriales (remboursement du versement transport ; 2016-622 QPC).
Le texte de ces décisions de renvoi est disponible à la direction de la séance.
Acte est donné de ces communications.
12
Composition de la cour d'assises spéciale
Discussion d'une proposition de loi dans le texte de la commission
M. le président. L’ordre du jour appelle la discussion, à la demande du groupe Les Républicains et de la commission des lois, de la proposition de loi relative à la composition de la cour d’assises de l’article 698-6 du code de procédure pénale, présentée par M. Philippe Bas et plusieurs de ses collègues (proposition n° 86, texte de la commission n° 253, rapport n° 252).
Dans la discussion générale, la parole est à M. Philippe Bas, auteur de la proposition de loi.
M. Philippe Bas, auteur de la proposition de loi. Monsieur le président, monsieur le garde des sceaux, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, pourquoi avons-nous déposé cette proposition de loi ?
Je rappelle – vous me pardonnerez de remonter si loin dans le temps – que, lorsque la Cour de sûreté de l’État a été supprimée en 1982, il a fallu créer une juridiction habilitée à juger les crimes contre la sûreté de l’État. À l’époque, le Parlement et le Gouvernement n’ont pas voulu exposer nos concitoyens, membres d’un jury d’assises, aux risques de pressions, lesquelles peuvent être très graves dans certaines affaires.
Une juridiction spéciale a donc été créée, la cour d’assises spéciale, laquelle est exclusivement composée de magistrats prélevés sur les tribunaux de grande instance pendant la durée des assises. Cette cour juge, presque exclusivement d’ailleurs, les crimes terroristes. Son activité s’est concentrée à Paris, les responsabilités du parquet parisien ayant été étendues au fil des années par le législateur à toutes les affaires de terrorisme.
Hélas, les tragiques attentats qui ont endeuillé notre pays ces deux dernières années, ces crimes de masse, ont fait peser de nombreuses contraintes sur la justice. Il nous a fallu, en plein accord avec l’Assemblée nationale et le Gouvernement, modifier la loi pénale à plusieurs reprises. Les moyens du parquet, comme ceux de l’instruction, ont été augmentés en ce qui concerne l’antiterrorisme. Reste le jugement des affaires.
Il est apparu que les conditions de fonctionnement de la cour d’assises spéciale, dont le président du tribunal de grande instance de Paris s’est fortement inquiété, permettaient très difficilement de juger efficacement et rapidement de nombreux criminels. La question nous est donc aujourd'hui posée, à nous, le législateur, de réformer la composition de la cour d’assises spéciale.
Cette cour collégiale comporte, outre le président, six membres en premier ressort. Ces six membres sont entièrement prélevés parmi les magistrats du siège du tribunal de grande instance. Ainsi des juges aux affaires familiales deviennent-ils l’équivalent de citoyens membres d’un jury d’assises le temps d’un procès pour crimes terroristes. Il se trouve que ces procès durent parfois longtemps, comme ce sera le cas de ceux qui auront lieu l'année prochaine.
Afin à la fois d’éviter l’effet induit par la composition actuelle de la cour d’assises spéciale sur le fonctionnement du tribunal de grande instance de Paris et de pouvoir juger un plus grand nombre d’affaires dès 2017, je propose de réduire le nombre de magistrats membres de ce collège de juges chargés de se prononcer sur les crimes terroristes.
Mes chers collègues, permettez-moi de vous donner quelques chiffres pour étayer cette proposition. Alors que 342 jours d’audience ont été consacrés aux affaires terroristes dans les procès d’assises en 2015, puis 132 jours en 2016, ce nombre s’élèvera, selon les estimations, à 1 244 en 2017, soit une hausse de plus de 842 % !
Le besoin en équivalents temps plein travaillé de magistrats – pardonnez-moi ce jargon – pour le jugement des crimes terroristes augmentera donc de 950 % entre 2016 et 2017 au sein de la cour d’appel de Paris. Cette situation résulte de l’augmentation de 93 % du nombre d’ouvertures d’informations judiciaires en matière terroriste en 2016, soit un doublement par rapport à 2015. Le nombre d’enquêtes préliminaires a lui augmenté de 70 %. Il existe donc un risque évident de saturation de la cour d’assises de Paris.
Nous pensons que, en réduisant de six à quatre le nombre de membres de cette cour, nous ne diminuerions pas les garanties offertes aux justiciables. Nous serions toujours dans le respect de notre tradition.
Je rappelle, à titre de comparaison, que la loi du 10 août 2011 – M. Mercier s’en souvient – a réduit de neuf à six le nombre de jurés dans les cours d’assises de droit commun, en premier ressort. Si on peut diminuer le nombre de jurés d’assises pour les crimes « ordinaires », si je puis dire, tout en respectant la collégialité, on peut certainement le faire aussi pour la juridiction spéciale, à condition, bien sûr, de ne pas descendre en dessous d’un certain seuil.
La proposition de loi qu’un certain nombre de mes collègues et moi-même vous soumettons aujourd'hui ne contrevient à aucune règle d’indépendance ou d’impartialité de la justice. C’est pourquoi je serais très heureux, mes chers collègues, sous réserve des propos de M. le rapporteur, que vous acceptiez de l’adopter. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et de l'UDI-UC. – M. Jean-Pierre Sueur applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Michel Mercier, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Monsieur le président, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, la proposition de loi qui vous est aujourd'hui soumise, que vient de vous présenter son principal auteur, Philippe Bas, président de la commission des lois, a un double objectif.
Le premier est de favoriser une bonne administration de la justice. Il s’agit de faire face à l’augmentation du nombre d’affaires terroristes, cette hausse traduisant concrètement les succès des services de police et des services judiciaires en matière de lutte antiterroriste. Certes, il y a eu plus d’attentats, mais on combat aussi de plus en plus efficacement le terrorisme. Je rappelle qu’une bonne administration de la justice est un objectif de valeur constitutionnelle consacré par la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789.
Le second objectif est pour moi tout aussi important. Il s’agit de conserver une juridiction de droit commun pour juger les terroristes.
La présente proposition de loi s’inscrit dans ce double cadre, et j’évoquerai tout d’abord le premier objectif.
La très forte augmentation du nombre d’affaires terroristes devant être jugées risque d’entraîner une embolie du tribunal de grande instance de Paris. Comme l’a indiqué Philippe Bas, le nombre de journées d’audience consacrées à de telles affaires devant la cour d’assises de Paris s’élèvera à 1 244 en 2017, soit une augmentation de 842 % par rapport à 2016. Deux très gros procès auront lieu en 2017, dont celui de la cellule terroriste Cannes-Torcy, qui retiendra la cour d’assises spécialement composée durant huit semaines.
La durée même de ces procès impose de prévoir sept assesseurs, et non pas six, afin de faire face au risque de maladie. Si un assesseur venait à manquer, il faudrait en effet recommencer toute la procédure.
Par ailleurs, la nouvelle politique pénale suivie par le parquet de Paris, validée par un arrêt de la chambre criminelle l’année dernière, consistant à retenir la qualification criminelle dans les dossiers de terrorisme, il en résulte une forte augmentation du nombre d’affaires à juger devant la cour d’assises de Paris, compétente en matière de terrorisme.
Environ deux cents magistrats du tribunal de grande instance de Paris peuvent être mobilisés en tant qu’assesseurs à la cour d’assises. Il en faut vingt-quatre à la fois compte tenu du nombre de cours d’assises siégeant en même temps à Paris. Enfin, quatorze conseillers à la cour d’appel de Paris président les cours d’assises du ressort de la cour d’appel de Paris. Si l’on veut respecter le délai d’un an pour juger les affaires, une réforme est donc véritablement nécessaire.
J’évoquerai maintenant le second objectif de cette proposition de loi.
Depuis dix ou quinze ans, tous les partis qui se sont succédé au pouvoir ont construit un droit du terrorisme. Celui-ci déroge au droit commun, de l’enquête préliminaire jusqu’à l’exécution des peines. Un choix très important a été fait, celui de faire appliquer ce droit dérogatoire par une juridiction de droit commun.
Si l’on ne permet pas à la juridiction de droit commun, même spécialement composée, pour des raisons de sécurité, uniquement de magistrats comme assesseurs, de fonctionner normalement, on sera obligé d’aller vers une juridiction d’exception, ce que n’est pas la cour d’assises spécialement composée.
Pour ma part, j’ai la conviction qu’il ne faut pas aller vers une juridiction d’exception. Je pense qu’il faut conserver la juridiction de droit commun en l’aménageant, afin que la République soit correctement armée pour juger les terroristes dans des délais normaux. Réduire le nombre d’assesseurs de six à quatre en premier ressort et de huit à six en appel permettrait d’aller dans ce sens.
Une question se pose : le nombre d’assesseurs sera-t-il suffisant pour permettre la collégialité du jugement ? Je rappelle, comme l’a fait remarquer notre collègue François Pillet en commission des lois, que les associations de terroristes sont pour beaucoup jugées par un tribunal correctionnel composé de trois personnes. La cour d’assises spéciale compterait donc plus d’assesseurs qu’un tribunal correctionnel. Le nombre d’assesseurs, tel qu’il est prévu dans la proposition de loi, respecte donc l’exigence constitutionnelle de collégialité.
Parce que cette proposition de loi permettrait une meilleure administration de la justice, parce qu’elle garantirait à la République d’être correctement armée pour lutter contre le terrorisme et à la justice de remplir pleinement son office, la commission des lois l’a adoptée à l'unanimité. Je vous invite, mes chers collègues, à en faire de même. (Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC et du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux.
M. Jean-Jacques Urvoas, garde des sceaux, ministre de la justice. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, chacun comprendra que je commence mon propos en saluant le travail des magistrats, qui, au sein du tribunal de grande instance de Paris, remplissent une mission exigeante face à la « déferlante terroriste », pour reprendre les mots du président du tribunal de grande instance de Paris, Jean-Michel Hayat, évoquant l’alourdissement du rôle du tribunal de grande instance de Paris, et singulièrement de la cour d’assises spéciale.
En 2016, quelque 114 informations judiciaires ont été ouvertes en matière terroriste, contre 67 en 2015. Elles concernent évidemment les candidats au djihad qui tentent de partir, ceux qui se rendent en zone de guerre ou en sont revenus, mais également les infractions d’apologie du terrorisme et le délit de consultation habituelle de sites djihadistes.
Parallèlement, nous avons enregistré une accélération du nombre d’incarcérations. J’en informe le Sénat, car ce sujet ne perdra pas de son actualité au cours des semaines à venir.
Ainsi, depuis le 1er septembre dernier, quelque 94 détenus ont été incarcérés sous le chef d’association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste : 75 % d’entre eux sont écroués dans des établissements de la région parisienne ; d’autres le sont dans l’établissement de Lille-Annoeullin ; les derniers sont écroués dans les établissements relevant de la direction interrégionale des services pénitentiaires de Bordeaux. Pour le reste, 50 établissements sont actuellement concernés par l’accueil de ce type de détenus.
Face à cette massification des procédures, et évidemment afin de mieux prendre en compte la dangerosité de ces profils, le parquet de Paris a décidé, en avril 2016, de modifier sa politique pénale, comme vient de le dire M. le rapporteur. Il a ainsi choisi de s’orienter de manière systématique vers une qualification d’association de malfaiteurs à but terroriste criminelle dès lors que la personne est partie combattre ou rejoindre des théâtres de guerre.
De fait, cette politique aura pour conséquence à moyenne échéance d’engorger la cour d’assises spéciale de Paris. Ainsi, selon la Chancellerie, quelque 22 dossiers de terrorisme devraient être jugés par cette juridiction en 2017. Le contentieux sera encore plus important en 2018. En effet, nous évaluons à 55 le nombre des dossiers qui pourraient relever de la cour d’appel de Paris.
Il n’est donc pas réfutable que la charge de la cour d’assises spéciale est sans précédent. Cette charge a d’ailleurs déjà des conséquences au quotidien pour tous les services de la juridiction, dont les magistrats sont tous appelés à siéger, qu’il s’agisse des juges aux affaires familiales ou des formations spécialisées.
Seuls les juges pour enfants, qui sont eux-mêmes confrontés à la déferlante des affaires terroristes mettant en cause des mineurs, et les juges d’instance, qui sont en très grande souffrance au regard des vacances de postes au sein du TGI de Paris, sont pour l’heure préservés.
Je suis donc conscient de l’importance du sujet qui nous réunit cet après-midi. Je l’ai même anticipé. C’est la raison pour laquelle j’ai choisi de renforcer les moyens du TGI de Paris pour y faire face.
De plus, toujours pour lutter contre l’engorgement, le président Hayat avait indiqué en novembre dernier que certaines affaires terroristes, qualifiées de « simples », pourraient être jugées en comparution immédiate.
C’est ainsi que, depuis le début de ce mois, les magistrats spécialisés de la 16e chambre peuvent juger en procédure accélérée en fixant une date de jugement à cinq mois au maximum. Sont notamment concernés le délit réprimant la consultation habituelle de sites terroristes, passible de deux ans de prison ferme et de 30 000 euros d’amende, et l’apologie du terrorisme, passible de cinq ans d’emprisonnement ou de sept ans si les faits ont été commis sur internet.
C’est également dans cette perspective d’adaptation de notre organisation judiciaire que vous proposez, mesdames, messieurs les sénateurs, de réduire le nombre de magistrats composant la cour d’assises spéciale.
Cette composition, vous l’avez rappelé, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, a été fixée par la loi du 9 septembre 1986 relative à la lutte contre le terrorisme et figure à l’article 698-6 du code de procédure pénale. Cette cour est composée de six magistrats assesseurs en premier ressort et de huit magistrats en appel. Vous proposez de ramener ces nombres respectivement à quatre et six, afin de permettre d’audiencer un plus grand nombre d’affaires terroristes et d’améliorer le fonctionnement du tribunal de grande instance de Paris ou de ne pas perturber excessivement son fonctionnement.
La proposition de Jean-Michel Hayat n’est pas nouvelle. Il m’en a fait part à de multiples reprises, lorsque nous avons légiféré sur ce sujet. J’ai choisi de ne pas y donner suite, et ce pour deux raisons.
Tout d’abord, sur la base des données fournies par la cour d’appel et le tribunal de grande instance de Paris en septembre 20015, nous évaluons à seulement 2,25 le « gain » en termes d’équivalents temps plein travaillé, ou ETPT, de magistrats du siège. La dimension symbolique d’une telle mesure serait donc notable, mais son impact sur le tribunal serait en réalité très faible.
La seconde raison, qui est plus forte, mais j’imagine que notre débat l’éclairera, c’est que cette mesure aboutirait à réduire la collégialité, alors qu’il s’agit d’affaires extrêmement graves et sensibles.
Pour autant, sous réserve que d’autres arguments viennent infirmer ce sentiment, je ne suis pas hostile à la démarche de la commission des lois du Sénat, qui a voté à l’unanimité ce texte. Je crois néanmoins qu’il ne faut guère aller au-delà de ces 2,25 ETPT. C'est la raison pour laquelle j’en appelle au Sénat pour qu’il appuie d’autres mesures, que j’ai déjà prises dans le cadre de la loi de finances pour 2017 et qui permettront de renforcer la juridiction, notamment le siège et le parquet.
Ces choix budgétaires nous ont ainsi permis de renforcer la section antiterroriste du parquet de Paris, qui est dorénavant composée de treize magistrats.
Nous avons également augmenté de deux juges le pôle d’instruction antiterroriste du TGI, qui est passé de huit à dix magistrats. Un onzième juge d’instruction prendra prochainement ses fonctions, sous réserve de l’avis conforme du Conseil supérieur de la magistrature, que j’ai saisi le mois dernier.
Nous avons aussi décidé – les crédits correspondants sont prévus dans le budget de l’année prochaine – de recruter des assistants spécialisés pour soutenir l’action du ministère public : quinze sont déjà recrutés et assurent des missions de veille extrêmement précieuses pour les magistrats au sein des juridictions, et vingt-cinq sont en cours de recrutement.
Parallèlement, nous avons alloué des moyens matériels supplémentaires au parquet antiterroriste, notamment, puisque sa dotation s’est accrue de 58 000 euros, dont 8 000 euros serviront à financer l’achat de gilets pare-balles. Les drames que nous avons connus cette année nous ont en effet contraints de procéder à ce type d’investissement.
Ce faisant, grâce à ces mesures, nous confortons notre organisation, convaincus – je partage ce point de vue avec le rapporteur, Michel Mercier – de la pertinence de notre organisation de droit commun, qui doit être conservée au regard même de la difficulté à laquelle sont confrontés les tribunaux.
J’avoue d'ailleurs, à ce stade, ne pas comprendre pourquoi réapparaît régulièrement une proposition, dont je ne perçois pas la pertinence et qui constituerait un bouleversement de notre organisation, visant à créer un parquet national antiterroriste dédié.
J’ai déjà eu l’occasion de dire tout le mal que je pensais de cette proposition, dont la concrétisation, en réalité, figerait nos capacités d’action. Nous savons tous que, aujourd'hui, compte tenu de notre organisation et du primat de la cour d’appel de Paris et du tribunal de grande instance de Paris, la totalité des magistrats peut être mobilisée en fonction des besoins.
La constitution d’un parquet antiterroriste ne correspond à aucun besoin identifié. Nous avons malheureusement éprouvé l’efficacité du système encore très récemment à Nice, et nous n’avons, à ce stade, repéré aucune faille, aucune défaillance de notre appareil judiciaire justifiant que l’on se lance dans le bouleversement d’une organisation qui a très largement fait ses preuves depuis 1986.
Personne n’a à gagner de ces débats de faux-semblants, où de fausses solutions occultent de vrais problèmes et qui, en fait, n’occupent que quelques esprits en quête d’une rationalité à côté de laquelle ils passent aveuglément. Il faut se concentrer sur l’essentiel.
Les plans de lutte contre le terrorisme qui ont été conçus et mis en œuvre ont permis d’augmenter les services judiciaires de 1 175 emplois, avec des magistrats – je l’ai évoqué –, mais aussi des greffiers et des fonctionnaires. Ils ont permis également d’augmenter de 100 emplois l’administration pénitentiaire dédiée à la lutte antiterroriste et d’augmenter de 75 emplois la protection judiciaire de la jeunesse, afin de renforcer, là aussi, la détection.
Le récent plan de lutte contre la radicalisation violente et de sécurisation des établissements pénitentiaires, que j’ai annoncé le 25 octobre 2016 et dont la mise en œuvre est déjà en cours, vise aussi à anticiper l’augmentation des affaires que j’évoquais.
Je terminerai en évoquant la loi de modernisation de la justice du XXIe siècle, très récemment promulguée. Ce texte, dont l’objet est de simplifier des procédures et de recentrer les magistrats sur leur cœur de métier, permettra, parce qu’il s’agit là d’une juridiction spécialisée, de dégager plus de temps pour la lutte antiterroriste.
Mesdames, messieurs les sénateurs, voilà le travail que nous avons effectué. Je réaffirme l’intérêt que j’accorde à l’apport du Sénat et, même si cette proposition de loi n’a qu’un effet modeste, je pense que toute idée intéressante est bonne à prendre. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain. – M. Yves Détraigne applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme Esther Benbassa.
Mme Esther Benbassa. Monsieur le président, monsieur le garde des sceaux, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, nous entamons l’année avec l’examen d’une proposition de loi portée par nos collègues MM. Bas, Zocchetto, Buffet, Détraigne et Pillet, relative à la composition de la cour d’assises instituée par l’article 698-6 du code de procédure pénale.
Cette cour d’assises, dite « spéciale », qui émane de la loi du 9 septembre 1986, est composée uniquement de magistrats professionnels : un président et six assesseurs lorsqu’elle statue en premier ressort, et huit assesseurs lorsqu’elle statue en appel. La raison de l’absence de jurés est claire : il s’agit d’éviter « toute prise aux pressions d’une organisation sur les personnes chargées du jugement du terroriste ». (M. le rapporteur acquiesce.)
M. Philippe Bas. Exactement !
Mme Esther Benbassa. Rappelons ici que, si la cour d’assises spéciale est compétente en matière de crimes terroristes, elle l’est également en matière de crimes militaires commis en temps de paix, d’atteintes aux intérêts fondamentaux de la Nation, de trafic de stupéfiants et de crimes relatifs à la prolifération d’armes de destruction massive et de leurs vecteurs.
L’objet de la présente proposition de loi est alors relativement simple : il s’agit de réduire de deux membres le nombre d’assesseurs professionnels siégeant au sein de cette cour d’assises, qui passerait ainsi de six à quatre en premier ressort et de huit à six en appel.
Selon les auteurs de la proposition de loi, cette modification permettrait, dans le contexte d’une augmentation sensible et durable du nombre d’affaires criminelles terroristes, d’audiencer un plus grand nombre d’affaires terroristes et de soulager le tribunal de grande instance de Paris, qui serait substantiellement moins mobilisé pour composer les cours d’assises.
La question à laquelle nous sommes amenés à répondre aujourd’hui est donc la suivante : pensons-nous que la réduction du nombre de magistrats siégeant à la cour d’assises spéciale soit à même de désengorger la cour d’assises de Paris, tout en garantissant une justice de qualité ? Une majorité des membres du groupe écologiste ne peut, je le crains, répondre par l’affirmative.
Avec 195 enquêtes préliminaires et 160 informations judiciaires relatives à des filières irako-syriennes en cours, il est certain que la cour d’assises spéciale doit fournir un travail titanesque. De surcroît, ce ne sont pas moins de sept dossiers qui devraient être audiencés en ce début d’année, dont deux d’entre eux sont particulièrement importants : le procès du frère de Mohamed Merah, qui devrait durer un mois, et celui de la cellule de Cannes-Torcy, avec une vingtaine de mis en cause, prévu pour trois mois.
Doit-on pour autant réduire le nombre de magistrats dans cette instance de jugement ? Je ne le crois pas. La collégialité est la garantie d’une justice mieux rendue ; elle doit être préservée et ne peut, mes chers collègues, être rognée pour faire face à la pénurie de magistrats.
Cette pénurie, le manque de moyens de l’ensemble des tribunaux de notre pays, nous ne le découvrons pas avec l’augmentation du nombre d’affaires de terrorisme. Voilà des années que l’ensemble des professionnels du droit la dénonce. Vous déclariez vous-même, il y a quelques mois, monsieur le garde des sceaux, que « la justice est à bout de souffle » et que nous sommes face à « une vraie situation de sinistre ».
On le sait, la justice, malgré les efforts consentis depuis 2012, manque de tout : de magistrats, de greffiers, de fonctionnaires, mais aussi du matériel de base nécessaire au fonctionnement d’une juridiction, comme du papier ou de l’encre pour imprimer les jugements.
La réponse qui nous est proposée aujourd’hui, par une majorité sénatoriale qui n’a pas souhaité examiner le projet de loi de finances pour 2017, donc le budget de la justice, me paraît pour le moins légère. Mais peut-être est-ce annonciateur des temps qui viennent…
En 2015, pour la première fois depuis longtemps, il y a eu plus de magistrats nommés que de départs à la retraite. Cela ne se reproduira probablement pas si le candidat soutenu par certains sur ces travées et qui promet de réduire l’emploi public de 500 000 postes est élu. (Mme Cécile Cukierman et M. Jean-Pierre Sueur applaudissent.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.
M. Jean-Pierre Sueur. Monsieur le président, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, c’est l’honneur des démocraties que de tenir absolument à ce que les crimes terroristes, par définition odieux, soient jugés dans le cadre d’une justice présentant – monsieur le rapporteur, vous avez, à juste titre, insisté sur ce point – les caractéristiques d’une justice de droit commun et non d’une justice d’exception.
Chacun a énoncé l’objet du texte : simplifier les choses, passer de six assesseurs à quatre en premier ressort et de huit assesseurs à six en appel. La composition actuelle, qu’il est proposé de réformer, est issue, vous l’avez dit, de la loi du 9 septembre 1986, et l’extension de la compétence de la cour d’assises spéciale aux crimes terroristes a alors eu pour objectif de prévenir tout dysfonctionnement judiciaire qui pourrait résulter de manœuvres d’intimidation sur les jurés populaires, comme il y en a eu.
Ces dispositions ne sont pas isolées, puisque, en application de l’article 706-26 du code de procédure pénale, en matière de stupéfiants, les accusés majeurs sont jugés par la cour d’assises dont la composition et le fonctionnement sont les mêmes. Il en va de même pour le jugement des crimes relatifs à la prolifération d’armes de destruction massive et de leurs vecteurs.
Je veux souligner que cette loi a été déférée au Conseil constitutionnel, qui a déclaré : « Considérant qu’il est loisible au législateur compétent pour fixer les règles de la procédure pénale en vertu de l’article 34 de la Constitution de prévoir des règles de procédure différentes selon les faits, les situations et les personnes auxquelles elles s’appliquent pourvu que ces différences ne procèdent pas de discrimination injustifiée et que soit assuré au justiciable des garanties égales, notamment quant au respect du principe des droits de la défense ;
« Considérant que la différence de traitement établie par l'article 706-25 nouveau du code de procédure pénale […] tend, selon l'intention du législateur, à déjouer l'effet des pressions ou des menaces pouvant altérer la sérénité de la juridiction de jugement ; que cette différence de traitement ne procède donc pas d'une discrimination injustifiée ; que, en outre, par sa composition, la cour d'assises instituée par l'article 698-6 du code de procédure pénale présente les garanties requises d'indépendance et d'impartialité ; que devant cette juridiction les droits de la défense sont sauvegardés ; que, dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance du principe d'égalité devant la justice doit être écarté ».
Mes chers collègues, j’ai tenu à vous citer cet extrait assez long de la décision du Conseil constitutionnel, qui montre que le Conseil a clairement établi les choses par rapport à la légalité et à la constitutionnalité de la procédure. Je rappelle aussi que la chambre criminelle de la Cour de cassation, qui a eu à se prononcer sur la validité de cette composition, l’a aussi pleinement considérée comme justifiée et conforme au droit.
Vous l’avez souligné, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, monsieur le garde des sceaux, le contentieux terroriste connaît actuellement une forte augmentation. Les chiffres ont déjà été rappelés : au 1er décembre 2016, la section antiterroriste du parquet de Paris dénombrait 288 informations judiciaires et 287 enquêtes préliminaires, dont 160 informations judiciaires et 195 enquêtes préliminaires pour le seul contentieux syro-irakien. Le nombre d’ouvertures d’informations judiciaires en matière terroriste, comme je l’ai lu dans votre rapport, monsieur Michel Mercier, a augmenté de 93 %.
Dans ces conditions, nous verrons bien l’effet de cette mesure, dont nous dites, monsieur le garde des sceaux, qu’il sera limité. Cela étant, il est clair, comme vous l’avez sans doute remarqué, que l’intention du législateur et de notre commission des lois, unanimes en l’espèce, n’est en aucun cas d’aller vers une juridiction d’exception. C’est justement parce que nous ne voulons pas que certains, à l’avenir, aient l’idée de créer une juridiction d’exception que nous pensons sage de prévoir une composition réaliste, eu égard à la grande ampleur du contentieux qui devra être traité en 2017 et durant les années suivantes, hélas.
Je terminerai mon propos en disant qu’il s’agit pour nous d’aller vers la meilleure administration de la justice possible, ou de progresser tout au moins en ce sens. Vous le savez, monsieur le garde des sceaux, une bonne administration de la justice est aussi un objectif à valeur constitutionnelle. (M. le garde des sceaux acquiesce.) C’est pourquoi le groupe socialiste et républicain votera la présente proposition de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain. – Mme Esther Benbassa applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. André Reichardt.
M. André Reichardt. Monsieur le président, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, comme en 2015, l’année 2016 qui s’est écoulée a encore été marquée par le terrorisme, ainsi que, bien entendu, par la nécessaire lutte pour y faire face.
Notre collègue Michel Mercier le relève dans son rapport, le nombre d’ouvertures d’informations judiciaires en matière terroriste a augmenté de plus de 93 % par rapport à l’année précédente et le nombre d’enquêtes préliminaires de plus de 70 %. Au vu de la menace persistante, l’année 2017 ne s’annonce guère sous de meilleurs auspices.
Dans un tel contexte, il devient urgent de réformer l’appareil judiciaire, afin de donner à la cour d’assises spéciale de Paris les moyens de faire face à l’augmentation croissante et très importante, on l’a dit, du nombre de procédures pour crimes terroristes.
Alors qu’elle traitait jusqu’ici trois à quatre affaires par an, sa charge devrait doubler cette année. Plusieurs dizaines d’affaires sont ainsi à attendre pour les années à venir, dont deux principales, cette année, d’une durée moyenne évaluée à douze semaines. Ce sont – Mme Benbassa les a citées avant moi –, celle du frère de Mohamed Merah, qui avait tué sept personnes dont trois enfants en 2012, et celle de la cellule djihadiste dite de « Cannes-Torcy », accusée d’un attentat contre une épicerie casher la même année.
Viendront encore s’y ajouter de lourds dossiers, ceux du triste soir du 13 novembre 2015, pour lesquels quatre à cinq mois de procédure seront sans doute nécessaires. Le procureur de la République de Paris a, en outre, annoncé pour avril prochain la criminalisation de près de 90 dossiers, actuellement en cours d’information judiciaire.
Au vu de l’augmentation très importante du nombre de procédures et de l’obligation de respecter un délai d’un an d’audiencement, tel que le prévoit le code de procédure civile, la situation de la Cour est aujourd’hui mise à l’épreuve et devient singulièrement problématique.
La modification de la composition de la juridiction parisienne va donc dans le bon sens, celui d’une justice plus raisonnée, notamment au nom du principe de célérité de la justice, que ce soit dans le cadre des procédures pour crimes terroristes que pour ce qui concerne les procédures de droit commun.
Dès lors, si ce n’est permettre d’assurer un temps de procédure raisonnable, ramener le nombre d’assesseurs de six à quatre en première instance, et de huit à six en appel, ne peut qu’augmenter le niveau de performance de nos juridictions.
Au sens du Pacte international relatif aux droits civils et politiques et de la Convention européenne des droits de l’homme, le principe de célérité de la justice est un droit fondamental pour les justiciables, non seulement pour la victime, mais également pour la personne poursuivie, notamment lorsque celle-ci est placée en détention provisoire, comme c’est naturellement très souvent le cas.
Un délai non raisonnable engage ainsi la responsabilité de l’État pour faute lourde, au sens de l’article L. 141-1 du code de l’organisation judiciaire, l’obligeant à réparer le dommage causé par le fonctionnement défectueux du service public de la justice.
À ce titre, la personne qui aurait fait l’objet d’une détention provisoire au cours d’une procédure terminée à son égard par une décision de non-lieu, de relaxe ou d’acquittement devenue définitive a droit à la réparation intégrale du préjudice moral et matériel que lui a causé cette détention.
C’est ainsi que la presse s’est récemment fait l’écho de l’indemnisation dont avait pu bénéficier M. Farouk Ben Abbes, soupçonné d’avoir projeté un attentat contre le Bataclan dès 2010. Celui-ci avait obtenu un non-lieu faute de charges suffisantes, nonobstant des faits avérés par les services égyptiens. À telle enseigne que Philippe Bilger, magistrat honoraire bien connu, a souligné dans une chronique du Figaro : « On offre aveuglément les privilèges de l’État de droit à ceux qui veulent le détruire ».
J’aimerais à cet égard mettre l’accent sur la question des délais de procédure anormalement longs, qui ont valu à la France de se faire plusieurs fois condamner par la Cour européenne des droits de l’homme de Strasbourg.
À l’occasion de l’affaire Sagarzazu contre France, en janvier 2012, la Cour a clairement rappelé qu’il « incombait aux États d’agencer leur système judiciaire de manière à permettre à leurs tribunaux de répondre aux exigences de la Convention », au terme desquelles « toute personne détenue a droit d’être jugée dans un délai raisonnable ou libérée pendant la procédure ».
En l’espèce, les requérants, membres de l’ETA à l’époque, avaient été mis en examen pour participation aux activités de préparation d’actes de terrorisme et placés en détention provisoire. Près de deux ans s’étaient écoulés entre l’ordonnance de mise en accusation et l’arrêt de la cour d’assises de Paris spécialement composée.
La Cour européenne des droits de l’homme, pour condamner la France pour durée excessive de la détention provisoire, avait retenu que les juridictions internes ont fait droit aux demandes de prolongation de la détention provisoire formulées par le procureur général « essentiellement en raison de la charge du rôle de la cour d’assises spécialement composée », et cela indépendamment de tout motif lié à « la préparation d’un procès de grande ampleur ou en raison du besoin des autorités de prendre des mesures de sécurité efficaces ».
La Cour avait en outre observé que le Gouvernement s’en était exclusivement tenu à l’argument de l’encombrement de la cour d’assises de Paris afin de justifier le délai litigieux. Bien qu’elle ait reconnu le problème lié à l’encombrement judiciaire, la Cour de Strasbourg n’a eu de cesse de condamner la France pour ces raisons.
La Cour de cassation s’est elle-même alignée sur la jurisprudence européenne, considérant, à l’occasion d’un arrêt rendu en chambre criminelle en 2009, que « les difficultés récurrentes de fonctionnement de la juridiction appelée à statuer au fond ne pouvaient justifier une prolongation de la détention provisoire au risque de méconnaître les dispositions tant de la Constitution que de la Convention européenne des droits de l’homme ».
Je souhaiterais donc insister sur le fait que la juridiction parisienne connaît actuellement d’importants déficits en termes d’effectifs, avoisinant, nous dit-on, les 15 %. Dès lors, la mobilisation de 24 magistrats – M. le rapporteur l’a citée avant moi –, sur un vivier d’à peine plus de 200 magistrats, rend malaisée l’organisation des services. En effet, lorsque des services ne fonctionnent qu’avec un ou deux magistrats, il est difficile de désigner une personne pour aller aux assises sans compromettre la capacité de jugement de la juridiction dans laquelle on a puisé.
Aussi, il est de pratique courante de ne puiser qu’au sein de trois services : le correctionnel, l’instruction et les affaires familiales. Il est donc urgent de donner à la cour d’assises spéciale les moyens nécessaires, afin de lui permettre de pérenniser son fonctionnement et de minimiser le risque d’engorger toutes les procédures par effet de cascade.
D’après les calculs opérés, cette proposition de loi visant à réduire le nombre de magistrats affectés aux assises devrait, nous dit-on, augmenter le nombre d’audiencements et permettre à la cour de juger treize affaires supplémentaires de terrorisme, de cinq jours chacune, et six affaires supplémentaires de dix jours en appel. Même si, comme nous le disait à l’instant M. le garde des sceaux, cette augmentation peut paraître modeste, elle reste, bien entendu, bonne à prendre, compte tenu des effets en cascade.
Qui plus est, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, sur un plan moral enfin, ce sont autant de procédures qui permettront d’accélérer le processus d’indemnisation symbolique des victimes, nonobstant la réparation pécuniaire assurée en amont par le fonds d’indemnisation.
Pour ces différentes raisons, vous l’avez compris, au nom du groupe Les Républicains, j’appuie fortement la proposition de loi présentée par le M. le président Philippe Bas et par certains de nos collègues. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et de l'UDI-UC. – M. Jean-Pierre Sueur applaudit également.)
M. Philippe Bas. Merci !
M. le président. La parole est à Mme Cécile Cukierman.
Mme Cécile Cukierman. Monsieur le président, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, depuis une vingtaine d’années, les procédures pénales dérogatoires au droit commun se sont étendues. Elles se sont construites, de façon morcelée, autour du terrorisme, du trafic de stupéfiants, du proxénétisme et, finalement, de la criminalité organisée. L’objectif affiché est le renforcement de l’efficacité répressive, mais il s’agit aussi d’éviter les manœuvres d’intimidation sur les jurés populaires constituant les cours d’assises qu’on qualifiera de traditionnelles.
Toutefois, cette extension continue des procédures dérogatoires soulève la question de la conciliation entre sécurité et liberté. La proposition de loi dont nous débattons aujourd’hui n’échappe pas à cette règle et à ce questionnement.
Depuis 1986, la compétence de jugement des affaires de terrorisme est centralisée devant les juridictions parisiennes et les règles de composition et de fonctionnement des cours d’assises dérogent au droit commun, puisque ces affaires sont jugées par une cour d’assises spécialement composée de magistrats professionnels, sans jurés.
Mettant en avant l’ouverture en 2017 de deux grands procès, l’augmentation du nombre de journées d’audience en 2017 – cela a été rapporté précédemment par l’auteur de cette proposition de loi –, ainsi que, en général, une augmentation durable des affaires liées au terrorisme – M. le garde des sceaux l’a également rappelé –, ce texte prévoit donc de modifier la composition de la cour d’assises spéciale, afin d’améliorer le fonctionnement de la justice.
Dans les faits, il s’agit de réduire de deux membres le nombre d’assesseurs professionnels siégeant au sein de cette cour d’assises, qui passerait ainsi de six à quatre en premier ressort et de huit à six en appel. Cela permettrait, pour le rapporteur, d’audiencer un plus grand nombre d’affaires terroristes et d’améliorer le fonctionnement du tribunal de grande instance de Paris, qui serait substantiellement moins mobilisé pour composer les cours d’assises. Monsieur le rapporteur, vous avez même parlé d’ « embolie » à propos du tribunal de grande instance.
Nous ne pouvons nier que la composition de cours d’assises spéciales a une incidence réelle sur l’activité à venir du tribunal de grande instance de Paris, puisque les magistrats mobilisés à cette fin ne seront plus affectés « aux affaires courantes », ce qui, bien évidemment, pose de véritables questions en termes d’organisation de notre justice et de délais d’instruction.
Nous faisons tous le même constat : au regard de l’augmentation du contentieux terroriste, des moyens supplémentaires sont nécessaires à la bonne administration de notre justice.
Je n’ai cessé, comme l’ensemble des membres de mon groupe, de dénoncer ici la baisse du budget de la justice, la réduction des effectifs dans le cadre d’une refonte de la carte judiciaire, l’asphyxie des juridictions par l’absence de crédits suffisants de fonctionnement – permettez-moi d’avoir une pensée pour celles et ceux qui travaillent au tribunal de Nancy, dans des conditions climatiques difficiles –, l’engloutissement des moyens humains et financiers dans la priorité donnée à la machine pénale et l’inflation carcérale.
Pour reprendre les mots d’un ancien procureur général de Paris, le retard accumulé durant ces dix dernières années en termes budgétaires est gigantesque – nous sommes au même niveau que la Moldavie !
Les effectifs constituent l’un des points faibles de notre système judiciaire. En 2012, la France ne comptait que 10,7 juges professionnels pour 100 000 habitants, soit moitié moins que la moyenne des pays du Conseil de l’Europe, qui est de 21.
C’est pourquoi nous ne souscrivons pas à la solution proposée par cette proposition de loi, qui fait le choix d’adapter notre droit à la pénurie de magistrats, pénurie provoquée par les choix des gouvernements précédents, notamment celui qui fut dirigé par M. Fillon,… (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Philippe Bas. Un excellent gouvernement !
Mme Cécile Cukierman. …qui a réduit les effectifs et les moyens de fonctionnement de la justice. Malgré la volonté du gouvernement actuel de corriger cette faiblesse des effectifs, il manque toujours des magistrats dans l’ensemble des juridictions.
Loin de la nécessité d’augmenter les moyens et les effectifs, opter en faveur de la réduction du nombre d’assesseurs, c’est faire le choix d’une atteinte indirecte au principe de collégialité, principe qui garantit les droits de la défense.
Oui, la montée en charge du tribunal de grande instance de Paris est sans précédent, mais, face aux conséquences de politiques pénales qui viennent inévitablement engorger cette juridiction, devons-nous vraiment adapter notre droit, plutôt que de répondre au problème des moyens ?
C’est plus de magistrats qu’il faut, et non moins de droits pour les justiciables, quelles que soient les poursuites engagées. En effet, il faut noter que cette cour d’assises spéciale est compétente en matière non seulement de terrorisme, mais aussi de crimes militaires commis en temps de paix, de crimes commis par les militaires dans l’exercice du service, y compris pour des infractions commises dans le service du maintien de l’ordre ou en matière de trafic de stupéfiants. La modification proposée s’appliquera donc également à ces affaires.
Enfin, comme le souligne le rapporteur, de nombreux syndicats sont opposés à la réforme proposée, qu’il s’agisse d’organisations représentant des magistrats ou des avocats. En effet, il faut garder à l’esprit qu’on parle des crimes les plus graves, de ceux qui troublent le plus gravement l’ordre public, et, par conséquent, de ceux pour lesquels les accusés encourent les peines les plus lourdes. Dès lors, le principe d’une collégialité étendu nous apparaît essentiel.
Une telle réforme aurait également un impact sur l’autorité de la décision. Comme le souligne le président de l’association des avocats pénalistes, « lorsqu’elle est rendue par un nombre important de personnes, symboliquement, on lui accorde une autorité plus grande ».
Vous l’aurez compris, mes chers collègues, pour toutes ces raisons, nous ne soutiendrons pas cette proposition de loi.
13
Souhaits de bienvenue à une délégation parlementaire
M. le président. Monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, j’ai le plaisir de saluer, à la tribune d’honneur du Sénat, une délégation de cinq sénateurs japonais, conduite par M. Takuya Yanagimoto, président de la commission sur la Constitution de la Chambre des conseillers du Japon. (Mmes et MM. les sénateurs, ainsi que M. le garde des sceaux, ministre de la justice, se lèvent.)
La délégation japonaise est actuellement en Europe pour étudier trois sujets : le bicamérisme, la promotion de la participation des jeunes et des femmes à la vie politique, et les moyens de la démocratie participative. La France est la deuxième étape de son déplacement sur notre continent, après l’Italie, où elle s’est rendue hier, et la Suède, où elle sera demain.
La délégation s’est entretenue, notamment, avec M. Jean-Pierre Sueur, vice-président de la commission des lois et membre du groupe d’amitié France-Japon, que préside notre collègue David Assouline.
La délégation vient par ailleurs d’échanger avec MM. Henri Cabanel et Philippe Bonnecarrère, respectivement président et rapporteur de la mission d’information du Sénat constitué sur le thème : « Démocratie représentative, démocratie participative, démocratie paritaire : comment décider avec efficacité et légitimité en France en 2017 ? »
Le Sénat français entretient d’excellentes relations d’amitié avec la Chambre des conseillers du Japon et se réjouit de recevoir cette délégation.
Mes chers collègues, permettez-moi de souhaiter à nos homologues du Parlement japonais, en votre nom à tous et en mon nom personnel, une cordiale bienvenue. (Mmes et MM. les sénateurs, ainsi que M. le garde des sceaux, applaudissent.)
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Composition de la cour d'assises spéciale
Suite de la discussion et adoption d’une proposition de loi dans le texte de la commission
M. le président. Nous reprenons l’examen de la proposition de loi relative à la composition de la cour d’assises de l’article 698-6 du code de procédure pénale.
Discussion générale (suite)
M. Jacques Mézard. Monsieur le président, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, nous avons encore l’illustration de la confrontation entre le principe de réalité et les objectifs que nous devrions tous avoir depuis longtemps pour promouvoir une justice efficace, si toutefois nous avions l’habitude de développer dans ce pays une approche suffisamment prospective.
M. Philippe Bas. Nous ne pouvions pas prévoir les attentats, cher collègue !
M. Jacques Mézard. En la matière, ce principe de réalité conduira les membres de notre groupe à voter unanimement en faveur de ce texte, tout en constatant que l’adaptation des institutions judiciaires à la demande immédiate n’est pas nécessairement la meilleure solution. En effet, elle ne fait qu’ajouter à la cacophonie et à l’incohérence qui règnent dans le fonctionnement de notre système pénal, caractérisé par une accumulation de textes compliquant la tâche des magistrats.
En l’occurrence, le principe de réalité, c’est l’augmentation considérable du nombre d’ouvertures d’informations judiciaires en matière de terrorisme et du nombre d’enquêtes préliminaires : elles ont crû respectivement de 93 % et de 70 % entre 2015 et 2016, portant le stock à 288 informations judiciaires et 287 enquêtes préliminaires.
Vous le savez, monsieur le garde des sceaux, car vous l’avez dit nettement en prenant possession du merveilleux bureau que vous occupez à la Chancellerie, la bonne solution, la logique, le bon sens et l’efficacité commanderaient d’avoir le nombre de magistrats nécessaires pour bien faire fonctionner la justice.
Si, chaque fois que nous sommes confrontés à une augmentation du nombre de dossiers, nous choisissons de réduire le nombre des magistrats qui les traitent ou de sortir certaines affaires de la compétence judiciaire – nous en avons des exemples récents –, je ne suis pas persuadé que nous ferons avancer la justice dans ce pays. Pourtant, c’est bien ce qui se passe sous les majorités successives.
Il faudra bien, un jour, que nous ayons en France suffisamment de magistrats, en tout cas un nombre raisonnable au regard des pays comparables.
Nous avons constaté, voilà plusieurs années, qu’il fallait développer la collégialité. Les pôles d’instruction ont été créés, mais la loi n’a pas vraiment été appliquée. Aujourd’hui, une fois de plus, confrontés au principe de réalité, on réduit le nombre de magistrats composant une juridiction.
Comme Mme Cukierman l’a rappelé, les cours d’assises spéciales ne jugent pas que des affaires terroristes, et la juridiction parisienne ne sera pas la seule concernée, ce qui pose problème. Il serait temps de développer une vision prospective et de cesser de régler les difficultés de cette manière.
Cela étant, nous n’entendons pas faire obstacle à ce texte, qui répond à un véritable problème.
Je sais, monsieur le président de la commission des lois, que le Sénat réfléchit beaucoup au redressement de la justice, mais je ne pense pas que ce soit en accumulant les textes et en allant vers des systèmes sécuritaires que l’on résolve les problèmes. Ce n’est pas ce que vous avez en tête, monsieur le président de la commission, je le sais, et j’espère que nous pourrons trouver des solutions utiles.
Ces juridictions spéciales fonctionneront-elles mieux si le présent texte est adopté ? Ce dernier permettra de réduire le stock, en tout cas de réduire son accroissement, mais il pose le problème du bon exercice de la collégialité, que nous n’avons pas été capables de régler depuis nombre d’années.
Clemenceau disait : « Pour prendre une décision, il faut être un nombre impair de personnes, et trois c’est déjà trop ! » (Sourires.) Tout est dit ! Continuons ainsi, et le problème risque en effet d’être résolu de cette façon. Je ne crois pas pourtant que le développement du juge unique dans toutes les matières, souvent dénoncé par ailleurs, soit la panacée.
En conclusion, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, nous voterons ce texte sans aucun enthousiasme, conformément au principe de réalité, lequel n’est toutefois pas le meilleur moyen de faire avancer la justice dans ce pays. (Applaudissements sur les travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Yves Détraigne.
M. Yves Détraigne. Monsieur le président, monsieur le garde des sceaux, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, la présente proposition de loi vise à modifier la composition de la cour d’assises spéciale. Cette dernière est actuellement composée d’un président et de six assesseurs lorsqu’elle statue en première instance, et d’un président et de huit assesseurs quand elle statue en appel.
Cette organisation a fait la preuve de son efficacité depuis 1986. Aujourd’hui, elle est mise à l’épreuve par l’accroissement sans précédent du nombre de procédures ouvertes pour infraction terroriste. Au 1er décembre 2016, la section antiterroriste du parquet de Paris dénombrait 288 informations judiciaires et 287 enquêtes préliminaires, dont 160 informations judiciaires et 195 enquêtes préliminaires pour le seul contentieux syro-irakien.
Mes chers collègues, vous n’êtes pas sans savoir que le dispositif judiciaire antiterroriste français se caractérise par la centralisation parisienne et la spécialisation des magistrats. L’ensemble des infractions terroristes criminelles, pour lesquelles le parquet de Paris a retenu sa compétence antiterroriste, est jugé par la cour d’assises de Paris. Quel problème se pose, dès lors ?
Tout d’abord, la cour d’assises de Paris est susceptible d’être particulièrement sollicitée pour composer les cours d’assises spéciales. Il y aura ainsi, en 2017, quatre compositions de cours d’assises permanentes, dont une spécialement composée pour des affaires essentiellement terroristes.
À cette difficulté s’en ajoute une autre, amenée par le contexte de forte menace terroriste que nous connaissons, hélas, en France. Alors que la cour d’assises spécialement composée de Paris devra juger en 2017 au minimum sept dossiers, eu égard au respect du délai d’un an d’audiencement prévu par l’article 181 du code de procédure pénale, la situation de la cour d’assises de Paris est aggravée par l’augmentation très importante du nombre de procédures pour crimes terroristes. La cour d’assises de Paris apparaît donc aujourd’hui en très grande difficulté.
L’augmentation actuelle des procédures pour infractions terroristes aura un effet particulièrement chronophage pour les magistrats pouvant siéger à la cour d’assises spéciale, pour des dossiers qui peuvent réclamer entre six jours et plusieurs semaines d’audience.
Par conséquent, la réduction du nombre d’assesseurs de la cour d’assises spécialement composée est une nécessité pour l’efficacité de la justice pénale. C’est dans cette perspective que la proposition de loi vise à modifier la composition de la cour d’assises spéciale, en ramenant le nombre d’assesseurs de six à quatre en première instance et de huit à six en appel.
Une telle modification de la composition de la cour d’assises spéciale aurait vocation à s’appliquer à toutes les matières relevant de sa compétence et ne serait pas réservée au seul jugement des crimes terroristes.
Cette mesure contribuerait à réduire les délais de comparution pour améliorer l’effectivité du droit à être jugé dans un délai raisonnable, élément essentiel du droit à un procès équitable. Elle permettrait, d’une part, une plus grande efficacité de la justice antiterroriste et l’audiencement d’un plus grand nombre d’affaires, et, d’autre part, l’amélioration de l’activité des juridictions parisiennes, qui seront proportionnellement moins sollicitées pour composer la cour, dont les compétences dépassent la seule matière terroriste.
Certes, en tant que rapporteur pour avis du budget des services judiciaires, je préférerais que nous puissions augmenter les moyens consacrés à la justice, mais nous sommes confrontés à un principe de réalité. « Nécessité fait loi », en quelque sorte : nous devons trouver une solution en rapport avec les moyens dont nous disposons.
La grande majorité des magistrats entendus par notre rapporteur Michel Mercier, que je salue ici pour son excellent travail de fond, approuvent cette modification législative, dont ils espèrent l’entrée en vigueur prochaine. Cependant, les représentants des avocats se sont inquiétés d’un risque d’atteinte à la solennité et à l’autorité de la décision, en raison de la moindre collégialité de la cour et d’une possible atteinte à la qualité de la décision rendue.
Notre rapporteur considère que la réduction du nombre de magistrats professionnels de la cour d’assises spécialement composée serait probablement sans effet négatif sur la qualité des décisions rendues, mais aurait très probablement un effet significatif sur l’amélioration des conditions de travail de l’ensemble des juridictions susceptibles d’être sollicitées pour composer ces cours d’assises, au premier rang desquelles la juridiction parisienne compétente nationalement pour le terrorisme. Je partage cette opinion.
Enfin, notre rapporteur l’a très justement rappelé, cette mesure traduit également l’exigence de bonne administration de la justice, objectif à valeur constitutionnelle qui découle des articles XIV et XV de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789.
Pour toutes ces raisons, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, le groupe UDI-UC, conforté par la position favorable de la commission, votera en faveur de la proposition de loi. (Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC.)
M. le président. La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion du texte de la commission.
proposition de loi relative à la composition de la cour d'assises de l’article 698-6 du code de procédure pénale
Article unique
(Non modifié)
À la première phrase du premier alinéa de l’article 698-6 du code de procédure pénale, le mot : « six » est remplacé par le mot : « quatre » et le mot : « huit » est remplacé par le mot : « six ».
M. le président. Personne ne demande la parole ?…
Je mets aux voix, dans le texte de la commission, l’article unique de la proposition de loi.
(La proposition de loi est adoptée.)
15
Autorités administratives indépendantes et autorités publiques indépendantes
Discussion en troisième lecture et adoption définitive d’une proposition de loi et d’une proposition de loi organique dans les textes de la commission
M. le président. L’ordre du jour appelle, à la demande du groupe Les Républicains, la discussion en troisième lecture de la proposition de loi, modifiée par l’Assemblée nationale en deuxième lecture, portant statut général des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes et de la proposition de loi organique, modifiée par l’Assemblée nationale en deuxième lecture, relative aux autorités administratives indépendantes et autorités publiques indépendantes (textes de la commission nos 256 et 255, rapport n° 254).
Il a été décidé que ces deux textes feraient l’objet d’une discussion générale commune.
Dans la discussion générale commune, la parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Jean-Vincent Placé, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé de la réforme de l'État et de la simplification. Monsieur le président, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, nous examinons aujourd’hui en troisième lecture la proposition de loi organique et la proposition de loi, déposées par les sénateurs Marie-Hélène Des Esgaulx, Jean-Léonce Dupont et Jacques Mézard, qui visent à instaurer un statut unique pour les autorités administratives indépendantes et autorités publiques indépendantes.
Nous avons eu, depuis plusieurs mois, de longs et passionnants débats sur les propositions issues du travail d’une commission sénatoriale. Et nous avons depuis lors fait un long chemin, qui a, je crois, permis d’entendre les différentes positions, et qui a surtout permis de trouver des conciliations prenant en compte des positions différentes, mais pas forcément opposées.
On le sait, le problème est loin d’être simple. Il avait déjà été soulevé par plusieurs rapports parlementaires. La commission d’enquête du Sénat, qui a précédé ces propositions, concluait : « La prolifération de ces autorités contribue de plus en plus fortement à l’illisibilité et au dysfonctionnement du système institutionnel, alors même que la volonté de simplification administrative doit constituer une ardente obligation, afin de redonner tout son sens et son efficacité à l’action publique. »
Cette conclusion sur la nécessité de simplifier et d’apporter une lisibilité est largement partagée sur les bancs du Parlement, et le débat autour de la création d’un statut général est un débat ancien et récurrent. L’initiative sénatoriale ne pouvait donc que susciter l’intérêt.
Il est vrai que, depuis la création en 1978 de la CNIL, la Commission nationale de l'informatique et des libertés, première autorité administrative indépendante, bien d’autres ont été créées, dans des domaines divers, avec des finalités diverses, et avec des modes de fonctionnement également très divers. Je me dois cependant de souligner que la création de ces autorités a répondu à des problématiques d’intérêt général, avec notamment l’objectif d’assurer de nécessaires régulations dans des secteurs où c’était indispensable et où ce type d’autorités constitue une réponse adaptée. Il est important de ne pas l’oublier.
Si la volonté de simplifier ne peut qu’être partagée, notamment par le secrétaire d’État en charge de la simplification, les difficultés apparaissent dès lors que l’on s’intéresse aux dispositions qui composeraient ce statut, puisqu’il s’adresse à des autorités fort différentes.
Je pense par exemple aux garanties offertes en matière de déontologie et d’indépendance ou à la rationalisation des modes de fonctionnement. Autant de questions sur lesquelles le Gouvernement avait d’ailleurs engagé un travail depuis plusieurs années, comme le processus de mise en commun de certaines fonctions supports des services du Premier ministre et des AAI visant à réduire les coûts et à développer un mode de fonctionnement collaboratif entre les services ou la mise en place par diverses lois de règles communes.
Les propositions de loi que nous examinons aujourd’hui visent à aller au-delà, en créant une liste limitative des autorités reconnues en tant qu’autorités administratives indépendantes, et en précisant les modes de fonctionnement et de nomination, mais également les modalités de contrôle et en unifiant le statut de leurs membres.
Le texte, tel qu’il a été présenté en première lecture au Sénat, a largement évolué. Les amendements, tant au Sénat qu’à l’Assemblée nationale, ont contribué à modifier, préciser, voire réévaluer certaines dispositions. Je veux d’ailleurs souligner, au-delà de nos divergences de vues sur certains points, la qualité du travail réalisé tant par les sénateurs que par les députés, notamment par les rapporteurs de ces textes. La tâche n’était pas simple !
La position du Gouvernement a d’ailleurs également évolué, puisque, dans sa version initiale, le texte n’avait pu recevoir notre assentiment. En effet, il n’allait pas dans le sens du travail gouvernemental très important engagé sur les AAI et pouvait même présenter des dispositions allant à l’encontre de décisions récentes prises par le législateur ou le Gouvernement, ou soulevant de réelles questions de constitutionnalité.
Je ne puis que constater, avec la plus grande satisfaction, que le texte que nous examinons aujourd’hui a pris en compte nombre des remarques formulées par le Gouvernement et a révisé des dispositions qui apparaissaient problématiques. De même, des équilibres ont été trouvés entre les assemblées, notamment sur la liste, les règles de fonctionnement, de déontologie et les incompatibilités.
Les rapporteurs ont très bien travaillé, et je souscris à nombre des compromis qui ont été trouvés.
Permettez-moi cependant d’exprimer quelques regrets sur des dispositions qui risquent d’être pénalisantes pour certaines de ces AAI. Je pense notamment aux règles d’incompatibilité avec des activités professionnelles, qui mettent en difficulté les recrutements dans les AAI relevant d’une technicité très importante. En effet, une trop grande restriction en amont et en aval de l’exercice de leurs membres engendrera de la complexité dans des secteurs où les experts et les talents viennent parfois à manquer. Je pense aussi à certaines autorités qui n’ont pas été intégrées dans la liste des autorités administratives indépendantes et qui semblaient pourtant répondre aux critères arrêtés par ce texte.
Toutefois, l’équilibre est parfois complexe à trouver, et le compromis est un signe de la bonne santé de notre démocratie.
En conclusion, je vous remercie une nouvelle fois, mesdames, messieurs les sénateurs, du travail de très grande qualité que vous avez réalisé sur ces textes et j’exprime, au nom du Gouvernement, un sentiment favorable à leur égard. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jacques Mézard, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, ce dossier fut une longue marche, et je me réjouis de l’évolution de la position du Gouvernement. C’est la mode de changer, mais quand cela va dans le bon sens, on ne peut que s’en réjouir ! (Sourires.)
Avec les membres de mon groupe, j’ai voulu créer une commission d’enquête sur la question des autorités administratives indépendantes. Sous la présidence de Marie-Hélène Des Esgaulx, cette instance a beaucoup travaillé, auditionnant notamment les 42 présidents d’autorités administratives indépendantes.
Mon idée n’était pas de proposer la suppression des autorités administratives indépendantes, mais de faire en sorte qu’elles soient dotées d’un statut général et d’en diminuer le nombre, afin que cette appellation ne s’applique qu’à des organismes prenant effectivement des décisions administratives et réellement indépendantes, ce qui n’est pas toujours le cas.
Au début des travaux de la commission d’enquête, le secrétaire général du Gouvernement s’était montré hostile à l’idée d’un statut général. Nous voici, après un long combat, parvenus à la troisième lecture de ces textes devant notre assemblée.
Je suis de ceux qui considèrent que notre pays est doté d’une haute fonction publique compétente et de haut niveau, mais, dans une véritable démocratie, il est bon que celle-ci exerce sa mission sous l’autorité des élus, et non l’inverse.
Nous sommes donc appelés, aujourd’hui, à tirer le bilan de ce marathon législatif. Je renvoie à mes différents rapports pour exposer le contenu de ces textes. À ce stade et en me réjouissant que nous allions au bout du processus, je me bornerai à quelques observations générales.
Ce processus témoigne, tout d’abord, d’une parfaite articulation entre les deux missions du Parlement dans un régime représentatif : contrôler et légiférer. Monsieur le secrétaire d’État, le Parlement est capable, quand on le laisse travailler, d’exercer ces deux missions, et ce n’est pas en réduisant le nombre des parlementaires de moitié que l’on fera avancer les choses… (M. Patrick Abate applaudit.)
Je ne délivre pas là d'ailleurs un message subliminal, tant cette proposition est équitablement partagée dans différents groupes politiques… (Sourires.)
Les autorités administratives et publiques indépendantes sont un sujet de réflexion désormais ancien, et je souhaite rendre hommage aux travaux réalisés par notre ancien collègue, le doyen Gélard, sur lesquels nous nous sommes appuyés.
Je suis heureux de constater que, au terme des débats législatifs, huit des onze propositions de la commission d’enquête sont, au moins partiellement, mises en œuvre par ces textes. Il a fallu trouver un consensus entre les deux assemblées, ce qui n’a empêché ni le débat ni la confrontation.
Je dois remercier notre collègue Marie-Hélène Des Esgaulx, qui a présidé efficacement la commission d’enquête (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.), le questeur Jean-Léonce Dupont, qui s’est joint à nous pour le dépôt de ces propositions de loi (Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC.), et le ministre Alain Richard, qui a apporté son expertise et nous a permis d’avancer positivement. À l’Assemblée nationale, le rapporteur, le président Jean-Luc Warsmann, a également beaucoup contribué à ce que nous arrivions à trouver ensemble une solution.
Fixer un statut général à ces autorités n’était pas particulièrement facile ! À ce jour, il en existe quarante-deux. Pendant longtemps, nous avons assisté à une véritable prolifération, le Parlement y apportant d’ailleurs, dans la plupart des cas, sa validation. Les gouvernements successifs entendaient ainsi laisser à des autorités administratives indépendantes la responsabilité de certains domaines d’action.
Nous vous proposons aujourd’hui de passer de quarante-deux à vingt-six. Pour ceux qui ont particulièrement travaillé sur ces textes, comme Marie-Hélène Des Esgaulx et moi-même, c’est encore trop ! Nous avons dû faire des concessions, en particulier sur la Commission nationale du débat public, qui n’est pas une autorité, ou sur le Médiateur national de l’énergie, dont je salue la capacité de lobbying… (Sourires.)
Pendant des mois, nous avons pu constater que certaines autorités administratives indépendantes ont une capacité remarquable à pratiquer le lobbying et à considérer qu’elles sont non seulement indépendantes, mais, qui plus est, au-dessus de tout contrôle… C’est quelque chose d’absolument exceptionnel et qui n’a jamais cessé pour certaines d’entre elles !
M. Didier Marie. Des noms ! (Sourires.)
M. Jacques Mézard, rapporteur. Tout est inscrit dans les rapports que nous avons publiés, mon cher collègue.
M. Philippe Bonnecarrère. Nous les avons lus !
M. Jacques Mézard, rapporteur. Il a donc fallu beaucoup de détermination pour aller jusqu’au bout, et toute notre énergie – c’est le cas de le dire… (Nouveaux sourires.) – ne nous a pas suffi pour y arriver en ce qui concerne le médiateur dont je viens de parler…
L’Assemblée nationale a accepté, en deuxième lecture, plusieurs apports sénatoriaux. Un accord s’est noué sur les règles de fonctionnement et d’organisation de ces autorités, ainsi que sur les garanties d’indépendance de leurs membres. La deuxième lecture a parachevé, sur ce point, le rapprochement engagé en première lecture.
Chaque membre disposera d’un mandat irrévocable d’une durée comprise entre trois et six ans et les conditions de sa cessation seront strictement encadrées. Un membre ne pourra exercer plus d’un mandat concomitamment au sein de ces autorités, sauf pour représenter l’autorité dont il est membre au sein d’une autre autorité indépendante.
Sur ce point, je rappelle ce que nous avons constaté : pratiquement les deux tiers des autorités administratives indépendantes étaient présidés par des membres du Conseil d’État, dont la plupart continuaient d’y siéger, voire d’y exercer des responsabilités importantes.
M. Alain Bertrand. Voilà un vrai cumul…
M. Jacques Mézard, rapporteur. Il était donc temps de disposer d’un statut général. Des conseillers d’État ou des conseillers à la Cour des comptes peuvent certes siéger dans les autorités administratives indépendantes, dans la mesure où la loi en décide ainsi, mais ce n’est pas la peine d’en ajouter systématiquement.
En matière déontologique, nous sommes parvenus à fixer des règles strictes, qui étaient nécessaires. Contre l’avis du Gouvernement, mais avec l’accord du président Jean-Louis Nadal, nous avons prévu l’établissement et la publication d’une déclaration de patrimoine pour les membres de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique. Qui résistait à cette mesure ? Ce n’était pas le président de la Haute Autorité, mais bien le Gouvernement ! (Exclamations.)
M. Yves Détraigne. Ce n’est pas bien !
M. Jacques Mézard, rapporteur. Pas bien du tout, en effet.
Cette évolution est tout à fait indispensable, puisqu’elle permet à ces autorités de voir leur indépendance reconnue.
Dans le même temps, nous avons renforcé le contrôle du Parlement, en prévoyant l’obligation de déposer, d’une part, un rapport annuel, d’autre part, un document budgétaire en annexe du projet de loi de finances. Ces documents permettront au Parlement d’avoir une vue précise de l’évolution du financement et du coût de ces autorités administratives indépendantes.
Enfin, le consensus auquel nous avons abouti avec l’Assemblée nationale englobe aussi la question de l’application de l’article 13 de la Constitution. Le champ des nominations soumises, dans ce cadre, au contrôle du Parlement a été étendu à plusieurs présidences d’autorités, dont celle de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques – ce progrès qui devrait être relevé par notre Haute Assemblée… –, ainsi que de celle de la Commission nationale de l’informatique et des libertés, qui n’y tenait pas du tout.
Mes chers collègues, je conclurai en remerciant tous ceux qui ont contribué, d’une manière ou d’une autre, à l’adoption de ces propositions de loi, mais en émettant aussi un regret, celui de la profonde difficulté à faire aboutir de tels textes, pourtant indispensables. Cela a été possible sans procédure accélérée, mais grâce à la collaboration entre les groupes politiques – je tiens d’ailleurs à remercier le groupe Les Républicains de l’Assemblée nationale d’avoir inscrit ce texte dans son ordre du jour réservé.
L’adoption de ces deux propositions de loi constitue une avancée démocratique, ce qui est très important dans les temps que nous vivons ! (Applaudissements sur les travées du RDSE, du groupe écologiste et du groupe socialiste et républicain, ainsi que sur certaines travées du groupe Les Républicains et du groupe UDI-UC.)
M. le président. La parole est à M. André Gattolin.
M. André Gattolin. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, les deux textes que nous examinons aujourd’hui en troisième lecture traitent d’une question, à notre sens majeure, mais trop longtemps évacuée sous le tapis de l’organisation contemporaine de notre démocratie : les contours et modes de fonctionnement des fameuses autorités administratives indépendantes et autorités publiques indépendantes, qui n’ont cessé de se multiplier en France au cours des quatre dernières décennies.
Je tiens tout d’abord à saluer le climat transpartisan et très constructif dans lequel les débats entourant l’élaboration de ces deux textes ont pu se dérouler depuis leur dépôt, le 7 décembre 2015. Le président Mézard a rappelé les difficultés qu’il a rencontrées, mais les délais ont tout de même été relativement courts entre le dépôt de ces textes et aujourd’hui.
Je veux, au nom du groupe écologiste, féliciter nos collègues Marie-Hélène Des Esgaulx et Jacques Mézard de la richesse, la finesse et la grande pertinence des travaux qu’ils ont conduits au sein de la commission d’enquête à l’origine de ces deux propositions de loi, qu’ils ont déposées avec Jean-Léonce Dupont.
Avec beaucoup de justesse, leur rapport parlementaire avait mis en lumière les nombreuses dérives qui pouvaient entourer la prolifération des autorités indépendantes depuis la création de la toute première d’entre elles, en 1978 : la Commission nationale de l’informatique et des libertés.
Il est vrai que les dérives n’ont pas manqué depuis cette date : d’abord, dans le caractère parfois anarchique de leur prolifération ; ensuite, au niveau du contrôle démocratique et parlementaire souvent faible, en dépit des prérogatives très significatives qui leur étaient déléguées ; enfin, en ce qui concerne leur recrutement, excessivement endogamique, et le déficit de stricte déontologie, qui frôle parfois la ligne rouge du conflit d’intérêts.
Il faut avoir l’honnêteté de reconnaître que, en tant que législateur, nous avons souvent contribué à la multiplication, parfois désordonnée, de ces autorités et à la construction de ce que nos deux collègues ont qualifié, de manière certes un peu provocatrice, de sorte d’État dans l’État.
Nous l’avons parfois fait, parce que cela nous apparaissait comme une solution de repli face à un problème difficile que nous n’arrivions pas à résoudre autrement, mais sans que cela soit toujours aussi efficace que nous l’aurions souhaité, ni véritablement légitime d’un strict point de vue politique.
Sur le fond, le groupe écologiste soutient la présente démarche, qui vise à circonscrire plus efficacement les défauts entourant ce type de dispositifs et ainsi à gagner en cohérence, en transparence et en éthique démocratique.
C’est la voie à prendre pour répondre à la défiance croissante de nos concitoyens à l’endroit de nos institutions, comme à l’égard de notre administration, et renforcer les missions fondamentales principalement assignées à ces autorités, à savoir la protection des libertés publiques et la régulation de secteurs économiques ouverts à la concurrence.
Dès lors, nous saluons la compétence exclusive donnée au législateur de créer toute autorité administrative ou publique indépendante, tout comme l’élaboration – enfin ! – d’un statut commun pour ces autorités, avec un corpus déontologique et des principes fondamentaux communs encadrant leur fonctionnement et leur organisation.
Ainsi, une meilleure transparence est à présent exigée, notamment à travers un contrôle renforcé des obligations déclaratives de leurs membres auprès de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique. C’était d’autant plus nécessaire que, comme l’a souligné le rapport de la commission d’enquête du Sénat, pas moins de 102 des 571 membres devant déposer des déclarations d’intérêts et de situation patrimoniale n’avaient toujours pas satisfait à leurs obligations au 1er octobre 2015, malgré une information des présidents de leur autorité et une double relance.
Par ailleurs, le groupe écologiste se félicite de voir exaucé son souhait de maintenir le Comité d’indemnisation des victimes des essais nucléaires, la Commission nationale du débat public et le Médiateur national de l’énergie dans la liste exhaustive et réduite des autorités administratives ou publiques indépendantes. C’est une bonne chose, eu égard au rôle essentiel que ces autorités assument dans le fonctionnement de notre société.
Toutefois, nous regrettons que le régime de non-renouvellement et de non-cumul des mandats des membres de ces autorités ait été atténué par rapport à la proposition sénatoriale initiale.
De même, l’ambition de soumettre toutes les nominations de présidence de ces autorités à la procédure prévue par l’article 13 de la Constitution a été revue à la baisse, et c’est bien dommage ! Ce mécanisme aurait eu l’avantage de permettre plus de transparence et un véritable contrôle parlementaire sur lesdites nominations.
Nous déplorons également que le régime des incompatibilités de ces mandats avec les fonctions de magistrat professionnel ou de membre du Conseil d’État ait dû être affaibli au profit d’un consensus.
Aujourd’hui, près de deux tiers des présidents d’autorités administratives indépendantes sont des conseillers d’État ou des magistrats de la Cour des comptes, comme s’il n’existait pas, dans notre pays, d’autres compétences que celles qui sont présentes dans ces deux grands corps de l’État… Cela nous amène à nous interroger sur l’institution progressive de ce regrettable « entre soi »…
Malgré ces quelques reculs qui résultent de divergences de vues entre nos deux assemblées ou avec le Gouvernement, ces deux textes constituent une grande avancée. Par conséquent, le groupe écologiste votera en faveur de ces deux propositions de loi. (MM. Jean-Claude Requier et Yves Détraigne applaudissent.)
M. le président. La parole est à M. Didier Marie.
M. Didier Marie. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, avec cette troisième lecture, nous arrivons au terme d’un long processus parlementaire engagé en avril 2015 par la création de la commission d’enquête sollicitée par le groupe du RDSE, qui a abouti au rapport de notre collègue Jacques Mézard en novembre de la même année.
Au nom du groupe socialiste et républicain, je veux saluer le rapporteur pour la qualité de son travail et l’écoute dont il a fait preuve à l’égard des contributions venues de toute part, notamment celles qui ont été portées par Alain Richard au nom du groupe socialiste et républicain. Je veux aussi saluer son volontarisme – certains diront son obstination… – pour mener cette entreprise de réforme jusqu’à son terme contre les réticences initiales, il faut bien l’admettre, tant de l’Assemblée nationale que du Gouvernement.
Alors que le Sénat s’apprête à adopter définitivement les propositions de loi ordinaire et organique relatives aux autorités administratives indépendantes, notre groupe considère que les objectifs initiaux de clarification, de mise en cohérence et donc de stabilisation de ces autorités sont globalement atteints. De quarante-deux, le nombre des autorités administratives indépendantes est ramené à vingt-six, mais, ce qui est plus important que le nombre lui-même, ces textes réservent au législateur la compétence en matière de création d’autorités nouvelles.
Ces textes fixent, par ailleurs, un corpus de règles communes, qu’il s’agisse de l’organisation et du fonctionnement de ces autorités ou des règles déontologiques s’imposant à leurs membres : harmonisation des règles de nomination et de révocation, incompatibilités, limitation du cumul des mandats, extension des obligations déclaratives afin de lutter contre les conflits d’intérêts, etc. Je n’insiste pas, le rapporteur en ayant dressé la liste.
Reste que ces deux textes sont des compromis, ce qui nous amène à formuler deux regrets.
Le premier concerne la liste des autorités administratives indépendantes. L’Assemblée nationale, sans doute plus sensible au lobbying de certaines autorités, a souhaité conserver à quelques-unes d’entre elles une telle qualification, alors même qu’elles ne constituent pas une autorité, au sens où elles ne prennent pas formellement de décisions.
Insistons une dernière fois sur un aspect que le débat au cours de la navette a déjà permis de faire avancer : ne pas reconnaître la qualité d’autorité administrative indépendante à une institution ne revient pas à lui dénier son utilité ou sa légitimité ; cela ne veut pas non plus dire que l’on ne lui reconnaît pas d’indépendance.
Soucieux des inquiétudes formulées par quelques-unes d’entre elles, nous avons collectivement souhaité garantir dans la loi la nécessaire indépendance de certaines de ces institutions non reconnues comme autorités administratives indépendantes, telles que le Comité national consultatif d’éthique, la Commission des sondages ou la Commission nationale consultative des droits de l’homme. Si le temps démontre que d’autres consolidations de ce type se révèlent utiles, le législateur, évidemment, s’y emploiera.
Notre second regret concerne la dérogation au principe de non-renouvellement des membres. L’un des attributs élémentaires de l’indépendance, c’est de ne pas être candidat à quelque chose. Par définition, solliciter le renouvellement d’une nomination, que celle-ci procède du Gouvernement ou d’une assemblée politique, c’est sérieusement atténuer son indépendance, laquelle consiste à prendre ses décisions sans recueillir d’instruction ou d’approbation de la part des autorités de nomination.
Des arguments plaidaient en faveur de la continuité de la mission et du fait que toutes les autorités indépendantes ne sont pas de même importance, mais le résultat auquel nous sommes parvenus nous semble, sur ce point, imparfait. Certes, il existe heureusement des dispositions visant au constat collégial des manquements déontologiques, mais qu’il soit toujours possible de faire la tournée des autorités chargées de la nomination pour être renouvelé dans ses fonctions pose question. C’est sans doute, sur ce sujet, une occasion manquée.
Ces deux regrets ne sauraient néanmoins entamer le caractère positif du travail accompli. Notre groupe adoptera donc ces textes, qui sont des modèles de travail parlementaire et font honneur à notre fonction de législateur et donc à l’ensemble du Sénat. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et du RDSE. – M. Yves Détraigne applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, nous voici de nouveau réunis en séance publique pour examiner la proposition de loi organique relative aux autorités administratives indépendantes et autorités publiques indépendantes et la proposition de loi portant statut général de ces autorités.
Avec cette troisième lecture, qui débouchera, je l’espère, sur un vote conforme de ces deux textes, conformément à la position de la commission des lois, nous achevons un processus législatif qui honore le Parlement.
Je rappelle, en effet, que ces deux propositions de loi traduisent les onze propositions du rapport de la commission d’enquête adopté à la fin d’octobre 2015. Elles ont été déposées en décembre 2015 et adoptées par le Sénat, en première lecture et sans opposition, en février 2016, puis par l’Assemblée nationale en avril de la même année. La deuxième lecture s’est faite en juin au Sénat, puis en décembre 2016 à l’Assemblée nationale.
Il n’aura donc fallu qu’un peu plus d’un an pour traduire en termes législatifs les recommandations d’une commission d’enquête parlementaire. Cette trajectoire quasi parfaite a été permise par la volonté de parlementaires appartenant à tous les groupes politiques : ils se sont impliqués dans cette commission d’enquête pour mener un travail de contrôle approfondi et en tirer les conséquences sur le plan politique, alors même que le Gouvernement – disons-le, monsieur le secrétaire d’État ! – avait, au départ, exprimé une réserve certaine…
Ce résultat doit beaucoup, et je l’en remercie une fois encore, au président Jacques Mézard, rapporteur de la commission d’enquête que je présidais, puis désigné par la commission des lois comme rapporteur des deux propositions de loi. Il est la cheville ouvrière de ce travail. Il a su préserver l’essentiel du dispositif que nous proposions et trouver avec la majorité de l’Assemblée nationale des compromis intelligents, qui ne dénaturent pas le contenu de notre texte.
Merci, donc, monsieur Mézard. Ce fut un bonheur de travailler à vos côtés ! (Exclamations amusées.)
M. Philippe Dallier. Quelle déclaration !
M. Georges Labazée. C’est une déclaration d’amour !
Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. Il faut parfois le dire, mes chers collègues !
Je tiens également à saluer la volonté de rapprochement de notre collègue député, Jean-Luc Warsmann, rapporteur de l’Assemblée nationale, qui a grandement contribué à ce résultat final. Nous avons ainsi démontré que les deux chambres du Parlement pouvaient travailler ensemble de manière exemplaire.
Sur le fond, le rapporteur nous a présenté le dispositif, très équilibré, auquel nous sommes parvenus, mais j’insisterai sur trois points, qui m’ont tenu particulièrement à cœur tout au long de ce parcours législatif.
Tout d’abord, l’Assemblée nationale a adopté sans modification, dès la première lecture, l’article 1er de la proposition de loi organique, qui prévoit que la création d’une autorité administrative ou publique indépendante relève de la compétence exclusive du législateur. C’est un point essentiel. Le Parlement devra donc expressément consentir à la création d’une telle structure, et cela ne pourra plus être fait par assimilation successive ou « à l’insu de son plein gré »…
S’agissant du sort à réserver aux quarante-deux autorités existantes, les débats successifs aboutissent, finalement, à vingt-six – notre proposition de loi initiale n’en retenait que vingt –, en se fondant sur des critères d’indépendance bien identifiés, à savoir l’existence d’un pouvoir normatif, de régulation ou de sanction qui soit effectif.
Bien sûr, j’ai personnellement quelques interrogations sur les adjonctions opérées en séance publique, car les critères d’indépendance ne paraissent pas totalement remplis par certaines autorités. Je suis en total accord avec Jacques Mézard : je regrette qu’un critère de « visibilité », sans véritable contenu juridique, ait pu justifier la reconnaissance du Médiateur national de l’énergie – ce n’est pas raisonnable – ou le maintien de la Commission nationale du débat public.
N’oublions pas que la prolifération de ces « objets juridiques non identifiés », comme les qualifiait excellemment le doyen Gélard dans son rapport d’information publié en juin 2014, entraîne un délitement de l’État et nuit à la lisibilité de l’action publique.
J'en viens au deuxième point que je souhaite aborder. L’accord, auquel les deux assemblées sont parvenues sur les dispositions du statut général des autorités administratives ou publiques indépendantes, assure un corpus de règles garantissant l’indépendance de leurs membres et favorisant une diversification bienvenue de leur profil. Il conforte également les règles déontologiques, qui sont dorénavant exigeantes, notamment en ce qui concerne le contrôle renforcé sur les obligations déclaratives des membres et les limitations de leurs activités professionnelles, y compris après la cessation de leur mandat.
Le dispositif, tel qu’il a été adopté, permet le recrutement de membres hautement qualifiés – praticiens ou experts des secteurs économiques qu’ils doivent réguler –, tout en prévenant d’éventuels conflits d’intérêts.
Troisième point, le texte qui est soumis aujourd’hui à notre vote permet un contrôle parlementaire renforcé des autorités administratives ou publiques indépendantes.
En soumettant les nominations aux fonctions de président à la procédure prévue au dernier alinéa de l’article 13 de la Constitution, ce contrôle pourra s’effectuer de manière plus intense. En effet, le Sénat, après avoir souhaité que l’ensemble des autorités relève de cette procédure, s’est rallié à la position de l’Assemblée nationale, qui privilégie une stricte interprétation de cet article 13, qui n’évoque que les fonctions revêtant « une importance pour la garantie des droits et libertés ou la vie économique et sociale de la Nation ».
Finalement, sur les vingt-six autorités administratives ou publiques indépendantes qui sont qualifiées comme telles par la loi, seules les nominations à la présidence de six autorités ne sont pas soumises à la procédure de l’article 13 de la Constitution. C’est une avancée considérable.
En revanche, je me félicite que l’Assemblée nationale, en deuxième lecture, se soit ralliée à la position du Sénat pour confier au Président de la République, et, concomitamment, soumettre au contrôle parlementaire la nomination des présidents de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques et de la Commission nationale de l’informatique et des libertés.
Cela illustre parfaitement la volonté du Parlement de mieux suivre et contrôler l’action de ces autorités, qui exercent une influence significative sur l’exercice des droits et libertés par nos concitoyens ou sur le fonctionnement de la vie économique et sociale de notre pays.
En conclusion, je souhaite insister sur l’importance de ces deux textes qui souhaitent simplifier et rationaliser l’action publique, en mettant fin au dysfonctionnement institutionnel induit par la prolifération des autorités administratives ou publiques indépendantes. Jacques Mézard et moi-même évoquions un État dans l’État ; nous avions raison, et il était vraiment nécessaire d’intervenir.
Pour moi, il s’agit d’une première étape, qui met en place un cadre et des moyens d’action permettant d’exercer un véritable contrôle démocratique. C’est à nous, mes chers collègues, qu’il revient maintenant de faire vivre ce contrôle, en utilisant la boîte à outils que ces deux textes mettent à notre disposition. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et de l'UDI-UC. – M. Joseph Castelli applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme Cécile Cukierman.
Mme Cécile Cukierman. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, comme nous l’avions précisé lors des deux précédentes lectures, nous partageons les préoccupations des auteurs de ces textes et leurs propositions visant à ramener le nombre des autorités administratives indépendantes de quarante-deux actuellement à vingt-six et à mettre en place des règles communes de fonctionnement et de contrôle.
Comme nous avons déjà eu l’occasion de le souligner, au-delà de leur coût – près de 600 millions d’euros de budget par an, en hausse de 11 % depuis 2010, des effectifs en progression de 5,3 % et des rémunérations pouvant aller jusqu’à 300 000 euros annuels –, la multiplication des autorités administratives indépendantes, le manque de contrôle ou encore les statuts divers de leurs membres posent la question de l’unicité de l’État. Le contrôle qui doit être exercé sur ce type d’institutions est une nécessité dans une démocratie.
En effet, comme le souligne très justement l’auteur de la proposition de loi, l’intensité du contrôle du Parlement s’est réduite, à mesure que les gouvernements qui se sont succédé abandonnaient aux différentes autorités administratives indépendantes leurs compétences. La mise en œuvre de leur responsabilité devant le Parlement est à ce jour très insatisfaisante, quand elle n’est pas inexistante. Ainsi, dans le domaine économique, ces autorités déterminent de véritables politiques publiques, sans concertation avec le Parlement, donc sans contrôle ni légitimité démocratiques.
De plus, leur mode de mise en place, les problèmes de déontologie, les conflits d’intérêts ont été largement soulignés au cours des précédentes lectures. Trop nombreuses, les autorités administratives indépendantes accentuent un « entre soi » qui freine tout changement possible. À cet égard, les différents messages reçus, les relances parfois insistantes, pour ne pas dire plus, subis par les parlementaires de tous bords sont assez révélateurs, ainsi que la difficulté de trouver un compromis entre les deux assemblées sur la définition, pour ainsi dire la « labellisation », de ce que doit être, ou ne pas être, une autorité administrative indépendante.
Encore une fois, nous l’avons dit lors de chaque lecture, nous ne sommes pas hostiles par principe aux autorités administratives indépendantes et nous reconnaissons l’utilité de certaines d’entre elles, qui jouent un rôle de vigilance, de conseil, d’alerte et de protection des plus faibles.
Toutefois, nous ne pouvons pas nier que les autorités administratives indépendantes manquent de légitimité démocratique – je n’y reviens pas. Ce déficit ne peut être comblé par l’expertise réelle, ou parfois supposée, de ces autorités.
Si nous regrettons, comme cela a pu être souligné en commission, la dérogation au principe de non-renouvellement du mandat des membres d’une autorité administrative indépendante, ce dernier étant un gage d’indépendance, nous voterons encore une fois pour cette proposition de loi. Elle constitue en effet un premier pas vers la reconnaissance d’un constat que nous dressons depuis plusieurs années et qui est partagé : une perte de repères et de compétences des administrations centrales, la dilution du pouvoir de décision et donc de la responsabilité, une distorsion de l’État, la perte de son pouvoir politique sur les marchés et, enfin, la confiscation de la définition de l’intérêt général par une élite déconnectée des réalités. (M. Patrick Abate applaudit.)
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet.
Mme Nathalie Goulet. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, nous devons aujourd’hui à Jacques Mézard un texte qui fait honneur au travail du Parlement.
Je voudrais surtout faire l’éloge de la méthode qui a été suivie : une commission d’enquête, suivie du dépôt de deux propositions de loi très bien articulées et légitimes, compte tenu des résultats des travaux de la commission d’enquête, et une vraie navette où l’on prend le temps de travailler les textes sur une base solide. Il s’agit d’un cas exceptionnel dans le contexte des années qui viennent de s’écouler ! Il faut ajouter que la réforme constitutionnelle de 2008 a permis que des textes d’origine parlementaire aboutissent, avec un ordre du jour généralement rempli par le Gouvernement. Toutes ces bonnes fées se sont donc liguées autour du berceau de ce texte.
D’une femme, on aurait dit qu’elle était entêtée ; de Jacques Mézard, on dit qu’il est persévérant. Il a eu raison, car c’est un vrai sujet, qui est loin d’être anodin. Le travail ainsi réalisé a comblé un vide législatif, il était donc vraiment nécessaire.
De la même façon, lorsque l’on demande un rapport sur le rôle de l’État actionnaire, on nous oppose toujours l’argument que la Cour des comptes ou la commission des finances y travaillent. De nombreux rapports ont d’ailleurs été rendus, mais au terme de navettes soumises à un véritable travail d’entrisme, il ne se passe rien !
Il a donc fallu à cette commission d’enquête beaucoup de persévérance et la volonté d’assurer un suivi. Marie-Hélène Des Esgaulx l’a très bien dit : il appartiendra au Parlement de donner vie au travail accompli, notamment en matière budgétaire, car nous n’avons jamais le temps d’examiner vraiment les « jaunes » budgétaires. Si je poursuis le parallèle avec le rôle de l’État actionnaire, le budget de la mission est examiné en cinq minutes un vendredi soir – lorsqu’il est examiné ! –, alors qu’il s’agit d’un budget fondamental. Le Parlement devrait donc faire preuve de la même persévérance en abordant ce dernier sujet, car nous voyons qu’il est possible d’obtenir des résultats.
Multiplier les autorités administratives indépendantes revient à multiplier les délégations de décisions, cela a été dit. Déontologie, obligations liées au cumul des mandats, transparence : tout cela va dans le sens de ce que veulent les citoyens. En ce qui concerne le non-renouvellement des mandats, peut-être recevrons-nous un jour en boomerang les observations d’une autorité administrative indépendante qui nous suggérera d’en faire autant ?
Il faudra, enfin, assurer un vrai suivi de ces questions, et c’est là que commenceront les problèmes. Il faudra non seulement se pencher sur l’application de la loi, mais aussi être vigilant lors de l’examen du budget, comme l’a dit Jacques Mézard. Quoi qu’il en soit, c’est le seul exemple d’une initiative parlementaire qui arrive à son terme, après six mois de commission d’enquête et un an de navette, ce qui représente finalement un délai assez court. Je suis sûre que le rapporteur n’éprouvera pas de baby blues en sortant de cette séance et qu’il trouvera un autre sujet sur lequel il pourra travailler !
Le groupe UDI-UC votera évidemment ces textes, fruits d’une excellente initiative menée de main de maître. Nous en félicitons l’auteur, ainsi que la commission et l’ensemble de nos collègues qui ont travaillé sur ce sujet. (Applaudissements sur les travées de l’UDI-UC. – MM. Alain Bertrand et Marc Laménie applaudissent également.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Requier.
M. Jean-Claude Requier. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, le Sénat revient en troisième lecture sur la proposition de loi organique relative aux autorités administratives indépendantes et aux autorités publiques indépendantes et sur la proposition de loi portant statut général des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes. Ces deux textes ont été déposés dans la continuité de l’excellent rapport de la commission d’enquête sénatoriale créée sur l’initiative du groupe du RDSE et de son président, Jacques Mézard. Il est bon d’en rappeler le titre : Un État dans l’État – Canaliser la prolifération des autorités administratives indépendantes pour mieux les contrôler.
Dans son ouvrage La légitimité démocratique, l’historien et sociologue Pierre Rosanvallon démontre que les autorités administratives indépendantes détiennent une légitimité « d’impartialité ». Or deux conditions sont nécessaires à cette légitimité : que les autorités administratives indépendantes ne soient pas irresponsables et qu’elles soient soumises à des exigences procédurales strictes.
Au regard des pouvoirs considérables détenus par certaines autorités administratives indépendantes, comme la prise de décisions conduisant à l’inéligibilité d’un élu, l’envoi d’injonctions aux ministres, l’accès de droit à des documents protégés par le secret de la défense nationale, il est essentiel que la représentation nationale puisse contrôler leur création et leur fonctionnement.
L’indépendance de ces autorités administratives indépendantes ne saurait fonder une caste administrative exempte de toute responsabilité. Or la commission d’enquête du Sénat a constaté que la représentation nationale ne contrôle pas vraiment – ou pas suffisamment – ni la création ni le fonctionnement de ces autorités.
Tout d’abord, le transfert de pouvoir du Gouvernement vers les autorités administratives indépendantes n’est assorti, d’après ce même rapport qui fera date, « d’aucun transfert de responsabilité politique devant le Parlement ».
Toujours selon ce rapport, « les autorités administratives indépendantes peuvent, dans leur domaine de compétence, mener une politique dont elles ne sont pas amenées à répondre devant les assemblées dans les mêmes termes que les membres du Gouvernement. L’équilibre des pouvoirs est, de ce point de vue, rompu, car le Parlement ne peut mettre en cause que le Gouvernement qui, dépossédé de sa compétence, renvoie allégrement aux décisions d’une autorité sur laquelle les parlementaires ont une prise réduite. Au total, le transfert de la compétence du Gouvernement vers une autorité administrative indépendante se traduit, pour le Parlement, par un appauvrissement démocratique. »
On cerne ici le problème de l’indépendance fonctionnelle des autorités administratives indépendantes. Il faut pouvoir renforcer le contrôle démocratique du Parlement sur celles-ci, les encadrer et les doter d’un statut, car indépendance ne signifie pas irresponsabilité. À ce titre, la proposition de loi portant statut général des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes va dans le bon sens, en prévoyant d’obliger ces autorités à adresser chaque année, au Parlement et au Gouvernement, un rapport d’activité, et en leur imposant, lorsque les commissions permanentes compétentes de l’Assemblée nationale et du Sénat le demandent, de rendre compte devant elles, annuellement, de leur activité. Voilà un pas important vers le contrôle démocratique de ces autorités par le Parlement.
Par ailleurs, le manque de diversification dans la nomination des membres des autorités administratives indépendantes favorise un sentiment d’« entre soi » qui doit prendre fin entre membres du Conseil d’État, de la Cour de cassation et de la Cour des comptes. La proposition de loi prévoit intelligemment que « nul ne peut être membre de plus de deux autorités » et que le mandat de membre d’une autorité administrative indépendante ne peut être renouvelé qu’une seule fois.
Afin de lutter contre la politisation des nominations des membres des autorités administratives indépendantes, la proposition de loi a élargi le contrôle parlementaire sur les nominations à la présidence de certaines de ces autorités.
Enfin, comme l’indiquait le rapport établi par notre collègue Patrice Gélard en 2006, « l’irrévocabilité des mandats des membres des AAI constitue une garantie d’indépendance essentielle permettant, selon les termes de Mme Marie-Anne Frison-Roche [spécialiste du droit de la régulation], d’éviter “une capture de l’autorité par le politique” ». À ce sujet, la proposition de loi contient justement plusieurs règles relatives au statut des membres de ces autorités. Elle harmonise la durée du mandat entre trois ans et six ans, pose le principe de l’irrévocabilité du mandat et renforce le régime des incompatibilités.
Dans le droit fil de ces textes sur la simplification administrative, le Gouvernement devra faire preuve de sagesse en supprimant les doublons et en évitant d’en créer d’autres, lorsqu’il confie à une autorité administrative indépendante des missions qui se superposent à celles de l’administration. À l’heure où les élus, les maires et les présidents d’établissements publics de coopération intercommunale doivent participer à l’effort national de réduction des dépenses publiques, l’État doit montrer l’exemple et éviter les dépenses inutiles de son administration. Il faut donc supprimer les postes qui doublonnent dans les ministères concernés !
Enfin, le Gouvernement doit également progresser sur un sujet connexe à celui des autorités administratives indépendantes, celui du contrôle et de la fixation d’un cadre commun aux « agences de l’État », dont le nombre ne cesse de se multiplier. En 2015, 1 244 agences de l’État étaient répertoriées par l’Inspection générale des finances. En 2012, le Conseil d’État relevait dans son rapport annuel que la création d’une agence n’est neutre ni d’un point de vue budgétaire ni en termes de gestion publique et recommandait de subordonner toute création à une évaluation de sa pertinence. À ce sujet, le Conseil d’État propose de réévaluer la pertinence des missions confiées à chaque agence de l’État et d’imposer une étude d’impact comme préalable à la création d’une agence.
Monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, le groupe du RDSE soutient ces deux propositions de loi permettant de mettre fin à la prolifération excessive des autorités administratives indépendantes et de renforcer leur contrôle démocratique de manière permanente et effective ! (Applaudissements sur les travées du RDSE. – M. André Gattolin applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. François Bonhomme.
M. François Bonhomme. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, cette ultime discussion est l’occasion pour beaucoup de souligner l’esprit constructif qui a prévalu tout au long de la procédure et la volonté de convergence qui s’est fait jour sur les points qui restaient en suspens.
Il faut ici souligner le remarquable et valeureux travail préparatoire de nos collègues qui a permis d’y parvenir, consécutif au rapport de la commission d’enquête sénatoriale menée par Marie-Hélène Des Esgaulx, Jacques Mézard et Jean-Léonce Dupont.
Ce travail nous a permis de mesurer le chemin parcouru depuis 1978, date de la première création d’une autorité administrative indépendante, la Commission nationale de l’informatique et des libertés, la CNIL, ainsi que la multiplication des autorités administratives indépendantes qui a suivi.
Depuis, ces autorités, qui ont prospéré, régissent des pans entiers des politiques publiques, dans des domaines aussi divers que les marchés financiers, le numérique, les données personnelles, l’audiovisuel ou la bioéthique…
Personne ne conteste sérieusement l’action des autorités administratives indépendantes, qu’il s’agisse de la protection des droits et des libertés des citoyens face au pouvoir de l’administration et au développement de certaines technologies ou de la régulation de divers secteurs de la vie économique, notamment ceux qui sont ouverts à la concurrence pour respecter les règles de l’Union européenne. Leur utilité est donc largement démontrée et ce constat est partagé.
Pour autant, c’est à la lumière de cette montée en puissance que je m’associe pleinement à la volonté de rationaliser leurs moyens, particulièrement dans un contexte de contraintes financières qu’il est inutile de rappeler, mais aussi de garantir leur indépendance, sans en faire un « quatrième pouvoir ».
Cet objectif suppose un contrôle rapproché du Parlement, par le biais de la nomination de leurs responsables, en amont, et par un contrôle annuel, en aval.
Rappelons ici une évidence : la contrepartie logique au fait que ces autorités ne procèdent pas du suffrage universel est un contrôle effectif par la représentation nationale – c’est même une condition de leur légitimité démocratique. Or, jusqu’à présent, aucun corpus juridique ni déontologique n’est venu clarifier le cadre de leur création et de leurs missions.
La proposition de loi organique vient justement renforcer le contrôle des assemblées sur les autorités administratives indépendantes et les autorités publiques indépendantes, s’agissant notamment des modalités de nomination à la présidence de ces autorités ou en fixant un socle d’incompatibilités électorales et professionnelles.
La proposition de loi ordinaire clarifie aussi les règles de fonctionnement des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes en matière financière, comme en matière de gestion de leurs effectifs. D’une part, elle définit un cadre déontologique par un régime contraignant d’incompatibilités et, d’autre part, elle met en place un statut général et un contrôle étroit par la représentation nationale. De ce point de vue, il paraît normal qu’elle réserve la création de ces autorités au législateur et laisse le soin à la loi d’en arrêter une liste exhaustive et réduite.
Là aussi, un rapprochement des points de vue a été possible entre l’Assemblée nationale et le Sénat avec dorénavant 26 autorités. Plus particulièrement, je souscris aux dispositions nouvelles qui prévoient une autonomie financière encadrée, une durée des mandats des membres harmonisée, un principe d’irrévocabilité du mandat des membres, l’interdiction de siéger en même temps au sein de plusieurs autorités administratives ou publiques indépendantes, le non-renouvellement du mandat pour la fonction de président, la diversification des profils des membres, la prévention de tout risque de conflits d’intérêts et, enfin, la transparence des nominations.
Toutes ces dispositions sont à l’évidence de nature à renforcer la légitimité des autorités et, finalement, à approfondir et donner corps à notre État de droit. C’est donc une amélioration qu’il faut ici saluer, tout comme l’exercice par le Sénat de sa mission de contrôle. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – MM. Loïc Hervé et Yves Détraigne applaudissent également.)
M. le président. La parole est à M. Marc Laménie. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Marc Laménie. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, je tiens naturellement à m’associer à l’ensemble des orateurs qui m’ont précédé pour saluer le travail réalisé par la commission d’enquête. Celui-ci a abouti, en décembre 2015, au dépôt de ces deux propositions de loi, destinées à mettre en place un statut général des autorités administratives et publiques indépendantes.
Je remercie donc nos collègues Jacques Mézard, Marie-Hélène Des Esgaulx et Jean-Léonce Dupont, auteurs de ces propositions de loi, ainsi que l’ensemble des membres de la commission des lois, ceux d’hier, comme le doyen Patrice Gélard, et ceux d’aujourd’hui.
Nous pouvons mesurer les progrès réalisés au long du cheminement de ces deux textes au sein des deux assemblées parlementaires. Le rapport met en lumière tout le travail d’investigation qui a été nécessaire pour parvenir au compromis tout à fait positif réduisant le nombre d’autorités administratives et publiques indépendantes à 26, soit 19 autorités administratives indépendantes et 7 autorités publiques indépendantes.
Il est vrai que nous ne connaissons pas toutes ces autorités qui jouent un rôle incontestable pour la transparence, l’indépendance, l’éthique et la morale. Par exemple, la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique recueille les déclarations de patrimoine et d’intérêts de plusieurs milliers de personnes, membres du Gouvernement, parlementaires, élus locaux, membres de cabinets ministériels, hauts fonctionnaires et, justement, les membres de ces autorités administratives et publiques indépendantes. Je pourrais également citer l’Autorité de sûreté nucléaire, dont j’ai pu mesurer, dans mes fonctions de président de commission locale d’information de la centrale nucléaire de Chooz, le rôle important en matière de transparence.
Ces autorités devront rendre compte, chaque année, de leur coût de fonctionnement, dans le cadre de la loi de finances, et de l’exécution de leurs missions et de leurs engagements de service public. Leur autonomie financière sera encadrée, la transparence des nominations en leur sein sera renforcée, le nombre de renouvellements des mandats sera limité. Enfin, l’ensemble des règles déontologiques qui leur sont applicables sera conforté. Ces avancées sont autant de garanties qui permettront d’instaurer un climat de confiance.
Nous voterons donc ces deux propositions de loi qui vont dans le bon sens. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Yves Détraigne applaudit également.)
M. le président. La discussion générale commune est close.
Nous passons à l’examen de la proposition de loi, dans le texte de la commission.
proposition de loi portant statut général des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes
Article 1er
(Non modifié)
Les titres Ier à IV de la présente loi constituent le statut général des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes dont la liste est annexée à la présente loi.
Annexe
1. Agence française de lutte contre le dopage
2. Autorité de contrôle des nuisances sonores aéroportuaires
3. Autorité de régulation des communications électroniques et des postes
4. Autorité de la concurrence
4 bis. Autorité de régulation de la distribution de la presse
5. Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières
6. Autorité de régulation des jeux en ligne
7. Autorité des marchés financiers
8. Autorité de sûreté nucléaire
8 bis. Comité d’indemnisation des victimes des essais nucléaires
9. Commission d’accès aux documents administratifs
9 bis. Commission du secret de la défense nationale
10. Contrôleur général des lieux de privation de liberté
11. Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques
12. Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement
12 bis. Commission nationale du débat public
13. Commission nationale de l’informatique et des libertés
14. Commission de régulation de l’énergie
15. Conseil supérieur de l’audiovisuel
16. Défenseur des droits
17. Haute Autorité de santé
18. Haut Conseil de l’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur
19. Haut Conseil du commissariat aux comptes
19 bis. Haute Autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur internet
20. Haute Autorité pour la transparence de la vie publique
21. Médiateur national de l’énergie
M. le président. Je mets aux voix l’ensemble constitué par l’article 1er et l’annexe.
(L’article 1er et l’annexe sont adoptés.)
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Article 4
(Non modifié)
Pour l’application de la présente loi, les dispositions des titres Ier à IV mentionnant le président d’une autorité administrative indépendante s’appliquent au Défenseur des droits, au Contrôleur général des lieux de privation de liberté et au médiateur national de l’énergie.
Les articles 5 à 13 et l’article 22 ne sont pas applicables au Défenseur des droits. Par dérogation à la première phrase de l’article 16, il établit le règlement intérieur de l’institution, dont les règles déontologiques s’appliquent également aux adjoints, aux membres du collège et à ses délégués.
L’article 5, les deuxième à dernier alinéas de l’article 7 et les articles 8 et 12 ne sont pas applicables au Contrôleur général des lieux de privation de liberté. Par dérogation à la première phrase de l’article 16, il établit le règlement intérieur de l’autorité.
La dernière phrase du second alinéa de l’article 5, les deuxième à avant-dernier alinéas et la seconde phrase du dernier alinéa de l’article 7, le second alinéa du II de l’article 8 et l’article 12 de la présente loi ne sont pas applicables au médiateur national de l’énergie. Par dérogation à la première phrase de l’article 16, le médiateur établit le règlement intérieur de l’autorité. Par dérogation à l’article 20, il établit le budget de l’autorité publique indépendante sur proposition du directeur général. – (Adopté.)
TITRE IER
ORGANISATION DES AUTORITÉS ADMINISTRATIVES INDÉPENDANTES ET DES AUTORITÉS PUBLIQUES INDÉPENDANTES
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Article 8
(Non modifié)
I. – (Supprimé)
II. – Le mandat de membre d’une autorité administrative indépendante ou d’une autorité publique indépendante est renouvelable une fois.
Un membre nommé en remplacement d’un membre ayant cessé son mandat avant son terme normal est désigné pour la durée du mandat restant à courir. Si cette durée est inférieure à deux ans, ce mandat n’est pas pris en compte pour l’application des règles propres à chaque autorité en matière de limitation du nombre de mandat de ses membres. – (Adopté.)
Article 9
(Non modifié)
Nul ne peut être membre de plusieurs autorités administratives indépendantes ou autorités publiques indépendantes. Toutefois, lorsque la loi prévoit qu’une de ces autorités est représentée au sein d’une autre de ces autorités ou qu’elle en désigne un des membres, elle peut désigner ce représentant ou ce membre parmi ses propres membres.
Le mandat de membre d’une autorité administrative indépendante ou d’une autorité publique indépendante est incompatible avec les fonctions au sein des services d’une de ces autorités.
Au sein d’une autorité administrative indépendante ou d’une autorité publique indépendante, le mandat de membre du collège est incompatible avec celui de membre d’une commission des sanctions ou de règlement des différends et des sanctions.
Au sein du collège d’une autorité administrative indépendante ou d’une autorité publique indépendante, certains membres peuvent faire partie d’une formation restreinte, seule compétente pour prononcer des sanctions. Dans ce cas, ils ne peuvent pas participer aux délibérations du collège qui engagent les poursuites. – (Adopté.)
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TITRE II
DÉONTOLOGIE AU SEIN DES AUTORITÉS ADMINISTRATIVES INDÉPENDANTES ET DES AUTORITÉS PUBLIQUES INDÉPENDANTES
Chapitre Ier
Déontologie des membres
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Article 11
(Non modifié)
I et II. – (Non modifiés)
III. – Aucun membre d’une autorité administrative indépendante ou d’une autorité publique indépendante ne peut exercer des fonctions de chef d’entreprise, de gérant de société, de président ou membre d’un organe de gestion, d’administration, de direction ou de surveillance ou une nouvelle activité professionnelle au sein d’une personne morale ou d’une société qu’elle contrôle au sens de l’article L. 233-16 du code de commerce si cette personne morale ou cette société a fait l’objet d’une délibération, d’une vérification ou d’un contrôle auquel il a participé au cours des deux années précédentes.
IV. – Lorsqu’il est exercé à temps plein, le mandat de membre d’une autorité administrative indépendante ou d’une autorité publique indépendante est incompatible avec l’exercice par les membres de l’autorité d’une activité professionnelle ou d’un emploi public. Le président de l’autorité peut toutefois autoriser l’exercice de travaux scientifiques, littéraires, artistiques ou d’enseignement.
V. – Lorsque la loi prévoit la présence, au sein du collège d’une autorité administrative indépendante ou d’une autorité publique indépendante, de membres désignés parmi les membres en activité du Conseil d’État, de la Cour des comptes, du corps des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel et du corps des magistrats des chambres régionales des comptes, il ne peut être désigné d’autre membre en activité du même corps, à l’exclusion du président de l’autorité concernée. – (Adopté.)
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Chapitre II
Déontologie du personnel
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TITRE III
FONCTIONNEMENT DES AUTORITÉS ADMINISTRATIVES INDÉPENDANTES ET DES AUTORITÉS PUBLIQUES INDÉPENDANTES
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Chapitre Ier
Personnel des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes
Article 17
(Non modifié)
Toute autorité administrative indépendante ou autorité publique indépendante dispose de services placés sous l’autorité de son président, sous réserve des exceptions prévues par la loi pour les services qui sont chargés de l’instruction ou du traitement des procédures de sanction et de règlement des différends.
Toute autorité administrative indépendante ou autorité publique indépendante peut employer des fonctionnaires civils et militaires, des fonctionnaires des assemblées parlementaires et des magistrats placés auprès d’elle dans une position conforme à leur statut et recruter des agents contractuels. – (Adopté.)
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Chapitre II
Finances des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes
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Chapitre III
Patrimoine des autorités publiques indépendantes
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TITRE IV
CONTRÔLE DES AUTORITÉS ADMINISTRATIVES INDÉPENDANTES ET DES AUTORITÉS PUBLIQUES INDÉPENDANTES
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TITRE V
DISPOSITIONS DIVERSES ET FINALES
Chapitre Ier
Suppression de la qualité d’autorité administrative indépendante
Article 25
(Non modifié)
I. – (Non modifié)
II. – (Supprimé)
III. – Le chapitre II du titre Ier du livre IV de la première partie du code de la santé publique est ainsi modifié :
1° L’article L. 1412-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Le comité exerce sa mission en toute indépendance. » ;
2° Au premier alinéa du I de l’article L. 1412-2, le mot : « autorité » est remplacé par le mot : « institution » ;
3° (Supprimé)
III bis. – L’article 1er de la loi n° 2007-292 du 5 mars 2007 relative à la Commission nationale consultative des droits de l’homme est ainsi modifié :
1° Le deuxième alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Elle ne reçoit ni ne sollicite d’instruction d’aucune autorité administrative ou gouvernementale. » ;
2° (Supprimé)
IV. – Le onzième alinéa du II, le III et le VII de l’article 4 de la loi n° 2010-2 du 5 janvier 2010 relative à la reconnaissance et à l’indemnisation des victimes des essais nucléaires français sont supprimés.
V. – (Supprimé)
VI et VII. – (Non modifiés)
VIII à XII. – (Supprimés)
XIII. – La loi n° 77-808 du 19 juillet 1977 relative à la publication et à la diffusion de certains sondages d’opinion est ainsi modifiée :
1° Au début du premier alinéa de l’article 5, les mots : « Il est institué une commission des sondages » sont remplacés par les mots : « La commission des sondages est » ;
2° L’article 6 est ainsi rédigé :
« Art. 6. – La commission des sondages est composée de neuf membres :
« 1° Deux membres du Conseil d’État élus par l’assemblée générale du Conseil d’État ;
« 2° Deux membres de la Cour de cassation élus par l’assemblée générale de la Cour de cassation ;
« 3° Deux membres de la Cour des comptes élus par l’assemblée générale de la Cour des comptes ;
« 4° Trois personnalités qualifiées en matière de sondages désignées, respectivement, par le Président de la République, le Président du Sénat et le Président de l’Assemblée nationale.
« La commission élit en son sein son président.
« En cas de partage égal des voix, celle du président est prépondérante.
« Les membres de la commission des sondages sont nommés pour un mandat de six ans non renouvelable.
« Ne peuvent être membres de la commission les personnes qui perçoivent ou ont perçu dans les trois années précédant leur désignation une rémunération, de quelque nature que ce soit, de médias ou d’organismes réalisant des sondages tels que définis à l’article 1er.
« Dans les trois années qui suivent la fin de leur mandat, les anciens membres de la commission ne peuvent percevoir une rémunération, de quelque nature que ce soit, de médias ou d’organismes réalisant des sondages tels que définis au même article 1er.
« Les neuvième et dixième alinéas du présent article sont applicables au personnel de la commission ainsi qu’aux rapporteurs désignés par cette dernière.
« Chacun des membres mentionnés aux 1° à 3° peut se faire remplacer par un suppléant nommé dans les mêmes conditions. » ;
3° À la fin du premier alinéa de l’article 7, les mots : « pris en application de l’article 5 ci-dessus » sont remplacés par le mot : « applicables » ;
4° L’article 8 est abrogé.
XIV. – (Non modifié)
M. le président. L’amendement n° 1, présenté par M. Courteau, est ainsi libellé :
Alinéas 3 à 6
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. Roland Courteau.
M. Roland Courteau. La proposition de loi portant statut général des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes, telle que modifiée en deuxième lecture par l’Assemblée nationale, supprime, dans son article 25, alinéa 4, la qualité d’autorité indépendante du Comité consultatif national d’éthique pour les sciences de la vie et de la santé, ou CCNE, pour lui conférer un statut d’« institution indépendante » qui, de manière redondante, « exerce sa mission en toute indépendance ».
Alors que l’on cherche à unifier et à préciser le statut d’organismes divers, on crée pour le CCNE, à côté des autorités administratives et publiques indépendantes, une nouvelle catégorie d’organismes aux contours plus flous, qualifiés d’institutions indépendantes : c’est, à notre avis, un facteur de confusion et de complexité.
Or, en même temps, on tend à accorder ou à maintenir au CCNE, précisément pour lui assurer les garanties nécessaires à son indépendance, l’essentiel des caractéristiques des autorités administratives indépendantes, qu’il s’agisse de l’autonomie dans la gestion budgétaire ou d’obligations en matière de prévention des conflits d’intérêts et de patrimoine – qu’il respecte, évidemment !
Le législateur a entendu confier au CCNE une responsabilité éminente dans l’élaboration des normes en matière bioéthique, qui touchent à des droits fondamentaux de la personne et aux libertés publiques. En particulier, aux termes de l’article L. 1412–1–1 du code de la santé publique, tout projet de réforme sur les problèmes éthiques et les questions de société soulevés par les progrès de la connaissance dans les domaines de la biologie, de la médecine et de la santé doit être précédé d’un débat public sous forme d’états généraux, lesquels sont organisés sur l’initiative du CCNE, après consultation des commissions parlementaires permanentes compétentes et de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques.
M. Bruno Sido. Très bien !
M. Roland Courteau. Le choix de confier les débats publics au CCNE a été fait en considération même de son indépendance pour les organiser, si besoin en recourant à l’aide de la Commission nationale du débat public qui se voit reconnaître, à juste titre, le statut d’autorité administrative indépendante. Il devra d’ailleurs procéder prochainement à l’organisation d’états généraux de la bioéthique.
Il convient donc, selon nous, de conserver à cet organisme le rôle d’autorité morale qu’il a acquis, tant à l’échelon national qu’à l’échelon international. Cette préoccupation est partagée notamment par notre collègue Michelle Meunier.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jacques Mézard, rapporteur. L’avis de la commission est défavorable, même si je salue le caractère obstiné et déterminé de notre collègue Roland Courteau.
Je me suis entretenu, il y a quelques jours, avec le président du CCNE, le professeur Delfraissy, qui présente de très nombreuses qualités, dont celle d’être originaire du département du Cantal… (Sourires.)
M. François Bonhomme. Mais ça ne suffit pas !
M. Daniel Raoul. Personne n’est parfait !
M. Jacques Mézard, rapporteur. Il a parfaitement compris quel était notre objectif.
Je regrette surtout que cet amendement supprime une rédaction sur laquelle nous sommes parvenus à un consensus avec l’Assemblée nationale. Nous avons en effet inséré dans le code de la santé publique la même phrase que celle qui s’applique à la Commission nationale consultative des droits de l’homme : « Le comité exerce sa mission en toute indépendance. »
Certes, le CCNE n’a pas le statut d’autorité administrative indépendante, tout simplement parce que, comme son nom l’indique, il est un comité consultatif et non une autorité. En revanche, pour garantir sa liberté et son indépendance dans l’exercice de ses missions, nous inscrivons ces principes dans la loi. Que voulez-vous de plus ?
Notre proposition est sage et recueillera très rapidement, j’en suis persuadé, l’aval de tous les membres de ce comité.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Vincent Placé, secrétaire d’État. Je ne peux que saluer votre persévérance, monsieur Courteau. En effet, depuis le début de l’examen de ce texte, vous êtes attentif au statut du CCNE. C’est aussi le cas du Gouvernement, qui a longtemps soutenu votre argumentation.
Néanmoins, comme je l’ai dit lors de la discussion générale commune, le Gouvernement est soucieux de respecter le travail parlementaire et les compromis qu’il a permis de dégager, ainsi que vient de l’expliquer M. le rapporteur. Il s’en remet donc à la sagesse de la Haute Assemblée.
M. le président. Je mets aux voix l’article 25.
(L’article 25 est adopté.)
Chapitre II
Coordinations au sein des statuts des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes
Article 26
(Non modifié)
Le chapitre II du titre III du livre II du code du sport est ainsi modifié :
1° Le I de l’article L. 232-5 est ainsi modifié :
a) À la première phrase du premier alinéa, les mots : « dotée de la personnalité morale » sont supprimés ;
b) Le 16° est abrogé ;
2° L’article L. 232-6 est ainsi modifié :
a) (Supprimé)
b) Au troisième alinéa, le mot : « président, » est supprimé ;
c) Le quatorzième alinéa est complété par les mots : « par décret du Président de la République parmi les membres du collège. » ;
d) L’avant-dernier alinéa est ainsi rédigé :
« Le mandat des membres du collège de l’agence est de six ans. Il est renouvelable une fois. Il n’est pas interrompu par les règles concernant la limite d’âge éventuellement applicables aux intéressés. » ;
3° L’article L. 232-7 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, les mots : « survenant plus de six mois avant l’expiration du mandat, il est pourvu à la nomination d’un nouveau membre dont le mandat expire à la date à laquelle aurait expiré le mandat de la personne qu’il remplace. Le » sont remplacés par le mot : « , le » ;
b) Le troisième alinéa est supprimé ;
c) Au dernier alinéa, les mots : « membres et les » sont supprimés ;
3° bis Le II de l’article L. 232-7-1 est ainsi rédigé :
« II. – Toutefois, dans le cas où une autorité souhaite renouveler le mandat d’un membre sortant, elle le désigne au préalable. Il est alors procédé, dans les conditions prévues au I, au besoin par tirage au sort, à la désignation des autres membres par les autres autorités appelées à prendre part à ce renouvellement. » ;
4° Les trois premiers alinéas de l’article L. 232-8 sont supprimés. – (Adopté.)
Article 27
(Non modifié)
Le chapitre Ier du titre VI du livre III de la sixième partie du code des transports est ainsi modifié :
1° L’article L. 6361-1 est ainsi modifié :
a) Après le mot : « décret », la fin du 1° est ainsi rédigée : « du Président de la République ; »
b) La seconde phrase du treizième alinéa, les seizième et dix-septième alinéas et la seconde phrase de l’avant-dernier alinéa sont supprimés ;
c) Après le mot : « fonctions, », la fin du dix-huitième alinéa est ainsi rédigée : « son successeur est de même sexe. » ;
1° bis et 2° (Supprimés)
2° bis La section 1 est complétée par un article L. 6361-4-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 6361-4-1. – Les personnels des services de l’autorité sont tenus au secret professionnel pour les faits, actes et renseignements dont ils ont pu avoir connaissance en raison de leurs fonctions. » ;
2° ter L’article L. 6361-10 est abrogé ;
3° L’article L. 6361-11 est ainsi modifié :
a) Les premier et troisième à dernier alinéas sont supprimés ;
b) Au début du deuxième alinéa, le mot : « Celui-ci » est remplacé par les mots : « Le président » ;
4° (Supprimé) – (Adopté.)
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Article 28
(Non modifié)
Le chapitre Ier du titre VI du livre IV du code de commerce est ainsi modifié :
1° L’article L. 461-1 est ainsi modifié :
a) Le II est ainsi modifié :
– au deuxième alinéa, après le mot : « nommé », sont insérés les mots : « par décret du Président de la République » ;
– il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Selon des modalités fixées par décret en Conseil d’État, le collège est, à l’exception de son président, renouvelé par moitié tous les deux ans et six mois. » ;
b) Le III est ainsi rédigé :
« III. – Le mandat des membres du collège n’est renouvelable, sous réserve du septième alinéa du II, qu’une seule fois. » ;
2° L’article L. 461-2 est ainsi modifié :
a) La seconde phrase du premier alinéa est supprimée ;
b) Après les mots : « à trois séances consécutives », la fin du deuxième alinéa est supprimée ;
c) Les troisième et avant-dernier alinéas sont supprimés ;
3° L’article L. 461-4 est ainsi modifié :
aa et ab) (Supprimés)
a) Le sixième alinéa est supprimé ;
b) À l’avant-dernier alinéa, les mots : « est ordonnateur des recettes et des dépenses de l’autorité. Il » sont supprimés ;
4° Les deux derniers alinéas de l’article L. 461-5 sont supprimés. – (Adopté.)
Article 29
(Non modifié)
Le code des transports est ainsi modifié :
1° A Le chapitre Ier du titre VI du livre II de la première partie est ainsi modifié :
a) À la fin de la première phrase du premier alinéa de l’article L. 1261-1, les mots : « , dotée de la personnalité morale » sont supprimés ;
b) Au premier alinéa de l’article L. 1261-3, les mots : « membres et les » sont supprimés ;
c) Après le mot : « sexe », la fin du second alinéa de l’article L. 1261-6 est supprimée ;
d) L’article L. 1261-7 est ainsi modifié :
– au premier alinéa, le mot : « , national » est supprimé ;
– les deuxième à avant-dernier alinéas sont supprimés ;
e) À l’article L. 1261-10, les mots : « constaté par le collège » sont supprimés ;
f) Au début de la première phrase de l’article L. 1261-12, les mots : « Le collège de l’Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières adopte et publie un règlement intérieur précisant ses » sont remplacés par les mots : « Le règlement intérieur de l’Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières précise les » ;
g) L’article L. 1261-16 est ainsi modifié :
– la seconde phrase du sixième alinéa est supprimée ;
– les deux dernières phrases du septième alinéa sont supprimées ;
h) L’article L. 1261-18 est ainsi modifié :
– les deux premiers alinéas sont supprimés ;
– au troisième alinéa, les mots : « , nommé par le président, » sont supprimés ;
i) L’article L. 1261-19 est ainsi modifié :
– le premier et les trois derniers alinéas sont supprimés ;
– au début du deuxième alinéa, le mot : « Elle » est remplacé par les mots : « L’Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières » ;
1° B Au 3° de l’article L. 1264-7, la référence : « L. 2131-7 » est remplacée par la référence : « L. 2132-7 » ;
1° (Supprimé)
2° L’article L. 2131-2 est abrogé ;
3° à 13° (Supprimés) – (Adopté.)
Article 30
(Non modifié)
Le code des postes et des communications électroniques est ainsi modifié :
1° L’article L. 130 est ainsi modifié :
a) (Supprimé)
b) La deuxième phrase du premier alinéa est complétée par les mots : « du Président de la République » ;
b bis) L’avant-dernière phrase du même premier alinéa est complétée par les mots : « du Président de la République » ;
c) Les quatrième et dixième alinéas et la seconde phrase de l’avant-dernier alinéa sont supprimés ;
d) (Supprimé)
2° L’article L. 131 est ainsi modifié :
a) Au début de la première phrase du premier alinéa, les mots : « La fonction de membre de l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes est incompatible avec toute activité professionnelle, tout mandat électif national, tout autre emploi public et » sont remplacés par une phrase et les mots : « Les membres de l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes exercent leurs fonctions à temps plein. Leur mandat est incompatible avec » ;
a bis) Au début de la seconde phrase du même premier alinéa, les mots : « Les membres de l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes » sont remplacés par le mot : « Ils » ;
b) Au deuxième alinéa, les mots : « membres et » sont supprimés ;
b bis) Le troisième alinéa est supprimé ;
c) Le quatrième alinéa est supprimé ;
3° Les deux premiers alinéas de l’article L. 132 sont supprimés ;
4° Les trois derniers alinéas de l’article L. 133 sont remplacés par deux alinéas ainsi rédigés :
« L’autorité propose aux ministres compétents, lors de l’élaboration du projet de loi de finances de l’année, les crédits nécessaires, en sus des ressources mentionnées au premier alinéa, à l’accomplissement de ses missions. Ces crédits sont inscrits au budget général de l’État.
« Le président de l’autorité est ordonnateur des dépenses. » ;
5° L’article L. 135 est ainsi modifié :
a) Le premier alinéa est remplacé par six alinéas ainsi rédigés :
« Le rapport d’activité établi par l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes :
« 1° Présente les mesures relatives au service universel postal et au service universel des communications électroniques définis aux articles L. 1 et L. 35-1 qui ont été mises en œuvre, notamment l’évolution des tarifs de détail et la qualité du service fourni ainsi que les mesures propres à assurer aux utilisateurs finals handicapés un accès aux réseaux et aux services de communications électroniques équivalent à celui dont bénéficient les autres utilisateurs, tel que prévu à l’article L. 33-1 ;
« 2° Fait état des déploiements des réseaux de communications électroniques, notamment des réseaux à très haut débit fixes et mobiles, et de l’effort d’investissement réalisé par les opérateurs dans le cadre de ces déploiements ;
« 3° Dresse l’état de l’internet, en intégrant notamment les problématiques liées à la neutralité de l’internet ainsi qu’à l’utilisation des technologies d’adressage IPv6 ;
« 4° Rend compte de l’activité de l’autorité au sein de l’Organe des régulateurs européens des communications électroniques et de coopération internationale.
« Ce rapport est adressé à la Commission supérieure du numérique et des postes. » ;
b) Le deuxième alinéa est supprimé ;
6° Le 10° de l’article L. 36-7 est abrogé. – (Adopté.)
Article 31
(Non modifié)
I. – La loi n° 2010-476 du 12 mai 2010 relative à l’ouverture à la concurrence et à la régulation du secteur des jeux d’argent et de hasard en ligne est ainsi modifiée :
1° L’article 34 est ainsi modifié :
a) La seconde phrase de l’avant-dernier alinéa du I est supprimée ;
b) Le VI est abrogé ;
2° Le II de l’article 35 est ainsi modifié :
a) Au début de la deuxième phrase du premier alinéa, les mots : « Trois membres, dont le président, » sont remplacés par les mots : « Le président est nommé par décret du Président de la République et deux autres membres » ;
b) Après le mot : « ligne », la fin de la première phrase du deuxième alinéa est ainsi rédigée : « exerce ses fonctions à temps plein. » ;
c) La deuxième phrase du troisième alinéa est ainsi rédigée :
« Ce mandat n’est pas renouvelable. » ;
d) La dernière phrase du troisième alinéa, l’avant-dernier alinéa et la seconde phrase du dernier alinéa sont supprimés ;
3° L’article 36 est ainsi modifié :
a) Les I et III sont abrogés ;
b) Le II est ainsi modifié :
– le premier alinéa est supprimé ;
– au deuxième alinéa, les mots : « avec l’exercice d’un mandat électif national et » sont supprimés ;
4° L’article 37 est ainsi modifié :
a) (Supprimé)
b) Le II est ainsi modifié :
– les trois premiers alinéas sont supprimés ;
– à la première phrase du dernier alinéa, les mots : « fixe le règlement intérieur et les règles de déontologie applicables au personnel des services de l’Autorité de régulation des jeux en ligne et » sont supprimés ;
– la même première phrase est complétée par les mots : « du personnel des services de l’Autorité de régulation des jeux en ligne » ;
– il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Un décret en Conseil d’État fixe les modalités d’application du présent II. » ;
c) Le III est abrogé ;
d et e) (Supprimés)
5° L’article 41 est ainsi modifié :
a) Le dernier alinéa du I et la seconde phrase du III sont supprimés ;
b) Les deux dernières phrases du premier alinéa et le second alinéa du II sont supprimés.
II. – (Supprimé) – (Adopté.)
Article 31 bis
(Non modifié)
L’article L. 121-7 du code de l’environnement est abrogé. – (Adopté.)
Article 32
(Non modifié)
Le chapitre II du titre IX du livre V du code de l’environnement est ainsi modifié :
1° L’article L. 592-2 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, après le mot : « nommés », sont insérés les mots : « par décret du Président de la République » ;
b) Après le mot : « sexe », la fin de la deuxième phrase du quatrième alinéa est supprimée ;
c) Après le même quatrième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Selon des modalités fixées par décret en Conseil d’État, le collège est, à l’exception de son président, renouvelé par moitié tous les trois ans. » ;
c bis) La seconde phrase de l’avant-dernier alinéa est supprimée ;
d) Le dernier alinéa est supprimé ;
2° et 3° (Supprimés)
3° bis L’article L. 592-3 est ainsi modifié :
a) Après le mot : « avec », la fin de la première phrase est ainsi rédigée : « tout mandat électif. » ;
b) La seconde phrase est supprimée ;
4° Les articles L. 592-4 à L. 592-7 sont abrogés ;
5° Après le mot : « résultant », la fin de l’article L. 592-9 est ainsi rédigée : « de l’article L. 592-8, ainsi que de leurs obligations en matière de déontologie résultant de la loi n° … du … portant statut général des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes. » ;
6° L’article L. 592-12 est ainsi modifié :
a) Les trois premiers alinéas sont supprimés ;
b) Au début du dernier alinéa, les mots : « L’autorité » sont remplacés par les mots : « L’Autorité de sûreté nucléaire » ;
7° L’article L. 592-13 est ainsi modifié :
a) Le premier et les deux derniers alinéas sont supprimés ;
b) Au deuxième alinéa, après le mot : « intérieur », sont insérés les mots : « de l’Autorité de sûreté nucléaire » ;
8° L’article L. 592-14 est ainsi modifié :
a) Le premier alinéa est supprimé ;
b) Au début du second alinéa, le mot : « Elle » est remplacé par les mots : « L’Autorité de sûreté nucléaire » ;
9° L’article L. 592-15 est abrogé ;
10° À l’article L. 592-30, les mots : « des commissions compétentes de l’Assemblée nationale et du Sénat ou » sont supprimés ;
11° L’article L. 592-31 est ainsi rédigé :
« Art. L. 592-31. – Le rapport annuel d’activité établi par l’Autorité de sûreté nucléaire est transmis à l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques.
« À cette occasion, l’Autorité de sûreté nucléaire se prononce sur l’état de la sûreté nucléaire et de la radioprotection. » – (Adopté.)
Article 33
(Non modifié)
Le chapitre unique du titre II du livre VI du code monétaire et financier est ainsi modifié :
1° À la première phrase du premier alinéa de l’article L. 621-1, les mots : « dotée de la personnalité morale » sont supprimés ;
2° L’article L. 621-2 est ainsi modifié :
a) Le II est ainsi modifié :
– le 1° est complété par les mots : « du Président de la République » ;
– à la fin du quatorzième alinéa, les mots : « est soumis aux règles d’incompatibilité prévues pour les emplois publics » sont remplacés par les mots : « exerce ses fonctions à temps plein » ;
– le dernier alinéa est supprimé ;
b) Le IV est ainsi modifié :
– la seconde phrase de l’avant-dernier alinéa est supprimée ;
– le dernier alinéa est ainsi rédigé :
« Selon des modalités fixées par décret en Conseil d’État, la commission des sanctions est, à l’exception de son président, renouvelée par moitié tous les trente mois. » ;
3° (Supprimé)
4° L’article L. 621-4 est ainsi modifié :
a) Le I est abrogé ;
b) (Supprimé)
c) Au premier alinéa du II, les mots : « membres, les » sont supprimés ;
5° L’article L. 621-5-1 est ainsi modifié :
a) Le premier alinéa est ainsi rédigé :
« Un secrétaire général est chargé du fonctionnement et de la coordination des services sous l’autorité du président. » ;
b) La première phrase du dernier alinéa est ainsi modifiée :
– au début, les mots : « Sur proposition du secrétaire général, le collège fixe le règlement intérieur et les règles de déontologie applicables au personnel des services de l’Autorité des marchés financiers et » sont remplacés par les mots : « Le collège de l’Autorité des marchés financiers » ;
– sont ajoutés les mots : « du personnel des services de l’Autorité des marchés financiers » ;
6° L’article L. 621-5-2 est ainsi modifié :
a) Le I est ainsi modifié :
– le premier alinéa est supprimé ;
– au début du deuxième alinéa, le mot : « Elle » est remplacé par les mots : « L’Autorité des marchés financiers » ;
– à la fin du dernier alinéa, la référence : « I » est remplacée par les mots : « du présent article » ;
b) Le II est abrogé ;
7° Le dernier alinéa du II de l’article L. 621-19 est supprimé. – (Adopté.)
Article 34
(Non modifié)
L’article L. 341-1 du code des relations entre le public et l’administration est ainsi modifié :
1° A Au 1°, le mot : « président, » est supprimé ;
1° Le douzième alinéa est ainsi modifié :
a) La première phrase est ainsi modifiée :
– au début, le mot : « Les » est remplacé par une phrase et les mots : « Le président de la commission est nommé par décret du Président de la République parmi les membres. Les autres » ;
– à la fin, les mots : « du Premier ministre » sont supprimés ;
b) (Supprimé)
c) La dernière phrase est complétée par les mots : « une fois » ;
2° Après le même douzième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Selon des modalités fixées par décret en Conseil d’État, le collège est, à l’exception de son président, renouvelé par moitié tous les trois ans. » ;
3° (Supprimé) – (Adopté.)
Article 34 bis
(Non modifié)
I. – Le chapitre II du titre Ier du livre III de la deuxième partie du code de la défense est ainsi modifié :
1° À l’intitulé, le mot : « consultative » est supprimé ;
2° À la première phrase du premier alinéa et au second alinéa de l’article L. 2312-1, le mot : « consultative » est supprimé ;
3° L’article L. 2312-2 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, le mot : « consultative » est supprimé ;
b et c) (Supprimés)
c bis) À la seconde phrase du sixième alinéa, les mots : « d’application de la deuxième phrase du dernier alinéa du présent article » sont remplacés par les mots : « de désignation en vue du remplacement d’un membre dont le mandat a pris fin avant son terme normal » ;
c ter) (Supprimé)
d) Le dernier alinéa est supprimé ;
4° L’article L. 2312-3 est abrogé ;
5° Au dernier alinéa de l’article L. 2312-4, le mot : « consultative » est supprimé ;
6° L’article L. 2312-5 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, le mot : « consultative » est supprimé ;
b) Le dernier alinéa est supprimé ;
7° À la première phrase du premier alinéa de l’article L. 2312-7 et au premier alinéa de l’article L. 2312-8, le mot : « consultative » est supprimé.
II à V. – (Non modifiés) – (Adopté.)
Article 34 ter
(Non modifié)
La section 1 du chapitre II du titre II du livre Ier du code de l’énergie est ainsi modifiée :
1° La seconde phrase de l’article L. 122-2 est supprimée ;
2° Les articles L. 122-3 et L. 122-4 sont abrogés ;
3° La première phrase de l’article L. 122-5 est ainsi rédigée :
« Le médiateur national de l’énergie est une autorité publique indépendante, dotée de la personnalité morale et de l’autonomie financière. » – (Adopté.)
Article 35
(Non modifié)
Le titre III du livre Ier du code de l’énergie est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa de l’article L. 132-1, après le mot : « énergie », sont insérés les mots : « , autorité administrative indépendante, » ;
2° L’article L. 132-2 est ainsi modifié :
a) À la fin de la première phrase du deuxième alinéa, les mots : « dans les conditions fixées par la loi organique n° 2010-837 du 23 juillet 2010 relative à l’application du cinquième alinéa de l’article 13 de la Constitution » sont remplacés par les mots : « du Président de la République » ;
b) Le dixième alinéa est supprimé ;
b bis) Le onzième alinéa est ainsi modifié :
– à la première phrase, le mot : « , national » est supprimé ;
– les deux dernières phrases sont supprimées ;
c) Après le même onzième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Selon des modalités fixées par décret en Conseil d’État, le collège est, à l’exception de son président, renouvelé par moitié tous les trois ans. » ;
3° L’article L. 132-3 est ainsi modifié :
b) Le dernier alinéa est supprimé ;
4° Le premier alinéa de l’article L. 132-4 est supprimé ;
5° L’article L. 132-5 est abrogé ;
6° L’article L. 133-5 est ainsi modifié :
a) (Supprimé)
a bis) Les deuxième et troisième alinéas et les deuxième, troisième et dernière phrases du dernier alinéa sont supprimés ;
b) (Supprimé)
7° Au premier alinéa de l’article L. 133-6, les mots : « membres et » sont supprimés ;
8° L’article L. 134-14 est abrogé ;
9° Après le troisième alinéa de l’article L. 134-20, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :
« Le comité peut, à la demande de la partie qui le saisit, décider que sa décision produira effet à une date antérieure à sa saisine, sans toutefois que cette date puisse être antérieure à la date à laquelle la contestation a été formellement élevée par l’une des parties pour la première fois et, en tout état de cause, sans que cette date soit antérieure de plus de deux ans à sa saisine.
« Le quatrième alinéa du présent article est applicable aux règlements de différends en cours à la date d’entrée en vigueur de la loi n° … du … portant statut général des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes. » – (Adopté.)
Article 36
(Pour coordination)
(Non modifié)
Le titre III du livre VIII du code de la sécurité intérieure est ainsi modifié :
1° L’article L. 831-1 est ainsi modifié :
a) Au 1°, les mots : « , respectivement, pour la durée de la législature par l’Assemblée nationale et pour la durée de leur mandat par le Sénat, » sont supprimés ;
b) Les deux derniers alinéas sont supprimés ;
2° L’article L. 832-1 est abrogé ;
3° L’article L. 832-2 est ainsi modifié :
a) Après le mot : « et », la fin du premier alinéa est ainsi rédigée : « exerce ses fonctions à temps plein. » ;
b) (Supprimé)
4° L’article L. 832-3 est ainsi modifié :
a) Le premier alinéa est supprimé ;
b) À la deuxième phrase du troisième alinéa, le mot : « deuxième » est remplacé par le mot : « premier » ;
5° L’article L. 832-4 est abrogé ;
6° Le premier alinéa de l’article L. 833-9 est supprimé. – (Adopté.)
Article 37
(Non modifié)
Le chapitre III de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés est ainsi modifié :
1° L’article 11 est ainsi modifié :
– la seconde phrase du a du 4° est supprimée ;
– au dernier alinéa, les mots : « , au Premier ministre et au Parlement » sont remplacés par les mots : « et au Premier ministre » ;
2° L’article 12 est abrogé ;
3° L’article 13 est ainsi modifié :
a) Le I est ainsi modifié :
– à la dernière phrase du douzième alinéa, les mots : « d’application du deuxième alinéa du II » sont remplacés par les mots : « de cessation du mandat avant son terme normal » ;
– après le même douzième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Selon des modalités fixées par décret en Conseil d’État, le collège est, à l’exception de son président, renouvelé par moitié tous les deux ans et six mois. » ;
– au début du treizième alinéa, est ajoutée une phrase ainsi rédigée :
« Le président est nommé par décret du Président de la République parmi les membres pour la durée de son mandat. » ;
– à la première phrase du même treizième alinéa, les mots : « un président et » sont supprimés et, au début de la seconde phrase, le mot : « Ils » est remplacé par les mots : « Le président et les vice-présidents » ;
– au début du quatorzième alinéa, les mots : « La fonction de président de la commission est incompatible avec toute activité professionnelle, tout autre emploi public et » sont remplacés par une phrase et les mots : « Le président exerce ses fonctions à temps plein. Sa fonction est incompatible avec » ;
b) Le II est ainsi modifié :
– les deuxième et troisième alinéas et les deux premières phrases du dernier alinéa sont supprimés ;
– au début de la troisième phrase du dernier alinéa, le mot : « Il » est remplacé par les mots : « Le règlement intérieur de la commission » ;
4° L’article 14 est abrogé ;
5° Le premier alinéa de l’article 19 est supprimé ;
5° bis À l’article 20, les mots : « membres et les » sont supprimés ;
6° Le premier alinéa de l’article 21 est supprimé. – (Adopté.)
Article 38
(Non modifié)
I. – Le chapitre V bis du titre Ier du livre Ier du code électoral est ainsi modifié :
1° L’article L. 52-14 est ainsi modifié :
a) (Supprimé)
b) Le sixième alinéa est ainsi modifié :
– à la première phrase, les mots : « survenant plus de six mois avant l’expiration du mandat » sont supprimés ;
– la seconde phrase est supprimée ;
b bis) Le septième alinéa est ainsi rédigé :
« Le mandat de membre est renouvelable une fois. » ;
c) Le huitième alinéa est ainsi rédigé :
« Le président de la commission est nommé par décret du Président de la République parmi les membres pour la durée de son mandat. » ;
c bis) Après le huitième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Le président de la commission exerce ses fonctions à temps plein. » ;
d) Les neuvième et dixième alinéas sont supprimés ;
d bis) Au onzième alinéa, les mots : « recruter des agents contractuels pour les besoins de son fonctionnement et » sont supprimés ;
e) À l’avant-dernier alinéa, les mots : « , qu’ils soient fonctionnaires ou contractuels, » sont supprimés ;
2° L’article L. 52-18 est abrogé.
II. – (Non modifié)
III et IV. – (Supprimés) – (Adopté.)
Article 39
(Non modifié)
La loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication est ainsi modifiée :
1° A Au premier alinéa de l’article 3-1, les mots : « dotée de la personnalité morale » sont supprimés ;
1° L’article 4 est ainsi modifié :
a) À la fin du premier alinéa, les mots : « du Président de la République » sont supprimés ;
b) La deuxième phrase du quatrième alinéa est ainsi rédigée :
« Il n’est pas renouvelable. » ;
c) Le huitième alinéa est ainsi rédigé :
« Lors de la désignation d’un nouveau membre appelé à remplacer un membre dont le mandat a pris fin avant le terme normal, le nouveau membre est de même sexe que celui qu’il remplace. Dans le cas où le mandat de ce membre peut être renouvelé, le président de l’autre assemblée désigne un membre de l’autre sexe. » ;
d) Le dernier alinéa est supprimé ;
2° L’article 5 est ainsi modifié :
a) Le premier alinéa est ainsi rédigé :
« Les membres du Conseil supérieur de l’audiovisuel exercent leurs fonctions à temps plein. Leurs fonctions sont incompatibles avec tout mandat électif. » ;
b) Les quatrième et cinquième alinéas sont supprimés ;
3° L’article 7 est ainsi modifié :
a) Le premier et les deux derniers alinéas sont supprimés ;
b) Au deuxième alinéa, les mots : « de ces services » sont remplacés par les mots : « des services du Conseil supérieur de l’audiovisuel » ;
4° L’article 18 est ainsi modifié :
a) Les six premiers alinéas sont remplacés par dix alinéas ainsi rédigés :
« Le rapport annuel d’activité établi par le Conseil supérieur de l’audiovisuel présente :
« 1° L’application de la présente loi ;
« 2° L’impact, notamment économique, de ses décisions d’autorisation d’usage de la ressource radioélectrique délivrées en application des articles 29, 29-1, 30-1, 30-5 et 30-6 ;
« 3° Un bilan du respect de leurs obligations par les sociétés et l’établissement public mentionnés aux articles 44 et 49 de la présente loi ;
« 4° Le volume d’émissions télévisées sous-titrées ainsi que de celles traduites en langue des signes, pour mieux apprécier le coût de ce sous-titrage et de la traduction en langue des signes pour les sociétés nationales de programmes, les chaînes de télévision publiques et tous autres organismes publics qui développent ces procédés ;
« 5° Les mesures prises en application des articles 39 à 41-4 visant à limiter la concentration et à prévenir les atteintes au pluralisme, notamment un état détaillé présentant la situation des entreprises audiovisuelles concernées à l’égard des limites fixées aux mêmes articles 39 à 41-4 ;
« 6° Le développement et les moyens de financement des services de télévision à vocation locale ;
« 7° Un bilan des coopérations et des convergences obtenues entre les instances de régulation audiovisuelle nationales des États membres de l’Union européenne ;
« 8° Un bilan du respect par les éditeurs de services de radio des dispositions du 2° bis de l’article 28 et du 5° de l’article 33 relatives à la diffusion d’œuvres musicales d’expression française ou interprétées dans une langue régionale en usage en France, de la variété des œuvres proposées au public et des mesures prises par le Conseil supérieur de l’audiovisuel pour mettre fin aux manquements constatés ainsi que des raisons pour lesquelles il n’a, le cas échéant, pas pris de telles mesures ;
« 9° Un bilan du respect par les éditeurs de services des principes mentionnés au troisième alinéa de l’article 3-1 et des mesures prises par le Conseil supérieur de l’audiovisuel pour mettre fin aux manquements constatés. » ;
b) Le septième alinéa est supprimé ;
5° Au début de la seconde phrase du second alinéa du 4° de l’article 42-7, les mots : « Par dérogation à l’article 7, » sont supprimés. – (Adopté.)
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Article 41
(Non modifié)
Le livre Ier du code de la recherche est ainsi modifié :
1° L’article L. 114-3-3 est ainsi modifié :
a) Au I, les mots : « un conseil » sont remplacés par les mots : « un collège » ;
b) Le II est ainsi modifié :
– au début du premier alinéa, les mots : « Le conseil » sont remplacés par les mots : « Le collège » ;
– le deuxième alinéa est ainsi rédigé :
« Le président est nommé par décret du Président de la République parmi les membres du collège. Il exerce ses fonctions à temps plein. » ;
– à la première phrase du troisième alinéa et au quatrième alinéa, le mot : « conseil » est remplacé par le mot : « collège » ;
– il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« La durée du mandat des membres autres que ceux mentionnés au 5° est de quatre ans. Ce mandat est renouvelable une fois. » ;
2° Après le mot : « supérieur », la fin de l’article L. 114-3-6 est supprimée ;
3° L’article L. 114-3-7 est abrogé ;
4° Aux articles L. 145-1 et L. 147-1, la référence : « L. 114-3-7 » est remplacée par la référence : « L. 114-3-6 » ;
5° Au 1° de l’article L. 146-1, les mots : « et L. 114-3-7, » sont supprimés. – (Adopté.)
Article 42
(Non modifié)
Le chapitre Ier du titre II du livre VIII du code de commerce est ainsi modifié :
1° Le premier alinéa du I de l’article L. 821-1 est ainsi rédigé :
« Le Haut Conseil du commissariat aux comptes est une autorité publique indépendante. » ;
2° Le I de l’article L. 821-2 est ainsi modifié :
a) À la première phrase du douzième alinéa, après le mot : « conseil », sont insérés les mots : « est nommé par décret du Président de la République pour une durée de six ans. Il » ;
b) (Supprimé)
c) Le dernier alinéa est ainsi rédigé :
« Lors de la désignation d’un nouveau membre appelé à remplacer un membre dont le mandat a pris fin avant le terme normal, le nouveau membre est de même sexe que celui qu’il remplace. » ;
d) (Supprimé)
3° L’article L. 821-3-2 est abrogé ;
4° Le I de l’article L. 821-3-3 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, les mots : « les membres et » sont supprimés ;
b) La première phrase du second alinéa est supprimée ;
5° Les I et VI de l’article L. 821-5 sont abrogés. – (Adopté.)
Article 43
(Non modifié)
Le chapitre Ier bis du titre VI du livre Ier du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° L’article L. 161-37, dans sa rédaction résultant de la loi n° … du … ratifiant l’ordonnance n° 2016-966 du 15 juillet 2016 portant simplification de procédures mises en œuvre par l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé et comportant diverses dispositions relatives aux produits de santé, est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, les mots : « dotée de la personnalité morale » sont supprimés ;
b) Le vingt et unième alinéa est remplacé par quatre alinéas ainsi rédigés :
« Le rapport annuel d’activité établi par la Haute Autorité de santé présente notamment :
« a) Les travaux des commissions mentionnées à l’article L. 161-41 du présent code ;
« b) Les actions d’information mises en œuvre en application du 2° du présent article.
« Les commissions spécialisées mentionnées au même article L. 161-41 autres que celles créées par la Haute Autorité de santé remettent chaque année au Parlement un rapport d’activité mentionnant notamment les modalités et les principes selon lesquels elles mettent en œuvre les critères d’évaluation des produits de santé en vue de leur prise en charge par l’assurance maladie. » ;
2° L’article L. 161-42 est ainsi modifié :
a) À la fin de la première phrase du septième alinéa, les mots : « du Président de la République » sont supprimés ;
b) (Supprimé)
c) Après le mot : « sexe », la fin de l’avant-dernier alinéa est supprimée ;
d) (Supprimé)
3° Les premier, deuxième et quatrième alinéas de l’article L. 161-43 sont supprimés ;
4° L’article L. 161-45 est ainsi modifié :
a) Le premier alinéa est supprimé ;
b) Au deuxième alinéa, après les mots : « Haute Autorité », sont insérés les mots : « de santé » ;
5° L’article L. 161-45-1 est abrogé. – (Adopté.)
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Chapitre III
Renforcement des règles de transparence au sein des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes
Article 46
(Non modifié)
I. – La loi n° 2013-907 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique est ainsi modifiée :
1° A (Supprimé)
1° Le I de l’article 11 est ainsi modifié :
a) Au 6°, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique, la seconde occurrence du mot : « consultative » est supprimée ; »
b) Après le même 6°, il est inséré un 6° bis ainsi rédigé :
« 6° bis Les médiateurs mentionnés à la section 1 du chapitre III du titre Ier du livre II du code du cinéma et de l’image animée, à l’article 144 de la loi n° 2014-344 du 17 mars 2014 relative à la consommation et à l’article L. 214-6 du code de la propriété intellectuelle ; »
2° Après le mot : « sont », la fin de la dernière phrase de l’avant-dernier alinéa du IV de l’article 19 est ainsi rédigée : « rendues publiques, dans les limites définies au III de l’article 5, par la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique, selon les modalités déterminées au dernier alinéa du I et au IV du même article 5. » ;
3° Au 4° du I de l’article 20 et à la première phrase du premier alinéa du I et aux deux premiers alinéas du II de l’article 23, après le mot : « gouvernementales », sont insérés les mots : « , des fonctions de membre d’une autorité administrative indépendante ou d’une autorité publique indépendante ».
II. – (Non modifié)
III. – Chacun des médiateurs mentionnés au 6° bis du I de l’article 11 de la loi n° 2013-907 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique établit une déclaration de situation patrimoniale et une déclaration d’intérêts, suivant les modalités prévues au même article 11, dans les six mois suivant la date de promulgation de la présente loi. – (Adopté.)
Chapitre IV
Nomination des présidents des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes
Article 47
(Non modifié)
Le tableau annexé à la loi n° 2010-838 du 23 juillet 2010 relative à l’application du cinquième alinéa de l’article 13 de la Constitution est ainsi modifié :
1° La troisième ligne est supprimée ;
2° (Supprimé)
3° Après la quinzième ligne, est insérée une ligne ainsi rédigée :
« |
Présidence de l’Autorité de régulation des jeux en ligne |
Commission compétente en matière de finances publiques |
» ; |
3° bis (Supprimé)
3° ter La première colonne de la vingt-deuxième ligne est complétée par les mots : « et aux énergies alternatives » ;
4° et 5° (Supprimés)
5° bis Après la vingt-quatrième ligne, est insérée une ligne ainsi rédigée :
« |
Présidence de la Commission du secret de la défense nationale |
Commission compétente en matière de défense |
» ; |
6° Après la vingt-cinquième ligne, sont insérées deux lignes ainsi rédigées :
« |
Présidence de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques |
Commission compétente en matière de lois électorales |
|
Présidence de la Commission nationale de l’informatique et des libertés |
Commission compétente en matière de libertés publiques |
» ; |
7° Après la trente-troisième ligne, sont insérées deux lignes ainsi rédigées :
« |
Présidence du Haut conseil du commissariat aux comptes |
Commission compétente en matière de finances publiques |
|
Présidence du collège du Haut Conseil de l’évaluation de la recherche et de l'enseignement supérieur |
Commission compétente en matière d’enseignement et de recherche |
» ; |
8° (Supprimé)
9° La trente-sixième ligne est supprimée. – (Adopté.)
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Chapitre V
Coordination et application
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Article 49
(Non modifié)
I. – Les modalités de mise en œuvre du premier renouvellement partiel prévu aux deux derniers alinéas du a du 1° de l’article 28, au c du 1° de l’article 32, au b du 2° de l’article 33, au 2° de l’article 34, au c du 2° de l'article 35, au a du 3° de l’article 37 et au a bis du 3° de l’article 43 bis sont fixées par décret en Conseil d’État.
II. – Les mandats débutés avant l’entrée en vigueur de la présente loi sont pris en compte pour l’application des dispositions de l’article 8 relatives à la possibilité pour un président d’une autorité administrative indépendante ou d’une autorité publique indépendante d’être renouvelé.
III, III bis, IV et V. – (Non modifiés)
VI. – Par dérogation au second alinéa du II de l’article 13 de l’ordonnance n° 2015-948 du 31 juillet 2015 relative à l’égal accès des femmes et des hommes au sein des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes, le mandat des membres de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques nommés au titre d’un renouvellement partiel de l’année 2017 peut être renouvelé une fois. Les membres qui leur succèdent, à l’issue de leur mandat, sont une femme et un homme. Ils sont nommés jusqu’au renouvellement prévu après le 30 avril 2025.
VII. – Le premier alinéa du II de l’article 13 de l’ordonnance n° 2015-948 du 31 juillet 2015 relative à l’égal accès des femmes et des hommes au sein des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes est ainsi rédigé :
« II. – Lors du premier renouvellement de la commission suivant le 30 avril 2020, le vice-président du Conseil d’État propose une femme. Les deux autres institutions désignées aux quatrième et cinquième alinéas de l’article L. 52-14 du code électoral proposent, pour l’une, deux femmes et un homme et, pour l’autre, une femme et deux hommes. » – (Adopté.)
Article 49 bis
(Pour coordination)
(Non modifié)
I et II. – (Non modifiés)
III. – La vingt-quatrième ligne du tableau annexé à la loi n° 2010-838 du 23 juillet 2010 relative à l’application du cinquième alinéa de l’article 13 de la Constitution est supprimée. – (Adopté.)
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M. le président. Les autres dispositions de la proposition de loi ne font pas l’objet de la troisième lecture.
Vote sur l'ensemble
M. le président. Avant de mettre aux voix l'ensemble de la proposition de loi, je donne la parole à M. Philippe Bonnecarrère, pour explication de vote.
M. Philippe Bonnecarrère. Je tiens au préalable à féliciter M. Jacques Mézard pour la continuité de son action.
Mme la présidente de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication m’a prié d’attirer l’attention de M. le rapporteur et du Gouvernement sur le délai de remise des rapports.
En vertu des dispositions applicables en particulier au Conseil supérieur de l’audiovisuel, ce dernier devait déposer son rapport au Président de la République, au Gouvernement et au Parlement dans un délai de trois mois. Monsieur Mézard, en accord avec le Gouvernement, vous avez souhaité normaliser ce dispositif sur la base d’un délai de six mois.
Cette modification nous préoccupe, car nous avions l’habitude, à la commission de la culture, de traiter ces rapports en début d’année, c’est-à-dire en pleine actualité politique, en particulier au regard de l’action du CSA. Nous éprouvons donc un sentiment d’imperfection concernant des rapports dont l’arrivée sera un peu plus tardive.
Voilà la raison pour laquelle Mme la présidente Morin-Desailly m’a demandé d’exprimer sa sensibilité sur cette question, qui ne remet absolument pas en cause notre vote favorable sur l’ensemble du texte.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?…
Je mets aux voix, dans le texte de la commission, l'ensemble de la proposition de loi portant statut général des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes.
(La proposition de loi est adoptée définitivement.)
M. le président. Nous passons à l’examen de la proposition de loi organique, dans le texte de la commission.
proposition de loi organique relative aux autorités administratives indépendantes et autorités publiques indépendantes
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TITRE IER
INCOMPATIBILITÉS AVEC LE MANDAT DE MEMBRE DES AUTORITÉS ADMINISTRATIVES INDÉPENDANTES ET DES AUTORITÉS PUBLIQUES INDÉPENDANTES
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Article 3
(Non modifié)
I. – Le premier alinéa de l’article 8 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Lorsque la loi prévoit la présence au sein du collège d’une autorité administrative indépendante ou d’une autorité publique indépendante de membres désignés parmi les magistrats en activité, il ne peut être désigné d’autre membre en activité du même corps, à l’exclusion du président de l’autorité concernée. »
II et III. – (Non modifiés)
M. le président. Je mets aux voix l’article 3.
(L’article 3 est adopté.)
TITRE II
RENFORCEMENT DU CONTRÔLE PARLEMENTAIRE DES AUTORITÉS ADMINISTRATIVES INDÉPENDANTES ET DES AUTORITÉS PUBLIQUES INDÉPENDANTES
Article 4
(Non modifié)
Le tableau annexé à la loi organique n° 2010-837 du 23 juillet 2010 relative à l’application du cinquième alinéa de l’article 13 de la Constitution est ainsi modifié :
1° La troisième ligne est supprimée ;
2° (Supprimé)
3° La première colonne de la quatorzième ligne est complétée par les mots : « et routières » ;
3° bis (Supprimé)
4° Après la quinzième ligne, est insérée une ligne ainsi rédigée :
« |
Autorité de régulation des jeux en ligne |
Présidence |
» ; |
4° bis La première colonne de la vingt-deuxième ligne est complétée par les mots : « et aux énergies alternatives » ;
4° ter et 5° (Supprimés)
6° La vingt-quatrième ligne est supprimée ;
6° bis Après la vingt-quatrième ligne, est insérée une ligne ainsi rédigée :
« |
Commission du secret de la défense nationale |
Présidence |
» ; |
7° Après la vingt-cinquième ligne, sont insérées deux lignes ainsi rédigées :
« |
Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques |
Présidence |
|
Commission nationale de l’informatique et des libertés |
Présidence |
» ; |
8° Après la trente-troisième ligne, sont insérées deux lignes ainsi rédigées :
« |
Haut Conseil du commissariat aux comptes |
Présidence |
|
Collège du Haut Conseil de l’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur |
Présidence |
» ; |
9° (Supprimé) – (Adopté.)
TITRE III
COORDINATION ET APPLICATION
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M. le président. Les autres dispositions de la proposition de loi organique ne font pas l’objet de la troisième lecture.
Personne ne demande la parole ?…
Je mets aux voix, dans le texte de la commission, l’ensemble de la proposition de loi organique relative aux autorités administratives indépendantes et autorités publiques indépendantes.
En application de l'article 59 du règlement, le scrutin public ordinaire est de droit.
Il va y être procédé dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 85 :
Nombre de votants | 338 |
Nombre de suffrages exprimés | 338 |
Pour l’adoption | 338 |
Le Sénat a adopté définitivement. (Applaudissements.)
16
Nominations à des commissions
M. le président. Je rappelle au Sénat que le groupe Les Républicains a présenté des candidatures pour la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées et la commission de la culture, de l’éducation et de la communication.
Le délai prévu par l’article 8 du règlement est expiré.
La présidence n’a reçu aucune opposition.
En conséquence, je déclare ces candidatures ratifiées et je proclame :
- M. Pascal Allizard membre de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, en remplacement de M. Jacques Gautier, dont le mandat a cessé ;
- Mme Marie-France de Rose membre de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication, en remplacement de M. Pascal Allizard, démissionnaire.
17
Retrait d’une question orale
M. le président. J’informe le Sénat que la question orale n° 1594 de M. Gilbert Roger est retirée du rôle des questions orales, à la demande de son auteur.
Mes chers collègues, l’ordre du jour de cet après-midi étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-sept heures trente-cinq, est reprise à vingt et une heures trente-cinq, sous la présidence de M. Jean-Pierre Caffet.)
PRÉSIDENCE DE M. Jean-Pierre Caffet
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
18
Où va l’État territorial ? Le point de vue des collectivités
Débat organisé à la demande de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation
M. le président. L’ordre du jour appelle le débat, organisé à la demande de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation, sur les conclusions du rapport d’information : Où va l’État territorial ? Le point de vue des collectivités (rapport d’information n° 181).
La parole est à M. le président de la délégation.
M. Jean-Marie Bockel, président de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’administration territoriale de l’État traverse, depuis une dizaine d’années au moins, mais sûrement depuis plus longtemps, une succession de réformes qui ont profondément modifié son organisation, ses missions, ses moyens et les conditions de travail de ses agents.
Cette situation affecte profondément l’exercice des compétences des collectivités territoriales, dans la mesure où la mise en œuvre territoriale des politiques publiques s’effectue de plus en plus dans un cadre partenarial État-collectivités.
C’est pour optimiser les conditions de ce partenariat que la délégation aux collectivités territoriales a confié à Marie-Françoise Perol-Dumont et à Éric Doligé, que je salue, la rédaction d’un rapport d’information sur l’évolution de l’État territorial du point de vue des collectivités.
Je crois qu’il faut tout d’abord être conscient qu’un certain reflux de l’administration déconcentrée de l’État n’est pas nécessairement à regretter. Il me semble, dans son principe, largement conforme au mouvement même de la décentralisation. De fait, pendant que l’État territorial entamait son repli, les collectivités s’affirmaient, se dotaient des outils administratifs et techniques nécessaires à l’exercice de leurs compétences, développaient leurs coopérations. Les collectivités territoriales ont ainsi largement pallié les carences de l’État déconcentré.
Mais l’État continue souvent, trop souvent, de se regarder comme une instance surplombante, qui délègue des compétences sans rien perdre de son droit de regard sur l’ensemble et sur le détail. Monsieur le ministre, mon constat est d’ordre général et n’est pas conjoncturel : il s’agit d’une constante, par-delà les changements de gouvernements.
Pour perdurer tel qu’en lui-même, d’une part, l’État s’appuie sur une réglementation envahissante et, d’autre part, il use de la carotte financière dont il dispose encore. Mon propos est caricatural et je force volontairement le trait.
Cela se traduit par des initiatives dispersées, lancées sans concertation, selon les priorités ministérielles de l’instant, mais aussi par des doublons administratifs et par la tentation de l’empiètement.
L’une des principales conclusions de notre rapport est qu’il faut maîtriser ce désordre. Si l’État, garant légitime de l’intérêt public national dans toutes ses dimensions, doit évidemment être présent dans les territoires, au-delà de ses fonctions régaliennes, c’est en tant que stratège.
Il est de moins en moins acceptable qu’une administration étatique en manque structurel de moyens continue d’aligner des troupes plus ou moins clairsemées dans des domaines tels que la partie du social transférée aux départements, la culture ou le sport, autres compétences en partie transférées aux collectivités territoriales. Les interlocuteurs de nos rapporteurs ont souvent cité ces domaines, monsieur le ministre, mais tout cela est bien entendu à préciser.
L’essentiel est de progresser. C’est pourquoi je vous propose d’engager rapidement un travail d’identification et un processus de suppression des doublons, en partenariat avec les acteurs de terrain, les associations d’élus locaux, et avec le concours actif du Sénat. La Haute Assemblée est le lieu privilégié de la synthèse pour tout ce qui concerne les collectivités. Sur un dossier dans lequel les collectivités et le Gouvernement sont les parties intéressées, elle a assurément un rôle à jouer.
Une seconde question clé est, à mes yeux, la complexité des administrations déconcentrées, de leur organisation, de leurs circuits. Notre rapport dénonce en particulier l’insuffisance des repères dont les élus locaux disposent pour s’orienter dans le maquis des normes, des procédures et des interlocuteurs étatiques. Il dénonce aussi, sur ces sujets, la faiblesse latente de l’autorité préfectorale, qui devrait résumer pour les élus locaux l’ensemble de l’État déconcentré. Le préfet devrait jouer davantage pour tous les élus, directement ou par le truchement des sous-préfets ou de ses représentants, le rôle de facilitateur dont nos rapporteurs ont montré la nécessité.
Le Gouvernement a réformé son organisation territoriale souvent, il faut bien le dire, sans consulter ni discuter, ou du moins pas assez. Il pourrait être tenté de simplifier de la même façon le fonctionnement de cette organisation. Tout le rapport de la délégation montre que la consultation préalable et constante des collectivités est indispensable.
C’est pourquoi, je le répète, je vous incite à lancer un travail avec les élus locaux. Nous avons nous-mêmes fait un questionnaire pour lancer cette concertation, qui fait l’objet d’une forte demande. Comme nous avons su nous mettre à la disposition, avec notre collègue Rémy Pointereau, de toutes les commissions concernées du Sénat et de son président sur la question de la simplification des normes, nous pourrions modestement nous placer au cœur d’un travail partenarial, aux côtés des gouvernements successifs, pour aller dans le sens d’une plus grande simplicité.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Éric Doligé, rapporteur de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation. Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la rapporteur, mes chers collègues, bien que M. Jean-Marie Bockel, président de la délégation, en ait déjà beaucoup dit, j’ajouterai quelques éléments qui méritent votre attention. Je le remercie tout d’abord de nous avoir permis de mener cette mission d’évaluation de l’application locale des politiques publiques, avec Marie-Françoise Perol-Dumont, mission qui a débouché sur l’élaboration d’un rapport d’information sur les relations entre les collectivités et les services déconcentrés de l’État.
Si les réformes de l’État territorial ont fait l’objet de nombreuses études, la plupart d’entre elles ont été réalisées, d’abord et avant tout, du point de vue de l’État, et non des collectivités.
Depuis la mission commune d’information du Sénat de 2011 sur la révision générale des politiques publiques, et hormis les rapports publiés par les commissions des lois et des finances dans le cadre de l’examen des projets de loi de finances, les conséquences de ces réformes sur les territoires ont été peu analysées.
La délégation a souhaité combler cette lacune, en parfaite coordination avec les travaux en cours de la commission des lois. Je salue ici notre collègue Pierre-Yves Collombat, qui a été entendu en sa qualité, notamment, de rapporteur délégué, chargé de l’administration générale et territoriale de l’État, de la mission de contrôle et de suivi de la mise en œuvre des dernières lois de réforme territoriale. Cet entretien a été un peu trop court à notre goût, mais nous aurons sans doute l’occasion de le poursuivre ultérieurement.
Afin de fonder nos travaux sur un diagnostic solide, il nous est apparu indispensable de consulter les élus locaux : en un mois, 4 500 contributions nous ont été adressées, dont 57 % par des maires, ce qui témoigne du vif intérêt rencontré par le sujet sur le plan local.
Les élus interrogés se sont très majoritairement dits insatisfaits des réformes des services déconcentrés qui se sont empilées depuis au moins une décennie.
J’insiste sur ce point : deux tiers des répondants ont ainsi jugé inefficaces ou non pertinents la réforme de l’administration territoriale de l’État, la RéATE, lancée en 2008, la réorganisation des services régionaux engagée en 2014 et le « plan Préfectures nouvelle génération », dévoilé en 2015.
Une proportion identique de participants a précisé que leur commune ou groupement a été touché par au moins une réforme des implantations des services de l’État, citant en tête les réorganisations des gendarmeries, des services régionaux, des hôpitaux, des sous-préfectures et des écoles.
Bien que demeurant souvent indirect, l’impact de ces réorganisations sur les collectivités et les usagers a été jugé négatif par la majorité des élus interrogés.
Ce constat mitigé, tiré de la consultation, est corroboré par les expériences de terrain qui nous ont été rappelées au cours de nos auditions et déplacements.
Un grand nombre d’acteurs locaux ont affirmé que ces réformes, dont l’inspiration est selon eux essentiellement budgétaire, et la méthodologie, peu participative, ont engendré une situation instable et confuse : l’État territorial, déstabilisé dans son organisation, désengagé de certaines missions et parfois dépourvu de moyens, ne répond pas toujours aux besoins des collectivités.
Il en résulte chez les élus locaux un sentiment d’insatisfaction, pour ne pas dire d’exaspération, qui contraste avec le discours rassurant, et parfois satisfait, des administrations centrales.
Au total, trois obstacles stratégiques s’opposent à la pleine efficacité des relations entre les collectivités et les services déconcentrés de l’État.
Le premier est l’insuffisante cohérence de l’État territorial. Les élus déplorent la complexité des circuits administratifs et la dispersion de la parole de l’État.
Le deuxième obstacle est l’existence de doublons. L’immixtion de l’État dans les compétences décentralisées est fréquemment dénoncée par les collectivités.
Le troisième obstacle, enfin, est dû à l’éloignement et au désengagement de l’État. Les élus s’inquiètent du retrait de l’État de certains territoires – toujours plus isolés – ou de certaines missions – pourtant utiles.
Face à ces difficultés, nous avons formulé une série de préconisations, que va présenter ma collègue Marie-Françoise Perol-Dumont. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur plusieurs travées de l'UDI-UC. – MM. Pierre-Yves Collombat et René Vandierendonck applaudissent également.)
M. le président. La parole est à Mme la rapporteur.
Mme Marie-Françoise Perol-Dumont, rapporteur de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, comme vient de le rappeler Éric Doligé, les nombreux élus ayant répondu au questionnaire et ceux que nous avons auditionnés ont dressé un bilan critique assez convergent des différentes réformes de l’État territorial, dont l’incidence, singulièrement sur les plus petites collectivités, a été jugée plutôt négative.
Pour autant, on ne peut pas dire que l’État soit resté totalement hermétique aux observations des élus, ni que les collectivités soient rétives à toute évolution des services déconcentrés.
D’une part, depuis l’année dernière, des inflexions ont été annoncées par l’État en faveur du maintien de services de proximité, d’une réévaluation de certaines missions intéressant les collectivités – comme le contrôle de légalité et l’ingénierie territoriale – ou d’une simplification des relations entre les acteurs locaux et les administrations déconcentrées.
Il conviendra d’être particulièrement attentifs à la mise en œuvre de ces annonces, parfois récentes, imprécises, afin qu’elles aboutissent pleinement et durablement.
D’autre part, ce ne sont pas seulement des critiques, mais surtout des attentes que les collectivités nourrissent, monsieur le ministre, à l’égard de l’État.
Les élus ayant participé à la consultation ont indiqué souhaiter un « État facilitateur », pour plus d’un tiers d’entre eux, et un « État conseil », dans plus d’un quart des cas. Ils souhaitent, en outre, disposer, par ordre de priorité, de services déconcentrés plus proches, plus disponibles et mieux identifiés.
Plus largement, les remontées de terrain témoignent de la nécessité d’un État capable de remédier à la complexité de son organisation, son droit et ses procédures, de maintenir une présence proche et partagée et de mieux s’inscrire dans une logique de coconstruction.
Dans cette perspective, notre rapport formule trente-cinq préconisations, réunies en cinq axes, dont je me bornerai à rappeler les grandes lignes.
Le premier axe vise à assurer la cohérence de l’État territorial. Il est ainsi crucial d’affirmer l’autorité préfectorale sur l’ensemble des réseaux territoriaux de l’État, agences comprises, agences surtout ! À cette fin, il serait utile d’instaurer une durée minimale d’affectation des préfets, de fixer leurs priorités dans une lettre de mission et de leur adjoindre le concours d’un véritable état-major.
Le deuxième axe a pour finalité le maintien de la proximité des administrations déconcentrées. Une attention particulière doit être portée aux départements dont la démographie est faible ou la géographie, spécifique.
À titre personnel – cela n’engage que moi –, j’ajouterai ma conviction que la RéATE, en amputant les moyens affectés à l’État dans les territoires, a initié ce fort sentiment de déshérence qui perdure, voire s’amplifie.
Dans ce contexte, il convient de conforter les ressources en ingénierie de l’État au niveau départemental, en particulier dans les régions fusionnées. L’organisation multisite des diverses directions dans ces régions nécessite d’être améliorée et la création de maisons de services au public, encouragée.
Le troisième axe tend à permettre aux collectivités de surmonter la complexité administrative. L’administration déconcentrée doit prendre en charge le poids de sa propre complexité en offrant aux collectivités un référent généraliste pour le montage des projets et en développant à leur intention des procédures intégrées, des engagements qualitatifs et des outils contractuels.
Le quatrième axe consiste à recentrer l’action de l’administration territoriale de l’État sur les politiques strictement étatiques. Il est urgent de mettre fin aux doublons en prévoyant la reprise par les collectivités de certains services déconcentrés et d’en finir avec les reports de charge en compensant véritablement le coût des politiques de l’État mises en œuvre par les collectivités.
Il importe aussi d’achever la décentralisation parfois inaboutie de certaines compétences en opérant les transferts correspondants de personnels, comme les gestionnaires de lycées et de collèges. On est, en la matière, resté au milieu du gué.
Le cinquième axe prévoit un renforcement de la dimension facilitatrice des administrations déconcentrées. Le contrôle de légalité doit être orienté, en amont de la prise de décision, vers l’offre d’avis et de conseil sur le droit et les procédures applicables, singulièrement pour les plus petites collectivités, qui ne peuvent disposer en interne des différents services requis.
De manière plus ambitieuse, il serait opportun d’accorder au préfet la faculté d’adapter certains éléments non cruciaux des normes, et plus largement du droit, en s’inspirant, par exemple, du pouvoir dérogatoire prévu en matière d’accessibilité pour les personnes handicapées.
Tel est le sens de notre rapport, qui est aussi un plaidoyer en faveur d’une relation partenariale adulte entre l’État territorial et les collectivités. Ainsi, posture de facilitation et rôle de conseil s’imposent comme la ligne de conduite impérative des services déconcentrés de l’État. (M. le rapporteur ainsi que MM. Hervé Poher, Daniel Chasseing et Benoît Huré applaudissent.)
M. le président. La parole est à M. René Vandierendonck.
M. René Vandierendonck. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le Sénat, en tant que représentant constitutionnel des collectivités territoriales, reprend ses débats aujourd’hui pour évoquer la question importante de la présence de l’État dans les territoires.
Où va l’État territorial ?
Le rapport d’information de la délégation sénatoriale aux collectivités territoriales et à la décentralisation, dont les rapporteurs sont nos collègues Marie-Françoise Perol-Dumont et Éric Doligé, rassemble autour de trente-cinq propositions le point de vue – j’insiste sur l’ampleur de la consultation – des collectivités territoriales sur la question posée.
Il est peu de dire que les services déconcentrés de l’État ont connu dix ans de réorganisations successives avec, en premier lieu, la fameuse réforme de l’administration territoriale de l’État lancée dans le cadre de la non moins fameuse révision générale des politiques publiques entre 2008 et 2012.
Remis en septembre 2012, le rapport de trois inspections générales – l’Inspection générale des finances, l’Inspection générale de l’administration, l’Inspection générale des affaires sociales – a montré que cette réforme, menée avec le concours de prestations de conseil s’élevant à plus de 21 millions d’euros par an, a essentiellement consisté à rechercher des économies budgétaires rapides et portant sur des rationalisations, des restructurations de services ou de processus. Je cite, pour illustrer mon propos, un passage du rapport : « la règle de non-remplacement d’un départ à la retraite sur deux prenant le pas sur les autres objectifs de réformes des politiques publiques ». Ainsi, la RéATE a conduit à la suppression de 3 200 emplois dans les réseaux des préfectures et sous-préfectures.
La réorganisation a été poursuivie depuis 2012 dans le cadre, cette fois-ci, de la modernisation de l’action publique, la fameuse MAP. Plusieurs chantiers prioritaires ont été lancés en 2014 sur le volet « services déconcentrés » : une revue des missions de l’administration territoriale, la rénovation de la carte de la déconcentration, la déconcentration de la gestion des ressources humaines et des crédits budgétaires – nous allons y revenir –, la nouvelle carte des sous-préfectures, le renforcement de la tutelle par les préfets des opérateurs de l’État au niveau territorial, la poursuite de la mutualisation des fonctions supports, la simplification du fonctionnement des instances consultatives.
Dans le cadre de la MAP, la réforme de l’État initiée – et confortée à partir de juillet 2014 pour qu’elle soit enfin menée dans le même calendrier que la réforme territoriale – poursuit l’ambition de faire un « État plus moderne » et un « État plus facilitateur » au service des collectivités territoriales.
Les différentes missions – et la vôtre n’est pas la moindre ! – aujourd'hui mises en œuvre pour évaluer l’état du sujet in situ sont formelles sur un point : les préfectures de département ont beau être présentées partout comme le niveau de mise en œuvre des politiques publiques, force est de constater qu’il leur est revenu de payer le prix fort.
Dans la préfecture du Cantal – département où vivent 147 000 habitants –, les effectifs de l’État, tous services déconcentrés réunis, sont passés, en dix ans, de 164 personnes à 100. Dans le Nord – je prends à dessein un département plus important, qui compte 2,6 millions d’habitants –, les équipes des directions départementales de l’équipement, des affaires maritimes, de l’agriculture et de la forêt, qui regroupaient, il y a dix ans, 2 040 agents, relèvent aujourd'hui d’une direction à vocation interministérielle. Cette nouvelle direction départementale des territoires et de la mer rassemble 485 personnes. Et encore faut-il préciser que, faute de compensation en cas de perte d’effectifs, on redoute la moindre maladie ou épidémie de grippe !
En comparaison – c’est un constat arithmétique –, le niveau régional a été beaucoup moins impacté par des suppressions de postes. Ce qu’il convient de saluer comme une véritable avancée, c’est le renforcement de l’autorité des préfets de région sur l’ensemble des directions régionales ainsi, et cela est très nouveau, qu’un pouvoir de coordination enfin reconnu à l’égard des services étatiques ou démembrés qui prolifèrent de plus en plus – Rectorat, ARS, ADEME, ANAH, ANRU, je pourrais citer une kyrielle d’agences ! Il s’agit là d’une démarche essentielle à la cohérence de l’action de l’État dans les territoires.
Ce qui est le plus remarquable et qu’il faut encourager à tout prix, c’est le nouveau dialogue qui s’instaure entre les préfets de région et les administrations centrales sur la définition des moyens budgétaires et humains nécessaires à la conduite de l’action de l’État. Il faut avoir entendu parler des budgets opérationnels de programme, les BOP, il faut avoir vu les directions régionales de l’environnement, de l’aménagement et du logement, les DREAL, ne dialoguer qu’avec leurs administrations d’origine pour mesurer le progrès accompli !
Maintenir la proximité de l’administration déconcentrée de l’État avec les collectivités territoriales – tout le Sénat est d’accord –, c’est d’abord faire le choix du département comme circonscription de l’État où se mettent en œuvre l’ingénierie territoriale et les politiques publiques. C’est cet objectif de rééquilibrage territorial qui a guidé l’action gouvernementale dès 2015 et qui a été encore renforcé par la fusion des régions au 1er janvier 2016.
Or, les ressources humaines de nombreuses préfectures départementales étaient à ce point « dans le rouge » qu’il y a lieu de se poser la question – comme le fait avec beaucoup de pertinence le rapport – de la garantie d’un socle d’effectif minimum pour que les services de l’État puissent mener à bien leurs missions, même redéfinies plus clairement. C’est l’origine du « plan Préfectures nouvelle génération » amorcé à l’été 2015 : revenir aux fondamentaux, à savoir les missions régaliennes de l’État et pouvoir apporter du conseil – et non plus uniquement du contrôle – aux collectivités, notamment les communes rurales et périurbaines. D’autant plus – j’insiste sur ce point – que des départements peu denses peuvent avoir des besoins stratégiques tout à fait réels – et c’est le cas neuf fois sur dix !
Le débat sur l’ingénierie territoriale semble parfois inutilement mettre en concurrence l’État et le département dans sa nouvelle compétence de solidarité territoriale – M. Doligé y a insisté.
Je partage avec les rapporteurs le souci de dépasser ce débat. Ainsi, la loi NOTRe, grâce aux schémas départementaux d’amélioration de l’accessibilité des services publics, a créé un cadre naturel de partenariat, notamment pour la mise en place des maisons de services au public : 700 maisons de services au public ont été créées, dont 225 en partenariat avec La Poste. Ce mouvement doit naturellement être encouragé.
L’amélioration de l’accès aux services et l’amélioration de la qualité de vie des populations sont des priorités importantes si l’on ne veut pas tomber dans le sentiment, décrit par Christophe Guilluy dans son ouvrage « La France périphérique », de relégation qu’on éprouve dans certains territoires.
M. Jean-François Husson. C’est déjà fait, hélas !
M. René Vandierendonck. Peut-être est-ce en effet bien entamé…
Le sous-préfet doit donc être l’interlocuteur naturel et le facilitateur des projets des communes. Il doit jouer un rôle de « courroie de transmission » qui oriente les collectivités vers les ressources en ingénierie et la recherche de financement.
Dans l’espace rural, il est indispensable qu’il noue des relations de partenariat avec les collectivités concernées, pouvant, chaque fois que cela est possible, prendre la forme de contrats de ruralité, par exemple, sur le modèle des contrats de ville.
Dans ce cadre contractuel, il sera possible de mieux articuler – autre problème soulevé par les rapporteurs – les procédures d’attribution de la dotation d’équipement des territoires ruraux, la DETR, avec les procédures analogues du département ou de la région.
J’en viens aux métropoles dont le moins que l’on puisse dire est qu’elles échappent désormais à toute définition rationnelle. Je veux souligner un point qui mérite de retenir notre attention en évoquant l’initiative prise par Nancy. Si cette métropole dispose de moyens d’ingénierie, elle est aussi dotée, indépendamment de ces derniers, des moyens d’ingénierie de son agence de développement et d’urbanisme. Eh bien, Nancy a mis en œuvre – à ma connaissance, c’est une première – un pôle métropolitain dont le but est précisément de mutualiser l’ingénierie à une échelle plus large que le périmètre métropolitain. Pour ma part, je crois que c’est à ce genre de comportement que l’on reconnaît une métropole solidaire et inclusive.
J’aborde maintenant le contrôle de légalité, signalant d'ailleurs, si on ne se paie pas de mots, que seul un acte sur cinq est actuellement contrôlé. Les effectifs consacrés au contrôle de légalité sont passés de 1 200 à 800 entre 2008 et 2016. Pourtant, la consultation faite par les rapporteurs montre qu’un État facilitateur – sollicité par 35 % des élus – et qu’un État conseil – souhaité par 27 % des élus – sont au premier rang des attentes des élus.
Le développement de la fonction de conseil et l’élaboration d’un répertoire des bonnes pratiques restent un objectif à atteindre.
Se pose ensuite le problème de l’allégement des normes – vous en avez fait mention, tous les élus en parlent et Rémy Pointereau y consacre une bonne partie de son énergie.
À ce stade, je voudrais rappeler que chaque fois que l’État, plutôt que d’emprunter la voie de la norme étroite du décret, privilégie le modèle des directives « Crédit foncier de France », il sauvegarde le pouvoir d’appréciation du préfet chargé de la mise en œuvre, il crée de la souplesse, il donne au contrat, qui fédère autour d’un projet de territoire les acteurs locaux, une réalité encore plus tangible.
L’État est stratège sur le plan régional. À ce stade, constatons que partout où nous allons en France – et nous allons partout ! –, les relations entre les services déconcentrés de l’État et les directions des nouvelles régions, dans le cadre de leurs compétences, sont encore à parfaire – pour être optimiste, on dira qu’elles sont embryonnaires.
On ressort des axes de progression autour desquels vous avez regroupé vos trente-cinq propositions avec la certitude que déconcentration et décentralisation, les deux font la paire. C’est ce que, en mécanique, on appelle un couple. Il n’y a pas de développement territorial sans une bonne articulation de ces deux forces.
On ressort de là aussi avec quelques idées simples.
Premièrement, il est essentiel de travailler sur la fonction « ressources humaines » – l’État a entrepris ce chantier –, ce qui veut dire non seulement rééquilibrer les compétences, mais aussi retravailler sur la formation et les moyens humains pour conforter l’échelon fondamental qu’est l’État départemental.
Deuxièmement, la compétence « solidarité territoriale » du département doit être mieux articulée avec l’ingénierie territoriale de l’État. Il est anormal, ici ou là, de voir des concurrences inutiles et stériles. La DETR en est un exemple.
Troisièmement, l’ingénierie territoriale, tout le monde en parle, mais on en parle plus qu’on en voit ! Je voudrais citer un objectif relativement simple. À l’heure de la nouvelle carte de l’intercommunalité, l’ingénierie territoriale donnera la certitude de ne pas laisser la nouvelle cartographie faire la réalité intercommunale. Ce qui fera la réalité intercommunale, c’est la capacité à fédérer les communes autour d’un projet. Pour cela, il y a un besoin d’ingénierie. Pour cela, le département a ses missions. L’État a les siennes. Quant à moi, j’indique ma préférence, dans un cadre clarifié, pour le mode contractuel, qui garantit la cohérence des politiques, qui garantit le partenariat, l’adaptation des politiques publiques aux réalités diverses des territoires. (Applaudissements sur quelques travées du groupe Les Républicains. – Mme Valérie Létard ainsi que MM. Jean Desessard, Hervé Poher et Pierre-Yves Collombat applaudissent également.)
M. le président. La parole est à Mme Caroline Cayeux.
Mme Caroline Cayeux. Monsieur le président, monsieur le ministre, madame, monsieur les rapporteurs, mes chers collègues, je tiens tout d’abord à saluer Marie-Françoise Perol-Dumont et Éric Doligé pour la qualité de leur écoute, pour la qualité de leur rapport d’information et la pertinence de leurs préconisations.
Dans le cadre de mes fonctions au sein de l’association Villes de France, j’avais émis quelques propositions sur ce sujet si important pour nos territoires. Beaucoup ont été reprises et je m’en réjouis. Permettez-moi toutefois de proposer quelques pistes d’amélioration des pratiques actuelles évoquées dans ce rapport.
J’approuve, en premier lieu, l’avis des rapporteurs, qui estiment nécessaire de pérenniser l’organisation multisite des services déconcentrés de l’État.
Une autre mesure, que j’ai le plaisir de retrouver dans les propositions du rapport, consiste à éviter « les fermetures simultanées de plusieurs services dans une même collectivité lors des projets de rationalisation d’implantation des services de l’État ».
M. Jacques Legendre. Très bien !
Mme Caroline Cayeux. En évoquant cette préconisation, je ne peux m’empêcher de songer à ces territoires vertement touchés par les réformes des services déconcentrés régionaux, ou bien le « plan Préfectures nouvelle génération », sans réflexion territorialisée préalable. Ces multiples restructurations administratives s’ajoutent, malheureusement, parfois avec la fermeture d’un site industriel, le départ de services publics de proximité ou la mise à l’écart du maillage ferroviaire. J’irai, à titre personnel, plus loin que le rapport, en demandant que des compensations soient même accordées aux territoires ayant déjà subi des départs successifs d’administrations déconcentrées ces dernières années.
Je partage aussi le constat sur la nécessité d’instaurer une durée minimale d’affectation de trois ans pour les préfets. J’estime, comme les rapporteurs, que la stabilité des nominations est un élément essentiel pour la continuité du service public.
Une autre piste mérite une attention toute particulière, et peut-être une application rapide. La suppression du contrôle de légalité actuel pourrait être étudiée au profit d’un mécanisme plus efficace reposant sur le système de « rescrit », à l’instar de ce qui a été proposé par Alain Lambert.
Selon moi, c’est une idée intéressante à expertiser de près. Il faut le reconnaître, le contrôle de légalité s’est dégradé ces dernières années, et les services des préfectures ne disposent plus des moyens nécessaires au traitement juridique des plus de cinq millions d’actes qu’ils reçoivent. La généralisation du rescrit, très développé en matière fiscale, consisterait en une validation préalable par l’autorité préfectorale de la solution retenue pour une question complexe. Les collectivités y gagneraient en sécurité juridique et les préfets verraient leur rôle devenir celui d’accélérateur des initiatives locales. Ainsi, il faudrait orienter le contrôle de légalité, en amont de la prise de décision des collectivités, vers l’offre d’avis et de conseil sur les procédures applicables.
Enfin, je dois déplorer, comme les rapporteurs, le manque de concertation avec les élus locaux. Et je ne peux que souscrire sans réserve aux préconisations pour rendre impérative une vraie concertation nationale préalable avec les associations d’élus locaux avant tout lancement de politique ministérielle touchant les compétences décentralisées, comme aux réformes de l’administration déconcentrée.
Un ajout à ces mesures pertinentes : le Parlement pourrait être mieux informé sur les conséquences des réformes de l’État déconcentré en termes de répartition géographique des effectifs de la fonction publique d’État. La dernière synthèse chiffrée existante sur la répartition géographique des effectifs de la fonction publique d’État n’a figuré que dans le rapport annuel « sur l’état de la fonction publique et les rémunérations » annexé à la loi de finances de 2013. Sans doute faudrait-il envisager sérieusement de rendre obligatoires tous les ans ces informations dans ce « jaune budgétaire » pour suivre les conséquences des réformes régulièrement. Je crois que nous en avons besoin pour notre travail parlementaire.
D’une manière générale, ce rapport intitulé « Où va l’État territorial ? Le point de vue des collectivités » s’avère un document opérationnel et novateur, grâce à ses préconisations pratiques et réalistes. J’en remercie les rapporteurs. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mmes Françoise Gatel et Valérie Létard ainsi que M. Pierre-Yves Collombat applaudissent également.)
M. le président. La parole est à Mme Éliane Assassi.
Mme Éliane Assassi. Monsieur le président, monsieur le ministre, madame, monsieur les rapporteurs, mes chers collègues, je voudrais en premier lieu saluer l’ambitieux travail fourni par Éric Doligé et Marie-Françoise Perol-Dumont dans le cadre de ce rapport, en lien avec les membres de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation et notamment avec son président, Jean-Marie Bockel.
Je salue en particulier l’initiative qui a consisté à interroger 4 500 élus locaux, via une enquête sur internet. Leur large participation démontre à quel point ceux-ci ont besoin d’être entendus et respectés. C’est une preuve supplémentaire du rôle qu’ils jouent au quotidien pour l’exercice de notre démocratie et pour faire vivre la République sur tout le territoire.
Depuis le début de la législature, les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen n’ont pas cessé de demander l’organisation de débats participatifs, la réalisation d’enquêtes et d’auditions, afin de mettre les élus locaux au cœur de l’élaboration de chaque réforme de l’administration comme de chaque réforme territoriale. C’est malheureusement tout l’inverse qui a été fait.
On ne s’étonnera donc pas de voir que 93 % des élus locaux ayant répondu à l’enquête dont les résultats figurent dans le rapport estiment ne pas avoir été suffisamment associés aux dernières réformes, et que 52 % d’entre eux indiquent ne pas y avoir été associés du tout. Le constat est accablant pour les différents gouvernements qui se sont succédé et les méthodes qu’ils ont employées. Force est de constater qu’ils ont préféré obéir aux injonctions de Bruxelles plutôt que de répondre aux besoins des élus locaux, ces sentinelles de la démocratie, et qu’ils ont fait le choix de la technocratie plutôt que celui de la République !
Madame la rapporteur, monsieur le rapporteur, lorsque vous évoquez la réforme de l’administration territoriale de l’État, la RéATE, la révision générale des politiques publiques, la RGPP, et la modernisation de l’action publique, la MAP, vous parlez de mesures incessantes, mal articulées, au sujet desquelles les acteurs de terrain n’ont pas assez été sollicités. Nous ne pouvons que partager les constats que vous dressez et serions même prêts à aller encore plus loin.
Les différents acteurs des collectivités locales, élus, agents et usagers, subissent aujourd’hui les conséquences des erreurs commises dès 2008 avec la RGPP. La première erreur aura été de mettre en œuvre cette réforme non pas dans le but d’améliorer la qualité des services publics, mais pour servir une idéologie néolibérale, en vertu de laquelle moins d’État, c’est davantage de liberté pour les marchés et pour la finance.
La seconde erreur – le rapport le montre bien – a consisté à réformer l’action publique en appliquant le dogme de la réduction des déficits budgétaires et de la baisse de l’investissement. Quelle erreur ! Quelle aberration, quand on sait que l'Observatoire français des conjonctures économiques considère que c’est justement par la relance de l’investissement public que l’on sortira de la crise à laquelle les Français sont confrontés.
Il faut évidemment réformer l’action publique. Parfois, nos concitoyens considèrent en effet que le fonctionnement de l’administration est trop complexe. Cela étant, le non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux et les fermetures de services publics n’ont jamais permis d’améliorer la situation. Au contraire, cela a tout compliqué.
Les réformes menées ces dernières années, qu’il s’agisse d’attaques contre l’emploi public ou de délocalisation des services publics, ont considérablement complexifié et affaibli l’action publique.
Je veux notamment parler de l’affaiblissement du rôle de l’État en tant qu’accompagnateur des collectivités locales. Certains des élus, notamment ruraux, auditionnés par les rapporteurs ont notamment souligné le fait que la fonction de conseil auparavant assurée par les services déconcentrés de l’État avait quasiment disparu. Si bien qu’aujourd’hui, et pour ne donner que cet exemple, les prestations d’ingénierie territoriale destinées au bloc communal doivent être assurées par les conseils départementaux.
Ce constat me conduit à aborder un sujet préoccupant, à savoir le glissement d’une partie des politiques publiques, auparavant assumées par les services déconcentrés de l’État, vers les collectivités territoriales. Comment ces collectivités pourraient-elles assumer des politiques qui relèvent du pouvoir régalien, comme suppléer à la fermeture d’une gendarmerie ou d’une sous-préfecture, par exemple ? Comment pourraient-elles sortir de leurs compétences propres, alors même que la clause de compétence générale a été supprimée ? Surtout, comment pourraient-elles pallier les manques de l’État, alors qu’elles ont fait face à une baisse de 10 milliards d’euros de la dotation globale de fonctionnement au cours des trois dernières années ?
Les collectivités n’en sont tout simplement pas capables financièrement. Les élus locaux assistent impuissants au remplacement d’un poste sur deux dans telle sous-préfecture, à la fermeture d’une classe dans telle école, ou à la fermeture de la gendarmerie du canton.
Et que dire des services publics de l’État qui ont été privatisés ? Je parle notamment de La Poste et du risque de fermeture d’un tiers des bureaux de poste dans certains départements. Quelque 61 % des élus locaux ayant répondu à l’enquête déclarent ainsi que leurs communes ont été touchées par des suppressions de services publics déconcentrés. On peut donc parler d’un véritable effacement de l’action publique, à l’origine de fractures sociales et de fractures entre les territoires.
Est-ce cela que nous voulons pour la France du XXIe siècle ? En posant cette question, je m’adresse aux élus locaux, aux agents des différentes fonctions publiques et aux usagers : il n’y a pas de fatalité ! Tout est question de choix politique et de volonté politique !
Avec de la volonté politique – et nous, nous en avons ! –, nous pouvons bâtir une France protectrice et solidaire où l’État agit main dans la main avec les collectivités locales. Au travers d’un plan de relance des services publics, de l’école, de la gendarmerie et de la justice, nous pourrions assurer l’égalité et la sécurité des territoires.
Avec de la volonté politique, nous pourrions également prendre le pouvoir sur la finance. Il faut en finir avec les injustices fiscales, comme l’évasion fiscale qui coûte 80 milliards d’euros chaque année à l’État, ou ces 30 milliards d’euros de cadeaux faits au patronat, avec pour conséquence directe d’étrangler fiscalement les classes moyennes et populaires.
Mes chers collègues, voici ce à quoi les citoyens et les élus locaux aspirent : un État fort pour développer notre économie, pour assurer davantage de démocratie, pour permettre davantage d’égalité entre les individus et entre les territoires. C’est ce à quoi travaillent les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen pour les échéances à venir : construire une nouvelle République et construire un nouveau pacte républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC. – M. Pierre-Yves Collombat applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat.
M. Pierre-Yves Collombat. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, où va l’État territorial ? Quel élu local déconcerté par l’avalanche de réformes parallèles touchant aux services territoriaux de l’État et collectivités locales au cours des dix dernières années ne s’est pas posé la question ? Merci à nos collègues Éric Doligé et Marie-Françoise Perol-Dumont d’avoir donné la parole à ces élus et de nous permettre d’en débattre.
Pourtant, j’ai le sentiment que les incohérences d’exécution bien réelles que nos collègues épinglent dans leur rapport dissimulent une logique, celle de la dissolution du modèle républicain français d’organisation territoriale dans tout autre chose. Ce modèle que l’on dit « jacobin » correspond plutôt à un jacobinisme bien tempéré, alliage d’un jacobinisme théorique, centralisateur et d’un girondinisme de fait.
Ainsi, depuis la Grande Révolution, la citoyenneté a deux faces : une face locale et une face nationale. La République est au village en même temps qu’à Paris. Contrairement à ce que l’on croit souvent, la commune française est la cellule de base de la gestion territoriale la plus autonome des grandes démocraties.
Si la démocratie locale est autant jacobine que girondine, l’État s’est fait de moins en moins jacobin tout au long d’un processus de décentralisation séculaire. De plus, ce que l’on oublie trop, il a joué le rôle d’un acteur local et pas seulement celui de surveillant général ou de courroie de transmission du Gouvernement.
Pierre Grémion l’a bien montré : dans le schéma classique d’administration territoriale française, il n’y a pas, d’un côté, l’administration de l’État et, de l’autre, les représentants de la population, mais une « consonance entre l’administration et son environnement » qui dépasse de beaucoup un simple accord de climat. L’administration préfectorale est autant le porte-parole de l’État auprès du terrain que l’inverse, c’est-à-dire du terrain auprès du pouvoir central.
De plus en plus et, surtout, sur la plus grande partie du territoire, l’État a d’abord marqué sa présence grâce à ses ingénieurs des Ponts et Chaussées ou à ceux des Eaux et Forêts. Il s’agissait d’une présence bénéfique et très appréciée qui faisait oublier ce que peuvent avoir d’urticantes les tracasseries de la bureaucratie régalienne. Au travers de ses ingénieurs, l’État est devenu partenaire et parfois acteur du développement local. Son désengagement progressif pour laisser place au marché – car c’est bien de cela qu’il s’agit – sera ressenti comme un abandon. C’est d’ailleurs ce que j’ai cru lire entre les lignes dans votre rapport.
Pour Pierre Grémion, cette symbiose entre fonctionnaires de l’État et élus locaux constituait un véritable « pouvoir périphérique ».
Les réformes intervenues ces dix dernières années au niveau tant des collectivités locales que des services de l’État visent à faire disparaître ce modèle sans le dire, voire en soutenant le contraire.
Fini l’État acteur et conseilleur ! Place aux intercommunalités les plus grandes possible, chargées d’assurer à leurs frais les services que l’État n’assume plus. Place aux cabinets d’expertise privés et au marché. Place aux départements transformés en services extérieurs de l’État social. Place aux grandes régions planificatrices de ce que d’autres, notamment les métropoles, voudront bien faire.
Sans compter que la RGPP, la MAP, la RéATE, ou encore le plan Préfectures nouvelle génération, sont en réalité la déclinaison d’un seul plan, le PRPTE, c’est-à-dire le plan de réduction de la présence territoriale de l’État, lui-même chapitre du grand plan de rigueur budgétaire, expression de la même logique.
Il faut bien garder en mémoire le fait que cette disparition du territoire de l’État acteur ne constitue en rien une nouvelle étape de la décentralisation, contrairement à ce que prétend le discours officiel. Elle correspond en réalité au renforcement de la tutelle du marché – il n’est qu’à voir le délabrement du service public sur la plus grande partie du territoire – assorti d’une nouvelle manière pour l’État d’exercer le pouvoir, ce que l’on a pu appeler « gouverner à distance ».
Sans renoncer à la contrainte par la loi et par la norme, lesquelles sont de plus en plus nombreuses et détaillées, bien que l’on s’en plaigne, l’État tend à utiliser des leviers de pouvoir plus libéraux et apparemment non contraignants : je parle des appels à projets dont l’État sélectionne les bénéficiaires mis en concurrence, des fonds plus ou moins exceptionnels de ceci ou de cela, aussi encadrés que les promotions publicitaires où – vous l’avez remarqué – l’on n’est jamais dans la bonne case, des bonifications – il n’est qu’à voir les incitations aux fusions de communes –, de la contractualisation – on en réclame même –, du conventionnement, de l’affichage des bonnes pratiques, ou encore du benchmarking.
Voilà la nouvelle façon de gouverner !
Condition nécessaire pour que cela fonctionne, réduire l’autonomie financière des collectivités territoriales et organiser leur dépendance vis-à-vis de l’État. C’est fait !
Au final, on a simplement remplacé l’État local, acteur de terrain, par l’État central bureaucratique, et ce au nom de l’autonomie de collectivités locales ainsi mises en concurrence et d’une saine gestion des finances publiques. C’est tout bénéfice pour la haute bureaucratie, dont les effectifs, eux, n’ont pas diminué : elle n’aura plus à se colleter avec les manants d’en bas, désormais totalement libres de prendre ou de laisser, à leurs risques et périls, du moins tant qu’ils accepteront de se tenir tranquilles ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRC. – MM. René Vandierendonck et Jean-Marc Gabouty applaudissent également.)
M. le président. La parole est à M. Hervé Poher.
M. Hervé Poher. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, lorsque l’on intervient sur un tel sujet, on a parfois du mal à adopter un point de vue totalement objectif, surtout quand on est ou quand on a été élu local. Personnellement, je dois avouer que j’ai beaucoup hésité entre le thème des « us et coutumes du peuple des élus locaux » et celui des « aléas de la vie de couple ». (Sourires.) Tout cela pour dire que les relations entre l’État et les élus locaux sont bien souvent complexes.
C’est d’ailleurs bien normal, car l’État a pris un malin plaisir à complexifier les choses en cherchant à mettre dans un même creuset la décentralisation, la déconcentration, la RGPP, l’obsession stérilisante des économies budgétaires et l’inconfort permanent des réformes territoriales. Tout cela mélangé, on perd un peu de lisibilité. Or les élus, en particulier territoriaux, ont horreur de ne pas y voir clair !
Pour autant, rassurez-vous, monsieur le ministre, je ne tomberai pas dans la critique facile, car les relations entre les collectivités territoriales et l’État sont bien plus nuancées et bien plus complémentaires qu’il n’y paraît.
Parmi les « us et coutumes du peuple des élus locaux », on observe trop souvent une mauvaise habitude consistant à taper sur l’État. C’est bien pratique : « C’est la faute de l’État, de la loi, ce n’est pas moi ! ». Nous avons tous usé et abusé de cette façon de faire. Cela étant, ce comportement est normal : nous, les élus, passons régulièrement à la toise électorale. Alors, quand les choses vont bien, on en tire les bénéfices. En revanche, quand l’ambiance est orageuse, on cherche un vilain responsable. De ce point de vue, l’État est quand même un coupable bien pratique.
Heureusement, nous avons bien souvent en face de nous des préfets et des sous-préfets qui ont le sens du devoir et le sens de l’État, mâtiné d’un peu de diplomatie, ce qui ne gâche rien. Bref, nous avons affaire à un corps préfectoral de haut niveau.
Avant de décider s’il faut féliciter ou critiquer l’État, l’important est de savoir ce que l’on attend de lui dans un pays décentralisé, dans un pays où les collectivités territoriales ont de plus en plus de compétences au fil des réformes, dans un pays où le cerveau est bien souvent « anar », mais où le cœur reste étrangement jacobin.
Le rôle de l’État dans sa composante déconcentrée est triple : il doit être commandeur, conseiller et complice. Commandeur, parce que c’est lui le gardien de la loi. Conseiller, parce que nul n’est plus à même que l’État de faciliter l’application de la loi. Complice, enfin, car, l’alliance entre les représentants de l’État et ceux des collectivités locales permet bien souvent de trouver une intelligence pratique ou une pratique intelligente de cette loi.
Cependant, cet exercice si difficile atteint quand même ses limites lorsque l’obsession budgétaire conduit à des sous-effectifs très handicapants pour l’image et l’efficacité de l’État. J’ai cru lire dans un texte traitant de la diminution des effectifs que l’on remplaçait « la quantité par la qualité ». Je veux bien le croire, mais tout être humain, même doté de beaucoup de qualités, a tout de même ses limites. Alors, réduire les effectifs pour telle ou telle raison, soit ! Mais entre le soi-disant trop-plein et la disette, il y a un juste milieu !
Autre remarque : il est également possible d’avoir recours à des transferts de compétences pour alléger la charge de l’État. Seulement, cela doit se faire à condition, bien entendu, de réaliser en parallèle un transfert de moyens, en particulier financiers. Et que l’on ne vienne pas nous reprocher ensuite que les collectivités territoriales ont trop embauché ! Je ne connais aucune collectivité locale qui embauche pour le plaisir de dépenser de l’argent ! (M. Claude Nougein est dubitatif.)
Mme Cécile Cukierman. C’est bien de le rappeler !
M. Hervé Poher. Un bémol, toutefois : le transfert de compétences a ses limites, des limites financières, des limites administratives et, il faut bien l’avouer, certaines limites politiques, au sens de « gestion de la ville ». Personne ne peut nier que le poujadisme local ou l’électoralisme peuvent parfois, je dis bien parfois, nuire au message et à la finalité de la loi. C’est pourquoi le rôle de l’État neutre, indépendant, gardien de certains principes et présent sur le terrain est primordial.
Le rapport d’information de nos collègues Marie-Françoise Perol-Dumont et Éric Doligé est très évocateur, s’agissant en particulier des questions, des incertitudes, des frustrations, voire de « l’exaspération » des élus locaux dans leur rapport avec l’État. Les trente-cinq propositions qui figurent dans le rapport sont fondées sur le bon sens, sur l’écoute et sur l’expérience du terrain, aujourd’hui essentielle.
Il faudra néanmoins nuancer certaines mesures. Un seul exemple : la durée d’affectation des préfets. Je suis élu d’un département, le Pas-de-Calais, où les représentants de l’État sont souvent soumis à rude épreuve dès leur arrivée, souvent chahutés par les événements, et où les temps morts sont rarissimes. C’est sans doute très formateur, mais c’est aussi très fatigant, même si tous les départements ou tous les arrondissements n’ont pas le même potentiel de montée d’adrénaline.
Indéniablement, les propositions figurant dans le rapport répondent à la double préoccupation qui tourmente en permanence les élus : assurer pleinement la libre administration de la collectivité tout en étant le partenaire d’un État qui fait naturellement partie, et ce pour de nombreuses raisons, de notre environnement, de notre fonctionnement et encore de nos réflexes.
Une dernière remarque : faisons très attention au tout-numérique ! Big Data a certes beaucoup de mémoire, d’intelligence et de rapidité, mais il manque singulièrement de sentiments. Rien n’interdit à nos structures dirigeantes et administratives de faire preuve d’un peu d’humanité !
Pour autant, je tiens à remercier nos collègues pour ce rapport d’information. Il nous rappelle que l’État et les collectivités locales ont un même devoir et un même objectif : le service public et le développement dans une certaine idée de la République. (Applaudissements sur les travées du groupe écologiste et du groupe socialiste et républicain. – Mmes Cécile Cukierman et Christine Prunaud ainsi que M. Pierre-Yves Collombat applaudissent également.)
M. le président. La parole est à M. Bernard Fournier.
M. Bernard Fournier. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je voudrais tout d’abord féliciter Marie-Françoise Perol-Dumont et Éric Doligé pour la qualité et la clarté de leur rapport. Il s’agit d’un travail considérable et utile pour lequel ils ont pris la peine de consulter les élus locaux par internet. Et demander leur avis aux élus lorsque l’on parle de la réforme des services de l’État, ce n’est pas si courant !
Cela fait maintenant dix ans que les services déconcentrés de l’État sont soumis à des réformes continuelles, définies sans véritable stratégie sur le long terme et sans grande concertation entre les ministères, le principal objectif étant de réduire les dépenses publiques.
Si l’on peut souligner un effort de rationalisation, de simplification et de modernisation de l’action publique, on constate que ces réformes provoquent sur le terrain un sentiment d’exaspération chez les élus et conduisent à un épuisement des personnels concernés. La stabilisation tant attendue dans nos collectivités territoriales se fait attendre et la cohérence de toutes ces politiques n’apparaît pas clairement.
La complexité perdure et désoriente les élus qui, sur le fond, ne ressentent souvent que leurs effets négatifs. La plupart d’entre eux ont été touchés par ces réformes et la disparition de services éminemment symboliques, comme la gendarmerie, les écoles, les urgences des hôpitaux, la trésorerie.
Certaines de nos communes, souvent les plus rurales, ont subi une concentration inédite de fermetures au cours des dernières années. Cela entretient ensuite un cercle vicieux avec d’autres fermetures en cascade : l’épicerie, le bureau de tabac, la boulangerie. Ces territoires éprouvent alors un sentiment d’abandon qui se traduit par une baisse de leur population à terme. Qui voudrait rejoindre ces territoires abandonnés, ces zones délaissées par l’État, mes chers collègues ? Le sentiment de désertification rurale n’est pas un vain mot, mais bien une réalité.
Les élus de terrain estiment à juste titre avoir été insuffisamment consultés. L’AMRF, l'Association des maires ruraux de France, a souligné le « manque de concertation ». En tant que président de l’Union des communes rurales de la Loire, je ne peux que confirmer cette réalité.
Nous avons maintes fois été mis devant le fait accompli, par exemple, lorsque les ATESAT, les dispositifs d’assistance technique fournie par l’État pour des raisons de solidarité et d’aménagement du territoire, ont disparu. Il en va d’ailleurs de même pour l’ensemble des services publics au sujet desquels les associations d’élus doivent se battre pour se faire entendre. Je rappelle que 93 % des élus locaux estiment ne pas avoir été suffisamment associés à ces réformes.
Il y a aussi le sentiment que l’État et ses services sont de plus en plus loin et que tout est de plus en plus concentré au niveau de la région, des grandes villes ou des grandes métropoles, le sentiment que les missions de conseil et d’expertise des services de l’État sont réduites à peau de chagrin et que, a contrario, les procédures de contrôle sont de plus en plus tatillonnes.
Nos collectivités arrivent difficilement à assumer l’ensemble de leurs missions, les spécificités des territoires sont souvent ignorées.
Les services déconcentrés de l’État sont de moins en moins présents et transfèrent leurs responsabilités notamment sur les intercommunalités et les départements. Le constat est flagrant, singulièrement en ce qui concerne les prestations d’ingénierie territoriale destinées au bloc communal.
Par ailleurs, la simplification des normes et la poursuite du travail très important mené sur ce sujet par de nombreux collègues de la Haute Assemblée m’apparaissent indispensables. La complexité des procédures, la multiplication des services et des interlocuteurs, l’explosion des normes sont indissociables. Tout cela entraîne un sentiment d’incompréhension et crée une grande perplexité chez les élus.
Les trente-cinq propositions émises par nos deux rapporteurs sont très intéressantes.
Je retiendrai en particulier la proposition visant à associer les élus locaux et leurs associations à l’élaboration des réformes, car la coconstruction est indispensable à mes yeux pour prendre en compte la complexité du terrain et sa diversité. Je retiendrai également la mesure tendant à conforter l’échelon départemental et à affirmer le rôle du sous-préfet, ainsi que la mesure visant à favoriser l’existence d’un interlocuteur unique.
J’insisterai aussi tout particulièrement sur la proposition d’éviter les fermetures simultanées de plusieurs services au sein d’une même collectivité locale. Enfin, je trouve intéressantes la proposition de généraliser les maisons de services au public et celle de renforcer le contrôle de légalité et l’ingénierie territoriale, deux missions très protectrices pour les élus. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Pierre-Yves Collombat applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Jean-François Husson.
M. Jean-François Husson. Monsieur le président, monsieur le ministre, madame, monsieur les rapporteurs, mes chers collègues, la France, à la fois État déconcentré et République décentralisée, a été bousculée par plusieurs réformes territoriales au cours de ces dernières années, donnant le sentiment aux collectivités territoriales d’être la variable d’ajustement d’une vision politique mal définie et peu lisible.
C’est pourquoi je tiens à saluer la nouvelle initiative de nos collègues Marie-Françoise Perol-Dumont et Éric Doligé, menée au nom de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation. Nos rapporteurs ont donné la parole aux personnes les plus concernées par les réformes, à savoir les élus locaux eux-mêmes et les représentants de l’État. Je me réjouis d’ailleurs que 60 % des presque 5 000 contributions récoltées proviennent de maires. Leur réponse massive est la manifestation de leur besoin de reconnaissance et de leur implication.
Ce rapport vient nous rappeler le lien indissociable qui existe entre décentralisation et déconcentration, cette dernière étant trop souvent oubliée.
Les propositions émanant des consultations qui ont été conduites me semblent parfaitement résumer les attentes des élus que chacun de nous rencontre au quotidien : il faut parvenir à définir une accessibilité des services au public après une concertation étroite entre les services de l’État et ceux des collectivités territoriales.
L’État doit être garant et à la hauteur de ses missions régaliennes. Il doit veiller à la cohérence des moyens mis à la disposition des collectivités locales pour leur permettre d’exercer leurs compétences d’origine ou celles qui leur ont été transférées. Bref, les collectivités territoriales ont besoin d’avoir un cadre d’action clair, qui – et cela n’est pas anecdotique ! – leur offre une sécurité juridique pour les actes qu’elles rendent.
Si l’on tire les conclusions du chamboulement territorial récent, on s’aperçoit que l’État a privilégié la seule loi du nombre pour définir la taille des intercommunalités, entraînant la constitution de périmètres toujours plus grands et plus larges, et cédant la place à une certaine forme d’« obésité territoriale ». Il me semble utile de rappeler que ces réformes, qui ont été conduites au fil de l’eau et sans grande cohérence, laissent aujourd’hui certaines collectivités territoriales totalement dépourvues et déstabilisées, ce qui porte préjudice tant aux collectivités concernées qu’aux élus et à la population.
En effet, l’État territorial se désengage d’un certain nombre de compétences et de missions au profit des collectivités locales, mais ne les retire pas pour autant à ses administrations déconcentrées. Dans le même temps, il n’accorde pas auxdites collectivités les moyens de leurs nouvelles compétences. Dès lors, un sentiment de méfiance s’instaure entre l’État et ces territoires, alors même que nous aurions besoin de fluidité, de partenariat, de coconstruction confiante de l’action publique.
La confiance, élément essentiel du pacte républicain en ce qu’elle permet d’instaurer des rapports apaisés, ne peut se concevoir sans équilibre et sans justice. Si l’État doit veiller à garantir cet équilibre territorial, il ne peut pas le faire en s’appuyant sur la seule décentralisation, tant nos territoires sont tous différents les uns des autres. Il ne peut l’atteindre que grâce à l’administration déconcentrée, en assurant l’égalité d’accès à ses services.
Au-delà de l’accès aux services publics, objectif figurant dans plusieurs des propositions du rapport, l’État déconcentré doit également porter une attention particulière et vigilante à l’accès aux services privés. Leur disparition sur certains territoires mérite une attention prioritaire pour bien agir : services postaux, professionnels de santé, services bancaires, sans parler de l’accès à la couverture en matière de téléphonie mobile et numérique.
Les parlementaires que nous sommes ont également un rôle à jouer à la veille de l’application de la loi sur le non-cumul des mandats. Si nous sommes naturellement des acteurs de la décentralisation auprès des élus et des collectivités locales, notre rôle dans la déconcentration est beaucoup moins évident. Pourtant, nous pourrions apporter un éclairage essentiel aux représentants de l’État sur nos territoires. Aujourd’hui, nous votons les dispositions législatives en n’ayant que trop rarement l’occasion de participer et d’en apprécier la mise en œuvre.
Aussi, pourrions-nous coconstruire davantage l’action publique territorialisée en coopération avec les acteurs déconcentrés ou non de l’État. Cela pourrait notamment se concrétiser dans le cadre de l’affectation de certaines dotations. Cette proposition permettrait de garantir l’équilibre que j’évoquais tout à l’heure, d’assurer leur liberté aux collectivités, de les accompagner dans leurs projets de développement, tout en veillant à ne pas créer de fractures entre elles, ou en les limitant, du moins, tant dans leur nombre que dans leur portée. Beau défi qu’il nous appartiendra de relever dès que possible ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme, M. les rapporteurs ainsi que MM. Jean-Marc Gabouty, René Vandierendonck et Pierre-Yves Collombat applaudissent également.)
M. le président. La parole est à M. Dominique de Legge.
M. Dominique de Legge. Monsieur le président, monsieur le ministre, madame, monsieur les rapporteurs, mes chers collègues, je tiens tout d’abord à saluer ce rapport, dans lequel je me retrouve totalement. Je le regrette, ai-je envie d’ajouter, car je m’aperçois que depuis 2011, et le rapport que j’avais établi sur la révision générale des politiques publiques – la RGPP –, la situation n’a guère évolué et les conclusions restent sensiblement les mêmes.
Je voudrais très rapidement relever trois points.
Premier point : l’état d’esprit qui doit présider dans la relation entre les collectivités territoriales et l’État.
Les grandes réformes de décentralisation des années 1980, sur lesquelles il n’est pas question de revenir, ont tout de même profondément modifié cet état d’esprit. Le passage d’un contrôle a priori à un contrôle a posteriori me laisse le sentiment d’une volonté de contrôle, plutôt que d’accompagnement des projets.
Il serait heureux de faire évoluer cette mentalité, car, comme cela est dit à plusieurs reprises dans le rapport, l’État doit avant tout accompagner les collectivités territoriales.
Deuxième point : la parole unique de l’État.
Monsieur le ministre, vous nommez les préfets, qui, officiellement, dépendent du ministère de l’intérieur. Or je constate que, de plus en plus, des services échappent à leur autorité : l’éducation nationale, les finances publiques, aujourd'hui la santé. Que dire des DREAL ? Et c’est sans compter, comme cela a été souligné, l’existence de nombreuses agences, qui illustre parfaitement le démantèlement des services de l’État.
On finit par se demander qui est le patron. À qui faut-il s’adresser ? Le préfet est-il vraiment celui qui porte la parole de l’État ?
Le préfet n’a même pas autorité dans l’organisation de ses propres services. Par exemple, s’il disposait d’une certaine latitude en matière de personnel dans un service donné, il ne pourrait déplacer un agent de ce service vers un autre. Nous en sommes encore à une gestion en silo, avec des agents appartenant à la fonction publique d’État et dépendant de différents ministères.
Il faut avancer sur cette question de la restauration de l’autorité du préfet, de sorte que l’État dispose d’une parole unique et que les équipes puissent être organisées au plus près des besoins.
Troisième point : la proximité et l’efficacité.
Je m’appuierai sur un cas concret, rencontré la semaine dernière dans ma commune.
Étant un élu respectueux de la loi, j’ai lancé un processus de modification du plan local d'urbanisme – ou PLU –, afin de le mettre en conformité. Le préfet m’ayant alerté, par courrier, sur le fait que je n’avais pas saisi l’État, je lui ai apporté la preuve que je l’avais bien fait, ayant déjà écrit à M. le sous-préfet.
Mais voici ce que ce dernier m’a répondu, après avoir pris acte de ma saisine : « Pour information, il est néanmoins préférable de saisir directement la préfecture. Aussi lorsque la modification du PLU sera approuvée, je vous invite à transmettre l’ensemble du dossier complet, ainsi que la délibération d’approbation à la préfecture du département. Une copie du dossier peut être, si vous le souhaitez, transmise pour information au sous-préfet ».
À qui doit-on véritablement s’adresser ? Tantôt, c’est à la sous-préfecture, tantôt à la préfecture, tantôt aux directions !
Nous n’avons plus une idée très claire de notre interlocuteur, et il faudrait, de ce point de vue, que la situation évolue.
Pour conclure, il ne peut pas y avoir deux actions publiques : une de l’État et une des collectivités territoriales. Toutes deux ont vocation à se rencontrer, car, à un moment donné, elles sont au service d’une même population. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – MM. Jean-Marc Gabouty, Pierre-Yves Collombat, René Vandierendonck et Georges Labazée applaudissent également.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Bruno Le Roux, ministre de l'intérieur. Monsieur le président, madame, monsieur les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, l’angle d’approche qui a été retenu pour ce rapport d’information me semble particulièrement intéressant. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains et de l'UDI-UC.)
Il me semble que ce qui est un réflexe acquis chez les sénatrices et les sénateurs l’est aussi dorénavant pour le Gouvernement.
Mme Françoise Gatel. Très bien !
M. Gérard Bailly. Il est temps !
M. Bruno Le Roux, ministre. Ce réflexe, de bonne administration, qui consiste à s’interroger sur les conséquences de ses choix politiques sur les collectivités territoriales a d’ailleurs été formalisé. Je pense concrètement – il ne s’agit pas pour moi d’en rester à de simples phrases – au Conseil national de l’évaluation des normes, le CNEN, et aux études d’impact des projets de loi.
Pour le ministère de l’intérieur, c’est plus qu’un réflexe ! Rien de plus normal, pour nous, que de considérer l’administration territoriale de la République dans son ensemble et de peser chaque décision au double trébuchet de la déconcentration et de la décentralisation, sans antagonisme.
C’est d’ailleurs le seul regret que le ministre de l’intérieur que je suis peut formuler à la lecture de votre rapport, madame Marie-Françoise Perol-Dumont et monsieur Éric Doligé. Vous avez retenu une présentation plus duale qu’elle ne l’est en réalité, et cette présentation ne résiste ni aux remontées des collectivités ni même aux propositions que vous formulez.
Je note donc la qualité de ce rapport, dont je partage volontiers une grande partie des conclusions.
Toutefois, je commencerais par rappeler une évidence – le contenu du rapport ne me laisse pas d’autre choix : on ne peut naturellement pas demander au gouvernement actuel d’endosser des décisions autres que celles qui ont été prises par lui-même ou par son administration !
Oui, la révision générale des politiques publiques de 2007, comme cela a été dit voilà quelques instants, a laissé de profondes cicatrices sur nos territoires, en sabrant dans les effectifs sans logique d’ensemble, sur le seul fondement d’une recherche d’économies. Oui, la réforme de l’État de 2008 aurait pu donner lieu à une plus grande concertation avec les élus. Oui, la succession de réformes, menées rapidement et emboîtées les unes dans les autres sans vision globale, nuit à la cohérence de l’action publique.
Mais ce n’est pas là le bilan du Gouvernement !
Je souhaite donc ramener ce débat, y compris dans l’hypothèse d’un futur rapport que vous ne manquerez pas de faire dans les prochaines années, mesdames, messieurs les sénateurs, à ce que le Gouvernement a réalisé depuis 2013 et, précisément, depuis le comité interministériel pour la modernisation de l’action publique de juillet 2013.
D’abord, le Gouvernement s’est engagé dans la stabilisation des organisations existantes pour donner la priorité à l’amélioration du fonctionnement de l’administration déconcentrée au bénéfice d’un meilleur service public.
C’est bien cet objectif que visait initialement le mouvement de modernisation de l’action publique, et c’est cet objectif qui, je le pense, a été atteint, dans une concertation renouvelée avec les collectivités locales. Au fil d’une démarche participative, la modernisation de l’action publique, ou MAP, dès 2013, puis les chantiers de l’administration territoriale en 2014 et 2015 ont dessiné – redessiné, devrais-je dire – les lignes de force d’un État territorial plus cohérent, mieux armé et plus proche de nos concitoyens. (M. Jean-François Husson s’exclame.)
Depuis près de cinq ans, l’État territorial s’est sans conteste donné les moyens d’une plus grande cohérence.
C’est le cas lorsque l’on donne au préfet de région les leviers pour véritablement gérer les moyens budgétaires sur son territoire, en le désignant responsable des budgets opérationnels de programme.
C’est aussi le cas lorsque l’on réaffirme le rôle du préfet dans la conduite et la coordination des politiques publiques, y compris de celles qui sont entre les mains d’établissements publics. Je vous renvoie sur ce point au décret du 7 mai 2015 portant charte de la déconcentration, aux efforts de rationalisation qui ont été consentis à l’égard des opérateurs ou encore, plus récemment, au plan Préfectures nouvelle génération, qui identifie ce rôle de coordination comme l’une des quatre missions prioritaires des préfectures, en prévoyant les moyens humains correspondants.
La cohérence de l’action de l’État territorial est un point essentiel : les collectivités – vous l’avez noté à plusieurs reprises – ont besoin d’un État présentant un seul visage et s’exprimant d’une seule voix. Ce visage et cette voix, à quelques exceptions près, sont incarnés par les préfets et je suis fier de redire ici, rejoignant, là encore, le jugement émanant de votre assemblée, l’excellence du travail exercé par ces hauts fonctionnaires partout sur le territoire.
Mais je veux aussi souligner que l’État territorial est aujourd'hui mieux armé.
Le Gouvernement a immédiatement fait le choix de mettre un terme à l’effondrement des effectifs départementaux, porté à son paroxysme par la RGPP, pour renforcer l’échelon départemental.
Certes, je suis prêt à le reconnaître, cela ne se vérifie pas pour un certain nombre, marginal, de politiques publiques, mais pour l’essentiel, le département est très clairement désigné comme l’échelon où sont mises en œuvre les politiques publiques de l’État. Pour employer une formule lapidaire, l’échelon départemental, c’est l’État tout entier !
C’est le niveau où sont prises les décisions concernant le quotidien des Français, le niveau des polices administratives, de l’accompagnement de leurs projets économiques ou associatifs, de leur sécurité et de la gestion des événements graves ou extraordinaires, du respect de l’État de droit et de la cohésion sociale. D’où notre souhait de continuer à renforcer cet échelon départemental.
Le passage de 22 à 13 régions a naturellement conduit à renouveler l’acuité de ce constat. Loin de remettre en cause l’échelon départemental, la réforme régionale l’a une nouvelle fois légitimé.
Cet échelon départemental, voire infradépartemental quand cela est nécessaire, doit aujourd'hui s’affirmer comme la véritable priorité d’action de l’État.
On retrouve cette même logique de renforcement dans le plan Préfectures nouvelle génération.
Nul ne peut prétendre – et je ne le ferais certainement pas devant vous, mesdames, messieurs les sénateurs – que la contrainte budgétaire épargne l’administration territoriale de l’État. L’impératif de redressement des finances publiques est fort et celle-ci doit, comme chacun, y prendre sa part. Mais il y a diverses manières de faire face à cet impératif : le ministère de l’intérieur, sous l’impulsion de mon prédécesseur, Bernard Cazeneuve, a fait le pari de s’y adapter, plutôt que de le subir.
Au nombre des missions prioritaires, figurent, je l’ai dit, la coordination territoriale des politiques publiques – l’impact est sensible pour les collectivités –, mais aussi le contrôle de légalité.
J’entends ce qui a été dit à ce sujet. Les moyens actuels peuvent sembler insuffisants, mais ce sont tout de même 136 équivalents temps plein – ou ETP – qui vont être redistribués sur le territoire pour assurer le contrôle de légalité. (Sourires sur plusieurs travées du groupe Les Républicains.) C’est déjà un « plus », même si ce n’est pas assez, et c’est en tout cas une rupture (Même mouvement.) par rapport aux politiques de suppression de postes qui étaient menées sur tout le territoire.
Je préfère les petits plus aux grands moins ! C’est tout de même préférable pour assurer un service au plus proche des collectivités ! (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Dominique de Legge. Ce n’est pas sérieux !
M. Bruno Le Roux, ministre. Autre élément, les petites préfectures voyaient leurs effectifs baisser sans discontinuité,…
M. Jean-François Husson. Ça baisse toujours !
M. Bruno Le Roux, ministre. … et la réduction était telle qu’elles finissaient par se demander si elles n’allaient pas devoir se regrouper à plusieurs pour assurer leur service. Là encore, la réforme a conduit à fixer un socle à 95 ETP, permettant de remplir toutes les missions et de garantir la présence de l’État, indépendamment de la taille des préfectures.
Je n’évoquerai pas en détail la capacité de mobilisation des personnels, au travers de déroulements de carrière plus bénéfiques pour eux, mais je pense tout de même que l’on peut voir dans toutes ces mesures – je le dis avec prudence, car les membres de cette assemblée connaissent beaucoup mieux que moi les collectivités locales – quelque chose de différent par rapport à ce qui existait par le passé.
M. François Bonhomme. Et l’ATESAT ?
M. Bruno Le Roux, ministre. Je voudrais conclure ce propos en évoquant le troisième axe fort de l’action gouvernementale : la proximité.
Ce gouvernement croit profondément aux vertus de la proximité : près de 1 000 maisons de services au public créées, 65 maisons de l’État mises en place, et presque autant en projet, des schémas départementaux d’accessibilité des services au public en cours d’élaboration partout sur le territoire, un droit d’alerte mis entre les mains des préfets de département, une directive nationale d’orientation sur l’ingénierie d’État dans les territoires et, pour finir, une modernisation d’ensemble de la carte des arrondissements à la faveur d’une réforme de la coopération intercommunale ayant permis de réduire de près de 40 %, et je pense que cela apporte une cohérence supplémentaire à l’action publique dans notre pays, le nombre d’établissements publics de coopération. Tout cela, en outre, s’est fait dans la concertation la plus riche avec les élus locaux. (Exclamations sur plusieurs travées du groupe Les Républicains.)
Ainsi, mesdames les sénatrices, messieurs les sénateurs, l’État territorial sait aujourd'hui où il va ! (Mme Françoise Gatel rit.)
Un sénateur du groupe Les Républicains. C’est déjà pas mal ! (Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Bruno Le Roux, ministre. Il sort de ces dernières années renforcé d’une régionalisation assumée, corollaire de l’instauration de collectivités régionales plus puissantes, mises en situation de rivaliser – c’est bien là l’objectif – avec leurs homologues européennes et de dynamiser le développement économique de la France.
Je ne sais pas où ira l’État territorial au cours du prochain quinquennat, mais il sort de l’actuelle mandature en présentant un nouveau visage, celui d’une articulation améliorée – j’allais dire parfaite (MM. François Bonhomme et Jean-François Husson s’exclament.), mais c’est probablement ma fonction qui me pousserait à employer ce terme – entre l’organisation des collectivités territoriales et celle des services déconcentrés de l’État.
Dans une République qui, de par notre Constitution, est unitaire tout autant qu’elle est décentralisée, c’est un signe de force.
La grande force de votre rapport, madame Perol-Dumont, monsieur Doligé, est de montrer que nous avons besoin de cette nouvelle organisation territoriale, telle qu’elle existe aujourd'hui, que celle-ci ne peut être mise en œuvre sans concertation et qu’elle exige une ambition sans cesse renouvelée. Or, de l’ambition pour les collectivités locales, il me semble qu’il en a manqué beaucoup par le passé !
Je suis donc fier de réaffirmer la volonté du Gouvernement de continuer sur le chemin qu’il a emprunté,…
M. Jean-François Husson. Un grand exercice de déni !
M. Bruno Le Roux, ministre. … si tant est qu’il lui soit accordé la possibilité de le faire dans les prochaines années. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain. – M. Jean-Claude Requier applaudit également.)
M. François Bonhomme. Amen !
M. le président. Mes chers collègues, nous en avons terminé avec le débat sur les conclusions du rapport d’information Où va l’État territorial ? Le point de vue des collectivités.
19
Ordre du jour
M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à demain, mercredi 11 janvier 2017 :
De quatorze heures trente à dix-huit heures trente :
(Ordre du jour réservé au groupe communiste républicain et citoyen)
1. Proposition de loi visant à abroger la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels, dite « loi Travail » (n° 155, 2016–2017) ;
Rapport de M. Dominique Watrin, fait au nom de la commission des affaires sociales (n° 259, 2016–2017) ;
Résultat des travaux de la commission (n° 260, 2016-2017).
2. Proposition de résolution européenne sur la reconnaissance de l’enseignement supérieur comme un investissement nécessaire à l’avenir, présentée en application de l’article 73 quinquies du règlement (n° 104, 2016-2017) ;
Rapport de Mmes Colette Mélot et Patricia Schillinger, fait au nom de la commission des affaires européennes (n° 179, 2016–2017) ;
Rapport de M. Jacques Grosperrin, fait au nom de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication (n° 258, 2016–2017).
De dix-huit heures trente à dix-neuf heures trente et de vingt et une heures à minuit :
(Ordre du jour réservé au groupe socialiste et républicain)
3. Proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale, portant adaptation des territoires littoraux au changement climatique (n° 176, 2016–2017) ;
Rapport de M. Michel Vaspart, fait au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable (n° 266, 2016–2017) ;
Texte de la commission (n° 267, 2016–2017) ;
Avis de M. Philippe Bas, fait au nom de la commission des lois (n° 246, 2016–2017).
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
(La séance est levée à vingt-trois heures cinq.)
Direction des comptes rendus
GISÈLE GODARD