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Nomination de membres d'organismes extraparlementaires
Mme la présidente. Je rappelle que la commission des affaires culturelles et la commission des affaires économiques ont proposé des candidatures pour plusieurs organismes extraparlementaires.
La présidence n'a reçu aucune opposition dans le délai d'une heure prévu par l'article 9 du règlement.
En conséquence, ces candidatures sont ratifiées et je proclame :
- MM. François Gerbaud et Daniel Reiner respectivement membre titulaire et membre suppléant du Conseil supérieur de l'aviation marchande ;
- M. Jacques Blanc membre du conseil d'administration de l'Établissement public des parcs nationaux de France ;
- MM. Bruno Retailleau, Pierre Hérisson, Louis de Broissia et David Assouline membres de la commission du dividende numérique.
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Application de l'article 65 de la convention sur la délivrance de brevets européens.
Suite de la discussion et adoption définitive d'un projet de loi
Mme la présidente. Nous reprenons la discussion du projet de loi autorisant la ratification de l'accord sur l'application de l'article 65 de la convention sur la délivrance de brevets européens.
Dans la suite de la discussion générale, la parole est à M. Christian Gaudin.
M. Christian Gaudin. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, la Haute Assemblée est appelée à se prononcer aujourd'hui sur la ratification du protocole de Londres, question en débat depuis plus de sept ans.
Je le déclare sans ambages : je suis favorable à cette ratification, pour des raisons diplomatiques, linguistiques, mais aussi économiques.
Tout d'abord, il faut rappeler que ce protocole relève d'une initiative française : c'est la France qui a souhaité engager des négociations afin d'alléger le coût du brevet européen et a organisé la conférence intergouvernementale qui a débouché sur la signature de cet accord en juin 2001.
Alors que la position française est encore fragile sur la scène européenne, même si nous sommes incontestablement de retour depuis l'intervention de M. Sarkozy sur le traité simplifié, il me semble dangereux de jouer de cette crédibilité renaissante.
Pour l'Européen convaincu que je suis, cette considération seule emporte l'adhésion, d'autant que l'application du protocole est aujourd'hui bloquée par la France.
Son application est en effet subordonnée à la ratification de la France : si nous refusons aujourd'hui cet accord, il ne sera jamais appliqué, alors que onze pays l'ont ratifié à ce jour, notamment l'Allemagne et l'Angleterre, dont la ratification est également obligatoire.
J'en viens aux enjeux linguistiques. La ratification du protocole par la France confortera le statut du français en tant que langue officielle dans le système européen des brevets. En effet, le français restera, avec l'anglais et l'allemand, l'une des trois langues officielles de l'Office européen des brevets, qui continuera de traiter sur un pied d'égalité ces trois langues officielles.
De plus, avec le protocole de Londres, les brevets européens délivrés en français pourront prendre effet au Royaume-Uni et en Allemagne sans traduction des descriptions, ce qui n'est pas possible actuellement.
Ainsi, la ratification du protocole de Londres permettra aux entreprises françaises, notamment aux PME, de faire respecter leurs brevets européens rédigés en français au Royaume-Uni et en Allemagne, qui constituent des marchés européens importants, sans avoir besoin de traduire les annexes techniques en allemand ou en anglais.
En outre, il paraît difficile de craindre un appauvrissement significatif du français comme langue technique, dès lors que l'exigence de traduction des revendications demeure.
Enfin, si nous ne ratifions pas le protocole de Londres, il y a fort à craindre que la tentation serait grande, pour les pays qui l'ont déjà ratifié, de s'accorder entre eux sur un régime plus favorable à l'anglais.
Quant aux enjeux économiques, ils ne sont pas négligeables : le protocole de Londres permettra de réduire le coût de dépôt des brevets.
Le brevet européen est en effet trop cher, comparativement aux principaux partenaires commerciaux de l'Europe. Son coût est rédhibitoire pour de nombreux chercheurs, entreprises technologiques et PME, qui renoncent à protéger leurs inventions. Les PME-PMI représentent moins du quart des dépôts de brevets effectués en France par des entreprises françaises. Le brevet coûte en effet quatre à cinq fois plus cher qu'un brevet américain et trois fois plus cher qu'un brevet japonais.
La principale raison en est qu'il faut fournir des traductions dans toutes les langues des pays où la protection est revendiquée.
Les opposants à la ratification du protocole de Londres estiment que la renonciation à la traduction en français des descriptions des brevets délivrés en anglais ou en allemand restreindrait l'accès de nos entreprises à cette source de connaissances indispensables pour qu'une économie demeure innovante et concurrentielle.
Cet argument ne me paraît toutefois pas réellement pertinent.
En effet, la veille technologique intervient le plus en amont possible. Les entreprises innovantes et les organismes de recherche de tous les pays européens doivent donc, dès à présent, maîtriser les trois langues officielles de l'Office européen des brevets, et donc le français, pour assurer une veille technologique performante.
Par ailleurs, l'Institut national de la propriété industrielle assure une traduction en français du résumé de toutes les demandes de brevets européens publiés et qui désignent la France, soit près de 40 000 en 2007. Cet abrégé en français est fourni par l'INPI dans les trois mois suivant la publication de la demande.
Les entreprises, en particulier les PME, les centres de recherche et les laboratoires français sont ainsi mis en situation d'assurer une veille technologique performante directement en français, que la demande de brevet ait été effectuée en français ou dans l'une des deux autres langues officielles.
Enfin, dans le projet de loi de finances pour 2008 est presque doublée l'enveloppe dont bénéficieront les entreprises innovantes au titre du crédit d'impôt recherche. Elles auront ainsi mieux les moyens de faire face aux coûts de protection de la propriété industrielle.
Pour conclure, j'aborderai trois thématiques qui me tiennent à coeur.
Tout d'abord, il est nécessaire de développer une culture du brevet en France, à l'image de ce qui se pratique en Allemagne ou aux États-Unis.
À ce titre, je me réjouis des annonces de Mme la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche sur la mise en place d'une formation de nos jeunes ingénieurs et de nos jeunes doctorants au dépôt de brevet.
En effet, jamais le dépôt de brevet n'a joué un rôle aussi stratégique dans la compétition économique internationale. En la matière, nous sommes en retard sur les États-Unis, où les brevets sont considérés moins comme des outils de recherche que comme des actifs de l'entreprise.
Notre pays est en déclin dans le paysage européen des brevets. Selon l'INPI, la France représente 18 % des dépenses de recherche et développement en Europe, mais 15 % seulement des dépôts de brevets, contre plus de 42 % pour l'Allemagne. Il est donc indispensable de développer rapidement et de façon systématique l'enseignement du droit de la propriété intellectuelle en France.
Il nous faut organiser et accompagner la dynamique de la propriété industrielle. La démarche de l'entrepreneur vers une culture du brevet favorise une attitude défensive contre les risques de la contrefaçon mais surtout l'entraîne dans un mouvement d'innovation et de création.
Le rôle entrepris par l'INPI, notamment auprès des plus petites de nos entreprises, doit être développé. Sa mission de proximité dans la veille et le prédiagnostic porte déjà ses fruits.
Ensuite, il convient de soutenir la recherche, car c'est une véritable priorité pour faire de notre économie une économie de la connaissance. L'attribution aujourd'hui même du prix Nobel de physique au chercheur Français Albert Fert, une première depuis dix ans, est une preuve éclatante de la vitalité de la recherche française.
M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles. C'est vrai !
M. Christian Gaudin. Il est donc nécessaire d'encourager la recherche fondamentale, dont le prolongement naturel est l'innovation, puis la conception de nouveaux produits et, donc, la croissance.
Enfin, il faut profiter de l'occasion qui nous est offerte par cette ratification pour reprendre les négociations sur le brevet communautaire, en levant le blocage actuel sur les questions linguistiques et en s'appuyant notamment sur les trois langues officielles de l'Office européen des brevets.
Je souhaite que la France, lorsqu'elle présidera l'Union européenne au second semestre 2008, relance vigoureusement une telle initiative.
C'est pourquoi, monsieur le secrétaire d'État, au nom du groupe de l'Union centriste-UDF, je soutiens sans plus attendre la ratification du protocole de Londres. (Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP.)
Mme la présidente. La parole est à M. Jean Bizet.
M. Jean Bizet. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, nous allons discuter - enfin, oserais-je dire ! - du projet de loi autorisant la ratification du protocole de Londres. Il s'agit de modifier le régime linguistique du brevet européen, afin d'en simplifier la délivrance et d'inciter ainsi nos entreprises à déposer davantage de brevets. Pour notre pays et pour l'Europe, les enjeux en matière de développement de la recherche, d'innovation et d'accroissement de la compétitivité sont considérables.
Vous l'aurez deviné, nous sommes là au coeur de la stratégie de Lisbonne. Je me réjouis des propos que vous avez tenus tout à l'heure, monsieur le secrétaire d'État, car il importe en effet, dans la perspective de la future présidence française de l'Union européenne, que notre pays donne une nouvelle impulsion à ce processus capital pour l'évolution de la technologie sur notre territoire.
Cet accord constitue également un enjeu important en matière de culture et de francophonie, puisqu'il confortera le statut international du français, celui-ci devenant la langue de l'innovation, comme l'a très clairement précisé Mme la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche au début du débat.
Or, à ce jour et malgré l'importance de tous ces enjeux, ce texte, signé par la France en juin 2001, n'a toujours pas été ratifié par le Parlement français, alors même qu'il est le résultat d'une initiative française, laquelle a pour origine la tenue à Paris, en juin 1999, d'une conférence intergouvernementale des États membres de l'Organisation européenne des brevets. C'est paradoxalement dans notre pays que des prises de position très tranchées ont été exprimées, que les plus grandes réticences se sont fait jour et que les plus grandes batailles d'arguments linguistiques, juridiques, économiques ou scientifiques ont été menées sur les conséquences d'une telle ratification.
Au cours de ces dernières années, afin de mieux analyser les risques et les opportunités de cet accord et d'évaluer la portée des différents arguments, des débats et des travaux ont été menés, notamment au sein de la Haute Assemblée et, plus particulièrement, de sa délégation pour l'Union européenne. À chaque fois, la conclusion était la même : le protocole de Londres doit être ratifié et entrer, enfin, en vigueur.
Il semble que ce lourd et long préalable, sans épuiser la question, a eu l'avantage d'éclairer la représentation nationale et le Gouvernement sur le sujet, puisque nous sommes enfin saisis d'un projet de loi de ratification.
Sans revenir en détail sur l'accord de Londres, remarquablement présenté par M. le rapporteur et par MM. les rapporteurs pour avis, je souhaite, au nom du groupe UMP, préciser quelques points qui me paraissent importants.
À ce jour, treize États membres de l'Organisation européenne des brevets sont parties à l'accord, et neuf d'entre eux ont achevé leur procédure d'adhésion ou de ratification. Or, l'article 6 du protocole soumet son entrée en vigueur à la ratification par au moins huit États membres, dont les trois pays dans lesquels le plus grand nombre de brevets européens a pris effet en 1999, à savoir l'Allemagne, le Royaume-Uni et la France. En conséquence, notre pays dispose d'un pouvoir de blocage et l'entrée en vigueur du protocole de Londres est actuellement suspendue à sa ratification par la France.
Je le rappelle, l'accord vise à amender l'article 65 de la convention sur la délivrance de brevets européens, signée en 1973. Il permet d'éviter, dans une très large mesure, la traduction de la « description », c'est-à-dire la partie technique du brevet, qui représente en moyenne dix-sept pages sur un total de vingt. C'est déjà le choix qu'avaient fait les États membres de l'Union européenne dans le cadre des négociations sur le brevet communautaire.
En revanche, la partie juridique du brevet, les fameuses « revendications », qui définit la portée du monopole d'exploitation, doit toujours être traduite en français, ainsi qu'en anglais et en allemand. Il s'agit d'une obligation découlant de l'article 14 de la convention de 1973, qui, précisément, reste inchangé.
Autrement dit, la partie essentielle du brevet, qui est aussi la seule à être entièrement rédigée, sera toujours systématiquement disponible en français. Il n'y a aucun doute à avoir sur ce point. Le français, avec l'allemand et l'anglais, devient ainsi l'une des trois seules langues dans lesquelles les innovations seront désormais revendiquées en Europe.
M. Jean Bizet. Je le souligne dès à présent, il n'est donc pas exact de prétendre que le protocole de Londres signe la mort de la langue française. C'est même tout le contraire, dans la mesure où il en fait l'une des trois langues de l'innovation en Europe.
M. Jean Bizet. Ensuite, il convient de préciser les points qui, à notre avis, rendent nécessaire la ratification du protocole de Londres.
Premier point, cet accord consacre le français, à parité avec l'allemand et l'anglais, comme l'une des trois langues officielles de l'Office européen des brevets, qui réunit aujourd'hui trente-deux États et examine plus de 200 000 demandes par an. Le statut de la langue française y est très envié par nos partenaires, notamment espagnols et italiens, lesquels contestent ce fonctionnement uniquement trilingue de l'Europe des brevets.
Il y a là un enjeu essentiel pour le statut scientifique du français, car, concrètement, cela signifie que le dépôt de brevets en langue française suffit à conférer un titre de propriété sur la majeure partie du marché européen. C'est pourquoi il est vital, pour l'avenir de la francophonie, que cet accord soit ratifié, et vite. D'ailleurs, il est frappant de constater que nos amis francophones d'Afrique subsaharienne et du Maghreb plaident majoritairement pour la ratification (M. Jacques Legendre est dubitatif), car eux-mêmes souhaitent pouvoir bénéficier de la protection de brevets déposés en langue française.
M. Jean Bizet. Le deuxième point porte sur la place de nos chercheurs et de nos entreprises sur le marché européen des brevets. Hélas ! le constat actuel est peu satisfaisant, puisque les statistiques indiquent que la langue de dépôt est l'anglais dans 70 % des cas, l'allemand dans 25 % des cas et le français dans à peine 5 % des cas. Protocole de Londres ou pas, cela fait bien longtemps que nos entreprises et nos chercheurs sont obligés de suivre les dépôts de brevets en anglais et en allemand. Prétendre le contraire relève tout simplement d'une méconnaissance inquiétante des réalités scientifiques et économiques de notre pays.
Il faut donc tout faire pour accroître la proportion des brevets déposés en langue française. L'un des freins majeurs concerne le coût du dépôt d'un brevet pour les petites et moyennes entreprises. La simplification du brevet européen, en diminuant le nombre de traductions obligatoires, réduira les coûts de 30 % à 40 %, ce qui constituera un stimulant puissant pour l'innovation et la recherche. Il y a d'ailleurs à ce sujet un très large consensus dans la communauté scientifique et chez les acteurs économiques. Les premiers bénéficiaires en seront les petites entreprises, puisque le simple fait de déposer un brevet en langue française leur garantira la protection de leurs inventions sur le marché européen.
Le troisième point est d'ordre juridique : il n'existe aucune ambiguïté sur la conformité du protocole de Londres à notre Constitution, depuis la décision rendue en ce sens par le Conseil constitutionnel le 28 septembre 2006. Pour tous les brevets déposés en Europe, la partie dénommée « revendications », qui définit le champ de la propriété industrielle, sera obligatoirement traduite en français, ce qui garantit la possibilité pour nos entreprises de se tenir au courant des innovations de leurs concurrents. En cas de litige, la traduction de l'intégralité du brevet restera obligatoire devant le juge français.
Par ailleurs, la simplification du brevet européen ne constitue à nos yeux qu'une première étape. L'entrée en vigueur du protocole de Londres doit s'inscrire dans le cadre d'une politique ambitieuse de soutien à la recherche et à l'innovation, dans le prolongement des mesures déjà prises, telles que le crédit d'impôt recherche ou la gratuité du premier brevet. Il est plus que jamais indispensable de développer en France une culture de la propriété industrielle, car nos entreprises investissent moins que leurs concurrentes étrangères en matière de recherche et développement, comme l'a clairement rappelé Mme Pécresse tout à l'heure. Ne l'oublions jamais, le dépôt et l'exploitation d'un brevet par une PME se traduisent, dans les cinq ans, par une augmentation très forte du chiffre d'affaires et par la création de nombreux emplois.
Enfin, dernier point sur lequel je souhaite insister, le brevet communautaire, comme M. le rapporteur l'a rappelé, est une question essentielle. À nos yeux, en effet, la ratification par la France de l'accord de Londres ne doit pas entraîner le blocage durable, voire l'abandon du brevet communautaire, ces deux types de brevets étant complémentaires.
Nos partenaires ayant eu satisfaction sur le brevet européen, il est aisé d'imaginer qu'ils ne soient plus guère incités à accepter des compromis sur le dossier du brevet communautaire. Dès lors, si nous préconisons la ratification de l'accord de Londres, nous estimons qu'elle doit avoir comme corollaire complémentaire et inséparable le déblocage du brevet communautaire. Sur ce point précis, monsieur le secrétaire d'État, nous comptons énormément sur votre action.
Il ne faut en aucun cas opposer brevet européen et brevet communautaire. Je le répète, ils sont en réalité complémentaires, dans la mesure où ils répondent à des besoins différents. Certaines entreprises ont besoin d'une protection couvrant l'ensemble du territoire de l'Union européenne : elles choisiront alors en priorité le brevet communautaire, qui constitue un instrument unitaire garantissant une protection identique dans l'ensemble de l'Union. D'autres n'ont besoin de se protéger que dans quelques États seulement : elles choisiront alors le brevet européen, qui permet de ne désigner qu'un nombre réduit d'États.
En tout état de cause, il convient d'organiser la coexistence des deux systèmes de brevets en Europe. À cette fin, nous demandons au Gouvernement, à l'appui des arguments qui ont été développés, notamment par M. Haenel, de trouver la manière la plus efficace de relancer le brevet communautaire, afin d'imbriquer les deux systèmes. Un compromis est possible et, selon nous, souhaitable, la France étant en position de force avec la présente ratification.
Vous l'avez compris, mes chers collègues, le groupe UMP, dans sa très grande majorité, votera avec enthousiasme en faveur du projet de loi autorisant la ratification du protocole de Londres, tout en soulignant l'importance des recommandations que je viens de présenter concernant le brevet communautaire. Cela permettra à la France, comme l'a si bien souligné Mme la ministre tout à l'heure, de continuer à faire entendre sa voix, c'est-à-dire la voix de ses chercheurs et de ses entreprises. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)
M. Hubert Haenel, rapporteur. Bravo !
Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Legendre.
M. Jacques Legendre. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, il en fallait, enfin, un !
M. Hubert Haenel, rapporteur. Et ce fut celui-là ! (Sourires.)
M. Jacques Legendre. Jusqu'à présent, nous avons entendu trois membres du Gouvernement puis cinq de nos collègues souligner, avec enthousiasme, la nécessité d'accepter l'accord sur l'application de l'article 65 de la convention sur la délivrance de brevets européens, dit « protocole de Londres ». Alors qu'il était dit que cette question faisait débat, nous n'entendons qu'un seul camp s'exprimer. Voilà qui est étrange !
M. Ivan Renar. Il n'y a qu'un seul son de cloche !
M. Jacques Legendre. Je vais donc m'efforcer de corriger un tant soit peu cette impression, en étant celui qui n'est toujours pas d'accord, même si, je dois l'avouer, j'ai fait du chemin pour en arriver là.
Puisque Mme la ministre a déclaré vouloir s'exprimer avec franchise, je ferai de même. Au départ, en effet, j'ai plutôt vu d'un bon oeil ce projet : qui peut donc s'opposer à l'idée de favoriser le dépôt de brevets par les entreprises françaises ? Nous sommes tous désireux de voir nos entreprises faire preuve d'innovation et de dynamisme, tout en assurant leur protection non seulement sur notre territoire, mais également dans les autres pays européens.
Chacun connaît mon engagement dans le domaine de la francophonie. Toutefois, je n'ai jamais pensé que celui-ci devait se concrétiser par le fait d'imposer la traduction en français ou l'utilisation de notre langue dans des situations où cela ne correspond à rien. C'est une simple question de bon sens !
J'ai donc examiné attentivement le projet qui nous était proposé, lequel est un peu compliqué pour qui n'est pas de la partie - il y est notamment question de préconisations et de revendications. Je ne m'étendrai pas trop sur la question, d'autant que, fait assez étrange, ceux qui ont pris la parole depuis le début de notre débat ont présenté les arguments en faveur du projet de loi, mais ont voulu aussi, notamment M. le rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles dans son excellente intervention, faire entendre la parole de ceux qui étaient réputés se poser des questions ou s'opposer au texte. (M. Ivan Renar s'exclame.) Cela m'évite donc une partie du travail.
J'ai le sentiment qu'il n'y a pas lieu de marquer autant d'enthousiasme qu'on a bien voulu le dire.
Certaines entreprises, surtout les grandes, trouveront un avantage à la nouvelle situation. Pour d'autres, le bilan sera plus nuancé. Mais lorsqu'on réfléchit en termes d'intelligence économique et que l'on évalue ce qui risque de se passer ailleurs, je ne suis pas certain que nous ayons fait de grands progrès dans ce domaine.
N'oublions pas que la principale puissance économique qui invente, dépose des brevets, et qui souhaite ensuite breveter ses inventions dans notre pays, se trouve à l'extérieur de l'Europe. Le problème, qui n'est pas totalement traité dans notre débat d'aujourd'hui, consiste donc à protéger notre territoire ainsi que les autres pays européens du dépôt en grappes de toute une série de brevets, essentiellement par les États-Unis, voire par le Japon.
Sans vouloir m'étendre sur ce sujet, je veux bien admettre que certains arguments économiques plaident en faveur de l'adoption du protocole de Londres. Bien évidemment, il ne m'est jamais venu à l'esprit que ceux qui le préconisent voulaient desservir les intérêts de leur pays. Mais le problème doit être quelque peu nuancé.
Par ailleurs, je ne suis pas persuadé que l'adoption du brevet européen fera avancer le brevet communautaire.
Avec le brevet européen, il me semble que nos partenaires ont obtenu l'essentiel de ce qu'ils souhaitaient. J'ai l'impression, en revanche, que le brevet communautaire, qui représente la bonne solution et sur lequel on travaille depuis trente ans, risque de s'arrêter en route, une grande part du chemin ayant été faite dans le sens souhaité par nos partenaires. J'espère me tromper !
D'ailleurs, un de nos anciens collègues, Maurice Ulrich, qui est également, même si on le sait moins, le spécialiste du brevet communautaire, dont il a suivi les négociations pendant de nombreuses années, partageait cette impression. S'interrogeant sur la question qui nous occupe aujourd'hui, il écrivait au rapporteur du texte à l'Assemblée nationale : « la traduction est évaluée à 4 000 ou 5 000 euros sur un total de 20 000 euros pour l'obtention d'un brevet. À qui fera-t-on croire que ce coût est tel qu'il décourage nos chercheurs et nos entreprises, qu'il est responsable de nos carences en ce qui concerne le dépôt de brevet ? On comprend la volonté du Gouvernement d'aider les PME innovantes, mais cela ne pourrait-il pas se faire sans risque pour notre langue en déclarant éligible à la prime de recherche les dépenses d'obtention du brevet ? ». Ce jugement vaut ce qu'il vaut !
J'en viens à la deuxième partie de la question, sur laquelle je suis plus à même de défendre une opinion forte, et qui concerne les conséquences pour notre langue d'un tel accord.
Soyons clair : pas plus que d'autres, je n'éprouve de plaisir à lire des revendications de brevets. Il est évident que la langue française ne saurait se réduire à ce type d'usage. Mais ce qui fait la modernité de l'usage de la langue française, c'est ce qui lui garantit un avenir au xxie siècle.
Quelle est la raison de l'angoisse et de la passion exprimées par un certain nombre d'entre nous ? Il ne s'agit pas de livrer une bataille, autour du brevet, au nom de tel lobby contre tel autre. Nous disons simplement que lorsqu'une langue, qui a bénéficié pendant longtemps d'un rayonnement international, cesse d'être la langue qui prévaut dans les domaines de la science et de l'économie, elle cessera progressivement d'être la langue usuelle - et c'est déjà le cas - dans les domaines des brevets, des transports, bref dans nombre des activités qui représentent la modernité et le xxie siècle.
Si nous ne prenons pas garde à l'évolution en cours, le français, comme de nombreuses autres langues, risque de se réduire à une forme de provincialisme, se bornant à être la langue que l'on parle dans l'intimité familiale et, je n'en doute pas, la langue du coeur. Il cessera, en revanche, d'être une langue internationale.
Je vais prendre un exemple, presque caricatural, afin d'illustrer mon propos.
Voilà quelques mois, je m'étais réjoui de la création de l'École d'économie de Paris, que je considérais comme une excellente initiative. Vous voyez que je peux faire preuve d'ouverture d'esprit ! J'avais cependant été quelque peu alerté par le fait que cette école se fasse également appeler Paris School of Economics. J'avais alors demandé à M. le secrétaire d'État chargé de la coopération et de la francophonie quelle action il envisageait pour éviter qu'une telle école, ayant vocation à enseigner une discipline aussi importante, et dont le nom, qui plus est, contient le mot « Paris », ne soit bientôt connue que sous la traduction anglaise de son nom. Sa réponse fut la suivante : « La discipline, même si l'on peut le déplorer, est très largement dominée par l'anglais, langue véhiculaire, désormais incontestée dans le domaine des sciences économiques. »
Il m'avait également été assuré qu'on allait essayer de contrebalancer l'hégémonie anglo-saxonne en dispensant des formations et en organisant des séminaires où l'approche française serait très largement mise en avant. Il fallait comprendre par là que cette approche serait mise en avant en anglais !
Croyez-vous que ce soit la manifestation d'une langue particulièrement vivante, que l'on va continuer à parler et à apprendre à l'extérieur de notre pays ?
J'ai été quelque peu étonné, tout à l'heure, lorsqu'un des orateurs a évoqué la position, sur le sujet, de nos amis d'Afrique subsaharienne.
Pour ma part, j'ai reçu un choc, cet été, à l'occasion de l'Assemblée parlementaire de la francophonie, dont les travaux se déroulaient au coeur de l'Afrique, lorsqu'un haut personnage d'un pays d'Afrique francophone m'a dit, dans le meilleur français qui soit : « Vous savez, monsieur, j'ai été formé à Paris. Nous sommes heureux de vous recevoir, mais ne vous faites pas d'illusion : dans vingt ans, ce n'est plus le français que l'on enseignera chez nous, mais l'anglais. »
Quelle est la cause de cette évolution ? La raison en est simple. Il y a cinquante ans, ces pays ont fait le choix de notre langue afin d'accéder à la modernité. Or si notre langue ne permet plus d'accéder à la modernité dans son entier, nous cesserons d'attirer ces pays, qui feront l'économie du français et passeront directement à l'anglais. Ce jour-là, mes chers collègues, nous aurons beaucoup perdu !
Je saisis l'occasion de ce débat pour évoquer un autre point.
Je suis quelque peu irrité, je l'avoue, lorsque j'entends certains dire que c'est un grand jour pour la francophonie. Certes, nous éprouvons une satisfaction de façade, car le français est consacré en tant que langue officielle de l'Office européen des brevets, au même titre que l'anglais et l'allemand. Mais cette égalité est très inégale, la plus grande part linguistique étant tenue par l'anglais, une part moindre par l'allemand, le français ne représentant qu'un « zeste » dans cet ensemble. Il n'y a pas lieu de chanter cocorico.
Mais le danger qui m'inquiète le plus, c'est que, pour la première fois, nous renonçons à notre ligne de conduite permanente, inscrite à l'article 2 de la Constitution : « La langue de la République est le français. » Même si le Conseil constitutionnel et le Conseil d'État ont considéré que cette évolution n'était en rien inconstitutionnelle, cela signifie que nous acceptons, pour la première fois, que des textes non rédigés en français puissent avoir une portée juridique sur notre sol.
Cette évolution explique aussi l'inquiétude de certains milieux professionnels qui ne sont pas fermés aux problèmes économiques, comme le Conseil national des barreaux. Les avocats savent bien, en effet, que la langue anglaise avance en liaison étroite avec la common law, tandis que la langue française est étroitement liée au droit de tradition européenne, latine et germanique. Cette concession à la langue anglaise est tout de même particulièrement inquiétante et peut clairement être analysée comme un recul par rapport à notre position constante.
En conclusion, mes chers collègues, nous devons mesurer la gravité de ce que nous faisons aujourd'hui. Le fait de ne pas entériner cet accord présenterait certes quelques désavantages et poserait des petits problèmes diplomatiques, mais le protocole de Londres contient l'acceptation d'un recul de notre langue, que nous risquons de payer.
J'ai à l'esprit cette phrase d'un grand Français, Georges Pompidou, Président de la République et modernisateur de notre pays, homme sensible aux problèmes économiques, qu'il connaissait bien, mais également homme de culture : « Si nous reculons sur notre langue, nous serons emportés purement et simplement. »
Je crains, monsieur le secrétaire, que le texte que l'on nous propose aujourd'hui de voter ne constitue un véritable recul. Pour ma part, je ne l'accepterai pas et j'invite ceux qui sont conscients de cette situation à faire en sorte que le Sénat ne s'associe pas à ce recul. (M. Jean-René Lecerf applaudit. -Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)
Mme la présidente. La parole est à M. Richard Yung.
M. Richard Yung. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, le débat sur la question que nous examinons aujourd'hui est passionné depuis de nombreuses années. C'est en effet en 1999 que Christian Pierret, alors secrétaire d'État à l'industrie, a pris l'initiative de convoquer, à Paris, la conférence intergouvernementale qui fut à l'origine du protocole de Londres.
Vous permettrez au dixième orateur, seul socialiste inscrit dans la discussion générale, d'exprimer le point de vue du groupe socialiste du Sénat. Je rappelle d'ailleurs que nous avions déjà déposé, en décembre 2006, une proposition de loi de ratification du protocole de Londres, qui, malheureusement, n'avait pas abouti.
Le point le plus marquant de ce débat concerne la place de la langue française. Des divers aspects du texte, dont je dirai un mot ultérieurement, c'est celui qui provoque, légitimement, le plus de doutes et d'hésitations.
De nombreux arguments ont été avancés. Pour ma part, j'en développerai deux, sous un angle nouveau.
Comme cela a été dit, l'accord de Londres confirme - on dit aujourd'hui : « grave dans le marbre », formulation sans doute un peu lourde - la place du français en le consacrant comme l'une des trois langues de l'Office européen des brevets, et donc du système européen des brevets. Or cette disposition n'est pas nouvelle puisqu'elle date de 1973.
Corollaire, sur lequel j'attire votre attention, le système européen des brevets - voire le système communautaire des brevets, si on élargit un peu la perspective - n'acceptera pas d'autres langues que ces trois langues officielles.
À cet égard, je pense à la revendication légitime exprimée par nos amis espagnols et portugais, qui possèdent, eux aussi, des langues internationales, et aux Italiens, dont l'industrie nationale est forte, qui demandent tous pour quelle raison ils ne font pas partie du scénario. C'est là que réside, au fond, l'une des causes fondamentales des difficultés rencontrées par le brevet communautaire.
Avec le protocole de Londres, nous répondons aux revendications émanant des pays qui veulent faire reconnaître leur langue. On peut, bien sûr, imaginer un système communautaire des brevets comprenant vingt-deux langues, ce qui supposerait que l'on dépose un brevet dans une langue, puis que l'on traduise le texte dans les vingt et une autre langues. Mais si on procède ainsi, le système est mort.
On a dit aussi que l'accord de Londres représentait un avantage pour les déposants français puisque leur brevet serait valable dans tous les autres États l'ayant ratifié. D'ailleurs, les États qui ne le ratifieront pas se poseront très rapidement des questions.
En effet, le déposant consultera la liste des États qui auront ratifié l'accord de Londres et pour lesquels une langue suffira, alors que les États qui ne l'auront pas ratifié exigeront toujours une traduction de l'intégralité du brevet dans leur langue officielle. Croyez-vous qu'un déposant fera traduire son brevet dans la langue officielle de pays comme la Lituanie ou la Grèce, sauf si le marché de ces pays présente un intérêt fort pour lui ?
Les États qui n'auront pas ratifié l'accord de Londres vont donc se trouver « en dérivation » du système européen de brevets. Ils recevront de moins en moins de demandes de dépôt de brevet, ce qui est déjà inquiétant mais, en outre, ils ne percevront plus les taxes annuelles, qui représentent la recette principale des offices de brevets. Ils y réfléchiront donc à deux fois, croyez-moi !
Pour répondre à notre collègue Legendre, je me considère aussi comme un bon Français et je suis également convaincu que nous devons défendre notre langue - tout en pratiquant les autres, d'ailleurs. Je tiens seulement à rappeler le fond du problème : les traductions de brevets sont inutiles et inutilisées.
Elles sont inutiles parce qu'elles arrivent trop tard, près de cinq ans après le dépôt de la demande : dans la plupart des domaines, cette période correspond à un cycle technologique complet. Par conséquent, l'accès au contenu technique du brevet n'apporte plus rien aux tiers qui en ont eu connaissance dès le dépôt de la demande.
Ces traductions sont également inutiles en raison de leur mauvaise qualité qui les rend inexploitables, notre collègue Jean-Léonce Dupont l'a montré. Soit la traduction n'a pas été réalisée par des professionnels, parce qu'elle est souvent sous-traitée à des doctorants ou à des étudiants rémunérés au lance-pierres - il faut le reconnaître -, soit les revendications elles-mêmes sont rédigées de manière incompréhensible par le déposant. Vous connaissez la fameuse boutade d'Alan Greenspan : « Si vous m'avez compris, c'est que je me suis mal exprimé ! » (Sourires.) Il en va de même en matière de revendication de brevet, parce que les déposants ne veulent pas que leurs concurrents puissent deviner les procédés mis en oeuvre. La traduction devient alors un exercice compliqué.
Pour toutes ces raisons, les traductions ne sont pas utilisées. Des statistiques réalisées dans la plupart des pays établissent que moins de 1 % des traductions de brevets sont consultées. Ce n'est pas défendre efficacement la langue française que d'entasser dans les sous-sols de l'INPI des tonnes de papier que personne ne lira.
C'est plutôt un faux-fuyant qui ne réglera pas le vrai problème de l'insuffisance des dépôts de brevets en France. Je citerai trois chiffres : l'Allemagne enregistre 50 000 demandes de dépôt de brevet par an, le Royaume-Uni de 25 000 à 30 000, la France 17 000, soit un tiers des demandes de dépôt de l'Allemagne. Telles sont les statistiques enregistrées depuis trente ans que le brevet européen existe.
Les obstacles que nous rencontrons tiennent à la formation, à la culture nationale et à la structure des PME - je ne développerai pas tous ces aspects. L'innovation technologique souffre d'un lourd handicap en France et je n'hésite pas à interpeller le Gouvernement sur ce point, même s'il n'est pas au coeur de notre débat : nous devons renforcer notre politique d'innovation, de recherche et développement en faveur des PME par des mesures fiscales incitatives et par une meilleure formation dans les écoles d'ingénieurs et les universités.
Il faut développer un substrat qui encourage les PME françaises à déposer plus de brevets et nous permette de passer de 17 000 à 25 000 ou 30 000 demandes de brevets par an. Le génie français n'est pas inférieur au génie allemand en matière de technologie, seule notre culture est déficiente sur ce point. Nous avons également besoin d'une politique plus volontariste en matière d'information scientifique et technique, où l'anglais est devenu prépondérant, ce qui pose un vrai problème.
La ratification de l'accord de Londres suppose évidemment des mesures d'accompagnement, cela a été souligné. J'en proposerai quatre.
En premier lieu, le ministère de l'industrie doit faire en sorte que les abrégés soient traduits et mis à disposition le plus rapidement possible - je crois que Jean-Léonce Dupont l'a également demandé. L'abrégé permet déjà une connaissance du contenu du brevet.
En deuxième lieu, les revendications doivent être traduites et publiées au moment du dépôt du brevet. La difficulté que nous rencontrons aujourd'hui tient à une traduction trop tardive des revendications, cinq ans après la publication du brevet. Les traduire et les publier dans un délai de neuf à dix-huit mois rendrait un service important aux PME en particulier, qui y auraient accès plus rapidement.
En troisième lieu, il faut répondre aux inquiétudes de la profession des traducteurs qui est touchée par l'accord de Londres, même s'il est difficile d'estimer dans quelle mesure. En effet, selon les estimations, 200 à 300 traducteurs vivraient des demandes de brevet ; ces chiffres sont sujets à caution car la profession est relativement divisée. Nous devons répondre à cette préoccupation et le groupe socialiste demande que le ministère de l'industrie organise une table ronde avec la profession sur les points que je viens d'indiquer et sur d'autres, comme le développement de la veille technologique. Accompagnons les traducteurs dans la modernisation de leur profession ! Quand le système européen des brevets est entré en vigueur, les conseils en brevet français ont exprimé la crainte d'être débordés par leurs concurrents anglais ou allemands. Cela ne s'est pas produit car les Français ont su structurer et développer une nouvelle profession de conseil en brevet de dimension européenne. C'est tout aussi jouable dans le cas des traducteurs.
En dernier lieu, nous devons demander à l'Office européen des brevets et à la Commission européenne d'accorder le libre accès aux bases de données de terminologie qu'ils construisent, au fur et à mesure des traductions de brevets, dans tous les domaines de la science et de la technique.
J'évoquerai brièvement la question du coût des traductions : pour le système européen des brevets, il s'élève approximativement à 700 millions d'euros. C'est une sorte d'impôt que l'Europe prélève sur ses entreprises innovantes car cet argent n'est pas utilisé intelligemment. Les entreprises américaines ou japonaises ne supportent pas un tel prélèvement : cela mérite réflexion.
Par ailleurs, le coût de la traduction d'un brevet moyen, selon l'expression consacrée, s'élève à 7 000 euros. Une PME innovante dépose de cinq à dix brevets par an. La traduction de dix brevets coûte en moyenne 70 000 euros, somme non négligeable. Il faut trouver un moyen d'aider ces PME innovantes qui veulent et peuvent exporter car une PME qui détient des brevets a plus de chances de remporter des succès à l'exportation.
On nous objecte que l'accord de Londres va faciliter l'invasion des brevets américains et japonais. Cette conception me semble dépassée : un meilleur accès à l'innovation technologique en France et en Europe ne peut qu'être positif car il est gage d'investissements et d'emplois futurs. Ou alors, il faudrait élever autour de l'Europe une barrière protectrice contre les technologies américaine et japonaise. Poussé à son terme, ce raisonnement devient donc intenable.
Enfin, j'évoquerai les relations entre l'accord de Londres, le brevet communautaire et les problèmes de juridiction, questions sur lesquelles beaucoup a déjà été dit.
Le brevet européen a rencontré un immense succès : on compte 200 000 dépôts de brevets par an, 6 000 à 7 000 agents travaillent à l'Office européen des brevets, dont 1 500 Français qui défendent la langue française - ne donnons pas systématiquement dans la morosité ! Ce brevet voit sa qualité mondialement reconnue et il a servi de modèle à l'harmonisation du droit des brevets, non seulement en Europe mais dans le reste du monde. Tous les pays copient le système européen des brevets.
Mais le brevet européen n'a pas évolué depuis sa création en 1973, date à laquelle les « pères fondateurs » ont rédigé la convention de Munich. Il se heurte à deux écueils : le coût du système et le problème des juridictions.
J'ai déjà évoqué la question du coût des traductions, l'accord de Londres cherche à y répondre. Le système européen des brevets génère un autre type de coût, les taxes annuelles, qui représentent plus de 1 milliard d'euros payés par l'industrie pour faire vivre les brevets pendant leur vie de vingt ans. Un débat doit être ouvert pour envisager si l'on ne peut pas réduire cette somme ou mieux l'utiliser.
Quant au problème des juridictions, le brevet communautaire y apporte une réponse, plusieurs d'entre vous l'ont dit. Mais la convention de Luxembourg de 1975, sur laquelle il repose, n'est jamais entrée en vigueur parce qu'elle bute notamment sur le problème des langues. En effet, des États comme l'Espagne, le Portugal, et d'autres, veulent que leur langue officielle soit reconnue. L'accord de Londres permet de contourner cette difficulté en posant les bases d'un système communautaire ainsi que, je l'espère, d'un système juridictionnel satisfaisant. Il jetterait en quelque sorte un pont entre le brevet européen et le brevet communautaire.
L'accord de Londres constitue peut-être même un exemple pédagogique, en ce sens qu'on pourrait imaginer un brevet communautaire conçu selon le même modèle, c'est-à-dire ouvert aux seuls États l'ayant accepté, les autres conservant le brevet européen. Il peut paraître étrange de préconiser un brevet communautaire qui ne serait pas vraiment unitaire, mais ce serait une façon d'avancer dans la bonne direction.
Aux yeux du groupe socialiste, l'accord de Londres représente donc une occasion unique, en termes d'investissements, d'emploi, de recherche et développement, domaines importants pour l'avenir de notre pays. Il répond au risque du « tout-anglais » et affirme la place du français, représentant ainsi une réelle avancée. Pour toutes ces raisons, le groupe socialiste votera le projet de loi autorisant la ratification de l'accord de Londres. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste ainsi que sur plusieurs travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)
Mme la présidente. La parole est à M. Ivan Renar.
M. Ivan Renar. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, après Mme la ministre et M. Christian Gaudin, je veux à mon tour évoquer cette façon positive de contribuer à la construction de l'Europe que constituent les travaux des deux physiciens qui viennent d'être couronnés par le prix Nobel, le Français Albert Fert et l'Allemand Peter Grünberg, dont les recherches sur la miniaturisation des disques durs ont bouleversé l'industrie de l'information.
Voilà un sujet qui peut nous rassembler...
M. Hubert Haenel, rapporteur. Cela arrive parfois !
M. Ivan Renar. ...avant que ne nous divise peut-être tout à l'heure le vote sur le projet de loi qui nous est soumis, ce qui me conduit à entrer dans le vif du sujet.
Je tiens d'abord à dire que j'ai apprécié les rapports de MM. Haenel, Dupont et Grignon : je les rejoins sur nombre d'éléments, même si je ne partage pas leurs conclusions.
Comme Mme Pécresse, M. Novelli et M. Jouyet - qui est bien seul ce soir ! -, nos rapporteurs nous vantent, en effet, les bienfaits du « protocole de Londres ». Mais, si ses bienfaits sont avérés, pourquoi avoir attendu sept ans avant de proposer leur ratification ?
Pourtant, les enjeux scientifiques, technologiques et industriels sont énormes, et les enjeux culturels, linguistiques et politiques le sont également !
Le protocole de Londres vise à alléger les obligations de traduction dans le système du brevet européen en levant l'obligation de traduire intégralement en français les brevets d'invention déposés sur notre territoire. Comment imaginer que la levée de cette obligation renforcerait le rôle et la place du français, qui, certes, resterait langue officielle du régime des brevets en Europe, mais au prix du sacrifice de son usage ?
En effet, le protocole de Londres prévoit de limiter cette traduction aux seules revendications ; rassurez-vous, chers collègues de la majorité, il s'agit non pas des revendications des syndicats, mais de la partie où le déposant délimite l'étendue de la protection qu'il demande ! (Sourires.)
Il aurait donc pour conséquence de supprimer la traduction en français de la partie descriptive des brevets européens, qui est pourtant essentielle à leur compréhension. La description est, en effet, tout aussi importante que les revendications, puisqu'elle constitue la contrepartie de l'exclusivité d'exploitation conférée par le brevet.
Le Gouvernement ne me semble pas prendre la mesure de l'importance du brevet dans la compétition économique de notre temps, dans la continuité, hélas ! d'une longue tradition française d'incompréhension à la fois des problèmes des PME et des questions relatives aux brevets d'invention.
Quant aux pays signataires du protocole dont la langue n'est ni l'allemand, ni l'anglais, ni le français, ils devront choisir l'une des trois pour les dépôts de brevet, mais, du fait de la fréquence des dépôts concomitants aux États-Unis et en Asie, l'anglais sera à l'évidence plébiscité, ce qui renforcera encore son hégémonie.
Alors que c'est la France des Lumières qui a jeté les fondements de la propriété intellectuelle, on s'apprête donc à marginaliser notre propre langue au nom de la compétitivité de l'Europe, au risque que celle-ci ne perde un peu plus son âme en s'adonnant au « tout anglais » et en renonçant au plurilinguisme qui fait sa richesse et son originalité.
Quant aux économies recherchées, elles ne seront pas même au rendez-vous, car cet accord conduira, au contraire, à un coût supplémentaire pour les PME-PMI. En effet, 93 % des brevets européens sont déposés en allemand ou en anglais et n'auront plus à être traduits en français. Par conséquent, les PME devront multiplier les traductions indispensables non seulement pour comprendre ce que font leurs concurrents, mais aussi pour se prémunir de l'insécurité juridique.
À ce dernier égard, l'enjeu que représente la traduction des brevets européens ne peut être dissocié du débat sur la transposition de la directive relative au respect des droits de propriété intellectuelle, dite directive anti-contrefaçon, qui a actuellement lieu dans le cadre du projet de loi de lutte contre la contrefaçon. Il est, en effet, manifeste qu'il faut connaître et comprendre les brevets des concurrents, donc les descriptions, pour ne pas encourir le risque d'être accusé de contrefaçon.
La situation ainsi créée va rendre la politique d'innovation plus onéreuse pour les PME, puisqu'elles devront de façon croissante traduire en français les brevets de source étrangère qui étaient jusque-là disponibles dans notre langue aux frais des déposants étrangers.
Les grands groupes n'auront pas ces difficultés, car ils ont les moyens de disposer en interne de services « brevets anglophones » et de pratiquer une veille technologique en anglais, ce qui n'est pas le cas d'un grand nombre de petites entreprises innovantes.
L'accès à une information technique complète et fiable est pourtant fondamental.
Nous avons appris par la presse que les nombreux cas de sur-irradiation survenus à l'hôpital d'Épinal étaient notamment dus au défaut de compréhension d'un logiciel anglais non traduit. La traduction n'est donc pas une question anodine puisqu'elle peut, toute proportion et raison gardées, nuire dans certains cas à la santé, voire entraîner la mort.
C'est donc une question non seulement de sécurité, mais aussi de bonnes conditions de travail, puisque la langue nationale est bien le premier outil de travail et devrait le rester !
Les seuls gagnants seront, par conséquent, les grands groupes économiques et financiers, qui déposent en masse des milliers de brevets, mais les gains qu'ils réaliseront se feront au détriment des PME-PMI qui devront traduire ces milliers de brevets à leur place et, de surcroît, chacune de leur côté. Ajoutons qu'il faudra continuer à traduire dans les langues des États n'ayant pas adhéré à l'accord !
De plus, en cas de litige, le déposant se verrait contraint de financer la traduction de la description de l'invention dans la langue de la juridiction nationale saisie.
Le texte est donc injuste et contreproductif, et la question de la traduction apparaît comme un prétexte qui ne résout en rien les problèmes de fond.
On le constate, ratifier le protocole de Londres, c'est apporter une réponse inefficace à un réel problème : les entreprises françaises ne déposent pas assez de brevets. Si l'on veut augmenter le nombre de brevets européens d'origine française, il est avant tout indispensable : premièrement, de former les petites et moyennes entreprises aux enjeux et atouts de la propriété industrielle pour la conquête des marchés ; deuxièmement, de favoriser une culture de l'action commerciale aujourd'hui insuffisante ; troisièmement, de s'engager plus résolument dans la recherche-développement.
Ainsi est-il indispensable d'investir massivement dans l'appareil de recherche publique, en renforçant significativement ses moyens humains et financiers, tout en renforçant le soutien de l'État aux entreprises et prioritairement aux PME engagées dans la recherche-développement. Répondre à la faiblesse de la recherche dans le secteur privé permettrait de remédier à l'insuffisance du nombre de brevets français.
C'est en intervenant dans ces domaines stratégiques que la part des brevets déposés en français pourra dépasser le modeste seuil actuel de 7%.
Pour autant, dans un contexte de montée en puissance de l'« économie de l'immatériel », il est également indispensable de mettre des garde-fous à cette pernicieuse tendance qui consiste à breveter la connaissance plutôt que l'innovation.
En outre, la protection de la propriété intellectuelle ne doit pas être asservie aux seuls intérêts financiers. Certes, l'argent lui-même est devenu une langue. Certains la pratiquent d'ailleurs de façon exclusive et sont incapables de comprendre les autres langues, les sacrifiant sans sourciller sur l'autel de la rentabilité à court terme.
Enfin - et, sur ce point, je rejoins totalement Jacques Legendre, car nous partageons une certaine idée de la France et de la culture - comment comprendre que notre pays, qui a ratifié la convention de l'UNESCO sur la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelle, ne soutienne pas la diversité des langues, le plurilinguisme et, par conséquent, la langue française ?
Je fais mienne la formule d'Umberto Eco : « La langue de l'Europe, c'est la traduction. »
M. Jacques Legendre. Très bien !
M. Ivan Renar. Il s'agit de défendre de façon étroite non pas la langue française, mais bien toutes les langues européennes. D'ailleurs, une vingtaine d'États européens ont refusé de signer l'accord, dont la Belgique, l'Italie, l'Espagne, la Finlande, la Grèce, le Portugal... On le constate donc, cet accord divise l'Europe au lieu de l'unir dans sa diversité.
II convient de défendre toutes les langues face à la domination de l'anglais, qui n'est pas une fatalité, mais aussi de défendre la francophonie. Les pays francophones nous observent et ils ne comprendraient pas, comme Jacques Legendre l'a bien dit, que la France ne soit pas capable de défendre le français chez elle. Eux qui ont fait le choix du français attendent de la France qu'elle se conduise en bonne mère et non pas en marâtre ! Ils ont bien noté la contradiction entre l'amour proclamé de la langue française et sa défense résolue.
Les francophones ont aussi lu Jacques Prévert, dont nous connaissons tous l'insolence et l'impertinence, valeurs de la démocratie. Rappelons-nous, mes chers collègues, cette déclaration du poète à la femme aimée, qu'il regarde apprêter un bouquet avant de le plonger dans l'eau :
« Tu dis que tu aimes les fleurs
« Et tu leur coupes la queue. [...]
« Alors quand tu me dis que tu m'aimes,
« J'ai un peu peur... » (Sourires.)
M. Jean-Léonce Dupont, rapporteur pour avis. Ça, c'est intraduisible !
M. Ivan Renar. Inutile de traduire, mon cher collègue !
Le protocole de Londres constitue une véritable menace pour la langue française, car, n'en doutons pas, le français disparaîtra des bases de données mondiales et sera éliminé de la langue scientifique de demain.
La compagnie nationale des conseils en propriété industrielle considère que la ratification de cet accord conduirait, à terme, à renoncer à la réflexion en français dans les sciences et les techniques. On ne répétera jamais assez que la diversité est une richesse et que l'avenir est à la diversité. Je ne suis pas pour le français über alles excluant les autres langues, mais, face à l'hégémonie du « tout anglais » et au danger de l'uniformisation, il est indispensable de défendre le pluralisme et la diversité des langues.
Le protocole de Londres n'obéit, hélas ! qu'à des calculs financiers qui occultent les conséquences culturelles et politiques de ce texte, non seulement pour la France, mais aussi pour les autres peuples européens.
Promouvoir la diversité culturelle et linguistique, c'est aussi favoriser l'apprentissage de l'allemand, du polonais, de l'italien ou du hongrois, comme l'a rappelé le Président de la République lors de son déplacement à Budapest, dans l'ensemble de l'enseignement scolaire européen, alors que l'apprentissage de ces langues n'est pas suffisamment encouragé dans notre propre pays.
Le langage construit la pensée ; tout comme nous refusons la pensée unique, nous ne voulons pas d'une langue unique.
Un sondage effectué par un grand quotidien auprès des internautes montrait que nos concitoyens défendaient le français à 62%. Faut-il rappeler que la langue est un puissant élément d'identification, qu'elle est non seulement un outil de communication, mais aussi un instrument de pouvoir, voire de domination ?
Des centaines de dialectes et de langues ont déjà disparu. Cette cruelle et tragique tendance ne fait que s'accélérer de par le globe, appauvrissant de façon irrémédiable le patrimoine humain d'autant de visions du monde. C'est pire que les bibliothèques et les livres que l'on brûle dans le roman d'anticipation de Ray Bradbury que nous avons tous lu dans notre jeunesse, Fahrenheit 451, remarquablement porté à l'écran par François Truffaut, car ce sont la mémoire et la transmission orale des langues que l'on condamne.
Et n'est-il pas particulièrement regrettable de s'attaquer aux traductions, donc aux langues, alors même que le brevet européen est surtout coûteux en raison des taxes très lourdes prélevées par l'Office européen des brevets, qui est la première barrière à l'accès des PME au brevet européen ?
Cet office n'a pas voulu réduire ses revenus, pourtant à la hauteur de ses tarifs prohibitifs, ce qui a inspiré à certains États l'idée de sacrifier les traductions, qui ne représentent pourtant en moyenne que 10 % du coût du brevet, contre 75 % pour les taxes et frais de maintien et 15 % pour les procédures. Si l'objectif affiché est de faire des économies, c'est donc sur la question de ces taxes et frais abusifs que doit prioritairement porter toute réforme.
Puisqu'il est question de mieux soutenir la recherche scientifique et l'innovation françaises, pourquoi ne pas avoir plutôt l'ambition de créer sur Internet une immense base de traduction des données scientifiques et techniques d'avenir ?
Google a mis en ligne gratuitement tous les brevets américains et a annoncé qu'il continuera cette politique avec les autres brevets, notamment européens. Il s'agit peut-être là d'une occasion exceptionnelle de rendre les brevets gratuitement accessibles en français au monde entier. Cependant, afin de ne pas laisser échapper cette opportunité, il est essentiel de refuser que 93 % des brevets européens ne soient plus traduits en français.
De plus, indépendamment des initiatives privées, il est souhaitable que les traductions en français des brevets européens existants ou à venir soient également mises en ligne par un organisme d'intérêt public tel que l'Institut national de la propriété industrielle. À l'ère de la révolution numérique, c'est une mission légitime.
Pour aller plus loin, pourquoi ne pas créer un service public européen des brevets, qui respecterait chacune des langues des pays adhérents à l'Union européenne ?
De nombreux États ont adopté une monnaie commune avec l'euro ; je pense que, de même, à plus ou moins long terme, le besoin d'une langue commune se manifestera de façon croissante.
Pourquoi pas ? Mais une langue commune ne sera acceptable par les peuples que si chacun des pays adhérents à l'Union européenne sent non pas que sa langue est menacée mais au contraire qu'elle est respectée, et à la condition que l'on accepte que la traduction demeure l'une des langues vivantes de l'Europe, c'est-à-dire une langue au service de toutes les autres et reconnaissant à chacune le droit de s'affirmer et de se développer à égalité.
En conclusion, aucune étude ne permet de mesurer les effets qu'aurait le protocole de Londres s'il était ratifié, et rien ne démontre qu'il sera source d'économies et encore moins qu'il permettra de favoriser le dépôt de brevets en français. C'est même l'inverse qui risque de se produire, avec pour conséquence, on l'a dit, une insécurité juridique accrue. Et je me contenterai de mentionner ses conséquences négatives sur l'emploi, notamment dans le domaine de la traduction...
Alberto Moravia disait à propos des langues qu'elles étaient les « merveilles de l'Europe ». Ratifier un accord au seul nom de la rentabilité économique en ignorant les aspects éthiques et culturels liés au patrimoine linguistique européen est un non-sens politique. Ce n'est pas la meilleure façon de construire l'Europe et encore moins de respecter les peuples qui la composent.
Au nom de la diversité linguistique, composante essentielle de l'économie de la connaissance, je demande donc à la Haute Assemblée de s'opposer à la ratification du protocole de Londres. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC. - M. Jacques Legendre applaudit également.)
Mme la présidente. La parole est à M. Aymeri de Montesquiou.
M. Aymeri de Montesquiou. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, le protocole de Londres suscite un débat passionnant et passionné. Depuis sept ans, il a donné lieu à une bataille acharnée et des rapports contradictoires analysant les conséquences de sa ratification se sont succédé.
À l'Assemblée nationale, des opinions diverses se sont exprimées sur tous les bancs ; dans chaque groupe, on trouve des partisans et des adversaires de ce protocole.
Je suis d'ailleurs frappé de voir combien les arguments sont réversibles. Selon les uns, cet accord offre une chance unique de consacrer le français comme langue scientifique quand, pour les autres, il sonne le glas de notre langue.
De quoi s'agit-il exactement ? Comme l'ont rappelé Mme la ministre, MM. les secrétaires d'État et MM. les rapporteurs, le protocole de Londres prévoit de conserver le régime fondé sur les trois langues de travail de l'Office européen des brevets, à savoir l'allemand, l'anglais et le français, tout en circonscrivant aux seules revendications la possibilité pour tout État concerné d'exiger, au moment de la validation, la traduction du brevet dans sa langue nationale.
De plus, la partie essentielle des brevets, qui est aussi la seule à être entièrement rédigée, sera toujours systématiquement disponible en français. À ceux qui s'inquiètent que des brevets écrits en anglais aient valeur juridique dans notre pays, on doit rétorquer, avec force, que leurs craintes sont vaines, puisque les revendications seront nécessairement écrites en français.
Quant aux annexes techniques si, par extraordinaire, il y avait doute sur leur signification, leur traduction serait exigée en cas d'action en justice, et ce aux frais du déposant.
L'utilisation du français se trouve donc garantie. Plus encore, il devient, avec l'allemand et l'anglais, l'une des trois seules langues dans lesquelles les innovations seront désormais revendiquées en Europe. Mes chers collègues, nous agirions contre nos intérêts en refusant de ratifier ce protocole ! D'ailleurs, l'Allemagne l'a bien compris : elle a entériné cet accord parce qu'il consacre l'allemand.
Certains, pour justifier leur opposition, arguent que l'Espagne et l'Italie ne signent pas le protocole. Mais si ces pays aux langues prestigieuses - surtout l'espagnol, parlé par des centaines de millions de personnes -, s'y refusent, c'est parce qu'ils regrettent que leur idiome ne figure pas dans la liste des trois langues officielles !
La défense de la langue française constitue pour nous un combat nécessaire, mais celui-ci ne doit pas choisir le mauvais terrain de l'accord de Londres.
Il est déjà acquis, hélas, que plusieurs grandes entreprises françaises non seulement tiennent leurs conseils d'administration en anglais et imposent l'usage de cette langue à leurs employés, mais aussi déposent leurs éléments de propriété industrielle directement en anglais. Cette situation est d'ailleurs dénoncée par le secrétaire général de la francophonie, M. Abdou Diouf, qui récemment déclarait souhaiter que les Français soutiennent leur langue autant que le font les autres membres de l'OIF, l'Organisation internationale de la francophonie.
Le combat pour le français doit être aussi un combat pour la diversité. Notre langue est la seule autour de laquelle se réunissent volontairement un grand nombre de pays, puisque pas moins de cinquante-cinq États se sont regroupés sous la bannière de l'OIF.
Aujourd'hui, dans l'esprit d'un certain nombre de hauts responsables, vanter l'importance du français reviendrait à faire preuve d'une nostalgie peu conforme à la modernité. Il importe de réagir contre ces allégations contraires à la réalité ! L'entrée en vigueur du protocole de Londres écarte le risque du « tout-anglais » et scelle l'utilisation obligatoire du français.
J'ajouterai que la place de la langue française dans le domaine de la recherche et de l'innovation dépend avant tout de l'importance et de la qualité de notre effort en matière de recherche, de la mise en place d'un réseau d'accompagnement efficace auprès de nos PME et de la meilleure valorisation de la recherche publique.
Ces considérations m'amènent à mon tour sur l'autre terrain où défenseurs et détracteurs du protocole s'opposent : le coût des brevets et ses conséquences sur leur dépôt.
Pour les premiers, le protocole de Londres permettra de réduire le coût du brevet européen et incitera ainsi les entreprises françaises, notamment les PME, à déposer davantage de brevets.
Pour les seconds, le coût des brevets constitue un « faux prétexte » ; pis encore, le coût de la traduction pèsera sur les PME et les TPE, qui seront obligées de traduire à la place des grandes entreprises, alors que ces dernières déposent des milliers de brevets dont les textes sont ponctués de termes extrêmement subtils. Enfin, les adversaires du protocole dénoncent le risque d'un effet d'aubaine pour nos concurrents, qui n'auront plus à traduire leurs brevets en français.
Or, bien au contraire, ce texte crée les conditions d'une conception offensive de la croissance économique et de la compétitivité. La recherche et développement ainsi que l'innovation sont, en effet, les clés de la croissance, de l'emploi et de la capacité de l'Europe à relever le défi de la mondialisation.
Mes chers collègues, quand on sait que, chaque année, la Chine forme deux millions de « bac + 5 » et d'ingénieurs, on comprend que le problème soit aigu ! Chacun déplore le retard de la France dans le domaine du dépôt des brevets par les PME. Il est vrai que, dans notre pays, comme maints orateurs l'ont souligné, une PME sur quatre seulement dépose un brevet au cours de son existence, contre une sur deux aux États-Unis - donc le double ! -, et 55% au Japon.
Nous devons relever ce défi ; je n'emploie pas le terme challenge ! Nous devons être capables de mener une politique offensive. Ne nous abritons pas derrière une ligne Maginot, mais promouvons une stratégie d'offensive économique au travers des brevets.
Mes chers collègues, cessons d'aller chercher ailleurs les causes de nos problèmes ! Nous devons accomplir un effort important, afin de développer la place de la recherche française en Europe et d'intensifier la recherche européenne. Arrêtons d'accuser les autres d'être responsables de la faiblesse de nos dépôts de brevets.
L'une des solutions consiste à réduire le coût de la propriété industrielle. La France a montré le chemin en diminuant de 50 % la taxation des brevets. Toutefois, si nous comparons avec la situation qui prévaut aux États-Unis, nous savons qu'il reste du chemin à parcourir.
En effet, 40 % des entreprises françaises renoncent à déposer des brevets en raison de leur coût, qui est de 30 000 euros environ. Une telle somme n'est sans doute pas considérable pour une entreprise du CAC 40, mais elle l'est pour la quasi-totalité des PME, dans lesquelles est produite une très grande part de l'innovation, ainsi que pour une entreprise en création, qui doit déposer et protéger son innovation. Il s'agit donc bien d'un point nodal de la politique des brevets en France comme en Europe.
En limitant le coût de la traduction, donc le coût total du brevet européen, le protocole de Londres favorisera les chercheurs, notamment les plus petits d'entre eux et les PME, soutenues par le CNRS, l'Académie des sciences, l'Académie des technologies et la CGPME. Cette politique est indispensable et conforme aux objectifs de Lisbonne.
Pour conclure, je soulignerai que la France, qui se veut aujourd'hui à la fois au coeur de l'Europe et le moteur de l'Union, est attendue sur ce texte.
Parmi les brevets déposés dans l'Union, 75 % le sont en langue anglaise, contre 18 % en allemand et 7 % en français. Cette dernière part pourrait s'éroder encore au cours des prochaines années, et la tendance des entreprises françaises à déposer leurs brevets directement en anglais s'accroîtra si nous ne donnons pas de manière définitive, publique et forte une place au français comme langue technologique, scientifique, à l'avant-garde de la bataille de l'économie.
Mes chers collègues, c'est la situation actuelle qui fragilise le français, et c'est la ratification des accords de Londres qui le renforcera !
Vous l'aurez compris, je voterai donc pour ce texte, comme la majorité des membres du groupe RDSE. Néanmoins, je dois préciser, à leur demande, qu'un certain nombre de mes collègues, dont MM. Bernard Seillier et Nicolas Alfonsi, n'ont pas été convaincus du bien-fondé de ce protocole et voteront donc contre sa ratification. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Jean-Pierre Jouyet, secrétaire d'État chargé des affaires européennes. Madame la présidente, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, je vous remercie tout d'abord de la qualité de ce débat, qui portait sur une question très importante et qui a été extrêmement riche.
Je me félicite également du large consensus qui a marqué cette discussion. Dans leurs interventions, MM. les rapporteurs, Hubert Haenel, Francis Grignon et Jean-Léonce Dupont, mais aussi MM. Jean-Claude Gaudin, Jean Bizet, Richard Yung et Aymeri de Montesquiou ont souligné, à juste titre, qu'il existera à l'avenir trois langues officiellement reconnues en matière de brevets, dont le français, ce qui est essentiel, me semble-t-il.
Il s'agit d'une avancée considérable sur le plan communautaire et européen, d'où la préoccupation de nos amis italiens et espagnols, qui a été soulignée par plusieurs orateurs, et sur laquelle je reviendrai.
Je voudrais cependant répondre aux objections qui ont été formulées par MM. Jacques Legendre et Ivan Renar.
Monsieur Renar, je suis un admirateur de François Truffaut et d'Alberto Moravia, mais cela ne m'amène pas nécessairement aux mêmes conclusions que vous. Quant à la citation de Jacques Prévert, je ne me prononcerai pas ! (Sourires.)
Votre argumentation portait principalement sur la protection de la langue française par rapport aux innovations qui nous viendraient des États-Unis et du Japon. Or deux éléments doivent être pris prendre en compte à cet égard, me semble-t-il.
Tout d'abord, nous devons ratifier le protocole de Londres parce que, comme M. Yung l'a souligné, il constitue une étape vers une meilleure reconnaissance du modèle européen de dépôt des brevets à l'échelle internationale, ce qui est important.
Monsieur Legendre, vous avez fait allusion au modèle américain de dépôt « en grappe ». Toutefois, si nous voulons justement faire obstacle à ce système et aider l'Europe, dans le cadre des négociations internationales, à faire valoir sa tradition, qui accorde une plus grande place à la sécurité juridique en matière de dépôt des brevets, nous devons faire en sorte que le protocole de Londres soit ratifié.
Un deuxième argument, présenté par M. Yung, est également très fort : à l'évidence, dans le cadre de la globalisation, nous ne devons pas craindre de favoriser tous les éléments qui contribuent à notre attractivité, que celle-ci soit mesurée en termes technologiques, scientifiques ou par le dépôt de brevets intellectuels.
Dans cette perspective, il est bon que l'Europe soit reconnue comme une puissance attractive, de la même façon que les États-Unis et le Japon. C'est d'ailleurs l'objectif que nous visons au travers de toutes les actions qui sont menées, à l'échelle européenne, dans le cadre de la stratégie de Lisbonne.
Plus important encore, les marchés en cause ne sont pas les mêmes. Nos entreprises sont concernées au premier chef par les marchés européens. Or ce sont ces derniers qui, à 60 % ou 80 %, bénéficieront de l'accord de Londres. Pour renforcer les exportations et le marché intérieur, la majorité des brevets utilisés dans l'Union doivent être déposés sur le territoire européen.
Tous les orateurs l'ont souligné, l'accord aura également un effet favorable sur les coûts de traduction, qui diminueront de 30 % à 40 %. Le statut du français sera maintenu pour la totalité des revendications, qui constituent le coeur du brevet. Il faut savoir que le registre de l'Office européen des brevets contient 150 000 termes scientifiques nouveaux qui seront traduits dans les trois langues officielles.
Messieurs Renar et Legendre, comme vous le savez, la France reste particulièrement attachée à la francophonie, puisque cette année, rien qu'en Europe, plusieurs millions d'euros seront consacrés à la promotion de cette politique. La préparation des présidences de l'Union européenne le montre également : voilà quelques jours, tous les fonctionnaires tchèques qui seront en charge de la présidence de l'Union sont venus à Paris se former à notre langue.
De même, sur un site de référence comme euractiv.com, 73 % des articles sont désormais rédigés en français, contre 30 % voilà quelques années. Dans le domaine linguistique, notre attitude ne doit donc pas être défensive mais, au contraire, particulièrement offensive.
Enfin, s'agissant de la disposition constitutionnelle selon laquelle « la langue de la République est le français », je rappelle que le Conseil d'État et le Conseil constitutionnel se sont prononcés à ce sujet.
Monsieur Renar, je tiens à préciser que la loi Toubon reste en vigueur pour ce qui concerne toutes les notices et spécifications techniques : il ne faut pas confondre le dépôt des brevets, dont nous discutons aujourd'hui, avec l'information de nos concitoyens, qui doit continuer d'être faite en français, je veux être extrêmement clair à cet égard. C'est particulièrement vrai de toutes les notices qui peuvent porter sur des produits dangereux ou sur des produits de consommation quotidienne.
Je souhaiterais maintenant vous rassurer en revenant sur les mesures d'accompagnement qui ont été demandées par MM. Dupont, Grignon et Yung, bien qu'elles soient plutôt du ressort de mes collègues Mme Pécresse et M. Novelli.
Des inquiétudes légitimes se sont exprimées au sujet des traducteurs, et il est vrai que des mesures d'accompagnement sont nécessaires pour cette profession. L'Institut national de la propriété industrielle proposera donc une labellisation des traductions et assurera au profit des traducteurs des formations sur la veille technologique et sur les normes techniques. Le but est de donner une meilleure visibilité à la profession de traducteur.
La question de la formation des ingénieurs au dépôt de brevets a également été soulevée. Mme Pécresse a déjà indiqué que serait effectivement mise en place une formation spécifique dans le cadre des écoles d'ingénieurs.
S'agissant de la proposition de loi de M. Marini, qui a déjà été adoptée par la Haute Assemblée, nous l'étudierons de manière approfondie ; en particulier, nous ferons évaluer son impact sur les entreprises.
M. Yung a fait référence aux mesures d'accompagnement fiscal. Il est d'ores et déjà acquis que le Gouvernement proposera dans le prochain projet de loi de finances - et c'est sans doute la principale mesure - que le crédit d'impôt recherche soit élargi et devienne, dans le cadre de l'OCDE, le dispositif d'appui fiscal le plus important en matière de recherche ; cette disposition aura un coût de 2,7 milliards d'euros. En matière d'apport de brevet, sera également prévu, toujours dans le projet de loi de finances, un abattement annuel égal à un tiers de la plus-value d'apport au-delà de la cinquième année de détention des droits sociaux, ce qui permettra une exonération totale de la plus-value en report au terme de la huitième année suivant celle de la réalisation de l'apport.
Enfin, il sera proposé de supprimer la différence de traitement entre la concession et la cession de brevet.
Tous ces éléments me semblent de nature à améliorer l'accompagnement fiscal, comme cela a été souhaité.
M. Grignon et M. Yung ont demandé d'autres mesures d'accompagnement, en particulier une aide au premier dépôt de brevet destinée aux PME. Hervé Novelli m'a donc fait savoir qu'il avait décidé de prévoir une réduction de 50 % pour les dépôts effectués par les PME, et ce qu'il s'agisse ou non du premier dépôt. Pour ce qui est du problème plus spécifique - et soulevé à juste titre - de l'accompagnement des PME vers le premier brevet, l'INPI doublera sur le terrain, dès 2008, le nombre de prédiagnostics en faveur des PME, qui passera de 500 à 1 000.
Messieurs les rapporteurs, vous avez également souhaité que soit aménagé le contentieux de la propriété intellectuelle en diminuant le nombre des tribunaux compétents. Le Sénat a très justement décidé de mettre en oeuvre une telle mesure dans le cadre du projet de loi de lutte contre la contrefaçon qu'il a discuté le 19 septembre dernier.
Enfin, vous avez demandé, là encore à juste titre, que les chercheurs du secteur public soient mieux sensibilisés à la question du brevet. Les annonces faites sur ce point par Mme Pécresse, je l'ai déjà indiqué, devraient vous satisfaire.
M. Yung a souhaité que nous puissions intervenir auprès de la Commission et de l'Office européen des brevets pour faciliter l'accès en ligne aux bases de données en terminologie. Vous pouvez compter sur moi, monsieur le sénateur : nous le demanderons avec insistance.
Pour ce qui est de la sécurité juridique des traductions, monsieur Dupont, le Gouvernement peut prendre l'engagement de préserver les droits des entreprises françaises en assurant - c'est le mécanisme de l'article L. 614-10 du code de la propriété intellectuelle - que le texte français fera foi en cas de traduction incomplète ou de mauvaise qualité.
Enfin, dernier aspect, le Gouvernement prend l'engagement solennel de donner à l'Institut national de la propriété industrielle des instructions fermes quant au maintien de la production des abrégés, car ceux-ci permettent que, au plus tard trois mois après leur publication, l'ensemble des demandes de brevet européen soient disponibles en français.
Telles sont les principales mesures d'accompagnement que le Gouvernement s'engage à prendre et que Mme Pécresse et M. Novelli m'ont demandé de porter à votre attention.
Je voudrais pour conclure insister après M. Haenel, M. Bizet et M. Gaudin sur un fait extrêmement important : il faut bien comprendre que la ratification de ce protocole entre dans le cadre de la relance de la stratégie de Lisbonne et s'inscrit dans la construction, au niveau communautaire, d'un dispositif juridique fondé sur l'avancement des travaux pour une juridiction communautaire des brevets, pour un brevet communautaire, avec un effet d'entraînement sur la question linguistique, en complément du brevet européen.
Soyez certains, mesdames, messieurs les sénateurs, que l'une des priorités de la présidence française sera de faire aboutir ces projets, de façon que cette ratification puisse porter tous les fruits que nous en attendons. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion de l'article unique.
Article unique
Est autorisée la ratification de l'accord sur l'application de l'article 65 de la convention sur la délivrance de brevets européens, fait à Londres le 17 octobre 2000, et dont le texte est annexé à la présente loi.
Mme la présidente. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article unique du projet de loi.
Je suis saisie de deux demandes de scrutin public émanant, l'une, de la commission des affaires étrangères et, l'autre, du groupe CRC.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
Mme la présidente. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 11 :
Nombre de votants | 315 |
Nombre de suffrages exprimés | 313 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 157 |
Pour l'adoption | 280 |
Contre | 33 |
Le Sénat a adopté définitivement le projet de loi. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE et sur les travées du groupe socialiste.)