b) Des difficultés à satisfaire la demande croissante d'auxiliaires de vie scolaire

La loi du 11 février 2005 a ouvert aux élèves handicapés le droit d'être accompagnés dans leur scolarité, lorsque les moyens de l'école ordinaire ne permettent pas de répondre à ses besoins spécifiques. Cet accompagnement peut prendre trois formes :

- un accompagnement collectif dans le cadre des classes adaptées que sont les Clis et des UPI : dans ces classes interviennent des auxiliaires de vie collectifs (AVS-Co) qui apportent un soutien global à l'équipe pédagogique. A la rentrée 2006-2007, l'éducation nationale recensait 1 519 AVS-Co accompagnent 47 532 élèves handicapés en Clis et en UPI ;

- un accompagnement par un service d'éducation spéciale et de soins à domicile (Sessad) : ces services assurent l'intervention de différents professionnels (enseignants spécialisés, éducateurs spécialisés ou encore ergothérapeutes) auprès de l'enfant handicapé, pendant et en dehors du temps scolaire, qui lui apportent une aide spécifique en complément de l'enseignement dispensé par les professeurs de son établissement ordinaire ;

- un accompagnement individuel, dans le cadre d'un projet personnalisé de scolarisation dans une classe ordinaire : sur décision de la commission des droits et de l'autonomie, les élèves concernés se voient affecter, le plus souvent à temps partiel, un auxiliaire de vie scolaire individuel (AVS-I), qui leur apporte un soutien d'ordre matériel (aide aux déplacements, à l'installation dans la classe) et joue également un rôle de médiation entre son entourage en stimulant ses facultés de communication et d'autonomie. A la rentrée 2006, environ 20 000 élèves handicapés bénéficiaient d'un tel accompagnement.

• Des difficultés de recrutement importantes

Sous l'impulsion de la nouvelle loi, le nombre de décisions des commissions des droits et de l'autonomie ouvrant droit à un accompagnement par un AVS-I a considérablement augmenté et cette tendance ne devrait plus s'inverser.

Or, l'éducation nationale peine aujourd'hui à faire face à cette pression de la demande d'AVS-I et le nombre croissants d'accords en CDAPH conduit progressivement à une réduction du temps d'accompagnement individuel moyen. Plusieurs raisons expliquent ces difficultés de recrutement.

Le dispositif de recrutement des personnels faisant fonction d'AVS-I reste largement artisanal : ces personnels relèvent en effet de statuts différents et sont recrutés sur des contrats dont la durée de vie est incertaine.

Trois types de contrats co-existent aujourd'hui :

- les AVS-I recrutés sur contrat d'assistants d'éducation (contrat à durée déterminée de droit public) : au nombre de 4 827 à la rentrée 2006-2007, ils sont recrutés spécifiquement pour assurer ces fonctions. D'un niveau de formation nécessairement au moins égal au baccalauréat et bénéficiant d'une formation spécifique à l'accompagnement d'élèves handicapés d'un minimum de soixante heures, ce sont les personnels qui donnent en général le plus de satisfaction aux familles. Le projet de loi de finances pour 2007 prévoit l'ouverture de 500 postes supplémentaires de ce type pour l'année scolaire 2007-2008 ;

- les emplois de vie scolaire (EVS) recrutés sur contrats d'avenir (contrats aidés à temps partiel d'une durée maximum de deux ans) : l'éducation nationale en recensait 1 883 à la rentrée 2006-2007. Ces personnels n'ont pour la plupart pas été recrutés à l'origine pour participer à l'accueil d'enfants handicapés ou alors uniquement pour assumer des fonctions proches de celles des AVS-Co. Mais sous la pression du nombre de décisions émanant des commissions des droits et de l'autonomie ouvrant des droits à un accompagnement individuel, de nombreux départements ont converti leurs EVS vers des missions d'AVS-I ;

- les EVS recrutés sur contrats d'accompagnement dans l'emploi (contrats aidés d'une durée maximum de deux ans) : 2 800 recrutements étaient planifiés au cours de l'automne 2006 sur ces contrats pour assurer expressément les fonctions d'AVS-I.

Le recours aux EVS est le plus souvent mal ressenti par les familles qui dénoncent leur faible qualification et le profil parfois inadapté des personnes recrutées : le recrutement sur la base de contrats aidés, c'est-à-dire destinés à des personnes très éloignées de l'emploi, conduit en effet à mettre en face des enfants handicapés des personnes elles-mêmes en difficulté et qui peuvent être déstabilisées par cette situation.

Le recours à des contrats de courte durée (deux ans maximum) oblige en outre l'éducation nationale à renouveler régulièrement ces personnels, ce qui entraîne, outre une perte d'expertise dommageable, un sentiment d'instabilité difficile à vivre pour les enfants et leurs familles.

L'Etat va d'ailleurs devoir faire face à une vague de contrats d'EVS venant à échéance d'ici décembre 2007 : or, l'ensemble des crédits ouverts par la loi de finances pour 2007 ayant déjà été délégués, cela signifie que ces postes ne pourront pas être remplacés pour la rentrée 2007. Il faudra attendre pour cela les crédits ouverts par la loi de finances pour 2008 : d'après les informations transmises à votre commission, le ministère de l'éducation nationale a demandé pour cet exercice l'ouverture de 4 500 nouveaux postes d'assistants d'éducation affectés à des fonctions d'AVS.


• Les candidats à ces fonctions sont peu nombreux, en raison principalement de la faible attractivité de ces emplois : quel que soit le type de contrat envisagé, il s'agit toujours de contrats à durée déterminée. De plus, l'éducation nationale reste incapable de proposer à ces personnels en fin de contrat des perspectives ultérieures de carrière, que ce soit au sein du ministère ou, par la validation des acquis de l'expérience, au sein du secteur médico-social.

• Un impératif : améliorer la formation des AVS

La mise en place des assistants d'éducation AVS-I s'est tout naturellement accompagnée d'une exigence de formation, qui a progressivement été étendue à tous les faisant fonction d'AVS-I : une formation initiale de soixante heures leur est ainsi dispensée. Elle peut être complétée en cours d'emploi par des modules d'approfondissement dont la durée annuelle peut atteindre 140 heures.

Compte tenu du caractère encore récent du recrutement des AVS, seule leur formation initiale est aujourd'hui opérationnelle. Mais elle reste sans aucun doute lacunaire. Guy Goeffroy, dans son rapport sur la scolarisation des personnes handicapées publié en septembre 2005, soulignait ainsi que « beaucoup [d'AVS] témoignent encore de son insuffisance, non pour le « plaisir » de dénoncer une carence, mais pour souligner la difficulté devant laquelle ils se trouvent fréquemment de répondre opportunément et sans risque au besoin exprimé. »

Au-delà de la question de son volume horaire, qui mériterait à l'évidence d'être renforcé, votre commission ne peut qu'insister sur la nécessité d'améliorer la qualité de cette formation initiale. La priorité devrait être de signer enfin la convention prévue entre l'éducation nationale, le ministère des affaires sociales et les associations de personnes handicapées, dans le but de faciliter la participation de celles-ci à la formation des AVS : c'est en effet en leur sein que se situe l'expertise la plus valable quant aux besoins des élèves handicapés.

Votre commission observe également que les professionnels des établissements médico-sociaux qui accueillent des enfants handicapés constituent un réel vivier de formateurs. Mobiliser ces professionnels permettrait en outre de valoriser leur expérience, à un moment où ils pourraient se sentir exclus de la question de la scolarisation des enfants handicapés, en raison de la priorité donnée à la scolarisation en milieu ordinaire.

Plus fondamentalement, votre commission plaide avec insistance pour une véritable professionnalisation du métier d'AVS : l'accompagnement des élèves handicapés constitue un gisement d'emplois futurs. Mais son développement dépend étroitement de l'attractivité que l'on réservera à ces emplois.

En vue de cette professionnalisation, il est donc nécessaire de réfléchir aux profils de recrutement souhaitables, au statut offert aux agents concernés et à leurs perspectives de carrière.

Selon votre commission, il convient donc dès maintenant d'orienter le recrutement des AVS vers des candidats dont le projet professionnel s'inscrit dans le champ du travail social et de mettre à leur disposition des modules d'approfondissement en cours d'emploi pour leur donner une perspective de formation diplômante dans ce champ du travail social, en mobilisant notamment la validation des acquis de l'expérience.

• Une catégorie particulière d'aidants : les traducteurs pour les jeunes sourds

Votre commission souhaite également attirer l'attention sur les besoins en aide humaine d'un public particulier, celui des jeunes sourds.

La loi leur reconnaît en effet le droit de choisir entre une communication en langue française, éventuellement associée au langage parlé complété (LPC) et une communication bilingue « français - langue des signes française » (LSF), y compris au sein de l'institution scolaire. Pour que ce droit d'option soit effectif, il faut que cette institution soit en mesure de mettre à la disposition des jeunes sourds un interprète en LSF ou un codeur LPC, selon leur choix.

Compte tenu de la très grande technicité de ces professionnels, il n'est pas envisageable de les recruter dans les mêmes conditions que des auxiliaires de vie scolaire classiques. Se pose également la question de la rareté de cette ressource, qui rend impossible la perspective d'affecter un interprète à chaque enfant sourd qui en ferait la demande. Au demeurant, l'assistance d'un interprète n'est sans doute pas nécessaire à plein temps auprès de l'enfant.

Votre commission estime donc qu'une solution raisonnable consisterait à créer des établissements scolaires ordinaires de référence en la matière, dont le nombre et la localisation pourraient être planifiés au niveau départemental pour les écoles et les collèges et au niveau de la région pour les lycées.

D'une façon plus générale, la question de l'intervention d'aides humaines demandant des compétences très spécialisées au sein de l'école soulève la question des limites de l'accessibilité de l'institution scolaire : les AVS peuvent en effet être considérées comme un dispositif d'accessibilité, puisqu'il permet au plus grand nombre des élèves handicapés d'intégrer l'école ordinaire. Dès lors que les aides humaines nécessaires à un enfant particulier demandent des compétences très spécifiques, leur prise en charge bascule dans le domaine de la compensation.

Dans la perspective de l'ouverture de la PCH aux enfants, fixée par la loi à 2009, il convient donc d'ores et déjà de réfléchir à la juste répartition des charges entre ce qui relève effectivement de la mission de service public de l'école et ce qui relève de la compensation individuelle.

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