II. LE PARLEMENT ACCOMPAGNATEUR DU PLAN DE REDRESSEMENT
A. LE PREMIER ACTE DE CET ACCOMPAGNEMENT LÉGISLATIF A EU LIEU
La décision de l'Etat actionnaire de participer à une augmentation de capital doit être accompagnée. Au plan communautaire, les mesures prévues ont été, dès le 3 décembre 2002, communiquées à la Commission européenne. Au plan national, la contribution du Parlement à l'opération a trouvé sa première expression en décembre dernier, après un premier pas réglementaire fait par le Gouvernement sous forme d'un décret.
1. Le préalable réglementaire : le changement d'objet de l'ERAP
Avant
d'envisager de confier à l'
ERAP, anciennement Entreprise de
recherches et d'activités pétrolières,
un rôle
dans la recapitalisation de France Télécom, il était
nécessaire d'élargir l'objet de cet établissement public,
dont la mission première est étrangère au secteur des
télécommunications.
Cet établissement public à caractère industriel et
commercial, doté de la personnalité civile et de l'autonomie
financière, a été créé par le décret
n°65-1117 du 17 décembre 1965, à l'origine pour mettre en
oeuvre la politique pétrolière nationale. Selon les termes
originels de l'article 2 du décret de 1965, l'ERAP pouvait en effet
intervenir dans les domaines pétroliers ou, minoritairement,
pharmaceutiques.
ARTICLE 2 DU DÉCRET N° 65-1117 DU 17 DÉCEMBRE 1965
« L'Entreprise de recherches et d'activités
pétrolières a pour objet la recherche, la production, le
stockage, le transport, le traitement, la transformation, la distribution, la
commercialisation des hydrocarbures liquides ou gazeux et des autres substances
minérales ou fossiles et de leurs dérivés, ainsi que
généralement toutes opérations concernant ces
activités et s'y rattachant directement ou indirectement.
A cet effet, l'Entreprise de recherches et d'activités
pétrolières peut, soit de son initiative propre, soit à la
demande du ministre de l'industrie, étudier toutes questions, engager
toutes opérations se rapportant à son objet, directement ou par
l'intermédiaire des entreprises dans lesquelles elle détient une
participation ou dont elle évoque, au besoin, la création.
L'Entreprise de recherche et d'activité pétrolières est,
en outre, habilitée à prendre des participations dans le secteur
de la pharmacie. Ces participations doivent demeurer minoritaires. »
Même en interprétant avec souplesse l'adverbe
« indirectement » à la fin du premier alinéa,
il était juridiquement impossible d'inclure les opérations
relatives aux télécommunications dans le champ
réglementaire d'intervention de l'ERAP !
A la veille de l'approbation du plan de redressement de France
Télécom, le Gouvernement a donc procédé à la
modification de l'objet de l'ERAP par décret. En choisissant
d'élargir l'objet d'une structure juridique déjà
existante, l'Etat gagnait du temps, le décret pouvant être pris en
quelques jours, à la différence de la loi qui aurait
été nécessaire pour créer une nouvelle
catégorie d'établissement public. En effet, l'article 34 de la
Constitution dispose que la loi « fixe les règles concernant
la création de catégories d'établissements
publics ».
Le
décret n° 2002-1409 du 2 décembre 2002
définit dorénavant en ces termes l'objet de l'ERAP :
« prendre, à la demande de l'Etat, des participations dans des
entreprises appartenant aux secteurs de l'énergie, de la pharmacie et
des télécommunications » au lieu de « la
recherche, la production, le stockage, le transport, le traitement, la
transformation, la distribution, la commercialisation des hydrocarbures
liquides ou gazeux et des autres substances minérales ou fossiles et de
leurs dérivés, ainsi que généralement toutes
opérations concernant ces activités et s'y rattachant directement
ou indirectement ». Le conseil d'administration de l'ERAP reste en
revanche marqué par le passé : y figure ainsi un
représentant du ministère des affaires
étrangères...
COMPOSITION DU CONSEIL D'ADMINISTRATION DE L'ERAP
L'ERAP
est administré par un conseil, nommé pour trois ans,
composé de douze membres:
- un haut fonctionnaire ou une personnalité ayant exercé des
fonctions de haute responsabilité économique, industrielle ou
financière au service de l'Etat, président ;
- deux représentants du ministre de l'industrie ;
-deux représentants du ministre des finances et des affaires
économiques ;
- un représentant du ministre des affaires
étrangères ;
- six personnalités de nationalité française choisies
en raison de leur compétence.
Le Président est nommé en Conseil des Ministres, les onze autres
membres par décret. L'ERAP est soumis au contrôle d'un Commissaire
du Gouvernement désigné par le Ministre de l'Industrie et d'un
Contrôleur d'Etat.
2. La première expression législative du soutien au plan de redressement : l'octroi à l'ERAP de la garantie de l'Etat
C'est au
travers du vote de la loi de finances rectificative n° 2002-1576 du
30 décembre 2002
9(
*
)
que le
Parlement a d'abord accompagné le plan de redressement de France
Télécom. En effet,
l'article 80 du collectif
budgétaire
dispose que : « Les emprunts
contractés par l'ERAP, dans le cadre de son soutien d'actionnaire
à France Télécom, bénéficient, en principal
et intérêts, de la garantie de l'Etat dans la limite de 10
milliards d'euros en principal ».
Ainsi, en octroyant à l'ERAP la garantie de l'Etat, le Parlement fait de
cet établissement un « bras armé » de l'Etat
pour le refinancement de France Télécom. Cette garantie de l'Etat
permet d'une part à l'ERAP de bénéficier d'un emprunt
auprès de la Caisse des dépôts et consignations aux
meilleurs taux
10(
*
)
, dans la
limite de 10 milliards d'euros en principal. Il marque d'autre part
l'engagement de l'Etat, dès la mise en place d'une ligne de
crédit par l'ERAP, d'accompagner l'entreprise France
Télécom dans la réussite de son plan de redressement.