Question de Mme BRULIN Céline (Seine-Maritime - CRCE-K) publiée le 01/05/2024

Question posée en séance publique le 30/04/2024

M. le président. La parole est à Mme Céline Brulin, pour le groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste - Kanaky.

Mme Céline Brulin. Ma question s'adresse à M. le ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l'industrie et de l'énergie.

Monsieur le ministre, malgré près de 92 milliards de dollars de bénéfice net en deux ans et des dividendes faramineux, ExxonMobil annonce vouloir mettre fin à ses activités chimiques à Port-Jérôme-sur-Seine, en Seine-Maritime, et vendre sa raffinerie de Fos-sur-Mer, ainsi que des dépôts de carburant.

Dans mon département, 647 emplois directs sont en jeu, voire plusieurs milliers si l'on tient compte des entreprises sous-traitantes et de l'ensemble du tissu économique touché.

Les ressources des communes du bassin d'emploi et de l'agglomération Caux Seine seraient elles aussi considérablement affectées.

Le Gouvernement et même le Président de la République doivent faire pression sur le groupe. Comment accepter que celui-ci continue d'avoir accès aux marchés français et européen, alors qu'il tire un trait sur la mobilisation, quatre-vingt-dix ans durant, de tout un territoire, ainsi que sur l'engagement et le savoir-faire de milliers de salariés et de dizaines de PME ?

Le vapocraqueur doit être pérennisé. Moyennant un certain nombre d'investissements, il peut produire des plastiques recyclés et contribuer à la décarbonation.

L'unité de polypropylène, qui peut fonctionner en autonomie en étant alimentée par TotalEnergies Normandie, doit être préservée.

Enfin, vous devez empêcher ExxonMobil d'imposer son calendrier et son plan de sauvegarde de l'emploi (PSE) au mépris de ses obligations légales.

Le site de Port-Jérôme-sur-Seine contribue à la fabrication de plastiques qui sont indispensables, que ce soit dans les domaines médical et pharmaceutique ou dans l'industrie automobile. L'abandonner ferait perdre un peu plus de souveraineté encore à la France. Cela mettrait notre pays à la merci de productions issues de gaz de schiste américains ou venues d'Asie, dans les conditions environnementales et sociales que l'on sait.

Monsieur le ministre, à quand la souveraineté en actes ? (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K, ainsi que sur des travées du groupe SER.)

Mme Cathy Apourceau-Poly. Très bien !

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Réponse du Ministère auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l'industrie et de l'énergie publiée le 01/05/2024

Réponse apportée en séance publique le 30/04/2024

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé de l'industrie et de l'énergie.

M. Roland Lescure, ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l'industrie et de l'énergie. Madame la sénatrice Céline Brulin, comme vous l'avez dit, ExxonMobil a annoncé le 11 avril dernier la fermeture de plusieurs activités chimiques à Gravenchon, dans la commune de Port-Jérôme-sur-Seine, mais aussi la vente d'une raffinerie à Fos-sur-Mer.

J'ai bien sûr pris contact immédiatement avec la direction française d'ExxonMobil, ainsi qu'avec le siège de l'entreprise à Houston, aux États-Unis, pour leur signifier mon mécontentement et ma déception vis-à-vis de cette décision et pour les interroger sur les raisons qu'ils mettent en avant pour la justifier.

Ils soulignent que le vapocraqueur est bien plus petit que celui de ses concurrents et souffre ainsi d'un déficit de compétitivité, qui est d'ailleurs en partie dû à un manque d'investissement ces dernières années.

M. Fabien Gay. Et c'est aux salariés de trinquer !

M. Roland Lescure, ministre délégué. En effet, cette activité est déficitaire en France depuis de nombreuses années.

Nous avons également rencontré immédiatement le repreneur de la raffinerie de Fos-sur-Mer. Je m'éloigne quelque peu de votre question, mais il était important de nous assurer que les 300 salariés concernés conserveraient leur emploi dans le cadre de la reprise par l'entreprise Rhône Énergies, laquelle a véritablement la volonté d'investir dans la raffinerie.

En ce qui concerne le site de Port-Jérôme-sur-Seine, la reprise s'accompagnera en effet malheureusement d'un PSE. Nous serons intraitables avec ExxonMobil, pour que cette société respecte ses obligations légales, et même, au-delà, pour qu'elle fasse preuve de responsabilité d'un point de vue social, vis-à-vis tant des salariés que du territoire, ces usines étant présentes dans la région depuis plus de quatre-vingt-dix ans.

Nous sommes en contact avec les représentants de l'entreprise. Nous le sommes aussi avec les élus : j'ai rencontré la vice-présidente de région et une députée, et mon cabinet vous transmettra, s'il ne l'a pas déjà fait, des dates pour fixer le rendez-vous que vous avez sollicité, afin que nous suivions ce dossier ensemble.

Cette décision est triste. Il s'agit d'une mauvaise nouvelle, qui intervient dans un territoire en développement, au sein duquel existent des perspectives d'emploi et d'investissement, y compris de la part de grandes entreprises américaines. Nous suivrons ce dossier de très près, en collaboration avec les élus locaux et, bien sûr, nationaux. (M. Ludovic Haye applaudit.)

M. le président. La parole est à Mme Céline Brulin, pour la réplique.

Mme Céline Brulin. Monsieur le ministre, nous attendons plus que des regrets. Nous parlons d'activités stratégiques. Le Gouvernement, qui s'y refusait jusqu'à présent, semble examiner la possibilité de reprendre les activités stratégiques d'Atos. Pourquoi ne pas le faire également dans ce cas ?

Pourquoi ne pas étudier la création d'un pôle pétrochimique ancré en France, en partenariat avec TotalEnergies, plutôt que de laisser ce dernier s'expatrier et entrer en bourse à Wall Street ?

Nous avons besoin de maintenir ces activités, qui ont des débouchés dans les industries pharmaceutique, médicale et automobile. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K, ainsi que sur des travées du groupe SER.)

Mme Marianne Margaté. Très bien !

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