Question de Mme LOPEZ Vivette (Gard - Les Républicains) publiée le 16/03/2023

Mme Vivette Lopez attire l'attention de M. le secrétaire d'État auprès de la Première ministre, chargé de la mer, sur l'avenir de la pêche au chalut, principalement en Occitanie.

En effet, la Commission européenne a présenté le 1er mars 2023 en commission de la pêche du Parlement européen son plan d'action pour le secteur de la pêche. Ce plan prévoit notamment l'interdiction progressive du chalutage de fond dans toutes les aires marines protégées entre 2024 et 2030. Cette mesure condamnerait l'activité de 7 000 navires européens, et près d'un tiers de la pêche française. En France, des milliers d'emplois, en mer et à terre, seraient détruits.

L'Occitanie est tout particulièrement menacée par cette mesure, les aires marines concernées représentant un peu plus de 75 % de la surface maritime du golfe du Lion située face aux côtes de la région. En outre, la pêche chalutière est particulièrement structurante pour la filière pêche locale et représente 80 % des apports de quatre criées de la région.

Il est permis par ailleurs de s'interroger sur la volonté de protection environnementale défendue par la commission. En effet, la flotte française est une de celles qui appliquent les normes environnementales les plus ambitieuses au monde. Aussi, il est à craindre, à l'inverse de l'effet escompté, que cette interdiction ne fasse qu'accélérer la dépendance de notre pays aux importations de pays tiers dont les pratiques en matière environnementale sont souvent désastreuses.

C'est pourquoi elle lui demande la stratégie que le gouvernement français souhaite adopter pour développer et soutenir la filière de pêche professionnelle française qui participe grandement à la souveraineté alimentaire nationale et qui est déjà grandement fragilisée par une crise liée aux conséquences du Brexit et à l'explosion des prix de l'énergie.

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Réponse du Secrétariat d'État auprès de la Première ministre, chargé de la mer publiée le 04/05/2023

Le plan d'action sur la restauration des écosystèmes marins pour une pêche durable et résiliente, présenté le mardi 21 février 2023 par la Commission européenne, propose d'interdire les arts trainants de fond danstoutes les aires marines protégées (AMP) d'ici à 2030, et dans les zones Natura 2000 d'ici à 2024. Cette mesure inclut sans distinction tout engin remorqué qui peut toucher le fond : chaluts de fond, chaluts à perche, sennes, dragues et toute activité qui interagit avec les habitats marins. Au Salon de l'agriculture, lundi 27 février 2023, le Président de la République et la Première ministre ont indiqué l'opposition de la France à cette proposition. L'interdiction des arts traînants dans les aires marines protégées aurait en effet des conséquences économiques importantes pour les pêcheries françaises, et notamment la pêche artisanale, alors qu'aucune étude d'impact approfondie n'a été réalisée par la Commission européenne à l'échelle de chaque territoire concerné. Le Secrétaire d'État chargé de la mer a immédiatement souhaité obtenir de la Commission européenne une clarification sur le statut juridique de son plan d'action qui n'a fait l'objet d'aucune concertation ni consultation des États membres. Devant les députés européens le 1er mars 2023, la Commission européenne a indiqué son intention de traduire son plan d'action en mesures réglementaires contraignantes, voire en sanctions, si les États ne l'appliquaient pas. Le Gouvernement a donc réaffirmé la position de la France au Parlement le 8 mars 2023 sans jamais opposer protection de la biodiversité marine et la pêche. C'est la conciliation des deux qui permet une gestion efficace des AMP en France depuis qu'elles existent avec des règles définies au cas par cas, efficaces et reconnues. La zone économique exclusive française comprend aujourd'hui 33% d'aires marines protégées, répondant d'ores et déjà aux objectifs européens et nationaux en la matière. Dans la majorité d'entre elles, des mesures de gestion sont construites en concertation avec les acteurs et sur la base d'études scientifiques spécifiques. Elles permettent des activités de pêche strictement encadrées. Il peut en effet être démontré qu'une pêcherie aux engins de fond bien gérée peut avoir des conséquences positives pour la ressource et une absence d'impact pour les habitats. C'est le cas par exemple en baie de Seine occidentale pour la pêche à la coquille Saint-Jacques. Cette pêche, qui se pratique en majorité dans les aires marines protégées, fait l'objet de mesures de gestion mises en place par les professionnels depuis les années 1970 : d'une année sur l'autre, des zones ne sont pas exploitées pour permettre un repos de la ressource et du milieu. Lorsque la zone est ouverte, l'effort est limité dans le temps et en volume. La pêche à la coquille est possible du 1er octobre au 15 mai en dehors de la période de reproduction. Elle est limitée à 45 minutes par jour, deux fois par semaine. Seules des coquilles âgées d'au moins 2 ans peuvent être pêchées. Cette restriction dans l'effort de pêche explique l'abondance de la ressource aujourd'hui (le stock a été multiplié par trois). En Bretagne, dans le parc naturel marin d'Iroise, l'algue hyperborea est récoltée à l'aide d'un peigne fonctionnant comme une drague. Là aussi, des mesures de gestion adaptée permettent durabilité de la ressource et protection des habitats : seulement 25% de la surface couverte par ces algues est exploité chaque année et cette activité est très encadrée. 80% de la production française d'algues marines provient de l'Iroise. La ressource a des capacités de reconstitution grâce aux mesures de gestion mises en oeuvre et à un environnement extrêmement favorable aux macro-algues. Dans le Parc national des Calanques, six chalutiers ont l'autorisation de pratiquer à l'intérieur du Parc. La ressource en poissons (daurades, loups) a ainsi pu se maintenir et même progresser ces 10 dernières années. Aussi, le plan d'action ne distingue pas les différences entre aires marines protégées. La définition d'une AMP au sens de la réglementation européenne prévoit pourtant la fixation d'objectifs spécifiques à chaque site et, au sein de chaque site, des mesures de gestion différentes peuvent être prises en fonction des objectifs de protection. Il existe en France quatorze types d'AMP qui vont des réserves intégrales dans lesquelles aucune activité de pêche n'est possible à des espaces où les activités humaines sont admises suivant des règles très précises. En outre, ce plan d'action ne prévoit aucune clause miroir sur le plan du commerce international : les États européens pourraient donc importer des produits de la mer depuis des pays situés en dehors de l'Union européenne qui ne respectent pas les normes que l'on impose à nos pêcheurs. Enfin, il ne reconnait pas les travaux déjà engagés par les États membres pour concilier les enjeux de protection du milieu, de restauration de la biodiversité et les activités socio-économiques et avant tout la pêche. Ces travaux font l'objet de discussions et de recherches importantes au niveau local entre professionnels de la pêche, associations de protection de l'environnement et scientifiques, sous la coordination des services de l'État et de ses établissements publics comme l'Office français pour la biodiversité (OFB). L'ensemble du paquet pêche durable de la Commission européen a été soumis à un premier échange politique lors du Conseil des ministres européens de la pêche le 20 mars 2023. D'autres États européens comme l'Espagne, les Pays-Bas et l'Allemagne ont rejoint la France sur cette position. À la suite de la mobilisation de la France, la Commission européenne a confirmé qu'elle n'imposera aucune obligation ni en 2024 ni en 2030 aux pêcheurs européens, et qu'elle laissera l'initiative à chaque État, conformément aux travaux déjà engagés dans leurs eaux marines et sur leurs littoraux.

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