Question de Mme GOY-CHAVENT Sylvie (Ain - Les Républicains) publiée le 08/12/2022

Mme Sylvie Goy-Chavent appelle l'attention de M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires sur l'interdiction de régulation en eaux libres des cormorans, une espèce prédatrice de poissons.

Les grands cormorans consomment entre 300 et 500 grammes de poisson par jour chacun en s'attaquant aux espèces disponibles dont les migrateurs, le brochet, l'ombre commun et la truite, pour certaines menacées.

Les acteurs de terrain ne comprennent donc pas cette décision et ils dénoncent un « mépris » de l'État pour le travail de protection des cours d'eau et de la faune piscicole réalisé par les associations de pêcheurs.

En effet, alors que les tirs de régulation étaient jusqu'ici permis, les effectifs de grands cormorans étaient en constante augmentation.

Dès lors, elle lui demande si l'État a correctement évalué les conséquences de cette interdiction sur les milieux aquatiques et sur l'économie.

En outre, elle lui demande ce qu'il adviendra des cormorans quand ils n'auront plus rien à manger.

Elle donc lui demande ce qu'il compte faire rapidement à ce sujet.

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Transmise au Secrétariat d'État auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé de l'écologie


Réponse du Secrétariat d'État auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé de l'écologie publiée le 12/01/2023

Le grand cormoran figure sur la liste des oiseaux protégés au niveau national et bénéficie également d'une protection européenne au titre de la Directive 2009/147/CE du 30 novembre 2009 relative à la conservation des oiseaux sauvages. Il s'agit d'un oiseau piscivore autochtone en Europe, dont la sous-espèce autorisée à la destruction est inféodée aux eaux douces, et dont l'aire de répartition s'était progressivement réduite en raison des tirs importants dont il faisait l'objet, jusqu'à ce qu'il soit protégé dans les années 1970. Le nombre moyen de grands cormorans hivernants a certes augmenté depuis que l'espèce est protégée, mais il se trouvait lors des premiers comptages nationaux menés dans les années 1980 à des niveaux extrêmement bas. En outre, ce chiffre est relativement stable depuis 2013, oscillant autour de 100 000 individus présents. Afin de contrôler ses impacts sur la pisciculture et sur les espèces de poisson protégées, un système dérogatoire à la protection stricte permet de mener des opérations de destruction si les conditions de la dérogation sont réunies. Il convient à la fois de ne pas nuire à l'état de conservation de l'espèce, mais également de démontrer qu'il n'existe pas d'autre solution satisfaisante et que le motif est justifié (en l'occurrence jusqu'alors pour prévenir les dommages aux piscicultures et dans l'intérêt de la protection de la faune et de la flore sauvages et de la conservation des habitats naturels). L'arrêté ministériel cadre du 26 novembre 2010 fixe ainsi les conditions et limites dans lesquelles les dérogations aux interdictions de destruction peuvent être accordées. Il est complété par un arrêté pris tous les 3 ans, qui fixe les quotas départementaux dans les limites desquelles les dérogations peuvent être accordées.  L'élaboration de l'arrêté triennal 2022/2025 est intervenue dans le contexte particulier d'annulation d'arrêtés préfectoraux relatifs aux dérogations sur les cours d'eau et plans d'eau, suite à diverses requêtes déposées ces dernières années. À ce jour, 15 arrêtés ont été annulés et 5 contentieux sont en attente de jugement. Les décisions des tribunaux administratifs font état de motivations insuffisantes des arrêtés car ils ne justifient pas de la présence dans les cours d'eau d'espèces de poissons menacées, de l'impact du grand cormoran sur les espèces protégées, ni de la mise en œuvre de solutions alternatives ; aussi les conditions de dérogation ne sont pas remplies. En conséquence, lors des travaux préparatoires à l'élaboration de l'arrêté, des réflexions ont été engagées avec l'ensemble des partenaires concernés par le grand cormoran (représentants des pisciculteurs et pêcheurs, associations de protection de la nature, experts, administration) afin de permettre la sécurisation des actes juridiques et d'éviter que les futurs arrêtés préfectoraux ne soient à nouveau annulés. Au terme de la période de consultation, il a été décidé de ne pas établir dans l'arrêté 2022/2025 de plafonds pour les cours d'eau et plans d'eau et de n'y rendre aucune dérogation possible. En effet, en l'état, les éléments disponibles ne permettent pas de justifier de l'impact du grand cormoran sur les espèces piscicoles menacées et de remplir les conditions de dérogation. L'arrêté du 19 septembre 2022 permet donc que les dérogations soient accordées pour protéger les seules piscicultures, dans 58 départements, avec un plafond annuel de 27 892 individus autorisés à la destruction soit un nombre total d'individus autorisés à la destruction correspondant à plus de 24 % de la population hivernante recensée en janvier 2021. Si des études robustes étaient produites localement et démontraient l'impact du grand cormoran sur l'état de conservation des espèces de poissons menacées, l'arrêté 2022/2025 pourra être complété, dans la période triennale, afin de mettre en place des plafonds sur les cours d'eau et plans d'eau concernés dans les départements. Des discussions sont ainsi en cours entre mes services et la Fédération nationale de la pêche en France (FNPF) afin de construire un protocole solide et de définir des sites pilotes pour le mettre en œuvre. Les travaux ont notamment identifié quatre départements dans lesquels nous engageons d'ores et déjà les travaux pour documenter les impacts sur la faune aquatique. Plus généralement, le ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires est pleinement engagé dans le maintien et la restauration de l'état écologique des écosystèmes aquatiques. En effet, au-delà de la prédation exercée par le grand cormoran sur les espèces piscicoles, d'autres enjeux d'importance, tels que la lutte contre les pollutions et les espèces exotiques envahissantes, sont l'objet de toute l'attention du ministère.

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