Question de M. LAURENT Daniel (Charente-Maritime - Les Républicains) publiée le 14/07/2022

M. Daniel Laurent attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire sur la situation des éleveurs laitiers et leur demande impérieuse d'application de la loi n° 2021-1357 du 18 octobre 2021 visant à protéger la rémunération des agriculteurs (EGALIM 2). Afin de répondre aux attentes de nos concitoyens et à notre ambition en matière de souveraineté alimentaire, il y a urgence à revoir la construction des prix à partir des coûts de production des éleveurs. Ils estiment que les indicateurs de marché étaient « au vert » : le prix du lait allemand, référence pour les produits de grande consommation à l'export, avait bondi de 7cts/L, passant de 32 à 39cts/L entre janvier et décembre 2021, quand dans le même temps en France on augmentait péniblement de 3cts/L pour atteindre 36 cts/L ; la valorisation beurre/poudre, indicateur de référence pour les produits laitiers utilisés dans les préparations, passait de 29cts/L à 45cts/L entre janvier et décembre 2021, et même 51cts/L en février 2022; l'indicateur de prix de revient du centre national interprofessionnel de l'économie laitière (CNIEL), où toute la filière est représentée (producteurs, coopératives, industriels et distribution), s'élevait à 40cts/L, le prix du lait en Europe ayant augmenté en moyenne de 16,7% sur 2021, allant même jusqu'à +29,3 % en Irlande ou +24,2% aux Pays-Bas, quand en France la moyenne européenne n'affichait que +7,8 %. Avec le contexte actuel, les charges explosent pour les exploitations : en janvier 2022, l'indice des prix d'achats des moyens de production agricole (IPAMPA), qui reflète les hausses des charges en élevage, a bondi 13,3 % en 1 an. C'était avant le conflit en Ukraine, depuis la situation ne fait que s'aggraver. Les éleveurs laitiers demandent ainsi une application stricte et immédiate de la loi EGALIM dans sa globalité, c'est-à-dire avec un prix défini par une formule qui tient compte des indicateurs de prix de revient par tous les opérateurs de la filière ; la revalorisation du prix du lait conventionnel et bio pour couvrir la hausse de coûts de production liée à la conjoncture actuelle. En conséquence, il lui demande quelles sont les mesures que le Gouvernement compte mettre en œuvre pour que ces indicateurs et ces hausses soient appliquées, car il en va non seulement de la pérennité des élevages de notre territoires, mais également du tissu économique où les entreprises laitières jouent un rôle primordial.

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Réponse du Ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire publiée le 29/09/2022

Le Gouvernement agit sur le long terme pour améliorer les relations commerciales et renforcer la position des agriculteurs dans la chaîne de valeur. La loi pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et une alimentation saine et durable de 2018 (EGALIM 1) a constitué une avancée notable pour une meilleure répartition de la valeur le long de la chaîne alimentaire. Elle a notamment permis d'inscrire, dans les pratiques, de nouveaux modes de négociations en entamant la « marche en avant du prix » c'est-à-dire une meilleure prise en compte des coûts de production agricoles dans la formation des prix d'achats aux agriculteurs. Les interprofessions ont mené un important travail pour élaborer et diffuser des indicateurs de référence prévus par la loi. Pour la filière laitière, le centre national interprofessionnel de l'économie laitière diffuse mensuellement sur son site internet un tableau de bord d'indicateurs, dont des coûts de production du lait. La loi visant à protéger la rémunération des agriculteurs (EGALIM 2) est venue renforcer les dispositions précédentes. Elle vise à garantir une meilleure prise en compte des coûts de production des agriculteurs, et doit permettre de mieux respecter le tarif des industriels, grâce à la non-négociabilité de la matière première agricole, la non-discrimination tarifaire, ligne à ligne, les clauses de révision automatique des prix tant sur les marques nationales que sur les marques de distributeurs et un encadrement des pénalités logistiques. Ces dispositions sont cruciales dans la période actuelle de forte hausse des coûts de production des éleveurs et de la nécessaire répercussion de ces augmentations à l'aval des filières et jusqu'aux consommateurs. Dans le cadre du plan de résilience économique et sociale, le Gouvernement a ainsi déclenché dès le 18 mars l'ouverture de nouvelles négociations commerciales entre les fournisseurs et les distributeurs, en mobilisant les mécanismes d'indexation et de renégociation prévus par la loi EGALIM 2. Depuis cette date, le Gouvernement a tenu un comité hebdomadaire des relations commerciales pour accélérer les renégociations, qui réunit syndicats agricoles, fédérations de transformateurs et distributeurs. Dans ce cadre, fournisseurs de produits agricoles et agroalimentaires et enseignes de la distribution ont signé le 31 mars une charte d'engagement qui pose les principes de ces renégociations. Les services de l'État restent particulièrement vigilants quant au respect de la mise en œuvre de la loi. Les services de contrôle de l'État sont d'ores et déjà mobilisés, tout comme le médiateur des relations commerciales et le médiateur de la coopération agricole. Les textes d'application permettant le fonctionnement du comité de règlement des différends commerciaux agricoles ont tous été adoptés en février 2022 et installés dès entrée en vigueur. Dans ce contexte, le ministre chargé de l'agriculture suit avec attention l'évolution conjointe des prix à la production, des coûts de production et de la marge des éleveurs laitiers. Selon FranceAgriMer et Agreste, le prix du lait payé au producteur en France est en augmentation continue depuis mai 2021. Tous types de laits confondus, le prix à teneurs réelles est évalué à 452 €/1 000 l au mois de juin, en hausse de 19 % par rapport à juin 2021. Selon l'institut de l'élevage (Idele), l'indice des prix d'achats des moyens de production agricole (IPAMPA) est, en lait de vache, en hausse de 21 % en mai 2022 par rapport à mai 2021. Toujours selon l'Idele, la marge brute laitière (Marge Ipampa Lait de vache sur Coût total indicé - MILC) tend à se redresser ces derniers mois malgré l'augmentation des coûts de production, grâce à la hausse concomitante du prix du lait. La valeur de la MILC est ainsi en hausse de 45 % en mai 2022 par rapport à mai 2021 et de 11 % en moyenne pondérée sur les 12 derniers mois. Par ailleurs, dans l'attente de la finalisation des nouvelles négociations commerciales et pour venir en aide aux éleveurs les plus impactés par les augmentations des charges, le Gouvernement a mis en œuvre, dans le cadre du plan de résilience économique et sociale, une mesure exceptionnelle dotée de 489 millions d'euros (M€) prenant en charge pour les éleveurs et intégrateurs une partie du surcoût supporté pour l'alimentation de leur cheptel lié aux conséquences de la guerre en Ukraine. Cette aide est de plus cumulable avec le dispositif de prise en charge des cotisations sociales dues par les exploitants à la mutualité sociale agricole dès lors que la demande de prise charge n'est pas justifiée par un surcoût lié aux dépenses d'alimentation animale. Ce dispositif a été abondé cette année à hauteur de 150 M€ supplémentaires (en plus de l'enveloppe de droit commun et des abondements réalisés pour prendre en compte les conséquences du gel d'avril 2021 et les annonces du 31 janvier 2022 liées à la crise porcine) pour venir en aide aux exploitations confrontées à des hausses de charges qui dégradent leur compte d'exploitation de manière significative. Les éleveurs laitiers peuvent bénéficier de ces mesures dès lors qu'ils remplissent les critères d'éligibilité.

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