Question de Mme BRIQUET Isabelle (Haute-Vienne - SER) publiée le 17/02/2022
Question posée en séance publique le 16/02/2022
M. le président. La parole est à Mme Isabelle Briquet, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
Mme Isabelle Briquet. Madame la secrétaire d'État, 137 milliards d'euros : ce sont les profits cumulés des entreprises du CAC 40 en 2021, selon l'agence Bloomberg. C'est bien plus qu'en 2019, qui sert d'année de référence, avant la crise sanitaire.
On peut se réjouir de la bonne santé des entreprises françaises. Elles ont été soutenues par les aides de l'État, dont l'opportunité ne saurait être remise en cause pour le maintien de notre tissu de PME. S'il n'est pas interdit aux actionnaires de faire des bénéfices, le montant de ceux-ci pose problème. Il n'est pas acceptable que les 80 milliards d'euros d'aides se retrouvent pour une part si importante dans la poche des actionnaires.
Depuis le début de ce quinquennat, les cadeaux fiscaux succèdent aux allégements fiscaux : suppression de l'impôt sur la fortune (ISF), instauration d'une flat tax, réduction importante des impôts de production
Nous ne cessons de dénoncer ces mesures, loi de finances après loi de finances. Aucune contrepartie à ces cadeaux n'est demandée aux entreprises, ni sociale ni écologique. Les revalorisations salariales et les investissements en faveur de la transition écologique n'ont pas leur place dans le partage des bénéfices. Aucune régulation n'est annoncée.
Depuis 2017, les écarts de richesse ne cessent de se creuser. Les salariés peinent à terminer le mois, les étudiants ont toujours recours à l'aide alimentaire, les familles s'endettent, la précarité s'installe ; les actionnaires, eux, profitent, avec l'approbation du Gouvernement.
Madame la secrétaire d'État, est-il décent de laisser prospérer ainsi une richesse improductive, alors que le pouvoir d'achat des Français ne cesse de s'éroder et que le chèque de Noël de 100 euros est déjà noyé sous les litres d'essence ? N'est-il pas temps de mettre en place une vraie redistribution des richesses ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER, ainsi que sur des travées des groupes CRCE et GEST.)
Réponse du Secrétariat d'État auprès du ministre de l'économie, des finances et de la relance, chargé de l'économie sociale, solidaire et responsable publiée le 17/02/2022
Réponse apportée en séance publique le 16/02/2022
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée de l'économie sociale, solidaire et responsable.
Mme Olivia Gregoire, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, des finances et de la relance, chargée de l'économie sociale, solidaire et responsable. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, c'est un plaisir de vous retrouver. J'ai l'honneur de représenter Bruno Le Maire, retenu à Toulouse, où il se trouve avec le Président de la République pour parler politique spatiale. (Mme Sophie Primas ironise.)
Madame Briquet, vous parlez de cadeaux fiscaux, je vais parler de défense de notre souveraineté, de nos entreprises, et de soutien aux salariés et à l'emploi.
Oui, nous réduisons les impôts de production, dans des proportions historiques. Oui, nous avons baissé le taux de l'impôt sur les sociétés, désormais à 25 %. Oui, nous avons transformé le crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE) en baisses de charges. Oui, nous avons réformé le droit du travail. Oui, nous avons rendu pas moins de 26 milliards d'euros aux entreprises et à peu près autant aux ménages, comme Olivier Dussopt vient de le rappeler.
Pour autant, je ne parle pas là de cadeaux ; je parle d'investissements. Gardons-nous des raccourcis, malgré le peu de temps dont je dispose pour vous répondre. Il est important que nos entreprises profitent de la croissance, qu'elles fassent des bénéfices. Il importe aussi, et je vous remercie de l'avoir dit vous-même, que les actionnaires touchent des retours sur leurs investissements. Cela s'appelle un dividende, et cela rémunère le risque pris en investissant.
Mme Isabelle Briquet. Zéro risque !
Mme Olivia Gregoire, secrétaire d'État. Je n'oublie jamais que, sans investissement, il n'y a pas d'emploi. Vous parliez de pouvoir d'achat : celui-ci ne saurait augmenter sans investissement.
Vous parliez de cadeaux. Je dirais plutôt que nous avons investi. Au cours de la période difficile que nous avons traversée, pas moins de 240 milliards d'euros ont été consacrés à la protection de nos entreprises, de nos salariés. Vous êtes nombreux à reconnaître de bonne foi que nous pouvons être fiers de ce choix.
Nous avons engagé sur les territoires, à l'heure actuelle, 72 milliards d'euros sur les 100 milliards d'euros prévus par le plan de relance. Pour avoir siégé trois ans à la commission des finances de l'Assemblée nationale, je sais qu'il faut être précis : à ces crédits sont attachées des obligations, et les entreprises ayant bénéficié du plan de relance doivent formuler un bilan d'émissions de gaz à effet de serre (Beges). C'est l'une des conditions attachées au plan de relance, qui a été adopté par le Parlement. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à Mme Isabelle Briquet, pour la réplique.
Mme Isabelle Briquet. Depuis cinq ans, vous prenez le ruissellement comme outil redistributif. Pourtant, force est de constater qu'en cette fin de quinquennat le pouvoir d'achat des Français est à sec et que la cohésion sociale se fissure. (Applaudissements sur les travées du groupe SER. M. Daniel Salmon applaudit également.)
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