Question de M. VAUGRENARD Yannick (Loire-Atlantique - SER) publiée le 01/04/2021
M. Yannick Vaugrenard attire l'attention de M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères sur les distorsions de concurrence que peuvent entraîner les dispositions du projet du mécanisme d'ajustement aux frontières concernant la filière de l'aluminium. Proposé dans le but d'atteindre les objectifs climatiques, il vise également à garantir des conditions de concurrences équitables au niveau mondial. Cependant, les propositions concernant la production d'aluminium s'appliquent uniquement sur les émissions directes de carbone. Or, les émissions indirectes de CO2 peuvent s'avérer plus importantes. De plus, seul l'aluminium primaire est concerné par ce nouveau régime de taxes. La production des semi-produits, sujette à une concurrence émergente avec la Chine en sera exemptée. Il lui demande donc quelles sont les mesures envisagées par le Gouvernement pour amender ces dispositions.
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Réponse du Ministère de l'Europe et des affaires étrangères publiée le 30/09/2021
L'Union européenne (UE) a rehaussé ses engagements climatiques ces dernières années, afin de se conformer aux exigences prévues par l'Accord de Paris. Cela s'est traduit par l'adoption, au Conseil européen de décembre 2019, d'un objectif de neutralité climatique de l'UE d'ici 2050, puis en décembre 2020 par le rehaussement à hauteur de -55% net de l'objectif européen de réduction des émissions d'ici 2030, par rapport au niveau de 1990. Afin de se donner les moyens de réduire nos émissions à hauteur de ces objectifs rehaussés, la Commission européenne a présenté, le 14 juillet, un paquet législatif "d'ajustement à l'objectif 55%"(dit"fit for 55"). C'est dans ce paquet législatif que figure une proposition de mécanisme d'ajustement carbone aux frontières (MACF), que la France appelle de ses vux depuis plusieurs années. La pertinence de cette initiative est renforcée par le rehaussement de notre ambition climatique et le risque de décalage avec celle de nos partenaires internationaux. Ce mécanisme d'ajustement carbone aux frontières sera pleinement compatible avec les règles de l'Organisation mondiale du commerce et poursuivra un objectif strictement climatique de lutte contre les fuites de carbone. Celles-ci portent gravement atteinte à l'efficacité de nos politiques climatiques ainsi qu'à leur acceptabilité. Le mécanisme aura pour objet d'appliquer à certains produits intensifs en émissions importés par l'UE le niveau de tarification carbone auquel sont soumis les produits européens dans le cadre du marché carbone européen (ETS). Afin qu'il ne soit pas considéré comme discriminatoire, nous souhaitons que ce mécanisme soit fondé sur un instrument miroir de l'ETS, avec des quotas spécifiques non échangeables avec ceux de l'ETS, mais ayant un même prix. Dans un premier temps, il pourrait s'appliquer à un périmètre restreint de quelques secteurs pilotes particulièrement exposés aux fuites de carbone, qui pourra ensuite être élargi à d'autres secteurs exposés. La Commission a notamment inclus au périmètre initial du mécanisme le secteur de l'aluminium. Dans leurs échanges avec les services de la Commission européenne, les autorités françaises ont mis l'accent sur la prise en compte des émissions directes dans le mécanisme d'ajustement carbone aux frontières, principalement pour des raisons de faisabilité. Concernant les émissions indirectes du secteur de l'aluminium, liées à la consommation d'électricité, la Commission n'a pas proposé de les inclure dans le périmètre initial du MACF mais pourrait examiner leur intégration à la fin de la période de transition. Nous étudierons cette possibilité avec beaucoup d'attention et de vigilance. Par ailleurs, le périmètre du mécanisme est restreint dans un premier temps à un certain nombre de produits de base, et non aux produits finis ou semi-finis, toujours pour des raisons de faisabilité. Nous serons toutefois vigilants à l'impact que l'introduction du mécanisme pourrait avoir sur les secteurs en aval des secteurs pilotes, et nous examinons les mesures qui permettraient de prévenir les risques qui seraient mis en lumière. Nous serons également attentifs à l'impact du MACF sur les exportations des secteurs pilotes et de leurs filières au niveau mondial, et examinerons les mesures qui permettraient d'éviter les fuites de carbone sur les marchés hors Union européenne. La France est déterminée à faire progresser ces discussions européennes, en particulier lors de sa présidence du Conseil de l'UE, au premier semestre 2022.
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