Question de M. TISSOT Jean-Claude (Loire - SOCR) publiée le 06/02/2020
M. Jean-Claude Tissot attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur la circulaire relative à l'attribution des nuances politiques aux candidats aux élections municipales et communautaires des 15 et 22 mars 2020. Cette circulaire donne instruction aux préfets de n'attribuer de nuances politiques qu'aux candidats des communes de plus de 9 000 habitants. Actuellement ce seuil est fixé à 1 000 habitants et concerne d'ores et déjà environ 25 000 communes et 8,9 millions de Français. En relevant le seuil à 9 000 habitants, ce sont environ 8 800 communes supplémentaires réunissant plus de 23 000 000 d'habitants qui sortiront des données établissant le rapport de force entre gauche et droite en France établi par le ministère de l'intérieur au soir des élections municipales. Ce ne sont donc pas quelques communes rurales qui seraient ainsi concernées par le système du nuançage, mais l'essentiel des petites villes et des villes moyennes que compte le pays. Les derniers scrutins électoraux nous enseignent que tous ces territoires qui ne seront plus pris en compte sont aussi ceux dans lesquels le parti présidentiel n'a pas ou peu d'existence. Avec l'effacement de ces territoires, le Gouvernement pourra présenter des résultats sur la base qui l'avantage le plus. Les résultats électoraux du parti La République en marche (LREM) seront alors artificiellement gonflés. Par ailleurs, cette circulaire crée sur mesure, pour les partis de la majorité présidentielle, une nouvelle catégorie politique au travers des listes « divers centre ». Cette étiquette sera attribuée aux listes officiellement investies par LREM et ses alliés, mais elle pourra l'être aussi aux listes qui n'ont pas été investies par la majorité présidentielle mais qui auront reçu son simple soutien, ou celui du mouvement démocrate (MODEM). En prévoyant la comptabilisation des votes sur la base d'un simple soutien, le Gouvernement calque les règles démocratiques sur la base de la stratégie politique décidée par le parti présidentiel, ce qui traduit une étonnante confusion des genres entre intérêt général et intérêts particuliers. Surtout, cette règle de comptabilisation des votes ne bénéficiera qu'à la majorité présidentielle et à aucun autre parti, ce qui constitue une rupture d'égalité manifeste. Au regard des graves entorses aux principes démocratiques, il lui demande si le retrait de cette circulaire est envisagé.
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Transmise au Ministère de l'intérieur
Réponse du Ministère de l'intérieur publiée le 03/09/2020
Tirant les conséquences de la suspension partielle prononcée par le juge des référés du Conseil d'État le vendredi 31 janvier 2020, une nouvelle circulaire relative à l'attribution des nuances politiques aux candidats aux élections municipales et communautaires des 15 et 22 mars 2020 avait été publiée le mardi 4 février 2020. Le Conseil d'État n'ayant pas exigé de recourir à un seuil préexistant dans le code électoral, la nouvelle circulaire prévoyait de retenir l'attribution de nuances politiques aux candidats dans les communes de 3 500 habitants et plus, ainsi que dans les chefs-lieux d'arrondissement quelle que soit leur taille. En effet, l'abaissement du seuil à 1 000 habitants retenu lors du renouvellement général de 2014 a suscité de nombreuses polémiques, en raison du caractère inadapté du nuançage politique des candidats dans les petites communes, où les listes sont généralement établies autour de projets locaux communs, sans référence partisane ni affichage idéologique. Aussi avait-il été décidé de revenir au seuil en vigueur jusqu'en 2008. Ainsi, l'abaissement de 9 000 à 3 500 habitants du seuil démographique imposant l'attribution d'une nuance politique aux candidats aux élections municipales et communautaires, respecte l'engagement pris par le ministre de l'intérieur au cours de l'examen au Parlement du projet de loi relatif à l'engagement dans la vie locale et à la proximité de l'action publique. Il rejoignait par ailleurs en partie les dispositions proposées en première lecture au Sénat par le sénateur Hervé Maurey, sans pour autant lier le choix d'une étiquette et l'attribution d'une nuance politique. En effet, si le choix d'une étiquette politique est totalement libre en ce qu'elle correspond à la sensibilité politique déclarée par le candidat, la nuance politique doit être attribuée par les services de l'État sur la base de plusieurs éléments objectifs tels que notamment, l'appartenance politique, les déclarations officielles, les soutiens apportés et la trajectoire politique passée du candidat. Par ailleurs, afin de ne laisser aucun doute quant à la volonté du ministère de l'intérieur d'assurer une parfaite égalité de traitement de toutes les listes de candidats, les grilles des nuances politiques, ainsi que leur méthode d'attribution avaient également fait l'objet d'ajustements dans le cadre de la nouvelle circulaire. Il était ainsi désormais explicitement prévu par la circulaire qu'une liste qui n'avait pas reçu d'investiture, mais qui était soutenue par un parti politique disposant de sa propre nuance de liste, se verrait attribuer la nuance de liste « divers » correspondant au bloc du parti ayant accordé son soutien : « divers gauche » (par exemple pour une liste sans investiture soutenue par le Parti socialiste), « divers centre » (pour une liste sans investiture, soutenue par La République en marche) ou bien « divers droite » (pour une liste sans investiture, soutenue par Les Républicains). Enfin, une nuance de liste « union du centre » avait été créée, par analogie avec les nuances « union de la gauche » et « union de la droite ». Elle a été attribuée aux listes investies par plusieurs formations centristes, dont La République en marche.
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