Question de M. LEFÈVRE Antoine (Aisne - Les Républicains) publiée le 09/01/2020

M. Antoine Lefèvre attire l'attention de Mme la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales sur la difficulté à laquelle le département de l'Aisne est confronté, eu égard au taux de fiscalité sur le foncier bâti du conseil départemental. En effet, suite à la suppression de la taxe professionnelle en 2010, la majorité de l'époque avait utilisé la possibilité de délier la progression des trois taxes (habitation, foncier bâti et non bâti). C'est ainsi que le taux axonais s'élève à 31,72 %, entraînant à terme des conséquences négatives pour le département : marge de manœuvre fiscale amputée, capacité à investir des bailleurs réduite, prélèvements importants sur les locaux professionnels et commerciaux et donc perte d'attractivité. Parallèlement, compte tenu de la baisse de 13,03 % à 6,53 % du taux de la taxe d'habitation et de la hausse de 7,74 points du foncier bâti, les marges de manœuvres fiscales du département ont alors été fortement réduites. Ainsi, la décision du Gouvernement de supprimer la taxe d'habitation aura un effet très atténué pour les Axonais. C'est pourquoi le conseil départemental sollicite l'autorisation de revenir sur la décision de 2010 en ramenant le taux du foncier bâti à ce qu'il aurait été, soit 23,989 %, si cette déliaison, unique en France, n'avait été mise en œuvre. Il souhaite donc connaître ses dispositions sur cette requête.

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Transmise au Ministère de l'action et des comptes publics


Réponse du Secrétariat d'État auprès du ministre de l'économie et des finances et du ministre de l'action et des comptes publics, chargé du numérique publiée le 19/02/2020

Réponse apportée en séance publique le 18/02/2020

M. Antoine Lefèvre. Depuis le 1er janvier 2011, le conseil général, devenu départemental, de l'Aisne, applique la déliaison du taux de la taxe d'habitation avec ceux des taxes foncières sur les ressources dont bénéficient les communes du département – une possibilité ouverte à l'occasion de la suppression de la taxe professionnelle.

Ainsi, pour l'exercice 2011, le taux de la taxe d'habitation a été diminué de 43 % et ramené à 19 %, tandis que le taux de la taxe sur le foncier bâti (TFB) a augmenté de 61 %. Actuellement, le taux axonais s'élève à près de 32 %, soit le troisième taux le plus élevé en France. Je me fais donc ici le relais du président du conseil départemental de l'Aisne, qui a par ailleurs saisi le Gouvernement de ce sujet à la fin du mois de décembre.

En effet, du fait de la baisse du taux de la taxe d'habitation de 13 % à environ 6 % et du relèvement de 7,7 points du taux de la taxe sur le foncier bâti, les marges de manœuvre fiscales du département ont été fortement réduites, ce qui entraîne à terme des conséquences négatives pour le département : capacités d'investissement des bailleurs réduites, prélèvements importants sur les locaux professionnels et commerciaux, et donc perte d'attractivité.

Par conséquent, la décision du Gouvernement de supprimer la taxe d'habitation n'aura qu'un effet très limité pour les Axonais. C'est pourquoi le conseil départemental sollicite l'autorisation de revenir sur la décision de 2010 en ramenant le taux de la taxe sur le foncier bâti à ce qu'il aurait été si cette déliaison, unique en France, n'avait pas été mise en œuvre.

Cette mesure aurait pour corollaire de diminuer d'autant la fraction de TVA compensatrice du conseil départemental, à laquelle serait substituée une dotation non indexée, du type de celles du Fonds national de garantie individuelle des ressources (FNGIR).

Certes, l'État devrait, dans ce cas, faire un effort budgétaire supplémentaire correspondant au montant de TFB non prélevé, mais, dans le même temps, il conserverait le dynamisme de la partie de TVA non attribuée au département. Le conseil départemental perdrait pour sa part le dynamisme de cette fraction de TVA, mais notre département retrouverait de l'attractivité aux yeux du monde économique et des propriétaires, et ces derniers bénéficieraient du gain de pouvoir d'achat annoncé par la suppression de la taxe d'habitation.

Monsieur le secrétaire d'État, l'Aisne est prête à faire un effort financier. Comme d'autres départements, elle est très impatiente de connaître le sentiment et la réponse du Gouvernement sur ce dossier.

Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Cédric O, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances et du ministre de l'action et des comptes publics, chargé du numérique. Monsieur le sénateur, vous l'avez rappelé, la taxe professionnelle a été supprimée en 2010. Cette année-là, les départements n'ont voté que les taux des taxes dites « ménages », soit la taxe d'habitation et les taxes foncières.

Le département de l'Aisne est le seul à avoir réduit de plus de 40 % deux de ces taux : celui de la taxe d'habitation et celui de la taxe sur le foncier non bâti. Il a compensé ces deux importantes baisses par une hausse de plus de 60 % du taux de la taxe sur le foncier bâti, dont la variation est libre de toute contrainte, sous réserve du respect du plafond prévu à l'article 1636 B septies du code général des impôts.

L'année suivante, les parts départementales de taxe d'habitation et de taxe foncière sur les propriétés non bâties ont été transférées aux collectivités du bloc communal.

L'article 16 de la loi de finances pour 2020 prévoit que, à compter de 2021, une fraction du produit net de la TVA est affectée aux départements en compensation de la perte de leur part de taxe foncière sur les propriétés bâties. Cette compensation est notamment calculée en fonction de la taxe foncière sur les propriétés bâties résultant du produit de la base d'imposition 2020 par le taux départemental appliqué sur le territoire départemental en 2019. Ce taux, légalement voté et appliqué pour une taxation devenue définitive, ne saurait être modifié.

S'agissant de l'année 2020, l'article 16 de la loi de finances pour 2020 ne prévoit aucune mesure de gel ou d'encadrement du taux de la taxe foncière sur les propriétés bâties. Les départements gardent toute liberté de réduire ce taux à leur convenance, voire de l'augmenter dans les limites du plafond précité. Le département de l'Aisne pourrait donc ramener ce taux au niveau qui lui convient pour l'année 2020, au prix, évidemment, de l'acceptation d'une sensible baisse de ressources.

Il convient également de souligner qu'une telle décision réduirait d'autant le produit de taxe foncière transféré aux communes axonaises en contrepartie de la suppression de la taxe d'habitation sur les résidences principales. En effet, le mécanisme de compensation prévu au IV de l'article 16 de la loi de finances pour 2020 repose sur une comparaison entre une perte communale de référence au titre de la taxe d'habitation et les ressources de taxe foncière départementale sur le foncier bâti constatées sur le territoire communal au titre de 2020.

Mme la présidente. La parole est à M. Antoine Lefèvre, pour la réplique.

M. Antoine Lefèvre. Monsieur le secrétaire d'État, je vous remercie de toutes ces informations sur ce sujet éminemment technique. Je vais les faire analyser. Il m'apparaît toutefois que, le taux de la taxe sur le foncier bâti étant chez nous supérieur à 150 % de la moyenne nationale, on aurait pu, à titre exceptionnel, permettre aux collectivités concernées de le réduire. Dans notre territoire, nous avons besoin de souplesse.

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