Question de Mme GRÉAUME Michelle (Nord - CRCE) publiée le 07/11/2019

Mme Michelle Gréaume appelle l'attention de M. le Premier ministre sur la disparition, dans sa forme actuelle, de la mission interministérielle contre les dérives sectaires.

Créée en 2002, cette mission, qui n'a eu de cesse de prouver son utilité et son efficacité, est aujourd'hui menacée d'affaiblissement par son rattachement aux services du ministère de l'intérieur. Sa force était justement son caractère interministériel, qui permettait aux délégués de chaque ministère d'échanger les informations, renforçant l'efficacité de la vigilance et de la lutte.

Cette « fusion » au sein du comité interministériel de prévention de la délinquance et de la radicalisation (CIPDR) semble répondre à une recommandation de la Cour des comptes de 2017. Pour les organisations sectaires, il s'agit d'une véritable aubaine, puisque cette assimilation pourra leur permettre de se présenter en tant que culte ou religion.

Mais pour tous les acteurs qui travaillent avec la mission de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (MIVILUDES) au quotidien, résumer ses fonctions à la lutte contre la radicalisation est un véritable non-sens, ne laissant pas transparaître la réalité du vaste champ d'action de la mission. De même, le discours rassurant consistant à dire que les moyens et les missions de la MIVILUDES seront maintenus, alors même qu'on réduit le nombre de fonctionnaires qui travailleront au service de cette mission, ne passe pas auprès des acteurs du domaine.

Ceci est d'autant plus inquiétant que les mouvements, ayant pignon sur rue, ne cessent de se multiplier et de se transformer, notamment sous l'impulsion des nouvelles technologies (réseaux sociaux, internet) qui jouent un rôle-clé dans les embrigadements. D'ailleurs, le nombre de signalements liés à des emprises a encore augmenté en 2018. Les parlementaires sont également exposés, puisqu'ils sont régulièrement sollicités par ces organisations sectaires lors d'interventions sur les questions de santé et d'éthique (drogue, virus de l'immunodéficience humaine…).

La lutte contre les sectes et celle contre la radicalisation sont deux combats différents, qu'il faut mener efficacement, mais dans le respect des spécificités de chacune.

Aussi, elle l'interroge sur la pertinence de ce rattachement, considérant l'efficacité actuelle avérée et l'expertise des fonctionnaires au service de cet organisme de lutte contre les dérives sectaires.

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Réponse du Premier ministre publiée le 28/11/2019

Depuis 2002, la MIVILUDES joue un rôle essentiel d'analyse des phénomènes sectaires et de coordination de l'action préventive et répressive face aux dérives sectaires. Ce rôle est essentiel et le Gouvernement entend le confirmer. Le Gouvernement confirme l'importance accordée à la prévention et à la lutte contre les dérives sectaires, sous toutes leurs formes, et dans les différents secteurs d'activité et de la vie sociale au sein desquels celles-ci peuvent aujourd'hui se manifester : certaines formes religieuses mais aussi, par exemple, des dérives dans les domaines de la santé, de la formation, du développement personnel, etc. Il est possible, à la fois de garder un degré d'ambition inchangé en la matière, et de moderniser l'organisation administrative pour tenir compte des évolutions récentes. Une part de l'activité de la MIVILUDES pose aujourd'hui des questions de synergies et de partages de compétences avec d'autres organismes qui n'existaient pas en 2002, comme par exemple le secrétariat général du comité interministériel de prévention de la délinquance et de la radicalisation (SG CIPDR). Par ailleurs, la Cour des comptes avait formulé en 2017 des observations sur l'organisation et le fonctionnement de la MIVILUDES. Elle suggérait déjà que le rattachement au ministère de l'intérieur permettrait d'en renforcer le caractère opérationnel. Dans ce contexte, le Gouvernement a décidé de rattacher la MIVILUDES au ministère de l'intérieur. Cette nouvelle organisation est envisagée pour le début de l'année 2020. Ce nouveau rattachement s'explique par trois raisons principales : rattachée au ministère de l'intérieur, la MIVILUDES pourra exercer ses missions en pleine articulation avec SG CIPDR : les champs d'intervention de ces deux organismes ne se recouvrent pas totalement mais ils ont pour important point commun la lutte contre les nouvelles formes de radicalité et certains phénomènes d'emprise et d'enfermement ; le ministère de l'intérieur a, traditionnellement, une vocation d'animation interministérielle dans ses champs de compétences ; cette nouvelle organisation ne compromet pas, au contraire, la bonne prise en compte de la variété des problématiques liées aux dérives sectaires ; il est de bonne administration que l'action publique relève des ministères : cela permet au Premier ministre et à ses services de se concentrer sur leur rôle d'impulsion, de coordination et d'arbitrage. La nouvelle organisation est donc respectueuse de la répartition des rôles au sein du Gouvernement. D'ici le début de l'année 2020, les modalités pratiques de ce nouveau rattachement seront précisées. Sur ce sujet, le Gouvernement considère évidemment qu'il n'est pas question de laisser se perdre un bilan de vingt ans d'action publique contre les dérives sectaires : la MIVILUDES continuera d'assurer son travail de recueil des signalements et d'identification de réponses appropriées. La nouvelle organisation préservera la bonne prise en compte de la spécificité des phénomènes sectaires.

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