Question de M. DELAHAYE Vincent (Essonne - UC) publiée le 25/07/2019
M. Vincent Delahaye attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur la question de la gestion des mineurs non accompagnés par les départements.
En septembre 2018, le Parlement adoptait la loi n° 2018-778 du 10 septembre 2018 pour une immigration maîtrisée, un droit d'asile effectif et une intégration réussie. L'article 51 de ce texte autorisait la mémorisation « d'empreintes digitales ainsi qu'une photographie des ressortissants étrangers se déclarant mineurs privés temporairement ou définitivement de la protection de leur famille ».
L'assemblée des départements de France (ADF) avait exprimé ses préoccupations face à une hausse des flux, par rapport aux manques de moyens administratifs et financiers des départements. L'ADF accueillait alors avec bienveillance les propositions du Premier ministre relatives à la prise en charge des mineurs non accompagnés, notamment la création d'une base centralisant les évaluations d'âge menées dans divers départements.
Au mois de janvier 2019, le département de l'Essonne se portait volontaire à l'expérimentation d'un nouveau fichier biométrique « appui à l'évaluation de minorité » (AEM), notamment dans le but d'assurer une meilleure prise en charge des mineurs isolés étrangers. Cela s'inscrivait également dans un objectif de désengorger ses services administratifs et de lutte contre le nomadisme « administratif », en facilitant l'évaluation de l'âge des demandeurs dans chaque département.
En effet, entre 2015 et 2018, le nombre de mineurs non accompagnés pris en charge par le département de l'Essonne a été multiplié par trois. Le département accueillait environ 200 mineurs en 2015, contre plus de 700 en 2018. Cette croissance démographique représente un coût administratif et financier important pour le département.
Après plusieurs mois d'expérimentation, force est de constater une certaine diminution du nombre de demandes de prise en charge auprès de l'établissement du recensement obligatoire. Néanmoins, l'administration départementale relève que le nombre de mineurs confiés par la cellule nationale au département ne cesse d'augmenter par rapport à l'année précédente.
Dès lors, il semble juste de souligner les carences de ce dispositif, dans la mesure où les objectifs initiaux ne sont pas atteints.
Il souhaite savoir si le Gouvernement ambitionne de donner suite à ce dispositif expérimental. Il désire également connaître les correctifs qu'il entend lui apporter le cas échéant.
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Réponse du Ministère de l'intérieur publiée le 07/11/2019
Le flux de personnes se déclarant mineurs non accompagnés (MNA) a fortement augmenté ces trois dernières années. Le nombre d'évaluations de minorité effectuées par les départements a doublé en trois ans, passant de moins de 30 000 en 2015 à plus 60 000 contrôles en 2018 pour seulement 17 022 confirmations de minorité cette même année. Aux termes de l'accord du 17 mai 2018 entre l'Etat et l'association des départements de France, l'État s'est engagé à renforcer son appui opérationnel et financier aux départements. Outre des efforts de régulation des flux (démantèlement des filières, fichier national, etc.), l'État a proposé une aide concentrée sur la phase d'accueil et d'évaluation, avec 500 euros par jeune à évaluer, plus 90 euros par jour pour l'hébergement pendant quatorze jours, puis 20 euros du quinzième au vingt-troisième jour. Le décret n° 2019-57 du 30 janvier 2019 a créé un traitement de données pour mieux garantir la protection de l'enfance, dénommé « appui à l'évaluation de la minorité (AEM) ». Il permet d'accélérer et de fiabiliser le processus d'évaluation de la minorité et d'éviter le détournement de la protection de l'enfance par des majeurs et ainsi de mieux accueillir les mineurs en situation d'isolement. L'enrôlement des données biométriques des personnes se déclarant mineures dans un fichier national constituera un outil opérationnel pour identifier une personne déjà évaluée majeure et ainsi limiter les présentations successives dans plusieurs départements. Le recours au dispositif d'aide à l'évaluation mis en place par l'État est laissé à l'appréciation du conseil départemental. Au 1er octobre 2019, 61 collectivités l'utilisent, dont l'Essonne, et 15 autres ont exprimé le souhait d'en bénéficier. Une réduction des flux de présentation aux guichets des collectivités est constatée dans les départements qui emploient l'AEM. Outil d'aide à l'évaluation de la minorité, la finalité de l'AEM n'est pas de réguler la répartition de mineurs non accompagnés placés par décision judiciaire sur le territoire national, cette mission relevant du ministère de la justice qui arrête la clé de répartition propre à chaque département. Dans une décision du 19 juin 2019 de la garde des Sceaux, la répartition est calculée en fonction de la part de population des jeunes de 19 ans et moins dans le département rapportée à celle des jeunes de 19 ans et moins recensée dans l'ensemble des départements concernés et du cinquième du rapport entre d'une part, la différence entre le nombre de mineurs privés temporairement ou définitivement de la protection de leur famille que ce département aurait dû accueillir au 31 décembre de l'année précédente et le nombre de mineurs effectivement pris en charge par le département à cette date et d'autre part, le nombre de mineurs accueillis dans l'ensemble des départements concernés au 31 décembre de l'année précédente. D'après les données de la mission « mineurs non accompagnés » du ministère de la justice, le nombre de mineurs non accompagnés placés par décision judiciaire du 1er janvier au 31 juillet 2019 était estimé, pour l'ensemble du territoire, à 10 931 contre 9 317 au 31 juillet 2018 soit une augmentation de 14,8 %. Dans le département de l'Essonne, 246 mineurs non accompagnés ont été placés contre 205 du 1er janvier au 31 juillet 2018 soit une augmentation de 20 %. L'Essonne ayant vocation à prendre en charge 2,28 % des mineurs non accompagnés placés par décision judiciaire d'après la clé de répartition adoptée le 19 juin 2019 par la garde des Sceaux, ministre de la justice (contre 2,24 % en 2018), il est logique que l'augmentation du nombre de mineurs non accompagnés au niveau national se répercute dans des proportions comparables sur ce département.
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