Question de M. ARTANO Stéphane (Saint-Pierre-et-Miquelon - RDSE) publiée le 10/07/2019
Question posée en séance publique le 09/07/2019
M. Stéphane Artano. Édith Piaf disait : « Il y a des silences qui en disent long, comme il y a des paroles qui ne signifient rien. » Depuis le dépôt, en 2014, du dossier d'extension du plateau continental, le Gouvernement français est extrêmement silencieux sur ce sujet. Les propos tenus par Emmanuel Macron lors du grand débat à l'Élysée, en février 2019, ne nous ont pas rassurés. J'aimerais qu'on nous explique quelle est la stratégie de la France dans le cadre de la négociation de l'extension du plateau continental au large de Saint-Pierre-et-Miquelon. (Applaudissements sur des travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.)
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Réponse du Ministère de l'Europe et des affaires étrangères publiée le 10/07/2019
Réponse apportée en séance publique le 09/07/2019
M. Jean-Yves Le Drian, ministre de l'Europe et des affaires étrangères. Monsieur le sénateur, vous m'interrogez sur la résolution du différend entre la France et le Canada s'agissant de la délimitation du plateau continental de la France au large de Saint-Pierre-et-Miquelon.
Vous le savez, nos deux pays sont parties à la convention des Nations unies sur le droit de la mer. Tous deux ont déposé un dossier de demande d'extension du plateau continental. La convention de Montego Bay prévoit un dispositif nommé la Commission des limites du plateau continental, que vous connaissez
M. Stéphane Artano. Oui !
M. Jean-Yves Le Drian, ministre. et qui pourrait être saisie de la délimitation. Toutefois, cette commission n'ayant pas vocation à trancher des litiges, la seule solution, pour la France, est de parvenir à un compromis bilatéral avec le Canada. À cette fin, la France a proposé en 2016 le lancement d'un dialogue d'experts franco-canadiens pour en discuter. Pour le moment, le Canada n'a pas souhaité entamer cette discussion, mais nous restons ouverts sur ce point.
Sans attendre qu'une solution puisse être trouvée à ce différend, le Président de la République a évoqué récemment la question de Saint-Pierre-et-Miquelon avec le Premier ministre du Canada, lors des cérémonies du 6 juin, en vue de renforcer l'intégration régionale de l'archipel. Cette intégration renforcée doit pouvoir se matérialiser en particulier dans le domaine clé que constitue le domaine de la pêche pour l'archipel.
Au-delà du différend juridique entre la France et le Canada, la priorité du Gouvernement reste d'assurer le développement économique et social de l'archipel. Sachez, monsieur le sénateur, que Mme la ministre des outre-mer est particulièrement attentive à ce sujet. Nous avons l'occasion d'en parler très souvent pour essayer d'avancer. Mais, pour avancer, il faut être deux !
M. le président. La parole est à M. Stéphane Artano, pour la réplique.
M. Stéphane Artano. Vous l'aurez compris, j'ai cité Édith Piaf à dessein.
La France et le Canada, amis et voisins, sont résolument condamnés à trouver une solution négociée et mutuellement satisfaisante. Le Canada persiste à nier l'évidence et à refuser tout dialogue avec la France concernant le plateau continental, alors même qu'« il n'a pas hésité à trouver des solutions intelligentes avec d'autres États et partenaires en la matière », comme le rappelait Annick Girardin, députée à l'époque et actuelle ministre des outre-mer. À ses côtés, j'avais défendu la demande par la France de l'extension du plateau continental de Saint-Pierre-et-Miquelon.
Depuis 2014, il ne s'est pas passé grand-chose, ce que je regrette. Sont toutefois intervenues les négociations sur l'accord de libre-échange avec l'Union européenne, le CETA, pour lequel le Canada avait fondamentalement besoin de l'accord diplomatique et du soutien de la France. Si je me réjouis de l'amitié naissante entre MM. Trudeau et Macron, qui sont à tu et à toi dans les conférences de presse, attitude extrêmement symbolique, j'ai le sentiment que, en matière de souveraineté, la France se couche en permanence devant les Anglo-Saxons, en l'occurrence devant le Canada.
Le général de Gaulle, qui doit se retourner dans sa tombe, affirmait que nous entrerions comme convenu dans le Marché commun, mais debout. Or, aujourd'hui, j'ai l'impression que nous sommes couchés face au Canada.
Vous venez de valider le CETA,
M. le président. Il faut conclure !
M. Stéphane Artano. qui sera ratifié par l'Assemblée nationale. Je m'y opposerai au Sénat, parce que nous sommes en position de soumission face au Canada. C'est inacceptable pour la population. C'est une question de souveraineté nationale,
M. le président. Il faut conclure !
M. Stéphane Artano. et pas seulement pour Saint-Pierre-et-Miquelon. (Applaudissements sur les travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen et du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, ainsi que sur des travées du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains.)
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