Question de Mme BONFANTI-DOSSAT Christine (Lot-et-Garonne - Les Républicains) publiée le 17/01/2019
Mme Christine Bonfanti-Dossat appelle l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation au sujet de la création du lac de Caussade. Ce projet lancé il y a vingt ans a pour but de maintenir un débit raisonnable du Tolzac toute l'année, de préserver l'environnement de la faune et la flore alentour, tout en permettant à une agriculture diversifiée de prospérer en aval de la retenue.
Après des mois d'études, le projet de barrage a été autorisé par la préfecture le 29 juin 2018, comme le supposaient les conclusions de l'enquête publique donnant un avis favorable sans réserve. Or, des associations militantes écologiques ont bloqué ce projet local pourtant validé et largement attendu en particulier par les agriculteurs, en l'attaquant au tribunal administratif.
Les ministères de l'écologie et de l'agriculture ont annulé le projet et la préfecture a dû retirer son autorisation mi-octobre 2018. En réponse au référé des associations écologiques, le tribunal de grande instance d'Agen a ordonné que la préfecture fasse cesser les travaux.
Toutefois, depuis, des semaines, les travaux de construction du lac de Caussade continuent.
Aussi, elle l'interroge sur sa stratégie pour éviter une montée des tensions problématique autour de ce projet attendu localement.
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Réponse du Ministère de l'agriculture et de l'alimentation publiée le 23/01/2019
Réponse apportée en séance publique le 22/01/2019
Mme Christine Bonfanti-Dossat. Monsieur le ministre, voilà maintenant plus de vingt ans que notre territoire évoque régulièrement le projet de création d'un lac artificiel à Caussade.
Ce lac artificiel doit permettre de stocker de l'eau pour irriguer les cultures et, bien sûr, pour réalimenter le Tolzac. Certains mettent en doute son utilité, invoquent la biodiversité. D'autres défendent son intérêt pour faire vivre les activités agricoles.
Dans un département voisin du Tarn et de Sivens, vous imaginez combien les tensions sont vives, et pour cause : le 29 juin 2018, le projet est autorisé par un arrêté préfectoral. Il est l'aboutissement d'un travail de fond mené avec tous les acteurs locaux : chambre d'agriculture, conseil départemental, association des maires, syndicats d'agriculteurs et services de l'État.
Après vingt ans d'atermoiements, ce projet, qui permet de soutenir près de trente exploitations et de maintenir le débit d'une rivière en période de sécheresse, allait enfin voir le jour. C'était oublier un mal qui ronge notre pays : les décisions aveugles prises depuis la capitale ; le sentiment que l'on sait mieux dire ce qui est bon en décidant depuis un ministère parisien plutôt qu'en écoutant les acteurs locaux.
En septembre dernier, le projet est annulé par un nouvel arrêté préfectoral, obtenu par des associations écologistes militantes. Des susceptibilités entre préfets de région et de département auraient-elles joué ? Je ne sais pas. Toutefois, les travaux ont commencé dans l'illégalité, et ils se poursuivent aujourd'hui. La semaine passée, le préfet de région a décidé, par arrêté, de faire apposer des scellés sur le site. Les appels à manifestation se multiplient.
Monsieur le ministre, comme le disait Nougaro : « Chez nous, même les mémés aiment la castagne ! » (Sourires.)
Mme Nicole Bonnefoy. C'est vrai ! (Nouveaux sourires.)
Mme Christine Bonfanti-Dossat. Alors, avant que la situation ne se dégrade, je vous invite, vous qui n'êtes pas un produit du sérail, à venir sur place vous rendre compte de l'intérêt réel de ce projet.
Ma question est simple : allez-vous répondre à mon invitation ? Quelles sont vos intentions pour assurer l'avenir de ces exploitations agricoles ?
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Didier Guillaume, ministre de l'agriculture et de l'alimentation. Madame la sénatrice Christine Bonfanti-Dossat, votre question porte sur le lac de Caussade ; c'est un sujet que j'ai découvert lors de mon arrivée au ministère. Depuis, je l'ai beaucoup travaillé, et je le connais bien.
Les difficultés actuelles s'expliquent par des raisons juridiques.
En réponse au référé de l'association France nature environnement, le tribunal de grande instance d'Agen a demandé, mardi dernier, que la préfecture fasse cesser ces travaux. Vous l'avez dit vous-même : ces derniers continuent depuis des semaines, alors même que le projet est aujourd'hui non autorisé.
Vous m'interrogez quant à la stratégie de l'État pour éviter une montée des tensions face au projet, lequel est attendu très localement.
Sur un plan strictement administratif et juridique, en application de la décision en référé du tribunal de grande instance d'Agen, mon collègue François de Rugy a dû demander un constat de justice de l'illégalité des travaux. À ce titre, des astreintes financières sont possibles. J'ai lu certains appels à manifestation : je ne sais pas si les mémés aiment la castagne,
Mme Christine Bonfanti-Dossat. Si !
M. Didier Guillaume, ministre. mais je sais que, dans ce territoire, on a le sang chaud !
Cette situation va nécessairement provoquer des tensions j'en ai conscience , d'autant que certains agriculteurs sont engagés dans la réalisation du chantier. Toutefois, vous le savez, l'État ne peut pas, en responsabilité, laisser ces travaux se poursuivre, alors même qu'ils ne sont pas autorisés : c'est la règle, et aucun gouvernement ne peut y déroger.
Madame la sénatrice, je suis engagé dans les assises de l'eau. Je vous le dis très sincèrement, comme je l'ai déjà dit au Sénat : dans le contexte du réchauffement climatique, l'agriculture française a besoin d'eau pour se développer. Mais les retenues d'eau doivent être aménagées dans le consensus territorial, sur la base de plans territoriaux.
Aussi, je vous lance un appel : je viendrai sûrement un jour dans le Lot-et-Garonne, même si je ne m'y rendrai pas dans l'immédiat cela ne servirait à rien, en pleine situation de crise. J'ai d'ores et déjà rencontré tous les députés et les sénateurs de ce territoire, notamment M. Moga il y a quelques instants : j'observe que les parlementaires sont unanimement favorables au projet !
Alors, aidez-nous à apaiser les tensions. Il faut que le monde agricole nous y aide aussi. Dans ce qui a été fait, certains points sont juridiquement discutables. Pour ce qui me concerne, je ne pars pas des bureaux parisiens pour décider ce qui doit se passer sur le terrain : je veux connaître la véracité et la réalité du problème. Cette retenue d'eau correspond-elle réellement aux besoins ?
J'y insiste, il faut absolument nous aider à apaiser le débat, afin qu'une solution positive puisse en sortir dans les prochaines semaines.
Mme la présidente. La parole est à Mme Christine Bonfanti-Dossat, pour répondre à M. le ministre.
Mme Christine Bonfanti-Dossat. Monsieur le ministre, pour vérifier la véracité des faits, je vous assure qu'il faut venir sur place !
Le pire n'est jamais certain, je vous l'accorde Toutefois, je vous aurai averti ; pour ma part, je considère sincèrement que le principe de précaution doit l'emporter sur toute autre considération.
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