Question de Mme COHEN Laurence (Val-de-Marne - CRCE) publiée le 04/10/2018
Mme Laurence Cohen interroge Mme la ministre des solidarités et de la santé sur sa volonté de supprimer la clause de conscience spécifique à l'interruption volontaire de grossesse (IVG).
En France, une femme sur trois a recours à une IVG au cours de sa vie. En 2015, 218 100 interruptions volontaires de grossesse ont été réalisées en France, un chiffre stable depuis 2006 selon la Direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (DREES). Malgré ces chiffres qui peuvent sembler importants et quarante ans après l'adoption de la loi n° 75-17 du 17 janvier 1975 relative à l'interruption volontaire de la grossesse (loi Veil), l'accès à l'IVG en France reste difficile, voire l'est de plus de plus.
Les obstacles sont nombreux : fermeture de 130 centres en 10 ans, manque de structures de proximité, manque de professionnels, sites de désinformation, entraves physiques, discours culpabilisateurs et moralisateurs par des mouvements réactionnaires, etc.
De plus, l'article L. 2212-8 du code de la santé publique stipule qu'au-delà de la clause de conscience générale s'appliquant aux médecins pour tout acte médical, l'IVG est concernée par une clause de conscience spécifique.
Des exemples récents (absence d'IVG à Hôpital du Bailleul à la Flèche (72) faute de médecins, propos tenus par le président du syndicat national des gynécologues obstétriciens) ont montré que le recours à cette double clause est important et peut, dans ce contexte de pénurie de médecins, de structures, être un obstacle supplémentaire. Le Gouvernement a d'ailleurs très vite réagi en permettant, dans le premier cas, le recrutement d'un médecin, et dans le deuxième cas, en condamnant fermement les propos précités.
Un état des lieux a été annoncé par la ministre, pour mieux connaître la réalité des faits, mais elle lui demande si elle n'estime pas que cette clause de conscience spécifique est superfétatoire et obsolète et si elle entend, de fait, permettre sa suppression pour conforter et renforcer le droit à l'IVG pour toutes sur l'ensemble du territoire.
Le Haut Conseil à l'égalité, dans un rapport publié en 2013, ainsi que le défenseur des droits dans son avis n°15-12 de mai 2015 préconisaient de supprimer cette clause de conscience spécifique, considérant que la clause de conscience générale suffisait et que l'IVG ne devait pas être un acte médical à part. Une pétition plus récente avec plus de 70 000 signatures va dans le même sens.
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Réponse du Ministère des solidarités et de la santé publiée le 31/01/2019
L'interruption volontaire de grossesse (IVG) est un droit de la femme, un droit humain. Ce droit, inscrit dans notre patrimoine juridique, est une question de liberté, de respect et de dignité des femmes. Il a sauvé la santé et la vie de milliers de femmes. Ce droit garantit l'accès à l'information, à des services de soins dédiés mais aussi à des interruptions de grossesse sécurisées, volontaires ou pour des raisons médicales. La loi de modernisation de notre système de santé du 26 janvier 2016 a amélioré les conditions d'accès à l'IVG, en supprimant notamment le délai de réflexion de sept jours au profit d'un délai librement choisi par la femme. Lors des débats parlementaires concernant la loi suscitée, la clause de conscience n'a pas été remise en cause dès lors qu'elle contribue au juste équilibre établi par la loi Veil. Aujourd'hui, il n'y a pas de volonté de revenir sur cet équilibre. La clause de conscience est un droit pour les professionnels de santé qui, pour une raison personnelle, ne souhaitent pas pratiquer cet acte. Toutefois, comme le prévoit le code de la santé publique (article L. 2212-8), le praticien qui fait valoir ce droit « doit informer, sans délai, l'intéressée de son refus, et lui communiquer immédiatement le nom de praticiens ou de sages-femmes susceptibles de réaliser cette intervention ». Cette information et cette orientation sont impératives pour permettre à la femme d'exercer son droit. Concernant l'égal accès des femmes à l'IVG, un état des lieux est demandé aux agences régionales de santé afin d'identifier les difficultés rencontrées et d'y remédier.
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