Question de M. LÉONHARDT Olivier (Essonne - RDSE) publiée le 31/05/2018
M. Olivier Léonhardt attire l'attention de M. le ministre de l'économie et des finances sur les inquiétudes relatives à la hausse des seuils d'audit des entreprises par les commissaires aux comptes.
En effet, cette mesure qui serait prévue dans le cadre du projet de loi en préparation de plan d'action pour la croissance et la transformation des entreprises (dit PACTE) a été annoncée par le Gouvernement en février 2018 lors d'une réunion publique à Colmar devant des chefs d'entreprise. Cette annonce fait elle-même suite aux préconisations de l'inspection générale des finances (IGF), missionnée conjointement par les ministres de la justice et de l'économie, qui proposait de relever les seuils d'audit au niveau européen.
Si cette proposition était retenue, elle aurait des conséquences considérables sur l'ensemble de ce secteur professionnel et pourrait supprimer 80 % des mandats des commissaires aux comptes dans les entités commerciales correspondant à 40 % des honoraires perçus. Le nombre d'emplois qui serait détruit est estimé à plus de 10 000 dans le secteur, sans compter les conséquences indirectes dans les cursus universitaires, éditeurs de logiciels, etc.
Outre les conséquences sur le secteur professionnel lui-même, c'est la remise en cause de la prévention des risques dans 150 000 entreprises (sur les 196 000 entités commerciales soumises au contrôle légal) et l'augmentation du risque de défaillance de nombreuses petites et moyennes entreprises (PME) qui préoccupent de nombreux acteurs.
Les commissaires aux comptes sont logiquement attachés au partenariat naturel noué avec les régions quant à l'observation et à la consolidation des tissus économiques locaux et tiennent évidemment à leur rôle d'accompagnement. Ils considèrent que la certification légale joue un rôle important dans la compétitivité des économies locales, notamment au travers de la prévention des défaillances des PME sur les territoires.
Sécurisation des relations des entreprises dans leurs opérations de croissance, renforcement de la transparence du développement économique, sécurisation juridique et fiscale sont autant de missions essentielles qui pourraient être remises en cause par la mise en œuvre de cette mesure.
Aussi, il souhaiterait savoir si une concertation avec l'ensemble des partenaires du secteur est intervenue ou prévue, avoir des informations complémentaires sur cette mesure et savoir si le Gouvernement compte l'inscrire dans le projet de loi « PACTE ».
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Réponse du Ministère de l'économie et des finances publiée le 05/07/2018
Dans le cadre du plan d'action pour la croissance et la transformation des entreprises (PACTE), le Gouvernement souhaite alléger les obligations pesant sur les petites entreprises, afin de faciliter leur développement. Parmi les mesures envisagées, à cet effet, le relèvement de certains seuils, réglementaires et fiscaux, constitue une orientation importante pour réduire les charges administratives qui leur sont applicables. Dans ce cadre, le Gouvernement envisage, en effet, de relever les seuils de certification légale des comptes, par un commissaire aux comptes, au niveau prévu par le droit européen, c'est-à-dire 8 M de chiffres d'affaires, 4 M de bilan et 50 salariés. Une analyse, conduite par l'inspection générale des finances (IGF), a en effet démontré que la pertinence de seuils d'audit légal, plus faibles que ceux fixés par le droit européen, n'est pas établie tant du point de vue de la qualité des comptes des petites entreprises, que de leur accès au financement. Le rapport de l'IGF démontre, en outre, que les coûts supportés par les petites entreprises françaises, qui ne sont pas visées par l'obligation européenne de certification légale des comptes, sont élevés (de l'ordre de 600 M, soit en moyenne 5 511 par an pour une entreprise située sous les seuils européens). Pour cette raison, il semble pertinent, au regard des enjeux financiers limités associés, de rendre facultative l'intervention d'un commissaire aux comptes dans les petites entreprises, alors que 75 % d'entre elles recourent, en parallèle, aux services d'un expert-comptable, qui concourt, d'ores et déjà, à la qualité comptable dans ces structures. Cette démarche est conforme à l'objectif fixé par le Premier ministre, dans la circulaire du 26 juillet 2017 relative à la maîtrise des flux réglementaires et de leur impact, d'identifier et d'éliminer les surtranspositions du droit européen dans notre droit national, alors qu'un nombre significatif d'États membres ont fixé des seuils identiques ou supérieurs à ceux prévus par le droit européen. Elle est également pleinement cohérente avec les orientations du Gouvernement visant à établir un nouveau contrat avec les entreprises, fondé sur la restauration de liens de confiance mutuelle entre l'État et les acteurs économiques, et, ainsi, une diminution du poids des contrôles et une responsabilisation individuelle accrue, comme en témoigne la création d'un droit à l'erreur, prévu par le projet de loi pour un État au service d'une société de confiance. Le relèvement des seuils d'audit constitue un défi pour la profession de commissaires aux comptes, impliquant une évolution en profondeur de son activité. Afin d'étudier, de manière précise, les conséquences de cette réforme et d'envisager les mesures d'accompagnement nécessaires, l'appui d'une mission présidée par M. Patrick de Cambourg - Président de l'Autorité des normes comptables, a été sollicitée sur l'avenir de la profession. Cette mission aura, notamment, pour objectif d'identifier des missions nouvelles, légales ou non, pouvant être confiées aux commissaires aux comptes ; de rechercher les moyens pour renforcer l'attractivité de cette profession et de permettre le maintien d'un maillage territorial suffisant de la profession dans les territoires ; de proposer des mesures d'aide aux professionnels les plus touchés par la réforme ; enfin, de formuler des propositions visant à favoriser le développement de l'expertise comptable et à enrichir ses missions d'appui et de conseil aux entreprises ne disposant pas d'un commissaire aux comptes. Les conclusions de cette mission permettront au Gouvernement d'adopter, d'ici à l'été 2018, un plan d'action visant à accompagner la mise en uvre du relèvement des seuils d'audit.
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