Question de M. MAZUIR Rachel (Ain - SOCR) publiée le 01/03/2018
M. Rachel Mazuir appelle l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur la régression de la formation et du travail en milieu carcéral.
Dans un rapport intitulé « Travail en prison : préparer (vraiment) l'après » publié le 15 février 2017, l'institut Montaigne et la fondation M6 mettent en effet en exergue le déclin de la mission de réinsertion de la sanction pénale. Manifestement, les prisons échouent à prévenir la récidive puisque 59 % des prisonniers « replongent » cinq ans après leur libération. Le rapport pointe l'inquiétante régression de la formation et du travail, qui sont pourtant deux outils majeurs de réhabilitation des détenus.
Aujourd'hui, le taux d'activité rémunérée des condamnés est en dessous des 30 % alors qu'il était de 46,5 % en 2000. Ce déclin quantitatif s'accompagne d'une « dégradation de la qualité des tâches réalisées en détention », des tâches de surcroît mal considérées, mal rémunérées et qui ne correspondent pas aux besoins du marché du travail.
Fort de ce constat, l'institut Montaigne et la fondation M6 proposent entre autres de « renforcer la formation et l'orientation professionnelle des personnes détenues grâce à des dispositifs adaptés aux durées des peines », de « faire évoluer le travail et la formation professionnelle vers une meilleure préparation à la sortie » et d'« investir massivement dans le numérique ». Le think tank suggère également la création d'une « agence nationale pour la réinsertion », la « professionnalisation des agents de l'administration pénitentiaire » sur ce sujet, ou encore l'application d'une « réglementation sur la rémunération horaire » des prisonniers.
En janvier 2018, elle a présenté l'efficacité des peines comme l'un des chantiers prioritaires de la prochaine loi pénale et de programmation pour la justice. Il souhaite donc savoir si le Gouvernement a l'intention d'allouer les moyens nécessaires pour réhabiliter la formation et le travail des détenus comme véritable outil de réinsertion et de lutte contre la récidive.
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Réponse du Ministère de la justice publiée le 03/01/2019
La part de la population pénale bénéficiant d'une activité professionnelle a chuté depuis 20 ans et les causes en sont multiples : baisse de l'offre, amplification des difficultés économiques après 2008, transfert de la formation professionnelle aux régions en 2014, baisse de l'employabilité de la population pénale, inadaptation du cadre juridique de la relation employeur/détenu, etc. Pour faire face à ce défi, une action de diversification des modalités de travail en détention a été impulsée par l'Etat : depuis 2016, des structures d'insertion par l'activité économique ont été ouvertes dans des établissements pénitentiaires afin de favoriser le travail des personnes détenues les plus éloignées de l'emploi. La loi du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel pose le cadre d'une expérimentation de l'apprentissage en détention dont les modalités sont en train d'être précisées ; elle permet en outre que des entreprises adaptées puissent proposer du travail dans les établissements pénitentiaires, dans l'esprit de l'expérimentation d'un établissement et service d'aide par le travail (ESAT) au centre de détention de Val-de-Reuil depuis quatre ans. En avril 2018, une convention a été signée avec Régions de France qui doit permettre de stabiliser l'intervention des régions en matière de formation professionnelle des détenus. L'organisation administrative de ces champs de politique publique vient par ailleurs d'évoluer : l'agence du travail d'intérêt général et de l'insertion professionnelle des personnes placées sous main de justice a été créée le 10 décembre 2018 et a notamment pour mission de développer la formation professionnelle, le travail et l'insertion professionnelle et en particulier l'insertion par l'activité économique, dans les établissements pénitentiaires. A cet effet elle est chargée : - de proposer une stratégie nationale du travail d'intérêt général, de l'emploi pénitentiaire et de l'insertion professionnelle par l'activité économique ; - de rechercher des partenaires pour développer la formation professionnelle, le travail et l'insertion professionnelle et par l'activité économique des personnes placées sous main de justice ; - de coordonner avec les ministères concernés, la mise en uvre opérationnelle des offres d'activité par les structures partenaires et d'y associer les collectivités territoriales ; - d'assurer la gestion en régie de l'emploi dans les établissements pénitentiaires et d'organiser la commercialisation des biens et services produits par les détenus ; - d'animer un réseau de partenaires publics et privés sur le territoire ; - d'assurer la promotion de l'emploi pénitentiaire, d'établir des statistiques et d'évaluer la mise uvre de ces dispositifs ; - de proposer des évolutions législatives et réglementaires pour faciliter la mise en uvre opérationnelle des offres d'activité par les structures partenaires. L'agence prend la forme d'un service à compétence nationale intégrant l'ancien service de l'emploi pénitentiaire (SEP) basé à Tulle. Elle en reprend donc les missions qu'elle sera chargée de développer et diversifier. Enfin, les besoins de formation et d'activité professionnelle sont très fortement pris en compte au travers du programme immobilier pénitentiaire. Ce dernier, dont les moyens sont sécurisés par la loi de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice en cours d'examen devant le Parlement, favorise les implantations en ville ou proche des agglomérations, à proximité, donc, des bassins d'emploi. Le programme fonctionnel des futurs établissements prévoit en outre d'emblée des surfaces d'activités et des zones de stockages importantes.
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