Question de M. TODESCHINI Jean-Marc (Moselle - SOC) publiée le 13/01/2011

M. Jean-Marc Todeschini appelle l'attention de M. le ministre du travail, de l'emploi et de la santé sur le devenir du régime minier. Les conclusions du rapport de la mission d'information confiée à M. Yves Bur par le Gouvernement en mai 2010 soulèvent en effet une vive indignation parmi l'ensemble des populations vivant dans les bassins miniers.
Elles sont en effet particulièrement attachées à la médecine minière qui est un acquis social, lié à l'histoire des bassins ferrifères et houillers. Ses fondamentaux, gratuité, qualité, et proximité doivent perdurer, jusqu'à la fin du régime qui s'éteindra naturellement dans quelques années. Or, les recommandations de ce rapport proposent à l'inverse une liquidation pure et simple du régime spécial minier, remettant ainsi en cause les engagements pris par l'État depuis la seconde guerre mondiale.

Ce rapport, s'il est suivi par le Gouvernement, risque de renforcer le sentiment d'abandon déjà très présent dans le bassin houiller. En effet, alors que le bassin houiller mosellan a déjà connu l'an passé la fermeture de près de la moitié des centres de soins, le rapport propose de maintenir le décret du 31 décembre 2009 impliquant la suppression de la gratuité de nombreuses prestations pour les ayants droit. Il s'agit là d'une véritable provocation à l'égard des affiliés du régime et cela témoigne d'une grande méconnaissance des réalités et des besoins des populations dans les bassins miniers.

Aussi, il lui demande une nouvelle fois l'abrogation du décret n° 2009-1787 du 31 décembre 2009. Il lui demande en outre de bien vouloir opposer officiellement une fin de non-recevoir aux recommandations provocatrices et hors-sujet du rapport de M. Bur et de soumettre toute évolution des pensions minières à une concertation préalable impliquant l'ensemble des acteurs concernés sur le terrain.

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Réponse du Secrétariat d'État chargé de la santé publiée le 16/02/2011

Réponse apportée en séance publique le 15/02/2011

M. Jean-Marc Todeschini. Madame la secrétaire d'État, la mission d'information sur l'avenir du régime de sécurité sociale minier, constituée à la demande du Gouvernement en mai 2010, a récemment présenté ses conclusions.

Cette mission d'information était chargée de proposer des solutions afin d'accélérer la convergence du régime spécial minier avec le régime général. Son rapport, présenté par M. Yves Bur, est loin de faire l'unanimité, si ce n'est contre lui ! Et pour cause : M. Bur propose en réalité rien de moins qu'une liquidation pure et simple du régime spécial minier, en préconisant la renonciation aux principes fondamentaux de la médecine minière, à savoir la gratuité, la qualité et la proximité des soins.

La proposition de maintenir les dispositions du décret du 31 décembre 2009, que nous avons déjà maintes fois dénoncées, constitue par exemple une véritable provocation à l'égard des affiliés du régime, qui vont voir disparaître la gratuité de nombreuses prestations, comme les transports ou les cures.

Dans le même esprit, alors que le bassin houiller lorrain a déjà subi l'an passé la fermeture de près de la moitié des centres de soins, les préconisations du rapport visent à affaiblir les organismes régionaux du régime minier.

Ces propositions démontrent une grande méconnaissance des réalités et des besoins des populations dans les bassins miniers. Les élus locaux ne s'y sont d'ailleurs pas trompés. De nombreuses communes du bassin houiller et ferrifère de Moselle ont adopté des motions condamnant le rapport Bur, le plus souvent à l'unanimité des membres des conseils municipaux.

Les défenseurs des droits des mineurs voient en effet dans les conclusions de ce rapport une véritable insulte à la mémoire minière et à tous ceux qui ont payé un lourd tribut au redressement de la France après-guerre : certains mineurs ont perdu la vie, la majorité d'entre eux ont développé de nombreuses affections graves et invalidantes.

En suivant les conclusions de ce rapport, vous ne manqueriez pas, madame la secrétaire d'État, de susciter l'indignation de tous ceux qui n'acceptent pas de voir progressivement remis en cause les acquis sociaux d'une population particulièrement fragile, au nom de la lutte contre les déficits sociaux.

Il paraît au contraire essentiel de continuer à défendre aujourd'hui ces principes fondamentaux de la médecine minière que sont la gratuité, l'équité et la proximité. Ces derniers doivent perdurer et être garantis jusqu'à la fin du régime, lequel s'éteindra naturellement dans quelques années.

Toute autre décision non concertée ne pourra être interprétée que comme l'expression d'un véritable et incompréhensible acharnement, venant renforcer un sentiment d'abandon déjà très prégnant dans le bassin houiller mosellan.

C'est pourquoi, madame la secrétaire d'État, j'aimerais que vous nous fassiez part aujourd'hui publiquement de votre intention d'opposer une fin de non-recevoir aux recommandations provocatrices et injustes du rapport de M. Bur. J'aimerais tout particulièrement connaître la position du Gouvernement concernant l'abrogation du décret n° 2009-1787 du 31 décembre 2009.

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Nora Berra, secrétaire d'État auprès du ministre du travail, de l'emploi et de la santé, chargée de la santé. Monsieur le sénateur, je vous prie de bien vouloir excuser M. Xavier Bertrand, ministre du travail, de l'emploi et de la santé, qui m'a chargée de vous transmettre sa réponse.

Le 21 décembre dernier, M. Yves Bur a effectivement remis à M. Xavier Bertrand le rapport que lui avait demandé Mme Roselyne Bachelot-Narquin sur l'avenir du régime de sécurité sociale minier.

Monsieur le sénateur, le ministre du travail ne partage pas votre avis sur le rapport de M. Bur, dont il tient au contraire à souligner la qualité. Il en retient pour sa part les trois idées centrales suivantes.

Premièrement, l'offre de soins du régime minier est indispensable et doit être préservée. Elle est notamment très implantée dans des bassins défavorisés et sous-équipés, dans le Nord et l'Est.

Deuxièmement, pour préserver cette offre de soins, il faut agir. Cela signifie réformer le régime et la gestion de l'offre. La situation financière est très délicate, comme le montre le rapport. En plusieurs endroits, les difficultés financières menacent la pérennité des établissements gérés par le régime. Il faut avoir le courage de regarder la réalité en face.

Troisièmement, il n'est pas question de remettre en cause les acquis du régime minier, en particulier la gratuité des soins, et les acquis du statut minier pour les personnels du régime. Ces principes seront pleinement pris en compte dans les solutions qui seront préconisées.

Par conséquent, M. le ministre engagera, comme il l'a annoncé le 21 décembre, une concertation sur la base du rapport du député Yves Bur, en y associant tant les organisations syndicales du régime que les élus locaux. Leur avis sera précieux sur ce sujet important.

M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Todeschini.

M. Jean-Marc Todeschini. Je remercie Mme la secrétaire d'État de m'avoir fait part de la réponse de M. Xavier Bertrand.

On nous annonce une vaste concertation, mais je peux d'ores et déjà affirmer que l'ensemble des élus locaux, y compris ceux de l'UMP, ont une position différente de celle du Gouvernement ! Je ne suis pas hostile par principe à une telle concertation, associant les élus locaux, les organisations syndicales et les ressortissants du régime, mais je sais trop bien que, en général, « modernisation » signifie « fermetures et restrictions »… Il sera de plus en plus difficile aux personnes concernées d'accéder aux soins si les structures de soins ferment, dans la mesure où elles ne peuvent consulter que des praticiens agréés ! Pour cette population, le facteur éloignement joue beaucoup, comme on a déjà pu le voir par le passé. J'espère que l'on entendra les acteurs de terrain !

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