Question de Mme HERMANGE Marie-Thérèse (Paris - UMP) publiée le 05/11/2010

Question posée en séance publique le 04/11/2010

Mme Marie-Thérèse Hermange. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.

Le terrible attentat perpétré contre les chrétiens d'Irak a bouleversé l'ensemble de nos concitoyens, parce que la protection des chrétiens d'Orient est une mission traditionnelle de la France et parce que cet acte a frappé une communauté historique et autochtone qui ne combat que pour vivre en paix chez elle.

En pleine célébration, à la veille de l'une des fêtes des plus solennelles pour les chrétiens, les armes ont parlé. Désormais c'est à une autre parole de s'exprimer : celle de la paix et du dialogue, pour rétablir la confiance et la coexistence civiles.

Aujourd'hui, l'avenir de cette population et, à travers elle, de la démocratie dans ce pays ne peut laisser la France indifférente, compte tenu de la position que nous avons prise dans le débat sur l'intervention militaire en Irak.

Les chrétiens fuient en masse, et la France les accueille chaleureusement. Toutefois, dans la mesure où il s'agit de la sécurité de ces citoyens et du respect des libertés fondamentales, ce débat, nous semble-t-il, doit être porté à un autre niveau, au-delà de la seule hospitalité.

Il doit être porté, tout d'abord, dans la sphère internationale. Ne pensez-vous pas que la saisine de l'ONU, voire de son Conseil de sécurité, s'impose ? La France est-elle prête à y défendre cette parole ?

Il doit être porté, ensuite, à l'échelle européenne. Au moment où l'Union européenne met en place le Service européen pour l'action extérieure, la France est-elle prête à encourager une démarche commune, pour que l'Europe montre sa capacité d'action et défende les libertés fondamentales ?

Il doit être porté, enfin, au niveau irakien. Dans la mesure où ces communautés sont vivantes et liées aux autres, la France doit tout mettre en œuvre pour soutenir le tissu social qu'elles ont constitué.

Ne convient-il pas, dès lors, que notre pays recense les projets de soutien aux écoles, hôpitaux, universités, commerces et entreprises qu'il est susceptible d'aider au travers de l'aide au développement et du commerce extérieur, en liaison avec l'État irakien ?

La présence des chrétiens en Irak est un vecteur de paix pour l'Orient, mais aussi pour le monde. La France, sous l'autorité du Président de la République, est-elle prête à relever ce défi, pour que cette communauté historique et autochtone puisse, tout simplement, continuer à vivre chez elle ? (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste.)

M. Christian Poncelet. Très bien !

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Réponse du Ministère des affaires étrangères et européennes publiée le 05/11/2010

Réponse apportée en séance publique le 04/11/2010

M. Bernard Kouchner, ministre des affaires étrangères et européennes. Madame la sénatrice, le 31 octobre dernier, c'est un acte odieux et barbare qui a été perpétré. Ce n'était pas le premier, hélas ! en Irak. Il a frappé, dans l'église syriaque de Bagdad, des chrétiens qui assistaient à la messe. Il y eut 50 morts, vous le savez, et le retentissement mondial que cet acte a connu nous impose, une fois de plus, de réagir.

Comment faire ? Tout d'abord, il faut faire face à l'urgence. Ce matin, j'ai reçu les représentants des communautés chrétiennes d'Orient, qui nous demandent de prendre en charge une vingtaine de blessés graves. Nous sommes en train de le faire : ceux-ci seront traités dans les hôpitaux parisiens.

M. Christian Poncelet. Très bien !

M. Bernard Kouchner, ministre. Cette aide était élémentaire. Que pouvons-nous faire d'autre ? Comme vous l'avez montré à juste titre, madame la sénatrice, et je ne reprendrai pas tous vos arguments à cet égard, les chrétiens font partie de l'histoire de ce pays. Avant le dernier conflit, qui aujourd'hui s'éternise, ils étaient d'ailleurs très nombreux, plusieurs centaines de milliers. Désormais, personne ne peut dire s'ils sont seulement 300 000.

En tout cas, nous ne pouvons, hélas ! les protéger un par un. Aussi, vous avez raison de demander une démarche européenne. Celle-ci sera engagée. J'ai d'ores et déjà demandé que ce sujet soit abordé au plus vite par les vingt-sept pays de l'Union européenne et que Mme Catherine Ashton puisse réagir.

Toutefois, comment faire ? Devons-nous suspendre la coopération avec l'Irak que nous avons engagée ? Celle-ci est tournée très majoritairement, et même presque complètement, vers la formation de la police, des juges et du système judiciaire. Il ne convient donc pas de la supprimer.

Peut-on protéger, comme vous le souhaitez, madame la sénatrice, les écoles chrétiennes, les centres communautaires et les églises ? C'est au Gouvernement irakien de le faire. Nous lui demanderons d'y veiller, mais nous ne pouvons nous en charger nous-mêmes, hélas !

Pouvons-nous nous tourner vers les Nations unies ? Nous nous efforcerons de le faire, en proposant au Conseil de sécurité un débat sur la situation en Irak.

En effet, avec tout le respect que je dois à votre démarche, madame la sénatrice, je suis au regret de vous rappeler que cet attentat n'est pas le premier commis en Irak et que d'autres communautés ont été frappées plus lourdement encore. Je le déplore, mais c'est la réalité. Toutefois, nous formulerons une telle demande à propos de la situation en Irak et nous verrons bien ce qui en résultera.

Sur le fond, il n'est pas question de renoncer à accueillir les chrétiens d'Irak. Brice Hortefeux, Éric Besson et moi-même avons créé depuis 2008 des centaines de places d'accueil dans cette perspective et nous sommes prêts à continuer à le faire.

Toutefois, ce n'est pas la solution. Les autorités irakiennes, ou du moins la communauté chrétienne d'Irak, nous demandent au contraire, comme vous l'avez suggéré, madame la sénatrice, d'engager une démarche internationale, au nom des droits de l'homme et de la liberté de culte. Nous nous y attellerons avec acharnement. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste.)

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