Question de M. ANZIANI Alain (Gironde - SOC) publiée le 18/03/2010

M. Alain Anziani appelle l'attention de Mme la ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés, sur les conséquences de la surpopulation carcérale et sur la nécessité d'adopter des normes strictes pour garantir un espace de vie minimal aux personnes détenues.

La surpopulation carcérale est aujourd'hui le principal facteur de détérioration des conditions de détention. Au 1er octobre 2009, le nombre des personnes écrouées détenues en métropole et outre-mer s'élevait à 61.781, pour 53.764 places opérationnelles, soit un taux d'occupation de 114,9 %. La diminution du taux de suroccupation des établissements en 2009 ne doit pas masquer les disparités importantes entre établissements. Ainsi, au 1er octobre 2009, 11 établissements pénitentiaires présentaient une densité supérieure ou égale à 200 % et 33 une densité comprise entre 150 % et 200 %.

En outre, il souligne que ces chiffres ne reflètent en rien le respect du principe d'encellulement individuel consacré par la loi pénitentiaire du 24 novembre 2009. En effet, ils sont calculés en fonction de la capacité opérationnelle de l'établissement, qui est déconnectée du nombre effectif de cellules, et sous-estiment par conséquent le phénomène de densité carcérale. Ces critères de calcul sont fixés par la circulaire du 17 mars 1988 relative aux capacités des établissements pénitentiaires. Par exemple, une cellule dont la surface est comprise entre 11 m² et 14 m² compte pour deux places, et une cellule de 49 à 54 m² compte pour 10 places.
Durant la période d'exécution du moratoire de 5 ans sur l'encellulement individuel institué par l'article 100 de la loi pénitentiaire, il estime indispensable l'édiction de normes règlementaires strictes régissant l'encellulement individuel. Il s'agit notamment de rendre effectif l'article 716 du code de procédure pénale, régissant l'encellulement collectif, qui précise que « lorsque les personnes mises en examen, prévenus et accusés sont placés en cellule collective, les cellules doivent être adaptées au nombre des personnes détenues qui y sont hébergées. (...) Leur sécurité et leur dignité doivent être assurées ».
Dans cette perspective, les critères retenus par la circulaire de 1988 apparaissent tout à fait obsolètes. Il est indigné du fait que, pour des cellules dont la superficie est supérieure à 45 m², l'espace vital pour chaque personne détenue est inférieur aux 5 m² rendus obligatoires pour les chiens de chenil par l'arrêté du 25 octobre 1982 relatif à l'élevage, la garde et la détention des animaux.

Les cellules collectives ne sont pas seules concernées par ce non-respect pour des personnes humaines de normes appliquées aux animaux. Ainsi, l'Observatoire international des prisons note qu'à la prison de Vars en Isère, la superficie des cellules du quartier disciplinaire est de 4,5 m².

Cette comparaison met crûment en lumière les atteintes à la dignité des personnes en milieu carcéral. Cette surpopulation fait disparaître toute notion d'intimité. Le rapport 2008 du Contrôleur général des lieux de privation de liberté donnait ainsi l'exemple d'une cellule de 10,5 m² avec trois lits et un matelas au sol.

De telles conditions de détention sont incompatibles avec l'objectif de réinsertion fixé à l'administration pénitentiaire. Comme le note le Contrôleur dans son rapport pour 2009, les personnes détenues « sortent rarement de ces lieux autrement que brisées ou révoltées ». Considérant qu'il doit être mis fin immédiatement à ces situations, il souhaite qu'elle édicte, par voie réglementaire, des normes d'occupation des cellules plus respectueuses de la dignité humaine.

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Réponse du Ministère de la justice publiée le 22/07/2010

Depuis son arrivée au ministère de la justice et des libertés, l'amélioration des conditions de détention des personnes détenues est une priorité du ministre d'État. Elle doit répondre aux ambitions et aux objectifs de la politique pénitentiaire engagée. Au 1er juin 2010, le nombre de personnes écrouées détenues s'élevait à 61 656 pour une capacité opérationnelle de 56 793 places alors que au 1er juin 2009, le rapport était de 63 277 personnes détenues pour 53 024 places. La baisse constatée en un an est d'environ 2,6 %. Les actions engagées par le ministre d'État pour lutter contre la surpopulation carcérale et améliorer les conditions de détention sont de deux ordres : d'une part, la construction de nouveaux établissements pénitentiaires offrant des conditions d'hébergement conformes aux règles pénitentiaires européennes et aux prescriptions de la loi pénitentiaire adoptée le 24 novembre 2009 ; d'autre part, la mise en oeuvre d'une politique de développement des peines alternatives à l'incarcération. Ainsi, un programme immobilier de très grande ampleur est mené depuis 2002 qui a permis la construction ou la rénovation de 25 établissements. Le nombre de place d'hébergement sera de 62 000 d'ici à 2014, permettant de diminuer sensiblement la densité carcérale. Un nouveau programme immobilier est en cours d'élaboration. Il doit permettre de poursuivre la mise à niveau des établissements pénitentiaires. Par ailleurs, 5 000 places supplémentaires nettes seront créées, comme l'a annoncé le Président de la République. Ce nouveau programme permettra de répondre aux prescriptions de la loi pénitentiaire : il garantit un taux d'encellulement individuel de 95 % ; il permet le développement des activités : l'objectif est de proposer cinq heures d'activités par jour à chaque détenu ; il assure le maintien des liens familiaux : chaque établissement sera doté d'unités de vie familiale et/ou de parloirs familiaux, ce qui permettra à chaque détenu de bénéficier d'un parloir de ce type par trimestre comme le prévoit la loi ; les unités de consultations et de soins ambulatoires (UCSA) seront développées pour la prise en charge des détenus présentant des troubles mentaux ; conformément à la loi, le régime de détention sera adapté à la personnalité du détenu, qui sera évaluée dès son entrée dans l'établissement. Cette différenciation se déclinera sous la forme de quartiers en mode ouvert ou en mode fermé. Parallèlement à cet ambitieux programme immobilier, la loi pénitentiaire poursuit sa politique de développement des aménagements de peine, et favorise le développement des alternatives à la détention. Le nombre de condamnés concernés par les aménagements de peine est élargi, les conditions d'octroi sont assouplies et la procédure simplifiée. De même, la loi pénitentiaire étend le placement sous surveillance électronique fixe et mobile pour les prévenus avant le procès. Ainsi, l'ensemble de ces dispositions va contribuer à désengorger progressivement les établissements pénitentiaires et à rendre les conditions d'hébergement en adéquation avec la réglementation en vigueur.

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