Question de M. TROPEANO Robert (Hérault - RDSE) publiée le 29/10/2009
M. Robert Tropeano attire l'attention de M. le ministre d'État, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat, sur la lutte contre les macro-déchets de notre littoral dans le cadre du « Grenelle de la mer ».
La fréquentation touristique maritime de la dernière saison estivale confirme l'inquiétude de nombreux élus locaux, ainsi que de l'ensemble des associations environnementales, sur l'état de pollution de nos côtes et de nos fonds marins.
Cette année encore, les nuisances, le plus souvent irrémédiables, provoquées par les rejets en mer de macro-déchets (plastiques, verres, cannettes en aluminium
) démontrent l'impérieuse nécessité de mettre en place des mesures fortes pour protéger notre précieux patrimoine maritime. Selon l'Ifremer, on estime que plus de 540 millions de tonnes de déchets plastiques encombrent les fonds marins européens, la mer Méditerranée étant de loin la mer la plus polluée avec plus de 300 millions de tonnes de déchets ! À titre d'exemple, les déchets plastiques - pour ne citer que cette catégorie de déchets - représentent entre 60 et 95 % des macro-déchets, avec une biodégradabilité polluante située entre 100 et 500 ans.
Or les zones les plus gravement touchées par cette pollution insidieuse et dramatique pour les écosystèmes sont notamment les zones de mouillage et, paradoxalement, les réserves naturelles marines. Et le développement de la navigation de plaisance constitue aujourd'hui un facteur aggravant.
Dans le cadre du « Grenelle de la mer » mis en place par le Gouvernement depuis le printemps 2009, la lutte contre les macro-déchets apparaît comme une des priorités, avec l'objectif de promouvoir et favoriser les éco-gestes maritimes.
Aussi, face à l'insuffisance des campagnes de communication pour tenter de prévenir ce phénomène destructeur, l'élaboration de normes tendant à traiter le problème à la source, avec la prévention du rejet de centaines de milliers de tonnes de déchets par des millions de plaisanciers (loisirs, pêche occasionnelle, etc), apparaît inévitable. Par exemple, la présence de collecteurs flottants de déchets domestiques dans les zones de mouillage et les réserves naturelles marines, au même titre que la présence de poubelles dans nos communes, semble une piste intéressante à étudier.
Dans le cadre des textes réglementaires prochainement issus du « Grenelle de la mer » et conformément aux souhaits de nombreuses associations environnementales, il lui demande quelles mesures le ministère a l'intention de mettre en œuvre pour lutter contre le fléau des macro-déchets sur nos côtes maritimes.
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Réponse du Secrétariat d'État au logement et à l'urbanisme publiée le 16/12/2009
Réponse apportée en séance publique le 15/12/2009
M. Robert Tropeano. Monsieur le secrétaire d'État, la Conférence des parties à la convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques, qui se déroule actuellement à Copenhague, revêt une importance fondamentale pour sauvegarder l'équilibre climatique de notre planète et, par voie de conséquence, pour anticiper les bouleversements écologiques majeurs qui ne manqueront pas de se produire dans les trente prochaines années.
C'est l'occasion pour l'ensemble de la communauté scientifique, ainsi que pour les élus et les associations de protection de l'environnement, d'attirer plus particulièrement l'attention sur l'état de pollution de plus en plus inquiétant de nos mers et océans.
Grâce à l'importance de son littoral, tant en métropole qu'outre-mer, la France possède la plus grande surface maritime au monde. La saison estivale vient à peine de s'achever que les élus locaux et les associations tirent, une fois de plus, la sonnette d'alarme sur l'état de délabrement de nos côtes et fonds marins.
Les chiffres établis par les structures scientifiques parlent d'eux-mêmes. L'IFREMER, l'Institut français de recherche pour l'exploitation de la mer, estime à plus de 540 millions de tonnes le poids des déchets plastiques qui encombrent les fonds marins européens, la mer Méditerranée étant de loin la mer la plus polluée.
Ce type de déchets représente entre 60 % et 95 % des macro-déchets, avec une biodégradabilité polluante située entre 100 et 500 ans ; viennent, ensuite, les déchets en verre et en métal. Sur le plan écologique, l'accumulation menace l'écosystème sous-marin en empêchant le renouvellement des biotopes et en provoquant la mort par étranglement ou étouffement de grands organismes marins tortues, cétacés, thons , ainsi que de milliers d'oiseaux en surface.
Or le développement de la navigation de plaisance constitue, aujourd'hui, un facteur aggravant : la France compte plus de 900 000 bateaux immatriculés et, chaque année, quelle que soit la conjoncture économique, 25 000 nouvelles immatriculations sont enregistrées ; c'est, au fil des ans, autant de pollution supplémentaire !
Monsieur le secrétaire d'État, au printemps dernier, le Gouvernement a lancé le processus du « Grenelle de la mer », qui devait aboutir à l'élaboration de normes réglementaires visant à assurer une gestion de la mer plus efficace et plus respectueuse de l'environnement.
Il est impératif que, dans ce cadre, soient promus les éco-gestes et la responsabilisation des comportements individuels. Les campagnes de communication locales et nationales ne suffisant pas à endiguer ce phénomène destructeur, il est urgent de traiter le problème à la source, c'est-à-dire en prônant l'arrêt des rejets en mer de centaines de milliers de tonnes de déchets.
La solution la plus efficace, la plus simple et la moins coûteuse serait la mise en place de collecteurs flottants de déchets domestiques dans les zones de mouillage et les réserves naturelles marines. Déjà utilisés par certaines collectivités et personnes morales en charge de la collecte des déchets, ces collecteurs ont démontré leur efficacité en permettant la récupération massive de milliers de tonnes de détritus.
Monsieur le secrétaire d'État, ma question est donc la suivante : dans le cadre des normes prochainement édictées, le Gouvernement envisage-t-il de généraliser l'implantation de tels collecteurs flottants ? En effet, la mer n'est pas une poubelle !
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Benoist Apparu, secrétaire d'État chargé du logement et de l'urbanisme. Monsieur le sénateur, la gestion des macro-déchets du littoral est une question complexe. Derrière ce terme générique se cachent des déchets de natures, de tailles et d'origines variées, dont 80 % proviennent de la terre.
La réduction de leur impact environnemental nécessite, par conséquent, la mise en uvre d'actions complémentaires, en matière aussi bien de prévention de la production de ces déchets, dont les différentes sources sont identifiées, que de développement de filières adéquates de collecte et de traitement.
Menée dans le cadre du Grenelle de l'environnement au sein du comité opérationnel chargé de la question des déchets, la réflexion sur les macro-déchets s'est poursuivie de décembre 2008 à mai 2009 par le biais d'un groupe de travail spécifique, dont les travaux ont abouti à la rédaction d'un plan de réduction et de gestion des macro-déchets flottants, repris dans l'engagement 67 du Grenelle de la mer.
Les mesures retenues, qu'elles soient de nature législative ou réglementaire, portent à la fois sur la sensibilisation du grand public, la recherche et l'innovation, notamment en matière de gestion des déchets portuaires, la connaissance qualitative et quantitative des différents types de macro-déchets. Il s'agit plus particulièrement de prendre en compte dans les outils de planification les zones d'accumulation de ces déchets, pour être en mesure de les traiter.
Au-delà des aspects techniques se pose également la question du mode de financement et de la responsabilité de la prise en charge de ces déchets.
En effet, l'impossibilité de remonter jusqu'aux pollueurs et les distances importantes parcourues par les déchets obligent à développer des approches innovantes. Les travaux du groupe de travail sur les macro-déchets flottants ont permis de développer la notion de solidarité amont-aval : l'objectif est de responsabiliser les acteurs en amont dans le traitement des déchets accumulés en aval. À cette fin, l'engagement 95b du Grenelle de la mer prévoit la création d'un fonds de solidarité fondé sur le principe pollueur-payeur. Un groupe de travail chargé de la mise en uvre de cet engagement sera prochainement constitué et devrait remettre ses conclusions avant le printemps 2010.
Monsieur Tropeano, le Gouvernement encourage les gestionnaires des ports et des zones de mouillage à mettre en place des collecteurs flottants de déchets lorsque cela s'avère pertinent. Si la gestion spécifique de ces déchets est une nécessité, elle ne relève pour autant pas de la loi, pas plus, en tout cas, que l'installation des poubelles dans les rues.
M. le président. La parole est à M. Robert Tropeano.
M. Robert Tropeano. Monsieur le secrétaire d'État, je vous remercie de votre réponse. La mise en place de collecteurs flottants est une solution simple et évidente, qui, de surcroît, ne coûterait rien aux collectivités et permettrait d'apaiser le mécontentement des pêcheurs professionnels. Ces derniers se plaignent en effet avec force, leurs prises étant aux deux tiers polluées par les plastiques.
La prolifération des méduses sur nos côtes est l'une des conséquences directes de cette pollution, puisque leurs principales prédatrices, les tortues, meurent étouffées par les plastiques. Parallèlement, la faune marine fragile, notamment les dauphins, souffre d'occlusion intestinale.
En matière de dépollution de la mer, il est très important que la France, dotée du territoire maritime le plus vaste au monde, donne l'exemple.
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