Question de M. MOULY Georges (Corrèze - RDSE) publiée le 22/11/2007
M. Georges Mouly rappelle à M. le ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité que la garde d'enfants est une préoccupation majeure de nos concitoyens, désireux de concilier vie professionnelle et vie familiale. C'est également un véritable défi pour les élus locaux, notamment en zone rurale où il est nécessaire de mettre en œuvre des solutions innovantes, offrant des réponses en terme de souplesse et de proximité.
C'est pourquoi l'une des mesures phares du plan « petite enfance » 2007-2012 est particulièrement intéressante de ce point de vue : il s'agit de la création de « micro-crèches ».
Cependant, dans un contexte budgétaire contraint, et plus particulièrement pour les départements ruraux comme la Corrèze, la mise en œuvre d'actions publiques volontaires et dynamiques, en réponse à l'attente des habitants de ces territoires, le développement de ces structures expérimentales doit mériter une attention particulière de l'État, dans le cadre d'une politique des territoires fondée sur la cohésion sociale.
Quels soutiens spécifiques de l'État peuvent être attendus dans ces territoires ruraux pour accompagner et développer ces « mini-crèches »?
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Réponse du Secrétariat d'État chargé de la solidarité publiée le 19/12/2007
Réponse apportée en séance publique le 18/12/2007
M. le président. La parole est à M. Georges Mouly, auteur de la question n° 112, adressée à M. le ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité.
M. Georges Mouly. Madame la secrétaire d'État, lors de la dernière campagne pour l'élection présidentielle, un droit opposable à la garde d'enfant a été évoqué. Le problème est délicat, tant d'un point de vue juridique que d'un point de vue politique. Un droit opposable, certes, mais opposable à qui ? La question peut se poser.
Lors de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale, M. Éric Woerth a bien souligné la nécessité d'engager un effort en direction des familles les plus modestes afin d'offrir le plus grand choix possible dans les modes de garde. C'est bien, mais le reste à charge pour la garde d'enfant est encore trop dissuasif pour bien des familles ! À titre d'exemple, seuls 3 % des enfants des familles percevant un minimum social sont gardés en crèche.
Parmi les 2,1 millions d'enfants de trois mois à trois ans, 700 000 sont gardés par les parents ou les grands-parents et 1 million par des assistantes maternelles ou des structures d'accueil. Les 400 000 restants n'ont pas de solution pérenne ou satisfaisante, les parents ayant alors recours « au système D ».
Il est aujourd'hui urgent de développer des modes de garde moins chers et plus faciles à mettre en oeuvre que les structures collectives. C'est également opportun, notamment dans les territoires ruraux.
Le plan « petite enfance » présenté par le précédent gouvernement s'est résolument placé au service des familles. Prévu pour cinq ans, il a pour objectif d'augmenter et de diversifier une offre de garde de qualité afin d'aider les familles à concilier vie professionnelle et vie familiale, ce qui est le fond du problème. Une collectivité locale pourra ainsi proposer à des assistants maternels de se regrouper dans un même lieu pour accueillir de trois à neuf enfants.
Évidemment, les structures collectives doivent pouvoir rester une réponse complémentaire. Les difficultés qu'elles rencontrent en raison d'une accélération des dépenses, notamment à cause du paiement à l'heure des assistantes maternelles, alors que les CAF - les caisses d'allocations familiales - plafonnent leurs prestations de service, doivent être examinées avec attention afin de contribuer à garantir les réponses que ces structures apportent aux familles, surtout dans les zones urbaines.
Pour ce qui concerne les territoires ruraux, le dispositif des « mini-crèches » est particulièrement intéressant, d'autant que la scolarisation des enfants de moins de trois ans reste aléatoire dans la mesure où elle ne constitue pas une obligation. Quand les possibilités existent, elles sont souvent mises en oeuvre à temps partiel.
La souplesse du dispositif « mini-crèches » permet de constituer un maillage territorial, évolutif en fonction des besoins, fédérateur pour les familles et les assistantes maternelles dont l'isolement est ainsi rompu.
Dans mon département - il n'en a certes pas le monopole -, la garde d'enfant est une préoccupation majeure. Le mode de garde par des assistantes maternelles à domicile est privilégié. Ainsi, un site internet dédié centralise les possibilités d'accueil et présente les projets d'accueil des assistantes maternelles à qui le département offre un outil pédagogique, véritable guide de la profession. L'accueil de la petite enfance est ici une politique volontariste où la création de mini-crèches pourra utilement compléter les dispositifs existant : crèche collective, accueil à domicile, halte-garderie itinérante.
Néanmoins, dans un contexte budgétaire contraint, les initiatives des collectivités locales sont quelque peu bridées. Les mini-crèches sont certes moins onéreuses, mais leur création et leur fonctionnement nécessitent un effort financier. Un autre écueil à contourner est l'agrément des assistantes maternelles. L'obligation d'une formation préalable de soixante heures a un coût et n'est pas particulièrement incitative pour générer « les vocations ». Pourquoi ne pas envisager une formation « continue » ?
Le processus de décentralisation a le mérite de permettre l'adaptation de l'organisation des politiques publiques aux réalités locales. L'accueil des populations est un défi majeur des territoires ruraux, qui doivent pouvoir offrir des réponses aux besoins quotidiens des familles, des réponses en termes de souplesse et de proximité. L'offre de modes de garde de qualité et diversifiés est l'une d'entre elle, notamment pour les familles de jeunes actifs ; la micro-crèche est une réponse adaptée à la ruralité.
Madame la secrétaire d'État, quels soutiens spécifiques l'État peut-il apporter pour accompagner et développer ces mini-crèches dans le cadre d'une politique des territoires fondée sur la cohésion sociale ? Plus généralement et de façon pragmatique, afin d'offrir des solutions dans les meilleurs délais, n'est-il pas possible d'inciter les collectivités locales à développer très fortement les structures d'accueil, dont le déficit est patent et la répartition territoriale inégale, par une politique d'aide à la création et au fonctionnement ?
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Valérie Létard, secrétaire d'État chargée de la solidarité. Monsieur le sénateur, le milieu rural connaît une situation de sous-équipement pour la garde des jeunes enfants. Cette situation, que vous connaissez bien, résulte d'une conjonction d'éléments structurels défavorables tels que la faible densité de population ou le manque d'infrastructures comme les écoles maternelles, par exemple.
Il est donc indispensable de proposer des solutions de garde qui soient adaptées aux besoins des familles tout en respectant le rythme de vie de l'enfant. Le développement des crèches en milieu rural n'est pas forcément la solution la plus adaptée eu égard au faible effectif d'enfants concernés. Il me semble que les structures plus individualisées telles que les relais d'assistantes maternelles, les haltes-garderies ou les structures multi-accueil correspondent davantage aux attentes des familles.
Un effort financier significatif a été effectué par l'État et la Caisse nationale des allocations familiales pour le financement de l'investissement et du fonctionnement des structures d'accueil avec une prise en compte des difficultés financières des communes. Vous le savez, elles sont nombreuses à être dans ce cas dans les territoires ruraux.
S'agissant de l'investissement, plusieurs fonds ont été ouverts depuis 2000. Depuis 2003, une approche novatrice a consisté à majorer l'aide octroyée en cas de création de places dans une commune rurale. Ce ciblage, prenant la forme d'une majoration des aides, se retrouve dans les plans d'investissement qui ont suivi. Il sera à l'avenir conforté, car il est source d'efficacité et d'équité.
En ce qui concerne le fonctionnement, la répartition des enveloppes financières des contrats « enfance et jeunesse » est effectuée en fonction du taux de couverture des besoins et du potentiel fiscal des communes de telle sorte que les territoires les moins bien dotés soient favorisés. J'ajoute que la loi de financement de la sécurité sociale a prévu de majorer le complément de mode de garde de la prestation d'accueil du jeune enfant pour permettre aux familles les plus modestes de pouvoir choisir, avec un reste à charge équivalent, entre la crèche et une assistante maternelle, ce qui n'était pas le cas jusqu'à présent.
Dans le prolongement de cette approche de rééquilibrage entre les territoires, l'État a autorisé la Caisse nationale des allocations familiales à inscrire, dans son budget d'action sociale de l'année 2007 et 2008, un fonds d'accompagnement des contrats « enfance et jeunesse ». Doté de 20 millions d'euros, il est destiné à faciliter la mise en oeuvre de ces nouveaux contrats par la prise en charge de mesures ponctuelles, par exemple des travaux d'investissement. Ces aides visent les circonscriptions de CAF ayant un taux important de familles en situation précaire et comprenant une majeure partie de leur territoire en zone de revitalisation rurale ou en zone urbaine sensible.
Il était aussi nécessaire d'adapter les modes d'accueil des structures collectives pour prendre en compte les contraintes des familles dans les petites communes rurales ; vous avez d'ailleurs évoqué ce point. C'est ainsi que nous avons prévu la possibilité de créer, à titre expérimental, des « micro-crèches » qui rassemblent en un même lieu plusieurs assistantes maternelles. Ces structures suscitent un fort engouement, et plusieurs projets devraient aboutir dans les prochaines semaines.
Au total, vous l'avez noté, monsieur le sénateur, les spécificités du milieu rural sont bien prises en compte dans notre action au profit des familles. Nous conforterons cet effort de ciblage dans le cadre du droit opposable à la garde d'enfants, sur lequel s'est engagé le Président de la République.
À l'occasion de la conférence sur l'égalité professionnelle, les partenaires sociaux ont largement débattu de cette question. Ils ont souhaité continuer à réfléchir sur l'ouverture de crèches en horaires décalés pour les gens qui travaillent plus tard le soir, sur les modes de garde alternative ou sur les crèches interentreprises. Ces dernières s'adressent à de petites entreprises qui n'auraient pas la surface nécessaire pour créer leur propre structure. Beaucoup d'entre elles se développent et des initiatives originales et très intéressantes commencent à voir le jour.
Nous devons encourager ces initiatives et voir comment les optimiser et les généraliser sur le territoire en retenant les meilleures et les plus efficaces. Essayons de tenir compte des réalités du terrain et de répondre à toutes les situations. En effet, notre territoire est différent dans sa ruralité, dans son urbanité, dans ses territoires intermédiaires. Nous devons prendre en considération ces dimensions. Tel est l'objectif du travail mené par Xavier Bertrand et par moi-même.
M. le président. La parole est à M. Georges Mouly.
M. Georges Mouly. Madame la secrétaire d'État, je souhaite avant tout vous remercier. En effet, vous confortez l'existant et vous tracez des perspectives dans le sens souhaité, c'est-à-dire avec la meilleure adaptation possible aux réalités du terrain, en particulier en milieu rural.
Votre réponse est très dense et comprend de nombreux éléments précis. À ma grande confusion, j'avoue que je découvre certaines réalités. Inutile de vous dire que je la relirai et que je la ferai lire à ceux qui, comme moi, sont sensibles à cette réalité sociale dans nos départements. Peut-être cela donnera-t-il lieu à d'autres rendez-vous.
En attendant, pour l'heure, je vous renouvelle mes remerciements.
M. le président. Madame la secrétaire d'État, à Marseille, nous avons des bébécars. Ce sont des bus qui stationnent à différents endroits et où les parents peuvent laisser leurs enfants pendant qu'ils font des courses ou qu'ils effectuent des formalités administratives. Je peux vous dire que c'est dur de créer des crèches !
Mme Valérie Létard, secrétaire d'État. En effet, c'est très difficile !
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