ROYAUME-UNI
I - L'EVOLUTION DU SYSTEME
A) LES PRINCIPES FONDATEURS
Le
système de protection sociale britannique actuel remonte à la
publication en 1942 du rapport "
social insurance and allied
services
" de Lord William Beveridge.
De ce rapport se sont dégagés les grands principes de la
sécurité sociale
: universalité,
généralité, unicité, uniformité des
prestations en espèces
.
Le système préconisé par Lord Beveridge a
été progressivement mis en place par plusieurs lois instituant :
- le système national d'allocations familiales (
Family Allowance
Scheme
), à partir de deux enfants, en 1945 ;
- le service national de la santé (
National Health Service,
N.H.S.
) financé par l'impôt, avec gratuité des soins,
en 1946 ;
- l'assurance nationale (
National Insurance
) octroyant la plupart des
prestations en espèces, également en 1946.
B) LES PRINCIPALES REFORMES
De 1948
à 1979, plusieurs réformes ont été
réalisées afin de nuancer le principe d'uniformité des
prestations et d'améliorer la situation des assurés tout en
tenant compte de la diversité des situations individuelles. Il s'agit
notamment de la création de nouvelles prestations sous condition de
ressources, de prestations partiellement proportionnelles pour les
salariés (indemnités journalières et allocations de
chômage) et de l'institution d'un régime de retraite
complémentaire obligatoire.
Par la suite, le gouvernement de Mme Thatcher n'a pas confirmé cette
tendance et a préféré revenir à des prestations
forfaitaires.
Parmi les mesures prises à cette époque figurent :
- la suppression de la gratuité systématique des
médicaments ;
- la prise en charge du versement des indemnités journalières par
les entreprises ;
- la refonte des régimes de retraite ;
- la simplification des prestations sous conditions de ressources.
Le 1er avril 1991 est entrée en application la réforme du N.H.S.
qui introduit dans le système de soins la
concurrence
dans le but
d'offrir au public des services plus efficaces. Ainsi, les
médecins
généralistes
regroupés en cabinet, et dont la
clientèle est d'au moins 7 000 patients, peuvent opter pour
l'attribution d'un
budget autonome
qui leur confère le droit de
négocier auprès des hôpitaux publics et privés les
prestations pour leurs patients. Dans les faits, cette disposition concerne
environ deux tiers des généralistes.
Cela leur donne le droit de recevoir directement des ressources
financières leur permettant d'acheter certaines prestations aux
hôpitaux et à d'autres services. Cette formule leur permet, d'une
part, de mieux contrôler les prestations de santé qui peuvent
être obtenues pour leurs patients et, d'autre part, d'assurer des soins
plus rapides et meilleurs qu'auparavant.
Les fonds dont disposent ces médecins peuvent servir non seulement
à l'achat de divers services et produits, y compris certains traitements
chirurgicaux et des soins infirmiers en dispensaire, mais également
à l'amélioration des locaux à usage professionnel,
à l'achat d'équipement...
Par ailleurs, ils peuvent utiliser les excédents budgétaires pour
embaucher du personnel de manière à entreprendre des
activités de prévention comme les vaccinations.
Quant aux hôpitaux, ils peuvent désormais s'organiser librement en
trusts et acquérir leur autonomie financière, leur financement
dépendant de leur capacité à vendre des services aux
généralistes.
Cette réforme a été complétée, en avril
1993, par une loi sur les
community
cares
qui
transfère la prise en charge des personnes âgées, des
handicapés... aux autorités locales et, en avril 1994, par une
hausse de 11,6 % du prix des médicaments.
C) LES CARACTERISTIQUES DU SYSTEME ACTUEL
La protection sociale britannique se subdivise en deux branches : celle des soins de santé , regroupant les prestations en nature, et celle de l' assurance nationale , qui sert l'ensemble des prestations en espèces.
1) Les soins de santé
Les
soins de médecine générale, les soins hospitaliers et tous
les soins dispensés par le N.H.S. sont gratuits pour toutes les
personnes résidant au Royaume-Uni. Une participation est exigée
pour les soins dentaires et les médicaments, mais de nombreuses
exceptions sont prévues.
Les lacunes et les dysfonctionnements croissants du N.H.S. ont cependant
conduit au développement du secteur privé. La médecine
privée ne donnant lieu à aucun remboursement, des assurances
privées se sont répandues afin de la prendre en charge. Elles
prennent principalement la forme de contrats de groupe souscrits par les
employeurs pour leur personnel d'encadrement.
2) L'assurance nationale
Le
régime d'assurance nationale est universel et a vocation à
couvrir l'ensemble de la population qui réside au Royaume-Uni :
salariés, travailleurs indépendants et non-actifs.
On peut distinguer trois grandes catégories de prestations :
- les prestations contributives qui regroupent les pensions de retraite,
d'invalidité, de veuvage, d'accidents du travail, les allocations de
chômage et les indemnités de maladie ;
- les prestations non contributives et non soumises à condition de
ressources, parmi lesquelles les allocations familiales, les prestations
destinées aux handicapés et les pensions militaires
d'invalidité ;
- les prestations non contributives et soumises à condition de
ressources, c'est-à-dire le revenu minimum, les allocations de logement
et la prise en charge des impôts locaux.
Comme dans le domaine des soins, depuis quelques années, la protection
sociale complémentaire privée s'est beaucoup
développée. Elle prend la forme de contrats d'assurances
privées offrant par exemple des compléments d'indemnités
journalières en cas de maladie, des capitaux-décès...
Par ailleurs, de plus en plus, l'Etat incite les salariés à
choisir un régime de retraite complémentaire privé et
à se constituer, de leur propre initiative, des plans d'épargne
retraite individuelle.
II - LES BENEFICIAIRES DE L'ASSURANCE NATIONALE
Si l'assurance nationale couvre toute la population, les assurés sont répartis, pour l'effort contributif en quatre catégories selon leur statut.
1) La catégorie n° 1
Elle
concerne les
salariés dont les revenus excèdent le seuil
hebdomadaire de 57 .
Les cotisations sont retenues directement par l'employeur sur le salaire
versé à l'employé.
Le taux des cotisations, salariales et patronales, varie selon la
rémunération. Pour les cotisations salariales, il y a un plancher
et un plafond, mais les cotisations patronales sont dues sur la totalité
du salaire.
Par ailleurs,
les cotisations, salariales et patronales, sont
réduites lorsque les employeurs ont choisi de financer la retraite
complémentaire en dehors du système national
public.
2) Les catégories n° 2 et n° 4
La catégorie n° 2 regroupe les travailleurs indépendants qui sont redevables d'une cotisation hebdomadaire fixe. Les travailleurs indépendants dont les revenus excèdent un certain seuil doivent payer des cotisations supplémentaires au titre de la catégorie n° 4.
3) La catégorie n° 3
Les cotisations de cette catégorie, payables par les salariés, les travailleurs indépendants ou les non-actifs sont des cotisations volontaires dont le montant hebdomadaire est fixe. Elles concernent surtout les personnes qui ne relèvent pas des autres catégories ou dont les cotisations ordinaires ne sont pas suffisantes pour l'ouverture du droit à certaines prestations contributives.
III - L'ORGANISATION ADMINISTRATIVE
Au
Royaume-Uni
, l'ensemble du système de protection sociale est
géré uniquement par l'Etat
, sans qu'interviennent les
partenaires sociaux.
Ainsi, c'est le
ministère de la santé
qui assure la
direction du N.H.S. Ce dernier, responsable des prestations en nature, et plus
particulièrement des services des soins de santé publique, est
administré en services d'hygiène au niveau des districts et des
régions.
Les services sociaux chargés d'assister les personnes
âgées, les handicapés..., bien que gérés par
les autorités locales, dépendent également du
ministère de la santé qui détermine leur politique,
établit des directives et en assure le contrôle.
Le
ministère de la sécurité sociale
est
chargé de l'assurance nationale qui regroupe l'ensemble des prestations
en espèces. Deux établissements publics nationaux, placés
sous l'autorité directe du ministre de la sécurité
sociale, la
Benefits Agency
et la
Contributions Agency
, sont
chargés de la collecte des cotisations et du versement des prestations.
C'est également le ministère de la sécurité sociale
qui a la tutelle des allocations de chômage, bien qu'elles soient
gérées et distribuées par les services du ministère
du travail, et des allocations logement, pourtant gérées par les
collectivités locales.
Seules les assurances vieillesse complémentaires échappent
totalement à la gestion étatique
. En effet, bien
qu'obligatoires, elles sont laissées au libre choix des futurs
retraités. Il s'agit donc dans ce cas particulier d'une gestion
concurrentielle.
IV - LE FINANCEMENT
En
dehors des allocations familiales financées directement par l'Etat,
trois fonds distincts sont utilisés pour financer les dépenses
sociales :
- le N.H.S., financé en majeure partie par l'impôt, fait
fonctionner l'ensemble du système de santé ;
- le fonds de consolidation, dont relèvent toutes les prestations non
contributives et celles soumises à condition de ressources, est
financé par l'impôt ;
- le fonds de l'assurance nationale, essentiellement financé par les
cotisations salariales et patronales, assure le versement des prestations
contributives.
Depuis le 1er avril 1995, les cotisations alimentant le fonds de l'assurance
nationale sont, par catégories d'assurés, les suivantes
:
1) Catégorie n° 1
|
Entreprises dont les salariés sont couverts par |
|||
|
le régime de retraite complémentaire public |
un régime de retraite complémentaire privé |
||
Salaire hebdomadaire |
Cotisations
|
Cotisations
|
Cotisations
|
Cotisations
|
de 58 à 104,99 |
|
3 % sur la totalité du salaire |
|
3 % sur la tranche allant de 0 à 58 |
de 105 à 149,99 |
2 % sur la tranche de 0 à 58 |
5 % sur la totalité du salaire |
2 % sur la tranche de 0 à 58 |
5 % sur
la tranche allant de 0 à 58
|
de 150 à 204,99 |
10 % au-delà |
7 % sur
la totalité
|
8,2 % au-delà |
7 % sur
la tranche allant de 0 à 58
|
|
|
10,2 % sur la totalité du salaire |
|
10,2 %
sur la tranche allant de 0 à 58
|
au-delà de 440 |
- |
10,2 % sur la totalité du salaire |
- |
10,2 %
sur la tranche allant de 0 à 58
|
2) Catégorie n° 2
Les non-salariés doivent verser un montant forfaitaire de 5,75 par semaine. Toutefois, ceux dont les revenus annuels sont inférieurs à 3 260 n'ont pas à payer de cotisations.
3) Catégorie n° 3
Qu'ils soient ou non salariés, les assurés de cette catégorie doivent verser une cotisation forfaitaire de 5,65 par semaine.
4) Catégorie n° 4
Les
assurés de cette catégorie sont les non-salariés dont les
revenus annuels excèdent 6 640 par an ; leur cotisation est de 7,3 %
des revenus compris entre 6 640 et 22 880 par an.
L'ensemble des cotisations est affecté indistinctement à tous
les risques couverts.
V - LES PRINCIPALES PRESTATIONS
Les prestations contributives en espèces sont imposables. La plupart des prestations non contributives ne le sont pas.
A) LES PRESTATIONS DE L'ASSURANCE MALADIE MATERNITE
1) Les prestations en nature
Il faut,
pour bénéficier du système de soins, se faire inscrire,
sans attendre d'être malade, auprès d'un médecin
généraliste agréé. Toute personne est libre de
choisir son médecin et de s'inscrire sur la liste de celui qu'elle
préfère. L'inscription est sanctionnée par la
délivrance d'une carte d'identité médicale qui marque
à la fois le droit d'être soigné par ce médecin et
l'impossibilité d'en consulter un autre, sauf urgence. On ne peut
changer de médecin que lors d'un déménagement ou avec
l'accord du conseil médical dépendant du N.H.S.
Un grand nombre de soins sont fournis gratuitement. C'est le cas de presque
tous les soins médicaux, à condition, pour les consultations de
spécialistes et les hospitalisations, qu'elles aient été
prescrites par le médecin généraliste. Cependant, dans
tous les hôpitaux du réseau N.H.S., des listes d'attente
d'hospitalisation sont établies.
Par ailleurs, une participation de 4,25 par médicament est
exigée. Toutefois, ceux-ci sont délivrés gratuitement :
- aux hommes de plus de 65 ans ;
- aux femmes de plus de 60 ans ;
- aux femmes enceintes ou qui ont un enfant de moins d'un an ;
- aux jeunes de moins de 16 ans ;
- aux personnes disposant de faibles ressources ;
- aux personnes qui souffrent de maladies graves.
Ces différentes catégories représentent environ deux tiers
de la population.
A l'exception des enfants et des étudiants qui bénéficient
des soins gratuitement, la participation aux frais dentaires est de 80 % avec
un plafond de 250 par traitement et les soins d'ophtalmologie ainsi que les
lunettes sont, sauf cas particuliers, entièrement à la charge des
intéressés.
2) Les prestations en espèces
a)
La maladie
Un salarié en arrêt de maladie a droit, après un
délai de carence de trois jours, et s'il remplit les conditions
requises, à des indemnités journalières de maladie.
Le versement de ces indemnités est effectué par l'employeur qui
se fait ensuite rembourser par l'assurance nationale. Elles peuvent être
versées pendant une durée globale de 28 semaines et sont
égales à 52,50 par semaine. Seuls les salariés ayant des
revenus supérieurs ou égaux à 58 par semaine peuvent en
bénéficier.
Les personnes qui ne bénéficient pas des indemnités
journalières de maladie (non-salariés, chômeurs,
retraités, personnes n'ayant pas suffisamment cotisé ou ayant des
revenus inférieurs à 58 ) peuvent percevoir un forfait,
directement versé par l'assurance nationale, pendant au maximum
28 semaines. Cette prestation varie généralement entre 44,40
et 52,50 par semaine. Elle est égale à 56,45 , pour les
femmes de plus de 60 ans et les hommes de plus de 65 ans. Son attribution est
subordonnée à des conditions de cotisations.
b) La maternité
Les prestations légales de maternité sont versées pendant
18 semaines par l'employeur.
Elles correspondent à :
- 90 % du salaire antérieur pendant les 6 premières semaines ;
- un forfait hebdomadaire de 52,50 pendant les 12 semaines suivantes.
L'intéressée doit avoir conservé le même emploi sans
interruption depuis au moins 26 semaines à la date de la demande qui
doit être déposée lors de la quinzième semaine
précédant la date prévue de l'accouchement.
Par ailleurs, son salaire hebdomadaire moyen doit excéder le premier
seuil de cotisation à l'assurance nationale, soit 58 par semaine.
L'assurance nationale peut verser aux personnes ne remplissant pas ces
conditions d'attribution un forfait de :
- 45,55 par semaine aux assurées sans emploi ou non salariées,
- 52,50 par semaine aux salariées.
Ces prestations ne sont versées que sous certaines conditions de
cotisations.
B) LES PENSIONS DE RETRAITE
L'âge légal du départ en retraite est de 65 ans
pour les hommes et 60 ans pour les femmes. Une carrière complète
représente 44 ans de travail pour les hommes et 39 ans par les femmes.
Les pensions que perçoivent les retraités se décomposent
en une pension légale de base, dont le montant est indépendant du
salaire, et une pension complémentaire obligatoire.
1) La pension de base
La pension légale individuelle est de 58,85 par semaine. Elle est majorée de 35,25 par semaine pour un couple dont un seul des époux travaille. Elle est également majorée lorsqu'il y a des enfants à charge. Les personnes âgées de plus de 80 ans ont droit à un supplément.
2) La pension complémentaire
Il
existe trois formes de pensions complémentaires :
- publiques, elles sont versées par l'assurance nationale et
correspondent à environ 20 % du salaire moyen ;
- privées, elles sont souscrites par l'employeur et peuvent atteindre au
maximum deux tiers du dernier salaire pour 40 ans d'affiliation chez le
même employeur ;
- sous forme de plans individuels agréés par l'administration
fiscale.
C) LES PRESTATIONS FAMILIALES
Elles
sont accordées sans conditions de ressources dès le premier
enfant à charge de moins de 16 ans ou de moins de 19 ans s'il poursuit
des études. Le premier enfant ouvre droit à une allocation de
10,40 par semaine et les suivants à 8,45 par semaine chacun.
Par ailleurs, le régime des prestations familiales prévoit, dans
certaines circonstances, le versement d'allocations de parent isolé
(6,30 par semaine) ou d'allocations d'orphelins (11,05 par
semaine).
D) L'ASSURANCE CHOMAGE
Les
allocations de chômage sont attribuées sous les mêmes
conditions de cotisation que les indemnités journalières de
maladie.
Elles sont versées après un délai de carence de trois
jours pendant une année, et sont indépendantes du salaire
perçu. Elles comportent une indemnité de base de 46,45 par
semaine et un supplément pour adulte à charge de 28,65 par
semaine.
E) LE REVENU MINIMUM GARANTI
Il
s'agit de l'
income support
, qui garantit un revenu minimum aux personnes
qui ne travaillent pas ou travaillent moins de 16 heures par semaine. Pour le
calcul de l'
income support
, la plupart des ressources du ménages,
y compris les prestations sociales, sont prises en compte. La détention
d'un capital entre également dans le calcul des ressources.
L'
income support
, variable suivant l'âge et la situation
matrimoniale du demandeur, se compose de trois éléments :
- l'allocation personnelle qui peut atteindre 46,50 par semaine pour une
personne seule de plus de 25 ans et 73 par semaine pour un couple ;
- des majorations destinées aux personnes ayant des besoins
spécifiques supérieurs à la moyenne (familles avec
enfants, personnes handicapées ...)
- l'allocation de résidence pour compenser les frais de logement non
couverts par l'allocation logement.