- Mardi 23 octobre 2018
- Proposition de loi visant à prévenir les violences lors des manifestations et à sanctionner leurs auteurs - Examen des amendements au texte de la commission
- Proposition de loi relative à l'accueil des gens du voyage et à la lutte contre les installations illicites - Examen des amendements au texte de la commission
- Mercredi 24 octobre 2018
- Proposition de loi relative à la représentation des personnels administratifs, techniques et spécialisés au sein des conseils d'administration des service départementaux d'incendie et de secours - Procédure de législation en commission (articles 47 ter à 47 quinquies du Règlement) - Examen du rapport et du texte de la commission
- Mission d'information sur le vote électronique - Examen du rapport d'information
Mardi 23 octobre 2018
- Présidence de M. Philippe Bas, président -
La réunion est ouverte à 9 h 05.
Proposition de loi visant à prévenir les violences lors des manifestations et à sanctionner leurs auteurs - Examen des amendements au texte de la commission
EXAMEN DES AMENDEMENTS DU RAPPORTEUR
Mme Catherine Troendlé, rapporteur. - Au regard de nos travaux de la semaine passée, je vous propose d'améliorer le texte de la commission par trois amendements de coordination.
Article 2
L'amendement de coordination n° 21 est adopté.
Article 3
L'amendement de coordination n° 22 est adopté.
Article 8
L'amendement de coordination n° 23 est adopté.
EXAMEN DES AMENDEMENTS DE SÉANCE
Mme Catherine Troendlé, rapporteur. - Les amendements identiques nos 2 et 9 rect. suppriment l'article 1er, qui permet au préfet de diligenter, à l'occasion d'une manifestation sur la voie publique, un contrôle des effets personnels des passants. Ils sont contraires à la position de la commission ; j'y suis en conséquence défavorable.
La commission émet un avis défavorable aux amendements identiques nos 2 et 9 rect.
Mme Catherine Troendlé, rapporteur. - L'amendement n° 1 autorise la participation des agents de police municipale aux contrôles effectués au sein et aux abords d'une manifestation. Il a déjà été rejeté par notre commission. J'en demande le retrait ou, à défaut, y serai défavorable.
La commission demande le retrait de l'amendement n° 1 et, à défaut, y sera défavorable.
Mme Catherine Troendlé, rapporteur. - Les amendements identiques nos 3 et 10 rect. suppriment l'article 2, qui crée une interdiction administrative individuelle de manifester. Ils sont contraires à la position de notre commission, qui a encadré le dispositif en le dotant de garanties supplémentaires. Avis défavorable.
M. Philippe Bas, président. - Nous en avons effectivement délibéré la semaine passée.
La commission émet un avis défavorable aux amendements identiques nos 3 et 10 rect.
Mme Catherine Troendlé, rapporteur. - Les amendements identiques nos 4 et 11 rect. suppriment l'article 3, qui autorise la création d'un fichier répertoriant les mesures d'interdiction individuelle de manifester. J'y suis défavorable, dans la mesure où ils sont contraires à la position de notre commission.
La commission émet un avis défavorable aux amendements identiques nos 4 et 11 rect.
Mme Catherine Troendlé, rapporteur. - L'amendement n° 12 rect. prévoit un contrôle du fichier prévu à l'article 3 par la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL) et par la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement (CNCTR). En application de la loi du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, ce fichier sera soumis, comme l'ensemble des traitements de données à caractère personnel, à un contrôle a posteriori de la CNIL. Dès lors, l'introduction dans la loi d'un nouveau fondement à ce contrôle serait source de confusion. En outre, il ne paraît pas opportun de confier en la matière un rôle à la CNCTR, qui n'est compétente que pour le contrôle a priori et a posteriori des techniques de renseignement. Avis défavorable.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 12 rect.
Mme Catherine Troendlé, rapporteur. - Les amendements identiques nos 5 et 13 rect. suppriment l'article 4 créant un délit de dissimulation du visage dans une manifestation. J'y suis défavorable.
La commission émet un avis défavorable aux amendements identiques nos 5 et 13 rect.
Mme Catherine Troendlé, rapporteur. - Les amendements identiques nos 6, 14 rect., 16 et 18 suppriment l'article 5, qui élargit le champ des incriminations relatives au port d'armes dans une manifestation. Nous avons encadré le dispositif par des garanties supplémentaires, je suis donc défavorable à sa suppression.
M. Philippe Bas, président. - Sommes-nous assurés de l'objectivité de la définition du port d'armes par destination ?
Mme Catherine Troendlé, rapporteur. - Nous nous sommes fondés sur la jurisprudence.
M. Philippe Bas, président. - Il n'y aura donc pas de difficulté d'interprétation.
M. Pierre-Yves Collombat. - Si, toujours !
Mme Catherine Troendlé, rapporteur. - Il reviendra au juge de trancher.
La commission émet un avis défavorable aux amendements identiques nos 6, 14 rect., 16 et 18.
Mme Catherine Troendlé, rapporteur. - Les amendements identiques nos 7, 15 rect., 17 et 19 suppriment l'article 6 relatif aux peines complémentaires d'interdiction de manifester et d'interdiction de séjour. J'y suis défavorable, car ils sont contraires à la position de notre commission.
La commission émet un avis défavorable aux amendements identiques nos 7, 15 rect., 17 et 19.
Mme Catherine Troendlé, rapporteur. - Je suis, en revanche, favorable à l'amendement n° 20, qui apporte des précisions à l'obligation de pointage. Je comprends, en effet, la volonté des auteurs d'insister sur l'exigence du principe constitutionnel de proportionnalité en matière pénale, dès lors que se trouve en cause la liberté de manifester.
La commission émet un avis favorable à l'amendement n° 20.
Mme Catherine Troendlé. - L'amendement n° 8 supprime l'article 8 relatif à l'application de la proposition de loi en Outre-mer. Avis défavorable.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 8.
Le sort des amendements du rapporteur examinés par la commission est retracé dans le tableau suivant :
La commission adopte les avis suivants sur les amendements de séance déposés sur la proposition de loi :
Proposition de loi relative à l'accueil des gens du voyage et à la lutte contre les installations illicites - Examen des amendements au texte de la commission
M. Philippe Bas, président. - La semaine passée, la position de notre commission a consisté à proposer un vote conforme du Sénat sur la proposition de loi relative à l'accueil des gens du voyage et à la lutte contre les installations illicites telle que modifiée par l'Assemblée nationale.
Mme Catherine Di Folco, rapporteur. - L'amendement n° 3 rétablit l'exemption des obligations du schéma départemental d'accueil et d'habitat des gens du voyage pour les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) ne comprenant aucune commune de plus de 5 000 habitants. Il prévoit, en outre, que ledit schéma ne puisse imposer la création de nouvelles aires d'accueil que si le taux d'occupation des aires existantes est au moins égal à un seuil fixé par décret. Sur le fond, il est difficile d'y être défavorable car ces dispositions figuraient dans le texte initial du Sénat, mais je vous rappelle que nous souhaitons une adoption conforme. En conséquence, je demande le retrait de l'amendement et, à défaut, y serai défavorable.
M. Pierre-Yves Collombat. - Je n'ai déposé qu'un amendement dans la perspective de la séance publique, afin d'attirer l'attention du Sénat sur les deux points que vous avez mentionnés. Si nous ne revenons pas à la rédaction initiale de la proposition de loi, le texte s'inscrira dans l'esprit de la loi du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République (NOTRe) consistant à transférer le maximum de compétences au niveau intercommunal. Alors que la loi du 5 juillet 2000 relative à l'accueil et à l'habitat des gens du voyage, dite Besson, exclut les communes de 5 000 habitants et moins des obligations du schéma départemental, la proposition de loi les y astreint dès lors qu'elles appartiennent à un EPCI, même si celui-ci ne comprend aucune commune de plus de 5 000 habitants. Cela revient à leur imposer de disposer d'aires d'accueil pour les gens du voyage. Quant à la seconde disposition de mon amendement, elle relève du bon sens : pourquoi imposer la création d'aires supplémentaires lorsque les capacités d'accueil sont suffisantes ? Si le Gouvernement souhaite transférer de nouvelles charges aux communes, qu'il le fasse mais que le Sénat n'en soit pas responsable !
Mme Catherine Di Folco, rapporteur. - La loi Besson prévoit effectivement que seules les communes de plus de 5 000 habitants figurent obligatoirement au schéma départemental d'accueil et d'habitat des gens du voyage. La proposition de loi ne revient pas sur ce point.
M. Pierre-Yves Collombat. - Les communes de 5 000 habitants et moins appartenant à un EPCI ne seront plus exemptées !
M. Philippe Bas, président. - Je considère, pour ma part, que les EPCI de grande taille devraient se charger des questions d'importance, laissant à l'échelon de proximité la gestion des sujets du quotidien. Ils souffrent en effet de ne pouvoir maintenir leur cohésion lorsque trop de compétences leur sont confiées. Croyez bien que si nous avions espoir de pouvoir négocier avec l'Assemblée nationale, nous aurions donné un avis favorable à cet amendement. Hélas, malgré les insuffisances du texte voté par nos collègues députés, nous nous trouvons dans l'obligation de sauver ce qui peut l'être en adoptant le texte sans modification. Comme pour la loi NOTRe, où nous avons par exemple réussi à sauver les départements, il convient ici de suivre un raisonnement politique pragmatique...
M. Jean-Luc Fichet. - Certes, la proposition de loi crée une nouvelle obligation pour les communes de 5 000 habitants et moins.
Mme Catherine Di Folco, rapporteur. - Non.
M. Jean-Luc Fichet. - Néanmoins, dans la mesure où le texte vise à apaiser les relations entre les collectivités territoriales et les gens du voyage, et afin de préserver les chances d'un vote conforme, je suis défavorable à l'amendement.
M. Pierre-Yves Collombat. - Nous aurons le débat en séance publique.
La commission demande le retrait de l'amendement n° 3 et, à défaut, y sera défavorable.
Mme Catherine Di Folco, rapporteur. - L'amendement n° 10 prévoit que le schéma départemental détermine la répartition des charges financières nécessaires à la réalisation des aires permanentes d'accueil et des aires de grand passage entres les communes et les EPCI. Notre commission a, pour mémoire, précisé que la compétence des EPCI à fiscalité propre s'étendait à la création des aires. Afin que la proposition de loi soit adoptée conforme, je propose de demander le retrait de l'amendement.
La commission demande le retrait de l'amendement n° 10 et, à défaut, y sera défavorable.
Mme Catherine Di Folco, rapporteur. - Je vous invite à déclarer irrecevable au titre de l'article 45 de la Constitution l'amendement n° 2, qui prévoit l'information préalable du maire en cas de stationnement sur une aire d'accueil. En effet, l'article 3 - qui comprend des dispositions du même ordre - a été adopté sans modification par l'Assemblée nationale. L'amendement est donc contraire à la règle dite de l'entonnoir.
L'amendement n° 2 est déclaré irrecevable au titre de l'article 45 de la Constitution et de l'article 48, alinéa 6, du Règlement du Sénat.
Mme Catherine Di Folco, rapporteur. - L'amendement n° 4 rectifié prévoit que les emplacements en aire permanente d'accueil soient comptabilisés comme logements locatifs sociaux. Le Sénat, avec l'avis favorable de notre commission, avait adopté cette disposition à l'initiative de notre collègue Dominique Estrosi-Sassone. Néanmoins, nous ne souhaitons pas relancer la navette en modifiant le texte issu des travaux de l'Assemblée nationale. Du reste, bien qu'il s'agisse d'une disposition de bon sens, un amendement proche a été rejeté lors de la discussion du projet de loi portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique (ELAN).
M. Philippe Bas, président. - Mes chers collègues, si nous amendons ce texte, il ne verra jamais le jour. Pour autant, je ne le défendrai jamais comme une avancée suffisante. Il fallait évidemment des mesures plus rigoureuses !
La commission demande le retrait de l'amendement
n°
4
rectifié et, à défaut,
y sera défavorable.
Article 5 (suppression maintenue)
Mme Catherine Di Folco, rapporteur. - L'amendement n° 5 rectifié rétablit l'article 5 de la proposition de loi relatif à la procédure d'évacuation d'office des campements illicites. Pour les raisons précédemment évoquées, j'en demande le retrait et, à défaut, y serai défavorable.
La commission demande le retrait de l'amendement
n°
5
rectifié et, à défaut,
y sera défavorable.
Mme Catherine Di Folco, rapporteur. - L'amendement n° 1 étend la définition du délit d'entrave volontaire à la circulation. Or l'article 6 de la proposition de loi concerne exclusivement le délit d'occupation illicite et en réunion d'un terrain. Je vous invite donc à déclarer l'amendement irrecevable au titre de l'article 45 de la Constitution et de la règle dite de l'entonnoir.
L'amendement n° 1 est déclaré irrecevable au titre de l'article 45 de la Constitution et de l'article 48, alinéa 6, du Règlement du Sénat.
Mme Catherine Di Folco, rapporteur. - L'amendement n° 6 rectifié réintroduit la possibilité, lors d'une occupation illicite et en réunion d'un terrain, de transférer les véhicules sur une aire d'accueil située dans le département. Bien que j'approuve cette disposition, je demande le retrait de l'amendement et, à défaut, y serai défavorable.
M. Loïc Hervé. - Je tenais à cette mesure, mais je soutiens la commission dans son choix d'adopter le texte sans modification. Nous aurons néanmoins le débat dans l'Hémicycle et pourrons à nouveau proposer cette disposition dans d'autres véhicules législatifs. L'adoption de la présente proposition de loi constitue déjà la concrétisation de l'appel des élus au Gouvernement s'agissant des conditions d'accueil des gens du voyage.
La commission demande le retrait de l'amendement n° 6 rectifié et, à défaut, y sera défavorable.
Mme Catherine Di Folco, rapporteur. - Les amendements nos 9 rectifié, 8 rectifié et 7 rectifié maintiennent, pendant une certaine durée, la possibilité de poursuivre en justice les occupants illicites d'un terrain, même lorsqu'une commune n'est plus en conformité avec ses obligations d'accueil des gens du voyage. Je ne suis pas convaincue de leur utilité. En effet, la loi Besson prévoit d'ores et déjà un délai de deux ans pour que les communes se mettent en conformité en cas de révision, délai pouvant être prorogé sur demande si la commune manifeste la volonté de se conformer à ses obligations.
La commission demande le retrait des amendements nos 9 rectifié, 8 rectifié et 7 rectifié et, à défaut, y sera défavorable.
La commission adopte les avis suivants sur les amendements de séance déposés sur la proposition de loi :
La réunion est close à 9 h 30.
Mercredi 24 octobre 2018
- Présidence de M. François Pillet, vice-président -
La réunion est ouverte à 8 h 30.
Proposition de loi relative à la représentation des personnels administratifs, techniques et spécialisés au sein des conseils d'administration des service départementaux d'incendie et de secours - Procédure de législation en commission (articles 47 ter à 47 quinquies du Règlement) - Examen du rapport et du texte de la commission
M. François Pillet, président. - Le 26 juin 2018, Mme Catherine Troendlé et plusieurs de ses collègues ont déposé une proposition de loi relative à la représentation des personnels administratifs, techniques et spécialisés (PATS) au sein des conseils d'administration des services départementaux d'incendie et de secours (SDIS).
Lors de sa réunion du 25 septembre, la Conférence des présidents a décidé que cette proposition de loi serait intégralement examinée selon la procédure de législation en commission prévue aux articles 47 ter à 47 quinquies du Règlement du Sénat, en vertu de laquelle le droit d'amendement s'exerce, sauf exceptions, uniquement en commission.
Elle a fixé au mercredi 24 octobre la date de réunion de la commission, au lundi 22 octobre à midi le délai limite de dépôt des amendements et au mardi 30 octobre à 14 h 30 la date et l'heure des explications de vote et du vote en séance sur le texte de la commission.
Le 5 octobre, le Gouvernement a engagé la procédure accélérée pour l'examen de ce texte, marquant ainsi son soutien à l'initiative prise par Mme Troendlé.
La réunion est ouverte à l'ensemble des sénateurs - seuls les membres de la commission des lois prenant part aux votes - et au public. Elle fait l'objet d'une captation audiovisuelle diffusée en direct et en vidéo à la demande sur le site Internet du Sénat.
Mme Catherine Troendlé, auteur de la proposition de loi. - Participant de longue date aux différentes instances de la sécurité civile, notamment à la Conférence nationale des services d'incendie et de secours, dont je suis membre depuis 2011 et vice-présidente depuis 2015, j'ai pu recueillir les demandes récurrentes des personnels administratifs, techniques et spécialisés (PATS). Ils souhaitent être représentés au conseil d'administration de leur SDIS.
Ceux que l'on nomme les « PATS » dans le jargon de la sécurité civile sont les agents qui, au sein des SDIS, ne sont pas sapeurs-pompiers professionnels et qui sont très majoritairement des fonctionnaires territoriaux des catégories A, B et C - les sapeurs-pompiers professionnels formant une catégorie spécifique de fonctionnaires territoriaux.
Il y avait, en 2016, 11 200 PATS, un effectif important à côté des 41 000 sapeurs-pompiers professionnels. Leurs tâches sont centrales, essentiellement dans des fonctions « support » : participation à la gestion des ressources humaines ou des affaires financières, missions juridiques et, pour les personnels des filières techniques, maintenance en condition opérationnelle des véhicules et matériels, un enjeu majeur pour les capacités opérationnelles des SDIS. C'est parfois la vie des sapeurs-pompiers qui en dépend !
Or, malgré leur rôle central et leur nombre important, les PATS ne sont pas représentés au sein des conseils d'administration des SDIS, à l'inverse des sapeurs-pompiers volontaires et professionnels qui comptent respectivement deux représentants dotés d'une voix consultative. Je propose de réparer cette injustice afin que les PATS disposent, eux aussi, d'un représentant au conseil d'administration, avec voix consultative. C'est aussi le souhait de l'Assemblée des départements de France, que j'avais consultée.
L'article unique de ma proposition de loi prévoit que les fonctionnaires territoriaux n'ayant pas la qualité de sapeur-pompier professionnel désignent un représentant doté d'une voix consultative au conseil d'administration, au même titre que les représentants des sapeurs-pompiers professionnels et volontaires. Désormais au nombre de cinq, ces représentants accompagneraient le directeur, le médecin chef du SDIS et le président de l'Union départementale des sapeurs-pompiers, qui disposent également d'une voix consultative.
Le rapporteur Loïc Hervé souhaite accroître encore l'intégration des PATS au sein des SDIS en les dotant de représentants à la commission administrative et technique des services d'incendie et de secours (CATSIS). Leur représentant au conseil d'administration serait issu de ces élus. Je me félicite de cette proposition, la reconnaissance des PATS en serait améliorée.
Chers collègues, je compte sur vous pour adopter cette proposition de loi très attendue !
M. Philippe Bas, en remplacement de M. Loïc Hervé, rapporteur. - Je salue la présence du ministre pour cette procédure de législation en commission - une originalité du Sénat, d'abord testée à titre expérimental, puis consolidée l'an dernier. Elle s'applique à des textes qui ne font pas l'objet de controverses majeures et qui suscitent un travail approfondi, néanmoins accéléré. Catherine Troendlé connaît parfaitement le sujet. Loïc Hervé est lui aussi très engagé dans le soutien aux SDIS, il s'est beaucoup investi dans son travail de rapporteur, mais il ne pouvait pas être avec nous aujourd'hui, or la date d'une réunion de commission pour la législation en commission est fixée en conférence des présidents et ne peut être déplacée. Je le remplace donc dans ses fonctions.
Tout a été dit ou presque par Catherine Troendlé. La question d'aujourd'hui n'est en rien secondaire. Sans les 11 000 PATS, les SDIS ne pourraient fonctionner. Les personnels administratifs et techniques ont parfois la vie de leurs collègues entre leurs mains ! Or ils ne sont pas représentés au conseil d'administration des SDIS : c'est une injustice mais aussi une faiblesse du point de vue de la cohésion et de l'efficience de ces services.
Lors des auditions conduites par Loïc Hervé, l'initiative de notre collègue Catherine Troendlé a été unanimement saluée par les organisations syndicales, la Fédération nationale des sapeurs-pompiers, l'Assemblée des départements de France, la Conférence nationale des services d'incendie et de secours, l'Association nationale des directeurs de SDIS.
Je remercie le Gouvernement d'avoir engagé la procédure accélérée : une fois n'est pas coutume, nous en sommes satisfaits. Car c'est le gage que le texte sera inscrit à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale, et qu'il ira à son terme.
Loïc Hervé partage tous les objectifs de la proposition de loi et a fait des propositions complémentaires, approuvées par Mme Troendlé. Il suggère que les PATS soient également représentés au sein de la CATSIS, qui est consultée sur toutes les questions d'ordre technique et opérationnel, l'organisation concrète des services. Le nombre de leurs représentants au sein de cette commission serait fixé par voie réglementaire. Il pourrait s'élever à deux : M. le ministre nous confirmera si telle est bien son intention.
Au conseil d'administration, les PATS disposeraient d'un
représentant, avec voix consultative, contre deux pour les
sapeurs-pompiers professionnels, ce qui semble satisfaisant. Ce
représentant serait désigné parmi les représentants
élus qui siègeraient à la CATSIS
- la proposition
de loi prévoyait une élection directe. Cette homothétie
entre les deux catégories serait bienvenue. L'amendement de notre
rapporteur en ce sens rejoint une préoccupation également
exprimée par le groupe socialiste et républicain dans l'un de ses
deux amendements.
M. François Pillet, président. - Je souhaite la bienvenue au nouveau ministre M. Laurent Nunez : à titre personnel, je suis heureux d'accueillir ici un Berrichon !
M. Philippe Bas, rapporteur. - Tout le monde n'a pas la chance d'être normand...
M. Laurent Nunez, secrétaire d'État auprès du ministre de l'Intérieur. - Je suis très attaché à mes origines berrichonnes et vous remercie de votre accueil.
Aux termes de l'article L. 1424-24 du code général des collectivités territoriales, le SDIS est administré par un conseil d'administration où siègent des représentants du département, des communes et des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) qui exercent la compétence secours et lutte contre l'incendie, avec voix délibérative. Y siègent aussi, avec voix consultative, le directeur départemental du SDIS, le médecin chef du service de santé et de secours médical des sapeurs-pompiers, un sapeur-pompier professionnel officier et un non officier, un sapeur-pompier volontaire officier et un non officier, ainsi que le président de l'Union départementale des sapeurs-pompiers.
En 2017, on comptait 11 217 PATS soit 21,7 % des personnels salariés des SDIS. Ils sont aujourd'hui représentés au comité technique lorsqu'il existe, et au comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail. Ils assument un rôle majeur dans les fonctions support et de préparation des opérations ; ils contribuent donc pleinement aux missions opérationnelles et au maintien en condition opérationnelle du matériel. Ils seront mieux reconnus s'ils peuvent demain faire entendre leur voix au conseil d'administration, car actuellement ils en sont exclus - ils le sont aussi des CATSIS qui sont pourtant consultées sur les questions techniques et opérationnelles intéressant les SDIS.
Les représentants des sapeurs-pompiers au conseil d'administration sont désignés en qualité d'élus à la CATSIS : je suis donc favorable à l'amendement du rapporteur, qui prévoit la même architecture pour les PATS, et qui simplifie la mise en oeuvre réglementaire de la mesure. Le Gouvernement est ainsi favorable à cette initiative et souhaite que cette proposition de loi soit adoptée dans les meilleurs délais.
Mme Brigitte Lherbier. - C'est un texte nécessaire et intéressant. Je veux dire ici un mot de la coordination indispensable entre police municipale, police nationale et SDIS. À Tourcoing, tous les vendredis se réunit la cellule de veille qui associe ces services ainsi que les établissements scolaires, afin de passer en revue les événements et manifestations à venir. Des sapeurs-pompiers, experts de l'évacuation, du confinement ont participé à la pédagogie dans les écoles, après les attentats.
Mme Catherine Di Folco. - Je salue l'initiative de Catherine Troendlé et les ajouts du rapporteur. Dans le Rhône, nous avons un service départemental-métropolitain d'incendie et de secours. J'espère qu'une mention sera ajoutée au cours de la navette, pour prévoir l'application de ces mesures à notre SDMIS.
M. Patrick Kanner. - Je fus président du SDIS du département du Nord, qui compte 7 000 collaborateurs. Je garde un souvenir ému du poids des SDIS sur le budget départemental. Le transfert de la compétence au niveau départemental a en effet conduit à donner à ce service public des moyens opérationnels de qualité : les sapeurs-pompiers ont une force de conviction - pour ne pas dire plus - auprès des élus qui leur garantit les meilleurs véhicules, les plus beaux locaux... C'est que leur mission est particulièrement noble, ils protègent leurs concitoyens. C'est cher mais c'est utile.
Reste la question de l'équilibre des pouvoirs au sein des SDIS : les départements paient, mais l'État commande. Comme président du conseil général du Nord, j'ai toujours défendu le retour du bloc de compétence sûreté et sécurité dans le giron de l'État, car il s'agit d'une mission régalienne. Les services de santé dans les écoles, en revanche, seraient mieux gérés au niveau départemental...
Quoi qu'il en soit, le groupe socialiste et républicain votera la proposition de loi de Mme Troendlé, enrichie par le rapporteur.
M. Jean-Luc Fichet. - Je salue cette initiative car les PATS n'ont pas toujours eu une place reconnue. Après la grande réforme de 1996, on leur a confié des postes auparavant occupés par des pompiers : ils n'étaient donc pas les bienvenus. Il me semble néanmoins judicieux de conserver des postes administratifs pour la reconversion de pompiers qui ne peuvent plus assurer de missions opérationnelles. En sens inverse, des postes encore occupés par des pompiers pourraient être transférés à des PATS, afin de renforcer la capacité d'intervention. Certains gradés ont fait tout leur parcours dans des fonctions administratives, alors qu'ils seraient utiles sur le terrain...
Mme Nathalie Delattre. - Cette reconnaissance des PATS est bienvenue.
Un arrêt de la Cour de justice de l'Union européenne reclasse l'activité des sapeurs-pompiers volontaires en travail professionnel. Cela pourrait menacer notre modèle : monsieur le ministre, avez-vous pris connaissance du dossier ? Votre prédécesseur faisait fi de cette jurisprudence...
M. Pierre-Yves Collombat. - Je ne doute pas que cette proposition de loi, de bon sens, fasse l'unanimité mais, puisque certains collègues ont abordé des points moins consensuels, j'en ajouterai un : le rôle de plus en plus important des sapeurs-pompiers dans le secours à personne, qui relève en principe du ministère de la santé. Un rapport que Mme Troendlé et moi-même avions rédigé en 2016 sur la question, hélas livré depuis, comme disait Marx, à la critique rongeuse des souris, dénonçait le coût de cette dérive et son impact sur l'organisation des services. Il serait temps de traiter ce problème fondamental.
Mme Françoise Gatel. - Cette proposition de loi, pertinente, est très attendue et fait consensus. Il est important de conjuguer sapeurs-pompiers professionnels et volontaires, non seulement pour des raisons matérielles de coût, mais aussi et surtout parce que l'engagement des pompiers est un remarquable engagement citoyen, qui met en exergue les valeurs de notre République. Le secours aux personnes, coûteux en temps d'intervention, nous oblige à remettre en cause la définition de la fonction de pompier. La conception de la décentralisation - dont vous n'êtes nullement coupable, monsieur le ministre - qui consiste à faire financer des politiques publiques par les collectivités territoriales tout en conservant le pouvoir de décision à l'État est réductrice et inefficace. Les sapeurs-pompiers relèvent-ils d'une compétence régalienne ? Oui, si l'on conserve l'efficacité et la proximité. Mais il serait pertinent que les départements, s'ils portent une compétence, puissent l'exercer, en définissant eux-mêmes la configuration des moyens dont ils ont besoin.
M. Jean Louis Masson. - Cette proposition de loi est très pertinente, et je m'y associe. J'ai été très réticent lors de la création des SDIS, qui ajoutent une couche au millefeuille territorial, alors qu'il faudrait les incorporer aux compétences d'une collectivité. Quant à la problématique du secours aux personnes, elle nous renvoie à celle des carences du SAMU : nos concitoyens téléphonent aux pompiers quand le SAMU ne fonctionne pas. Il est vrai qu'il y a aussi des abus, qui obèrent notre capacité de secours aux personnes.
M. Jean-Pierre Sueur. - Puisque nous sommes arrivés à un débat plus général, je souhaite profiter de votre venue, monsieur le ministre, pour attirer l'attention sur les agressions dont sont victimes les sapeurs-pompiers lorsqu'ils interviennent : caillassages, atteintes aux matériels, voire aux personnes. Ces actes sont odieux, inadmissibles, et la République dans son ensemble doit les dénoncer, les condamner et les sanctionner, tant ils heurtent l'humanité : comment peut-on porter atteinte à ceux qui viennent porter secours ? L'unité de tous les responsables sur ce point est indispensable.
M. Alain Marc. - Millefeuille administratif ? Souvent, le fait que l'État commande donne de bons résultats. Dans l'Aude, par exemple, comment coordonner les secours si c'est au président du conseil départemental de gérer ? Je préfère que ce rôle revienne à l'État. Dans les milieux ruraux et hyper-ruraux, le secours aux personnes pose problème : la diminution du nombre d'hôpitaux et l'élargissement des secteurs de garde, qu'on observe dans l'Aveyron, met encore davantage en danger les populations très isolées. Dans ce contexte, quel sera le rôle des sapeurs-pompiers, essentiellement volontaires ?
M. Laurent Nunez, secrétaire d'État. - L'application de la réforme au département du Rhône est prévue par l'amendement du rapporteur COM-3 rectifié. Comme je l'ai indiqué hier en réponse à une question orale sans débat, nous prendrons une initiative européenne pour maintenir le statut de sapeur-pompier volontaire dans le dispositif de sécurité civile. Certes, le secours aux personnes pèse lourdement sur l'activité de nos SDIS, puisqu'il représente près de 80 % des interventions. Nous attendons la restitution d'un rapport conjoint de l'inspection générale de l'administration et de l'inspection générale des affaires sociales sur cette question. Comme vous l'avez indiqué, il faut une vision globale de la chaîne de secours.
Vous avez évoqué l'importance de la sécurité des sapeurs-pompiers pendant leurs interventions. Récemment, une agression particulièrement grave a eu lieu à Villeneuve-Saint-Georges, qui a causé le décès du sapeur-pompier, Geoffroy Henry. Le ministre de l'intérieur a rappelé à l'ensemble des préfets que, dans chaque département, une convention doit être passée entre le SDIS, les groupements de gendarmerie et les directions départementales de la sécurité publique pour prévoir des cadres d'intervention spécifiques. Des protocoles d'intervention ciblent les secteurs sensibles. Ces conventions fonctionnent bien. En tous cas, après le drame de Villeneuve-Saint-Georges, le ministre a demandé à l'ensemble des préfets de veiller à la correcte application de ces conventions, d'ailleurs saluées par les professionnels. Quant à la répartition des compétences entre l'État et les conseils départementaux, il me semble que le préfet du département doit conserver une capacité opérationnelle pleine et entière, puisque c'est lui qui assume la responsabilité vis-à-vis de nos concitoyens.
M. Philippe Bas, rapporteur. - Mme Delattre a soulevé un problème juridique important, qui inquiète les sapeurs-pompiers et mérite un examen approfondi. Mme Di Folco a évoqué le cas du département du Rhône, auquel M. Buffet est également très attentif ; justement, l'amendement de M. Hervé, que je vais vous présenter, prend en compte la spécificité de ce département. Quant à l'augmentation de la charge des départements, elle est réelle et ne s'est pas faite de propos délibéré, mais par glissements. On parle des sapeurs-pompiers comme des soldats du feu alors que, de plus en plus, ils sont devenus des soldats de la santé, de l'urgence sanitaire, à cause du repli de l'hôpital public. Or, la prise en charge par l'État des interventions de nature sanitaire des sapeurs-pompiers se fait très en-dessous de leur coût, comme cela a été mis en évidence par l'excellent rapport de Mme Troendlé et M. Collombat. Cette question, non résolue, inquiète beaucoup notre commission des lois, monsieur le ministre. Je me permets d'y insister, car nous assistons à un véritable transfert de charges vers les conseils départementaux, qui ne sont pas des vaches à lait ! Les départements s'épuisent dans le financement de ces missions, qui leur sont imposées. Heureusement que les sapeurs-pompiers sont là ! Ils sont souvent bien seuls sur le terrain pour faire face à l'urgence sanitaire.
Il est exact que beaucoup de sapeurs-pompiers exercent en réalité des fonctions administratives et techniques. Chaque SDIS doit réfléchir à la meilleure répartition des tâches car, parfois, ces sapeurs-pompiers qui pourraient être réaffectés sur le terrain. Il est donc de l'intérêt du service lui-même que toutes les catégories de personnels soient bien représentées car cela permettra un débat très utile sur le bon emploi des effectifs.
Les agressions que subissent tous les porteurs d'uniformes - comme si le fait d'exercer une autorité sur les citoyens était en soi une forme d'agression, à laquelle il faudrait répondre par la violence - constituent un phénomène de société très préoccupant. Les sapeurs-pompiers, qui font les frais de cette attitude, doivent être mieux protégés. Je salue sur ce point l'initiative de M. Decool : à son initiative, la loi du 3 août dernier autorise notamment les pompiers et les policiers municipaux à porter une caméra mobile, dont l'expérience montre que le déclenchement fait généralement redescendre les conditions de température et de pression en cours d'intervention. Notre commission des lois est très attentive à ce problème, monsieur le ministre, et toute initiative du Gouvernement pour renforcer la sécurité de nos sapeurs-pompiers sera la bienvenue. Nous continuerons nous aussi à réfléchir à la possibilité de nouvelles actions dans ce domaine.
EXAMEN DES AMENDEMENTS
M. François Pillet, président. - L'amendement COM-3 rectifié, qui réécrit cet article, nous a déjà été présenté par le rapporteur. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Laurent Nunez, secrétaire d'État. - Favorable.
L'amendement COM-3 rectifié est adopté. L'article unique est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission. L'amendement COM-1 rectifié ter devient sans objet.
Article additionnel après l'article unique
M. François Pillet, président. - L'amendement COM-2 rectifié bis, présenté par le groupe socialiste et républicain, insère un article additionnel après l'article unique.
M. Patrick Kanner. - Son objectif n'est pas, bien sûr, de créer une quatrième fonction publique, mais de reconnaître les PATS en les intégrant dans le corps des sapeurs-pompiers. Nous mesurons les obstacles techniques, mais c'est une manière d'aller jusqu'au bout de notre démarche.
M. Philippe Bas, rapporteur. - Je me sens très humble devant un amendement aussi ambitieux ! Les PATS sont des fonctionnaires, auxquels est applicable le droit commun de la fonction publique territoriale. Moralement, c'est une très bonne idée de porter tous les membres des SDIS à une égale dignité, car il est toujours bon que les mêmes règles soient applicables à tous. Cela dit, des écarts de situations peuvent exister. Il faudrait faire un inventaire très précis des difficultés techniques à résoudre pour arriver au résultat souhaité. Je ne suis nullement hostile à votre idée, mais je me sens insuffisamment éclairé sur l'ampleur du travail à accomplir pour regrouper sous un même statut les personnels des SDIS. Je demande donc le retrait de cet amendement.
M. Laurent Nunez, secrétaire d'État. - Mon avis rejoint celui du rapporteur. Le code général des collectivités territoriales définit le corps départemental des sapeurs-pompiers comme étant composé de sapeurs-pompiers professionnels et volontaires servant dans les SDIS, et les spécificités du métier justifient l'existence d'un corps particulier, qui ne peut être élargi aux PATS - auxquels, justement, la proposition de loi accorde une place légitime et entière au sein des instances de concertation. Avis défavorable, donc.
M. Patrick Kanner. - En somme, nous avons politiquement raison et juridiquement tort ! Nous comprenons que notre démarche ne peut pas aboutir en l'état actuel du droit, et retirons cet amendement.
L'amendement COM-2 rectifié bis est retiré.
Mme Catherine Troendlé, auteur de la proposition de loi. - D'aucuns pourront considérer que c'est un texte a minima, mais j'ai pour habitude, sur ce sujet, d'avancer à petits pas, et de consolider chaque avancée. Le rapport que j'ai rédigé en 2016 avec M. Collombat loue l'efficacité des plateformes communes. D'ailleurs, le Président de la République a annoncé l'année dernière qu'il souhaitait les développer rapidement. Ces plateformes réunissent déjà les ambulanciers, le SAMU, le service mobile d'urgence et de réanimation (SMUR), les pompiers, et fonctionnent très bien. Y ajouter les forces de l'ordre apporterait une réponse aux violences auxquelles sont exposés les sapeurs-pompiers.
Vous avez évoqué la compensation des carences
ambulancières. Le sujet ne date pas d'hier ! Un rapport, en 2008,
a débouché sur un référentiel, mis en oeuvre
à l'époque par Mme Bachelot, ministre de la santé. La
compensation financière avait été fixée à
208 euros
- elle est aujourd'hui de 115 euros, alors que le
coût réel de l'intervention est en moyenne de 380 euros. Il
faut donc un effort supplémentaire pour aboutir à une prise en
charge au coût réel.
Enfin, 252 sénateurs ont co-signé une motion que j'ai déposée avec M. Cigolotti, à l'attention de la Commission européenne et de M. Juncker, pour appeler à une directive spécifique aux forces de sécurité et de secours d'urgence. Nous l'avions mise en avant dans le rapport que nous avons transmis en mai sur le statut du sapeur-pompier volontaire. Pour l'instant, aucune réaction du Gouvernement ni du Président de la République... J'ai donc pris rendez-vous avec Mme Thyssen, la Commissaire européenne en charge de l'emploi, mais je sais que je n'y arriverai pas toute seule ! Il serait bon que le Président de la République prenne ce sujet à bras le corps.
La commission adopte la proposition de loi dans la rédaction issue de ses travaux.
M. François Pillet, président. - Je salue cette belle unanimité.
Le sort des amendements examinés par la commission est retracé dans le tableau suivant :
Ce point de l'ordre du jour a fait l'objet d'une captation vidéo disponible en ligne sur le site du Sénat.
La réunion, suspendue à 9 h 35, est reprise à 9 h 50.
- Présidence de M. Philippe Bas, président -
Mission d'information sur le vote électronique - Examen du rapport d'information
M. Philippe Bas, président. - La décision du Gouvernement d'abandonner, pour les élections législatives de 2017, le vote par Internet pour les Français de l'étranger, pourtant prévu par les textes et déjà utilisé en 2012, constitue le point de départ des travaux de nos deux rapporteurs, Mme Jacky Deromedi et M. Yves Détraigne. Le risque que la plateforme de vote soit piratée était alors présenté comme la raison de cet abandon. Il nous avait paru regrettable de devoir accepter, sur des arguments informatiques, une telle régression de l'expression démocratique de nos compatriotes expatriés !
Hélas, le Gouvernement ne semble pas avoir recherché depuis une issue à cette difficulté : il n'a présenté, lors de la dernière réunion de l'Assemblée des Français de l'étranger (AFE), ni calendrier, si solution technique. Il s'agit pourtant d'une question d'égalité des citoyens devant le suffrage ! Je souhaite que le rapport d'information constitue le point de départ d'une démarche affirmée du Sénat en faveur de ce principe démocratique incontournable.
Mme Jacky Deromedi, rapporteur. - Le vote électronique recouvre deux dispositifs distincts : les machines à voter, utilisées par une minorité de communes pour l'ensemble des élections politiques, et le vote par Internet, ouvert à nos compatriotes établis hors de France pour les élections législatives et consulaires. Notre commission a déjà a examiné ces dispositifs en 2014, sur le rapport de notre collègue Antoine Lefèvre et de notre ancien collègue Alain Anziani.
Les actuelles machines à voter sont proches de l'obsolescence, le moratoire de 2008 ayant ralenti les efforts de modernisation. Les communes utilisatrices craignent désormais l'abandon d'appareils qui leur donnent entière satisfaction. Par ailleurs, le recours au vote par Internet a été supprimé pour les dernières élections législatives, au détriment de nos compatriotes de l'étranger qui ont souvent dû parcourir de nombreux kilomètres pour se rendre dans un bureau de vote. À l'issue de nos travaux, nous avons acquis la conviction qu'il convient de conforter et de sécuriser ces deux dispositifs.
M. Yves Détraigne, rapporteur. - La France fêtera prochainement les cinquante ans de l'introduction des machines à voter dans son droit électoral. Le recours à ces appareils est une faculté pour les communes de plus de 3 500 habitants, sous réserve de l'accord du préfet. Il demeure toutefois résiduel : au 1er janvier 2018, seules soixante-six communes utilisent des machines à voter pour tout ou partie de leurs bureaux de vote, ce qui représente 1 421 bureaux de vote et 1,39 million d'électeurs, soit 3 % du corps électoral.
Pour comprendre le fonctionnement des machines à voter, nous avons reçu les représentants des communes utilisatrices et effectué deux déplacements au Havre et à Mandelieu-la-Napoule. Dans un bureau de vote équipé d'une machine à voter, aucune enveloppe ni aucun bulletin de vote papier n'est remis à l'électeur. Prenant son tour dans une éventuelle file d'attente, il se présente devant l'appareil, avec l'autorisation du président du bureau de vote. Seul le votant fait face à la machine afin de garantir le secret du vote, même en l'absence d'isoloir. Une fois le vote validé, le président du bureau annonce que l'électeur a voté et referme l'urne électronique. À la clôture du bureau de vote, l'urne est définitivement fermée et les résultats sont imprimés par la machine sur un ticket de dépouillement.
Les exigences de sécurité à l'égard des machines à voter sont nombreuses. Les appareils sont agréés par arrêté du ministère de l'intérieur, après vérification du bureau de contrôle Veritas. Les critères de l'agrément sont fixés par le règlement technique de 2003, qui définit pas moins de 114 exigences.
Des précautions sont également prises au cours du processus électoral. Ainsi, les machines à voter fonctionnent en autonomie : elles ne sont pas reliées par un réseau et ne font pas appel à Internet. Leur intégrité est également garantie par des règles de protection physique. Conformément à une circulaire de 2017, les machines sont stockées dans un local sécurisé : seules les personnes habilitées peuvent y accéder et leur présence est consignée dans un registre d'accès. De même, les opérations de programmation des appareils sont réalisées en présence des candidats à l'élection ou de leurs délégués. Une fois la machine paramétrée, les agents de la commune y apposent des scellés numérotés et ses modalités de fonctionnement ne peuvent plus être modifiées jusqu'au scrutin. Enfin, les communes utilisatrices possèdent des appareils de secours, mis en service en cas de défaillance. D'après le ministère de l'intérieur, l'application de ces règles n'a causé aucune difficulté particulière lors de l'élection présidentielle et des élections législatives de 2017, hormis un incident identifié à Issy les Moulineaux lors du second tour de l'élection présidentielle. Cet incident résultait d'une erreur humaine, non d'un dysfonctionnement de la machine.
Lors de leur audition, les représentants des communes utilisatrices se sont déclarés pleinement satisfaits des machines à voter. Grâce au ticket de dépouillement, ces appareils génèrent des gains de temps importants en accélérant le dépouillement : à la clôture du bureau de vote, il n'est pas nécessaire de faire appel à des scrutateurs pour compter les enveloppes, les répartir entre les tables de dépouillement et comptabiliser les résultats par candidat. Les machines à voter empêchent également la nullité d'un bulletin, puisqu'il est impossible d'ajouter des inscriptions, de rayer un élément ou d'insérer plusieurs bulletins dans une même enveloppe. Les machines sont, en outre, facilement accessibles pour les personnes en situation de handicap. Elles n'ont, en revanche, pas d'influence sur le taux de participation, ainsi que nous l'avons constaté à Antibes, où seuls certains bureaux de vote en sont équipés.
Depuis 2008, le Gouvernement a mis en place un moratoire : les préfets n'autorisent plus de nouvelles communes à s'équiper de machines à voter et l'État n'agrée plus d'autres modèles. Les communes déjà équipées peuvent continuer à utiliser leurs appareils mais, en pratique, elles ne renouvellent pas leur parc, craignant que l'État n'interdise les machines à voter.
Initialement, ce moratoire représentait un compromis entre les inquiétudes générées par cette technologie et la volonté des communes utilisatrices d'amortir l'achat de ces appareils. Il est désormais daté ; il ralentit le processus de fiabilisation et de sécurisation des machines à voter. Les appareils sont vieillissants et ne pourront plus être maintenus en état d'ici quelques années. Comme le souligne l'Agence nationale de la sécurité des systèmes d'information (ANSSI), « le maintien à long terme du moratoire représente sans doute la pire des solutions : les machines acquises avant 2008 continuent à être utilisées, sans jamais être mises à jour ». Nous nous trouvons donc face à un choix politique : interdire les machines à voter ou, au contraire, assurer leur maintien et leur modernisation.
Lors de nos travaux, aucun acteur institutionnel ni aucun informaticien n'a pu démontrer le manque de fiabilité des résultats électoraux dans les communes qui utilisent des machines à voter. Seuls des risques potentiels ont été mis en avant, sans preuve matérielle de l'existence de fraudes passées sur le territoire français. L'ANSSI et le ministère de l'intérieur ont d'ailleurs refusé d'organiser une simulation de piratage contre une machine à voter comme nous le leur proposions. Or, seul un tel test aurait pu démontrer l'éventuelle vulnérabilité des machines !
Dans ces conditions, notre première proposition vise à lever le moratoire de 2008. Nous souhaitons ainsi sécuriser la situation des communes qui utilisent, avec satisfaction, les machines à voter et permettre à de nouvelles communes de s'équiper, sur la base du volontariat.
Parallèlement, nous devons relancer les efforts de sécurisation des machines à voter, même si aucune fraude n'a été constatée sur le territoire français. Avec notre deuxième proposition, nous recommandons de créer les conditions d'un dialogue tripartite entre le ministère de l'intérieur, l'ANSSI et les communes utilisatrices. Une telle méthode avait été mise en oeuvre en 2007 et avait permis d'engager un dialogue efficace et apaisé.
Dans la même logique, notre troisième proposition vise à durcir les conditions d'agrément des nouvelles machines à voter. En effet, quinze ans après leur entrée en vigueur, les critères du règlement technique de 2003 doivent être actualisés. L'opération de paramétrage des appareils pourrait également être sécurisée, un tiers indépendant s'assurant de l'intégrité des scellés apposés jusqu'à l'ouverture du bureau de vote.
Enfin, la levée du moratoire de 2008 doit s'accompagner d'une réflexion sur les règles de financement des machines à voter, notamment pour inciter les communes à moderniser leurs appareils. Initialement, l'État prenait en charge l'ensemble des coûts d'acquisition et d'entretien des machines à voter. Cette règle figure d'ailleurs à l'article L. 69 du code électoral. Dans les années 2000, l'État s'est toutefois contenté de verser une subvention forfaitaire de 400 euros par machine pour un coût unitaire estimé à 5 500 euros. Depuis 2008, il ne donne plus rien. Notre quatrième proposition incite donc les communes utilisatrices à renouveler leur parc de machines à voter, au besoin à l'aide d'une subvention de l'État.
Mme Jacky Deromedi, rapporteur. - Il nous est également apparu indispensable de sécuriser le vote par Internet, qui constitue une garantie essentielle pour les 1,8 million de Français de l'étranger.
Le vote par Internet est le fruit d'une initiative de notre collègue Robert del Picchia en 2003. Il est circonscrit à l'élection des députés représentant les Français de l'étranger et aux élections consulaires. Son extension à d'autres scrutins n'a pas été envisagée, soit parce que le nombre de votants est trop faible pour amortir le coût du dispositif - ce serait le cas des élections sénatoriales - soit parce que le scrutin concerne l'ensemble des Français.
Le vote par Internet doit concilier deux impératifs : sa sécurité et son ergonomie.
S'agissant de la sécurité, il fait l'objet de contrôles de la part du bureau de vote par voie électronique (BVE), de la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL), de l'ANSSI et du juge électoral.
Pour ce qui concerne son ergonomie, le vote par Internet demeure une procédure complexe, notamment parce que les codes d'identification des électeurs doivent être envoyés a minima par deux canaux de transmission comme les courriels et les SMS. Lors des élections consulaires de 2014, au moins 6 % des votants par Internet, soit environ 4 630 personnes, ont rencontré des difficultés de connexion et dû contacter la cellule d'assistance technique.
Sur le plan sociologique, le vote par Internet ne semble pas avoir d'influence décisive sur le taux de participation des électeurs établis hors de France, qui dépend principalement des enjeux du scrutin. À titre d'illustration, en 2012, 39,07 % des Français de l'étranger ont participé au premier tour de l'élection présidentielle (pour lequel seul le vote à l'urne était autorisé) et seulement 20,71 % d'entre eux ont voté au premier tour des élections législatives (pour lequel le vote par Internet était ouvert, en complément du vote à l'urne et du vote par correspondance). Le recours au vote électronique varie en outre selon les régions du monde : au premier tour des élections législatives de 2012, 78,71 % des votants se sont exprimés par Internet en Europe du Nord, contre 33,93 % au Proche-Orient et en Afrique.
Le vote par Internet constitue toutefois une garantie essentielle pour les Français de l'étranger. Si 80 % d'entre eux habitent à moins de quinze kilomètres d'un bureau de vote, certains doivent effectuer un long trajet pour se rendre aux urnes. Lors des dernières élections législatives, un seul bureau de vote était ouvert en République centrafricaine, deux en Colombie et trois en Russie. Un expatrié vivant à Irkoutsk doit, par exemple, parcourir 2 812 kilomètres pour voter à Ekaterinbourg, ce qui représente un trajet de plus de trois heures en avion et un budget d'environ 470 euros. Le vote par Internet permet également de répondre à des difficultés très concrètes, notamment lorsqu'un risque existe en matière de sécurité. En pratique, les Français de l'étranger l'utilisent massivement : plus de la moitié d'entre eux ont voté en ligne lors des élections législatives de 2012.
Le vote par Internet comporte donc de nombreux avantages qui plaident pour son maintien. Il rencontre cependant de sérieuses difficultés qui ont conduit le précédent Gouvernement à l'abandonner pour les élections législatives de 2017.
Cette décision s'explique notamment par le contexte géopolitique. Elle ne résultait pas d'une menace précise ou d'un risque clairement identifié mais d'un environnement plus global, avec les attaques contre le site Internet de TV5 Monde en 2015 et les interrogations sur le déroulement de la campagne présidentielle américaine en 2016. Le Gouvernement a donc fait usage du principe de précaution, comme l'a reconnu l'ancien président du bureau de vote par voie électronique.
Outre ces difficultés géopolitiques, la plateforme de vote en ligne présente des imperfections structurelles, qui ont également contribué à l'abandon du vote par Internet pour les élections législatives de 2017.
Conçue à partir de mai 2016, cette plateforme représente un projet d'envergure. Outre le système de vote, elle comporte plusieurs services périphériques comme la centralisation des résultats du scrutin, y compris depuis les bureaux de vote physiques. Le marché a été attribué à la société espagnole SCYTL, pour une durée de quatre ans. Son montant total s'élève à 3,73 millions d'euros, somme à laquelle il faut ajouter 2,99 millions d'euros de prestations annexes confiées à d'autres entreprises.
Dès l'origine, le calendrier de l'opération était trop resserré, comme l'a démontré la Cour des comptes. Le prestataire et l'administration n'ont pas eu suffisamment de temps pour concevoir et tester la nouvelle plateforme.
En outre, le besoin initial en matière de sécurité a été sous-estimé : le Gouvernement a multiplié par deux ses exigences pendant l'exécution du marché, sans revoir le contrat du prestataire.
Enfin, les deux tests grandeur nature (TGN) organisés en décembre 2016 et en février 2017 n'ont pas donné satisfaction. Lors du second TGN, 14 % des utilisateurs n'ont pas réussi à accéder à la plateforme, contre environ 5 % lors des élections législatives de 2012. Ces difficultés ergonomiques ont retardé la sécurisation du dispositif, comme l'a confirmé l'ANSSI au cours de son audition. Si les responsabilités semblent partagées entre l'administration et le prestataire, il semble étonnant que ce dernier n'ait subi aucune pénalité, alors que sa plateforme présentait de graves imperfections fonctionnelles. Son marché public n'a pas été résilié ; il est encore en vigueur.
Dans ce contexte, l'enjeu est de maintenir le vote par Internet pour les Français de l'étranger tout en sécurisant le dispositif. Cette exigence reprend l'engagement pris par le Président de la République devant l'Assemblée des Français de l'étranger.
À court terme, il faut garantir l'organisation du vote par Internet pour les élections consulaires de 2020, en travaillant avec le même prestataire, la société SCYTL. Avec notre cinquième proposition, nous souhaitons que l'État renforce ses capacités de pilotage technique et organise au moins trois tests grandeur nature en amont du scrutin.
À moyen terme, une nouvelle procédure de mise en concurrence sera lancée pour préparer les élections législatives de 2022. Il faudra éviter de reproduire les erreurs constatées en 2017 ! Avec notre sixième proposition, nous préconisons que l'État renforce les moyens alloués à la sécurisation du vote par Internet. À titre d'exemple, la dématérialisation de la propagande électorale pour les seuls Français de l'étranger permettrait d'économiser plus de 3 millions d'euros, qui pourraient être réinvestis dans la plateforme de vote.
De même, il convient de rationaliser la procédure de passation du marché public pour s'assurer de l'adéquation entre les besoins de l'administration et les offres des candidats. Le marché doit être attribué au moins dix-mois mois avant le scrutin - contre douze mois en 2017 - pour pouvoir corriger les imperfections constatées lors des tests grandeur nature.
À long terme, notre septième proposition vise à s'assurer de l'identité des électeurs qui se connectent sur la plateforme de vote, en recourant par exemple à des techniques biométriques. Un tel dispositif simplifierait également la procédure de connexion, en supprimant l'envoi des codes d'identification par courriel et par SMS ; il nécessiterait de nombreuses garanties en matière de protection des données personnelles.
Enfin, nous devons porter une attention particulière aux conséquences, pour les Français de l'étranger, de la prochaine réforme institutionnelle s'agissant des élections législatives.
Les projets de loi déposés sur le bureau de l'Assemblée nationale proposent notamment de supprimer le vote par correspondance lorsque les Français de l'étranger sont autorisés à voter par Internet. Nous n'y sommes pas hostiles mais souhaitons, avec notre huitième proposition, que l'Assemblée des Français de l'étranger soit consultée en amont sur ce choix fondamental entre les deux modalités de vote.
Nos compatriotes établis hors de France disposeraient, après la réforme, de deux votes : un vote pour l'élection au scrutin proportionnel de députés dans la circonscription « Français de l'étranger » (qui deviendrait une circonscription unique), et un vote pour l'élection, également à la proportionnelle, de 61 députés sur une liste nationale. Nous avons constaté avec satisfaction que le vote par Internet serait ouvert pour ces deux scrutins, ce qui présente l'avantage de la cohérence et de la simplicité. Il faut que ce principe soit maintenu au cours de la navette parlementaire.
M. Philippe Bas, président. - Je vous remercie pour votre exposé fort concret qui soulève des questions essentielles pour le fonctionnement de notre démocratie.
Mme Agnès Canayer. - La ville du Havre utilise des machines à voter depuis 2004. Il s'agit d'un engagement démocratique important à l'endroit de nos électeurs.
La ville se trouve désormais au pied du mur : comment expliquer que le système ne fonctionne pas, alors qu'il s'est montré efficace pendant presque quinze ans et qu'aucun problème n'a été déploré ?
L'enjeu est également financier : Le Havre a investi un million d'euros pour l'achat de 150 machines et aimerait pouvoir échelonner le renouvellement indispensable de son parc. Je remercie les rapporteurs pour leur travail, dont l'apport au débat sera essentiel.
M. François Bonhomme. - Votre rapport d'information a le grand mérite de réaliser une analyse exhaustive du sujet. Certes, la sécurité et la fiabilité des dispositifs doivent être améliorées. Pour autant, j'avoue être moins convaincu par l'argument que je qualifierais de « totem moderniste ».
L'acte de vote est sacré dans une démocratie ! Les urnes et le caractère secret du vote, qui n'existaient pas sous la Révolution française, représentent dans ce cadre un immense progrès. Je crains une désacralisation de l'acte de vote s'il venait à être dématérialisé. Nous rappelons souvent que le geste doit être tremblant pour modifier la loi ; changer les modalités du vote ne peut non plus être anodin.
M. François Pillet. - J'apprécie toujours lorsqu'un exposé pédagogique permet un débat éclairé ; je vous remercie donc pour la grande qualité de votre présentation.
Je partage les interrogations de François Bonhomme, en distinguant toutefois l'usage de la machine à voter, qui nécessite toujours l'acte civique et symbolique de se déplacer dans un bureau de vote, du vote par Internet. La nécessité de cette seconde modalité peut néanmoins se comprendre pour nos compatriotes vivant à l'étranger, compte tenu de la distance qui parfois les sépare d'un bureau de vote.
Lors des auditions que vous avez menées ou des déplacements que vous avez effectués, a-t-il été envisagé par certains de vos interlocuteurs que l'expérimentation du vote par Internet puisse être étendue à l'ensemble des électeurs français, y compris lorsqu'ils résident sur le territoire national ? Personnellement, je serais très préoccupé par une telle expérimentation...
M. Henri Leroy. - J'aimerais apporter mon témoignage d'élu municipal de Mandelieu-la-Napoule, qui utilise le vote électronique depuis 2005. Je puis vous assurer que le caractère cérémonieux de l'acte de vote ne s'en trouve aucunement amoindri.
Selon les sondages que nous avons réalisés, les jeunes apprécient la modernité du procédé, tandis que les plus âgés y semblent accoutumés. À Antibes par exemple, où certains bureaux de vote sont équipés de machines à voter et d'autres non, les électeurs qui dépendent de bureaux de vote traditionnels réclament l'installation de machines à voter !
Croyez-moi : l'acte de vote demeure symbolique ; la sensation est intacte. La fraude, en outre, s'avère impossible compte tenu de l'installation de scellés préalablement au vote, au besoin par huissier de justice. D'ailleurs, nous utilisons des machines à voter au Congrès des maires ! Enfin, les mal voyants peuvent, grâce à ce système, voter sans l'aide d'un tiers.
À mon sens, le sujet n'est en réalité préoccupant qu'à cause du moratoire de 2008 qu'il convient de lever, afin de moderniser le parc des machines à voter.
M. Pierre-Yves Collombat. - Je joins mes félicitations à celles de mes collègues concernant la clarté de ce rapport. Il convient de distinguer les machines à voter du vote par Internet, surtout s'il était envisagé une généralisation de ce dernier.
Je n'ai guère d'expérience s'agissant de l'utilisation des machines à voter et la question m'apparaît mineure. Du reste, la fraude, phénomène néanmoins en recul, ne constitue pas un sujet propre aux machines à voter : dans ma région, d'aucuns parlent de « sucrage des urnes »...
Le vote doit, à mon sens, rester un acte sacré qui soude la Nation dans un geste symbolique qu'il ne faut pas perdre.
Le vote par Internet pose, en conséquence, un problème différent. Si son usage paraît, pour des raisons pratiques, logique et de bon sens pour les Français résidant à l'étranger, je ne suis pas favorable à son élargissement à l'ensemble des électeurs. Prenons garde aux dérives modernistes qui remettraient en cause le caractère cérémoniel du vote.
M. Jérôme Durain. - Je ne partage par la crainte exprimée par certains de nos collègues de voir désacralisé le geste électoral. J'ai parfois trouvé les bureaux de vote tristes et austères... Je suis favorable à l'utilisation des machines à voter dès lors que la sécurité et la fiabilité sont garanties.
Mme Jacky Deromedi, rapporteur. - Il me semble effectivement important, comme le mentionnait notre collègue François Pillet, que les électeurs se déplacent physiquement pour voter. J'ai toujours plaisir à le constater, pour les Français de l'étranger, dans nos ambassades et consulats.
Lorsqu'il est mis en oeuvre, le vote par Internet n'est qu'une une possibilité : les urnes existeront ! Dans certains pays où les distances sont considérables, le vote par Internet est toutefois indispensable pour permettre à nos compatriotes expatriés de conserver un lien avec la France, même si les conséquences sur le taux de participation ne paraissent pas évidentes.
En revanche, notre rapport d'information ne préconise nullement la généralisation du vote par Internet à l'ensemble des électeurs résidant sur le territoire français ; le coût en serait trop élevé et le risque de piratage important.
M. Yves Détraigne. - De même, nous ne proposons pas de rendre obligatoire l'usage des machines à voter mais de permettre aux communes utilisatrices de moderniser leurs équipements. Parce qu'il n'est pas relié à Internet, ce dispositif ne pose pas de difficulté en matière de sécurité. Il préserve, en outre, le rituel du vote. Pourquoi, dès lors, bloquer le renouvellement du parc de machines à voter? Une décision de bon sens doit être prise.
M. Philippe Bas, président. - Chers rapporteurs, recevez à nouveau mes remerciements pour votre étude approfondie. Je vous propose d'envoyer le présent rapport d'information, accompagné d'un courrier au Président de la République, au Premier ministre, au ministre de l'intérieur et au ministre de l'Europe et des affaires étrangères, afin d'insister sur l'urgence de la problématique du vote par Internet pour les Français de l'étranger.
La commission autorise la publication du rapport d'information.
La réunion est close à 10 h 35.