Mardi 21 juin 2016
- Présidence de Mme Michèle André, présidente, M. Philippe Bas, président de la commission des lois et M. Jean-Claude Lenoir, président des affaires économiques -La réunion est ouverte à 9 h 05
Transparence, lutte contre la corruption et modernisation de la vie économique - Audition de M. Michel Sapin, ministre des finances et des comptes publics
La commission procède à une audition commune avec la commission des finances et la commission des affaires économiques de M. Michel Sapin, ministre des finances et des comptes publics, sur le projet de loi n° 691 (2015-2016) relatif à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique.
M. Philippe Bas, président de la commission des lois. - Je remercie Michel Sapin d'avoir répondu à l'invitation de la commission des lois pour une discussion sur le projet de loi relatif à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique. Cette audition est élargie aux commissions des finances et des affaires économiques.
Mme Michèle André, présidente de la commission des finances. - Nous sommes heureux d'accueillir Michel Sapin à l'occasion de l'examen d'un projet de loi qui a pour objectif d'assurer la compétitivité de notre système financier et la protection de notre économie, ainsi que celle des épargnants et des assurés. Ce texte nous incite à poursuivre notre réflexion sur la manière dont le Parlement doit intervenir en matière de droit financier. De plus en plus, nos lois sont écrites à Bruxelles ou par ordonnances, et les demandes d'habilitation se multiplient. Nos récents travaux sur l'application des lois ont montré que, si les ordonnances sont généralement publiées et les projets de loi de ratification déposés, la procédure n'aboutit pas toujours, à moins de passer par la voie d'un amendement gouvernemental. À nous de veiller au suivi des nouvelles ordonnances qui seront prises. Je me réjouis d'entendre le ministre sur ces sujets.
M. Jean-Claude Lenoir, président de la commission des affaires économiques. - L'Assemblée nationale a manifesté un grand intérêt pour l'agriculture, le commerce et l'artisanat, puisqu'elle a multiplié par neuf le nombre des articles consacrés à ces domaines, passant ainsi de 4 à 35 articles. L'imagination et l'initiative étaient au rendez-vous.
Sur l'agriculture, le projet de loi enrichi par l'Assemblée nationale reprend pour l'essentiel les propositions que nous avions inscrites dans un texte très largement adopté au Sénat, il y a quelques mois, que le vote d'une question préalable par nos collègues députés avait empêché d'aboutir. Les bonnes idées du Sénat ont été reprises par le Gouvernement et complétées par l'Assemblée nationale. On ne peut que saluer notre influence. Ces mesures portent sur la contractualisation, les conditions de formation des prix, le rôle accru de l'observatoire des prix et des marges, la traçabilité des ingrédients. D'autres innovations concernent l'encadrement des achats de terres agricoles.
Sur le commerce et l'artisanat, la commission des affaires économiques défend la nécessité de protéger les PME. La délégation aux entreprises présidée par Élisabeth Lamure s'est prononcée sur les délais de paiement de droit commun. Nous souhaitons également préserver un équilibre entre le respect des qualifications professionnelles exigées pour exercer un métier artisanal et le souci d'encourager l'initiative personnelle dans la lignée de la loi sur les auto-entrepreneurs. La commission des affaires économiques se réunira cet après-midi pour définir ses propositions.
M. Michel Sapin, ministre des finances et des comptes publics. - J'ai l'honneur de porter ce texte en collaboration avec Jean-Jacques Urvoas pour les dispositions de procédure pénale, avec Stéphane Le Foll pour celles qui touchent à l'agriculture et avec Emmanuel Macron pour les questions économiques. Quels que soient les domaines de la vie économique et de la vie publique abordés, les objectifs sont les mêmes : d'une part, fixer des limites pour lutter contre une finance utilisée à des fins contraires à la morale et à l'efficacité économique ; d'autre part, encourager la meilleure utilisation possible de l'argent de la finance au service de la production, de la création d'emplois, de l'initiative et du développement économique. Autrement dit, sans être caricatural, il s'agit de distinguer entre une finance mal utilisée, qu'il faut combattre, et une finance indispensable au développement économique, qu'il faut encourager.
Cette loi dite « Sapin 2 » - et je ne peux que remercier ceux qui l'ont ainsi nommée - rappelle que j'étais déjà présent devant vous, il y a une vingtaine d'années, pour défendre les mêmes objectifs. En traitant du financement de la vie politique et de la transparence des marchés, la loi « Sapin » luttait contre la corruption sur le territoire national. La loi « Sapin 2 » porte la lutte au niveau transnational.
Les dispositions sur la protection des lanceurs d'alerte ont été considérablement enrichies par l'Assemblée nationale, à juste titre si l'on tient compte du récent rapport du Conseil d'État. Le législateur doit concilier la protection de la liberté d'expression du lanceur d'alerte et la sauvegarde des droits publics, la protection des droits des tiers, et en particulier le droit au respect de la vie privée. L'alerte éthique repose sur la responsabilité individuelle et le sens de l'intérêt général. Elle ne peut s'affranchir des règles qui encadrent sa publicité, qu'il s'agisse de son authenticité, de son bien-fondé ou de l'implication des autorités compétentes. Le droit actuel ne suffit pas à assurer cet équilibre. Chacun connaît les cas récents qui ont montré combien la protection des lanceurs d'alerte était insuffisante.
La loi doit donner une définition précise et étendue du lanceur d'alerte. Elle doit prévoir une protection pour ceux qui dénoncent de graves atteintes à la légalité, mais aussi pour ceux qui s'attaquent à des situations qui, sans être illégales, n'en sont pas moins choquantes dans une société comme la nôtre : les scandales de Luxleaks révélés par Antoine Deltour, par exemple.
Il s'agit également de déterminer un régime d'aides financières accordées au lanceur d'alerte pour faire face aux procédures judiciaires engagées contre lui, parfois pendant des années, ou pour faire valoir ses droits. La loi doit prévoir l'avance des frais de procédure judiciaire au bénéfice du lanceur d'alerte. Elle doit aussi garantir la réparation rapide des dommages financiers et moraux, à charge pour l'autorité publique de se retourner contre leurs auteurs pour récupérer la somme qu'elle aura versée au lanceur d'alerte.
L'Assemblée nationale a modifié les dispositions relatives au répertoire des représentants d'intérêts. C'est un système que vous connaissez bien, pour avoir créé un répertoire des représentants d'intérêts auprès du Sénat. L'Assemblée nationale a élargi la liste des autorités publiques auprès desquelles les représentants d'intérêts peuvent se manifester. Elle a prévu de nouvelles obligations déclaratives et créé une sanction complémentaire d'interdiction d'entrée en communication avec les autorités publiques, en cas de manquements répétés aux obligations légales. L'action des représentants d'intérêts doit être rendue transparente par la loi. Il ne s'agit pas de stigmatiser les représentants d'intérêts. Cependant, s'il n'y a rien d'anormal à faire valoir des intérêts privés, cela le deviendrait si on le faisait de manière dissimulée.
Je crois utile de rappeler que la transparence n'est pas sans limites. En plus des bornes fixées par la Constitution, le dispositif qui garantit la transparence doit rester opérationnel. S'il est trop compliqué, il sera inefficace. Je suis favorable à un registre unique, commun au Gouvernement et au Parlement - aux assemblées parlementaires d'en décider. Je suis favorable à l'application des mêmes obligations à l'ensemble des représentants d'intérêts, quelle que soit l'autorité publique avec laquelle ils communiquent. Les obligations déclaratives et déontologiques qui seront prévues par la loi, conformément à l'article 34 de la Constitution, ne pourront pas méconnaître le droit à la liberté de communication. Dans ces conditions, le répertoire des représentants d'intérêts sera un outil qui participera de manière efficace à l'entreprise de re-légitimation de l'action publique engagée depuis quelques années.
En matière de lutte contre la corruption transnationale, les classements de l'OCDE sont très défavorables à la France, car notre législation et nos réglementations se conforment peu aux standards définis par l'organisation. Les classements des ONG, comme Transparency international, ne donnent pas une meilleure image de la France ou des entreprises françaises présentes à l'étranger. Même si nous bénéficions depuis 2000 d'un dispositif d'incrimination de corruption d'agents publics étrangers, pas une entreprise française n'a été définitivement condamnée à ce jour. Aux États-Unis, aux Pays-Bas ou en Grande-Bretagne, les mêmes faits seraient condamnés très lourdement. Cette situation nuit à notre image, à la compétitivité de nos entreprises et à notre souveraineté. Sans compter qu'il serait préférable que les amendes soient payées à l'État français plutôt qu'à la justice américaine...
Mieux prévenir : tel est le mot d'ordre pour lutter contre la corruption. Le projet de loi prévoit la création d'une Agence nationale de prévention de la corruption, qui prendrait la suite du service central de prévention de la corruption, avec des pouvoirs renforcés et des missions supplémentaires. Il impose aussi une obligation de vigilance aux grandes entreprises et aux établissements publics à caractère industriel et commercial. Enfin, il renforce notre arsenal répressif, en créant une peine complémentaire de mise en conformité des procédures de prévention et de détection de la corruption pour les entreprises. L'Assemblée nationale a également inscrit dans le texte la convention judiciaire d'intérêt public, qui sera un outil fort utile s'il est bien encadré et conforme aux principes du droit français (intervention du juge du siège, publicité des débats, etc.).
Vous pourrez encore améliorer le texte pour lui garantir sa pleine cohérence et veiller à ce que notre pays soit aux meilleurs standards en matière de lutte contre la corruption. J'attire cependant votre attention sur la nécessité de maintenir le pouvoir de sanction de l'Agence nationale de prévention de la corruption : c'est un gage de son efficacité et de sa célérité.
Pour encourager la modernisation de la vie économique, pour faire que la bonne finance aille au bon endroit, le projet de loi prévoit aussi de renforcer la régulation financière. On gagnera ainsi en stabilité financière et en compétitivité, tout en protégeant davantage les épargnants. Plusieurs mesures étoffent les pouvoirs de l'Autorité des marchés financiers (AMF) et de l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR). Nous créerons en particulier un régime de résolution pour les assurances, une première en Europe, afin de renforcer la stabilité financière et la protection des assurés. Nous veillerons en regard à harmoniser le code de la mutualité, en dotant les mutuelles d'une gouvernance modernisée. Il vous sera proposé de travailler par voie d'ordonnance, sur ces sujets infiniment techniques. Soyez assurés que nous vous donnerons autant de précisions que possible sur le travail engagé.
L'Assemblée nationale a souhaité renforcer les pouvoirs du Haut Conseil de stabilité financière, créé il y a trois ans. C'est une institution qui veille à l'interaction entre les développements financiers et la stabilité économique. Je suis heureux que le Parlement ait compris le rôle majeur qu'elle pouvait jouer. Plusieurs de vos amendements ont du reste pour objet de renforcer le dispositif de sanction dans le domaine financier ou de préciser les pouvoirs de ce Haut Conseil. J'y suis globalement favorable, ainsi qu'à la disposition novatrice introduite par les députés pour lutter contre les pratiques prédatrices des fonds vautours. L'Assemblée nationale a trouvé un bon équilibre dans la rédaction, que je soutiens.
Une disposition adjacente du Gouvernement améliore la protection des biens d'États étrangers. Je tiens à préciser qu'elle n'a rien à voir avec la question des biens mal acquis. Bien évidemment, il ne s'agit pas de protéger les intérêts de tel ou tel État étranger, mais de mettre la France en conformité avec ses engagements internationaux, en protégeant uniquement les biens diplomatiques, sous contrôle du juge pour vérifier l'absence d'abus de droit.
Pour protéger les consommateurs et les épargnants, l'Assemblée nationale a souhaité, comme moi, interdire la publicité des plateformes internet qui proposent des instruments financiers très risqués. L'AMF avait attiré notre attention sur le nombre considérable de réclamations à ce sujet. De nombreuses personnes qui ont écouté les slogans « devenez trader en quelques jours » ou « jouez sur le Forex » ont été victimes de pratiques frauduleuses qui leur ont fait perdre beaucoup d'argent. Même sur les sites légaux, 90 % des investisseurs sont perdants. Nous allons renforcer la portée de l'interdiction votée par les députés.
Pour faciliter le financement de l'économie, le projet de loi crée un régime prudentiel adapté pour les régimes de retraite supplémentaire, en maintenant un niveau de protection élevé et en autorisant l'utilisation de cette épargne au profit du financement des entreprises françaises. Ces perspectives nouvelles de rendement pour les épargnants dégageront plusieurs dizaines de milliards d'euros pour le financement de l'économie.
Une partie de l'épargne sur livret de développement durable pourra être affectée au financement d'une personne morale relevant de l'économie sociale et solidaire, dont je rappelle qu'elle représente 10 % du PIB de la France. L'Assemblée a souhaité étendre en sa faveur les obligations d'emploi de l'épargne réglementée qui incombent aux banques. Vous préférez revenir au texte initial du Gouvernement : de mon point de vue pourtant, l'extension des obligations d'emploi inciterait les banques à investir davantage dans ce secteur et c'est la raison pour laquelle j'y étais favorable.
L'Assemblée nationale a cherché à favoriser plus fortement le parcours de croissance des entreprises, notamment artisanales. Le texte actuel maintient ainsi un niveau de qualification élevé pour l'accès aux professions artisanales, tout en clarifiant certaines situations qui relèvent des « activités multiservices » et qui bénéficieront d'une certaine souplesse. Les députés ont également voulu enrichir le volet agricole du texte, pour apporter plus de transparence sur les ventes de foncier agricole.
Enfin, s'agissant de la rémunération des dirigeants des sociétés cotées, je me félicite de votre approche constructive. Les députés ont introduit des dispositions, avec le soutien du Gouvernement. Votre rapporteur a proposé de clarifier et de renforcer le dispositif. Je serai favorable à vos propositions dès lors que l'équilibre du texte des députés sera respecté : l'assemblée générale des actionnaires doit non seulement pouvoir donner son avis mais également être en mesure de reconsidérer le niveau de la rémunération des dirigeants. C'est une révolution que la Suisse a déjà opérée. Comme chacun sait, il s'agit là du plus grand des pays révolutionnaires d'Europe centrale...
C'est avec une vraie émotion que, près de vingt-cinq ans après avoir présenté à votre assemblée un projet de loi portant quasiment le même titre, j'engage aujourd'hui le débat avec vous. Peut-être y aura-t-il une loi « 3 » ou même « 4 », mais je ne serai plus là pour la défendre dans vingt-cinq ans ou dans quarante ans...
M. Philippe Bas, président. - Nous vous remercions pour la précision et la clarté de votre exposé, sur une matière assez protéiforme.
M. François Pillet, rapporteur de la commission des lois. - Aborder en si peu de temps l'ensemble de ce texte que l'Assemblée nationale a enrichi de 57 à 172 articles est un défi difficile à relever. La création d'une Agence nationale de lutte contre la corruption, le répertoire unique des représentants d'intérêts, l'aggravation des sanctions pénales pour divers délits d'atteinte à la probité publique, la mise en place d'un statut général protecteur des lanceurs d'alerte sont autant de sujets forts. La France mérite certainement une meilleure image auprès de l'OCDE. Par conséquent, la commission des lois examinera ce texte attendu et annoncé depuis longtemps dans un esprit très constructif.
Les mesures qui concernent la transaction pénale ou la rémunération des dirigeants ne devraient pas poser de difficultés majeures.
Il n'en va pas de même pour les missions que vous proposez d'attribuer aux différents acteurs de la lutte contre la corruption. Le projet de loi réinjecte de la confusion entre, d'une part, la prévention et la détection de la corruption, qui peuvent relever de l'administration et, d'autre part, la répression, pour laquelle on ne saurait trouver meilleur garant que l'autorité judiciaire. Je m'étonne de ce glissement qui tend à donner aux autorités administratives des pouvoirs de nature pénale. On a créé récemment un procureur national financier, il serait légitime de le conforter dans cette mission de lutte contre la corruption. De mon point de vue, la répression, c'est l'autorité judiciaire. La prévention, ce peut être les autorités administratives avec des pouvoirs renforcés. Nous ne souhaitons pas que les autorités administratives et judiciaires soient confondues, cela serait immédiatement sanctionné par le Conseil constitutionnel.
Enfin, les entreprises françaises ne peuvent pas être soumises à des standards différents de ceux auxquels se soumettent leurs concurrents. Si, au nom de la simplification, on leur impose une gestion de leur activité plus complexe, le choix sera simple : il suffira d'une fusion pour qu'elles déplacent leur siège social hors de France. C'est une inquiétude que je n'ai cessé d'entendre lors des auditions que j'ai menées. Veillons à ne pas en faire plus que ce que demandent les autorités internationales.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur de la commission des finances. - La version initiale du projet de loi présentait des dispositions satisfaisantes. Certains ajouts de nos collègues députés ont nui à la cohérence du texte et introduit certains points gênants, comme à l'article 45 bis, notamment, sur le reporting pays par pays. On prévoit l'application anticipée en France de la directive européenne encore en discussion, avec des seuils d'application plus élevés pour les entreprises. Le risque est évident non seulement pour la compétitivité de nos entreprises, mais aussi en matière fiscale. Les autorités fiscales de certains pays risquent de taxer davantage nos entreprises qui y exportent leurs produits au détriment des recettes fiscales françaises. Restons prudents. Même si nous ne sommes pas contre la transparence, pourquoi vouloir appliquer seuls ces dispositions, alors qu'aucun instrument communautaire ne fixe des règles communes.
Nous avons également été très étonnés par le grand nombre de dispositions concernant les habilitations à prendre des ordonnances. Quand les délais sont contraints, il est tout à fait normal de procéder ainsi. Cependant, dans le texte, un certain nombre d'habilitations introduites par voie d'amendement ont un caractère très large, comme à l'article 21 bis A la disposition qui autorise le Gouvernement à réformer entièrement le code de la mutualité française par voie d'ordonnance. Nous n'avons aucune idée des intentions du Gouvernement sur le fond. Il faudrait au moins un débat parlementaire sur une telle réforme. Même interrogation sur l'article additionnel qui autorise à prendre des dispositions sur la technologie Blockchain, même si nous estimons que des dispositions sont utiles. On ne peut pas esquiver le débat parlementaire au profit d'habilitations du Gouvernement à prendre des mesures par ordonnance.
Quant aux lanceurs d'alerte, il est prévu sans doute à juste titre de financer leur protection. Pour faire le pendant, il faudrait cependant prévoir d'indemniser les victimes en cas d'alertes infondées. Par ailleurs, je m'interroge sur le secret fiscal. Comment se combine-t-il avec la protection des lanceurs d'alerte ? Enfin, le texte prévoit qu'il reviendrait au Défenseur des droits de faire réparation aux lanceurs d'alerte des dommages moraux et financiers qu'ils auraient subis. Comment pourrait-il être en mesure d'évaluer ces dommages ? Le Défenseur des droits a surtout un rôle d'alerte. Quand il s'agit de réparer un préjudice, c'est à la justice française d'oeuvrer.
M. Daniel Gremillet, rapporteur pour avis de la commission des Affaires économiques. - La commission des affaires économiques est saisie par délégation d'un certain nombre d'articles qui a considérablement enflé après le passage du texte à l'Assemblée nationale. Le texte étudié lors des premières auditions n'a plus rien à voir avec le texte final. Je le regrette, en tant que rapporteur. Les députés ont ouvert de nombreux volets sans développer aucune vision d'ensemble, et cela dans des domaines où l'improvisation n'a pas sa place. La question du foncier agricole, celle des relations commerciales sont ainsi concernées au premier chef.
La protection du foncier agricole pose la question de la préservation des structures traditionnelles, souvent familiales, et de la libre disposition des terres par leurs propriétaires. Le dispositif adopté à l'Assemblée nationale étend de facto le droit de préemption des Safer. Certes, cette solution est sans doute utile pour lutter contre la spéculation ; elle n'en reste pas moins précipitée tant le sujet est complexe et ne peut donner cours au bricolage.
L'Assemblée nationale a multiplié les dispositions qui modifient le dispositif de la loi de modernisation de l'économie. Le Gouvernement a présenté un amendement autorisant les contrats pluriannuels en matière de relations commerciales et modifiant la date butoir de conclusion des contrats. Certains s'élèvent contre cette mesure qui risque de déstabiliser les négociations et de renforcer la position des distributeurs. J'aimerais avoir votre avis sur ce point.
La loi prévoit également de faire apparaître dans le contrat le prix moyen entre les producteurs et les entreprises, et entre les entreprises et les distributeurs, afin de garantir le prix le plus bas. L'idée peut être généreuse ; on risque néanmoins d'aller à l'inverse du but recherché. Qu'en pensez-vous ?
Enfin, l'Assemblée nationale a contenu l'ambition du Gouvernement sur l'ouverture des qualifications professionnelles, afin que l'activité artisanale ne soit pas dévalorisée. Le Gouvernement entend-il se satisfaire du compromis trouvé par les députés ?
Mme Michèle André, présidente. - J'ai été rapporteure pour avis de la loi relative à la consommation. L'article 25 bis supprime la phase de conciliation entre les créanciers et les débiteurs non propriétaires de leur logement. Il faut se demander dans quelle mesure il est concevable de priver ainsi les organismes HLM de la possibilité de faire valoir leurs droits et de traiter différemment les surendettés selon qu'ils sont propriétaires ou non.
Mme Élisabeth Lamure. - Certains dispositifs introduits par voie d'amendement à l'Assemblée nationale risquent de peser lourdement sur les PME, comme l'obligation de mettre en place une procédure interne pour recueillir les alertes dans les entreprises de plus de 50 salariés. Le seuil est bas : encore une mesure qui dissuadera les entreprises de se développer ! Les collectivités - villes de plus de 10 000 habitants, EPCI, départements - seront soumises également à cette obligation : ce sera autant de nouvelles charges pour elles. On nous demande de ratifier une ordonnance sur les marchés publics dont les dispositions sont bien complexes pour les PME. Idem pour les conditions strictes de l'accès à l'auto-liquidation de la TVA. Enfin, le reporting fiscal anticipe la directive européenne et abaisse le seuil de 750 à 50 millions d'euros de chiffre d'affaires.
Une autre disposition concerne la dérogation sur les délais de paiement pour les entreprises de grand export. La loi de modernisation de l'économie avait fixé de nouvelles règles ; la commission des affaires économiques a supprimé cette dérogation à une large majorité dans le projet de loi relatif à la consommation de 2014 ; la dérogation a été rétablie en novembre 2015 dans une proposition de loi rejetée par la commission des affaires économiques et finalement retirée par le groupe socialiste. La disposition revient dans ce projet de loi. Nos arguments restent les mêmes : l'allongement des délais de paiement se fait au détriment des PME. En 2014, l'observatoire des délais de paiement avait donné un avis défavorable à cette mesure. Pourquoi y revenir ?
M. Pierre-Yves Collombat. - Vous défendez des mesures d'équilibre, mais en matière de lutte contre la corruption, a-t-on besoin d'équilibre ? Ne vaudrait-il pas mieux, comme le soutient mon collègue François Pillet, confier à la justice la sanction des délits ? On se perd dans cet amoncellement de dispositions, d'organismes, de mesures de prévention, et l'on en retire l'impression que les délits financiers ne sont pas vraiment considérés comme des délits. C'est à la justice de prononcer des sanctions.
M. Éric Bocquet. - La France étant en retard dans la protection des lanceurs d'alerte, votre texte était très attendu. Or les ONG, après le vote de l'Assemblée nationale, ont fait part de leur déception, de réserves vis-à-vis de la limitation de cette notion aux domaines de l'environnement ou de la sécurité publique. Ainsi, le nouveau cadre défini par le texte ne prendrait pas en compte la situation du lanceur d'alerte de LuxLeaks, Antoine Deltour.
Qu'entendez-vous par « finance mal utilisée » ? La bonne finance et la mauvaise finance, c'est un peu comme le bon chasseur et le mauvais chasseur du sketch des Inconnus : on a du mal à faire la différence...
M. Gérard Longuet. - La distinction que vous faites entre bonne et mauvaise finance n'est pas opérationnelle. En économie, chacun cherche à tirer parti du système existant ; ceux qui innovent sont d'abord mal reçus, et bien souvent les condamnés d'hier seront salués demain, et vice versa. À qui revient-il de tracer la frontière, sinon à l'autorité de la justice ? Je suis de culture libérale, mais je n'ignore pas que notre pays s'est construit autour de son État, à qui appartient le privilège de l'action publique. Or via les lanceurs d'alerte, soutenus par les ONG, il y a une privatisation de l'action publique. Les poursuites sont de la responsabilité de l'État, et plus précisément du parquet, elles ne sauraient être ainsi déléguées à l'initiative individuelle ou associative. Ces constructions légales sont inquiétantes car elles feront peser un soupçon de délit sur chaque innovation. Comment opérer le distinguo entre bon et mauvais comportement ? Entre bonne et mauvaise finance ? Un exemple : les grands exportateurs français sont bien souvent sollicités par les pays acheteurs pour des offsets, c'est-à-dire des contreparties industrielles. La corruption traditionnelle est condamnable, elle nuit d'abord aux entreprises en faussant la concurrence ; mais qui jugera de la validité des demandes d'offset ? Des lanceurs d'alerte dénonceront des concurrents bien placés... Je préférerais que cela reste sous l'autorité du juge.
M. Jacques Mézard. - Votre texte semble ignorer totalement la proposition de loi sur les autorités administratives indépendantes, déposée au Sénat et prochainement examinée en deuxième lecture par l'Assemblée nationale. Entendez-vous en tenir compte ou poursuivez-vous votre route, sachant que les parallèles ne se rejoignent jamais ?
M. Jean-Claude Lenoir, président. - Du moins dans le système euclidien...
M. Jacques Mézard. - Dans tous les domaines, la tendance est à la dé-judiciarisation ; les peines en matière financière ont été ramenées à cinq ans maximum, les délits correspondants peuvent donc faire l'objet de transactions pénales - une pratique devenue très courante. Je crains qu'un développement sans véritable contrôle des systèmes de protection des lanceurs d'alerte ne facilite l'utilisation de la procédure à mauvais escient. Il faut protéger ceux qui considèrent, à juste titre, que la loi n'est pas respectée ; mais il serait malvenu de développer des dispositifs qui bloquent notre pays et s'ajoutent à la complexité existante.
M. Michel Sapin, ministre. - Vous m'avez posé des questions très précises et concrètes, en particulier dans le domaine économique, et je ne suis pas en mesure de répondre à toutes ! Pour ce qui touche à l'agriculture, Stéphane Le Foll se tient à votre disposition. Je commence ainsi par un aveu d'ignorance, mais cela vaut mieux que de tenir des propos inexacts...
Beaucoup de vos remarques, légitimes, ne s'appliquent cependant pas à ce texte. Vous critiquez à bon droit la profusion des autorités administratives indépendantes, mais nous n'en créons aucune ici. Même si la tentation a existé, l'Assemblée nationale a jugé préférable de faire intervenir le Défenseur des droits, qui est une autorité indépendante et constitutionnelle. Nous cherchons, soyez-en assuré, à réduire le nombre de ces autorités, au nom de l'efficacité.
Je constate que les critiques de la distinction entre bonne et mauvaise finance viennent de deux personnalités très différentes, qui vont jusqu'à la tourner en dérision.
M. Gérard Longuet. - Nous cherchons à comprendre...
M. Michel Sapin, ministre. - La corruption, est-ce de la bonne finance ?
M. Gérard Longuet. - Où commence la corruption ?
M. Michel Sapin, ministre. - Corrompre des personnalités politiques et administratives au Nigeria ou ailleurs pour remporter un contrat, est-ce une bonne pratique ? C'est contraire aux principes éthiques et moraux. Économiquement, c'est une aberration car on emporte ainsi un marché par d'autres moyens que la qualité des produits et services délivrés ou le prix. Nos entreprises françaises sont les premières à dénoncer des mécanismes de cette nature. C'est pourquoi il faut veiller au respect des règles de l'OCDE dans tous les pays, en particulier les pays émergents qui n'ont pas de culture bien établie en la matière. Acheter une autorisation administrative ou la bienveillance des autorités n'est pas une manière convenable de procéder. La corruption transnationale sévit en premier lieu dans les pays pauvres. Ailleurs, elle est plus rare.
M. Pierre-Yves Collombat. - Quand on vend des armes...
M. Michel Sapin, ministre. - On n'est pas obligé d'acheter des généraux pour vendre des armes !
Les pays en voie de développement pâtissent eux aussi de ces pratiques : l'argent dépensé par l'entreprise se répercute dans le prix payé par le pays ou le bailleur de fonds qui le soutient. Il est légitime, du point de vue économique, d'envisager des mécanismes de compensation industrielle ou des transferts de technologie, mais pas des compensations au profit d'individus, qui le placeront dans quelque île ensoleillée... Il est un peu trop caricatural, j'en conviens, d'opposer bonne et mauvaise finance.
M. Gérard Longuet. - Voilà !
M. Michel Sapin, ministre. - Néanmoins, il est des chasses de qualité, qui préservent la nature et associent toutes les parties prenantes, et d'autres bien différentes... C'est le fondement de ce texte : il y a des manières d'utiliser l'argent qui corrompent, d'autres qui sont très utiles. Ainsi, les règles prudentielles obligent les compagnies d'assurance à utiliser l'épargne de leurs clients dans des placements liquides et à court terme, comme des obligations d'État ; cela rend service à l'État, certes, mais pas forcément à l'économie. Il convient d'orienter les fonds vers des emplois utiles, les Français y sont profondément attachés.
Ce texte introduit-il une confusion entre les pouvoirs administratifs et judiciaires et le rôle des lanceurs d'alerte ? Ces derniers se contentent de divulguer des informations, ils ne provoquent pas les poursuites. Des révélations non pertinentes, destinées à porter atteinte à la réputation d'une entreprise ou motivées par la vengeance, ne donneront pas lieu à l'ouverture d'une information judiciaire.
Pas davantage de confusion entre la justice et l'autorité administrative. Cette autorité peut constater qu'une entreprise n'a pas mis en oeuvre des dispositifs de prévention et prononcer des sanctions administratives. Ce faisant, elle met en application l'obligation de vigilance créée par la loi : les entreprises doivent former leurs commerciaux appelés à intervenir dans des pays considérés comme dangereux, mettre en place des référents en matière de déontologie, etc. Mais la poursuite des faits de corruption reste entre les mains de la justice, quelle que soit la procédure utilisée, y compris la convention pénale. Je reconnais les imperfections rédactionnelles relevées par Éric Bocquet, mais l'objectif est sans ambiguïté. Nous souhaitons qu'Antoine Deltour reçoive la protection nécessaire. Le lanceur d'alerte est une personne qui révèle des faits illégaux ; pour les agents publics, la procédure est encadrée par l'article 40 du code de procédure pénale.
La principale difficulté réside dans la définition des pratiques contraires à l'intérêt général. Pour la santé, cela de ne pose pas de problème : les laboratoires qui n'agiraient pas dans des conditions éthiquement irréprochables sont visés. Il en va de même dans le domaine environnemental. Mais dans le domaine financier, c'est plus délicat - même si, dans notre exemple, l'État luxembourgeois a lui-même mis fin à la situation dénoncée par Antoine Deltour. Cela a donné lieu à une directive européenne prévoyant une transparence absolue sur la situation fiscale des entreprises et interdisant aux États de négocier des conventions fiscales sans coordination.
Mes équipes sont prêtes à travailler avec vous pour trouver la meilleure définition, sans pour autant porter atteinte au secret fiscal, qui protège les contribuables. Je n'hésiterai pas à prendre les mesures administratives ou judiciaires qui s'imposent en cas de divulgation.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur. - Dans ce cas, pourquoi ne pas l'écrire dans le texte ?
M. Michel Sapin, ministre. - Nous sommes prêts à travailler avec le Parlement pour affiner l'écriture et prévoir le traitement de situations anormales comme celle qu'Antoine Deltour a dénoncée.
Le Défenseur des droits vérifiera les informations recueillies par le lanceur d'alerte, saisira éventuellement la justice des faits dénoncés et le soutiendra de deux manières : en le protégeant contre les discriminations - licenciement ou autres - que pourrait lui valoir son acte et, le cas échéant, en le soutenant financièrement, dans l'attente de l'indemnisation. Certains lanceurs d'alerte sont engagés dans des procédures extrêmement lourdes et longues.
L'article 45 bis prévoyant un rapport pays par pays - j'emploie le mot français ! -sur l'activité des multinationales fait débat. Les échanges entre administrations fiscales pour aider chaque État à percevoir les impôts qui lui sont dus sont déjà prévus dans la loi, en vertu d'une décision européenne. Des événements récents ont donné une actualité nouvelle à la question : ces informations doivent-elles être rendues publiques, accessibles aux citoyens et aux ONG ? En publiant de manière unilatérale les activités de ses multinationales, notre pays se mettrait en difficulté ; de plus, l'information apporterait peu aux citoyens, en l'absence de points de comparaison internationale. Le plus important est la réciprocité, qui ne figure pas dans les dispositions de l'OCDE, mais est prévue par le projet de directive en cours de discussion au Conseil des ministres des finances de l'Union européenne, l'Ecofin. Une décision du Conseil constitutionnel de 2015 a confirmé l'inconstitutionnalité de la divulgation publique de ces données. En revanche, la directive rendra constitutionnelle la disposition. Par conséquent, je suis favorable au rapport pays par pays, à condition que ce soit dans le cadre de cette directive européenne.
L'habilitation à légiférer par ordonnance : vieux débat... Monsieur Sueur, votre prédécesseur à la présidence de la commission des lois était particulièrement intransigeant sur ce point ! Mais vous n'ignorez pas que la transposition des directives européennes représente des paquets de législation considérables. Une ou deux des habilitations en cours méritent sans doute d'être précisées mais, globalement, elles sont de bonne administration, d'autant que vous n'auriez pas véritablement les moyens de travailler sur ces sujets. Je m'engage néanmoins à apporter des précisions au rapporteur général de la commission des finances sur l'habilitation que nous demandons pour réformer le code de la mutualité ; on pourrait, par exemple, la réduire aux secteurs sur lesquels nous souhaitons avancer.
Chargée de la mise en oeuvre de la procédure de lutte contre le surendettement avec les commissions départementales, la Banque de France a constaté la faible utilité du volet des procédures relatif à la recherche d'une conciliation. Il ralentit les décisions, sans garanties supplémentaires pour les personnes concernées. La disposition proposée par la Banque de France réduirait par conséquent leur durée, tout en conservant l'intervention du magistrat à chaque étape. Néanmoins, je n'ignore pas les préoccupations légitimes des banques et des organismes HLM, et nous sommes prêts à examiner le dispositif avec vous.
M. Philippe Bas, président. - Je vous remercie.
La réunion est levée à 10 h 30
Mercredi 22 juin 2016
-- Présidence de Mme Michèle André, présidente -La réunion est ouverte à 8 h 30.
Transparence, lutte contre la corruption et modernisation de la vie économique - Examen du rapport pour avis
La commission examine le rapport pour avis de M. Albéric de Montgolfier sur le projet de loi n° 691 (2015-2016), adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relatif à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique.
Mme Michèle André, présidente. - Notre rapporteur général, Albéric de Montgolfier, va nous présenter son rapport pour avis et ses amendements sur le projet de loi relatif à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique, dit « loi Sapin II », sur lequel la commission des lois est saisie au fond, mais nous a donné de nombreuses délégations au fond. À la demande du rapporteur, nous émettrons également un avis sur certains articles sur lesquels nous n'avons pas reçu de délégation au fond. Les modifications que nous proposerons sur les articles pour lesquels nous avons reçu une délégation au fond, en adoptant les amendements du rapporteur et ou en émettant un avis favorable aux amendements des autres sénateurs, ont vocation à être intégrées à son texte par la commission des lois.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur pour avis. - Ayant initialement pour objet « la transparence, la lutte contre la corruption et la modernisation de la vie économique », ce projet de loi comprenait 57 articles. Après son passage à l'Assemblée nationale, il en comporte 172, soit un quasi triplement du texte, devenu un vaste ensemble assez hétéroclite, allant du bien-être animal dans les abattoirs à la lutte contre la corruption. De nombreuses dispositions ont été ajoutées par les députés et le Gouvernement. Michel Sapin lors de son audition hier a eu quelques difficultés à justifier un certain nombre de ces ajouts, sur lesquels il a reconnu n'être pas compétent.
Notre commission a reçu une délégation au fond pour examiner 56 articles, relatifs à des dispositions très diverses que je ne détaillerai pas, hormis les plus importantes ou celles faisant l'objet d'amendements, et elle s'est saisie pour avis de 5 articles supplémentaires.
Notre principal regret, dans ce texte fourre-tout, c'est que 19 articles portent habilitation du Gouvernement à prendre par ordonnance des mesures relevant du domaine de la loi ; 15 habilitations sont inscrites dans les articles de notre compétence. Parmi celles-ci, six ont été introduites par des amendements du Gouvernement à l'Assemblée nationale, sans aucun débat ni étude d'impact préalable. Je vous proposerai de conserver celles qui transposent des directives communautaires imposant des délais de mise en oeuvre rapprochés - par exemple le paquet Market Abuse Directive-Market Abuse Regulation (MAD-MAR) sur les abus de marché - ou portant sur des sujets très techniques, comme la deuxième directive sur les services de paiement (directive DSP 2). Entre les décisions européennes et la transposition par ordonnance, l'espace laissé au débat national se restreint...
Sont plus douteuses les habilitations pour donner un cadre juridique aux opérations sur titres non cotés au moyen de Blockchain, à l'article 34 ter, ou pour refondre complètement le code de la mutualité, à l'article 21 bis A, sans que l'on sache rien des intentions du Gouvernement et alors que la ministre des affaires sociales avait annoncé un projet de loi il y a tout juste un an. Hier, Michel Sapin était un peu sec sur cette question ! Ces ordonnances ne sont pas dictées par l'urgence, elles sont politiques, et nous estimons que les sujets méritent un débat parlementaire.
Nous sommes très attachés aux droits du Parlement. Il est préférable d'opérer les transpositions en dur, comme cela a été fait pour la répression des abus de marché : le Parlement peut alors, en l'absence d'urgence, se saisir du débat. L'article 20 du présent projet de loi instaure ainsi un plafond de 15 % du chiffre d'affaires pour les sanctions des personnes morales par l'Autorité des marchés financiers (AMF). Nous pourrions étendre ce plafond aux sanctions pénales en matière d'abus de marché et aux sanctions prononcées par l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR).
Se posent également des problèmes de frontière entre le législatif et le réglementaire. J'ai été très vigilant sur l'équilibre entre la loi et le décret. Je vous proposerai donc de revenir sur la possibilité accordée au Gouvernement de fixer librement les conditions dans lesquelles les fonds d'investissement peuvent prêter aux entreprises. Nous sommes au coeur du shadow banking, il est important que le législateur fixe lui-même des garde-fous.
Le texte comprend également des dispositions sur le contrôle prudentiel des établissements bancaires. Il introduit un régime purement national de résolution pour les entreprises d'assurances, toujours par voie d'ordonnance. Il élargit les compétences du Haut Conseil de stabilité financière (HCSF), qui se verrait attribuer des pouvoirs très importants. Mieux vaut encadrer ces dispositions, compte tenu de leurs effets potentiels sur les assurés.
Le texte de loi comprend aussi plusieurs mesures interdisant la publicité en faveur des produits financiers hautement spéculatifs et complexes - Forex, options binaires ou autres segments de marché où les risques de perte sont considérables et où les escrocs sont à l'affût. Cela va dans le bon sens. Nous avions évoqué ce sujet avec Gérard Rameix, le président de l'AMF. Plusieurs de mes amendements sécurisent et renforcent la portée des dispositions en matière de publicité. Par exemple, la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) pourra sanctionner tout intermédiaire contribuant à la diffusion d'une publicité illégale. Je vous proposerai aussi de mieux encadrer la publicité pour les produits défiscalisés, notamment dans l'immobilier dans la ligne des dispositions que Philippe Dallier avait fait adopter dans la loi consommation de 2010. Le Gouvernement les avait oubliées : elles ne sont pas codifiées et donc pas appliquées aujourd'hui.
M. Michel Bouvard. - J'avais proposé cela il y a dix ans, mais le Gouvernement - le nôtre ! - l'avait refusé.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur pour avis. - Pour le secteur bancaire, prenons acte de la réduction de la durée de validité des chèques. En revanche, revenons au texte du Gouvernement sur le financement des organismes de l'économie sociale et solidaire (ESS) par les titulaires d'un livret de développement durable (LDD) : l'identification des acteurs de l'ESS est difficile et n'a toujours pas été effectuée par l'Insee. Le dispositif proposé impose aux banques de proposer chaque année à leurs clients titulaires d'un LDD de faire des dons à ces entreprises et associations. Rien ne prouve encore que cela se révèlera efficace et le dispositif ne doit en aucun cas être étendu au livret A comme le proposent nos collègues députés ! Les établissements auraient à gérer des tonnes de paperasse !
Je vous proposerai aussi un article additionnel pour interdire le versement des cautions pénales en espèces au-delà d'un montant fixé par décret. Le paiement en espèces des impôts ou des créances publiques est limité à 300 euros, ce qui est parfois compliqué pour les organismes HLM ou pour le recouvrement des amendes. Le plafond de paiement en liquide est de 1 000 euros chez les commerçants. Mais étrangement, il n'y a aucune limite pour les cautions pénales. Récemment à Lyon, un individu mis en examen pour trafic de drogue a versé 500 000 euros en petites coupures pour être libéré, alors qu'un citoyen honnête ne peut pas payer plus de 300 euros d'impôts en espèces !
M. Michel Bouvard. - C'est stupéfiant !
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur pour avis. - C'est le seul domaine où il n'existe aucune limite au paiement en espèces...
M. André Gattolin. - ... ou plutôt où le liquide est encore autorisé !
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur pour avis. - Je souhaite une meilleure traçabilité des sommes versées pour les cautions pénales.
Le reporting public d'activités pays par pays entre administrations fiscales, la lutte contre l'évasion fiscale des multinationales, sont des sujets sensibles. Je souscris aux dispositions renforçant les pouvoirs des administrations fiscales, notamment sur les prix de transfert dont la manipulation est une technique notoire d'évasion fiscale. En revanche, imposer aux entreprises dont le chiffre d'affaires est compris entre 50 et 750 millions d'euros une déclaration d'activités pays par pays, alors qu'aucun autre État ne l'applique, n'aurait pas de sens. La date d'entrée en vigueur au 1er juillet 2020 montre combien cela relève de la déclaration d'intention. L'obligation de déclaration publique d'activités pays par pays diffère de l'échange d'informations entre administrations fiscales. Restons-en aux dispositions de la directive présentée par la Commission européenne et prévoyons une date d'entrée en vigueur au 1er janvier 2018, sous réserve de l'adoption de cette directive par nos partenaires européens. La France ne peut, ni ne doit être la seule à exposer les données de ses entreprises nationales, sans aucun instrument communautaire. Cela n'aurait aucun sens, sauf de donner des armes à nos concurrents.
Sur l'évasion fiscale des particuliers, le registre public des bénéficiaires effectifs des personnes morales est une bonne initiative, même si sa portée est limitée aux entités domiciliées en France. Beaucoup dépend donc de la coopération avec nos partenaires : je vous proposerai d'améliorer la nouvelle procédure d'avis des commissions des finances sur la liste des États et territoires non coopératifs (ETNC), dont l'affaire des Panama Papers a montré les limites.
Nous avons enfin souhaité nous saisir pour avis de quelques articles. Je vous proposerai la suppression de l'article 6 F, non que je sois défavorable aux lanceurs d'alerte, mais il ne doit pas revenir au Défenseur des droits de qualifier une personne de lanceur d'alerte, ni d'évaluer et indemniser les préjudices moral et financier subis : seule une juridiction peut le faire. Les autorités administratives ne doivent pas devenir des juridictions ou des quasi-juridictions. Le coût de la mesure n'est absolument pas évalué, les modalités de récupération de sommes indûment versées non plus : ce dispositif ne peut être conservé.
La réforme de la procédure de surendettement, bien que réclamée par la Banque de France, pose problème au regard des droits des créanciers. Je vous proposerai de modifier ces dispositions. Enfin, je me félicite que l'Assemblée nationale ait adopté sur proposition du Gouvernement l'article 26 bis reprenant en grande partie une disposition que le Sénat avait adoptée à mon initiative : il faut éviter que les banques ferment les comptes des personnes signalées par Tracfin, notamment celles fichées « S » pour terrorisme. Sinon, elles seraient averties de la surveillance dont elles font l'objet !
Compte tenu du caractère foisonnant de nombreuses dispositions et des courts délais d'examen du texte - adopté mardi dernier à l'Assemblée nationale, après introduction de très nombreux articles - je vous demande de bien vouloir accepter que je revienne devant vous d'ici la séance publique, si nécessaire, pour vous présenter de nouveaux amendements.
Mme Michèle André, présidente. - Nous les examinerions mercredi prochain. Le délai limite pour les amendements de séance sera fixé au jeudi 30 juin.
M. Didier Guillaume. - Cette loi comprend une colonne vertébrale, la transparence, la lutte contre la corruption et la modernisation de la vie économique, mais elle est également un fourre-tout : nous l'assumons. Ce n'est pas la première fois que cela se produit, ni qu'un projet de loi double de volume durant son examen. Il était utile de profiter de ce véhicule pour faire passer des mesures nécessaires, celles sur l'agriculture par exemple, très importantes, attendues par les professionnels. Vous avez parlé d'ordonnances politiques : la refonte du code de la mutualité est peut-être politique, mais elle est surtout une demande forte de ce secteur, exprimée lors de son dernier congrès et rappelée par le président de la fédération nationale de la mutualité française (FNMF) Etienne Caniard. La réforme du code de la mutualité est une question d'efficacité économique.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur pour avis. - Non, ce n'est pas la première fois qu'un projet de loi complète des dispositions diverses ni qu'il double ou triple de volume. Le principal problème est que sur des sujets majeurs, le Parlement soit dessaisi de ses droits. L'article 21 bis A a été introduit à l'Assemblée nationale sans débat. La réforme de la mutualité est légitime, mais elle doit se faire par une loi, comme annoncé par la ministre, et non par ordonnance. Sur les 19 habilitations, certaines, sur des sujets techniques, sont justifiées. Mais les réformes majeures exigent un débat parlementaire.
M. Vincent Capo-Canellas. - Nous sommes tous d'accord sur le fait que ce texte est important. Le rapporteur et la commission sont dans leur rôle en l'amendant. Nous nous interrogeons sur la méthode choisie et sur son efficacité réelle : qui trop embrasse mal étreint. Enfin, nous pouvons améliorer un certain nombre des dispositions votées par l'Assemblée nationale.
EXAMEN DES AMENDEMENTS
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur pour avis. - Mon amendement n° FINC.1 supprime l'article : je ne suis pas contre les lanceurs d'alerte, mais l'indemnisation relève de la justice et non du Défenseur des droits.
M. Maurice Vincent. - La durée de l'attente du jugement d'indemnisation est une vraie difficulté pour les lanceurs d'alerte. Si nous voulons les soutenir, alors que leur statut a été reconnu, il faut mettre en place une procédure rapide de reconnaissance et d'indemnisation. Nous voterons contre l'amendement.
M. Claude Raynal. - Avec le rapporteur général, j'avais proposé un fonds d'indemnisation alimenté par les amendes prélevées. Pourriez-vous déposer un amendement en ce sens ?
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur pour avis. - Il tomberait sous le coup de l'article 40. En outre, je vous renvoie aux quatorze pages de l'avis du Défenseur des droits demandant instamment que la procédure inscrite dans le projet de loi soit revue. Selon lui, les missions d'accompagnement et de soutien financier prévues « pourraient porter atteinte aux règles de composition, d'organisation et de fonctionnement de l'institution » : elles ne s'inscrivent pas dans la mission du Défenseur des droits. Il faut imaginer autre chose. Les prud'hommes peuvent imposer le versement des salaires. On peut aussi recourir à une procédure de référé.
M. Vincent Capo-Canellas. - Cet article pose problème sur le fond. Comme dans d'autres textes, on crée des procédures là où il en existe déjà. L'indemnisation relève des juridictions judiciaires et administratives. Ne multiplions pas les canaux : quand il existe une procédure judiciaire, à quoi bon créer une procédure administrative ?
M. Jean-Claude Boulard. - Selon quel critère est-on un lanceur d'alerte rémunéré ? Quelle est la frontière entre le lanceur d'alerte et le délateur, dans un pays qui a largement versé dans cette tendance à certains moments de son histoire ?
M. André Gattolin. - Lorsqu'il s'agit de lutter contre l'évasion fiscale, la procédure judiciaire est trop longue, il faut absolument prévoir des arbitrages ; mais des personnes isolées pourraient attendre cinq à dix ans pour recevoir des indemnités ? Je suis contre cet amendement, qui ne tient pas la route.
M. Éric Bocquet. - Dans l'actualité récente, tous les grands scandales, comme LuxLeaks ou les Panama Papers, ont été révélés par des lanceurs d'alerte, non par des autorités d'État. Il est urgent d'avancer. Le projet de loi précise qu'un lanceur d'alerte est « une personne qui révèle, dans l'intérêt général et de bonne foi, un crime ou un délit, un manquement grave à la loi ou au règlement, ou des faits présentant des risques ou des préjudices graves pour l'environnement ou pour la santé ou la sécurité publiques, ou qui témoigne de tels agissements. » Il faudrait inclure dans la définition les sphères financières et bancaires.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur pour avis. - L'article 6 A donne une définition sans doute imparfaite. Reste qu'une autorité administrative - Défenseur des droits ou Haute Autorité pour la transparence de la vie publique - ne doit pas se transformer en juridiction. C'est là où le bât blesse. Toutes ces procédures ne résisteront pas devant la Cour européenne des droits de l'homme. Quelle serait la voie de recours ? Le texte ne le dit pas. On aurait pu prévoir un fonds mais seul le Gouvernement peut le proposer : un amendement de notre part tomberait sous le coup de l'article 40. La multiplication des autorités administratives indépendantes me gêne. Enfin, le code du travail prévoit la protection du salarié abusivement licencié.
M. Philippe Dominati. - Je suis pour l'amendement. Les délais de justice ne sont pas un prétexte suffisant. Prenons deux exemples récents. La personne qui a prévenu de la préparation d'un attentat à La Défense n'a pas le statut de témoin, elle est dans une situation financière délicate et l'État ne sait pas comment gérer ce cas. Autre exemple, des rémunérations significatives ont été prévues après une saisie importante de drogue, en faveur de lanceurs d'alerte d'un autre genre... Trouvons un mécanisme souple qui vaille pour tous les cas.
M. Jacques Genest. - Je suis favorable à cet amendement. Le Parlement est là pour défendre le droit et l'État de droit. On crée sans cesse des autorités administratives indépendantes, mais avec quelles voies de recours ? La justice est certes lente, mais elle est le meilleur garant des libertés.
M. Maurice Vincent. - Toutes les personnes que nous avons entendues ont souligné le progrès considérable que représente la procédure prévue par l'Assemblée nationale, même si elle n'est pas parfaite.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur pour avis. - Nous ne parlons ici que de l'indemnisation. L'article 7 prévoit par ailleurs une protection des lanceurs d'alerte dans le secteur financier. Que faire lorsque le Défenseur des droits a accordé une indemnisation, si la justice ensuite ne qualifie pas la personne de lanceur d'alerte ? Nous en débattrons en séance...
L'amendement n° FINC.1 est adopté.
En conséquence, la commission émet un avis défavorable à l'adoption de l'article 6 F.
Elle émet un avis favorable au maintien de la suppression de l'article 6.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur pour avis. - La commission des lois nous a délégué au fond l'examen de cet article. L'amendement n° FINC.2 généralise le dispositif de recueil des signalements, au-delà des obligations de règlements européens précisément cités. Cela évitera de devoir compléter cette liste.
L'amendement n° FINC.2 est adopté.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur pour avis. - L'amendement n° COM.80 de Nathalie Goulet supprime la protection sectorielle des lanceurs d'alerte. Avis défavorable.
M. Michel Bouvard. - C'est louche !
M. Maurice Vincent. - J'approuve l'avis du rapporteur. Cependant, dans le droit existant, on a deux types de lanceurs d'alerte, et deux régimes, dont un spécifique au secteur bancaire et financier. Il est légitime de se poser des questions...
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur pour avis. - Mais l'effet est contreproductif.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° COM.80.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur pour avis. - L'amendement n° FINC.3 améliore la protection des victimes de faux signalement. Les lanceurs d'alerte peuvent faire oeuvre utile... ou causer des dégâts.
L'amendement n° FINC.3 est adopté.
La commission proposera à la commission des lois d'adopter l'article 7 ainsi modifié.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur pour avis. - L'article 17 nous est délégué au fond, comme les articles suivants, 18 et 19. L'amendement n° FINC.4 supprime des habilitations à légiférer par ordonnance devenues sans objet : l'essentiel des dispositions sont déjà transposées dans le cadre de la récente proposition de loi sur la répression des abus de marché.
L'amendement n° FINC.4 est adopté.
La commission proposera à la commission des lois d'adopter l'article 17 ainsi modifié, et d'adopter les articles 18 et 19 sans modification.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur pour avis. - L'article nous est délégué au fond. En cas d'abus de marché, il convient - l'amendement n° FINC.5 y pourvoit - que le juge pénal puisse comme l'AMF infliger aux personnes morales une sanction allant jusqu'à 15 % du chiffre d'affaires. L'amendement n° FINC.6 étend ce dispositif aux sanctions prononcées par l'ACPR.
L'amendement n° FINC.5 est adopté, de même que l'amendement n° FINC.6.
L'amendement rédactionnel n° FINC.7 est adopté, de même que l'amendement n° FINC.8 tendant à corriger une erreur matérielle.
La commission proposera à la commission des lois d'adopter l'article 20 ainsi modifié.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur pour avis. - L'examen de l'article 21 nous est délégué au fond.
L'amendement rédactionnel n° FINC.9 est adopté.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur pour avis. - L'amendement n° FINC.10 encadre l'habilitation à légiférer par ordonnance concernant le nouveau mécanisme de résolution des organismes d'assurance.
L'amendement n° FINC.10 est adopté.
La commission proposera à la commission des lois d'adopter l'article 21 ainsi modifié.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur pour avis. - L'article nous est délégué au fond. Il a été introduit par le Gouvernement ; il habilite ce dernier à modifier très largement, par ordonnance, le code de la mutualité. Mon amendement n° FINC.11 le supprime. Je m'en suis suffisamment expliqué. Mme Marisol Touraine avait annoncé une loi lors du 41e congrès de la mutualité le 11 juin 2015 : nous nous conformons à cette annonce !
M. Maurice Vincent. - Didier Guillaume s'est déjà exprimé sur ce sujet. Nous voterons contre cet amendement.
L'amendement n° FINC.11 est adopté.
La commission proposera à la commission des finances de supprimer l'article 21 bis A.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur pour avis. - L'examen de cet article nous est délégué au fond. En cas de difficulté d'un assureur, le Haut Conseil de stabilité financière (HCSF) peut prendre des mesures conservatoires portant atteinte au droit des contrats - suspension de contrat, restriction de la faculté d'arbitrage, suppression de versement d'avances sur contrat... L'amendement n° FINC.12 limite à trois mois renouvelables au lieu de six mois la période d'intervention du HCSF.
M. Claude Raynal. - Quelle est la référence juridique des trois mois ? C'est très court pour prendre des mesures conservatoires...
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur pour avis. - Il n'y a aucune référence juridique, ni pour les trois mois, ni pour les six mois. Ces mesures exceptionnelles, très graves, justifiées pour résoudre une crise, doivent être prises sur une durée la plus courte possible, afin de ne pas porter atteinte aux droits des épargnants.
M. Daniel Raoul. - Pourquoi préciser que la menace est « caractérisée » ? Soit elle est grave, soit elle ne l'est pas.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur pour avis. - Il faut que la nature de la menace soit précisée et l'avis motivé doit être rendu public. Il faut expliquer !
L'amendement n° FINC.12 est adopté.
La commission proposera à la commission des lois d'adopter l'article 21 bis ainsi modifié.
Elle proposera l'adoption sans modification de l'article 22.
Article additionnel après l'article 22
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur pour avis. - L'examen de cet amendement nous est délégué au fond. L'amendement n° COM.104 porte sur le régime d'incompatibilité entre les dirigeants des organes centraux et ceux des affiliés des groupes mutualistes, et la règle de déport des dirigeants des affiliés pour les décisions de l'organe central. Ce sont des questions sensibles, qui nous ont valu de nombreux courriers et qui méritent un débat. François Marc pose une question de fond me semble-t-il, mais la rédaction est trop large. L'amendement doit être retravaillé. Retrait ou avis défavorable.
M. François Marc. - L'article 22 a vocation à mieux superviser le système bancaire mutualiste. Nous allons plus loin et traitons du risque de conflits d'intérêts dans la gouvernance de ce type d'institutions. Cet amendement mérite sans doute d'être affiné. Mais les conflits d'intérêts existent et doivent être limités partout. Je reformulerai mon amendement.
M. Michel Canevet. - C'est un sujet important !
L'amendement n° COM.104 est retiré.
La commission proposera à la commission des lois d'adopter sans modification les articles 22 bis A, 22 bis et 22 ter.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur pour avis. - Article délégué au fond. L'amendement n° FINC.13 apporte une clarification rédactionnelle. L'Assemblée nationale a donné aux conseils régionaux, dès lors que les régions ont la pleine compétence économique, l'accès au fameux fichier bancaire des entreprises (Fiben) de la Banque de France. Seuls y accèdent aujourd'hui les adhérents, banques, assurances... Sous réserve de l'application des mêmes règles de confidentialité, je suis favorable à l'extension votée par les députés.
M. Michel Bouvard. - Quelle en est la nécessité ? En général, l'investissement des régions se fait dans le cadre d'une opération globale ; des représentants de la Banque de France, de la Banque publique d'investissement (BPI), sont amenés à intervenir, ils peuvent donner l'information nécessaire aux élus. Je suis assez sceptique...
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur pour avis. - Cette interrogation est légitime, je l'ai eue également, mais la Banque de France n'est pas opposée à cette ouverture.
M. Vincent Capo-Canellas. - L'amendement est utile : il faut encadrer cet accès.
L'amendement n° FINC.13 est adopté.
La commission proposera à la commission des lois d'adopter l'article 22 quater ainsi modifié.
Elle proposera l'adoption des articles 22 quinquies et 23 sans modification.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur pour avis. - Cet article nous est délégué. L'amendement n° FINC.14 garantit la mise à jour au moins annuelle de la liste des ETNC prévue par l'article 238-0 A du code général des impôts, alors que ce réexamen systématique annuel n'était pas prévu.
M. Vincent Capo-Canellas. - Très bien.
L'amendement n° FINC.14 est adopté.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur pour avis. - L'amendement n° FINC.15 précise le délai dont disposent les commissions des finances de l'Assemblée nationale et du Sénat pour rendre leur avis sur le projet d'arrêté fixant la liste des ETNC. Vous vous souvenez sans doute que notre commission avait déjà refusé de ratifier une convention fiscale avec un pays...
M. Claude Raynal. - Un mois n'est-il pas un délai un peu court au regard du fonctionnement de nos institutions ? Serons-nous obligés de revenir fin août si la liste nous est transmise fin juillet ? Je suis réservé...
Mme Michèle André, présidente. - Nous ferons comme pour les décrets d'avance qui interviennent alors que le Parlement ne siège pas, je vous consulterai
M. Jean-Claude Boulard. - Ce délai relève-t-il du législateur ?
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur pour avis. - Pour le décret d'avance, cela relève même d'une loi organique.
M. Claude Raynal. - Je m'abstiens.
L'amendement n° FINC.15 est adopté.
La commission proposera à la commission des lois d'adopter l'article 23 bis ainsi modifié.
Elle proposera l'adoption de l'article 23 ter sans modification.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur pour avis. - Avec son amendement n° COM.90, David Assouline fait preuve d'une certaine originalité...
M. Michel Bouvard. - C'est l'amendement « ma tante »...
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur pour avis. - Oui, sur le Crédit municipal. Il prévoit qu'un décret peut modifier, mais à la hausse seulement, le plafond du versement en espèces, pour un prêt sur gage, avec un montant minimal fixé par la loi.
M. Philippe Dominati. - Cela correspond à la réalité de personnes en situation d'interdit bancaire. Le seuil est trop bas pour tous les exclus bancaires.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur pour avis. - L'article 25 A répond à ce souci, en prévoyant un seuil dérogatoire, fixé par décret, de paiement en espèces par les établissements de crédit municipal. Mais dans l'amendement, la variation ne peut se faire qu'à la hausse !
M. Maurice Vincent. - Je ne l'interprète pas ainsi. Il s'agit de gagner du temps en évitant de recourir à un décret, sans modifier le seuil de 3 000 euros. L'Assemblée avait affiché ce seuil tout en revoyant à un décret. Ici, l'amendement inscrit les 3 000 euros dans la loi et supprime le passage par le décret.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur pour avis. - C'est au Gouvernement de prendre la décision, par un décret.
M. Jean-Claude Boulard. - Cessons donc de voter des dispositions réglementaires. Tripler le volume d'un texte discrédite la loi. Un délai sans sanction est un délai sans portée. Dégonflons les lois, rendons-les lisibles, elles seront mieux respectées.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur pour avis. - La loi prévoit des limites de paiement en espèces. Ces seuils relèvent dans leur grande majorité du décret. Celui-ci aussi. Le Gouvernement a souhaité qu'il soit de 3 000 euros. L'amendement de David Assouline introduit de la confusion entre la loi et le décret. Avis défavorable.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° COM.90.
Elle proposera à la commission des lois d'adopter l'article 25 A sans modification.
Article additionnel après l'article 25 A
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur pour avis. - L'amendement n° FINC.16, suivant la même logique, prévoit de plafonner le versement en espèces pour le cautionnement judiciaire, avec un montant fixé par décret.
L'amendement n° FINC.16 est adopté.
La commission proposera à la commission des lois d'adopter un article additionnel ainsi rédigé.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur pour avis. - L'examen de l'article nous est délégué au fond. L'amendement de suppression n° COM.88 d'Anne-Catherine Loisier revient à rétablir la durée légale actuelle d'encaissement d'un chèque, douze mois contre six prévus par l'Assemblée nationale. Sagesse.
M. Claude Raynal. - Et nous, nous y sommes défavorables.
M. Michel Bouvard. - Un délai de six mois, c'est déjà beaucoup !
M. Vincent Capo-Canellas. - Comment l'Assemblée nationale et le Gouvernement justifient-ils cette réduction du délai ?
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur pour avis. - Elle réduit l'incertitude de la gestion de trésorerie...
M. Michel Bouvard. - Et limite certaines optimisations fiscales...
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur pour avis. - Elle réduit le risque d'impayé pour les commerçants, et le coût de traitement des chèques et incite à développer des moyens de paiement alternatifs.
M. Jean Pierre Vogel. - Le chèque est un moyen de paiement comptant et non à crédit. Il y a aussi le risque d'un chèque involontairement sans provision, car la situation du compte bancaire a pu se dégrader entre le moment de l'émission et celui de l'encaissement. Un délai de six mois est déjà très largement suffisant.
M. Michel Canevet. - Et les cautions payées par chèque ? Il ne faut pas changer la règle actuelle, ce serait une atteinte aux libertés publiques.
M. Jacques Chiron. - Les propriétaires de petits logements loués pour moins d'un an à des étudiants n'encaissent pas les chèques de caution. Ils devront le faire si le délai est réduit à six mois.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° COM.88.
Elle proposera à la commission des lois d'adopter l'article 25 sans modification, de même que l'article 25 bis B.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur pour avis. - L'article 25 bis, qui ne nous est pas délégué au fond, concerne la procédure de désendettement. Il supprime la phase de conciliation, pour les débiteurs surendettés non propriétaires immobiliers. Dès lors il établit une distinction entre propriétaires et non propriétaires. La commission des lois et la commission des affaires économiques proposent de supprimer l'article 25 bis. Mon amendement n° FINC.17 est un amendement de repli. Selon la Banque de France, la deuxième phase de la procédure de conciliation est inutile. J'ai besoin de plus de temps pour expertiser cette question, mais adoptons cet amendement pour avoir le débat au lieu de supprimer l'article.
M. Maurice Vincent. - Nous suivons plutôt le Gouvernement et votons contre cet amendement.
L'amendement n° FINC.17 est adopté.
La commission émet un avis favorable à l'adoption de cet article sous réserve de l'adoption de son amendement.
Elle proposera à la commission des lois d'adopter l'article 26 sans modification.
Elle émet un avis favorable à l'adoption sans modification de l'article 26 bis.
Elle proposera à la commission des lois l'adoption sans modification de l'article 27.
Article 27 bis (nouveau)
L'amendement rédactionnel n° FINC.19 est adopté.
La commission proposera à la commission des lois d'adopter l'article 27 bis ainsi modifié.
Article 28
L'amendement de coordination n° FINC.35 est adopté.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur pour avis. - Là encore nous procédons à l'examen au fond. L'amendement n° FINC.20 étend l'interdiction de la publicité à des instruments financiers risqués cotés, négociés sur un marché règlementé ou échangés dans un système multilatéral de négociation.
L'amendement n° FINC.20 est adopté.
La commission proposera à la commission des lois d'adopter l'article 28 ainsi modifié.
Article 28 bis A (nouveau)
L'amendement de coordination n° FINC.36 est adopté.
La commission proposera à la commission des lois d'adopter l'article 28 bis A ainsi modifié.
Article 28 bis B (nouveau)
L'amendement de suppression n° FINC.21 est adopté.
La commission proposera à la commission des lois la suppression de l'article 28 bis B.
Elle proposera l'adoption de l'article 28 bis C sans modification.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur pour avis. - L'article nous est délégué au fond. L'amendement n° FINC.22 concerne l'interdiction de publicité sur des produits financiers risqués : il étend cette interdiction à tous les intermédiaires et les annonceurs, au-delà des seuls établissements qui effectuent les transactions. Il existe des sites illégaux, montés par des escrocs ; des sites légaux, mais basés à Chypre par exemple, que nous ne pouvons sanctionner ; et des sites légaux, agréés - mais le capital investi peut être perdu en totalité.
M. Maurice Vincent. - L'amendement ne transforme-t-il pas la sanction pénale en sanction administrative ?
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur pour avis. - Oui, mais le montant reste le même.
M. Maurice Vincent. - Alors nous voterons contre, car nous souhaitons le maintien d'une sanction pénale.
L'amendement n° FINC.22 est adopté.
La commission proposera à la commission des lois d'adopter l'article 28 bis ainsi modifié.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur pour avis. - Même esprit : l'amendement n° FINC.23 vise le parrainage ou le mécénat.
L'amendement n° FINC.23 est adopté.
La commission proposera d'adopter l'article 28 ter ainsi modifié.
Article additionnel après l'article 28 ter
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur pour avis. - L'amendement n° FINC.24 renforce les obligations de transparence dans le démarchage des produits ouvrant droit à réduction d'impôt. Les intermédiaires, parfois, vendent du rêve, et oublient de mentionner les risques, notamment le risque locatif. Nous pourrons améliorer la rédaction d'ici la séance publique.
L'amendement n° FINC.24 est adopté.
La commission proposera à la commission des lois d'adopter un article additionnel ainsi rédigé.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur pour avis. - L'article nous est délégué au fond. Nos collègues qui siègent à gauche devraient me suivre sur l'amendement n° FINC.25, concernant l'extension au livret A de l'option solidaire du livret développement durable : je propose un retour au texte du Gouvernement. Imagine-t-on chaque établissement bancaire adresser chaque année à des millions de détenteurs de livret A un courrier pour leur demander s'ils veulent « faire un don à l'économie sociale et solidaire » ?
L'amendement n° FINC.25 est adopté.
La commission proposera à la commission des lois d'adopter l'article 29 ainsi modifié.
Article additionnel après l'article 29
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur pour avis. - L'amendement n° COM.72 traite des frais liés aux contrats d'assurances obsèques. Pourquoi augmenter le plafond de ces frais ?
M. Maurice Vincent. - Il y a un vrai problème de transparence, c'est pourquoi nous soutenons la disposition proposée par Jean-Pierre Sueur.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur pour avis. - Elle renchérira le coût des contrats pour les souscripteurs.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° COM.72.
Elle proposera à la commission des lois de ne pas adopter cet article additionnel.
Elle proposera d'adopter sans modification l'article 29 bis ainsi que l'article 29 ter.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur pour avis. - L'examen au fond nous est délégué sur cet article. Celui-ci prévoit que les « éléments substantiels » - termes bien flous - des contrats collectifs d'assurance font l'objet d'une autorisation par l'assemblée générale de l'association des épargnants qui les a souscrits. L'objectif est d'améliorer la transparence et le fonctionnement desdites associations, mais la mesure semble difficile à mettre en oeuvre. Quel pourcentage des souscripteurs assiste à l'assemblée générale ? Supprimons l'article. C'est l'objet de mon amendement n° FINC.26 et je propose à Jean-François Husson, auteur de l'amendement n° COM.117, de s'y rallier.
M. Jean-François Husson.- Je vais me rallier à cette proposition, mais restons attentifs : la gestion de l'épargne exige un encadrement précis. Par le passé, c'est d'ailleurs la participation des adhérents à certaines associations, comme l'AFER, qui a permis de mettre en évidence les abus de leurs dirigeants, qui ont pu procéder à des baisses des taux de rémunération des assurances vie sans réelle consultation. C'est pourquoi j'ai proposé que les pouvoirs délégués au conseil d'administration le soient pour une durée limitée. Car les conséquences d'une pratique déviante se manifestent très rapidement, et je crois donc qu'il sera important d'évoquer ce sujet lors du débat.
L'amendement n° COM.117 est retiré.
L'amendement de suppression n° FINC.26 est adopté.
La commission proposera à la commission des lois de supprimer l'article 29 quater.
Elle proposera l'adoption sans modification de l'article 32, ainsi que de l'article 33.
Articles additionnels après l'article 33
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur pour avis. - L'amendement n° COM.118 de Jean-François Husson ne pose pas de difficulté de fond ; cependant, porter atteinte aux contrats en cours exige un motif d'intérêt général...
L'amendement n° COM.118 est retiré.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur pour avis. - Les amendements nos COM.22 et COM.116 de Jean-François Husson traitent d'un sujet relevant de la loi de finances. Défavorable.
L'amendement n° COM.116 est retiré.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° COM.22. Elle proposera à la commission des lois de ne pas adopter cet article additionnel.
L'amendement n° COM.119 est retiré.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur pour avis. - L'amendement n° FINC.27 supprime la condition de ressources pour le rachat d'un mini-Perp, car celui-ci est au maximum de 2 000 euros : ce montant ne justifie pas une vérification des ressources.
L'amendement n° FINC.27 est adopté.
La commission proposera à la commission des lois d'adopter l'article 33 bis ainsi modifié.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur pour avis. - L'article 34, qui nous est également délégué au fond, n'est pas sans lien avec les risques de shadow banking. Il autorise les fonds à prêter aux entreprises. Pourquoi pas, mais cela mérite un débat... et un encadrement, auquel procède l'amendement n° FINC.28 : les prêts doivent être consentis à des entreprises non financières, pour une durée inférieure à celle du fonds, et il convient de limiter les rachats de parts et le recours à l'effet de levier.
M. Maurice Vincent. - Nous y sommes favorables.
Mme Marie-France Beaufils. - Nous nous abstenons.
L'amendement n° FINC.28 est adopté.
La commission proposera à la commission des lois d'adopter l'article 34 ainsi modifié.
Elle proposera également d'adopter sans modification l'article 34 bis, de même que les articles 34 ter, 34 quater et 35.
Article additionnel après l'article 35
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur pour avis. - Je soutiens, sur le fond, la demande de Michel Bouvard de prolonger pour les remontées mécaniques le suramortissement Macron, mais elle aurait plus sa place en loi de finances. Et si la mesure est annoncée par avance, elle perd de sa puissance ! Je souhaite le retrait de l'amendement n° COM.126 rectifié.
M. Michel Bouvard. - Le Gouvernement a décidé de prolonger le suramortissement dans le projet de loi numérique. Je souhaite caler sur cette durée celle applicable aux remontées mécaniques : j'y reviendrai en loi de finances ou dans le collectif budgétaire.
L'amendement n° COM.126 rectifié est retiré.
La commission proposera à la commission des lois d'adopter les articles 37 et 39 sans modification.
Elle émet un avis favorable à l'adoption de l'article 45 sans modification.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur pour avis. - L'examen au fond de cet article nous est délégué. Celui-ci traite du reporting pays par pays : contrairement à André Gattolin, auteur de l'amendement n° COM.74, je préfère m'en tenir au texte de la directive présentée en avril 2016. Les dispositifs purement nationaux me gênent ; c'est par la coordination des efforts, dans le cadre de l'OCDE ou par des accords de type Fatca, que l'on progresse. Je souhaite le retrait de l'amendement n° COM.74 au profit de mon amendement n° FINC.29.
M. André Gattolin. - Il y a des trous dans la raquette, ou plutôt dans le texte voté par l'Assemblée nationale. Les États membres de l'Union européenne, et un certain nombre d'autres territoires, sont visés ; mais il reste tous les autres pays dans le monde ! Il convient que les entreprises publient les informations pour chaque territoire où elles possèdent ne serait-ce qu'une ou deux filiales, car celles-ci offrent autant de possibilités de contournement. En outre, la directive n'est pas définitivement adoptée.
Notre collègue Roger Karoutchi, ancien ambassadeur auprès de l'OCDE, rappelle souvent comment les avancées internationales prennent leur origine dans un exemple national. Le volontarisme est productif. Je maintiens l'amendement, quitte à modifier sa rédaction.
M. Maurice Vincent. - Nous nous abstiendrons sur les deux amendements.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° COM.74.
L'amendement n° FINC.29 est adopté.
La commission proposera à la commission des lois d'adopter l'article 45 bis ainsi modifié.
Article 45 ter (nouveau)
L'amendement de suppression n° FINC. 30 est adopté.
La commission proposera à la commission des lois de supprimer l'article 45 ter.
Elle proposera d'adopter l'article 45 quater A, l'article 45 quater B et l'article 50 sans modification.
Article 50 bis (nouveau)
L'amendement rédactionnel n° FINC. 31 est adopté.
La commission proposera à la commission des lois d'adopter l'article 50 bis ainsi modifié.
Article 51
L'amendement rédactionnel n° FINC. 32 est adopté.
La commission proposera à la commission des lois d'adopter l'article 50 ainsi modifié.
Article 52
L'amendement rédactionnel n° FINC. 33 est adopté.
La commission proposera à la commission des lois d'adopter l'article 52 ainsi modifié.
Elle proposera l'adoption sans modification de l'article 53.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur pour avis. - L'amendement n° COM. 24 de Michel Bouvard supprime l'article, lequel ouvre la commission de surveillance de la Caisse des dépôts et consignations (CDC) à des représentants du personnel du groupe.
M. Michel Bouvard. - Maurice Vincent et Vincent Delahaye siègent à la commission de surveillance en notre nom, ils s'exprimeront sans doute. Une disposition introduite à l'Assemblée nationale ouvre la composition de la commission de surveillance aux représentants des salariés de tout le groupe CDC, y compris des filiales qui peuvent être concernées par des dossiers abordés dans les discussions au sein de cette instance. Je n'ai aucune défiance à l'égard de ces représentants, mais la CDC n'est pas une entreprise publique généralement quelconque ! Ni à la Libération, ni dans la loi de 1983 sur la démocratisation du secteur public, la CDC n'a été visée par les dispositions introduites pour le secteur public. Elle est placée sous le contrôle par le Parlement. Du reste, elle ne gère pas l'argent public, mais celui des épargnants, les dépôts des notaires, etc.
Lors des réunions de la commission de surveillance, des dossiers sensibles sont souvent évoqués. La parole du gouverneur de la Banque de France, celle des autres membres, serait moins libre en présence de salariés qui peuvent être directement ou indirectement concernés. Enfin, la commission ayant le pouvoir d'engager une procédure de révocation du directeur général, elle ne saurait inclure des personnes placées sous l'autorité de celui-ci. La composition retenue par le législateur ne traduit pas une omission ; en deux cents ans, le Parlement aurait parfaitement pu modifier les choses, il ne l'a jamais voulu.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur pour avis. - Avis favorable.
M. François Marc. - Je partage les arguments de Michel Bouvard. La commission de surveillance a un champ de responsabilité précis, qui n'a rien à voir avec le management des diverses entités du groupe. Surtout, elle a le pouvoir d'engager une procédure pour « virer le patron »...
M. Michel Bouvard. - La CDC n'est pas une Scop !
M. Maurice Vincent. - Je ne rejoins pas Michel Bouvard. Ce n'est pas parce que la CDC a un statut particulier que la démocratisation du secteur public doit s'arrêter à sa porte. Quant au secret des délibérations, il s'impose à tous pareillement, et il n'a pas toujours été respecté à 100 %... en l'absence pourtant de représentants des salariés !
Cette demande ancienne va plutôt dans le sens du progrès social.
M. Vincent Delahaye. - Je ne le crois pas. La liberté de parole des représentants du Parlement, de la Banque de France, du Conseil d'État ou de la Cour des comptes est précieuse. Et la révocation possible du dirigeant fait obstacle à une participation des représentants des salariés.
Mme Marie-France Beaufils. - Les salariés ont leur point de vue à donner sur l'avenir de leur groupe. Ils sont tout aussi capables que les autres de respecter la confidentialité. Dans le secteur de la défense, les représentants syndicaux se tiennent si bien à leur obligation de réserve que, même aux parlementaires, ils ne disent rien !
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur pour avis. - La CDC est sous la surveillance du Parlement depuis la loi de 1816.
La commission émet un avis favorable à l'amendement n° COM. 24.
Elle proposera à la commission des lois de supprimer l'article 54 bis B.
Elle propose d'adopter sans modification l'article 54 bis C.
Article additionnel après l'article 54 bis C
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur pour avis. - L'amendement n° COM. 17 de Michel Bouvard prolonge jusqu'à son terme le mandat du directeur général de la Caisse des dépôts et consignations, atteint par la limite d'âge.
M. Michel Bouvard. - Le renouvellement fréquent du directeur général, ces dernières années, est contraire à l'exigence d'une gestion à long terme, donc d'une certaine permanence, que traduit par exemple le renouvellement glissant de la commission de surveillance. Jusqu'à Robert Lion, le directeur général était nommé à vie. Depuis, il l'est pour cinq ans. Et le décès en cours de mandat de Francis Mayer a aligné fortuitement la date de nomination sur le calendrier de l'élection présidentielle... Il est important qu'au moins, le directeur général soit nommé pour cinq ans quelles que soient les circonstances, y compris s'il atteint en cours de mandat l'âge de la retraite. Les commissions des finances saisies en application de l'article 13 de la Constitution sauront qu'elles acceptent une nomination pour cinq années. Personne n'avait identifié le problème jusqu'à présent. Pierre-René Lemas lui-même, lorsqu'il était candidat au poste, a été entendu par notre commission et a répondu positivement à Philippe Dominati, qui lui demandait s'il avait bien l'intention de demeurer en poste jusqu'au terme du mandat.
M. Philippe Dominati. - Je n'ai pas le même sentiment que Michel Bouvard... La nomination surprise de Pierre-René Lemas était liée au départ de Jean-Pierre Jouyet à l'Élysée ; le candidat ne possédait pas de compétences financières particulières, il avait occupé cinq postes différents en sept ans... Il aurait été sain qu'il dise alors qu'il serait touché par la limite d'âge en cours de mandat, et qu'il nous demanderait une modification. Je ne juge pas urgent de modifier la règle pour un cas particulier.
M. Michel Bouvard. - Nous ne le faisons pas pour un cas particulier mais pour tous les cas dans l'avenir.
M. Éric Bocquet. - J'ai certaines réserves. Est-ce le lieu de le faire dans ce projet de loi ? Et il me semble plus normal qu'une modification des règles ne s'applique pas à la personne en place, uniquement à ses successeurs dans l'avenir.
M. André Gattolin. - C'est aussi ce que je pense. Les règles du départ à la retraite sont un peu trop à géométrie variable. N'avons-nous pas reproché à un candidat à la direction du CSA d'avoir soixante ans, donc de ne pas être reconductible à l'issue de son mandat ?
M. Dominique de Legge. - La nomination pour cinq ans devrait avoir un caractère automatique.
M. Michel Bouvard. - J'ajoute que nous nous étions prononcés en connaissance de cause.
M. Gérard Longuet. - La Caisse des dépôts et consignations est placée sous la surveillance du Parlement. Or l'exécutif a trop pris l'habitude de nommer des gens qui ont l'estime du président de la République. À nous de reprendre la main. L'amendement est sans doute taillé pour Pierre-René Lemas, mais il est bon que le Parlement s'exprime et fasse, en l'occurrence, le choix de la stabilité pour l'avenir.
M. Jacques Genest. - Et refuse de nommer une personne qui est à six mois de la retraite !
M. Vincent Capo-Canellas. - Il y a des précédents. Les règles ont été modifiées pour certains préfets en exercice, je songe à un cas dans mon département : le législateur est intervenu pour un seul fonctionnaire. Mais le délai était encadré ; ici, la rédaction est très large. Existe-t-il des précédents de maintien en fonctions sur une durée aussi longue ?
M. Michel Bouvard. - Il reste deux ans de mandat...
M. Vincent Capo-Canellas. - Cela me gêne de n'encadrer en rien la durée.
M. Maurice Vincent. - À titre personnel, je voterai l'amendement, mais le groupe socialiste s'abstiendra.
M. Michel Bouvard. - Si nous voulons à l'avenir éliminer un candidat parce qu'il est trop proche de la retraite, il nous suffira de refuser collectivement sa nomination en votant contre lors de son audition. Je vous rappelle que nous avons - à mon initiative - inclus la direction générale de la CDC dans les fonctions soumises, en vertu de l'article 13 de la Constitution, à consultation des commissions parlementaires compétentes.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° COM.17.
Elle proposera à la commission des lois de ne pas adopter cet article additionnel.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur pour avis. - L'amendement n° COM.86 de Didier Marie aurait plus sa place en loi de finances, puisqu'il traite de fiscalité. Avis défavorable.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° COM.86.
Elle proposera à la commission des lois d'adopter l'article 55 bis sans modification.
Article 58 (nouveau)
L'amendement rédactionnel n° FINC.34 est adopté.
La commission proposera à la commission des lois d'adopter l'article 58 ainsi modifié.
Le sort des amendements examinés par la commission est retracé dans le tableau suivant :
La réunion est levée à 10 h 35.