Mardi 24 janvier 2006
- Présidence de M. Jean Arthuis, président.Loi de finances pour 2005 - Exécution budgétaire - Audition de M. Jean-François Copé, ministre délégué au budget et à la réforme de l'Etat
Au cours d'une première séance tenue dans la matinée, la commission a procédé à l'audition de M. Jean-François Copé, ministre délégué au budget et à la réforme de l'Etat, sur l'exécution du budget 2005.
M. Jean Arthuis, président, s'est félicité de ce que le Sénat soit tenu informé quasiment en « temps réel » de l'exécution 2005, le gouvernement n'ayant clôturé les comptes que le vendredi 20 janvier 2006.
M. Jean-François Copé a indiqué que si certains des résultats de l'exécution 2005 avaient été rendus publics avant son audition par les commissions des finances des deux Assemblées, c'était en raison de la réunion tenue la veille à Bruxelles par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie avec la Commission européenne.
Il a indiqué que les dépenses de l'Etat en 2005 avaient été inférieures de 21 millions d'euros à l'autorisation de la loi de finances initiale, qui prévoyait l'application de la norme du « zéro volume ». Il a rappelé que, dès le début de l'année 2005, le gouvernement avait mis en place une « réserve de précaution » de 4 milliards d'euros sur des crédits de la loi de finances initiale pour 2005 et de 2,5 milliards d'euros sur les crédits reportés de l'année précédente, cette réserve ayant été majorée d'un milliard d'euros en milieu d'année 2005. Il a précisé que l'essentiel de cette réserve avait été annulé, le montant des annulations s'étant élevé à plus de 6 milliards d'euros.
M. Jean-François Copé a déclaré que, malgré la maîtrise des dépenses de l'Etat, les investissements de l'Etat avaient augmenté de 7 % hors effets de périmètre. Il a en particulier souligné que l'exécution de la loi de programmation militaire du 27 janvier 2003 pour 2003-2008 était allée au-delà des crédits prévus par la loi de finances initiale, avec la consommation de 250 millions d'euros de crédits reportés. Il a indiqué qu'en conséquence, les dépenses ordinaires de l'Etat avaient été quasiment stabilisées en valeur (+ 0,2 %), malgré l'augmentation de diverses dépenses inéluctables. Il a précisé que les reports de crédits étaient revenus de 9,7 milliards d'euros début 2005 à environ 5 milliards d'euros début 2006, contre 14,1 milliards d'euros en début de législature.
M. Jean-François Copé a indiqué que les recettes fiscales de l'Etat avaient été supérieures en 2005 de plus de 500 millions d'euros aux prévisions de la loi de finances initiale pour 2005, démentant les prévisions pessimistes qui avaient pu être faites en juin 2005 par le gouvernement et la commission des finances. Il a indiqué que les recettes de l'impôt sur le revenu avaient été supérieures d'1,4 milliard d'euros par rapport à la prévision de la loi de finances initiale pour 2005, ce qui provenait en particulier d'un recours accru aux modes de paiement dématérialisés, passés de 64 % à 71 % du produit de l'impôt. Du fait notamment du dynamisme du marché de l'immobilier, les produits des droits de donation et succession et de l'impôt de solidarité sur la fortune avaient été supérieurs, respectivement d'1 milliard d'euros et de 300 millions d'euros, aux prévisions de la loi de finances initiale. En sens inverse, il a indiqué que les recettes de la TVA et de l'impôt sur les sociétés avaient été inférieures de respectivement 600 millions d'euros et 1,7 milliard d'euros aux prévisions de la loi de finances initiale. Il a ajouté que, comme l'avaient montré les travaux de la commission Durieux, le surplus de TVA induit par la hausse du prix du pétrole avait été plus que compensé par la moins-value enregistrée en matière de TIPP, ces deux impôts connaissant une perte de recettes nettes cumulée de 100 millions d'euros. Il a indiqué que le prélèvement sur les recettes de l'Etat au profit de l'Union européenne avait été particulièrement dynamique, avec un montant supérieur d'1,5 milliard d'euros à la prévision de la loi de finances initiale pour 2005. Il a souligné le dynamisme des recettes non fiscales (+ 2,8 milliards d'euros par rapport à la prévision de la loi de finances initiale pour 2005), qui avait pour origine un ensemble de facteurs techniques, pour la plupart retracés dans la loi de finances rectificative pour 2005.
M. Jean-François Copé a indiqué que le solde budgétaire avait été de - 43,5 milliards d'euros en 2005, ce qui représentait une amélioration de 3,3 milliards d'euros par rapport à la prévision associée à la loi de finances rectificative pour 2005, d'1,6 milliard d'euros par rapport à celle associée à la loi de finances initiale pour 2005, et de 400 millions d'euros par rapport à l'exécution de l'année 2004. Il a précisé que cette amélioration de 3,3 milliards d'euros résultait de l'action de trois paramètres, représentant chacun un impact d'environ 1 milliard d'euros : la sous-estimation de l'impact en 2005 de la réforme du régime des acomptes de l'impôt sur les sociétés effectuée par la loi de finances rectificative pour 2005, un dynamisme plus grand que prévu des autres recettes fiscales, et la combinaison d'autres facteurs d'amélioration (recettes non fiscales et excédent du compte d'avances aux collectivités locales en particulier).
Il a défini l'année 2005 comme « l'année de la réforme fiscale ». Il a souligné que le Conseil constitutionnel, dans sa décision n° 2005-530 DC du 29 décembre 2005 rendue sur le projet de loi de finances pour 2006, n'avait pas censuré l'article relatif au plafonnement des « niches » fiscales pour des raisons de fond, mais en raison de sa complexité, et déclaré que le gouvernement allait s'efforcer de mettre au point un dispositif simple et lisible, dans le cadre d'un groupe de travail comprenant des membres des commissions des finances des deux Assemblées.
M. Jean Arthuis, président, a considéré que le législateur ne devait adopter que des mesures lisibles et compréhensibles.
M. Jean-François Copé a défini l'année 2006 comme « l'année de l'efficacité de la dépense ». Il a rappelé, à cet égard, qu'à la suite de la circulaire du Premier ministre du 29 septembre 2005, deux vagues « d'audits de modernisation » avaient été lancées, en octobre 2005 et en janvier 2006. Il a indiqué que les réunions d'économies structurelles de février prochain intégreraient des revues de programme « à la canadienne », afin de déterminer les moyens de réaliser des gains de productivité.
M. Jean Arthuis, président, a jugé nécessaire d'accroître l'efficacité de la dépense publique.
Un large débat s'est alors engagé.
M. Philippe Marini, rapporteur général, s'est félicité de ce que, dans sa décision précitée, le Conseil constitutionnel ait validé l'essentiel de la loi de finances initiale pour 2006, en particulier en ce qui concernait la réforme de la taxe professionnelle. Il s'est réjoui de ce que le Conseil constitutionnel ait décidé qu'une complexité excessive pouvait rendre une disposition fiscale inconstitutionnelle. Il a considéré que la meilleure manière de traiter le problème des « niches » fiscales était non de plafonner les avantages fiscaux, mais d'élargir l'assiette des différents impôts, tout en réduisant leur taux. Faisant allusion à un article de M. Christian Saint-Etienne paru dans le journal « Le Monde » le 21 janvier 2006, il a considéré que, la TVA ayant économiquement moins d'effets pervers que les autres impôts, il convenait d'en augmenter, et non d'en diminuer, le taux. Il s'est interrogé sur le montant des reports de crédits sur l'année 2006, et sur les perspectives de régulation budgétaire et d'évolution de la masse salariale de la fonction publique en 2006. Il a considéré, en outre, que la contribution de la France au budget de l'Union européenne ne devait pas être accrue par rapport à celle qui résulterait des dernières positions exprimées par la France.
En réponse, M. Jean-François Copé a considéré que les orientations proposées par M. Philippe Marini, rapporteur général, au sujet des « niches » fiscales, seraient difficiles à mettre en oeuvre. Il a indiqué que les reports de crédits vers l'année 2006 seraient de l'ordre de 5 milliards d'euros, dont 2 milliards d'euros pour les dépenses militaires, 1 milliard d'euros pour les fonds de concours tardifs et 2 milliards d'euros pour les budgets civils. Il a rappelé qu'en 2005, les crédits annulés avaient été de 6 milliards d'euros. Il a évalué le coût de l'augmentation de 0,5 % du point fonction publique, au 1er juillet 2006, à 200 millions d'euros en 2006.
M. Alain Lambert, après s'être félicité du respect de l'objectif de dépenses, s'est demandé s'il ne convenait pas de passer au « zéro valeur », plutôt qu'à une norme de réduction des dépenses de l'Etat de 1 % en volume. Il s'est en outre demandé si le fait d'avoir un déficit public inférieur à 3 % du PIB en 2005 interromprait la procédure pour déficit excessif actuellement en cours.
M. Yann Gaillard s'est interrogé sur la capacité des différents corps d'inspection à répondre aux demandes d'audits du gouvernement.
M. Marc Massion a considéré que la consommation des ménages n'était pas « robuste », contrairement à ce qu'avait indiqué le ministre délégué au budget et à la réforme de l'Etat, et que la réforme du régime des acomptes de l'impôt sur les sociétés réalisée par la loi de finances rectificative pour 2005 rendait les recettes pour 2005 et pour 2006 peu lisibles. Il s'est interrogé sur les causes du dynamisme des recettes non fiscales en 2005.
M. Serge Dassault a exprimé un point de vue analogue au sujet de la réforme de l'impôt sur les sociétés. Il a considéré, en outre, qu'une révision à la baisse du barème des exonérations de charges sociales permettrait de réaliser d'utiles économies.
M. Aymeri de Montesquiou a estimé que si les effectifs de la fonction publique étaient ramenés en France à la moyenne européenne, les dépenses publiques seraient réduites de 100 milliards d'euros par an. Il s'est demandé, en outre, si les pouvoirs de l'Union européenne en matière de TVA étaient conformes au principe de subsidiarité.
M. Philippe Adnot s'est interrogé sur les modalités de financement du transfert du RMI aux départements.
M. Thierry Foucaud a souhaité savoir, pour les différentes entreprises concernées, quel avait été l'impact en 2005 de la réforme du régime des acomptes de l'impôt sur les sociétés. Il a estimé que l'Allemagne et l'Espagne menaient une politique budgétaire moins restrictive que celle de la France.
Après avoir salué le volontarisme du gouvernement, M. Jean Arthuis, président, a déclaré que celui-ci pouvait compter sur le soutien de la commission. Considérant que la TVA était un bon impôt, il a jugé inopportun d'en appliquer le taux réduit au secteur de la restauration. Il a souligné que la réforme du régime des acomptes de l'impôt sur les sociétés était neutre sur le long terme, une partie des recettes jusqu'alors perçues en avril l'étant désormais en décembre de l'année précédente. Il a souhaité savoir si les opérateurs de téléphonie mobile avaient d'ores et déjà payé l'amende qui leur avait été imposée en 2005.
En réponse, M. Jean-François Copé a indiqué que les opérateurs de téléphonie mobile avaient d'ores et déjà payé l'amende précitée. Il a confirmé qu'une fois que le Conseil ECOFIN avait adopté une décision abrogeant sa décision sur l'existence d'un déficit excessif, la procédure repartait du début, en cas de nouveau déficit excessif. Il a rappelé à cet égard que le pacte de stabilité n'autorisait le maintien d'un déficit excessif que trois années consécutives au maximum. Il est donc indispensable que la France ne soit pas en situation de déficit excessif en 2005. Il a indiqué que la règle du « zéro volume » correspondait, selon l'hypothèse d'une inflation de 1,8 %, à une augmentation des dépenses d'environ 4 milliards d'euros, de sorte que la règle d'indexation des dépenses sur l'inflation diminuée d'1 point correspondait à une augmentation des dépenses de l'ordre de seulement 2 milliards d'euros. Il a estimé que le gouvernement avait tous les moyens nécessaires en matière de contrôle et d'évaluation de la dépense, et indiqué que les principaux services et procédures de l'Etat auront fait l'objet d'un audit d'ici le mois de juillet 2006. Il a précisé que si les dépenses de consommation des ménages en produits manufacturés avaient diminué de 1 % en décembre 2005, elles avaient progressé d'environ 2,6 % en moyenne annuelle en 2005, de sorte que la consommation des ménages pouvait être considérée comme dynamique. Il a estimé que la réforme du régime des acomptes de l'impôt sur les sociétés était utile sur le long terme, et ne pouvait être assimilée à une manipulation comptable.
M. Philippe Marini, rapporteur général, a estimé que cette réforme aurait dû être réalisée depuis longtemps.
M. Jean-François Copé a indiqué qu'il était « ouvert » quant à une éventuelle réduction des allégements de cotisations sociales. Après avoir évoqué un rapport récemment remis au Premier ministre par MM. Michel Mercier et Henri de Raincourt en leur qualité de parlementaires en mission (« Plus de droits et plus de devoirs pour les bénéficiaires des minima sociaux d'insertion », 15 décembre 2005), il a fait part de son intention de « mettre sur la table » en 2006 les relations financières entre l'Etat et les collectivités territoriales. Il a déclaré que le gouvernement souhaitait toujours que le secteur de la restauration bénéficie de la TVA à taux réduit, mais qu'il lui fallait pour cela obtenir l'accord de l'ensemble des Etats membres de l'Union européenne. Il a indiqué qu'il ne pouvait transmettre à la commission l'impact de la réforme du régime des acomptes d'impôt sur les sociétés pour chacune des entreprises concernées, pour des raisons tenant au secret fiscal qu'il était tenu, bien évidemment, de respecter. Il a déclaré que le gouvernement avait besoin du soutien de la commission pour améliorer l'efficacité de la dépense publique.
Audition de M. François Loos, ministre délégué à l'industrie
Au cours d'une seconde séance tenue dans l'après-midi, la commission a procédé à l'audition de M. François Loos, ministre délégué à l'industrie.
Après avoir remercié M. François Loos, ministre délégué à l'industrie, pour avoir accepté cette audition, M. Jean Arthuis, président, a rappelé qu'elle portait essentiellement sur le nouveau dispositif des consortiums d'approvisionnement à long terme des industries dites « électro-intensives », qui avait été introduit dans la loi de finances rectificative pour 2005. Rappelant le contexte où s'était inscrit l'examen de ce dispositif important, il a indiqué que celui-ci avait suscité les « hésitations et interrogations » de la commission, compte tenu notamment de son introduction tardive par voie d'amendement parlementaire. Il a donc invité M. François Loos, ministre délégué à l'industrie, à expliquer la genèse, la philosophie et le fonctionnement de ces nouveaux consortiums d'approvisionnement en électricité.
M. François Loos, ministre délégué à l'industrie, a, en premier lieu, rappelé que le marché de gros de l'électricité constituait désormais un marché européen, dont les prix convergeaient et avaient plus que doublé depuis 2001, passant de 23 euros par kilowattheure à plus de 50 euros aujourd'hui. Il a relevé que l'organisation actuelle du marché n'offrait pas de produits de long terme spécifiques pour les industriels électro-intensifs consommant essentiellement « en continu ». Dans ce contexte, la création de consortiums d'approvisionnement avait pour objet de permettre à ces industriels de bénéficier de prix de l'électricité compatibles avec la poursuite de leurs activités.
Revenant sur la genèse du dispositif, il a précisé qu'une table ronde, rassemblant les producteurs et consommateurs d'électricité, avait été mise en place en mars 2005 et avait rendu ses conclusions en juillet 2005, peu avant la saisine du Conseil de la concurrence. Le dispositif du consortium avait ensuite été présenté à la Commission européenne, successivement à la direction générale des transports et de l'énergie, en septembre, puis à la direction générale de la concurrence, en novembre. Enfin le ministère délégué à l'industrie avait reçu l'avis du Conseil de la concurrence le 5 décembre et la réponse de la direction générale de la concurrence le 7 décembre 2005, avant que l'ensemble du dispositif ne soit soumis au Parlement, dans le cadre de l'examen de la loi de finances rectificative pour 2005.
M. François Loos a exposé les cinq autres options qui avaient été étudiées, puis écartées. Le retour à un tarif réglementé et le développement de lignes directes s'étaient révélés contraires à la réglementation européenne ou techniquement complexes à mettre en oeuvre. Une meilleure valorisation des profils de consommation et l'octroi de rabais pour des consommations sur le long terme, la mise en place de contrats de moyen et long terme librement négociés, ou une participation directe des électro-intensifs à des investissements de production, à l'instar du réacteur EPR en Finlande, présentaient également des difficultés. En raison, par exemple, du délai de sept ans de construction d'un réacteur nucléaire, qui ne permettait pas de répondre au problème actuel du coût de l'électricité, ou du manque d'intérêt que l'opération pouvait présenter pour EDF. M. François Loos a ajouté que la solution qui était finalement apparue la plus appropriée résidait dans un montage permettant aux industriels d'acquérir à très court terme des droits de tirage sur la consommation d'électricité, via une structure inspirée du « modèle » finlandais.
Puis il a expliqué le mécanisme du consortium ayant pour objet de financer l'achat de volumes d'électricité auprès de fournisseurs. Ce consortium achèterait de l'électricité sur la base de contrats de long terme, sur une durée de 15 à 20 ans, et se financerait essentiellement par emprunt. Il a précisé que cette dette serait traitée, au sein des comptes des actionnaires, dans le strict respect des normes comptables internationales en vigueur, en particulier celles relatives aux principes de consolidation. Un dispositif fiscal assorti de critères de consommation d'électricité permettrait de limiter le dispositif aux entreprises électro-intensives. L'intérêt financier du montage, pour les producteurs comme pour les consommateurs, et de ce fait, la capacité de fournir de l'électricité à moindre coût, reposait sur un écart positif, de l'ordre de cinq points, entre la rentabilité escomptée par les producteurs d'électricité de la ressource financière à court terme fournie par le consortium et le coût sur le long terme, d'environ 6 %, de cette ressource pour le consortium.
M. François Loos a précisé que le consortium, acheteur d'électricité, impliquait dès lors quatre types d'acteurs : l'Etat, qui assurait la sélectivité et le caractère incitatif du dispositif ; les industriels actionnaires, qui apportaient les capitaux propres initiaux du consortium et lui versaient un prix de revente pour la livraison de l'électricité ; les banques, qui assuraient le financement de long terme par emprunt, étaient remboursées par le consortium, et disposaient d'un droit de préemption de troisième rang sur les droits à consommation d'un actionnaire défaillant ; et les producteurs, qui livraient de l'électricité au consortium pour un prix global incluant deux composantes qu'étaient le prix initial, c'est-à-dire un versement en numéraire effectué par le consortium en début de contrat au titre de l'achat de « droits de tirage », et un « prix d'enlèvement », acquitté sur le long terme. Le prix d'enlèvement se révèlerait donc d'autant plus faible que la mise initiale était élevée.
Il a ensuite indiqué que la direction générale de la concurrence de la Commission européenne avait émis le souhait que le volume d'enlèvement d'électricité soit limité à 10 ou 15 % de la production globale, ce qui se révélait inférieur aux besoins des industries électro-intensives sur 10 ans.
M. François Loos a enfin détaillé les critères d'éligibilité au consortium. Une entreprise était ainsi considérée comme électro-intensive lorsqu'au titre du dernier exercice clos, le rapport existant entre la quantité d'électricité consommée et la valeur ajoutée était supérieur à 2,5 kilowattheures par euro. Les volumes d'électricité éligibles correspondaient, quant à eux, à la consommation annuelle en France des sites vérifiant une triple condition : une consommation du site en heures creuses, c'est-à-dire réalisée entre 20 heures et 8 heures en semaine, ainsi que le samedi et le dimanche, représentant au moins 55 % de la consommation annuelle totale d'électricité ; un rapport entre l'énergie consommée au-dessous d'un certain seuil de puissance et cette puissance supérieur ou égal à 8 000 heures, hors arrêts exceptionnels et périodes d'entretien ; et une consommation du site donnant lieu au paiement des charges de service public de l'électricité, définies par l'article 5 de la loi du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité.
Puis en réponse à une question de Mme Nicole Bricq, M. François Loos a indiqué que ces critères étaient compatibles avec la législation communautaire et avaient été négociés en amont avec Mme Nelly Kroes, commissaire à la concurrence. Il a ajouté que l'ensemble du dispositif concernait les seules usines localisées en France et contribuait à favoriser le « site France », le critère du prix de l'électricité se révélant souvent déterminant dans les choix d'implantation géographique des grandes industries.
Cet exposé a été suivi d'un large débat.
M. Philippe Marini, rapporteur général, s'est félicité de cette présentation abordant à la fois les dimensions économique et industrielle du dispositif, tout en regrettant qu'elle n'ait pas été synthétisée lors de l'examen de l'amendement correspondant en loi de finances rectificative pour 2005. Il a constaté que l'effet de levier du consortium permettait aux consommateurs d'électricité de bénéficier de conditions d'approvisionnement plus favorables et de maintenir leur activité. Il présentait, à ce titre, une réelle parenté avec certains mécanismes mis en oeuvre durant les années 80 dans le secteur de l'industrie nucléaire et de l'enrichissement d'uranium, dont les clients avaient également mis en place des contrats sur le long terme portant sur des droits d'enlèvement. Le caractère consortial constituait néanmoins, selon lui, une réelle innovation du dispositif récemment adopté.
Il a ensuite formulé trois demandes de précisions :
- se référant à l'exposé de M. François Loos, ministre délégué à l'industrie, sur le traitement de la dette du consortium dans les comptes des actionnaires, il a rappelé que cette question avait plus particulièrement alerté la commission fin décembre 2005, compte tenu du caractère potentiellement déconsolidant du dispositif. Il a, dès lors, souhaité obtenir des éclaircissements, tout en s'estimant a priori rassuré, dès lors que le nouveau dispositif ne se révélait pas « en soi » déconsolidant et serait conforme aux normes comptables internationales ;
- sa deuxième question avait trait à la portée du différentiel de cinq points résultant de la différence de valorisation des flux financiers, en termes de coût du capital, par les producteurs et les industriels impliqués dans le consortium ;
- enfin M. Philippe Marini, rapporteur général, a souhaité que soit précisée la séquence des droits de préemption successifs en cas de défaillance d'un actionnaire du consortium. Relevant que le consortium verrait sa composition varier au gré de l'exercice des droits de préemption, il s'est demandé si, à terme, les banques ne seraient pas en mesure de remplacer tout ou partie des industriels.
En réponse, M. François Loos a précisé que la déconsolidation dans les comptes de l'actionnaire était autorisée dans trois cas par les normes comptables internationales IAS 27, 28 et 31, et en particulier lorsque l'actionnaire d'une entité n'exerçait pas d'influence dominante au sein de cette dernière. Il appartenait néanmoins au Comité de la réglementation comptable et au commissaire aux comptes de chaque société participante de décider s'il devait être procédé à une mise en équivalence ou à une intégration proportionnelle.
S'agissant du différentiel de taux d'actualisation, il a souligné que le rendement du capital de 11 % escompté par les producteurs correspondait à celui fixé par une convention entre l'Etat et EDF, qui conditionnait les choix d'investissement de l'opérateur national. Il a ajouté que le consortium, pour sa part, emprunterait à un taux moyen d'environ 6 % et disposerait d'un capital de 600 000 euros. Enfin, il a indiqué que les droits de préemption permettaient d'éviter l'effet d'aubaine et d'affecter le « ruban » de consommation à un intervenant en cas de fermeture d'un site. Ils pouvaient dès lors être successivement exercés par un autre industriel actionnaire du consortium, un producteur d'électricité puis un établissement de crédit.
M. Roland du Luart a souhaité savoir combien la France comptait d'entreprises électro-intensives. Il a demandé des précisions sur les modalités de répartition de la contribution au service public de l'électricité (CSPE).
M. François Loos a observé que la CSPE permettait de financer le surcoût de production d'énergie électrique par des centrales solaires, éoliennes ou de cogénération. Il a rappelé qu'EDF achetait l'énergie produite afin de favoriser le développement d'unités de production peu polluantes, et que son coût était plus élevé que celui de l'électricité produite par le groupe EDF. Il a indiqué que la CSPE, répartie sur tous les consommateurs d'électricité, à hauteur de quelques pourcents de leur facture, permettait de compenser ce différentiel de tarif, et d'alimenter les fonds sociaux couvrant les frais de fourniture d'électricité aux plus démunis dans les conditions prévues par la loi. Il a noté que la contribution au service public de l'électricité des entreprises électro-intensives était plafonnée à 500 000 euros par an.
M. François Loos a souligné que la CSPE permettait également de compenser le différentiel existant entre le rendement réel d'un investissement énergétique en Corse ou en région ultramarine et le taux de 11 % fixé par convention entre l'Etat et EDF.
Il a constaté que la France comptait 43 entreprises électro-intensives, soit 120 sites de production et 13 % de la consommation industrielle française totale d'électricité. En réponse à Mme Nicole Bricq, il a précisé que ces entreprises appartenaient à 43 groupes industriels distincts.
M. Yves Fréville a estimé que l'évolution du prix de l'électricité depuis quatre ans, mettait en évidence la forte augmentation de son coût marginal à court terme, et, par là même, l'insuffisance chronique de la capacité de production. Il a considéré que la fixation d'un taux de rendement des investissements trop élevé, soit 11 %, avait contribué à freiner le développement de la capacité de production d'électricité. Il a souhaité savoir sur quels critères était fixé ce taux d'actualisation des investissements d'EDF.
M. François Loos a rappelé que le sous-dimensionnement de la capacité de production d'électricité n'était pas propre à la France, mais concernait l'Europe dans son ensemble. Il a expliqué que la production d'électricité obéissait aux règles d'un marché libéral, le prix de l'énergie augmentant jusqu'à ce que le coût marginal atteigne un niveau suffisant pour qu'il soit rentable de construire une nouvelle unité de production.
Il a indiqué qu'une obligation d'investissement à hauteur de 30 milliards d'euros dans les trois ans avait été prévue lors de l'ouverture du capital d'EDF, soit l'équivalent de la production de cinq centrales électriques. Il a, par ailleurs, relevé que le taux d'actualisation des investissements réalisés par EDF avait été fixé à 11 % par la Commission de régulation de l'énergie (CRE). Il a ajouté que la France défendait la mise en place d'un programme d'investissements pluriannuels au niveau européen permettant de développer la capacité de production d'électricité à hauteur des besoins.
M. Jean Arthuis, président, a souhaité connaître la valeur de l'investissement du consortium précité.
M. François Loos a indiqué que le consortium investissait 1,5 milliard d'euros dans l'achat d'électricité, alors que le coût d'une centrale nucléaire de technologie EPR (European Pressurized Reactor) s'élevait à 3 milliards d'euros.
M. Gérard Longuet a constaté que la création du consortium permettait d'éviter la raréfaction de l'offre d'électricité, mais aussi de lisser l'évolution de son prix dans le temps. Il a rappelé que la création d'une nouvelle unité de production devait selon toute logique être précédée d'une forte tension sur les prix de l'énergie, puis d'une diminution importante une fois l'équipement en service. Il s'est demandé comment la dette contractée par les entreprises électro-intensives dans le cadre du montage financier retenu pour créer le consortium serait consolidée dans les comptes des sociétés concernées.
Il a estimé que l'avantage fiscal consenti aux entreprises électro-intensives restait marginal, mais s'est demandé si leur exemple ne risquait pas d'inciter des entreprises exclues du dispositif à revendiquer les mêmes conditions de vente d'électricité. Il a considéré que la fixation d'un taux d'actualisation des investissements d'EDF à 11 % correspondait à une logique de financement de type obligataire, et n'était pas forcément favorable à une adaptation rapide du marché aux besoins.
M. François Loos a précisé que l'intégration de la dette contractée par les entreprises électro-intensives n'avait pas à être proportionnelle au regard des normes IRFRS, mais que la mise en équivalence au sein du passif était suffisante pour traduire la portée économique de cette décision d'investissement. Il a rappelé que l'organisation d'une « chaîne » de droits de préemption de l'électricité produite en cas de défaillance structurelle d'un associé du consortium permettait d'éviter la formation de dettes cachées.
En ce qui concerne la possibilité d'une demande reconventionnelle des industriels électro-intensifs de moindre taille ou d'autres industries, il a indiqué qu'EDF leur proposait déjà la conclusion de contrat de fourniture d'électricité sur 5 ans.
M. François Loos a observé que selon les stipulations de la convention qui le liait à l'Etat, le groupe EDF devait rechercher un niveau de rentabilité de ses investissements de l'ordre de 11 %, les associés du consortium ayant emprunté au taux de 6 % sur le marché bancaire, la rentabilité de l'investissement réalisé s'avèrera supérieure pour EDF.
Mme Nicole Bricq a rappelé qu'elle n'avait pas voté la mesure proposée en loi de finances rectificative pour 2005, car elle considérait qu'elle était symptomatique du dysfonctionnement du marché de l'électricité. Elle a estimé que la concurrence n'avait pas fonctionné correctement, comme le montrait l'augmentation importante du prix de l'électricité à moyen terme.
Elle a considéré que le gouvernement avait proposé la création « d'un cartel monopolistique » sur le marché de la production d'électricité, les entreprises électro-intensives étant désormais en mesure de se protéger des effets de la concurrence par la mise en place du consortium. Elle a noté que cette disposition législative ne semblerait légitime que si ses effets étaient limités dans le temps, et elle a craint que les sociétés concernées ne soient pas encouragées à réaliser des économies d'énergie.
Mme Nicole Bricq a rappelé qu'en juillet 2007, tous les consommateurs d'électricité deviendraient « éligibles » et pourraient, à ce titre, choisir leur fournisseur d'électricité. Elle s'est demandé si les efforts consentis en faveur des entreprises électro-intensives n'étaient pas reportés sur les autres consommateurs, notamment les ménages et les collectivités territoriales. Elle a d'ailleurs indiqué que les collectivités territoriales commençaient à préparer l'échéance de juillet 2007.
M. François Loos a admis que le marché de production de l'électricité n'était pas organisé de façon optimale. Il a précisé que l'obligation d'investir 30 milliards d'euros faite à EDF lors de l'ouverture de son capital et le développement des interconnexions en Europe étaient des mesures de moyen terme et que la création de mesures dérogatoires pour les entreprises électro-intensives constituait une réponse de court terme indispensable au regard de leur situation. Il a rappelé que les entreprises étrangères électro-intensives bénéficiaient du dispositif législatif au même titre et dans les mêmes conditions que les entreprises françaises. Il a ajouté que celui-ci visait donc bien à réduire les risques de délocalisation d'unités de production, motivées par l'augmentation du prix de l'électricité en France.
M. François Trucy a remarqué que les maires qui souhaitaient développer la production d'électricité par l'implantation d'éoliennes sur le territoire de leur commune se heurtaient parfois à de réelles difficultés et devaient renoncer à mener à bien les investissements prévus.
M. François Loos a observé que la production d'électricité par des installations éoliennes devait passer de 400 mégawatts installés en 2005 à 2 000 mégawatts installés à la fin de l'année 2006. Il a convenu que l'installation d'éoliennes répondait à des prescriptions législatives strictes concernant notamment l'insertion dans le paysage, le respect des ondes radar utilisées par l'armée, etc. Il a souligné le rôle essentiel que jouaient les préfets dans ce domaine pour faire appliquer cette législation tout en incitant au développement d'unités de production d'énergie renouvelable.
M. Paul Girod a souhaité savoir quel était, pour EDF, le statut fiscal de l'investissement du consortium.
M. François Loos a indiqué qu'il s'agissait d'un revenu différé. En réponse à M. Michel Moreigne, il a confirmé que la réforme prévue par la loi de finances rectificative pour 2005 n'avait pas d'incidence sur la fiscalité locale.
M. Philippe Marini, rapporteur général, a estimé que la qualité des informations données par le ministre confirmait que le dispositif adopté était efficace et adapté à la situation concurrentielle que connaissaient les entreprises électro-intensives. Il s'est toutefois demandé comment il était possible de se prémunir contre le risque que l'activité de courtage, c'est-à-dire la cession in fine de gré à gré des droits à consommation en cas de non exercice des droits de préemption lors de la défaillance d'un associé du consortium, ne devienne prépondérante. Il a souhaité savoir si le risque « d'une cartellisation de l'offre d'électricité » avait ainsi été évalué.
M. François Loos a indiqué que, sur les recommandations du Conseil de la concurrence, la capacité d'achat d'électricité du consortium avait été limitée à la moitié des besoins exprimés par les industriels, soit 20 terawatts. Il a estimé que le risque de courtage était ainsi limité, la « série des droits de préemption en cascade » prévus par la loi étant également de nature à prévenir la formation d'une cartellisation de l'offre d'électricité.
Mme Nicole Bricq a souhaité obtenir des précisions sur les entreprises électro-intensives qui pourraient devenir membre du consortium.
M. François Loos a précisé qu'il s'agissait notamment d'industries du secteur de la chimie, de la métallurgie et de la production d'aluminium.
M. Jean Arthuis, président, a observé que le doublement du prix du kilowatt/heure entre janvier 2003 et janvier 2006 démontrait l'imperfection du marché de l'électricité. Il s'est demandé si les petites et moyennes entreprises (PME) ne devaient pas envisager de fédérer leurs intérêts afin d'obtenir, à leur tour, des conditions de vente d'électricité avantageuses. Il a souhaité, par ailleurs, que l'utilisation de la CSPE fasse l'objet d'un audit afin d'en assurer un bon suivi.
M. François Loos a indiqué que la CSPE était répartie et utilisée sous le contrôle de la CRE. Il a rappelé qu'elle permettait de compenser le surcoût de production d'électricité par des ressources naturelles renouvelables ou peu polluantes. Il a observé que certaines PME, notamment celles productrices de chlore, étaient éligibles au dispositif prévu pour les entreprises électro-intensives. Il a souligné que les autres PME pouvaient bénéficier de contrat d'achat d'électricité de moyen terme avec les producteurs d'énergie électrique, et a estimé que cela les plaçait dans une position concurrentielle satisfaisante au sein du marché européen.
En réponse à la question de M. Jean Arthuis, président, M. François Loos a indiqué qu'il était prêt à poursuivre la réflexion sur ce sujet.
M. Jean Arthuis, président, a remercié le ministre pour la qualité de son exposé et la précision des réponses qu'il avait apportées à la commission.
Mercredi 25 janvier 2006
- Présidence de M. Jean Arthuis, président.Réunion du Bureau de la commission - Compte rendu
M. Jean Arthuis, président, a rendu compte de la réunion du bureau qui s'était tenue le mardi 24 janvier 2006 et avait défini le programme de travail de la commission pour le premier semestre de l'année 2006. Il a précisé, par ailleurs, que le programme de contrôle des rapporteurs spéciaux pour 2006 ferait l'objet, comme les années passées, d'une communication ultérieure.
Il a tout d'abord fait état des projets et propositions de lois intéressant la commission susceptibles d'être inscrits à l'ordre du jour du Sénat en cours de semestre. En premier lieu, il a rappelé que M. Adrien Gouteyron serait le rapporteur des trois conventions fiscales en instance. Puis il a émis le souhait que la discussion du projet de loi portant règlement définitif du budget de 2005, qui pourrait intervenir en juin 2006, puisse durer plusieurs jours, et se faire en présence de ministres gestionnaires avec la participation des rapporteurs spéciaux et pour avis concernés. Il a ensuite rappelé que le Sénat devait examiner prochainement, en deuxième lecture, le projet de loi relatif aux offres publiques d'acquisition.
Puis M. Jean Arthuis, président, a énuméré les textes dont le dépôt est envisagé par le gouvernement ou évoqué par voie de presse, citant un projet de loi portant diverses dispositions d'ordre économique et financier (DDOEF), un projet de loi sur la participation et l'épargne salariale, dont la commission des finances pourrait être saisie pour avis, une éventuelle proposition de loi portant réforme du Conseil de la politique monétaire (CPM) de la Banque de France. Il a également suggéré que la commission se saisisse pour avis sur le projet de loi pour l'égalité des chances, qui comporte plusieurs dispositions de nature fiscale.
Par ailleurs, il a rappelé que le débat d'orientation budgétaire (DOB) pour 2007 aurait lieu à la fin de ce semestre et pourrait, le cas échéant, se tenir après la discussion du projet de loi de règlement pour 2005.
M. Jean Arthuis, président, en est ensuite venu aux travaux de réflexion prospective que la commission entendait mener, au premier rang desquels figure le dispositif de la « TVA sociale », rappelant que le président de la République avait engagé un débat sur une réforme du financement de la protection sociale à l'occasion de ses voeux aux Français. Il a également insisté sur la nécessité d'un suivi des engagements pris à l'automne 2005 lors de la discussion budgétaire en matière de finances locales, précisant que ce suivi devrait particulièrement concerner la réforme de la taxe professionnelle.
En outre, il a souligné la nécessité de suivre la mise en place de la base sénatoriale de données sur les collectivités territoriales, qui est assurée par le service des collectivités territoriales. Répondant aux doutes émis par M. Aymeri de Montesquiou sur la capacité du gouvernement de transmettre au Sénat l'ensemble des données nécessaires à la mise en oeuvre de ce projet, il a estimé qu'il était de la responsabilité du Sénat d'y « mettre bon ordre ».
M. Jean Arthuis, président, a également souhaité que la commission des finances effectue un bilan de la mise en oeuvre de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF), notamment à l'occasion de son « désormais traditionnel » séminaire annuel.
Il a également fait un point sur les relations de la commission avec la Cour des comptes dans le cadre de la LOLF, se plaisant à en relever la qualité et l'étroitesse. A ce sujet, il a tout d'abord rappelé que, depuis 2002, la commission avait déjà reçu 13 enquêtes commandées à la Cour des comptes en application de l'article 58-2 de la LOLF. Puis il a expliqué que 3 enquêtes commandées en 2005 et adressées par la Cour des comptes feraient l'objet d'auditions conjointes devant la commission au cours du premier trimestre de l'année 2006 : ces études concernent les frais de justice, le fonds de soutien à l'expression radiophonique (FSER), et le fonds d'intervention pour les services, l'artisanat et le commerce (FISAC). Il a aussi rappelé que 2 études demandées au titre de 2005 demeuraient « en instance », l'une sur la gestion immobilière du ministère de l'équipement, l'autre sur le service public de l'équarrissage. En réponse à M. Aymeri de Montesquiou, qui s'interrogeait pour savoir si la gestion immobilière du ministère de l'équipement ne devait pas être mise en rapport avec la gestion du personnel de ce ministère, il a estimé que ce sujet devait être abordé lors de l'audition qui suivrait la remise de l'étude par la Cour des comptes. M. Jean Arthuis, président, a ensuite présenté les thèmes des études demandées par les rapporteurs spéciaux et que la commission allait transmettre à la Cour des comptes au titre de 2006. Y figurent :
- l'association française d'action artistique, à la demande de MM. Michel Charasse et Adrien Gouteyron, rapporteurs spéciaux ;
- les instances consultatives placées auprès du Premier ministre, à la demande de MM. François Marc et Michel Moreigne, rapporteurs spéciaux ;
- les aides à l'emploi, à la demande de M. Serge Dassault, rapporteur spécial ;
- le recouvrement des amendes et des condamnations pécuniaires, à la demande de M. Bernard Angels, rapporteur spécial ;
- la mise en place d'Oseo-Anvar et des pôles de compétitivité, à la demande de M. Maurice Blin, rapporteur spécial.
M. Jean Arthuis, président, a également évoqué l'expérimentation mise en place depuis 2004 de la mission d'assistance de la Cour des comptes à la commission effectuée en application de l'article 58-1 de la LOLF, pour une étude portant sur l'Institut national de recherches en archéologie préventive (INRAP). M. Yann Gaillard s'est félicité de cette expérience et a tenu à souligner la grande qualité des services rendus dans ce cadre par M. Christian Sabbe, conseiller-maître à la Cour des comptes. M. Jean Arthuis, président, a alors invité ses collègues à donner suite à cette expérience, notamment lorsque les rapporteurs spéciaux auront à définir leur programme de travail. Il a, par ailleurs, incité les rapporteurs spéciaux à exploiter les audits du gouvernement sur les administrations, estimant qu'ils constituaient un puissant levier de la modernisation de l'Etat.
Il a conclu sur les études prospectives de la commission en évoquant les sujets que celle-ci pourrait traiter en matière de fiscalité, à l'initiative de M. Philippe Marini, rapporteur général. Le bilan de l'épargne retraite, le capital risque et les « niches fiscales » en matière d'impôt sur les sociétés devraient ainsi faire l'objet d'études. Il a, de plus, indiqué que le bureau avait décidé la constitution, au sein de la commission, d'un groupe de travail sur les « niches fiscales » en matière d'impôt sur le revenu, à la suite de la décision du Conseil constitutionnel n° 2005-530 DC du 29 décembre 2005 sur la loi de finances pour 2006, ayant censuré l'article 78 de cette loi. En réponse à M. Jean-Jacques Jégou, qui souhaitait savoir si ce groupe aurait vocation à étudier des avantages tels que les revenus des militaires en mission, il a précisé que, dans son esprit, son cadre de réflexion serait très large, et qu'en tout état de cause, comme c'était la règle, l'ensemble des sensibilités politiques de la commission avait vocation à y figurer.
Puis M. Jean Arthuis, président, en est venu aux aspects internationaux des missions de la commission. Il a annoncé que, sous réserve de l'accord du bureau du Sénat, une délégation du bureau de la commission se rendrait au Japon, probablement pendant la suspension des travaux parlementaires du mois d'avril, afin d'étudier l'assainissement de l'économie de ce pays après l'éclatement de la « bulle » financière au début des années 1990 ; cette délégation pourrait, le cas échéant, compléter sa mission par un bref séjour en Corée du Sud. En outre, sous réserve de l'accord du bureau du Sénat, une délégation du bureau de la commission pourrait effectuer un voyage de quelques jours en Estonie et en Finlande au cours de la semaine de suspension des travaux parlementaires du mois de mai afin d'apprécier les dispositifs fiscaux retenus par des pays ayant rejoint récemment l'Union européenne.
M. Jean Arthuis, président, a ensuite évoqué le suivi de l'exécution budgétaire 2006. Il a rappelé que ce suivi devrait comprendre l'audition de ministres gestionnaires, à compter de la mi-avril. Par ailleurs, à l'instar de ce qui avait déjà été réalisé à quatre reprises en 2005, il a souligné que les travaux de contrôle feraient l'objet de débats en séance publique, comme cela est déjà envisagé pour le rapport d'information n° 417 (2004-2005) de M. Claude Belot sur les télévisions locales. Cela pourrait aussi concerner, notamment, le rapport de M. Yann Gaillard sur l'INRAP ou celui de M. François Marc sur le Conseil supérieur de l'audiovisuel. M. Jean-Jacques Jégou a suggéré que le suivi du dossier médical partagé (DMP) puisse également faire l'objet d'un tel débat.
Puis, passant aux travaux de contrôles susceptibles de faire l'objet d'auditions de suivi au sein de la commission, M. Jean Arthuis, président, a cité :
- le suivi du rapport d'information n° 476 (2004-2005) de M. Paul Girod sur la gestion de la dette de l'Etat dans le contexte européen, et plus particulièrement sur la question de la Caisse d'amortissement de la dette sociale (CADES) ;
- le suivi des enquêtes de la Cour des comptes sur Météo France et sur le Centre national pour l'aménagement des structures et des exploitations agricoles (CNASEA) ;
- le suivi du contrôle réalisé par MM. Joël Bourdin et Marc Massion, rapporteurs spéciaux, sur la Sopexa.
M. Paul Girod a relevé que la presse relatait que la LOLF avait rigidifié les procédures de certaines administrations. En réponse, M. Jean Arthuis, président, a souligné qu'il revenait aux rapporteurs spéciaux d'enquêter sur ce type de sujet.
Puis M. Jean Arthuis, président, en est venu aux auditions que la commission devait prévoir en cours de semestre. Il a expliqué qu'outre des ministres gestionnaires, ces auditions devraient concerner des responsables de programme, notamment au sein de missions interministérielles, et cela au vu des échanges qui s'étaient déroulés à l'automne 2005 en séance publique lors de la discussion du premier budget « au format LOLF ».
Par ailleurs, il a exprimé la volonté que la commission engage un cycle d'auditions sur la modernisation de l'Etat. Plusieurs hauts responsables de l'administration du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie pourraient être entendus afin de s'exprimer, à ce sujet, devant la commission.
D'autre part, il a souhaité que des hauts responsables internationaux et des personnalités du monde économique (chefs d'entreprise, syndicalistes, responsables d'instances de normalisation de la comptabilité) puissent également être entendus par la commission.
Enfin, il a suggéré que la commission auditionne d'autres personnalités, comme le Premier président de la Cour des comptes ou le président de l'Autorité des marchés financiers (AMF), ainsi que, le cas échéant, une « voix dissonante » par rapport aux positions défendues par l'AMF.
Enfin, M. Jean Arthuis, président, a indiqué que le « désormais traditionnel » séminaire annuel de la commission pourrait se tenir au début du mois d'avril, et qu'il conviendrait d'en déterminer rapidement le lieu. Il a ensuite informé la commission de la volonté du bureau que les amendements de la commission présentés en seconde réunion (soit lors de la séance d'examen des amendements extérieurs) fassent l'objet d'une motivation à l'attention des membres de la commission. Pour conclure, il a indiqué que le bureau avait donné acte à M. François Trucy de sa volonté d'actualiser son rapport d'information n° 223 (2001-2002) sur les jeux de hasard et d'argent en France.
Un débat s'est ensuite engagé.
M. François Marc s'est félicité que des auditions de responsables d'instances de normalisation comptable soient prévues, insistant sur l'importance particulière de ce sujet. Il a, d'autre part, estimé que l'Autorité des marchés financiers (AMF) devait faire l'objet d'un regard appuyé, et que la commission devait bien prévoir d'entendre des « voix discordantes ». M. Jean Arthuis, président, a réaffirmé sa volonté de ce qu'il en aille ainsi.
M. Jacques Baudot s'est demandé si la « TVA sociale » entrait dans le cadre des financements alternatifs de la protection sociale envisagés par le président de la République à l'occasion de ses voeux aux Français. M. Jean Arthuis, président, a estimé, pour sa part, que le président de la République avait lancé un vaste débat qu'il s'agissait, à présent, pour la commission de continuer à faire vivre.
A M. Yves Fréville, qui a jugé qu'il aurait été intéressant d'ajouter une réflexion sur les évolutions macroéconomiques au programme d'auditions de la commission, M. Jean Arthuis, président, a répondu qu'il lui semblait que le programme était déjà chargé, mais que cette possibilité serait étudiée. En tout état de cause, une audition en ce sens serait programmée pour la prochaine réunion.
Puis Mme Nicole Bricq a évoqué le projet de loi sur la consommation que le gouvernement préparerait selon plusieurs articles de presse, soulignant que la commission aurait vocation à s'en saisir pour avis. M. Jean Arthuis, président, a jugé qu'une telle saisine pourrait se faire si le contenu du projet de loi le justifiait.
Mme Nicole Bricq est ensuite revenue sur l'application de la LOLF, exprimant le souhait de disposer d'un tableau récapitulatif de l'ensemble des déplacements de crédits de programme à programme votés au cours de l'examen du projet de loi de finances pour 2006. M. Jean Arthuis, président, a précisé que cela était prévu.
A M. Gérard Longuet, qui a suggéré, à l'instar de M. Yves Fréville, que la commission organise des auditions sur le thème de l'évolution de la situation macroéconomique, M. Jean Arthuis, président, a répondu que des contacts avaient d'ores et déjà été pris en ce sens.
Enfin, M. Gérard Longuet, en sa qualité de rapporteur spécial de la mission « Enseignement scolaire », est revenu sur les études pouvant être demandées à la Cour des comptes en application de l'article 58-2 de la LOLF, estimant qu'une étude analysant les raisons du surcoût par élève du second cycle de l'enseignement secondaire constaté en France par rapport à la moyenne des pays de l'OCDE pouvait être très pertinente. M. Jean Arthuis, président, s'est demandé si une telle étude ne relevait pas d'autres formes d'expertise, évoquant notamment la mission d'assistance de la Cour des comptes au Parlement, en application de l'article 58-1 de la LOLF.