- Mardi 13 mai 2008
- Mercredi 14 mai 2008
- Finance internationale - Finance islamique - Table ronde consacrée à l'intégration de la finance islamique dans le système financier global
- Finance internationale - Finance islamique - Table ronde sur le développement de la finance islamique en France : quelles adaptations du cadre législatif et-ou réglementaire ?
- Retraite - Fonds de réserve pour les retraites - Audition de MM. Raoul Briet, président du conseil de surveillance, et Antoine de Salins, membre du directoire du Fonds de réserve pour les retraites
- Jeudi 15 mai 2008
- Finance internationale - Fonds souverains - Table ronde sur la stratégie d'investissement des fonds souverains : rentabilité à long terme ou contrôle sectoriel ?
- Finance internationale - Fonds souverains - Table ronde sur l'acceptabilité et la redevabilité des fonds souverains aux Etats-Unis, en Europe et en France
Mardi 13 mai 2008
- Présidence de M. Jean Arthuis, présidentContrôle du RMI - Examen des amendements
La commission a procédé à l'examen des amendements aux conclusions sur la proposition de loi n° 212 (2007-2008) de M. Auguste Cazalet, rapporteur, renforçant le contrôle comptable du revenu minimum d'insertion (RMI).
A l'issue d'un large débat, au cours duquel sont intervenus Mme Nicole Bricq, MM. Jean Arthuis, président, Michel Moreigne et Philippe Dallier, elle a émis les avis figurant dans le tableau suivant :
Mercredi 14 mai 2008
- Présidence de M. Jean Arthuis, président.Finance internationale - Finance islamique - Table ronde consacrée à l'intégration de la finance islamique dans le système financier global
Au cours d'une première séance tenue dans la matinée, la commission a procédé à l'audition, sous la forme d'une table ronde consacrée à l'intégration de la finance islamique dans le système financier global, de M. Zoubeir Ben Terdeyet, directeur de Isla-Invest, Mme Maya Boureghda, juriste à BNP Paribas, chargée d'enseignement à Paris I, M. Anouar Hassoune, vice-président de Moody's, N., responsable commercial de produits structures-asset management SGAM AI (Londres), M. Jean-François Pons, directeur des relations européennes et internationale de la Fédération bancaire française (FBF), M. Jérôme Pignolet de Fresnes, responsable de gestion de patrimoine BFC, et M. Gilles Saint-Marc, avocat associé au cabinet Gide Loyrette Nouel AARPI.
M. Jean Arthuis, président, a rappelé que la finance islamique, née dans les années 70, a pour but de développer des services bancaires et des produits financiers compatibles avec les prescriptions de la loi coranique (la « Charia »). Il a souligné qu'elle connaissait un développement significatif, soutenu par la présence d'une liquidité importante dans un certain nombre de pays musulmans, et une forte demande de produits compatibles avec la Charia.
Observant que cette croissance suscite un vif intérêt, y compris en Europe, il a noté que plusieurs pays s'interrogeaient sur la manière de l'intégrer aux côtés des activités « financières conventionnelles », le Royaume-Uni faisant figure de précurseur sur ce sujet depuis 2004.
Il a indiqué que la commission avait été sensibilisée à ce sujet lors d'une mission effectuée en mars 2007 au Moyen-Orient et d'un déplacement réalisé au Royaume-Uni par le rapporteur général, dans le cadre de la mission commune d'information relative aux centres de décision économique.
Cette table ronde a pour objectif de dresser un état des activités de l'industrie financière française dans ce domaine, encore fortement localisé au Moyen-Orient et en Asie du Sud-Est, d'apprécier l'opportunité pour la France de s'insérer sur ce marché en plein essor, et de déterminer les modalités à mettre en oeuvre pour y parvenir. Il a fait valoir, à cet égard, sa préférence pour des adaptations de bonnes pratiques plutôt que pour des modifications d'ordre législatif.
Procédant à l'aide d'une vidéo-projection, M. Gilles Saint-Marc, avocat associé au cabinet Gide Loyrette Nouel AARPI, a présenté les grandes caractéristiques de la finance islamique, poche de liquidité importante pour les marchés financiers occidentaux. Il a notamment indiqué que le taux de croissance annuel des activités liées à la finance islamique, depuis 2003, atteignait 15 %, que le volume des opérations de financement islamique à l'échelle mondiale était estimé à 500 milliards de dollars, répartis pour 60 % dans les pays du Golfe et pour 20 % en Asie du Sud-Est, et que le montant de l'épargne disponible dans ces zones se montait à 5.000 milliards de dollars.
Evoquant la concurrence de la place de Londres, il a souligné qu'elle pouvait s'appuyer sur des initiatives privées nombreuses comprenant l'ouverture de banques islamiques et la conclusion d'accords pour la mise en place de produits islamiques standardisés. Ces initiatives sont relayées par un soutien des autorités publiques, qui s'est manifesté par l'adoption de quatre réformes législatives depuis 2003, le Trésor britannique ayant annoncé également en mars 2008 son intention de lancer une émission d'obligations islamiques « sukuk ».
M. Gilles Saint-Marc a indiqué que la jurisprudence britannique avait conforté le principe selon lequel la finance islamique s'inscrit dans le cadre de la loi nationale, la question de la validation de la compatibilité de l'opération de financement avec la Charia étant laissée à l'appréciation d'un conseil de conformité à la Charia, interne aux banques, qui s'exprime sous la forme de « fatwa ». Il a observé que cette validation était rendue parfois délicate du fait de la diversité des écoles de pensée islamique et de la relativité de la chose jugée de telles « fatwa ».
Abordant l'environnement offert par la place de Paris à la finance islamique, il a considéré que le droit français disposait d'équivalences aux cinq principes de la Charia : prohibition de l'intérêt (« riba »), interdiction de l'incertitude (« maysir ») et de la spéculation (« gharar »), interdiction des secteurs illicites (« haram »), partage des pertes et des profits et contrainte de l'adossement de tout financement à un actif tangible.
Il a présenté ensuite les différents types de produits islamiques dans les domaines de l'achat-vente, de la location avec option d'achat, du financement de projet, et du refinancement par émission de « sukuk » en précisant, dans chaque cas, les évolutions législatives et réglementaires souhaitables, notamment en matière fiscale ou concernant le statut de la fiducie. Il a jugé plus substantiels les aménagements du droit français nécessaires au développement de l'assurance et de la banque islamique de détail.
En conclusion, il a estimé que la finance islamique représentait, au prix de réformes simples, une opportunité pour la France et qu'elle serait un facteur d'intégration des Musulmans et une preuve de la modernité de notre droit.
M. Jean Arthuis, président, a émis des doutes quant à l'opportunité d'intégrer des mesures d'adaptation dans le projet de loi de modernisation de l'économie et il s'est réjoui, pour l'équilibre des comptes de l'Institut du monde arabe, que l'Autorité des marchés financiers ait autorisé, en 2007, les donations à cet institut comme « instrument de purification de la part impure des dividendes ».
M. Anouar Hassoune, vice-président de Moody's, a qualifié la finance islamique de compartiment de la finance éthique en rappelant qu'elle contribuait, avant tout, à nourrir l'économie réelle.
Procédant à l'aide d'une vidéo-projection, il a évoqué l'historique de la finance islamique, créée à Dubaï en 1975 et dont le taux de croissance a atteint, en 2007, près de 26 %. Les actifs s'élèvent globalement à 5.000 milliards de dollars et le dynamisme de la finance islamique repose essentiellement sur le marché des « sukuk », particulièrement actif en Malaisie.
Bénéficiant à l'origine des surliquidités du Golfe persique liées au prix du pétrole et renforcées par les effets du 11 septembre, la finance islamique s'est orientée depuis les années 1990 vers la clientèle des particuliers.
Actuellement, 90 % de ses actifs sont portés par des banques, mais l'évolution devrait conduire à une désintermédiation et à la captation d'une large part du marché par des fonds.
Revenant sur les cinq principes de la Charia, M. Anouar Hassoune a estimé qu'il fallait donner une plus grande importance aux deux principes « positifs » que sont le partage des pertes et des profits et l'adossement des financements à un actif tangible.
Il a ensuite détaillé par zone géographique les marchés de la finance islamique dont les potentialités, au niveau mondial, peuvent être évaluées entre 4.000 et 5.000 milliards de dollars, le taux de pénétration actuel des produits islamiques au regard de l'ensemble des liquidités disponibles étant estimé à 12 %.
Il s'est interrogé sur les paradoxes de la situation française caractérisée, face aux opportunités offertes, par une faible part de pénétration des grandes banques françaises dans la finance islamique, un retard relatif dans le développement de produits conformes à la Charia, et l'absence d'une offre de banque de détail islamique, alors qu'existe une vaste communauté musulmane.
Il s'est toutefois réjoui de récentes initiatives, comme l'autorisation de la commercialisation d'OPCVM explicitement islamiques, l'introduction de la fiducie dans le droit français ou les réflexions d'Europlace sur la suppression des « frottements fiscaux » existants.
M. Jean-François Pons, directeur des relations européennes et internationales de la Fédération bancaire française (FBF), a observé que, depuis 2003, plusieurs grandes banques françaises avaient développé des activités de finance islamique à l'étranger, relevant qu'un tel développement nécessitait un effort financier, notamment pour définir des produits compatibles avec la Charia, validés par des comités ad hoc.
Pour ce qui concerne la France, il a indiqué qu'il n'existait pas d'obstacle juridique dirimant pour la finance islamique, même si des « frottements fiscaux » peuvent pénaliser cette branche. Dès lors, des opérations de banques d'investissement ont vu le jour ces dernières années, à un faible niveau. En revanche, il n'existe pas de demande significative pour des opérations de banque de détail. La France dispose d'ailleurs du meilleur taux européen d'inclusion bancaire, de l'ordre de 98 %, ce qui tend à montrer que les problèmes d'exclusion du système pour des raisons religieuses ne s'y posent pas. Il s'agira, toutefois, de suivre le succès rencontré par la démarche de certaines banques étrangères qui ont déposé des demandes d'agrément pour des opérations de banque de détail islamique en France.
A M. Jean Arthuis, président, qui souhaitait savoir si l'émission de « sukuk » pouvait présenter un intérêt pour les collectivités territoriales, MM. Jean François Pons et Gilles Saint-Marc ont répondu que de telles opérations étaient envisageables, s'agissant d'une poche de liquidités comparable à d'autres instruments. M. Anouar Assoune a indiqué que le Land allemand de Saxe avait ainsi recouru à une telle opération en 2004, et qu'il était, à ce jour, le seul cas connu.
Procédant à l'aide d'une vidéo-projection, Mme Maya Boureghda, juriste à BNP Paribas, chargée d'enseignement à Paris I, a présenté l'expérience pratique de la banque BNP Paribas en matière de finance islamique, soulignant que cet établissement était actif dans ce domaine depuis le début des années 1980. La division de banque islamique du groupe est implantée dans l'émirat de Bahreïn depuis 2003 et dispose d'un comité Charia et d'organismes de charité purificateurs, l'Institut du monde arabe bénéficiant de la partie « impure » des bénéfices réalisés. La qualité des prestations de ces structures fait de BNP Paribas un partenaire crédible dans la région du Golfe persique.
Ses activités sont très diversifiées, tant en matière de financement de projets à moyen ou à long terme qu'en matière de financement de capitaux. Au cours de ces dernières années, elle a ainsi participé à plusieurs grands projets, comme Qatar Gas II en 2004 (projet d'un montant de 6,5 milliards de dollars, dont une tranche de financement islamique de 530 millions de dollars) ou, en 2007, un dessein d'usine électrique et de dessalement d'eau de mer (2,7 milliards de dollars, dont une tranche islamique de 600 millions de dollars).
Mme Maya Boureghda a souligné que BNP Paribas souhaitait multiplier son offre de produits islamiques, cette branche d'activité constituant l'un des axes prioritaires de développement du groupe bancaire. Les régions visées en priorité sont l'Asie et les pays musulmans du pourtour méditerranéen. En revanche, à ce stade, il n'est pas prévu d'action significative en Europe.
M. Jean Arthuis, président, a rappelé qu'une délégation de la commission s'était rendue à Bahreïn lors d'un déplacement dans le Golfe persique au printemps 2007, où elle s'était fait présenter cette branche de l'industrie financière.
M. Zoubeir Ben Terdeyet, directeur de Isla-Invest, est revenu sur les propos de M. Jean-François Pons relatifs à l'absence de demande de produits islamiques de banque de détail en France. Il a souligné qu'au sein de la nouvelle génération de Musulmans français, de nombreuses personnes se posaient des questions sur leurs racines et se « réappropriaient les textes » islamiques. Dès lors, ceux qui souhaitent faire fructifier leur argent se heurtent au problème de l'interdiction de l'intérêt qui peut les priver de l'accès à des produits tels que le livret A ou le plan d'épargne logement. De même, si la fatwa de 1999 autorisant, sous conditions, le prêt immobilier pour l'acquisition d'un logement, a pu inciter certains Musulmans à utiliser un tel outil, d'autres ne le font pas, soit parce qu'ils n'entrent pas dans les critères édictés, soit parce qu'ils ne partagent pas l'analyse développée dans cette fatwa.
De plus, M. Zoubeir Ben Terdeyet a déclaré que les créateurs musulmans d'entreprises pouvaient rencontrer des difficultés de financement pour leurs projets du fait de l'absence de produits bancaires respectant les préceptes de l'Islam.
Etablissant un parallèle avec la viande hallal, pour laquelle la demande a été stimulée par le développement de l'offre, il s'est déclaré confiant quant au succès de produits financiers islamiques qui pourraient être lancés en France, de nombreux Musulmans étant susceptibles d'opter en leur faveur s'ils pouvaient le faire. Il a donc invité les banques à ne pas limiter leur réflexion au développement de grands projets de banque islamique dans certaines régions du monde, mais à s'intéresser également à la clientèle des Musulmans de France, y voyant, de surcroît, un facteur d'intégration.
N., responsable commercial de produits structurés-asset management SGAM AI, a indiqué qu'il disposait d'une expertise reconnue sur des solutions d'investissement conformes à la Charia depuis 2004, à la demande de clients originaires du Golfe persique et d'Asie du Sud-Est. Il a insisté sur l'importance cruciale que revêt la collaboration étroite avec des comités Charia de renommée internationale, collaboration qui intervient à tous les niveaux de la conception des produits islamiques.
Cela lui a permis de commercialiser une large gamme de produits islamiques à travers le monde : d'une part, des produits structurés, d'autre part des produits indiciels. A M. Jean Arthuis, président, qui s'est interrogé sur la localisation des fonds indiciels islamiques au Luxembourg, N. a fait valoir les facilités qu'offre le droit luxembourgeois pour la commercialisation de tels produits à l'international.
M. Jérôme Pignolet de Fresnes, responsable gestion de patrimoine de BFCOI, a expliqué que son établissement, filiale de la Société générale opérant sur l'île de La Réunion, avait demandé le développement de deux produits financiers islamiques pour répondre aux souhaits de sa clientèle, et bénéficier ainsi, par exemple, d'un produit aux effets comparables à ceux du livret A tout en étant conforme aux préceptes de l'Islam. Il a confirmé l'effet intégrateur potentiel de ce type de produits pour un certain nombre de clients.
En conclusion, M. Jean Arthuis, président, a constaté que la finance islamique faisait partie du paysage de la finance mondiale et que, soutenue notamment par l'évolution des cours du pétrole, elle connaissait une croissance rapide. Il a relevé que les banques françaises étaient actives en ce domaine, tout en conservant une attitude attentiste en France. Puis, ayant souligné l'ampleur des enjeux, il a déclaré que le développement de la finance islamique en France nécessitait peut-être certaines adaptations du cadre législatif ou réglementaire, ce que la seconde table ronde avait pour objet d'étudier.
Finance internationale - Finance islamique - Table ronde sur le développement de la finance islamique en France : quelles adaptations du cadre législatif et-ou réglementaire ?
La commission a ensuite organisé une seconde table ronde sur le développement de la finance islamique en France : quelles adaptations du cadre législatif et-ou réglementaire ?, avec M. Arnaud de Bresson, délégué général d'Europlace, M. Thierry Francq, chef du service du financement de l'économie à la direction générale du Trésor et de la politique économique, M. Bruno Gizard, secrétaire général adjoint de l'Autorité des marchés financiers (AMF), Mmes Laurence Toxé et Anne-Sylvie Vasseneix-Paxton, avocates au cabinet Norton Rose LLP (Paris), et M. Gilles Vaysset, secrétaire général du Comité des établissements de crédit et des entreprises d'investissement.
M. Arnaud de Bresson, délégué général d'Europlace, a estimé que la France faisait preuve d'un certain attentisme vis-à-vis du développement de la finance islamique. Dans cette perspective, il a rappelé que la finance islamique était une priorité d'action pour le Haut comité de place et qu'un groupe de travail ad hoc travaillait actuellement à présenter des propositions afin de lever les éventuels obstacles juridiques ou fiscaux au développement de ce marché en France.
Il s'est félicité, en outre, de la tenue de cette table ronde au Sénat, estimant que les progrès de ce dossier seraient d'autant plus rapides que la mobilisation des professionnels concernés serait accompagnée d'un soutien des autorités politiques.
M. Thierry Francq, chef du service du financement de l'économie à la direction générale du Trésor et de la politique économique, a confirmé l'intérêt du gouvernement pour la finance islamique, compte tenu notamment du montant des capitaux concernés.
Il a précisé que le développement de la finance islamique en France devait respecter trois principes :
- premièrement, il devait s'agir d'un processus soutenu par une certaine appétence des professionnels concernés, qui sont, en outre, les plus à même d'identifier les obstacles au développement d'un tel marché sur notre territoire ;
- deuxièmement, ce développement doit respecter un principe de neutralité budgétaire. Ainsi, s'agissant de l'émission de « sukuk », il apparaît aujourd'hui qu'une telle opération aurait un coût supérieur à une émission d'obligations classiques ;
- troisièmement, les éventuelles adaptations du cadre juridique français doivent se conformer à un principe de neutralité réglementaire. Il a ainsi notamment mentionné la nécessité de sécuriser la fiducie afin de faciliter son utilisation, que ce soit dans le cadre de la finance islamique ou de manière plus générale.
Il a expliqué que le développement de la finance islamique était plus ou moins prometteur, et, plus ou moins aisé selon les champs envisagés. S'agissant des activités relevant de la banque de détail, il a estimé que l'offre de produits d'épargne conformes aux prescriptions de la loi coranique ne soulevait pas de difficultés particulières, comme en témoigne l'exemple de l'île de La Réunion évoqué lors de la première table ronde. En revanche, il convient d'être prudent sur l'ouverture de comptes de dépôt pour deux raisons : d'une part, il ne semble pas exister de demande particulière, d'autre part, la garantie des dépôts, imposée par les règles communautaires, peut se révéler contraire au principe de partage des pertes et des profits posé par la finance islamique.
Il a précisé que l'objectif principal actuel était plus le développement de la banque d'investissement et de financement que la banque de détail, et qu'à ce titre, toutes les adaptations pouvaient être envisagées sous réserve des principes rappelés ci-dessus.
M. Jean Arthuis, président, a précisé que si la finance islamique nécessitait une intervention du législateur, cette intervention devait, pour la partie fiscale, être faite à l'occasion d'une loi de finances, et pouvait, pour la partie juridique, être envisagée à l'occasion du projet de loi de modernisation de l'économie.
M. Bruno Gizard, secrétaire général de l'Autorité des marchés financiers, a indiqué que l'AMF avait agréé en décembre 2006 un organisme de placement collectif en valeurs mobilières (OCVM) répondant aux critères de la finance islamique. Cet agrément n'a nécessité aucune modification du règlement général de l'AMF ou du code monétaire et financier dans la mesure où, dans le cas des OPCVM, le recours à des critères extra-financiers de sélection n'est pas nouveau. Il a indiqué que les OPCVM peuvent, par ailleurs, recourir à un comité Charia sous réserve que cela ne contrevienne pas à l'autonomie de l'établissement, et « purifier une part impure de leurs dividendes » en faisant des donations au profit d'organismes reconnus d'utilité publique. Il a précisé que le fonds agréé, qui réalise de bonnes performances, a été coté en Suisse en raison d'une demande plus importante dans ce pays.
Rappelant l'absence d'obstacles juridiques à la création ou à la gestion en France d'OPCVM compatibles avec les principes de la finance islamique, il a estimé que le développement de ce marché restait tributaire d'un changement culturel.
Procédant à l'aide d'une vidéo-projection, Mme Anne-Sylvie Vasseneix-Paxton, avocate au cabinet Norton Rose LLP (Paris), a présenté le développement de la finance islamique au Royaume-Uni, dont les autorités souhaitaient faire la première place financière européenne en matière de finance islamique.
Elle a tout d'abord souligné que ce développement se faisait sur la base de deux principes : d'une part, le respect du droit positif anglais, comme cela avait été rappelé par les instances juridiques en 2004 ; d'autre part, la conformité de l'activité des banques islamiques à la réglementation applicable à l'ensemble des banques exerçant au Royaume-Uni, y compris aux exigences posées par la Financial Services Authority (FSA).
Elle a souligné que le soutien apporté par les autorités britanniques au développement de la finance islamique au Royaume-Uni s'était notamment traduit par une approche pragmatique, avec un faible recours à la voie législative, si ce n'est pour les modifications fiscales. Sur un plan juridique, elle a indiqué que la FSA avait cherché à définir des produits islamiques au regard de la réglementation applicable, à clarifier le rôle du conseil de la Charia, à organiser une publicité des produits islamiques, à élaborer un plan d'achat immobilier.
Elle a jugé que la démarche britannique était transposable en France compte tenu notamment des faibles ajustements du cadre législatif et fiscal à réaliser d'une part, et du soutien et du pragmatisme des autorités de contrôle françaises d'autre part.
Procédant à l'aide d'une vidéo-projection, Mme Laurence Toxé, avocate au cabinet Norton Rose LLP (Paris), a complété cette présentation en détaillant l'évolution de la législation fiscale britannique pour s'adapter aux produits islamiques. Elle a souligné que cette évolution avait fait émerger de nouveaux concepts, tels que les « produits financiers alternatifs », qui pourraient, le cas échéant, être utilisés en France.
Trois importantes réformes ont été présentées : le « Finance Act » de 2003, qui a notamment supprimé le double droit de timbre sur les transactions immobilières islamiques, le « Finance Act » de 2005, qui a consacré la notion de « prééminence de la réalité économique sur l'apparence » (« substance over form ») permettant d'assimiler à de l'intérêt certains profits, et le « Finance Act » de 2007, qui a défini un régime applicable aux « sukuk ». Selon Mme Laurence Toxé, ces trois réformes peuvent inspirer les futures modifications fiscales françaises.
M. Gilles Vaysset, secrétaire général du Comité des établissements de crédit et des entreprises d'investissement (CECEI), a rappelé que le CECEI était le portail d'entrée pour toutes les banques qui souhaitaient s'installer sur le territoire national. S'agissant du développement de la finance islamique en France, il a précisé que le CECEI ne pratique aucune discrimination sur le fondement de l'origine des capitaux. Il a indiqué que le comité ne délivre pas d'agrément de « banque islamique », mais un agrément de banque, dont le fonctionnement, ou les produits, peuvent, le cas échéant, relever de la finance islamique.
Si plusieurs projets d'implantation ont été portés à sa connaissance, aucun n'a été déposé ce jour formellement auprès du CECEI. De même, le comité n'a jamais encore été saisi par un établissement bancaire islamique exerçant au sein de l'Union européenne au titre de la procédure de reconnaissance mutuelle qui existe entre pays de l'Union.
Il a rappelé les cinq critères qui présidaient à l'attribution de l'agrément : la qualité des apporteurs de capitaux, l'honorabilité des dirigeants, l'acceptabilité de l'actionnariat, les règles prudentielles de l'établissement, les dispositifs de sécurité et de contrôle interne, le CECEI étant attentif à la question du blanchiment des capitaux et au respect du cadre juridique français. A ce titre le comité Charia qui valide les produits islamiques d'un établissement ne saurait interférer avec la gouvernance de la banque.
En conclusion, il a estimé que s'agissant des activités bancaires, le développement de la finance islamique ne nécessitait pas de modifications du cadre juridique. Toutefois, comme tel était souvent le cas lors de la mise en place de nouveaux produits, il serait sans doute indispensable d'adapter les règles prudentielles des établissements. Il a affirmé que le CECEI était prêt à soutenir l'innovation financière, pour autant que celle-ci se fasse dans des conditions sécurisées.
M. Jean Arthuis, président, a noté que l'on constatait, si le développement de la finance islamique au sein du système financier global suscitait des initiatives françaises à l'étranger, une certaine inertie sur le territoire national, ce qui était regrettable au regard de « l'activisme » de certains pays européens sur ce marché. Outre l'intérêt attaché à la captation de certaines liquidités, il a rappelé que l'offre de produits islamiques dans notre pays pouvait également présenter un enjeu en termes d'intégration de la communauté musulmane française. Il s'est félicité du faible rôle qu'avait à jouer a priori le législateur, les débats ayant démontré, d'une part que les ajustements étaient relativement peu nombreux, et d'autre part, qu'un certain nombre de progrès et de clarifications pouvaient être réalisés via des leviers non législatifs (instructions fiscales, adaptation des pratiques). Il a appelé de ses voeux une plus grande réactivité de la part des professionnels concernés, afin que le développement de la finance islamique en France ne soit pas qu'un simple voeu.
Retraite - Fonds de réserve pour les retraites - Audition de MM. Raoul Briet, président du conseil de surveillance, et Antoine de Salins, membre du directoire du Fonds de réserve pour les retraites
Au cours d'une seconde séance tenue dans l'après-midi, la commission a procédé à l'audition de MM. Raoul Briet, président du conseil de surveillance, et Antoine de Salins, membre du directoire du Fonds de réserve pour les retraites, sur la situation du Fonds.
M. Jean Arthuis, président, a indiqué que cette audition, ouverte aux membres de la commission des affaires sociales, permettrait d'examiner le rôle du Fonds de réserve pour les retraites (FRR) dans le financement à venir des régimes de retraites et de vérifier ses performances dans la gestion des 25,8 milliards d'euros qui lui ont été confiés depuis l'origine, face à une volatilité accrue des marchés financiers.
Selon le rapport annuel 2007, ces 25,8 milliards d'euros auraient connu, sur les trois premières années d'investissement, une performance annualisée de 8,8 %, portant à 34,5 milliards d'euros sa capitalisation au 31 décembre 2007. Il a relevé qu'en 2007, la performance avait été notoirement inférieure à cette moyenne et, surtout, que certaines notes de la direction financière évoquaient l'hypothèse d'une performance nulle, voire négative, en 2008. Il a également souhaité obtenir des précisions sur les raisons ayant conduit le FRR à résilier, le 7 mai 2008, deux mandats de gestion.
M. Jean Arthuis, président, a remarqué qu'il avait été décidé, à partir du mois d'octobre 2007, d'augmenter la position du FRR en actions (64,5 % du portefeuille, contre 60 % prévus par la stratégie d'allocation d'actifs). Il a souhaité savoir comment cette décision avait été prise et si le FRR la regrettait aujourd'hui. Par ailleurs, il s'est interrogé sur la politique « d'investissement responsable » menée par le Fonds et a souhaité en connaître l'impact sur la performance des placements effectués. Il s'est également demandé si le FRR ne se comportait pas en partie comme un fonds souverain « à la française » et a souhaité connaître la proportion des investissements effectués dans des entreprises françaises à fin 2007.
Il a enfin souhaité que des précisions soient apportées s'agissant de son rôle dans le financement des retraites après 2020 et des modalités d'utilisation de ses fonds à compter cette date. Le FRR devant permettre de financer environ un tiers des besoins supplémentaires entre 2020 et 2040, il s'est demandé s'il y avait une logique à ce que les Français payent chaque année une contribution à la Caisse d'amortissement de la dette sociale (CADES) pour le désendettement de la sécurité sociale et, en parallèle, une autre contribution afin d'épargner des fonds dans la perspective de l'après 2020.
Procédant à l'aide d'une vidéo-projection, M. Raoul Briet, président du conseil de surveillance du Fonds de réserve pour les retraites, après avoir rappelé le contexte de création du FRR et son organisation, a relevé l'irrégularité des abondements annuels dont il avait bénéficié. Depuis 2006, le Fonds ne bénéficie plus d'excédents de la Caisse nationale d'assurance vieillesse (CNAVTS), ni de recettes provenant de privatisations et n'a été alimenté que par les ressources qui lui sont affectées par la loi, en l'occurrence une fraction du prélèvement social de 2 %. Il a précisé que la croissance des actifs au cours des exercices 2006 et 2007 s'expliquait ainsi plus par les résultats de placements obtenus par le Fonds que par les abondements dont il a fait l'objet.
M. Raoul Briet a observé que l'allocation stratégique du FRR avait été revue en mai 2006. Elle se décomposait aujourd'hui ainsi : 60 % en actions (contre 55 % précédemment), 30 % en obligations (contre 45 % précédemment) et 10 % en actifs de diversification. Il a précisé qu'avec cette allocation, la probabilité de dégager une performance au moins équivalente à 4,4 % en nominal, correspondant au coût des ressources publiques affectées au FRR et donc non utilisées pour désendetter l'Etat, s'établissait à près de 80 %.
Sur longue période, on observe un écart de rendement significatif entre les actions et les obligations, de l'ordre de 300 à 400 points de base, accompagné d'une volatilité supérieure des actions, volatilité que, seul, un investisseur de long terme peut assumer. Il a également relevé que les fonds de réserve mis en place par d'autres Etats avaient développé des stratégies d'investissement comparables.
Il a indiqué que la performance nette annualisée du FRR s'établissait à + 8,8 % depuis le démarrage de ses investissements en juin 2004, et à + 4,8 % en 2007, soit une performance annuelle moyenne comparable à celle d'autres investisseurs institutionnels européens.
M. Raoul Briet a ensuite relevé que les coûts de fonctionnement du FRR avaient été maîtrisés, puisqu'ils s'établissaient en 2007 à 17 points de base, pour un étalon de référence international évalué à 19 points de base. Il a précisé que les coûts de fonctionnement provenaient pour les deux tiers des frais de gestion payés aux gestionnaires d'actifs et, pour le tiers restant, des frais généraux liés à la structure de fonctionnement du fonds.
Puis il a évoqué les effets, sur l'évolution des actifs du fonds, des « turbulences financières » observées en 2007 et au début 2008. Il a noté que la performance du FRR depuis le début de l'année 2008 était négative à hauteur de 4,4 %, ramenant la performance annuelle moyenne depuis juin 2004 à + 6,8 %, mais que le point bas de l'exercice avait été rencontré le 21 mars 2008, date à laquelle la performance depuis le début de l'exercice était négative à hauteur de 9,6 %.
M. Raoul Briet a fait valoir qu'en dépit de ce choc financier, la performance annuelle moyenne de + 6,8 % était en phase avec la trajectoire de long terme d'évolution des actifs retenue par le FRR. Il a également indiqué que, de juin 2004 au 2 mai 2008, celui-ci avait généré des résultats financiers positifs à hauteur de 6,3 milliards d'euros, soit 3,4 milliards d'euros de plus que ce qu'auraient rapporté des placements obligataires. La probabilité que l'allocation stratégique permette de susciter un rendement moyen sur longue période supérieur à 4,4 % était ainsi estimée à 74 %, fin mars 2008.
Puis il a évoqué les perspectives du FRR : il entend poursuivre la mise en oeuvre de la diversification des actifs, procéder à un renouvellement des mandats confiés en 2003/2004 et réviser son allocation stratégique. Le FRR affinerait sa stratégie d'investissement responsable, en approfondissement les actions menées depuis 2003. Il devrait ainsi analyser les possibles impacts du réchauffement climatique sur sa politique d'investissement, dans le cadre du réexamen de l'allocation stratégique ; développer la - comme il l'a fait en se désinvestissant d'entreprises ne respectant pas la convention d'Ottawa sur l'interdiction de l'emploi, du stockage, de la production et du transfert des mines antipersonnel et sur leur destruction - et se doter d'un comité pour l'investissement responsable.
M. Raoul Briet a enfin apporté des précisions sur le rôle du FRR dans le financement des régimes de retraite. Il a noté que, sous des hypothèses de performance annuelle moyenne de 6,3 %, et avec un abondement annuel d'1,5 milliard d'euros entre 2007 et 2020, les actifs du FRR atteindraient environ 100 milliards d'euros à cette date, ce qui lui permettrait de couvrir près d'un tiers des besoins supplémentaires de financement des régimes éligibles au Fonds sur la période courant de 2020 à 2040. Dans ce schéma, le Fonds génèrerait 46 milliards d'euros de résultat financier positif cumulé à l'horizon 2020, soit 19 milliards d'euros de plus que le coût des ressources publiques affectées au FRR et non utilisées pour désendetter l'Etat.
Il a observé que les réserves ainsi accumulées par le FRR ne dispenseraient pas de mener certaines réformes afin d'assurer un financement pérenne des régimes de retraite. Il a également estimé qu'il convenait de préciser le rôle qu'on entendait assigner au FRR dans le financement à long terme du système de retraites par répartition, et ce, dans une perspective de bonne gestion financière sur le long terme, l'allocation stratégique pouvant être différente selon les missions attribuées au Fonds.
M. Antoine de Salins, membre du directoire du Fonds de réserve pour les retraites, a tout d'abord rappelé que les comptes du FRR, établis en valeur de marché, faisaient l'objet d'une certification par des commissaires aux comptes.
S'agissant de la mise en oeuvre de l'allocation stratégique, il a remarqué que l'on observerait, même en l'absence d'action du directoire, une déformation de la structure de l'allocation des actifs en fonction de l'évolution des marchés, ce qui nécessite la mise en place d'une allocation tactique à plus court terme. Il a précisé que le directoire pouvait faire varier la part des actions, à court terme, dans une fourchette comprise entre 51 % et 69 % de l'actif total du fonds.
Il a indiqué que le directoire avait neutralisé la position en actions à partir de mars 2007, puis s'était à nouveau exposé à compter de l'automne 2007. La position avait été gagnante dans un premier temps, jusqu'à la fin décembre 2007, puis la baisse des marchés avait conduit le Fonds à neutraliser progressivement sa position en actions. M. Antoine de Salins a noté que le FRR était aujourd'hui sous-exposé en actions et a estimé qu'au-delà de ces variations de court terme, seules les évolutions de long terme importaient.
Puis il a apporté quelques précisions sur la diversité géographique des actifs du Fonds, en indiquant que les trois quarts des placements du FRR étaient effectués en Europe, essentiellement au sein de la zone euro, dont 20 % en France.
Il a relevé que le FRR n'était pas contraint de privilégier les placements en France, même si ces derniers étaient quatre fois supérieurs au poids de la France au sein de la capitalisation boursière mondiale. Il a jugé important que le FRR effectue des placements au sein de différentes zones géographiques afin de maximiser ses résultats.
M. Antoine de Salins a ensuite indiqué que la résiliation, le 7 mai 2008, de deux mandats de gestion s'expliquait par l'insuffisance des performances financières constatées par rapport aux objectifs fixés et aux indices de référence.
M. Jean Arthuis, président, a relevé le caractère vertueux du FRR, mais a souligné le paradoxe qui consistait à l'abonder, alors que l'Etat et les organismes de sécurité sociale connaissaient des déficits.
M. Raoul Briet a rappelé que le FRR avait été mis en place à un moment où la CNAVTS était excédentaire et que les dotations accordées au FRR étaient neutres du point de vue du solde des administrations publiques. En revanche, il a indiqué qu'elles conduisaient à accroître le montant de la dette publique brute, concept sur lequel il a formulé certaines réserves. Il a notamment estimé que la situation des régimes de retraite par répartition conduisait à la formation d'une dette implicite et que l'on pouvait considérer, de ce point de vue, le FRR comme un instrument de désendettement à long terme. Il a également fait valoir que les régimes AGIRC et ARRCO constituaient, eux-mêmes, des réserves pour faire face aux besoins de long terme.
M. Jean Arthuis, président, a jugé qu'il eût été préférable d'être en excédent pour provisionner ces dépenses futures.
M. Raoul Briet a indiqué que les abondements du fonds, à hauteur d'1,5 milliard d'euros environ ces dernières années, ne suffiraient pas à faire face aux difficultés rencontrées par les organismes de sécurité sociale. Il a estimé, en outre, qu'il serait inopportun de les transférer à la CADES, dans la mesure où ceci pourrait conduire à un relâchement de l'effort de redressement des comptes sociaux.
M. Jean Arthuis, président, a rappelé les raisons ayant présidé à la création de la CADES et a noté que celle-ci n'avait pas empêché les comptes sociaux de se dégrader. Il a ensuite souhaité savoir si le FRR avait souscrit des bons du Trésor, mais également des obligations islamiques (sukuk), à propos desquelles la commission avait obtenu des précisions lors d'une table ronde sur la finance islamique.
M. Antoine de Salins a indiqué qu'environ 4 % des actifs du FRR étaient investis en bons du Trésor et que ceci correspondait à un choix des gestionnaires de mandats. En revanche, il a précisé que le FRR n'avait pas d'actifs investis en sukuk.
M. Charles Guené s'est étonné que le FRR ne dispose pas d'une orientation claire concernant l'utilisation de ses réserves à partir de 2020 et a souhaité obtenir des précisions sur ce point.
M. Raoul Briet a jugé nécessaire que le FRR dispose d'une « feuille de route » officielle, mais a indiqué que cette absence pouvait s'expliquer par l'horizon actuellement retenu pour les cadrages macroéconomiques, qui s'arrêtent avant 2020, date à partir de laquelle le FRR pourra utiliser ses actifs afin de lisser les besoins de financement des régimes de retraite.
Il a précisé que ces actifs pourraient atteindre environ 100 milliards d'euros à cette date, ce qui lui permettrait de couvrir près d'un tiers des besoins supplémentaires de financement des régimes éligibles au Fonds sur la période courant de 2020 à 2040.
M. Denis Badré a souhaité savoir s'il était possible de faire croître davantage les ressources du FRR.
M. Raoul Briet a indiqué qu'il pourrait être envisagé de lui affecter, le cas échéant, le produit de cessions d'actifs.
M. Charles Guené a noté que le FRR constituait un outil intéressant, mais que son bénéfice était limité à certains régimes éligibles.
M. Raoul Briet a indiqué que le champ d'action du FRR était effectivement circonscrit.
M. Jean Arthuis, président, a souhaité obtenir des précisions sur la certification des comptes du FRR. Il s'est également demandé si ce dernier envisageait d'investir davantage dans les PME françaises, afin d'alimenter la croissance de l'économie nationale.
MM. Raoul Briet et Antoine de Salins ont indiqué que les comptes du FRR avaient fait l'objet d'une certification sans réserve et ont précisé que la Cour des comptes pouvait également les contrôler. M. Antoine de Salins a également relevé que les coûts de fonctionnement du FRR étaient maîtrisés.
Il a estimé que la question de l'investissement dans les PME françaises était complexe : investir dans les PME pouvait entraîner, sur le long terme, une augmentation de la croissance potentielle de l'économie, mais plus la stratégie d'investissement était contrainte par des biais, plus la performance pouvait être réduite. En outre, il a jugé essentiel que le FRR se positionne sur des marchés émergents, qui seront les principaux vecteurs de la croissance mondiale à l'avenir.
Il a rappelé que près de 20 % des actifs du FRR étaient investis en France et que 20 à 30 % des actions détenues par le fonds correspondent à des PME françaises cotées. Il a indiqué qu'il en allait de même pour les actifs investis en capital-investissement.
M. Raoul Briet a observé que, même s'il s'agissait d'une fonction implicite, le FRR permettait également à la population de constituer une épargne retraite en bénéficiant de coûts d'intermédiation et de gestion très inférieurs à ceux auxquels elle pourrait prétendre à titre individuel.
Jeudi 15 mai 2008
- Présidence de M. Jean Arthuis, président. -Finance internationale - Fonds souverains - Table ronde sur la stratégie d'investissement des fonds souverains : rentabilité à long terme ou contrôle sectoriel ?
La commission a organisé une première table ronde sur la stratégie d'investissement des fonds souverains : rentabilité à long terme ou contrôle sectoriel ?, avec M. Jean-Paul Betbèze, directeur des études économiques du Crédit agricole, M. François Bujon de l'Estang, président de Citigroup France, M. Michael Doran, avocat associé au cabinet Gide Loyrette Nouel (Londres), M. Yves Jégourel, maître de conférences à l'université Montesquieu (Bordeaux IV), et Mme Laura Restelli-Brizard, avocate associée au cabinet Squadra.
M. Jean Arthuis, président, a rappelé que si les fonds souverains étaient anciens, la crise récente des « subprimes » avait attiré l'attention sur ces nouveaux intervenants du système financier international, qui sont apparus comme « les sauveurs du capitalisme » en raison de leur participation à la recapitalisation des banques en crise.
A cet égard, il a souligné que l'essor des fonds souverains constituait en grande partie le « miroir des ajustements » que les pays industriels n'avaient pas su accomplir, puisqu'ils avaient fortement investi en titres de dettes des Etats membres de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE).
Après avoir rappelé que leurs actifs pouvaient être estimés à 12.000 milliards de dollars en 2015, M. Jean Arthuis, président, a souligné la spécificité des fonds souverains qui présentaient le caractère de fonds d'Etat, tout en investissant dans des secteurs considérés comme stratégiques, ce qui avait suscité des interrogations de la part des autorités politiques. Dans ce contexte, il a observé que l'opacité de certains de ces fonds avait suscité des demandes de transparence et conduit au lancement d'initiatives distinctes par la Commission européenne, le Fonds monétaire international, l'OCDE et les Etats-Unis.
Il a ainsi appelé à concilier la liberté du commerce et la préservation des intérêts stratégiques, en vue d'une certaine normalisation des fonds souverains.
Procédant à l'aide d'une vidéo-projection, M. Jean-Paul Betbèze, directeur des études économiques du Crédit agricole, a souligné l'accélération historique du rôle des fonds souverains, dont les réserves actuelles, estimées à 3.300 milliards de dollars, pouvaient donner lieu à diverses interprétations : si celles-ci ne représentaient que le dixième de l'encours des fonds de pension ou des fonds mutuels, et le sixième de l'encours des fonds d'assurance mondiaux, leur croissance rapide ne rend pas compte de leur place croissante dans le système financier mondial, alimentée par une double rente - gazière et pétrolière, d'une part, de change (réserves monétaires), d'autre part.
Il a remarqué que ces fonds étaient essentiellement présents dans les pays asiatiques et du Golfe persique, à l'exception notable du Fonds de pension du gouvernement norvégien. Il a observé que la rente monétaire dont bénéficiaient les fonds souverains des pays émergents ou en développement s'expliquait par un écart de salaire pouvant être de l'ordre d'un à vingt entre la Chine et les pays industrialisés d'Europe occidentale, lequel était encore renforcé par la sous-évaluation du yuan chinois.
Dans ce contexte, les investissements croissants des fonds souverains posent la question du caractère spécifique ou non de ces acteurs financiers. Ils constituent des intervenants de longue période, présents non seulement sur les marchés obligataires publics et dans des grandes entreprises cotées, mais également dans d'importantes petites et moyennes entreprises des pays occidentaux. Il a ajouté que l'investissement d'un fonds souverain était, par ailleurs, la preuve de la solidité financière de l'entreprise dans laquelle ils acquéraient des participations.
M. Jean-Paul Betbèze a mis en garde contre le double écueil d'une vision excessivement pessimiste et d'une analyse des fonds souverains par simple référence à d'autres acteurs mieux connus, tels que les fonds de pensions, ce qui tendrait alors à sous-évaluer leurs spécificités. Il a appelé à l'élaboration d'une réponse organisée des pouvoirs publics au niveau européen, suivant l'exemple de la réflexion en cours aux Etats-Unis, ce qui exigeait une meilleure connaissance en termes d'intelligence économique, qui prenne en compte la rationalité des interventions des fonds souverains en tant qu'acteurs.
M. Jean Arthuis, président, a relevé que, selon M. Jean-Paul Betbèze « les fonds souverains vont croître et embellir ». Cela ne reflète-t-il pas un fatalisme face aux déséquilibres budgétaires et commerciaux persistants des pays industrialisés ?
M. Jean-Paul Betbèze a montré que cet essor témoignait également de l'efficacité des fonds souverains, qui se positionnaient non seulement sur des titres de dette publique particulièrement sûrs, mais également sur les marchés d'actions.
M. Aymeri de Montesquiou a souligné l'écart dans l'évaluation de l'encours dont dispose le fonds souverain des Emirats Arabes Unis, l'Abu Dhabi Investment Authority (ADIA), estimé entre 250 et 875 milliards de dollars, et le poids du Fonds de réserve national pour les retraites irlandais, dont le montant atteint 28 milliards de dollars dans un pays beaucoup moins peuplé que la France et qui a rattrapé, puis dépassé, le niveau de vie de la France en l'espace de seulement vingt ans.
Pour M. Jean-Paul Betbèze, le Fonds de pensions irlandais présente cette caractéristique d'être entièrement public et de recueillir l'ensemble des investissements du pays pour le paiement des pensions futures, ce qui explique son poids financier.
Procédant à l'aide d'une vidéo-projection, M. François Bujon de l'Estang, président de Citigroup France, a souligné le rôle croissant des fonds souverains comme véhicules d'investissement, devenus un des principaux modes d'investissement alternatif dans le monde.
D'ores et déjà, leur encours dépasse celui des « hedge funds » et des fonds de capital-investissement, mais les encours les plus importants restent nettement inférieurs à ceux des gérants de capitaux comme Barclays Global Investors, State Street Global Advisors ou Fidelity Investment.
Il a ensuite cité l'exemple de plusieurs prises de participations de fonds d'investissement au capital de grandes sociétés, à l'instar du Government Investment Corporation (GIC) de Singapour dans la banque UBS, ou de China Investment Corporation (CIC) dans le groupe de capital-investissement Blackstone. En ce sens, il a relevé que les investissements dans le secteur financier réalisés par les fonds souverains, minoritaires en 2006 (3,8 % de leurs investissements totaux), étaient devenus prépondérants en 2007 (63,8 % des investissements totaux).
Cet essor est effectivement lié, d'une part, au déséquilibre croissant de changes des Etats-Unis et des Etats membres de l'Union européenne, dont les déficits commerciaux cumulés sont équivalents à ceux des Etats en situation d'excédent commercial (principalement, le Moyen-Orient et l'Asie) et, d'autre part, à une accélération de l'augmentation des réserves de change, en hausse de 140 % au cours des cinq dernières années. Par ailleurs, il a souligné que le prix du baril de pétrole constituait naturellement un facteur décisif de l'augmentation du montant de pétro-dollars disponible.
M. Jean Arthuis, président, a rappelé que lors du déplacement de la commission dans les pays du Golfe Persique en mars 2007, il avait été retenu une hypothèse d'augmentation du prix du baril de pétrole nettement inférieure à la réalité constatée depuis. Par conséquent, les fonds souverains de ces Etats sont appelés à se développer plus rapidement que prévu.
Revenant sur l'historique des fonds souverains, M. François Bujon de l'Estang a souligné la création ancienne de plusieurs d'entre eux, comme la Kuweit Investment Authority en 1953 ou Temasek à Singapour en 1974.
Il a ensuite établi une classification des fonds souverains en cinq catégories, selon leur gestionnaire :
- des fonds relevant des banques centrales ;
- des fonds souverains ayant pour but la stabilisation du cours des matières premières, comme le fonds de stabilisation russe, financé par les exportations d'hydrocarbures ;
- les fonds souverains ayant principalement un rôle de préservation des ressources en matières premières afin de réaliser des investissements dans l'économie nationale, tel que l'Abou Dhabi Investment Authority des Emirats Arabes Unis ou le fonds de pension du gouvernement norvégien ;
- des fonds gouvernementaux jouant principalement un rôle d'investisseur, comme la Mubadala Development Company des Emirats Arabes Unis ;
- enfin, d'autres groupes ou entreprises combinant une propriété publique et un rôle d'investisseur, et qui peuvent donc être ainsi assimilés à des fonds souverains, à l'image de Gazprom.
S'agissant de l'activité des fonds souverains, M. François Bujon de l'Estang a souligné que la plupart d'entre eux procédaient désormais à des investissements plus risqués, et que leurs activités tendaient à se diversifier, à l'instar de la Qatar Investment Authority, qui recourait également à des opérations à effet de levier, c'est-à-dire incluant de la dette et offrant des possibilités de retour élevé sur investissement.
Puis il a montré que les choix de localisation géographique des interventions des fonds souverains auraient un effet différencié sur la croissance des pays les plus anciennement industrialisés, l'impact sur le taux de croissance mondiale étant proportionnellement plus élevé en cas d'investissement dans des pays émergents tels que la Chine ou l'Inde.
Il a dressé un bilan des bénéfices potentiels et des menaces supposées que comportait le développement des fonds souverains. D'une part, il a souligné qu'il s'agissait d'investisseurs de long terme ayant un faible endettement et qui permettaient non seulement de bénéficier de l'apport de capitaux étrangers, mais encore d'accroître les possibilités d'entrée sur des marchés émergents, sous réserve de réciprocité. D'autre part, il a relevé que des règles de transparence et de gouvernance devaient être adaptées aux fonds souverains, présents dans des secteurs stratégiques, et qu'ils représentaient une forme de renationalisation par l'entrée au capital d'entreprises privées d'investisseurs publics ou contrôlés par les pouvoirs publics.
Il a ainsi mis en garde contre tout réflexe défensif vis-à-vis des fonds souverains, évoquant les réticences des pouvoirs publics, notamment vis-à-vis des fonds souverains des pays d'Extrême-Orient, alors qu'ils offraient des opportunités de placement stable et à long terme.
M. Jean Arthuis, président, a observé que « nécessité fait loi » lorsque les fonds souverains financent une part croissante de la dette publique, et que la meilleure réponse consiste donc en une réduction des déficits publics.
Procédant à l'aide d'une vidéo-projection, M. Michael Doran, avocat associé au cabinet Gide Loyrette Nouel, a ensuite présenté le développement des fonds souverains comme vecteur de diversification de l'accès au crédit.
Après avoir rappelé qu'il existait aujourd'hui une quarantaine de fonds souverains dans le monde et que d'autres pouvaient être appelés à se créer au Japon, en Inde, au Brésil, en Arabie Saoudite et en Islande, il a détaillé les qualités que présentaient les fonds souverains :
- actionnaires sur le long terme, ils prennent des participations minoritaires, inférieures à 10 % du capital total des sociétés-cible ;
- actionnaires peu agressifs par comparaison aux fonds spéculatifs, ils restent peu représentés dans les organes d'administration et occasionnent peu de litiges avec les actionnaires ou les organes d'administration des sociétés.
M. Michael Doran a souligné les spécificités des fonds souverains en qualité d'investisseurs en titres de dette, susceptibles également de recourir à l'effet de levier. Il a évoqué la possibilité que les fonds souverains se positionnent comme intervenants directs sur le marché du crédit, en concurrence des banques, y compris au sein de l'Union européenne. A cet égard, il a appelé à ne pas sous-estimer la capacité des fonds souverains à s'adapter aux circonstances et à prendre place sur ce nouveau secteur d'activité malgré leur absence d'expérience, en rappelant que les banques, dont c'est le métier de base, n'ont pas su faire face, pour leur part, à la crise des « subprimes ».
Puis il a mentionné les discussions entre certains fonds souverains, comme la Mubadala Development Company des Emirats Arabes Unis, avec des agences de notation pour devenir des intervenants à part entière sur l'ensemble des segments des marchés financiers. Il a estimé cette évolution d'autant plus remarquable qu'il s'agissait encore d'investisseurs hybrides, capables de combiner les qualités des fonds d'investissement et des fonds spéculatifs et dont il fallait envisager, à l'avenir, une coopération accrue dans une perspective de maximisation du profit recherché. Il a donc appelé à considérer les fonds souverains moins comme une menace stratégique que comme des conglomérats financiers.
M. Jean Arthuis, président, a relevé le rôle que pourraient ainsi jouer les fonds souverains dans l'accès au crédit.
Outre les effets macroéconomiques des fonds souverains, M. Yves Jégourel, maître de conférences à l'université Montesquieu, procédant à l'aide d'une vidéo-projection, a axé son intervention sur trois thèmes : la stabilisation ou non du prix des actifs financiers ; les motivations stratégiques, politiques, ou au contraire financières, des fonds souverains et les possibles réflexes protectionnistes unilatéraux qu'elles peuvent engendrer ; enfin, les réponses économiques et politiques pouvant être apportées à l'émergence d'une nouvelle forme de capitalisme d'Etat.
Tout d'abord, il a souligné, mais relativisé, le risque potentiel de déstabilisation du prix de l'or, des matières premières ou de l'immobilier. Il a mis l'accent sur un risque d'amplification de la volatilité du prix de certaines classes d'actifs du fait du manque de transparence des fonds souverains, de leur fonctionnement institutionnel et de leur stratégie d'investissement. Enfin, il a jugé que le risque de déstabilisation des régimes de changes, bien qu'improbable, n'était pas totalement à exclure.
Il a ajouté que les fonds souverains étaient susceptibles de jouer un rôle positif dans le financement des entreprises et la stabilité financière. Leur vocation d'optimisation du couple rendement/risque les conduit, en effet, à accroître leur exposition aux actions et au capital-investissement, mais ils tendent à se repositionner sur les marchés émergents, au détriment des Etats-Unis et de l'Europe. Leurs stratégies d'investissement en ont également des investisseurs de moyen et long termes, voire de très long terme, avec une faible rotation des actifs et une exigence de rentabilité raisonnable, a priori facteurs de stabilisation des marchés. Ces fonds ont aussi joué un rôle de « financeur » en dernier ressort auprès d'un secteur bancaire gravement affecté par la crise des subprimes. Les fonds souverains peuvent enfin contribuer au financement du développement en Afrique.
Concernant le risque géopolitique résultant d'éventuelles prises de participation dans des entreprises à haute valeur technologique et à fort potentiel de croissance, M. Yves Jégourel a estimé qu'il pouvait alimenter des réflexes protectionnistes unilatéraux et dommageables, et que ce risque tenait, plus largement, à la possible inclusion de critères d'investissement extra-financiers, notamment éthiques ou religieux, dans les choix d'investissement des fonds. Ce risque géopolitique n'est cependant pas propre aux fonds souverains et se retrouve dans le rôle ambigu joué par les fonds d'investissement privés sous influence gouvernementale, ainsi que l'illustre l' « encerclement » de certains segments de l'industrie européenne d'armement terrestre par des fonds américains.
Les réponses à ce risque géopolitique sont, selon lui, de plusieurs ordres :
- tenter « l'audacieux pari » du code de bonne conduite afin d'améliorer la transparence, la prévisibilité et l'obligation de rendre des comptes des fonds souverains. Cet équilibre coopératif demeure cependant difficile à trouver et donc hypothétique ;
- favoriser l'émergence d'une définition européenne des secteurs stratégiques protégés, au regard du critère de souveraineté nationale, et imposer le principe de réciprocité ;
- renforcer le rôle des fonds de capital-risque soutenant les PME stratégiques, et trouver les conditions d'une mobilisation accrue de l'épargne nationale en faveur du financement des entreprises ;
- enfin, construire une vision géostratégique de long terme, associant pouvoirs publics, « think tanks » et secteur privé afin d'appréhender les opportunités et menaces éventuelles liées à ce nouveau « capitalisme d'Etat ».
Procédant à l'aide d'une vidéo-projection, Mme Laura Restelli-Brizard, avocate associée au cabinet Squadra, a entendu répondre à la question : faut-il craindre les fonds souverains, et si oui, lesquels ? Elle a fait référence à plusieurs typologies, dont celle élaborée par le FMI, et a identifié cinq éléments caractéristiques d'un fonds souverain : la souveraineté étatique, des excédents monétaires en devises étrangères ou revenus de matières premières, l'absence de recours à l'endettement, la haute tolérance aux investissements les plus risqués et une volonté d'investir à long terme.
Elle a ensuite proposé sa propre typologie en fonction de leur caractère « agressif » ou passif sur les marchés d'actions et de leur plus ou moins grande transparence :
- parmi les fonds « actifs », les fonds des pays du Golfe persique entendent préparer l'ère de l'après-pétrole. Ils s'appuient pour cela sur une stratégie d'investissement ouvertement axée sur le long terme, ne sont guère intéressés par une participation au conseil d'administration des sociétés détenues, et recourent largement aux gestionnaires et consultants extérieurs. Les craintes sur ces fonds sont, selon elle, généralement infondées ;
- les fonds du Sud-Est asiatique (Singapour, Malaisie et Corée du Sud) sont bien acclimatés aux marchés financiers et disposent d'un portefeuille d'actifs plus ou moins internationalisé. Certains d'entre eux ont adhéré à un code de bonne conduite élaboré avec les Etats-Unis, et les risques liés à ce type de fonds ne sont autres que ceux traditionnellement attachés à tout acteur important des marchés financiers ;
- les fonds à stratégie industrielle sont essentiellement représentés par les trois entités chinoises, qui cherchent à pérenniser des ressources énergétiques hors de Chine et à faciliter des transferts de technologie, et ciblent des secteurs tels que les télécommunications, les médias et les matières premières. Mme Laura Restelli Brizard a considéré qu'ils portaient un risque industriel non négligeable, en particulier du fait de la faible réciprocité de l'ouverture commerciale. Elle a également évoqué la probable création d'un fonds souverain indien, qui pourrait présenter des caractéristiques proches de ceux de la Chine, en raison d'un biais protectionniste analogue ;
- les deux fonds souverains de la Russie contribuent également à accroître les ressources énergétiques hors des frontières russes, mais dans le cadre d'une stratégie politique, en tant que moyen de pression sur les Etats voisins. Les éventuelles craintes sur les investissements de ces fonds devraient faire l'objet d'un débat politique, mais peuvent être alimentées par une certaine opacité, notamment sur l'oligarchie des compagnies russes de production et de distribution énergétiques ;
- les fonds du gouvernement norvégien, respectivement dotés de 322 milliards de dollars et 2,6 milliards de dollars, illustrent une stratégie relativement passive et sécurisée, intermédiaire entre celle d'un fonds de pension et celle d'un fonds de capital-investissement. Elle a rappelé que la transparence de leurs objectifs d'investissement et allocations d'actifs était réelle, que leurs comptes étaient audités et qu'ils adhéraient à une charte éthique. Le portefeuille du fonds de pension du gouvernement norvégien est exposé à 60 % aux actions, soit environ 3.000 participations, qui ne dépassent pas, individuellement, 3 % du capital des sociétés détenues ;
- enfin, la stratégie des autres fonds, parmi lesquels ceux du Brésil et du Nigeria, est encore assez floue et méconnue, et repose sur une plus grande proportion de titres non cotés.
M. Jean Arthuis, président, a rappelé que les fonds souverains, thème majeur appelé à être de nouveau débattu, marquaient le retour d'une forme de capitalisme d'Etat et que leur dynamique était alimentée par les nombreux déséquilibres des pays occidentaux. Plutôt que de craindre résolument la croissance de fonds souverains dont nos économies sont également responsables, il importe d'apprendre à « vivre avec » en gardant à l'esprit que l'acquisition de PME exportatrices par ces fonds peut constituer le prélude à de nouvelles délocalisations. Il a également considéré que la situation actuelle impose aux pays occidentaux, et particulièrement à la France, de constituer leurs propres fonds, ce qui suppose de poursuivre la réduction des déficits publics.
Finance internationale - Fonds souverains - Table ronde sur l'acceptabilité et la redevabilité des fonds souverains aux Etats-Unis, en Europe et en France
Puis la commission a organisé une seconde table ronde sur l'acceptabilité et la redevabilité des fonds souverains, avec M. Pierre-Ignace Bernard, directeur associé de McKinsey & Co, M. Gilles Dard, président de Merrill Lynch (France), M. Pierre Delsaux, directeur libre-circulation des capitaux, droits des sociétés et gouvernement d'entreprise à la Commission européenne, M. Igor Noskov, conseiller financier à l'ambassade de la Fédération de Russie en France, et M. Olivier Prost, avocat associé au cabinet Gide Loyrette Nouel (Bruxelles).
M. Jean Arthuis, président, a indiqué que cette seconde table ronde était consacrée aux moyens de rendre les fonds souverains plus acceptables et plus responsables.
Après avoir évalué les actifs sous gestion des fonds souverains entre 3.600 et 4.200 milliards de dollars actuellement et, d'ici à 2015, à 12.000 milliards de dollars, M. Pierre-Ignace Bernard, directeur associé de McKinsey & Co, procédant à l'aide d'une vidéo-projection, a entendu relativiser l'importance de ces réserves à l'échelle des classes d'actifs financiers internationales. La capitalisation boursière des marchés mondiaux d'actions représente ainsi 50.300 milliards de dollars, la gestion collective 48.100 milliards de dollars, et les émissions obligataires du secteur privé 42.800 milliards de dollars. De même, les transactions des fonds souverains constituent une partie infime des volumes annuels de négociation sur les marchés financiers mondiaux : 0,06 % du volume global de négociation et 0,43 % des transactions sur les marchés d'actions.
Une estimation de la répartition des encours des fonds souverains, par classe d'actifs et par zone géographique, révèle également que les prises de participation potentiellement « actives » au capital de sociétés étrangères demeurent nettement inférieures, avec 200 milliards de dollars, aux participations de nature équivalente dans des sociétés domestiques (1.936 milliards de dollars). Tant qu'un écart significatif de performance n'était pas anticipé, on ne peut sans doute guère s'attendre à un basculement important des investissements à caractère passif vers des investissements actifs, et des marchés domestiques vers ceux étrangers. Il a ajouté qu'avec 24 %, les participations des fonds souverains représentaient une fraction minoritaire du montant global des opérations de fusions-acquisitions des pays émergents vers les pays industrialisés (environ 174 milliards de dollars), mais proportionnellement plus élevée si l'on se rapportait aux 15 principales opérations.
La réalisation d'investissements pour un montant élevé et une part significative du capital pouvait, en revanche, exercer un effet éventuellement perturbant. M. Pierre-Ignace Bernard a dès lors évoqué trois pistes de solutions « minimalistes » pour améliorer l'acceptabilité des fonds souverains :
- l'articulation des modes de gouvernance des fonds : principes de la relation des fonds souverains avec le gouvernement, composition du conseil d'administration, approche des décisions d'investissement et de la gestion des risques, règles de gouvernance interne assurant l'intégrité des décisions prises ;
- la formalisation des procédures opérationnelles des fonds, c'est-à-dire de leur politique d'investissement, qui doit définir l'objectif des positions financières les plus significatives, et de leur mode d'implication éventuellement envisagé dans la gestion des sociétés rachetées ;
- enfin et dans un objectif de transparence, une meilleure communication des fonds sur leurs sources de financement et leurs objectifs d'investissement, les principes directeurs d'interaction avec les sociétés rachetées, leur structure de gouvernance et le rôle du gouvernement.
M. Gilles Dard, président de Merrill Lynch (France), a fait part de l'expérience récente de sa société, qui avait levé pour 12,8 milliards de dollars de capital en décembre 2007 et janvier 2008 sous forme d'actions préférentielles, dont 9 milliards de dollars avaient été souscrits par trois fonds souverains : Temasek (5 milliards de dollars), Kuwait Investment Authority (2 milliards de dollars) et la Korea Investment Corporation (2 milliards de dollars). Les autres investisseurs - fonds de pension et fonds d'investissement - avaient souscrit au même type d'instrument.
Il a déclaré que la réactivité des fonds souverains avait bénéficié à sa société, qui était satisfaite de disposer de tels actionnaires se comportant en investisseurs passifs et de long terme, disposant d'une longue expérience des marchés, et constituant un gage de confiance dans les perspectives de la banque. Puis, en réponse à M. Jean Arthuis, président, il a précisé que la souscription des actions préférentielles était rémunérée par un dividende compris entre 9 et 11 %.
Il a fait part de son incertitude sur les orientations de ces fonds actionnaires dans l'hypothèse où leur investissement dans Merrill Lynch ne se révèlerait pas rentable, tout en évoquant le précédent de la China Investment Corporation, présente au capital du fonds de LBO Blackstone, coté et dont le cours avait fortement chu en bourse. Il a ajouté que les marges d'action des fonds souverains seraient structurellement limitées par les capitalisations boursières, ce qui les conduirait sans doute à accroître leurs investissements domestiques.
M. Gilles Dard a exposé certaines tendances de la stratégie d'investissement des fonds souverains et estimé que la phase actuelle de hausse de l'exposition de ces fonds aux classes d'actifs plus risquées, qui pourrait à terme atteindre 6.000 milliards de dollars, ne contribuerait sans doute pas à modifier substantiellement le prix de ces actifs. En revanche, les fonds seraient conduits à diversifier leurs placements dans des actifs non libellés en dollars, accentuant ainsi les pressions à la baisse sur cette devise. Ils auraient également davantage recours à la gestion intermédiée, ce qui aurait un impact favorable sur l'industrie de la gestion d'actifs, avec un apport potentiel de 3.000 milliards de dollars.
S'agissant de la transparence des fonds souverains, il a comparé le fonds de pension du gouvernement norvégien, dont l'allocation d'actifs (60 % en actions) et l'objectif de rendement (6 à 6,5 %) étaient publics, et qui recourait largement aux gérants externes, et la China Investment corporation (CIC), plus opaque, mais dont le lien capitalistique avec Blackstone pourrait induire une évolution favorable. Il a ajouté que la CIC poursuivait des objectifs de rendement, de diversification de ses actifs hors de la zone dollar et de maîtrise stratégique de l'énergie et des technologies, tout en cherchant à minimiser l'impact politique de ses décisions d'investissement et en déléguant une part importante de sa gestion à des professionnels.
M. Pierre Delsaux, directeur libre-circulation des capitaux, droits des sociétés et gouvernement d'entreprise à la Commission européenne, a ensuite relativisé la nouveauté comme l'importance du phénomène des fonds souverains. Il a rappelé que de tels fonds étaient présents en Europe depuis les années 1950, et que le volume relatif de leurs investissements restait limité. Cependant, il a reconnu que le débat était légitime, dans la mesure où les investissements des fonds souverains augmentaient et se diversifiaient. Il a noté que ce débat se concentrait sur l'influence gouvernementale qui pouvait s'exercer à travers les fonds souverains, et sur la question de la réciprocité entre les pays de rattachement des fonds souverains et les pays où ces fonds investissaient. Par ailleurs, il a distingué les fonds souverains des entreprises d'Etat.
Il a indiqué que la « réponse » de la Communauté européenne (CE) au développement des fonds souverains était bien commune à l'ensemble des Etats membres, dans la mesure où le Traité CE garantissait la liberté de circulation des capitaux, à la fois entre Etats membres et entre ces Etats et des Etats tiers, sans distinguer entre investisseurs publics et investisseurs privés. L'Europe est donc « ouverte » aux fonds souverains, même si le droit communautaire autorise les Etats membres à protéger leurs intérêts « stratégiques ». Cette notion, dans le silence du Traité CE, a été interprétée par la Cour de justice des communautés européennes (CJCE) dans un sens restrictif. En particulier, elle ne recouvre pas le simple intérêt économique d'un Etat.
Cependant, dans le respect de ces principes communautaires, chaque Etat membre a pu se doter d'une législation propre sur les investissements internationaux. En vue de fixer une « doctrine » commune sur les fonds souverains, le Conseil des ministres de l'économie et des finances, en février 2008, a validé une recommandation de la Commission européenne. Estimant qu'un renforcement de la réglementation en vigueur n'est pas approprié, elle préconise la mise en place de codes de bonne conduite, librement adoptés par les fonds souverains, afin de garantir tant leur indépendance à l'égard des gouvernements que la transparence de leurs politiques d'investissement.
Il a fait état des premières réactions des représentants de fonds souverains à cette recommandation. D'une part, ils estiment que des règles identiques doivent s'appliquer aux autres investisseurs, capital-investissement et fonds spéculatifs notamment. D'autre part, ils appellent la Communauté européenne à faire également preuve de transparence, s'agissant de sa politique à l'égard des fonds souverains.
Enfin, il a estimé que le principe d'ouverture du marché européen aux investissements internationaux, dans la mesure où il s'était révélé bénéfique à l'Europe, devait être maintenu. Néanmoins, à ses yeux, cette ouverture du marché exclut la « naïveté » des acteurs, et des garanties de transparence doivent être aménagées en conséquence.
En réponse à M. Jean Arthuis, président, il a précisé que la Commission européenne ne souhaitait pas lier le débat relatif aux fonds souverains à la demande faite auprès de certains pays, comme la Chine, de s'ouvrir davantage aux investissements européens.
M. Igor Noskov, conseiller financier à l'ambassade de la Fédération de Russie en France, a fait part de son regret que le débat actuel sur les fonds souverains se soit déplacé du terrain économique au plan politique. Il a estimé que l'accueil réservé à un fonds souverain était fonction de l'image de son pays de rattachement.
Il a rappelé l'évolution très rapide qu'avait connue la Russie, d'une économie centralisée à une économie de marché. Selon lui, le pays s'est ouvert et continue de s'ouvrir aux investissements étrangers. Parallèlement, la hausse du prix des ressources naturelles a assuré à la Fédération des réserves de change qui alimentent son Fonds de stabilisation. Celui-ci est divisé en deux parts :
- d'une part, un « fonds de réserve », destiné à amortir d'éventuels chocs budgétaires (125,4 milliards de dollars au 1er avril 2008) ;
- d'autre part, un « fonds du bien-être national », ayant pour but de faire fructifier une partie des recettes énergétiques du pays, notamment par des investissements directs à l'étranger (32 milliards de dollars au 1er avril 2008).
Il a indiqué que les deux fonds étaient dirigés par le ministère russe des finances, la gestion de certaines opérations pouvant être déléguée à la banque centrale ou à des établissements financiers. Cette gestion vise à garantir l'intégrité des moyens des fonds et la stabilité des revenus issus de leurs placements, dans une perspective de long terme. Sur cette gestion, le ministre des finances produit des rapports réguliers au gouvernement, qui en rend compte au Parlement.
Il a jugé que, dans le contexte de la crise financière actuelle, l'activité des fonds souverains, dont les investissements s'inscrivaient traditionnellement dans le long terme, pouvait contribuer à restaurer la confiance des acteurs du marché. Il a reconnu que l'importance des liquidités dont disposaient ces fonds les poussait à présent à réorienter leur politique d'investissement, en privilégiant les placements les plus rentables. Mais, selon lui, les analyses véhiculées par la presse économique, notamment française, sur le « danger » qu'ils représenteraient pour les économies occidentales, étaient excessives. Il a souligné que les organisations économiques internationales, comme le FMI, la Banque mondiale ou l'OCDE, s'accordaient à reconnaître leur rôle positif en termes de normalisation des marchés financiers. Aussi, il a appelé au respect des règles de libre concurrence et à l'abandon des velléités protectionnistes qui pouvaient se faire jour à l'encontre des fonds souverains.
Répondant à M. Jean Arthuis, président, il a précisé que la réciprocité, à ses yeux, consisterait à traiter de manière identique les investisseurs publics et les investisseurs privés, en particulier les fonds spéculatifs (« hedge funds »), ainsi qu'à appliquer les mêmes règles de conduite aux fonds considérés par l'Europe comme « souverains » et à la Caisse des dépôts et consignations par exemple.
M. Olivier Prost, avocat associé au cabinet Gide Loyrette Nouel (Bruxelles), procédant à l'aide d'une vidéo-projection, a montré que les fonds souverains évoluaient dans un cadre juridique d'ores et déjà substantiel.
Il a tout d'abord présenté les règles communautaires applicables aux mouvements de capitaux, qui concernaient notamment les relations des Etats membres avec les Etats tiers, et s'appliquaient aux investissements directs comme aux investissements de portefeuille. Des mesures restrictives sont possibles, à l'initiative des Etats membres, à la condition d'être justifiées par des objectifs « légitimes ». Il a fait observer que c'était dans ce cadre que le gouvernement français avait publié le décret n° 2005-1739 du 30 décembre 2005, dit « anti-OPA », imposant une autorisation préalable du ministre chargé des finances pour les investissements étrangers dans certains secteurs d'activité susceptibles d'intéresser l'ordre public, la sécurité publique ou la défense nationale.
Il a ensuite rappelé que la Commission européenne exerçait un contrôle sur les concentrations d'entreprises au sein du marché européen. Par ailleurs, il a mentionné la réglementation internationale des services financiers et l'existence d'un contrôle des subventions internationales dans le cadre de l'Organisation mondiale du commerce (OMC).
S'interrogeant sur la nécessité d'envisager une réglementation spécifique pour les fonds souverains, il a préconisé de limiter les possibilités de restrictions aux seules menaces graves et bien établies pour l'économie d'un pays. Selon lui, c'est dans cette direction que se dirigent les récentes initiatives internationales, celles du FMI comme celles de la Commission européenne. Cependant, il a reconnu qu'une certaine vigilance était nécessaire. Dans cette perspective, le régime de réciprocité organisé par la directive communautaire relative aux OPA lui parait bien correspondre aux dispositifs qu'il convient de mettre en oeuvre.
M. Jean Arthuis, président, s'est enquis de la situation du décret dit « anti-OPA » au regard des règles communautaires, qu'il revenait à la Commission européenne d'apprécier. M. Pierre Delsaux a indiqué que les discussions entre les services de la Commission et les autorités françaises se poursuivaient, en vue de la meilleure issue possible.
Mme Nicole Bricq a estimé que, compte tenu de l'évolution des pays émergents depuis quelques années, les économies européennes devaient se préparer à un « décentrement » du monde. Elle a souscrit à la nécessité d'accompagner ce mouvement « sans naïveté ». A ses yeux, le meilleur moyen, pour les entreprises européennes, de s'insérer favorablement dans la nouvelle donne économique mondiale y est d'investir leur capital productif.
M. Jean Arthuis, président, a assimilé l'activité des fonds souverains, qui constituait pour lui une forme de nationalisation, à un nouveau « capitalisme d'Etat ». A ce titre, il a regretté l'absence de fonds souverains français. Dans la mesure où ces investisseurs peuvent apparaître de nature à déstabiliser la concurrence, il a estimé que l'instauration de règles de bonne gouvernance et de transparence permettrait d'apaiser les craintes des acteurs du marché. Par ailleurs, ces fonds participant au financement des déséquilibres commerciaux et budgétaires nationaux, il a espéré que l'attention nouvelle qui leur était portée pourrait contribuer à la sensibilisation de l'opinion publique à la nécessité des réformes destinées à restaurer les finances publiques.