EXAMEN DES ARTICLES

Article 1er
Allongement de la durée de l'ordonnance de protection
et création d'une ordonnance provisoire de protection immédiate

L'article 1er de la proposition de loi double la durée maximale des mesures prises dans le cadre d'une ordonnance de protection, qui passerait de six à douze mois, et crée une ordonnance provisoire de protection immédiate permettant à une victime présumée de violences conjugales de saisir le juge des affaires familiales, qui devra se prononcer dans un délai de vingt-quatre heures, afin de bénéficier de mesures d'urgence dans l'attente de la décision statuant sur l'ordonnance de protection.

Souscrivant à l'objectif de renforcement du dispositif juridique de protection des victimes de violences conjugales, la commission a adopté cet article, modifié par quatre amendements, en ouvrant notamment la saisine du juge aux affaires familiales à la personne en danger, après avis conforme du ministère public.

1. Depuis leur création en 2010, les ordonnances de protection ont été régulièrement renforcées et voient leur recours progressivement augmenter

a) Un outil encore récent permettant au juge aux affaires familiales de prendre des mesures temporaires afin de protéger les victimes présumées de violences conjugales

Le législateur a pris conscience de la spécificité des violences conjugales et a progressivement adapté le droit civil et pénal afin de mieux protéger les victimes. Ainsi, dès l'entrée en vigueur du nouveau code pénal le 1er mars 1994, il a été prévu que les peines encourues par les auteurs de violences seraient aggravées lorsqu'elles ont été infligées par le conjoint ou par le concubin de la victime.

Depuis lors, l'arsenal juridique de prévention et de lutte contre les violences conjugales a été régulièrement complété et affermi par le législateur. À titre d'exemple, et sans être exhaustif, la loi n° 2004-439 du 26 mai 2004 relative au divorce a permis au juge aux affaires familiales, lorsque les violences exercées par l'un des époux mettent en danger son conjoint ou un ou plusieurs enfants, de statuer, en amont de la procédure de divorce, sur la résidence séparée des époux afin d'évincer le conjoint violent du domicile conjugal. La loi n° 2006-399 du 4 avril 2006 renforçant la prévention et la répression des violences au sein du couple ou commises contre les mineurs a également constitué une avancée importante en faveur d'une meilleure prise en compte par le législateur du caractère spécifique des violences conjugales. Cette loi a notamment reconnu explicitement la notion de viol et d'agression sexuelle au sein du couple ainsi que l'existence du vol entre époux lorsque celui-ci porte sur des documents indispensables à la vie quotidienne de la victime - comme les papiers d'identité ou de sécurité sociale - et a élargi la circonstance aggravante précédemment mentionnée aux partenaires liés à la victime par un pacte civil de solidarité (PACS) ainsi qu'aux anciens conjoints, anciens concubins et anciens partenaires liés à la victime par un PACS lorsque les violences ont été infligées en raison des relations ayant existé entre l'auteur des faits et cette dernière.

L'une des étapes majeures de ce mouvement en faveur de la protection des victimes présumées de violences conjugales est le vote de la loi n° 2010-769 du 9 juillet 2010 relative aux violences faites spécifiquement aux femmes, aux violences au sein des couples et aux incidences de ces dernières sur les enfants, qui a instauré, avec le soutien du Sénat, les ordonnances de protection en remplacement des anciens « référés violence » de l'article 220-1 du code civil. Signe de l'intérêt porté à ce récent dispositif, le législateur l'a actualisé à cinq reprises entre 2011 et 2022, afin de le rendre plus opérationnel et plus protecteur3(*). La présente proposition de loi constituerait ainsi la sixième réforme du dispositif en quatorze ans.

Il convient en outre de souligner que, bien qu'il ne s'agisse pas d'une modification du dispositif de l'ordonnance de protection stricto sensu, la récente loi n° 2024-233 du 18 mars 2024 visant à mieux protéger et accompagner les enfants victimes et covictimes de violences intrafamiliales a permis au parent bénéficiaire d'une autorisation de dissimuler son domicile ou sa résidence dans le cadre d'une ordonnance de protection de ne pas informer l'autre parent de tout changement éventuel de résidence4(*).

Le référé violence

Institué à l'article 220-1 du code civil par la loi n° 2004-439 du 26 mai 2004 relative au divorce, le « référé violence » permettait au juge aux affaires familiales, en amont de toute procédure de divorce, de prendre en urgence des mesures protectrices du conjoint victime de violences conjugales.

Ainsi, l'époux victime pouvait, par assignation en référé dénoncée au ministère public, saisir le juge aux affaires familiales lorsque les violences exercées par l'autre conjoint mettaient en danger sa personne ou ses enfants. Le magistrat pouvait alors statuer sur la résidence séparée des époux, dont la jouissance était attribuée en principe au conjoint qui n'est pas l'auteur des violences, se prononcer sur les modalités d'exercice de l'autorité parentale ainsi que sur la contribution aux charges du mariage.

Les mesures prises étaient caduques si, à l'expiration d'un délai de quatre mois à compter de leur prononcé, aucune requête en divorce ou en séparation de corps n'avait été déposée.

Cette procédure d'urgence, qui n'est pas sans rappeler le mécanisme de l'actuelle ordonnance de protection, a disparu avec la création de cette dernière par la loi n° 2010-769 du 9 juillet 2010 relative aux violences faites spécifiquement aux femmes, aux violences au sein des couples et aux incidences de ces dernières sur les enfants.

Si ces deux procédures d'urgence ont en commun de permettre le prononcé de mesures protectrices au bénéfice du conjoint victime, l'ordonnance de protection offre une réponse plus efficace contre les violences intrafamiliales. Celle-ci offre une procédure plus rapide, limitée à 6 jours, dotée d'un champ d'application plus large, non restreint aux couples mariés, et permet le prononcé de mesures pénales en sus de mesures de nature civile.

En l'état du droit et à la suite des modifications apportées par le législateur au dispositif initial, l'ordonnance de protection est un dispositif d'urgence, à mi-chemin entre le droit civil et droit pénal, répondant au triple souhait, selon les mots du rapporteur pour le Sénat de la loi du 9 juillet 2010 précitée, François Pillet, de « mieux protéger, mieux prévenir et mieux réprimer »5(*) les violences conjugales.

Régie par les articles 515-9 à 515-13 du code civil, l'ordonnance de protection a considérablement renforcé l'office du juge aux affaires familiales et l'a placé en première ligne de la lutte contre les violences conjugales, en lui permettant d'ordonner des mesures provisoires dans l'attente d'un éventuel jugement pénal si les violences sont avérées.

Le juge aux affaires familiales peut ainsi délivrer une ordonnance de protection « lorsque les violences exercées au sein du couple, y compris lorsqu'il n'y a pas de cohabitation, ou par un ancien conjoint, un ancien partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou un ancien concubin, y compris lorsqu'il n'y a jamais eu de cohabitation, mettent en danger la personne qui en est victime, un ou plusieurs enfants »6(*). Le juge peut être saisi en ce sens soit par la personne en danger soit, avec l'accord de celle-ci, par le ministère public. Ni le ministère d'avocat, ni le dépôt d'une plainte pénale préalable ne sont exigés pour saisir le juge aux affaires familiales d'une demande d'ordonnance de protection.

En parallèle de la protection des victimes de violences conjugales, l'article 515-13 du code civil étend le dispositif de l'ordonnance de protection à toute personne majeure menacée de mariage forcé.

Dès la saisine, le juge doit convoquer en audience la partie demanderesse et la partie défenderesse, ainsi que le ministère public à fin d'avis. Le juge peut décider que les auditions des deux parties aient lieu séparément, l'audience séparée étant de droit lorsqu'elle est sollicitée par la partie demanderesse.

Le juge dispose d'un délai de six jours à compter de la fixation de la date de l'audience pour se prononcer. Alors que le juge devait précédemment se prononcer dans « les meilleurs délais », ce délai de six jours a été imposé par la loi n° 2019-1480 du 28 décembre 2019 visant à agir contre les violences au sein de la famille. Cette modification législative a entraîné une réduction très significative du délai de traitement des demandes d'ordonnances de protection : de près de 40 jours en 2019, la durée moyenne des affaires, entre la date de saisine et la date de la décision, est passée à 19 jours en 2020 et à 8 jours au premier semestre 2021. Dans le détail, la durée entre la saisine et l'audience est passée de 29,6 jours en 2019 à 6,5 jours en moyenne au premier semestre 2021 et celle qui court entre l'audience et la décision est passée de 10,1 jours à 1,5 jour en moyenne7(*).

Les chiffres provisoires pour l'année 2023 transmis à la rapporteure par la direction des affaires civiles et du sceau (DACS) du ministère de la justice font cependant état d'un délai plus élevé, de 9,7 jours en moyenne entre la date de la saisine et celle de la décision.

Après avoir recueilli les observations de chacune des parties afin de respecter le principe du contradictoire, le juge doit alors déterminer s'il « existe des raisons sérieuses de considérer comme vraisemblables la commission des faits de violence allégués et le danger auquel la victime ou un ou plusieurs enfants sont exposés »8(*).

Dans l'affirmative, le juge aux affaires familiales dispose d'une large palette de moyens afin de garantir la sécurité de la victime présumée de violences conjugales et l'aider à rendre effective la séparation. Les mesures que le juge peut prononcer sont listées aux articles 515-11 et 515-11-1 du code civil.

Le juge peut tout d'abord ordonner des mesures relevant traditionnellement du droit pénal à l'encontre de la partie défenderesse : l'interdiction d'entrer en relation, de recevoir ou de rencontrer certaines personnes désignées par le juge ; l'interdiction de détenir ou de porter une arme, qui peut s'accompagner de l'obligation de remettre aux services de police ou de gendarmerie les armes possédées ; ou encore l'interdiction de se rendre dans certains lieux spécialement désignés par le juge dans lesquels se trouve de façon habituelle la partie demanderesse, par exemple les abords de l'école des enfants. Pour s'assurer du respect de ces mesures, le juge peut, en application de l'article 515-11-1, ordonner le port d'un bracelet anti-rapprochement, après avoir recueilli le consentement des deux parties. De même, en application de l'article 41-3-1 du code de procédure pénale, il peut attribuer un « téléphone grave danger » à la partie demanderesse, afin de lui permettre d'alerter et de faire intervenir rapidement les forces de l'ordre, notamment grâce à la géolocalisation.

Le juge aux affaires familiales peut également prononcer des mesures civiles. Il statue sur la résidence séparée des membres du couple, et sur l'attribution à la victime des violences du logement conjugal ou du logement commun. Il peut également régler les relations financières entre les partenaires ainsi que les modalités d'exercice de l'autorité parentale. À cet effet, il peut, en application de l'article 373-2-9 du code civil, organiser le droit de visite du parent privé de l'exercice de l'autorité parentale dans un espace de rencontre dédié ou prévoir que la remise de l'enfant d'un parent à l'autre s'effectuera dans cet espace, ou avec l'assistance d'un tiers de confiance ou du représentant d'une personne morale qualifiée.

Enfin, le juge peut prononcer des mesures d'aide ou de protection de la personne victime de violences : autorisation de dissimulation de son domicile, pour éviter des représailles, admission provisoire à l'aide juridictionnelle, présentation de personnes morales qualifiées susceptibles de l'accompagner pendant toute la durée de l'ordonnance de protection. Des mesures de prise en charge sanitaire, sociale ou psychologique peuvent également être proposées par le juge à la partie défenderesse.

Conformément à l'article 515-12 du code civil, toutes ces mesures sont prises pour une durée maximale de six mois. Le juge dispose toutefois de la faculté de fixer une durée plus courte, conformément à l'article 1136-7 du code de procédure civile.

Le délai de l'ordonnance de protection était originellement de quatre mois mais a été étendu de deux mois par le législateur, dans le cadre de loi n° 2014-873 du 4 août 2014 pour l'égalité réelle entre les femmes et les hommes. Ce délai de six mois peut cependant être prolongé, sans que le législateur n'ait fixé aucune limite temporelle, si le juge aux affaires familiales a été saisi d'une demande relative à l'exercice de l'autorité parentale ou si une demande en divorce ou en séparation de corps est introduite avant leur expiration.

Les mesures édictées dans le cadre des ordonnances de protection peuvent être modifiées, complétées, supprimées ou suspendues « à tout moment » par le juge, à la demande du ministère public ou de l'une ou l'autre des parties, ou après avoir fait procéder à toute mesure d'instruction utile, et après avoir invité chacune d'entre elles à s'exprimer. Le juge peut également accorder à la personne défenderesse une dispense temporaire d'observer certaines des obligations qui lui ont été imposées.

Schéma procédural de l'ordonnance de protection

Jour 0

Jour 1

Jour 2

Jour 3

Jour 4

Jour 5

Jour 6

Saisine
du juge par requête

 

Délai accordé au défendeur pour préparer sa défense (2 ou 3 jours
selon le jour de la signification)

La copie de l'acte de signification doit être remise au plus tard lors de l'audience

Ordonnance de protection

Ordonnance de fixation
de la date d'audience

Audience

Délai accordé au demandeur pour
la signification de la date d'audience au défendeur.

En vertu des articles 1136-3 et 641 du code de procédure civile combinés, le délai de 2 jours pour signifier la date d'audience court à compter du lendemain du jour de fixation de l'ordonnance

 

Étude des pièces par le juge et rédaction de la décision

Source : commission des lois, d'après le guide pratique de l'ordonnance de protection,
publié en novembre 2021 par le ministère de la justice

Le non-respect de ces mesures constitue un délit, réprimé par les articles 227-4-2 et 227-4-3 du code pénal, et pouvant être puni d'une peine de 15 000 € d'amende et de deux ans d'emprisonnement (voir le commentaire de l'article 2).

Les ordonnances de protection en Espagne

L'ordonnance de protection, créée en France en 2010, s'inspire de l'ordonnance de protection des victimes de violences domestiques espagnole, introduite par la loi 27/2003 du 31 juillet 2003 relative aux ordonnances de protection des victimes de violences domestiques. À l'instar du mécanisme français, l'ordonnance de protection espagnole est une procédure d'urgence permettant à une victime d'adresser une demande de protection au magistrat compétent, celui-ci devant se prononcer dans un délai de 72 heures, contre six jours actuellement en droit français.

Tout comme en France, la procédure espagnole est une procédure contradictoire qui prévoit l'audition du demandeur et du défendeur avant toute prise de décision. Néanmoins, contrairement au droit français qui laisse au magistrat le soin de décider des modalités de l'audience, le législateur espagnol impose que les parties comparaissent de manière séparée afin d'éviter toute confrontation.

À l'issue, le magistrat qui estime qu'il existe une situation objective de risque pour la victime, peut prononcer des mesures d'ordre pénal ou civil similaires à celles prévues à l'article 515-11 du code civil français.

Malgré une procédure similaire, l'ordonnance de protection est douze fois plus souvent demandée en Espagne qu'en France (3 299 demandes en France en 2018 contre 40 720 en Espagne), et dix-sept fois plus souvent accordée (près de 28 682 ordonnances de protection ont été accordées en Espagne, soit environ 70 % de réponses positives, contre environ 1 670 en France, soit une moyenne de 60 % de réponses positives).

Cette différence quantitative peut s'expliquer, d'une part, par la durée des effets, limitée à trente jours renouvelables une fois en Espagne9(*), contre six mois renouvelables en France, conduisant les victimes espagnoles à saisir plus fréquemment le juge d'une demande de mise sous protection.

D'autre part, le recours aux ordonnances de protection est facilité en Espagne par la mise en place de juridictions spécialisées en matière de violences conjugales (Juzgados de Violencia sobre la Mujer), compétentes tant en matière pénale que civile et étant chargées d'instruire les délits et de protéger les victimes, notamment via la délivrance d'ordonnances de protection. En France, le décret n° 2023-1077 du 23 novembre 202310(*) a récemment créé des « pôles VIF » au sein des juridictions qui, sans disposer de compétences juridictionnelles propres, permettent une action coordonnée et rapide de l'ensemble des acteurs intéressés en réunissant des magistrats coordonnateurs civils et pénaux concernés par la question des violences intrafamiliales.

b) Un recours en hausse bien qu'encore insuffisant au regard de l'ampleur des violences conjugales

L'ordonnance de protection est devenue l'un des outils juridiques principaux de lutte contre les violences conjugales. Son recours apparaît en hausse presque continue depuis sa création, il y a désormais quatorze ans.

Ainsi, selon la mission interministérielle pour la protection des femmes contre les violences et la lutte contre la traite des êtres humains (Miprof)11(*), 5 792 demandes ont été formulées en 2022, contre 1 637 en 2011, première année d'application de la loi du 9 juillet 2010 précitée, soit une multiplication par 3,5 du nombre de demandes en 11 ans.

Cette tendance haussière a perduré en 2023. D'après les chiffres provisoires transmis à la rapporteure par la DACS, 6 435 demandes d'ordonnance de protection ont été formulées en 2023.

Le service statistique ministériel de la justice (SDES)12(*) s'est attaché à définir le profil sociologique des demandeurs d'ordonnance de protection. La quasi-totalité des demandes d'ordonnance de protection sont introduites par des femmes (97 %) et, à l'inverse, 96 % des défendeurs sont des hommes. Près de 8 demandeurs sur 10 se sont déclarés, au moment des faits dénoncés, en situation de couple avec le défendeur (mariés dans 46 % des cas et concubins dans 30 % des cas)13(*). Les ordonnances de protection concernent en outre des populations de tout âge : les demandeurs ou les défendeurs avaient, sur la période 2011-2021, entre 17 et 81 ans. Enfin, 89 % des demandeurs ont des enfants, le plus souvent mineurs.

Source : commission des lois, d'après les données de la Miprof et du SDES.

Le nombre de décisions d'acceptation est quant à lui passé de 1 129 en 2011 à 3 621 en 2022, soit une multiplication par 3,2. Il est à noter qu'en moyenne environ une demande sur cinq n'aboutit pas à une décision de fond (acceptation ou rejet), par exemple à la suite d'un désistement ou d'une caducité. Le taux d'acceptation des demandes d'ordonnance de protection est resté relativement stable sur la période, se situant entre 60 et 70 % ; il est passé de 67 à 69 % entre 2021 et 2022. Les données provisoires sur l'année 2023 laissent apparaître 3 997 décisions d'acceptation, soit 62 %14(*).

Les décisions de rejet sont, selon l'Association française des magistrats de la jeunesse et de la famille (AFMJF), pour la grande majorité fondées sur l'absence de danger actuel, qui constitue l'une des deux conditions à la délivrance d'une ordonnance de protection par le juge aux affaires familiales, conformément à l'article 515-11 du code civil. La position tenue par le défendeur vis-à-vis de la demande d'ordonnance de protection affecte sensiblement le taux d'acceptation des ordonnances : le SDES relève ainsi que lorsque ce dernier s'oppose à la demande (il le fait dans 49 % des cas), le taux d'acceptation n'est que de 51 %, contre 95 % lorsqu'il y est favorable (7 % des situations).

Si le nombre d'ordonnances de protection délivrées a augmenté depuis sa création, à la suite notamment des différentes réformes dont le dispositif a bénéficié, « l'ordonnance de protection reste un outil insuffisamment identifié par les différents acteurs de terrain »15(*) selon le ministère de la justice. Le nombre d'ordonnances de protection demandées a même, pour la première fois depuis sa création, reflué entre 2021 et 2022 (de 5 873 à 5 791)16(*). Ces chiffres paraissent enfin dérisoires vis-à-vis du nombre de femmes exposées à la violence de leur conjoint : sur l'année 2022, 321 000 femmes ont déclaré avoir été victimes de violences physiques, sexuelles, psychologiques ou verbales par leur partenaire ou ex-partenaire17(*).

Le comité national de pilotage de l'ordonnance de protection (CNOP), dans son rapport d'activité pour l'année 2020-2021, évoque plusieurs pistes pouvant expliquer la sous-utilisation de l'ordonnance de protection en France, notamment un manque de communication sur le dispositif, un manque de formation des professionnels concernés ou encore la notion de « danger » qui conditionne la délivrance de l'ordonnance de protection.

Le Comité national de pilotage de l'ordonnance de protection (CNOP)

Le CNOP a été installé le 23 juin 2020 par la garde des Sceaux, alors Nicole Belloubet, dans l'objectif de développer la procédure de l'ordonnance de protection. La présidence du comité a été confiée à Ernestine Ronai, responsable de l'observatoire des violences faites aux femmes de Seine-Saint-Denis.

Le CNOP est chargé d'examiner la manière dont le dispositif de l'ordonnance de protection est appliqué selon les cours et juridictions, de suivre l'application de la loi n° 2019-1480 du 28 décembre 2019 visant à agir contre les violences au sein de la famille et d'effectuer un état des lieux du prononcé de l'ordonnance. Dans le cadre de ses travaux, il établit des recommandations et propositions visant à favoriser le développement de l'ordonnance de protection. Le 25 juin 2021, il a publié son premier rapport dans lequel il formule huit préconisations en ce sens.

Le CNOP est composé de l'ensemble des acteurs concernés par le dispositif : la Haute-fonctionnaire à l'égalité femmes-hommes du ministère de la justice, les directions du ministère la justice (DACS, DACG, DSJ, SAJDAV), la Chambre nationale des commissaires de justice (CNCJ), le Conseil national des barreaux (CNB), l'association des femmes commissaires de justice de France, le Service des droits des femmes et de l'égalité (SDFE), diverses associations (FNSF, FNCIDFF, France Victimes, Fondation des femmes, Femmes solidaires), des personnels de greffe, des magistrats et des personnalités à titre d'experts.

2. L'article 1er de la proposition de loi vise à accroître les effets de l'ordonnance de protection, autant en amont qu'en aval de la décision du juge

L'article 1er comporte deux mesures qui ont toutes deux pour effet d'étendre temporellement la protection des victimes présumées de violences conjugales : en amont de la décision judiciaire d'octroi de l'ordonnance de protection, avec la création d'une ordonnance provisoire de protection immédiate, et en aval avec l'allongement de la durée de l'ordonnance de protection, qui passerait de six à douze mois. Il n'a fait l'objet que de modifications rédactionnelles mineures lors de l'examen à l'Assemblée nationale, à l'initiative de la rapporteure.

a) Le doublement de la durée de l'ordonnance de protection

Le 1° de l'article 1er de la proposition de loi modifie l'article 515-12 du code civil, relatif à la durée et au prolongement de l'ordonnance de protection (cf. supra), afin d'étendre la durée des mesures de l'ordonnance de protection à douze mois, contre six mois en l'état actuel du droit. Il s'agirait d'une durée maximale, la faculté du juge de fixer une durée inférieure n'étant pas altérée par la présente proposition de loi.

Cette extension serait applicable à toutes les ordonnances de protection, sans distinction selon le régime marital de la victime présumée ou la présence d'enfants. L'auteure de la proposition de loi justifie en effet cet allongement à douze mois par le souhait « de permettre aux personnes qui ne sont pas mariées et qui n'ont pas d'enfants de bénéficier d'un temps plus long pour organiser leur séparation »18(*).

En revanche, le 1° de l'article 1er de la proposition de loi ne modifie pas les conditions de prolongation de la durée des mesures édictées dans le cadre d'une ordonnance de protection. L'état actuel du droit serait donc conservé : ce nouveau délai de douze mois ne pourrait être prolongé que si le juge aux affaires familiales a été saisi d'une demande relative à l'exercice de l'autorité parentale ou si une demande en divorce ou en séparation de corps est introduite avant leur expiration.

Contrairement à la création d'une ordonnance provisoire de protection immédiate (cf. infra), cette mesure ne figure pas parmi les recommandations du rapport « Plan rouge VIF : améliorer le traitement judiciaire des violences intrafamiliales » d'Émilie Chandler et de Dominique Vérien19(*).

b) La création d'une ordonnance provisoire de protection immédiate

Le 2° de l'article 1er de la proposition de loi constitue la mesure la plus saillante du texte, à savoir la création d'une ordonnance provisoire de protection immédiate. Cette mesure s'inspire de la recommandation n° 33 du rapport précité « Plan rouge VIF ».

Recommandation n° 33 du rapport « Plan rouge VIF »

Créer une ordonnance d'éviction immédiate du conjoint violent prise par le procureur de la République de façon non contradictoire, à charge pour lui de saisir le juge aux affaires familiales d'une demande d'ordonnance de protection dans les huit jours, ce dernier ayant trois semaines pour prendre sa décision.

Tel que proposé dans le texte transmis au Sénat, cette ordonnance provisoire de protection immédiate serait délivrée par le juge aux affaires familiales, sur saisine du procureur de la République mais avec l'accord de la victime présumée, en parallèle d'une demande de délivrance d'une ordonnance de protection « classique ». Aucune ordonnance provisoire de protection immédiate ne pourrait être délivrée sans dépôt d'une demande d'ordonnance de protection.

Le juge disposerait d'un délai de vingt-quatre heures pour se prononcer, au vu des seuls éléments joints à la requête, c'est-à-dire sans avoir entendu la partie défenderesse. L'ordonnance provisoire pourrait être délivrée si le juge estime « qu'il existe des raisons sérieuses de considérer comme vraisemblables la commission des faits de violence allégués et le danger grave et immédiat auquel la victime ou un ou plusieurs enfants sont exposés ». Par rapport à l'ordonnance de protection « classique », dans un esprit de gradation, le danger doit être « grave et immédiat ». Le juge pourrait alors ordonner quatre des onze mesures qui peuvent être édictées dans le cadre d'une ordonnance de protection :

- interdire à la partie défenderesse de recevoir ou de rencontrer certaines personnes spécialement désignées par le juge, ainsi que d'entrer en relation avec elles, de quelque façon que ce soit ;

- interdire à la partie défenderesse de se rendre dans certains lieux spécialement désignés par le juge dans lesquels se trouve de façon habituelle la partie demanderesse ;

- interdire à la partie défenderesse de détenir ou de porter une arme ;

- ordonner à la partie défenderesse de remettre au service de police ou de gendarmerie les armes dont elle est détentrice.

Ces mesures seraient valables jusqu'à la décision du juge aux affaires familiales sur la demande de délivrance de l'ordonnance de protection, soit pendant une durée d'environ six jours.

Elles ne seraient pas susceptibles de recours. Toutefois, un recours pourrait être formé à l'occasion de la décision statuant sur l'ordonnance de protection elle-même. Interrogé sur le sujet par la rapporteure, le ministère de la justice estime « qu'il n'apparaît pas indispensable de prévoir un droit de recours contre une ordonnance provisoire de protection immédiate, compte tenu de sa durée d'effet relativement courte [et du caractère] accessoire de l'ordonnance provisoire de protection immédiate », laquelle doit nécessairement être adossée à une demande d'ordonnance de protection qui est quant à elle susceptible de recours.

Ainsi, le 2° de l'article 1er de la présente proposition de loi ne correspond que partiellement à la recommandation n° 33 du rapport « Plan rouge VIF » : le rapport prévoyait en effet que cette ordonnance provisoire soit délivrée par le procureur de la République, et non par le juge aux affaires familiales. En outre, le rapport ne proposait d'autoriser le procureur de la République qu'à évincer provisoirement le conjoint violent du domicile alors que la proposition de loi autorise le juge à prononcer davantage de mesures.

3. Un objectif louable de renforcement de la protection des victimes présumées de violences conjugales soutenu et affermi par la commission

Conformément à la position du Sénat depuis 2010, qui a toujours soutenu, moyennant des ajustements pour garantir la constitutionnalité et la proportionnalité du dispositif, les nombreux textes actualisant ou confortant le régime des ordonnances de protection, la commission a souscrit aux objectifs portés par l'article 1er, qu'elle a néanmoins modifié par l'adoption de quatre amendements.

De façon générale, la commission a estimé que la création d'une ordonnance provisoire de protection immédiate et l'allongement de la durée de l'ordonnance de protection participaient à un meilleur accompagnement des victimes présumées de violences conjugales et à l'accroissement des moyens juridiques permettant d'assurer l'intégrité physique de la personne en danger.

La commission a relevé, d'une part, le caractère accessoire de l'ordonnance provisoire de protection immédiate, qui garantit que le contradictoire sera bien exercé à l'occasion de la décision sur l'ordonnance de protection et, d'autre part, que les mesures pouvant être édictées dans le cadre d'une ordonnance provisoire de protection immédiate sont très strictement limitées dans le temps - six jours maximum -, ont un périmètre plus restreint que celui des ordonnances de protection et sont prononcées uniquement en cas de danger « grave et immédiat » - condition plus restrictive que pour les ordonnances de protection. Dans ce cadre, les atteintes aux droits de la défense lui ont paru acceptables et proportionnées au bénéfice d'une meilleure protection des victimes présumées.

Tel que transmis au Sénat par l'Assemblée nationale, le dispositif de l'ordonnance provisoire de protection immédiate a néanmoins été considéré par la commission comme inopérant en raison du verrou que représente la saisine du juge aux affaires familiales par le seul procureur de la République, qui n'a au surplus pas de délai pour opérer cette saisine. Cette saisine limitée au seul procureur de la République est présentée par l'auteure de la proposition de loi comme un filtre, afin d'éviter toute instrumentalisation d'un dispositif d'urgence sans contradictoire.

Or, il s'avère que, pour les ordonnances de protection « classiques », seulement 2 % des saisines du juge aux affaires familiales sont initiées par les procureurs de la République.

Il est donc assez probable, comme l'a d'ailleurs laissé entendre la Conférence nationale des procureurs de la République (CNPR) lors de son audition par la rapporteure, que les ordonnances provisoires de protection immédiate deviennent un outil mort-né si la seule autorité à même d'enclencher la procédure ne s'en saisit pas pleinement, faute de temps pour examiner rapidement les demandes d'ordonnance de protection.

Par conséquent, la commission a adopté l'amendement COM-3, présenté par sa rapporteure, afin d'assouplir le dispositif tout en maintenant un filtre à même d'éviter tout engorgement de l'office du juge aux affaires familiales et de limiter l'octroi d'une ordonnance provisoire de protection immédiate aux cas les plus justifiés.

Pour ce faire, la commission a ouvert la saisine du juge à toutes les personnes ayant demandé l'octroi d'une ordonnance de protection, mais en instaurant un avis conforme du parquet, rendu dans un délai de vingt-quatre heures, préalable à cette saisine. Cet avis conforme permettra, d'une part, de désinciter les demandes les moins pertinentes et, d'autre part, de s'assurer de l'investissement du parquet dans ces dossiers, notamment au regard de l'article 2 bis, qui permettra au parquet d'accorder un téléphone grave danger aux bénéficiaires des ordonnances provisoires de protection immédiate.

Le même amendement COM-3 précise en outre que le procureur de la République peut joindre des éléments à la requête formulée par la personne en danger.

Enfin, ledit amendement COM-3 lève une ambiguïté, en s'inspirant de la rédaction de l'article 544 du code de procédure civile, quant à l'expiration des effets de l'ordonnance provisoire de protection immédiate, le dispositif adopté par l'Assemblée nationale ne prenant pas en compte le cas lors duquel la demande d'ordonnance de protection « classique » serait retirée, par exemple si la victime présumée se désiste, et donc qu'aucune décision de fond n'est prise par le juge aux affaires familiales. Ce cas n'est pas seulement théorique puisque selon l'Infostat Justice n° 192 « environ une demande sur cinq en moyenne ne donne pas lieu à une décision sur le fond ». Pour répondre à cette éventualité, l'amendement COM-3 prévoit que les effets de l'ordonnance provisoire de protection immédiate cesseront dès lors que le juge prendra acte d'une exception de procédure, d'une fin de non-recevoir ou de tout autre incident mettant fin à l'instance.

La commission a également adopté l'amendement COM-4, présenté par sa rapporteure, qui élargit le périmètre des mesures pouvant être prononcées par le juge aux affaires familiales dans le cadre d'une ordonnance provisoire de protection immédiate en ajoutant la dissimulation de l'adresse de la victime présumée et la suspension provisoire, pour la durée de l'ordonnance provisoire de protection immédiate, du droit de visite et d'hébergement de l'auteur présumé des violences. Compte tenu du caractère non contradictoire de l'ordonnance provisoire de protection immédiate, le juge ne pourra cependant pas se prononcer, en extrême urgence, sur les modalités générales d'exercice de l'autorité parentale, qui restent limitées à l'ordonnance de protection « classique ».

Enfin, la commission a adopté l'amendement COM-2, présenté par sa rapporteure, corrigeant une dénomination obsolète à l'article 515-11 du code civil, et l'amendement COM-1 rect., présenté par Mélanie Vogel, qui précise que le juge ne peut motiver un refus d'octroi de l'ordonnance provisoire de protection immédiate sur la seule présence d'éléments non traduits. En effet, bien que la jurisprudence de la première chambre civile de la Cour de cassation autorise déjà tous les justiciables à joindre à leurs requêtes des éléments en langue étrangère, le juge peut exiger du requérant qu'il procède à ses frais à leur traduction. Il est cependant évident que, dans le contexte d'extrême urgence de l'ordonnance provisoire de protection immédiate, une traduction par un service agréé ne pourra pas être fournie en vingt-quatre heures. Or, les éléments de preuve en langue étrangère, comme un certificat médical attestant de coups et blessures, pourraient être utiles pour des personnes ayant récemment vécu à l'étranger. En revanche, la traduction restera exigible pour l'octroi de l'ordonnance de protection « classique ».

La commission a adopté l'article 1er ainsi modifié.

Article 1er bis (nouveau)
Dissimulation de l'adresse d'une personne bénéficiaire
d'une ordonnance de protection lorsque l'auteur des violences demande que lui soient communiquées les listes électorales

L'article 1er bis, issu d'un amendement portant article additionnel présenté par la rapporteure, tend à éviter tout usage détourné de la communication des listes électorales, qui comportent des données à caractère personnel, en permettant de masquer, dans certains cas, l'adresse du ou de la bénéficiaire d'une ordonnance de protection lorsque la demande de communication de la liste électorale provient de l'auteur des violences.

1. Le code électoral permet à tout électeur d'obtenir une copie des listes électorales de la commune, lesquelles comportent des données à caractère personnel, notamment l'adresse

Depuis 1964, le code électoral donne le droit à tout électeur, tout candidat ou tout parti ou groupement politique de consulter les listes électorales en mairie ou en préfecture.

Précédemment régi par l'article L. 28 du code électoral, ce droit d'accès a fait l'objet d'une recodification en 201620(*) et figure désormais à l'article L. 37, lequel dispose que « tout électeur peut prendre communication et obtenir copie de la liste électorale de la commune à la mairie ou des listes électorales des communes du département à la préfecture, à la condition de s'engager à ne pas en faire un usage commercial ». Le même droit de communication, ne pouvant cependant être exercé qu'en préfecture, est accordé par l'article L. 37 à « tout candidat et tout parti ou groupement politique ».

Ce droit d'accès est considéré par le juge administratif comme un moyen de « concourir à la libre expression du suffrage »21(*) en permettant aux électeurs de s'informer sur le contenu des listes électorales et de déposer un recours s'ils constatent une anomalie et aux partis et groupements politiques d'organiser leur propagande électorale.

Ce régime s'avère donc dérogatoire au cadre général de communication des documents administratifs, régi par les articles L. 311-1 à L. 311-8 du code des relations entre le public et l'administration. En effet, les listes électorales contenant des données à caractère personnel, et notamment l'adresse des électeurs ou encore leur date de naissance, ne sont pas communicables, contrairement aux autres documents administratifs, à

« toute personne qui en fait la demande »22(*) mais uniquement aux électeurs et aux partis. À ce titre, elles ne peuvent pas faire l'objet d'une publication électronique consultable en ligne ni être réutilisées à des fins commerciales.

Malgré cette restriction d'accès aux données personnelles contenues dans les listes électorales aux seuls électeurs, candidats, partis et groupements politiques, l'article L. 37 du code électoral constitue une seconde dérogation au cadre général de communication des documents administratifs dans la mesure où, contrairement au principe fixé par l'article L. 311-6 du code des relations entre le public et l'administration, il ne limite pas la consultation de documents comportant des données pouvant « porter atteindre à la vie privée » aux seuls « intéressés ».

Cette dérogation est appliquée par la Commission d'accès aux documents administratifs (CADA) qui a rappelé, dans son avis n° 20203381 du 10 décembre 2020, que « la spécificité du régime d'accès aux listes électorales est déterminée par sa finalité, à savoir concourir à la libre expression du suffrage, elle-même intimement liée au déroulement du processus électoral » et qu'à ce titre il est justifié que « par dérogation aux articles L. 311-5 et L. 311-6 du code des relations entre le public et l'administration qui font obstacle à la communication aux tiers d'informations mettant en cause la vie privée de personnes physiques identifiables, l'article L. 37 du code électoral permet à tout électeur, candidat, groupement ou parti politique d'obtenir, sous certaines conditions, communication intégrale des listes électorales, y compris des mentions intéressant la vie privée des électeurs [telles que la] date et lieu de naissance [ou le] domicile ».

Il pourrait donc être fait un usage détourné de ce droit d'accès aux listes électorales par une personne assujettie à une ordonnance de protection afin d'obtenir l'adresse du ou de la bénéficiaire de ladite ordonnance, malgré l'autorisation donnée par le juge de dissimuler son adresse, en application des 6° et 6° bis de l'article 515-11 du code civil.

2. L'article 1er bis de la proposition de loi tend à éviter tout usage détourné de la communication des listes électorales en permettant de masquer, dans certains cas, l'adresse du ou de la bénéficiaire d'une ordonnance de protection

Pour répondre à l'éventualité d'un mésusage du droit d'accès aux listes électorales par une personne assujettie à une ordonnance de protection ou à une ordonnance provisoire de protection immédiate23(*), l'article 1er bis de la proposition de loi complète les articles L. 37 du code électoral et 515-11 du code civil en prévoyant que l'adresse du ou de la bénéficiaire de l'ordonnance de protection soit, sous réserve de son accord, masquée lorsque la demande de communication de la liste électorale provient d'un électeur qui est également l'auteur des violences.

La dissimulation de l'adresse sur la liste électorale ne serait cependant possible que lorsque le juge aux affaires familiales a prononcé l'une des mesures mentionnées aux 6° et 6° bis de l'article 515-11 du code civil, c'est-à-dire l'autorisation pour le ou la bénéficiaire d'une ordonnance de protection de dissimuler son adresse à la partie défenderesse.

Afin de s'assurer que les mairies et les préfectures prennent les précautions nécessaires lors de la communication des listes électorales, l'article 1er bis confie en outre au procureur de la République la charge de les informer dès lors qu'une mesure mentionnée aux 6° et 6° bis de l'article 515-11 du code civil est prononcée au bénéfice d'une personne dont le domicile est situé dans leur ressort.

3. Corriger un défaut d'articulation entre le code électoral et le code civil, afin de mieux assurer la protection des victimes de violences conjugales

L'article 1er bis est issu d'un amendement COM-6, présenté par la rapporteure et adopté par la commission.

La commission a considéré que le risque de détournement du droit d'accès aux listes électorales par une personne soumise à une ordonnance de protection était certes limité car il supposait une connaissance fine du droit électoral, mais néanmoins réel. L'absence d'articulation entre le droit accordé par l'article L. 37 du code électoral et les mesures protectrices pouvant être édictées sur le fondement de l'article 515-11 du code civil apparaît donc, en l'état du droit, insatisfaisant.

C'est pourquoi la commission a accepté les modifications apportées par l'article 1er bis, qui permettront ainsi de rendre plus effective l'autorisation de dissimulation de l'adresse que peut accorder le juge aux affaires familiales aux bénéficiaires d'une ordonnance de protection.

La commission a adopté l'article 1er bis ainsi rédigé.

Article 2
Sanction du non-respect des mesures ordonnées dans le cadre d'une ordonnance provisoire de protection immédiate

L'article 2 de la proposition de loi crée un nouvel article au sein du code pénal afin de sanctionner de trois ans d'emprisonnement et de 45 000 € d'amende le non-respect des mesures ordonnées par le juge aux affaires familiales dans le cadre d'une ordonnance provisoire de protection immédiate.

La commission a adopté cet article, modifié par un amendement présenté par sa rapporteure qui harmonise les peines encourues pour violation d'une ordonnance provisoire de protection immédiate ou d'une ordonnance de protection.

1. La violation d'une ordonnance de protection est passible d'une peine de deux ans d'emprisonnement et de 15 000 € d'amende

En parallèle de la création, par la loi n° 2010-769 du 9 juillet 2010 relative aux violences faites spécifiquement aux femmes, aux violences au sein des couples et aux incidences de ces dernières sur les enfants, du dispositif de l'ordonnance de protection, le législateur a prévu l'instauration d'une sanction pénale spécifique, applicable en cas de non-respect des mesures édictées dans ce cadre par le juge aux affaires familiales. Cette peine, régie par l'article 227-4-2 du code pénal, peut atteindre deux ans d'emprisonnement et 15 000 € d'amende.

L'article 227-4-3 du même code punit quant à lui de six mois d'emprisonnement et de 7 500 € d'amende le fait, pour une personne tenue de verser une contribution ou des subsides au titre d'une ordonnance de protection, de ne pas notifier un changement de domicile au créancier dans un délai d'un mois.

Lors de l'instauration de ces peines, leur proportionnalité a été appréciée par le législateur au regard des peines qui étaient alors déjà prévues aux articles 227-3 et 227-4 dudit code, qui sanctionnent « l'abandon de famille ». L'article 227-3 punit en effet de deux ans d'emprisonnement et de 15 000 € d'amende le fait, pour une personne, de ne pas exécuter une décision judiciaire ou une convention judiciairement homologuée lui imposant de verser au profit d'un enfant mineur, d'un descendant, d'un ascendant ou du conjoint une pension, une contribution, des subsides ou des prestations de toute nature en raison de l'une des obligations familiales prévues par le code civil. L'article 227-4 punit quant à lui de six mois d'emprisonnement et de 7 500 € d'amende le fait, par une personne tenue à l'obligation de verser une pension, une contribution, des subsides ou des prestations de toute nature, de ne pas notifier son changement de domicile au créancier dans un délai d'un mois.

Le rapporteur de la loi du 9 juillet 2010 précitée, François Pillet, ayant estimé que « les dispositions pénales [des articles 227-4-2 et 227-4-3] permettront de donner toute son effectivité au dispositif de l'ordonnance de protection »24(*), le Sénat avait soutenu la création de ces deux nouvelles peines.

Depuis lors, le nombre de condamnations prononcées chaque année par le juge pénal au titre d'une violation d'une ordonnance de protection apparaît en hausse significative et régulière, illustrant aussi bien l'appropriation par le juge pénal des articles 227-4-2 et 227-4-3 que le recours accru aux ordonnances de protection. Ainsi, en 2022, 156 personnes ont été condamnées pour ce motif25(*), soit un quasi-quadruplement par rapport à 2017 et une hausse de 11,5 % par rapport à 2021.

Source : commission des lois, d'après les données de
l'Observatoire national des violences faites aux femmes

2. L'article 2 de la proposition de loi introduit un délit de violation d'une ordonnance provisoire de protection immédiate au sein du code pénal

Afin d'assurer le respect des mesures édictées dans le cadre d'une ordonnance provisoire de protection immédiate, l'article 2 de la proposition de loi introduit un nouvel article 227-4-2-1 au sein du code

pénal, sanctionnant de trois ans d'emprisonnement et de 45 000 € d'amende la violation des mesures ordonnées par le juge aux affaires familiales dans le cadre d'une ordonnance provisoire de protection immédiate.

Il s'agirait donc d'une peine significativement supérieure à celle qu'encourent les personnes ne respectant pas les mesures d'une ordonnance de protection « classique ».

L'auteure de la proposition de loi justifie la création et le quantum de cette peine par le souhait de permettre la mise en oeuvre de la géolocalisation de l'auteur des violences, qui est autorisée, en application de l'article 230-32 du code de procédure pénale, pour les enquêtes ou les instructions portant sur un crime ou sur un délit puni d'au moins trois ans d'emprisonnement.

Lors de son examen en commission des lois de l'Assemblée nationale, l'article 2 a en outre été modifié par un amendement de la rapporteure pour procéder à des corrections rédactionnelles mineures à l'article 227-4-2 du code pénal, qui régit la sanction encourue en cas de violation d'une ordonnance de protection.

3. Rendre plus lisible le quantum des peines en alignant celles encourues pour violation d'une mesure édictée dans le cadre d'une ordonnance de protection sur celles encourues en cas de violation d'une ordonnance provisoire de protection immédiate

La commission a considéré, à l'instar de l'Assemblée nationale, que l'instauration d'une peine sanctionnant la violation des mesures édictées dans le cadre d'une ordonnance provisoire de protection immédiate était nécessaire afin d'inciter à leur respect et de garantir l'effectivité des ordonnances provisoires de protection immédiate.

Dans un souci de lisibilité du droit, la commission a cependant adopté l'amendement COM-7, présenté par sa rapporteure, qui aligne les peines encourues pour non-respect d'une ordonnance de protection et non-respect d'une ordonnance provisoire de protection immédiate. Il convient de souligner qu'à l'exception de la DACS qui n'a pas souhaité se prononcer, la totalité des personnes auditionnées par la rapporteure se sont accordées sur la pertinence d'une peine unique, qui permettra au dispositif d'ensemble de gagner en clarté.

En effet, les mesures édictées par le juge aux affaires familiales dans le cadre d'une ordonnance de protection ne varient pas suffisamment de celles édictées dans le cadre d'une ordonnance provisoire de protection immédiate pour que soit justifié un traitement différent en cas de violation, a fortiori si la violation de ces mesures entraîne de nouvelles violences à l'égard de la victime. 

Plutôt que de créer un nouvel article 227-4-2-1 au sein du code pénal pour régir le cas spécifique de la violation des mesures prononcées dans le cadre d'une ordonnance provisoire de protection immédiate, la commission a ainsi jugé plus pertinent de rassembler en un article unique, l'article 227-4-2 préexistant, la réponse pénale à la violation des mesures édictées aussi bien dans le cadre d'une ordonnance provisoire de protection immédiate que d'une ordonnance de protection.

Ce faisant, elle a prévu un même quantum des peines pour la violation des deux ordonnances, en alignant la peine maximale encourue sur le dispositif prévu initialement par l'Assemblée nationale pour les seules ordonnances provisoires de protection immédiate, à savoir trois ans d'emprisonnement et 45 000 € d'amende. Cet alignement a donc pour conséquence de rehausser la peine maximale encourue pour non-respect d'une ordonnance de protection qui est, en l'état actuel du droit, fixée à deux ans d'emprisonnement et 15 000 € d'amende.

Cette modification du quantum des peines a en outre pour conséquence, en application de l'article 138-3 du code de procédure pénale, de permettre au juge d'imposer à la personne ayant violé une mesure édictée dans le cadre d'une ordonnance de protection le port d'un bracelet anti-rapprochement (BAR). En effet, le consentement de la partie défenderesse est nécessaire dès lors que la peine encourue est inférieure à trois ans.

La commission a adopté l'article 2 ainsi modifié.

Article 2 bis (nouveau)
Possibilité d'octroyer un téléphone grave danger dans le cadre des ordonnances provisoires de protection immédiate

L'article 2 bis, issu d'un amendement portant article additionnel présenté par la rapporteure, étend aux ordonnances provisoires de protection immédiate la possibilité, pour le procureur de la République, d'octroyer un téléphone grave danger. Cette possibilité est déjà ouverte, en l'état actuel du droit, pour les ordonnances de protection.

1. Les « téléphones grave danger », un outil de protection des victimes de violences conjugales ayant fait ses preuves

a) Le procureur de la République peut accorder un téléphone grave danger aux bénéficiaires des ordonnances de protection

Mis en place à titre expérimental en 2009 dans le ressort du tribunal de grande instance de Bobigny, puis dans les années suivantes dans le ressort des tribunaux de grande instance de Strasbourg, de Basse-Terre, de Pointe-à-Pitre, de Douai et de Paris, le « téléphone grave danger » (TGD), anciennement dénommé « dispositif femmes en très grand danger », a été pérennisé et généralisé à l'ensemble du territoire en 2014, lors de l'adoption de l'article 36 de la loi n° 2014-873 du 4 août 2014 pour l'égalité réelle entre les femmes et les hommes.

Lors de l'examen de la loi du 4 août 2014 précitée, le Sénat avait soutenu cette mesure, constatant que « les résultats des expérimentations conduites dans plusieurs ressorts montrent tout l'intérêt de ce dispositif » pour protéger les « femmes identifiées comme particulièrement exposées à un risque de violences conjugales »26(*).

Codifié à l'article 41-3-1 du code de procédure pénale, le TGD consiste en « un dispositif de téléprotection permettant [à son bénéficiaire] d'alerter les autorités publiques ». Concrètement, il s'agit d'un téléphone d'alerte, équipé d'un bouton d'appel préprogrammé renvoyant directement vers des écoutants professionnels. En situation de danger, l'appel est immédiatement dirigé vers un téléopérateur qui dispose d'ores et déjà de toutes les informations relatives à la victime (nom, coordonnées, etc.). Évaluant la situation de danger, ce téléopérateur prend contact directement, par une ligne dédiée, avec les services de police ou de gendarmerie qui sont censés intervenir dans de brefs délais.

La loi encadre cependant les conditions d'attribution du TGD, dont le coût repose sur le budget du ministère de la justice27(*) et qu'il s'agit de ne confier qu'aux personnes dont le risque de subir des violences est probable, afin d'éviter tout engorgement des services de police ou de gendarmerie.

Ainsi, seul le procureur de la République peut octroyer un TGD, et ce « en cas de grave danger menaçant une personne victime de violences de la part de son conjoint, de son concubin ou de son partenaire lié par un pacte civil de solidarité » ou « lorsque les violences ont été commises par un ancien conjoint ou concubin de la victime, ou par une personne ayant été liée à elle par un pacte civil de solidarité, ainsi qu'en cas de grave danger menaçant une personne victime de viol ».

La situation de grave danger est appréciée au regard des conditions cumulatives suivantes :

le dispositif de téléprotection ne peut être attribué qu'en l'absence de cohabitation entre la victime et l'auteur des violences ;

l'auteur des violences a soit fait l'objet d'une interdiction judiciaire d'entrer en contact avec la victime dans le cadre d'une ordonnance de protection, d'une alternative aux poursuites, d'une composition pénale, d'un contrôle judiciaire, d'une assignation à résidence sous surveillance électronique, d'une condamnation, d'un aménagement de peine ou d'une mesure de sûreté, soit est en fuite ou n'a pas encore pu être interpellé ou lorsque l'interdiction judiciaire d'entrer en contact avec la victime n'a pas encore été prononcée et que le procureur estime qu'il existe un « danger avéré et imminent ».

Le TGD étant conçu comme un outil au sein du dispositif plus global d'accompagnement de la victime vers la restauration de son autonomie, sa mise à disposition est temporaire et limitée à une durée renouvelable de six mois. Dans la même optique, le consentement exprès de la victime est requis, aucune victime ne pouvant se faire imposer l'octroi d'un TGD par le procureur. Le dispositif peut en outre permettre la géolocalisation de la victime au moment où elle déclenche l'alerte, sous réserve, à nouveau, de son accord.

b) Un usage croissant et satisfaisant des téléphones grave danger

Dix ans après leur introduction au sein de l'arsenal juridique en faveur des victimes de violences conjugales, les TGD semblent être désormais un dispositif connu et reconnu par les parties concernées, qui ont toutes souligné, lors des auditions menées par la rapporteure, non seulement son utilité et son efficacité pour protéger les victimes d'éventuelles réitérations de la part de l'auteur des violences, mais également la nécessité d'oeuvrer pour poursuivre son développement.

Les données transmises à la rapporteure par la direction des affaires civiles et du sceau (DACS) du ministère de la justice confirment l'usage croissant des TGD. En 2023, 5 709 TGD28(*) ont été déployés dans toutes les juridictions et ont engendré 3 231 sollicitations des forces de l'ordre.

Selon la lettre n° 19 de l'Observatoire national des violences faites aux femmes29(*), publiée en mars 2024, 4 168 TGD étaient actifs au 1er août 2023, contre 3 210 au 1er août 2022, soit une augmentation de 30 % en un an. De façon plus significative encore, le nombre de TGD a même plus que doublé par rapport au mois de novembre 2021, lors duquel 1 969 TGD étaient actifs30(*).

2. L'article 2 bis de la proposition de loi permet au procureur de la République d'octroyer un téléphone grave danger aux bénéficiaires d'une ordonnance provisoire de protection immédiate

Telle que transmise au Sénat par l'Assemblée nationale, la proposition de loi ne modifie pas les conditions d'octroi d'un téléphone grave danger, malgré la création du nouvel outil que représente l'ordonnance provisoire de protection immédiate.

Ainsi, si la proposition de loi était adoptée en l'état, dans l'attente de la décision du juge sur la demande d'ordonnance de protection « classique », le procureur de la République ne pourrait attribuer de téléphone grave danger à la victime de violences conjugales soumise à un danger « grave et immédiat » que si l'auteur des violences est en fuite ou qu'il n'a pas pu être interpellé (cf. supra).

Afin de remédier à cette lacune d'autant plus préjudiciable que les ordonnances provisoires de protection immédiate s'adressent aux cas dans lesquels le risque de violences est considéré comme particulièrement prégnant, la rapporteure a proposé, par l'amendement COM-8, de modifier l'article 41-3-1 du code de procédure pénale en précisant que le TGD peut être accordé par le procureur de la République aux bénéficiaires des ordonnances provisoires de protection immédiate. Le deuxième alinéa du même article 41-3-1 restant inchangé, la condition selon laquelle le TGD ne peut être attribué qu'en l'absence de cohabitation entre la victime présumée et l'auteur des violences demeure cependant.

Le dispositif proposé prévoit en outre le cas, a priori rare, dans lequel une ordonnance provisoire de protection immédiate ne serait pas suivie d'une ordonnance de protection. La durée de six mois d'attribution du TGD pouvant alors, dans ce cas spécifique, paraître excessive, l'article 2 bis précise que le procureur de la République peut réduire cette durée.

La commission a jugé pertinente et opportune l'extension de la possibilité d'attribuer un TGD dans le cadre d'une ordonnance provisoire de protection immédiate, estimant que ces situations de danger « grave et immédiat » justifiaient la mise en place de moyens de protection supplémentaires.

La commission a adopté l'article 2 bis ainsi rédigé.

Article 3
Application du dispositif en Polynésie française et à Wallis-et-Futuna

L'article 3 de la proposition de loi rend applicable les dispositions de la proposition de loi en Polynésie française et à Wallis-et-Futuna, territoires régis par le principe de spécialité législative.

La commission a adopté cet article sans modification.

Conformément à l'article 74 de la Constitution, la Polynésie française, les îles Wallis-et-Futuna, la Nouvelle-Calédonie et les Terres australes et antarctiques françaises sont régies par le principe de spécialité législative. Dans ces territoires, la loi n'est applicable que si le législateur le prévoit par une mention expresse.

En conséquence, l'article 3 de la proposition de loi rend applicables les articles 1er et 2 de ladite loi en Polynésie française et à Wallis-et-Futuna.

Cette application est pertinente au regard de l'appropriation par les acteurs locaux des ordonnances de protection. D'après les données transmises à la rapporteure par la direction des affaires civiles et du sceau (DACS) du ministère de la justice, en Polynésie française, territoire de 280 000 habitants, 23 ordonnances de protection ont été délivrées en 2023 contre 19 en 202231(*). Le taux d'acceptation est particulièrement élevé puisqu'il s'élève à 95,2 % en 2023, contre 87,5 % en 202232(*), des chiffres nettement supérieurs à la moyenne nationale, qui s'est élevée à 62 % en 2023. La DACS n'a en revanche pas été en mesure de fournir à la rapporteure des données relatives à Wallis-et-Futuna.

En revanche, dans la mesure où la compétence en matière de droit civil a été transférée à la Nouvelle-Calédonie à la date effective du 1er juillet 2013, conformément à l'article 21 de la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie, l'État n'a plus aucune compétence depuis cette date pour légiférer en matière de droit de la famille en Nouvelle-Calédonie. C'est pourquoi le II de l'article 3 de la présente proposition de loi n'étend pas les dispositions du texte à la Nouvelle-Calédonie. Les TAAF sont également exclues du dispositif, compte tenu de l'absence de population permanente sur ce territoire.

Favorable à la pleine application du dispositif en Polynésie française et à Wallis-et-Futuna, la commission a adopté cet article.

La commission a adopté l'article 3 sans modification.


* 3 Cinq lois ont récemment modifié les articles 515-9 à 515-13 du code civil : la loi n° 2011-525 du 17 mai 2011 de simplification et d'amélioration de la qualité du droit, la loi n° 2014-873 du 4 août 2014 pour l'égalité réelle entre les femmes et les hommes, la loi n° 2019-1480 du 28 décembre 2019 visant à agir contre les violences au sein de la famille, la loi n° 2020-936 du 30 juillet 2020 visant à protéger les victimes de violences conjugales et la loi n° 2022-52 du 24 janvier 2022 relative à la responsabilité pénale et à la sécurité intérieure.

* 4 Cette exemption est prévue à l'article 373-2 du code civil.

* 5 Rapport n° 564 (2009 - 2010) de François Pillet, fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale sur la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, renforçant la protection des victimes et la prévention et la répression des violences faites aux femmes.

* 6 Article 515-9 du code civil.

* 7 Les chiffres sur la durée de traitement des affaires sont issus de l'Infostat Justice n° 192 de juin 2023, intitulé : « Les ordonnances de protection contre les violences conjugales : près de sept demandes sur dix accordées entre 2019 et 2021 ».

* 8 Article 515-11 du code civil.

* 9 Si durant ces trente jours, une procédure pénale est engagée, les mesures sont renouvelées pour trente jours suivant le dépôt de la plainte, temps durant lequel le magistrat doit se prononcer sur leur maintien ou leur modification.

* 10 Décret n° 2023-1077 du 23 novembre 2023 instituant des pôles spécialisés en matière de violences intrafamiliales au sein des tribunaux judiciaires et des cours d'appel.

* 11 Miprof, Lettre de l'observatoire national des violences faites aux femmes n°19, mars 2024.

* 12 SDES, Les ordonnances de protection contre les violences conjugales : près de sept demandes sur dix accordées entre 2019 et 2021, Infostat Justice n°192, juin 2023.

* 13 Entre janvier 2019 et juin 2021.

* 14 Selon les éléments transmis à la rapporteure par la DACS.

* 15 DACS, Guide pratique de l'ordonnance de protection, novembre 2021, p. 1.

* 16 Mais il est en hausse en 2023, selon les données provisoires mentionnées supra.

* 17 Miprof, Lettre de l'observatoire national des violences faites aux femmes n° 19, mars 2024.

* 18 Rapport n° 2078 (XVIe législature) d'Émilie Chandler, fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, sur la proposition de loi visant à allonger la durée de l'ordonnance de protection et à créer l'ordonnance provisoire de protection immédiate.

* 19 Rapport d'Emilie Chandler, députée, et de Dominique Vérien, sénatrice, intitulé : « Plan rouge VIF : améliorer le traitement judiciaire des violences intrafamiliales », publié en mai 2023.

* 20 En application de l'article 7 de la loi n° 2016-1048 du 1er août 2016 rénovant les modalités d'inscription sur les listes électorales.

* 21 Conseil d'État, 7 février 2001, Commune de Pointe-à-Pitre (nos 229991et 229922).

* 22 Article L. 311-1 du code des relations entre le public et l'administration.

* 23 Sous réserve de l'adoption définitive des modifications apportées à l'article 1er, que la commission a complété pour permettre au juge aux affaires familiales, dans le cadre des ordonnances provisoires de protection immédiate, d'autoriser la victime présumée à dissimuler son adresse à l'auteur des violences.

* 24 Rapport n° 564 (2009 - 2010) de François Pillet, fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale sur la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, renforçant la protection des victimes et la prévention et la répression des violences faites aux femmes.

* 25 D'après les données issues de la lettre n° 19 (mars 2024) de l'Observatoire national des violences faites aux femmes.

* 26 Rapport n° 807 (2012-2013) de Virginie Klès, fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale sur le projet de loi pour l'égalité entre les femmes et les hommes, déposé le 24 juillet 2013.

* 27 Les TGD représentent un coût annuel de huit millions d'euros pour le ministère de la justice, d'après les informations transmises à la rapporteure par le service de l'accès au droit et à la justice et de l'aide aux victimes (SAJDAV).

* 28 Ce chiffre correspond au nombre total de TGD ayant été en activité au cours de l'année 2023. Il ne s'agit pas du nombre de TGD actifs à une date précise.

* 29 Miprof, Lettre de l'observatoire national des violences faites aux femmes n° 19, mars 2024.

* 30 Miprof, Lettre de l'observatoire national des violences faites aux femmes n° 18, novembre 2022.

* 31 Pour l'année 2023, il s'agit de données provisoires.

* 32 Idem.

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