Projet de loi Financement de la sécurité sociale pour 2025
Direction de la Séance
N°1063
15 novembre 2024
(1ère lecture)
(n° 129 , 138 , 130)
AMENDEMENT
C | |
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G |
présenté par
Mmes Mélanie VOGEL, OLLIVIER, SOUYRIS et PONCET MONGE, MM. BENARROCHE, Grégory BLANC et DANTEC, Mme de MARCO, MM. DOSSUS, FERNIQUE et GONTARD, Mme GUHL, MM. JADOT, MELLOULI et SALMON et Mme SENÉE
Article 14
(Annexe)
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Alinéa 19
Compléter cet alinéa par les mots :
ainsi que, le cas échéant, des versements de l’allocation journalière de proche aidant aux travailleuses et travailleurs qui résident en France, mais qui aident un proche résidant sur le territoire d’un autre État membre de l’UE et qui sont éligibles à cette allocation conformément à la législation de cet État membre
Objet
Par le biais du présent amendement, le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires souhaite souligner que les proches aidants qui aident leurs proches dans un autre État membre de l’UE devraient bénéficier de l’allocation journalière de proche aidant alors que cette allocation est actuellement strictement réservée aux seules personnes s’occupant d’un proche résidant en France.
Allocation de compensation pour les bénéficiaires du congé de proche aidant, l’allocation journalière du proche aidant (Ajpa) a vocation à soutenir financièrement les travailleuses et travailleurs qui réduisent leur activité professionnelle ou y renoncent temporairement afin de s’occuper d’un proche en situation de handicap ou en perte d’autonomie. Alors que cette allocation est indispensable pour compenser les pertes de salaire qui résultent de ce travail du care, notre législation interdit aujourd’hui qu’elle soit versée à une personne résidant et travaillant en France, mais aidant un proche à l’étranger. Cette restriction concerne notamment les travailleuses et travailleurs qui habitent dans les régions frontalières.
En effet, l’article L. 168-8 du code de la sécurité sociale prévoit que l’allocation soit versée aux bénéficiaires du congé de proche aidant, mais ce congé ne peut être accordé que si la personne aidée réside « de façon stable et régulière » sur le territoire, conformément à l’article L. 3142-17 du code du travail.
Dans son arrêt dans l’affaire n° C-116/23 du 11 avril 2024, la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) était amenée à statuer sur l’octroi d’une allocation de congé de proche aidant à un travailleur aidant un proche établi dans un autre État membre que celui où il résidait et travaillait. La CJUE a constaté que des restrictions empêchant les travailleuses et travailleurs aidant une ou un proche résidant ailleurs dans l’UE relèvent d’une « discrimination indirecte ». Ces restrictions à l’accès à l’allocation ne sauraient être justifiées que si elle était nécessaire pour éviter « une atteinte grave à l’équilibre financier du régime de sécurité sociale ».
Or, le tribunal luxembourgeois n’a pas souhaité vérifier si des restrictions empêchant les travailleuses et travailleurs aidant une ou un proche ailleurs dans l’UE de bénéficier d’une allocation de congé de proche aidant demandé conformément à la législation d’un autre État membre étaient autorisées. À la place, il a renvoyé cette question aux juridictions du pays qui lui avaient adressé la question préjudicielle.
Dans ce contexte, force est de constater que la restriction arbitraire et particulièrement sévère dans notre droit pourrait s’avérer contraire au droit de l’UE, car elle constitue une discrimination largement disproportionnée au seul objectif d’éviter des dépenses trop importantes pour la Sécurité sociale. Aussi, une telle restriction viole le principe de l’assimilation des prestations au sein de l’UE selon lequel « si, en vertu de la législation de l’État membre compétent, le bénéfice de prestations de sécurité sociale ou d’autres revenus produit certains effets juridiques, les dispositions en cause de cette législation sont également applicables en cas de bénéfice de prestations équivalentes acquises en vertu de la législation d’un autre État membre ou de revenus acquis dans un autre État membre » (arrêt de la CJUE du 5 décembre 2019 dans les affaires jointes nos C-398/18 et C-428/18).
Cette restriction aux conditions de versement de l'Ajpa qui pénalise lourdement les proches aidants transfrontières devrait être abolie afin de reconnaître la situation difficile des proches aidants transfrontières. L’allègement de ces restrictions permettrait de leur proposer une compensation financière essentielle. L'allocation devrait au moins être versée aux travailleuses et travailleurs résidant en France qui s'occupent d'une ou d'un proche résidant dans un autre État membre de l'UE et qui pourraient prétendre à une allocation en vertu du droit interne de cet autre État membre.
Tel est l’objet du présent amendement du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires.