Projet de loi PLFRSS pour 2023
Direction de la Séance
N°106 rect. quater
10 mars 2023
(1ère lecture)
(n° 368 , 375 , 373)
AMENDEMENT
C | Défavorable |
---|---|
G | Défavorable |
Rejeté - vote unique |
présenté par
Mmes MALET et DINDAR, MM. MOUILLER et BASCHER, Mmes Marie MERCIER et BELRHITI, M. PACCAUD, Mmes MULLER-BRONN, PETRUS, JACQUES et BILLON, M. PELLEVAT, Mme LASSARADE, MM. FAVREAU et GENET, Mme GUIDEZ et MM. Daniel LAURENT, CHARON, FRASSA, LAGOURGUE et DENNEMONT
ARTICLE 10
Consulter le texte de l'article ^
Alinéa 13
I. – Rédiger ainsi cet alinéa :
b) À la fin de la seconde phrase, les mots : « 100 000 euros jusqu’au 31 décembre 2026 » sont remplacés par le montant : « 150 000 euros ».
II – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
Objet
La loi du 28 février 2017 relative à l’égalité réelle dans les outre-mer a porté le seuil du relèvement du seuil de récupération sur succession, de 39 000 à 100 000 euros dans les collectivités régies par l’article 73 de la constitution. Ce relèvement, qui prendra fin le 1er janvier 2027, devait réduire le non-recours à l’Allocation de Solidarité aux Personnes Agées dans les outre-mer. Cinq ans après son adoption, force est de constater que cette modification n’a pas eu l’effet escompté.
A La Réunion, l’observatoire des transactions foncières relève qu’en 2021, le prix médian des ventes de maison par microrégion se situe au plus bas à 115 000 euros. Ce qui signifie qu’un actif net en héritage qui, dans les familles les plus modestes, n’est généralement constitué que du seul patrimoine habitable partagé, pourrait être vendu s’il y avait remboursement des sommes perçues au titre de l’ASPA Ce non recours à l’ASPA a été signalé dans les observations de la chambre régionale des comptes sur la gestion du RSA, avant sa recentralisation au 1er janvier 2020.
En réponse, le Département s’est engagé dans une action volontariste visant à accompagner les personnes âgées de plus de 62 ans vers les droits à la retraite et l’allocation de solidarité aux personnes âgées. Cet accompagnement est d’autant plus justifié qu’en choisissant de rester au RSA, les personnes âgées de plus de 65 ans pénalisent sensiblement leur revenu, le montant de l’ASPA étant largement supérieur à celui du RSA.
A titre d’exemple, les montants 2022, perçus pour une personne seule sont les suivants : 575,22 euros par mois pour le RSA et 976,78 euros par mois pour l’ASPA.
Le bilan des accompagnements engagés confirme la difficulté à les orienter vers leurs droits. La raison invoquée réside principalement dans les dispositions de l’article L815-13 du code de la sécurité sociale qui prévoient que les sommes versées au titre de l’ASPA peuvent être récupérées après le décès du bénéficiaire sur la succession.
La conséquence directe de ce non recours est un maintien dans la précarité et les seniors ne sont pas épargnés par la pauvreté : La Réunion compte 100 000 personnes âgées de + de 65 ans et le taux de pauvreté y est de 38 %. Il peut donc être considéré que dans cette tranche d’âge, environ 38 000 personnes sont éligibles à l’ASPA. Or en 2020, les bénéficiaires de cette allocation ne sont que 25 000.
Dans un contexte où près de 40 % des ménages pauvres sont propriétaires occupants non accédant, contre 25 % en métropole et où les solidarités intergénérationnelles sont essentielles pour garantir la cohésion sociale, le risque de récupération sur succession des sommes versées dissuade la personne âgée de solliciter l’ASPA. Ces ménages aux revenus limités, sont deux fois plus nombreux qu’en métropole, à être devenus propriétaire par héritage ou transmission. Pour autant, leurs descendants restent parmi les ménages les plus pauvres et la famille ne prend pas le risque de gager le capital immobilier familial. Cette solidarité intergénérationnelle fait partie des fondamentaux de la société créole ; dans un territoire où le taux de chômage est chroniquement au-dessus des 18 % et dont le taux d’emploi des jeunes est un des plus faibles de France.
Dans beaucoup de familles pauvres, la personne âgée contribue au fonctionnement familial par l’apport de la propriété du logement et les enfants l’accompagne au moment de sa perte d’autonomie. Cet accompagnement à domicile porté par des proches aidants est essentiel. Il vient en complément des politiques publiques de solidarité et il participe aux solutions de recours face au manque criant de structures d’accueil et d’hébergement pour les personnes âgées dépendantes.
Aussi, ce capital immobilier représente la seule « richesse économique » partagée de la famille.
Le principe de récupération de l’Allocation de Solidarité aux Personnes Agées sur l’actif net au moment de la succession constitue donc pour ces ménages, un frein insurmontable.
Face au constat du niveau de ressources dramatiquement bas des personnes âgées les plus pauvres, à La Réunion et plus largement dans les Outre-mer, situation encore une fois soulignée par l’INSEE, dans sa dernière étude, il est proposé de relever le seuil de récupération de l ‘ASPA et de supprimer l’échéance de 2026.
Tel est l’objet de l’amendement qui s’inscrit en cohérence avec la mesure d’assouplissement proposée dans le présent PLFRSS