Projet de loi Confiance dans l'institution judiciaire (PJL)

Direction de la Séance

N°198

23 septembre 2021

(1ère lecture)

(PROCÉDURE ACCÉLÉRÉE)

(n° 835 , 834 )


AMENDEMENT

C Favorable
G  
Adopté

présenté par

Le Gouvernement


ARTICLE 6

Consulter le texte de l'article ^

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

.... – Les dispositions des articles 622 à 626-1 du code de procédure pénale sont applicables aux condamnations prononcées par une cour d’assises sous l’empire du code d’instruction criminelle, lorsque la culpabilité de la personne est résultée d’aveux obtenus par l’usage de la torture.

Objet

Les dispositions du chapitre III du projet de loi, et notamment celles de son article 6, améliorent la procédure de jugement des crimes, et elles sont ainsi de nature à éviter que ne puissent être condamnées des accusés qui seraient en réalité innocents des faits qui leur sont reprochés.

Ces dispositions ne seront cependant applicables qu’aux crimes jugées après l’entrée en vigueur de la réforme, et certains procès criminels intervenus dans le passé ont pu faire l’objet, et continuent de faire l’objet, d’importantes critiques en raison de l’existence de doutes sérieux sur la culpabilité des personnes ayant été condamnées, spécialement lorsque la condamnation résulte d’aveux obtenu par l’usage de la torture, comme cela a été le cas dans l’affaire Mis et Thiennot.  

Il ne paraît cependant pas possible d’élargir de façon générale les possibilités de saisir la Cour de révision et de réexamen d’une demande en révision d’une décision pénale définitive au bénéfice de toute personne dont la culpabilité résulterait d’aveux obtenus sous la torture, comme cela a été envisagé par un amendement déposé  à l’Assemblée nationale.

En effet, si des aveux ont été obtenus par la torture, ils seront nécessairement annulés, et ne pourront donc donner lieu à une condamnation. Si par extraordinaire cela n'aura pas été le cas, ils permettront une condamnation de la France par la Cour de Strasbourg pour procédure inéquitable, et pourront donc alors donner lieu à une requête en réexamen, du fait de la condamnation de la France. Enfin, si, de façon encore plus extraordinaire, l'existence de torture pour obtenir des aveux était révélée après la condamnation, ces faits nouveaux justifieraient une requête en révision. 

Une telle réforme donnerait donc à tort l'impression que notre droit permet actuellement de condamner des personnes après avoir obtenu leurs aveux par la torture, ce qui est évidemment inexact, et constituerait une mise en cause difficilement admissible de l'action de police judiciaire des forces de la police et de la gendarmerie nationales.

En revanche, il est souhaitable de permettre, de façon plus ciblée, une possibilité de révision dans le cas de procédures anciennes, intervenues sous l’empire du code d’instruction criminelle, avant que la garde à vue ne soit, en 1960, consacrée, réglementée et encadrée par le code de procédure pénale, de façon de plus en plus protectrice des droits de la défense et de la protection de la dignité et de l’intégrité de la personne au fur et à mesure des réformes successives.

Une telle possibilité ne concernerait donc que des dossiers datant d’avant la création de ces garanties et pourrait ainsi s’appliquer à l’affaire Mis et Thiennot - atteignant ainsi l'objectif initialement poursuivi par l'amendement du député François Jolivet -, dans laquelle les aveux des deux suspects avaient été obtenus sous la torture, après plus d’une semaine d’interrogatoires par les enquêteurs, alors même que la garde à vue n’était pas encore reconnue et limitée par la loi.

Tel est l’objet du présent amendement, qui est ainsi de même nature que les dispositions adoptées par le Sénat dans la loi du 20 décembre 2020 relative au parquet européen, qui ont permis une procédure sui-generis de réhabilitation pour les personnes ayant été condamnées à mort, procédure qui ne peut donc par définition que s’appliquer à des dossiers dans lesquels la peine de mort a été prononcée et exécutée.