Projet de loi Prorogation de l'état d'urgence sanitaire
Direction de la Séance
N°67
29 octobre 2020
(1ère lecture)
(PROCÉDURE ACCÉLÉRÉE)
(n° 79 , 78 )
AMENDEMENT
C | Défavorable |
---|---|
G | Défavorable |
Rejeté |
présenté par
M. KERROUCHE, Mme de LA GONTRIE, MM. DURAIN, KANNER et BOURGI, Mme HARRIBEY, MM. LECONTE, MARIE, SUEUR
et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain
ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS ARTICLE 11
Après l'article 11
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après la section 3 du chapitre VI du titre Ier du livre Ier du code électoral, est insérée une section ainsi rédigée :
« Section...
« Vote par correspondance
« Art. L. .... – Lorsque l’état d’urgence sanitaire prévu à l’article L. 3131-12 du code de la santé publique est déclaré, ou lorsqu'un régime transitoire de sortie d'état d'urgence sanitaire défini à l’article 1er de la loi n° 2020-856 du 9 juillet 2020 organisant la sortie de l’état d’urgence est mis en place, par dérogation à l’article L. 54 du présent code, les électeurs votent soit dans les bureaux ouverts, soit par correspondance sous pli fermé, dans des conditions permettant d’assurer le secret du vote et la sincérité du scrutin.
« Le droit de vote par correspondance résultant du premier alinéa du présent article demeure valable jusqu'au terme du scrutin électoral concerné.
« Un décret en Conseil d’État fixe les modalités d’application du vote par correspondance. »
Objet
Le dernier scrutin municipal s’est déroulé dans les conditions de crise sanitaire engendrées par l’épidémie de Covid-19. Plusieurs mesures ont été envisagées pour faciliter son déroulement après le report du second tour, notamment la possibilité de double procuration qui avaient été proposée par la proposition de loi « tendant à sécuriser l’établissement des procurations électorales et l’organisation du second tour des élections municipales de juin 2020 » n°93 (Sénat).
A l’occasion de l’examen de cette proposition de loi, un dispositif visant à instaurer un vote par correspondance avait également été adopté par le Sénat. Il n’avait pas pu prospérer au motif que les conditions n’étaient pas réunies pour sécuriser cette nouvelle modalité de vote dans les délais impartis.
Cette justification, qui pouvait apparaître légitime, ne peut pas expliquer l’absence de réflexion sur ce sujet dans la perspective des prochains scrutins électoraux de 2021, voire de 2022.
Le contexte sanitaire du Coronavirus ne constitue désormais plus un fait conjoncturel, mais bel et bien structurel. Il convient de le prendre en considération comme tel, ainsi que l’exécutif nous y invite régulièrement en déclarant qu’« il faut apprendre à vivre avec le virus. » L’imprévisibilité et l’impréparation ne sont désormais plus des arguments recevables.
A ce sujet, lors de l’examen de l’amendement KERROUCHE n°3 au projet de loi « visant à sécuriser l’organisation du second tour des élections municipales », le ministre de l’intérieur d’alors, M. Christophe CASTANER avait lui-même déclaré : "Nous ne sommes plus en 1975, à l’époque où le législateur a décidé de supprimer cette procédure de vote. Nous pourrions parfaitement y travailler, d’un point de vue juridique et technique ; il faut en étudier les conditions. (...) j’organiserai volontiers un temps de travail sur ce sujet avec les présidents de commission ou avec leurs représentants et je m’engage à mobiliser tous les moyens techniques et juridiques du ministère pour éclairer les travaux qui pourraient être conduits."
Pour mémoire, le taux d’abstention a atteint 58,4% au second tour des élections municipales de 2020, soit 20 points de plus qu’au second tour de 2014, qui marquait d’ores et déjà un record.
Quand bien même le taux d’abstention s’explique par de multiples facteurs, un risque d’abstention lié aux conditions sanitaires ne peut être écarté et doit pouvoir être anticipé dans des délais acceptables. C’est tout à la fois une exigence démocratique, mais également un enjeu de légitimité politique pour les élus.
C’est pourquoi, afin de pouvoir assurer une continuité démocratique et garantir le respect des principes démocratiques lors des prochains scrutins électoraux, cet amendement propose d’instaurer un vote par correspondance, sous pli fermé, qui garantirait le secret du vote et la sincérité du scrutin en période d’état d’urgence sanitaire ou de sortie d’état d’urgence sanitaire. Le dispositif proposé prévoit également que la fin d’une de ces périodes au cours du processus électoral ne peut rendre caduc le droit de vote par correspondance pour le scrutin concerné.
De nombreuses démocraties pratiquent le vote par correspondance : 50 millions d’électeurs ont déjà voté en utilisant cette modalité pour le scrutin présidentiel des États-Unis de 2020. Pourquoi la France, qui le pratique notamment pour les français de l’étranger, serait-elle incapable d’en faire de même?