Proposition de loi Procurations électorales
Direction de la Séance
N°21 rect. bis
2 juin 2020
(1ère lecture)
(n° 468 , 467 )
AMENDEMENT
C | Favorable |
---|---|
G | Défavorable |
Adopté |
présenté par
MM. KERROUCHE, KANNER et SUEUR, Mme HARRIBEY, MM. Jacques BIGOT, DURAIN et Patrice JOLY, Mme GUILLEMOT, MM. ANTISTE et COURTEAU, Mmes GRELET-CERTENAIS, ARTIGALAS et LEPAGE, MM. TISSOT, FICHET, BÉRIT-DÉBAT et MONTAUGÉ, Mme BLONDIN et MM. MAZUIR, MANABLE, DAUDIGNY, VAUGRENARD, MARIE et GILLÉ
ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS ARTICLE 1ER TER
Après l'article 1er ter
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I.- Les électeurs votent soit dans les bureaux ouverts, soit par correspondance sous pli fermé, dans des conditions permettant d’assurer le secret du vote et la sincérité du scrutin.
II.- Le vote par correspondance est organisé dans les conditions fixées au présent II.
Le matériel de vote par correspondance est adressé aux électeurs au plus tard le deuxième mercredi qui précède le scrutin. Il comporte trois enveloppes : une enveloppe d'expédition, une enveloppe d'identification et une enveloppe électorale.
Afin de permettre le contrôle de son identité, l'électeur signe l’enveloppe d’identification. Il y insère une copie d’une pièce d’identité ainsi qu’un justificatif de domicile.
Son pli peut être transmis au tribunal d’instance par voie postale ou par les autorités compétentes pour établir les procurations.
Dans l’attente du scrutin, les plis sont conservés dans un lieu sécurisé du tribunal d’instance. Le greffier en chef tient un registre du vote par correspondance, un numéro d’ordre étant apposé sur chaque pli. Tout électeur et tout candidat, ou son représentant, peut consulter le registre et y consigner leurs observations relatives aux opérations du vote par correspondance.
Le jour du scrutin, les plis sont acheminés jusqu’au bureau de vote par les autorités compétentes pour établir les procurations.
À la clôture du bureau de vote, son président et ses assesseurs indiquent le numéro du pli sur la liste d’émargement et introduisent l’enveloppe contenant le bulletin de vote dans l’urne, après s’être assurés que l’électeur concerné n’a pas déjà voté.
À l'issue du scrutin, les enveloppes d'identification et leur contenu sont conservés jusqu’à l’expiration du délai de recours contentieux. Les plis parvenus après la clôture du scrutin ne sont pas ouverts et sont détruits.
III.- Toute manœuvre frauduleuse ayant pour but d'enfreindre les dispositions du présent article est punie d'un emprisonnement de deux ans et d'une amende de 15 000 euros.
Objet
Le second tour des élections municipales se tiendra le 28 juin 2020, sous réserve d’une « clause de revoyure ». Cette décision répond à une demande de continuité démocratique malgré la présence du coronavirus, au souhait de clore cette opération électorale brutalement interrompue par l’épidémie de Covid - 19 et à la nécessité de conférer une stabilité aux exécutifs municipaux et communautaires pour la mise en place de politiques publiques de relance, en actionnant le levier de la commande publique.
Pour autant, l’impératif putatif du parachèvement de ce scrutin, ne doit pas faire oublier un principe démocratique prenant sa source à l’article 3 de la Constitution de la Ve République et qui confère leur légitimité aux élus : la sincérité du scrutin, qui implique une égalité devant le scrutin. Au-delà de cette exigence démocratique, l’amoindrissement de la légitimité à agir des élus n’est jamais souhaitable : dans le meilleur des cas, elle favorise l’immobilisme ; dans le pire des cas, elle produit une instabilité institutionnelle pouvant éventuellement conduire à une élection partielle pour de mauvaises raisons.
En effet, même si le constat n’est pas uniforme dans toutes les communes, le premier tour, intervenu dans des circonstances particulières, a été marqué par une abstention record : elle a été en baisse de 20 points par rapport à 2014 lors du premier tour.
L’effet du Covid - 19 à cet endroit a pu être mis en lumière par des enquêtes électorales. Ainsi, la vague d'enquête Ipsos-CEVIPOF réalisée les 16 et 17 mars 2020 souligne que « 57 % des répondants n'ayant pas participé au scrutin du 15 mars 2020 indiquaient ne pas avoir souhaité se rendre dans un bureau de vote à cause du coronavirus (dont la moitié pour cet unique motif) ». En outre, « la proportion d'abstentionnistes invoquant le coronavirus croît avec l'âge : de 32 % parmi les 18 - 24 ans à 67 % parmi les plus de 65 ans. Enfin, alors que 48 % des abstentionnistes des communes rurales invoquent le coronavirus, ils sont 69 % dans les communes urbaines. »
Compte tenu des conditions sanitaires et des craintes légitimes des Français, le risque d’une abstention massive est réel. L'enquête du CEVIPOF effectuée entre le 22 et le 24 mai indique que 64% des répondants sont favorables au report des élections.
Il peut par ailleurs être souligné que si des solutions de substitution existent dans le droit en droit en vigueur - comme le vote par procuration - elles ne répondent pas complètement à la problématique spécifique engendrée par une crise sanitaire de l’ampleur de celle du Covid-19.
C'est pourquoi, afin de pouvoir garantir le respect des principes démocratiques lors du prochain scrutin municipal du 28 juin, cet amendement propose d'instaurer un vote par correspondance, sous pli fermé, qui garantirait le secret du vote et la sincérité du scrutin en période d'état d'urgence sanitaire. Il apporte des précisions sur les modalités de mise en œuvre du vote par correspondance proposé par l'amendement 20.
Cette solution dérogatoire, limitée au cas d'urgence sanitaire, se veut pragmatique et adaptée à la période exceptionnelle que nous traversons.
La France ne serait pas le premier pays à le mettre en œuvre : des élections ont été organisées en Bavière à la même période, alors qu'il s'agissait d'une des régions les plus touchées par l'épidémie de covid-19 et le taux de participation a augmenté par rapport au scrutin de 2014. Le second tour a d'ailleurs été organisé exclusivement par voie postale. Cinq États des États-Unis votent également par correspondance.
Seule cette solution permettrait au maximum de citoyens de participer au scrutin, sans risque sanitaire ni pour eux, ni pour les élus, personnels et bénévoles en charge des bureaux de vote. Le vote postal permet donc de s'adapter à une crise sanitaire comparable, en conjuguant participation, sincérité et sécurité sanitaire du scrutin dans un contexte exceptionnel.
NB :La présente rectification porte sur la liste des signataires.