Projet de loi PLF pour 2020
Direction de la Séance
N°I-48 rect. ter
22 novembre 2019
(1ère lecture)
PREMIÈRE PARTIE
(n° 139 , 140 , 141, 142, 143, 144, 145, 146)
AMENDEMENT
C | Défavorable |
---|---|
G | Défavorable |
Rejeté |
présenté par
M. Daniel LAURENT, Mmes IMBERT, MICOULEAU et CHAIN-LARCHÉ, M. CHATILLON, Mmes LASSARADE, TROENDLÉ et THOMAS, MM. BONHOMME, CAMBON et BRISSON, Mme BRUGUIÈRE, MM. Bernard FOURNIER et DALLIER, Mmes Laure DARCOS et DUMAS, MM. DÉTRAIGNE, BABARY, LEFÈVRE, CHARON et LONGEOT, Mme LOISIER, MM. LONGUET, SAVARY, GINESTA et GENEST, Mme GRUNY, MM. GREMILLET et VIAL, Mmes RAIMOND-PAVERO et DEROMEDI, MM. BOUCHET et LAMÉNIE, Mme LAMURE, MM. SIDO et CUYPERS, Mme FÉRAT, MM. BONNE, FOUCHÉ et POINTEREAU, Mme BERTHET et M. de NICOLAY
ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS ARTICLE 5 TER
Après l'article 5 ter
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le code général des impôts est ainsi modifié :
1° Au II de l’article 1028 ter du code général des impôts, le mot : « six » est remplacé par le mot : « douze » ;
2° Après l’article 1028 quater, il est inséré un article 1028 … ainsi rédigé :
« Art. 1028.… – I. – Les opérations réalisées par les sociétés d’aménagement foncier et d’établissement rural, ainsi que celles effectuées à leur profit ou réalisées par une personne substituée dans leurs droits, portant sur tout ou partie des actifs d’une société afférents à des biens ou droits mentionnés à l’article L. 143-1 du code rural et de la pêche maritime, ne sont pas soumises au régime fiscal des plus et moins-values professionnelles qui leur serait normalement applicable, dès lors que ces opérations sont mises en œuvre pour des motifs qui se rattachent exclusivement à leur mission prévue au 1° du I de l’article L. 141-1 du même code.
« II. – Le I n’est applicable que si le ou les bénéficiaires des opérations précitées sont dépourvus de lien capitalistique ou d’affiliation avec les membres de la société dont les actifs sont cédés. »
II – Au 2° du II de l’article L. 141-1 du code rural et de la pêche maritime, le mot : « six » est remplacé par le mot : « douze ».
III. – La perte de recettes résultant pour l’État des I et II est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Objet
Les sociétés exploitent désormais en France près des deux tiers de la surface agricole utile et le marché sociétaire représente l’équivalent du cinquième de la valeur du marché foncier.
Cet amendement consiste à mettre en place un régime fiscal de faveur pour permettre aux sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural d’intervenir sur ce marché sociétaire, soit pour acquérir, dans le but de les rétrocéder, par cession ou par substitution, des actifs d’une société qui portent sur des droits ou des biens mobiliers ou immobiliers à usage ou à vocation agricole, soit pour ventiler, dans le but de les rétrocéder, les mêmes actifs précités appartenant à des sociétés dont elles ont pu acquérir tout ou partie des parts à l’amiable ou par l’exercice de leur droit de préemption mentionné au 8° de l’article L. 143-1 du code rural et de la pêche maritime.
Ce régime fiscal de faveur consiste à ne pas soumettre les opérations précitées au régime fiscal des plus et moins-values professionnelles lorsqu’elles ont pour objet exclusif de satisfaire la mission agricole prévue au 1° du I de l’article L. 141-1 du code rural et de la pêche maritime (notamment, l'installation, le maintien et la consolidation d'exploitations agricoles).
Il permettra, à n’en pas douter, de remettre sur le marché des terres agricoles, et non plus des parts de société, à des prix pratiqués dans la région pour des immeubles de même ordre, sans faire subir aux attributaires desdites terres le poids de la fiscalité liée à l’application du régime fiscal des plus et moins-values professionnelles qui serait normalement applicable, notamment en cas de retrait partiel ou total d’actifs ou en cas de dissolution d’une société.
A titre d’exemple, une étude fiscale a été engagée en 2016 par une Safer avec les partenaires locaux pour envisager un démembrement d’une société agricole qu’elle a pu acquérir à l’amiable (exploitation de 750 hectares pour un montant de plus de 23 millions d’euros) et permettre de répondre à plusieurs projets agricoles et à plusieurs sollicitations en matière de compensation d’emprises foncières sur l’Agglomération de Compiègne, l’agglomération de Creil mais aussi avec les Voies Navigables de France pour l’opération Seine Nord Europe. Malheureusement, cette opération n’a pu aboutir du fait des incidences financières fiscales très importantes de plusieurs millions d’euros liées à la fiscalité des plus-values. Au final, la Safer a revendu cette exploitation à un unique attributaire.
Dans un contexte où se développent des entreprises aussi importantes (en surface et en valeur) que complexes (en termes d’organisation et de gouvernance), cette mesure fiscale permettra de libérer les terres des structures sociétaires et, conformément aux objectifs de la politique en faveur de l’agriculture (art. L. 1 du code précité), de faciliter l’accès au foncier agricole et de favoriser la transmission des exploitations et l’installation des jeunes agriculteurs. Aussi, pour y parvenir, les sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural doivent pouvoir disposer d’un délai plus long (douze mois au lieu de six) pour éventuellement se substituer à un ou plusieurs attributaires. Ce nouveau délai leur permettra notamment de mieux maîtriser le foncier, de rechercher les meilleurs projets sur le territoire concerné et d’accompagner les attributaires dans leur projet et leur plan de financement. Le vendeur de son côté augmente ses chances de trouver un acquéreur solvable et capable d’assurer la mise en valeur des biens en cause pendant au moins toute la durée du cahier des charges (10 ans au moins et 30 ans au plus).
La mesure proposée par cet amendement représente davantage un manque à gagner qu’une perte de recette pour l’Etat, dans la mesure où ameublie, la terre devient aujourd’hui un droit de créance dont les transferts interviennent généralement, pour les sociétés agricoles, avec une fiscalité réduite (droit fixe d’enregistrement de 125 euros, en application de l’article 730 bis du code général des impôts), qui ne tient pas compte des plus-values latentes. La tendance est de fait à la non-dissolution de ces sociétés, qui sont transmises d’un bloc et ne peuvent donc être acquises que par de rares structures, elles-mêmes de grande complexité et exploitant des surfaces très importantes (par exemple, en septembre dernier, une Safer a été notifiée d’une cession partielle de parts de SCEA à une société d’investissement pour un montant de plus de 16 millions d’euros avec des actifs représentant plus de 650 hectares de terres agricoles). Ces actifs restant au bilan de la société et n’étant ainsi jamais revalorisés, l’Etat ne perçoit aucune taxe sur les plus-values.
L'intervention des Safer sur le marché sociétaire représentait en 2018 environ 23 millions d’euros. Si on estime (source Ministère de l’Agriculture) que le foncier représente 65 % de l’actif total d’une exploitation, et que la plus-value moyenne sur ces actifs est de 10 %, le manque à gagner pour l’Etat serait inférieure à 500 000 euros.
Tel l'objet du présent amendement.
NB :La rectification consiste en un changement de place (d'un article additionnel après l'article 6 vers un article additionnel après l'article 5 ter).