Sommaire
Présidence de M. Gérard Larcher
Secrétaires :
Mme Corinne Bouchoux, M. Jean-Paul Émorine.
2. Modification de l'ordre du jour
3. Cessation du mandat et remplacement d'un sénateur
4. Candidatures à une commission
5. Communications du Conseil constitutionnel
6. Questions d'actualité au Gouvernement
M. Pierre Frogier ; M. Édouard Philippe, Premier ministre.
Mme Hermeline Malherbe ; M. Gérard Collomb, ministre d'État, ministre de l'intérieur.
situation ferroviaire à la sncf
M. Jean-Jacques Filleul ; M. Édouard Philippe, Premier ministre.
Mme Laurence Cohen ; M. Gérard Collomb, ministre d'État, ministre de l'intérieur ; Mme Laurence Cohen.
aides personnalisées au logement
M. Yannick Vaugrenard ; M. Jacques Mézard, ministre de la cohésion des territoires.
impact des nouvelles sanctions américaines contre la russie
M. Yves Pozzo di Borgo ; Mme Nathalie Loiseau, ministre auprès du ministre de l’Europe et des affaires étrangères, chargée des affaires européennes.
couverture du territoire en fibre optique
M. Patrick Chaize ; M. Mounir Mahjoubi, secrétaire d’État auprès du Premier ministre, chargé du numérique.
dotations à destination des collectivités territoriales
Mme Frédérique Espagnac ; M. Gérald Darmanin, ministre de l’action et des comptes publics.
dotation d'équipement des territoires ruraux
Mme Anne Chain-Larché ; Mme Jacqueline Gourault, ministre auprès du ministre d'État, ministre de l'intérieur ; Mme Anne Chain-Larché.
organisation des jeux olympiques
M. Gilbert Roger ; Mme Laura Flessel, ministre des sports.
7. Hommage au secrétaire général du Sénat
8. Nominations de membres d'une commission
compte rendu intégral
Présidence de M. Gérard Larcher
Secrétaires :
Mme Corinne Bouchoux,
M. Jean-Paul Émorine.
1
Procès-verbal
M. le président. Le compte rendu intégral de la séance du jeudi 27 juillet 2017 a été publié sur le site internet du Sénat.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté.
2
Modification de l'ordre du jour
M. le président. Monsieur le Premier ministre, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, avant de commencer notre séance de questions d’actualité au Gouvernement, je voudrais rappeler que la commission mixte paritaire sur le projet de loi d’habilitation à prendre par ordonnances les mesures pour le renforcement du dialogue social a pu aboutir à un accord.
En outre, ce matin, la commission mixte paritaire chargée d’élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi pour la confiance dans la vie politique est parvenue à l’adoption d’un texte commun. En revanche, il n’a pas été possible d’aboutir à un texte commun sur le projet de loi organique.
Mes chers collègues, notez bien dans vos agendas que nous examinerons demain, mercredi 2 août, à seize heures, les conclusions des deux commissions mixtes paritaires qui ont abouti à un accord.
Pour le projet de loi organique, le Gouvernement a décidé une nouvelle lecture. Cette lecture, sur proposition de la commission, avec l’accord du Gouvernement et, j’insiste sur ce point, de tous les groupes politiques, aura lieu vendredi 4 août, à quinze heures et, éventuellement, le soir. (Murmures sur un grand nombre de travées.) Mes chers collègues, cette solution nous évitera une semaine complémentaire de session.
M. Bernard Saugey. Très bien !
M. le président. Il n’y a pas d’opposition sur ce calendrier ?…
En vertu de cette large consultation démocratique (Sourires.), il en est ainsi décidé.
En conséquence, le délai limite de dépôt des amendements de séance sur le projet de loi organique pour la confiance dans la vie politique pourrait être fixé à l’ouverture de la discussion générale. La durée de la discussion générale serait fixée à une heure.
Il n’y a pas d’opposition ?…
Il en est ainsi décidé.
3
Cessation du mandat et remplacement d'un sénateur
M. le président. Par décision du 28 juillet 2017, le Conseil constitutionnel a rejeté la contestation dirigée contre l’élection à l’Assemblée nationale, à la suite du scrutin du 18 juin 2017, de M. Luc Carvounas comme député de la neuvième circonscription du Val-de-Marne.
En conséquence, conformément à l’article LO 137 du code électoral, M. Luc Carvounas a cessé d’appartenir au Sénat.
Par lettre en date du 28 juillet 2017, M. le ministre d’État, ministre de l’intérieur m’a fait connaître qu’en application des articles LO 137 et LO 320 du code électoral, M. Laurent Dutheil est appelé à remplacer, en qualité de sénateur du Val-de-Marne, M. Luc Carvounas à la suite de la décision du Conseil constitutionnel confirmant son élection à l’Assemblée nationale. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
Le mandat de M. Laurent Dutheil a commencé samedi 29 juillet 2017, à zéro heure.
Au nom du Sénat, je lui souhaite la bienvenue parmi nous.
4
Candidatures à une commission
M. le président. J’informe le Sénat que le groupe socialiste et républicain a fait connaître à la présidence le nom du candidat qu’il propose pour siéger à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale, en remplacement de M. Luc Carvounas, dont le mandat a cessé.
Cette candidature a été publiée et la nomination aura lieu conformément à l’article 8 du règlement.
J’informe le Sénat que le groupe Union Centriste a fait connaître à la présidence le nom du candidat qu’il propose pour siéger à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale, en remplacement de Mme Jacqueline Gourault, dont le mandat a cessé.
Cette candidature a été publiée et la nomination aura lieu conformément à l’article 8 du règlement.
5
Communications du Conseil constitutionnel
M. le président. Le Conseil constitutionnel a communiqué au Sénat, par courrier en date du 31 juillet, le texte d’une décision statuant sur la conformité à la Constitution de l’accord économique et commercial global, AEGG, entre le Canada, d’une part, et l’Union européenne et ses États membres, d’autre part, du 22 février 2017.
Acte est donné de cette communication.
Le Conseil constitutionnel a informé le Sénat, le 31 juillet dernier, que, en application de l’article 61-1 de la Constitution, le Conseil d’État lui a adressé trois décisions de renvoi de questions prioritaires de constitutionnalité portant :
- sur le second alinéa de l’article 1766 du code général des impôts (Contrats de capitalisation souscrits à l’étranger - Sanction en cas de manquement aux obligations déclaratives) (2017-667 QPC),
- sur la combinaison du 1° du II de l’article 244 bis A et du 2° du II de l’article 150 U du code général des impôts (Imposition des plus-values de cessions de biens immobiliers - Résidence principale - Contribuable devenu non résident à la date de la cession) (2017-668 QPC),
- sur les termes « ou aux régisseurs de messages publicitaires et de parrainage » figurant au a) du 1° de l’article L. 115-7 du code du cinéma et de l’image animée (Taxe sur les éditeurs et distributeurs de services de télévision) (2017-669 QPC),
Les textes de ces décisions de renvoi sont disponibles à la direction de la séance.
Acte est donné de ces communications.
Le Conseil constitutionnel a informé le Sénat, le 1er août 2017, que, en application de l’article 61-1 de la Constitution, la Cour de cassation lui a adressé un arrêt de renvoi d’une question prioritaire de constitutionnalité portant sur les dispositions de l’article 230-8 du code de procédure pénale (Effacement anticipé des données à caractère personnel inscrites au fichier de traitement des antécédents judiciaires) (2017 670 QPC).
Le texte de cet arrêt de renvoi est disponible à la direction de la séance.
Acte est donné de cette communication.
6
Questions d'actualité au Gouvernement
M. le président. L’ordre du jour appelle les réponses à des questions d’actualité au Gouvernement.
Je rappelle que l'auteur de la question dispose de deux minutes trente, de même que la ou le ministre pour sa réponse.
Je rappelle également que notre séance est retransmise en direct sur le site internet du Sénat, sur Public Sénat et sur Facebook.
Chacun sera attentif au respect des uns et des autres et tout autant au respect du temps de parole imparti.
nouvelle-calédonie
M. le président. La parole est à M. Pierre Frogier, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur plusieurs travées du groupe Les Républicains.)
M. Pierre Frogier. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre. Elle porte sur la préparation de la consultation de sortie de l’accord de Nouméa.
Monsieur le Premier ministre, dans votre déclaration de politique générale, vous avez affirmé que l’État veut jouer pleinement son rôle d’acteur et de garant du processus de l’accord de Nouméa. Vous en avez même fait un engagement personnel.
Je tiens à saluer ce volontarisme, qui succède à l’attentisme et aux atermoiements du quinquennat précédent.
M. Didier Guillaume. Ah !
M. Pierre Frogier. Encore faut-il passer de la parole aux actes.
Vous avez vous-même rappelé que, s’il n’est pas saisi, d’ici mai prochain, par l’assemblée délibérante de la Nouvelle-Calédonie, l’État devra organiser, en novembre 2018, la consultation pour l’autodétermination de la Nouvelle-Calédonie.
En clair, dans quinze mois, la Calédonie décidera de son accession ou non à l’indépendance.
Alors que l’issue de ce référendum est connue d’avance, le risque est grand que ce scrutin, de nature exagérément binaire, mal préparé, remette le feu aux poudres.
À ce titre, permettez-moi de citer Michel Rocard : « Personne ne peut avoir dans la tête que la question qui va être posée à ce référendum soit choisie de manière à diviser les Calédoniens en deux paquets égaux. Parce que là, on est sûr qu’ils recommenceront à se taper dessus. »
Monsieur le président du Sénat, vous avez vous-même affirmé à plusieurs reprises que l’État devait nous accompagner dans la recherche des convergences nécessaires à la définition de notre destin commun.
Sur le plan local, nous avons pris l’initiative d’organiser les États généraux de l’avenir, forme de « palabre à l’océanienne », pour échanger et rechercher avec la population et l’ensemble des forces politiques ce qui nous unit, ce qui nous rassemble, afin que cette consultation ne soit pas mortifère.
Monsieur le Premier ministre, êtes-vous prêt, lors de votre venue annoncée en Nouvelle-Calédonie, dont je vous rappelle la devise : « Terre de parole, terre de partage », à vous engager dans ce grand palabre pour l’avenir ? Et, puisque vous avez insisté sur la dimension personnelle de votre engagement, pourriez-vous nous dire comment vous comptez le traduire dans les faits ?
Monsieur le Premier ministre, la parole de l’État est attendue à Nouméa. La parole de la France est attendue dans le Pacifique ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste, ainsi que sur certaines travées du groupe La République en marche. – M. Gilbert Barbier applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.
M. Édouard Philippe, Premier ministre. Monsieur le sénateur, vous m’interrogez sur l’engagement du Gouvernement et sur mon implication personnelle dans la construction de l’avenir de la Nouvelle-Calédonie, et je vous en remercie.
Je veux vous dire à nouveau combien je suis conscient des enjeux et des défis considérables qui nous attendent, collectivement, en Nouvelle-Calédonie.
Comme vous, je veux éviter que les tensions ne s’avivent à l’approche de la consultation sur l’accession à la pleine souveraineté.
J’ai indiqué, dans ma déclaration de politique générale, quelle était l’ambition du Gouvernement sur ce sujet, et vous savez que, dès ma nomination, j’ai entrepris de rencontrer toute une série d’acteurs politiques, parlementaires ou non, et d’acteurs culturels de Nouvelle-Calédonie, pour mieux saisir, pour mieux mesurer et, pour tout dire, pour mieux comprendre l’ampleur de ces défis et la complexité de ces enjeux.
Je l’ai fait, et je vais continuer à le faire, comme l’ensemble du Gouvernement d’ailleurs, dans un esprit d’écoute et en suivant une valeur à laquelle vous êtes particulièrement attaché, car c’est une valeur océanienne : l’humilité.
Tel est également l’esprit qui a guidé la visite en Nouvelle-Calédonie de Mme la ministre des outre-mer, que je tiens à saluer. Au cours de la semaine dernière, elle a effectué son premier déplacement dans les outre-mer, et elle a choisi de se rendre d’abord en Nouvelle-Calédonie. Elle y a rencontré un grand nombre d’acteurs. Elle aussi a cherché à mieux comprendre, mieux saisir et mieux mesurer l’ensemble des enjeux du processus, et au-delà.
L’humilité, que je crois indispensable pour aborder les questions qui sont devant nous, s’impose tout d’abord devant la force de l’engagement de celles et ceux qui ont œuvré, parfois au prix de leur vie, pour tracer un chemin de paix et marcher de concert vers ce destin commun qui est désormais un acquis.
Monsieur le sénateur, je le sais, vous avez contribué à tracer ce chemin, notamment en proposant que le drapeau du FLNKS soit érigé au côté du drapeau français.
Cette humilité, c’est aussi celle qui doit nous saisir devant la responsabilité collective, qui nous revient à tous, en tant qu’acteurs du processus de l’accord de Nouméa.
Au fond, nous devons organiser, dans la transparence, un scrutin dont la légitimité ne pourra pas être contestée. C’est une priorité pour le Gouvernement, c’est une priorité de mon action, et c’est une priorité difficile à atteindre techniquement, vous le savez.
Nous voulons aussi profiter des fruits de la réflexion, souvent remarquable, menée par les nombreux experts missionnés par les non moins nombreux gouvernements qui se sont intéressés à ce sujet. Il y a de la connaissance acquise, il y a de l’expérience acquise, et il serait absurde, voire contre-productif, de vouloir s’en passer.
Si j’apporte cette précision, c’est parce que, en la matière, l’ensemble du Gouvernement entend s’inscrire dans une histoire et dans une continuité : c’est aussi une forme d’humilité, et il me semble que cette attitude est indispensable.
Nous pouvons nous appuyer sur des acquis irréductibles, qui sont l’œuvre de l’amitié civile et de la réconciliation engagée par Jean-Marie Tjibaou et Jacques Lafleur, que je tenais à citer ici.
Nous avons un grand nombre de points de convergence, qu’il s’agisse des valeurs aux sources de la société calédonienne comme de l’organisation institutionnelle ou du principe de la citoyenneté calédonienne.
Vous avez rappelé la devise de la Nouvelle-Calédonie : « Terre de parole, terre de partage. » Vous souhaitez, à juste titre, que l’État, plus encore que le Gouvernement, qui est à la fois acteur et arbitre du processus, ait lui aussi une parole. C’est le sens du déplacement de Mme la ministre des outre-mer, qui, à cette occasion, a insisté sur plusieurs enjeux : l’action en faveur de la jeunesse, la lutte contre l’insécurité, le soutien à la filière du nickel ou encore la préservation de la biodiversité.
Comme vous l’avez évoqué, j’aurai l’occasion de me rendre sur place au cours de la première quinzaine de décembre, après que les échéances électorales auront permis de renouveler les sénateurs de Nouvelle-Calédonie et après que nous aurons réuni, en octobre, un comité des signataires pour étudier, dans le détail, les conditions d’organisation de la consultation qui se tiendra au cours de l’année 2018.
Je profite de ce moment pour vous le dire, je compte bien que le comité des signataires, qui sera précédé par beaucoup d’entretiens, nous permettra d’échanger ces « bouts de parole » auxquels l’ensemble des acteurs de Nouvelle-Calédonie sont attachés.
Mesdames, messieurs les sénateurs, se prononcer sur l’accession à la pleine souveraineté, ce n’est pas se prononcer pour ou contre le destin commun. Ce destin commun est acquis : il est l’un des acquis de toutes les discussions, de tout le partage qui a eu lieu depuis maintenant de nombreuses années, et il ne doit pas être remis en cause ! (Applaudissements sur plusieurs travées du groupe La République en marche et du groupe Union Centriste, ainsi que sur certaines travées du groupe Les Républicains.)
prévention des feux de forêt
M. le président. La parole est à Mme Hermeline Malherbe, pour le groupe du Rassemblement démocratique et social européen.
Mme Hermeline Malherbe. Ma question s'adresse à M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur.
J’aurais pu à nouveau questionner le Gouvernement sur la taxe d’habitation, qui reste une préoccupation majeure pour les élus locaux. (Exclamations sur quelques travées du groupe Les Républicains. – MM. Martial Bourquin et Alain Néri applaudissent.)
M. Alain Néri. Absolument !
Mme Hermeline Malherbe. Toutefois, je souhaite évoquer un autre sujet d’inquiétude, à savoir la prévention des risques d’incendie.
Monsieur le ministre d’État, récemment, le sud-est de la France et la Corse ont fait face à de violents incendies, qui ont réduit en cendres près de 4 000 hectares de forêt, blessant au passage pompiers, forces de l’ordre et secouristes. Ces acteurs font preuve d’un très grand courage, au péril de leur vie, et je pense que nous pouvons tous ici leur rendre hommage.
Le 14 juillet dernier, dans mon département des Pyrénées-Orientales, au Boulou et à Maureillas-las-Illas, près de la frontière espagnole, le feu a consumé 190 hectares et mobilisé plusieurs centaines de pompiers.
Monsieur le ministre d’État, au-delà des outils que l’on peut donner aux pompiers et aux forces de sécurité pour lutter contre les incendies, ma question porte sur les moyens de prévention que l’on peut développer et valoriser.
Parmi ces moyens, on peut rappeler ceux qui concernent la défense des forêts contre l’incendie, la DFCI, pour laquelle les départements et les communes œuvrent, en particulier avec l’Entente pour la forêt méditerranéenne.
On peut aussi saluer les communes qui ont mis en place des réserves intercommunales de sécurité civile, les RISC, dans les Pyrénées-Orientales en particulier, pour assurer une surveillance des massifs en lien avec les pompiers et l’Office national des forêts, l’ONF.
Ainsi, je souhaite insister tout particulièrement sur l’action des communes qui accompagnent l’installation d’éleveurs dans le cadre du sylvo-pastoralisme, ou qui épaulent les propriétaires de mas isolés pour le défrichement et l’entretien des espaces naturels.
Par ailleurs, nous constatons qu’il existe des disparités d’une région à l’autre dans l’application de la réglementation en matière de prévention, et parfois entre deux communes au sein d’un même département.
Monsieur le ministre d’État, ma question est simple : comment reconnaître et valoriser le rôle préventif joué par les communes rurales, y compris financièrement, et comment harmoniser la prévention sur l’ensemble du territoire national pour une plus grande efficacité ? (Applaudissements sur les travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. le ministre d'État, ministre de l’intérieur.
M. Gérard Collomb, ministre d'État, ministre de l'intérieur. Madame Malherbe, je sais quelle attention vous portez à la situation que nous venons de vivre et que nous vivons encore aujourd’hui.
La semaine dernière, je me suis rendu en Corse, où, près d’Olmeta, quelque 1 300 hectares de forêt ont brûlé. Le lendemain, M. le Premier ministre et moi-même sommes allés à Bormes-les-Mimosas, où l’incendie était immense. Au total, dans cette région, 12 000 personnes ont dû être déplacées dans la nuit.
À ce titre, je veux saluer, comme vous l’avez fait, le travail de toutes celles et de tous ceux qui se sont engagés. Je songe en particulier à nos sapeurs-pompiers et à nos forces de protection civile, qui étaient sur le terrain. (Mme Sophie Primas applaudit.) Croyez-moi, ils étaient profondément engagés. (Applaudissements sur plusieurs travées du groupe La République en marche et du RDSE.)
La première action, c’est effectivement d’empêcher que le feu ne prenne, et donc d’avoir une autre vision de l’urbanisme et de la nature. J’ai également entendu ce que vous avez dit à propos des travaux d’entretien menés dans les zones agricoles.
La deuxième action, c’est de déployer les moyens disponibles pour lutter contre les incendies. C’est pour cela que, malgré les difficultés financières, le Gouvernement a décidé de commander six avions nouveaux pour les prochaines années : ainsi, nous aurons des moyens à la hauteur des difficultés qui peuvent être les nôtres ! (Applaudissements sur les travées du groupe La République en marche et sur quelques travées du RDSE.)
situation ferroviaire à la sncf
M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Filleul, pour le groupe La République en marche.
M. Jean-Jacques Filleul. Ma question s'adresse à Mme la ministre chargée des transports.
Ce dernier week-end de retours et de départs des vacanciers a été marqué par une pagaille monstre à la gare Montparnasse.
M. Charles Revet. Eh oui !
M. Jean-Jacques Filleul. Cette gare ne pouvait plus exercer ses fonctions primaires : accueillir les voyageurs et faire circuler les trains.
De nombreuses hypothèses ont été émises pendant ces soixante-douze heures, en particulier sur la nature de la panne qui a bloqué des milliers de voyageurs et perturbé toutes les gares du réseau Ouest-Atlantique.
Cette situation, grave par sa durée et par les perturbations qu’elle a entraînées, n’est pas admissible. Le service public est profondément touché par cette épreuve.
Madame la ministre, nous savons votre volonté : vous êtes venue présenter votre feuille de route le 20 juillet dernier devant notre commission de l’aménagement du territoire et du développement durable.
Votre projet est ambitieux ; nous le soutenons. SNCF Réseau doit faire l’objet de lourds investissements pour rénover et moderniser l’infrastructure ferroviaire dans sa variété et dans sa multiplicité. Il n’en reste pas moins que ces dysfonctionnements, dont l’ampleur dépasse tous les incidents quotidiens du réseau, sont inquiétants, d’autant que la concurrence pour le transport des voyageurs, issue du quatrième paquet ferroviaire européen, s’impose pour demain, plus précisément pour 2022.
Je tiens à rendre hommage à la sagesse des passagers en déficit d’informations, à leur patience, ou à leur fatalisme, face aux retards et aux suppressions de trains qu’ils ont subis et subissent encore aujourd’hui.
Ce défaut d’information de la part de SNCF, la longueur des recherches pour identifier l’origine de la panne ont suscité des polémiques et surtout de nombreuses questions.
M. Roger Karoutchi. Eh oui !
M. Jean-Jacques Filleul. Madame la ministre, au vu de cette situation, comment avez-vous réagi, quelles sont vos exigences vis-à-vis de SNCF et, dans l’immédiat, quelles mesures envisagez-vous de prendre ? (Applaudissements sur les travées du groupe La République en marche et sur quelques travées du groupe Union Centriste.)
MM. Michel Canevet et Loïc Hervé. Très bien !
M. le président. La parole est à M. le Premier ministre. (Marques de surprise et de satisfaction sur un grand nombre de travées.)
M. Édouard Philippe, Premier ministre. Monsieur le sénateur, samedi dans la soirée, un signalement de défaut sur la basse tension du poste de Vanves, qui contrôle la signalisation sur les dix kilomètres de voies précédant la gare Montparnasse, a été relevé par les équipes.
Cette panne, car il s’agit bien d’une panne, présente la double caractéristique d’être complexe à identifier – les stations où elle peut survenir sont remplies de connecteurs, et il faut identifier celui d’entre eux qui ne fonctionne plus – et d’être susceptible de faire courir des risques graves pour la sécurité des voyageurs.
M. Roger Karoutchi. Tout de même, trois jours !
M. Édouard Philippe, Premier ministre. En effet, le défaut de basse tension peut avoir pour effet de faire passer un feu rouge au vert, ce qui pose des questions de sécurité évidentes.
La SNCF a donc entrepris, dans les meilleures conditions de rapidité, d’identifier la panne. Mais elle s’est heurtée, outre le problème d’identification que j’ai mentionné, à la difficulté de réorganiser le plan de transports sans savoir quand la panne serait détectée et résolue, et à l’incroyable intensité du trafic lors de ce week-end de chassé-croisé.
M. Simon Sutour. Action, action !
M. Édouard Philippe, Premier ministre. Au total, ce week-end, sur 1,5 million de voyageurs SNCF dénombrés, 70 000 ont été impactés par la panne, et 3 500 n’ont pas pu être acheminés.
Cette situation n’est évidemment pas satisfaisante,…
M. Roger Karoutchi. C’est le moins que l’on puisse dire !
M. Édouard Philippe, Premier ministre. … vous le savez, je le sais, tous les Français l’ont compris, et le président de SNCF Mobilités comme le président de SNCF Réseau, que j’ai reçus aujourd’hui avec Mme la ministre des transports,…
M. Éric Doligé. Il faut en changer ! (Remarques ironiques sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Édouard Philippe, Premier ministre. … l’ont bien entendu ainsi. Ils en ont parfaitement conscience.
Face à ces difficultés, et comme souvent dans les crises, nous avons relevé des choses extrêmement insatisfaisantes, et d’autres qu’il faut saluer.
Parmi les éléments insatisfaisants figurent le temps passé pour identifier l’origine de la panne et la difficulté à mettre en place des process de travail en mode dégradé…
M. Simon Sutour. Qui gouverne ?…
M. Édouard Philippe, Premier ministre. Monsieur le sénateur, vous voulez peut-être que l’on évoque les conditions dans lesquelles le réseau a été régénéré pendant les cinq dernières années,…
M. Simon Sutour. Disons, depuis dix ans ! (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste.)
M. Édouard Philippe, Premier ministre. Alors, disons pendant les dix ou les quinze dernières années ! (Nouvelles protestations.)
M. Alain Néri. Oh là là !
M. Édouard Philippe, Premier ministre. Mesdames, messieurs les sénateurs, il nous a fallu et il nous faudra consacrer beaucoup plus de moyens à l’entretien des réseaux existants. (Brouhaha continu sur les mêmes travées.) C’est le sens de l’intervention de Mme la ministre des transports, qui s’est rendue sur les lieux dès dimanche et qui y est revenue lundi.
J’ai parfaitement conscience du charme, de l’intérêt, et même de l’opportunité qui s’attachent aux grands projets d’infrastructures. Mais nous devons également veiller à la sécurité : dans cet hémicycle figurent un certain nombre d’élus de nos territoires qui savent combien ces questions sont importantes et qui, en la matière, ont de mauvais souvenirs.
Pour des raisons de sécurité et pour des raisons d’efficacité, nous devrons consacrer des moyens à l’entretien des réseaux. (Exclamations ironiques sur plusieurs travées du groupe Les Républicains, du groupe Union Centriste, du groupe socialiste et républicain et du groupe CRC.)
M. Alain Néri. Ah, bravo, c’est une découverte !
M. Édouard Philippe, Premier ministre. C’est une priorité, et elle sera assumée.
J’ajoute que nous avons demandé au président de SNCF Réseau et au président de SNCF Mobilités de livrer tout le retour d’expérience nécessaire sur un tel incident. Je songe notamment à la mobilisation des « gilets rouges », qui permettent d’informer les voyageurs. Je pense aussi à la qualité - ou, en l’espèce, à l’absence de qualité - de l’information qui a été transmise aux usagers, laquelle, venant de sources différentes, était souvent imprécise et parfois contradictoire. Ce n’est pas acceptable.
SNCF Réseau et SNCF Mobilités ont des progrès considérables à faire.
Mme Catherine Procaccia. Ah oui !
M. Édouard Philippe, Premier ministre. C’est le sens des remarques précises, claires et fermes, que Mme la ministre des transports et moi-même avons formulées aux responsables de l’entreprise.
Cela étant, monsieur le sénateur, nous devons également souligner un bel aspect, même s’il ne compense pas l’insatisfaction éprouvée : nous avons également vu, à l’occasion de cette crise, des personnels se mobiliser, revenir de vacances, pour tenter de faire face à une situation pénible et difficile. (Protestations sur plusieurs travées du groupe Les Républicains. – Mme Stéphanie Riocreux, MM. Jean-Jacques Filleul et André Gattolin applaudissent.) Nous avons vu des gens œuvrer, jusque tard dans la nuit, parce qu’il fallait apporter un service aux usagers. Je tenais également à le souligner ! (Applaudissements sur les travées du groupe La République en marche.)
politique migratoire
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour le groupe communiste républicain et citoyen.
Mme Laurence Cohen. Ma question s'adresse à M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur.
Le 12 juillet dernier, le Premier ministre présentait un plan intitulé : « Garantir le droit d’asile, mieux maîtriser les flux migratoires ».
En réalité, il s’agit avant tout d’une politique dissuasive, tandis que les droits élémentaires des migrants continuent à être bafoués. Récemment, 156 migrants, parmi lesquels des mineurs, ont été arrêtés à la gare de Cannes et reconduits brutalement à la frontière franco-italienne par les forces de l’ordre. Ils essayaient simplement de déposer une demande d’asile, en toute légalité !
Cette reconduite à la frontière est une violation des droits humains les plus fondamentaux.
Cédric Herrou, cet agriculteur militant des droits humains, les accompagnait. Il a été, lui aussi, une nouvelle fois arrêté pour délit de solidarité.
Le rapport de l’organisation Human Rights Watch, sur les violences commises par les forces de police à Calais à l’encontre de 400 à 500 migrants, est tout aussi accablant. L’emploi du gaz poivre est courant. Nombreux sont celles et ceux qui sont choqués à juste titre par cette violence institutionnelle qui émane, hélas ! du pays des droits de l’homme.
Le Président de la République a affirmé que, d’ici à la fin de l’année, il ne voulait plus personne dans les rues, dans les bois.
Monsieur le ministre d’État, vous avez vous-même annoncé la création de deux centres d’accueil dans les Hauts-de-France et demandé un rapport sur les violences.
Ma question est donc simple : pouvez-vous nous préciser, en termes de moyens humains, matériels, et financiers, comment le Gouvernement entend faire face à la situation dramatique des migrants ? (Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)
M. le président. La parole est à M. le ministre d'État, ministre de l’intérieur.
M. Gérard Collomb, ministre d'État, ministre de l'intérieur. Madame la sénatrice, le problème de la crise migratoire doit être abordé avec beaucoup d’humilité.
J’ai regardé l’évolution des chiffres dans votre département.
M. Roger Karoutchi. La pauvre, pourquoi son département en particulier ? (Sourires sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste.)
M. Gérard Collomb, ministre d'État. Au cours de l’année 2016, nous y avons constaté une augmentation des demandes d’asile de l’ordre de 57 %.
M. Roger Karoutchi. Mme Cohen n’y est pour rien ! (Nouveaux sourires.)
M. Gérard Collomb, ministre d'État. Au total, 786 de ces demandes relevaient de la procédure Dublin. Au premier semestre de cette année, sur 1 938 demandeurs d’asile, 969 étaient en procédure Dublin : ces chiffres traduisent une augmentation de 50 %.
Aussi, avec le Président de la République et le Premier ministre, nous avons donc décidé de mettre en place un plan.
Mme Éliane Assassi. Ah !
M. Gérard Collomb, ministre d'État. Ce plan doit permettre, d’abord, que les migrants arrivant aujourd’hui de Dublin, qui ont été déboutés du droit d’asile dans le pays où ils étaient et qui essayent aujourd’hui de venir en France, voient leur dossier traité en priorité. Autrement, nous n’arriverons pas à faire face.
En même temps (Exclamations amusées sur les travées du groupe Les Républicains.), nous voulons agir avec générosité. C’est pourquoi, dans un département comme le Pas-de-Calais, nous avons fait en sorte que les exemples de Sangatte ou de la Lande ne se reproduisent plus. C’est pour cela que nous venons d’ouvrir deux centres d’accueil, mais aussi deux centres d’orientation. (Applaudissements sur les travées du groupe La République en marche. – M. Alain Fouché applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour la réplique.
Mme Laurence Cohen. Monsieur le ministre d’État, les migrants n’arrivent pas de Dublin… (Sourires sur les travées du groupe CRC.)
M. Roger Karoutchi. Mais si, ils passent par l’Irlande ! (Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Laurence Cohen. Cela étant, certains territoires font beaucoup d’efforts, et d’autres non.
Ce matin même, j’accompagnais Mme la ministre des solidarités et de la santé lors de sa visite d’un centre d’hébergement d’urgence à Ivry. Dans ce dossier, on observe une grande implication de la Ville de Paris, de la municipalité d’Ivry et d’un certain nombre d’associations, dont Emmaüs.
De quoi ont besoin les migrants, les associations et les collectivités ? Non des moyens constants, mais des moyens supplémentaires : tout ne peut pas reposer sur le bénévolat. Il faut que l’État s’en mêle, notamment à l’échelle des services publics. Certaines expériences fonctionnent : autant s’en servir et les multiplier !
M. le président. Il faut conclure, ma chère collègue.
Mme Laurence Cohen. Selon la CIMADE, pour 110 000 demandeurs d’asile, plus de 30 000 places sont nécessaires pour éviter toute mise à la rue ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRC. – M. Ronan Dantec applaudit également.)
M. Alain Fouché. Le Gouvernement s’en occupe, ma chère collègue !
aides personnalisées au logement
M. le président. La parole est à M. Yannick Vaugrenard, pour le groupe socialiste et républicain.
M. Yannick Vaugrenard. Ma question s’adresse à M. le Premier ministre.
Monsieur le Premier ministre, vous avez annoncé une diminution de cinq euros par mois du montant de l’aide personnalisée au logement. Pour les locataires bénéficiaires de l’APL, ce n’est pas rien !
M. Alain Néri. C’est un scandale !
M. Yannick Vaugrenard. En effet, 80 % des bénéficiaires disposent des ressources inférieures au SMIC, et, pour plus de la moitié d’entre eux, elles sont inférieures au seuil de pauvreté.
Voilà la triste réalité !
Cette mesure est aveugle, elle frappe les plus pauvres ; vous devez la supprimer.
Chacun a accepté la nécessité, pour notre pays, de faire des économies afin que nos enfants et nos petits-enfants ne paient pas les pots cassés de notre irresponsabilité, mais pas de cette façon, monsieur le Premier ministre, pas contre ceux qui supportent déjà le calvaire des fins de mois difficiles (Très bien ! sur certaines travées du groupe socialiste et républicain.) quand d’autres verront avec satisfaction leur impôt sur la fortune diminuer.
Qui plus est, ce projet fait entendre une petite musique fort déplaisante, car il consiste à montrer du doigt celles et ceux qui, dès lors qu’ils touchent les aides sociales, seraient autant d’assistés, voire des fraudeurs.
Mes chers collègues, dans le monde curieux où nous vivons, ceux qui gagnent 20 000 euros par mois persuadent ceux qui en gagnent 1 800 que tout va mal à cause de ceux qui vivent avec 535 euros… Et ça marche ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et du groupe CRC.) Eh bien moi, je vous le dis : cela suffit !
Il est en effet stigmatisant de diminuer de cinq euros par mois l’aide personnalisée au logement pour six millions et demi de ménages parmi les plus défavorisés.
Je vous suggère de prélever 0,07 % par an sur le patrimoine de cinq cents plus grosses fortunes de France (Très bien ! et applaudissements sur les mêmes travées.) ou encore douze euros par mois sur le revenu des 10 % les plus riches. Cela rapporterait strictement la même somme et serait beaucoup plus équitable.
Je vous le demande solennellement, monsieur le Premier ministre, revenez sur cette mesure, parce qu’elle est injuste, parce qu’elle touche également 800 000 jeunes, qui ont besoin d’être écoutés et d’être soutenus plutôt que d’être stigmatisés.
M. le président. Il faut conclure !
M. Yannick Vaugrenard. L’ensemble des associations caritatives et humanitaires plaident pour cette suppression. Après m’avoir écouté, je vous remercie de bien vouloir les entendre ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et du groupe CRC – MM. M. Jean-Jacques Filleul et Pierre-Yves Collombat applaudissent également.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de la cohésion des territoires.
M. Jacques Mézard, ministre de la cohésion des territoires. Mesdames, messieurs les sénateurs, monsieur le sénateur Vaugrenard, pour avoir souvent siégé dans cet hémicycle, je connais votre souci de préserver nos concitoyens les plus fragiles.
Je vous le dis toutefois très clairement, il ne faut pas pousser la simplification trop loin. Pourquoi le Gouvernement a-t-il été amené, et avec regret, à proposer cette mesure ? Vous le savez aussi bien que moi, aussi bien que nous : dans le budget, les APL étaient sous-budgétisées ! (Vives protestations sur les travées du groupe socialiste et républicain et du groupe CRC.) C’est la stricte réalité !
M. Albéric de Montgolfier. Eh oui !
M. Jacques Mézard, ministre. Le gouvernement précédent, je le dis très clairement, avait prévu des mesures d’économies sur les APL qui n’ont pas été mises en œuvre, ce qu’a d’ailleurs reconnu très loyalement l’ancien Premier ministre, Manuel Vals (Protestations sur les travées du groupe socialiste et républicain et du groupe CRC.)
Le Sénat a demandé, en 2015, à travers sa commission des finances, une enquête à la Cour des comptes sur le système des APL.
M. Albéric de Montgolfier. C’est vrai !
M. Jacques Mézard, ministre. Celle-ci a donné lieu à un rapport signé par M. Philippe Dallier. De la même manière, l’Assemblée nationale a demandé un rapport à votre camarade François Pupponi. Celui-ci avait conclu à la nécessité de revoir ce système et de réaliser un certain nombre d’économies (Protestations sur les travées du groupe socialiste et républicain.),…
M. Alain Néri. Pas comme cela !
M. Jacques Mézard, ministre. … y compris sur les allocations relevant du système propre aux étudiants.
La réalité est là : il faut constater les inégalités qui existent aujourd’hui dans ce système ainsi que sa complexité. Je vous renvoie à la page trente et un du rapport de Mme Fack, qui est significatif à cet égard !
Il reste donc des efforts à faire pour rendre plus équitables les critères d’accès aux APL et pour mettre en œuvre une politique du logement qui favorise une baisse des loyers et une relance de la construction.
Mme Évelyne Yonnet. Et le livret A ?
M. Jacques Mézard, ministre. Voilà la réalité concrète, et on ne peut pas l’éluder ! (Applaudissements sur les travées du groupe La République en marche, du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains – Protestations sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
impact des nouvelles sanctions américaines contre la russie
M. le président. La parole est à M. Yves Pozzo di Borgo, pour le groupe Union Centriste.
M. Yves Pozzo di Borgo. Ma question s’adresse à Mme la ministre chargée des affaires européennes et concerne l’impact des sanctions américaines contre la Russie, en particulier en matière commerciale, pour la France et pour l’Union européenne.
La semaine dernière, la Chambre des représentants américaine a adopté de nouvelles sanctions à l’encontre de la Russie. Ainsi, le président Trump a la possibilité de sanctionner les entreprises qui travaillent sur des pipelines venant de Russie, en limitant leur accès aux banques américaines et en les excluant des marchés publics américains.
Cela touche les entreprises Engie – française –, Uniper, Wintershall – allemandes – et Shell – anglo-néerlandaise –, qui travaillent sur le projet de gazoduc Nord Stream 2 entre la Russie et l’Allemagne via la Baltique.
Les conduits de nos habitations sont pleins de gaz arrivant de Russie par tuyau et de gaz de schiste arrivant des États-Unis par bateau. Notre première réaction devrait être de cesser d’acheter ce gaz de schiste américain. La compétition est internationale, et les États-Unis sont aujourd’hui largement excédentaires dans leur balance commerciale en matière de gaz.
Le sujet est cependant plus vaste et cette décision américaine pose deux problèmes.
Le premier problème est diplomatique. Les décisions de sanctions contre la Russie ont toujours été prises en concertation entre les États-Unis et l’Union européenne. Ce n’est pas le cas aujourd’hui.
Le second est économique et commercial. Il est clair que l’impact de ces mesures sur les entreprises européennes du secteur énergétique, et en particulier gazier, sera négatif. La guerre commerciale fait rage dans ce domaine.
Cette situation pose le problème de la portée extraterritoriale des règles américaines, qui coûtent près de 20 milliards de dollars de pénalités aux entreprises européennes, selon le rapport de Pierre Lellouche et de Karine Berger sur ce sujet.
Notre propre commission des affaires européennes, au Sénat,…
M. le président. Je vous demande de conclure.
M. Yves Pozzo di Borgo. Déjà ?… (Sourires.)
Madame la ministre, comment allez-vous accompagner la sainte et juste colère de M. Juncker, lequel, furieux de cette situation, réunit demain les commissaires européens ? (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre chargée des affaires européennes.
Mme Nathalie Loiseau, ministre auprès du ministre de l’Europe et des affaires étrangères, chargée des affaires européennes. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, monsieur le sénateur Yves Pozzo di Borgo, comme vous l’avez indiqué, le président Trump s’apprête à promulguer le projet de loi adopté largement par le Congrès américain portant de nouvelles sanctions contre la Russie, l’Iran et la Corée du Nord.
Le recours à des sanctions est un outil de politique étrangère auquel nous ne sommes pas hostiles. Le Conseil de sécurité des Nations unies y a recours, l’Union européenne également. En règle générale, nous examinons les régimes de sanctions en concertation avec nos partenaires, en particulier au sein du G7.
Vous soulignez très justement le caractère spécifique du projet de loi en question, singulièrement sa dimension extraterritoriale. Il rend possible de sanctionner des individus et des entreprises non américaines, notamment européennes, en fonction de leurs activités sans lien avec les États-Unis.
Vous avez justement mentionné le rapport de l’Assemblée nationale, préparé par M. Lellouche et Mme Berger. Je pourrais ajouter le rapport de M. Philippe Bonnecarrère, remis au nom de la Haute Assemblée. Dans les deux cas, les auteurs soulignent les difficultés posées par les sanctions extraterritoriales et ouvrent des pistes.
Nous avons publiquement indiqué le caractère illicite, au regard du droit international, de ces sanctions extraterritoriales.
Nous nous concertons d’abord avec l’administration américaine. Pour marquer notre préoccupation, Jean-Yves le Drian a ainsi effectué une démarche auprès de Rex Tillerson. Ce dernier a indiqué qu’il allait se concerter avec les alliés des États-Unis sur ce régime de sanctions.
Plus largement, nous nous concertons avec nos partenaires de l’Union européenne. Nous disposons d’outils : des mesures commerciales, des démarches diplomatiques, sans oublier le règlement de 1996, adopté à la suite de la législation Helms-Burton,…
M. le président. Il faut conclure !
Mme Nathalie Loiseau, ministre. … lequel permet de prendre des mesures de protection en matière de sanctions.
Nous sommes donc mobilisés et nous soutenons les déclarations et la volonté d’action du président Juncker.
couverture du territoire en fibre optique
M. le président. La parole est à M. Patrick Chaize, pour le groupe Les Républicains. (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Patrick Chaize. Ma question s’adresse à M. le secrétaire d’État chargé du numérique.
Si les collectivités se félicitent que le sujet de l’aménagement numérique fasse partie des dossiers prioritaires du Gouvernement, elles s’interrogent néanmoins sur d’éventuels changements d’orientation concernant le calendrier, bien sûr, mais aussi le budget.
Dans un premier temps, il serait très utile de clarifier nettement les deux échéances de 2020 : rendre raccordable en fibre optique à la maison l’ensemble des prises de la zone laissée à l’initiative privée d’une part, et, d’autre part, ainsi que l’a annoncé le Président de la République lors de la Conférence nationale des territoires, garantir une bonne couverture en haut et en très haut débit pour tous.
Il convient en outre que les moyens nécessaires suivent, afin de confirmer l’échéance en 2022 du plan France très haut débit. Il faut en effet rassurer les collectivités qui doivent déposer des demandes de financement dans les mois qui viennent. Sur les 3,3 milliards d’euros d’autorisation de programme, vous n’ignorez pas que 250 millions d’euros doivent encore être inscrits en loi de finances.
Enfin, pour assurer la cohésion des territoires, il est nécessaire que le Gouvernement fixe un objectif conforme à celui de la Commission européenne, soit un réseau permettant de délivrer un débit de dix gigabits par seconde et des débits symétriques en 2025. En pratique, cela signifie un réseau en fibre optique jusqu’à l’abonné. Selon les estimations de l’Agence du numérique, cela nécessite d’inscrire entre 1,5 milliard et 2 milliards d’euros supplémentaires en autorisation de programme.
Au moment où certains acteurs du secteur se déchaînent contre les réseaux d’initiative publique, les RIP, avec pour objectif principal de retarder le plus possible le déploiement du fiber to the home, ou FTTH, sur l’ensemble du territoire, il est impératif qu’une clarification soit apportée.
Monsieur le ministre, pouvez-vous nous préciser l’échéancier, nous rassurer sur les financements et, enfin, nous assurer que votre gouvernement préservera les investissements publics contre les attaques des opérateurs privés ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur certaines travées du groupe Union Centriste.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État chargé du numérique.
M. Mounir Mahjoubi, secrétaire d’État auprès du Premier ministre, chargé du numérique. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, monsieur le sénateur Patrick Chaize, merci pour cette question, elle est essentielle.
L’accès au réseau numérique est une priorité de ce gouvernement depuis les premiers jours, nous l’avons annoncé. Avec le ministre Jacques Mézard, M. Denormandie et M. Griveaux, nous en avons fait notre premier axe de travail. Nous souhaitons trouver des solutions qui puissent être activables rapidement et durables dans leurs effets.
Vous avez abordé trois points : le calendrier, la méthode, le financement. Je répondrai sur chacun d’entre eux.
Concernant le calendrier, nous avons un principe simple : nous ne remettons pas en cause les engagements passés, au contraire, nous allons plus vite. Tel était la promesse du Président de la République.
Concrètement, cela signifie du bon débit pour tous en 2020. Pour cela, il faudra s’engager à l’accélération du réseau fixe comme du réseau mobile. Vous avez bien entendu, 2020, c'est-à-dire deux ans avant 2022 ! (Exclamations amusées sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste.)
Vous riez, mais si certains parlent d’impatience numérique, les Français sont plutôt dans l’exaspération numérique. Ne pas bénéficier du numérique aujourd’hui au quotidien, c’est être exclu ! On ne peut pas rire de cela ! (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Alors que nous annonçons deux ans d’avance sur l’engagement pris, nous devrions être tous mobilisés, et tous ensemble ! (Applaudissements sur les travées du groupe La République en marche.)
Mme Nicole Bricq. Bravo !
M. Mounir Mahjoubi, secrétaire d’État. Donc, nous conservons l’engagement du très haut débit pour tous en 2022.
Vous évoquez un nouvel engagement, à échéance de 2025, cette fois : la société du gigabit, que la Commission européenne a souhaité promouvoir. Cela signifie un débit de près de cent mégabits par seconde pour les particuliers et d’un gigabit par seconde pour les équipements essentiels : commerçants, universités ou écoles. Cela reste l’objectif du Gouvernement, et nous irons jusqu’au bout.
Sur la méthode, maintenant.
Quelle méthode adopter pour modifier ces dates et aller plus vite ? Nous avons dû le faire avec les acteurs, que nous avons réunis à plusieurs reprises autour de trois sujets majeurs. Nous leur avons demandé à nouveau de respecter leurs engagements et de présenter chacun des gages pour la suite.
M. le président. Il faut conclure !
M. Mounir Mahjoubi, secrétaire d'État. En effet, vous l’avez dit, la tenue des engagements pris a posé problème. Ensuite, nous leur avons demandé d’améliorer et d’accélérer les investissements, et, enfin, nous avons insisté sur l’innovation à travers un mix que permettent aujourd’hui les nouvelles technologies.
Concernant enfin le financement, et en moins de dix secondes, monsieur le président, l’État s’est engagé, et les collectivités peuvent lui faire confiance. Si des compléments financiers sont nécessaires pour la suite, nous serons là ! (Applaudissements sur les travées du groupe La République en marche.)
M. Patrick Chaize. Je demande la parole, monsieur le président.
M. le président. Mon cher collègue, vous avez épuisé votre temps de parole.
dotations à destination des collectivités territoriales
M. le président. La parole est à Mme Frédérique Espagnac, pour le groupe socialiste et républicain.
Mme Frédérique Espagnac. Ma question s’adresse à M. le Premier ministre.
Monsieur le premier ministre, vous vous êtes engagé à produire un effort budgétaire de 60 milliards d’euros sur le quinquennat.
Lorsque le précédent gouvernement est arrivé au pouvoir, les déficits s’élevaient à 5,2 % du PIB. Au terme de ce quinquennat, en ajoutant les correctifs de la Cour des comptes pour l’année 2017, que je ne remets pas en cause ici, il s’élève à 3,2 %, soit une baisse de deux points du PIB, à environ 40 milliards d’euros. (Exclamations ironiques sur les travées du groupe Les Républicains.)
Dans le même temps, les charges des entreprises ont baissé de 40 milliards d’euros environ, une baisse financée pour moitié par des économies.
Donc, 40 milliards plus 20 milliards, cela fait 60 milliards d’euros d’économies réalisées durant le précédent quinquennat. (Rires sur les mêmes travées.)
M. Philippe Dallier. Affirmer cela, c’est énorme !
Mme Frédérique Espagnac. La Cour des comptes a reconnu, comme le rapporteur général de la commission des finances, M. de Montgolfier, que les collectivités territoriales ont été amplement mises à contribution, avec la réalisation d’une diminution de leurs dépenses de 3 milliards d’euros en 2016.
M. Albéric de Montgolfier. Ça, c’est vrai !
Mme Frédérique Espagnac. Elles ont donc déjà pris leurs responsabilités, il faut savoir le dire, mais il faut aussi savoir le reconnaître.
Monsieur le Premier ministre, vous êtes en responsabilité, vous faites face à une certaine situation des comptes publics, nous pouvons parfaitement l’accepter.
Ce qui pose problème, au point de susciter un malaise jusque dans les rangs de la majorité, c’est la méthode employée : le rabot, les baisses indifférenciées, qui concernent par exemple, les APL, la politique de la ville – le budget baisse de 46,5 millions d’euros –, la dotation d’équipement des territoires ruraux, ou DETR, et j’en passe.
Mettre tous les postes budgétaires à contribution, c’est une force ; le faire dans la méconnaissance des spécificités de chacun, c’est une injustice !
Je rappelle que le Président de la République lui-même a souhaité mener la transformation des politiques publiques et a appelé à mettre fin à cette vieille technique du rabot.
Monsieur le Premier ministre, je vous demande donc non pas de remettre en cause vos objectifs, mais de changer de méthode, de mettre un terme à la politique du rabot et de prendre l’engagement solennel de préserver les territoires ruraux de cet effort, parce qu’ils n’en peuvent plus et qu’ils n’ont que trop contribué au redressement des comptes. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain. - M. Jean-Claude Carle applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’action et des comptes publics.
M. Gérald Darmanin, ministre de l’action et des comptes publics. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, madame la sénatrice, il est certain que nous devons mettre fin à l’idée que nous pouvons vivre indéfiniment en déficit.
Imagine-t-on une entreprise, ou une famille vivant pendant plus de quarante ans en déficit ?
M. Pierre-Yves Collombat. Un pays n’est ni une famille ni une boulangerie, enfin !… Tout cela pour les 3 % !
M. Gérald Darmanin, ministre. Ce n’est même pas la question des 3 %, l’État s’est habitué à considérer que l’on pouvait vivre éternellement en déficit.
Nous sommes dans un pays où, aujourd’hui, comme M. le ministre d’État l’a rappelé au cours d’une précédente séance de questions d’actualité au Gouvernement, le déficit se creuse de 2 400 euros par seconde… Quant à notre dette, songez qu’elle atteint 2 200 milliards d’euros !
Notre méthode est, il est vrai, très différente de celle du gouvernement précédent. Tout le monde, bien sûr, va contribuer, mais pas sous forme de baisses de dotation appliquées uniformément par le Gouvernement aux élus locaux : nous allons contractualiser avec eux et discuter avec leurs associations.
Ainsi, le ministre d’État Gérard Collomb, Jacques Mézard et moi-même, à la demande du Premier ministre et du Président de la République, allons travailler avec l’ensemble des élus et des associations d’élus pour que les collectivités territoriales puissent contribuer à l’effort en matière de dépenses publiques,…
M. Martial Bourquin. Elles ont déjà payé !
M. Martial Bourquin. Treize milliards d’euros, tout de même !
M. Gérald Darmanin, ministre. C’est en effet l’État qui assumera la plus grande part de la réduction, puisque, ces dernières années, sous le gouvernement précédent, il n’a pas totalement pris sa part de la baisse des dépenses publiques. (Eh oui ! sur plusieurs travées du groupe Les Républicains. - Protestations sur plusieurs travées du groupe socialiste et républicain.)
M. Albéric de Montgolfier. C’est vrai !
M. Gérald Darmanin, ministre. Mesdames, messieurs les sénateurs, le budget que nous allons présenter sera sincère : nous allons « sincériser » les dépenses,…
M. Jackie Pierre. Oh !
M. Gérald Darmanin, ministre. … de sorte que le Parlement pourra discuter des vraies inscriptions budgétaires.
En outre, ce budget baissera, parce que nous ferons des vrais choix : des vrais choix…
M. Martial Bourquin. Treize milliards ?…
M. Gérald Darmanin, ministre. … et pas un coup de rabot, car, vous avez tout à fait raison, madame la sénatrice, le coup de rabot est le contraire de la politique.
Oui, nous avons choisi, à la demande du Président de la République, et parce que les Français l’ont voulu, de baisser la fiscalité des entreprises. Nous pensons en effet que ce sont les entreprises qui créent l’emploi, et pas seulement l’administration publique ! (Applaudissements sur les travées du groupe La République en marche et sur certaines travées du groupe Union Centriste.)
Mme Nicole Bricq. Très bien !
dotation d'équipement des territoires ruraux
M. le président. La parole est à Mme Anne Chain-Larché, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Anne Chain-Larché. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, ma question s’adresse à Mme la ministre Jacqueline Gourault.
Madame la ministre, la Conférence nationale des territoires, réunie en grande pompe, devait rassurer les élus locaux. Depuis cet exercice de communication, la réalité de vos annonces est venue les frapper de plein fouet.
Or la douche est froide, très froide : une baisse drastique des budgets communaux se prépare, sans aucune contrepartie qui permettrait aux communes d’absorber le choc. En plus des 11 milliards d’euros d’économies imposés aux communes lors du précédent quinquennat, ce sont 13 milliards d’euros qui vont leur être pris dans les cinq ans qui viennent !
Avec l’annulation par décret de 209 millions d’euros de crédits de paiement destinés à la politique des territoires et aux relations avec les collectivités territoriales, le coup est porté aux communes rurales.
Avec la suppression de la dotation d’action parlementaire, un marqueur de votre politique, les maires savent bien qu’ils ne pourront plus financer de très nombreux investissements.
M. Martial Bourquin. Absolument !
Mme Anne Chain-Larché. Avec la suppression de la taxe d’habitation, vous portez atteinte à l’autonomie financière des communes.
M. Alain Fouché. C’est vrai !
Mme Sophie Primas. Très bien !
Mme Anne Chain-Larché. Enfin, le Président de la République nous a expliqué qu’il y aurait trop d’élus locaux… C’est oublier que 90 % d’entre eux ne sont pas rémunérés, alors qu’ils animent la cellule de base de notre démocratie ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur de nombreuses travées du groupe Union Centriste.)
Madame la ministre, quand arrêterez-vous la machine infernale qui creuse la fracture territoriale et prend les collectivités locales pour bouc émissaire ? (Applaudissements sur les mêmes travées.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre auprès du ministre d’État, ministre de l’intérieur.
Mme Jacqueline Gourault, ministre auprès du ministre d'État, ministre de l'intérieur. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, Mme Chain-Larché a posé beaucoup de questions. (Murmures sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Éric Doligé. Et elle attend beaucoup de réponses !
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Je vais, bien sûr, m’efforcer de répondre à toutes.
En ce qui concerne la diminution du nombre des élus locaux, le Président de la République a annoncé, parmi les grands principes de la Conférence nationale des territoires, à laquelle vous avez fait référence, celui d’une liberté locale laissée aux élus pour s’organiser, par exemple en fusionnant des départements ou en créant des communes nouvelles. Mathématiquement (Exclamations ironiques sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste.), ces évolutions entraîneront une diminution des nombres des élus locaux. (Rires sur les travées du groupe Les Républicains.)
Il n’a jamais été question, madame la sénatrice, de diminuer le nombre des élus locaux, en particulier de toucher à celui des conseillers municipaux, y compris dans les plus petites communes ! (Exclamations et protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Daniel Gremillet. Ce n’est pas vrai !
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Au passage, je vous rappelle que, dans la discussion du projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République, ou loi NOTRe, il avait été envisagé ici même, au Sénat, de diminuer, dans certains cas, le nombre des conseillers communaux, devant la carence constatée compte tenu des difficultés parfois rencontrées pour constituer des listes complètes. (M. Bruno Retailleau rit.) Je vous renvoie au compte rendu des débats !
S’agissant des finances locales, l’un des acquis les plus importants de la Conférence nationale des territoires est le pacte qui sera conclu avec les élus locaux, comme vient de la rappeler Gérald Darmanin. (Exclamations ironiques sur les travées du groupe Les Républicains.) Au sein de cette conférence, tout sera discuté en vue de réaliser des économies. (Rires sur les mêmes travées.)
Ce n’est pas la peine de rire, vous savez bien quel est l’état des finances locales ! (Nouvelles exclamations sur les mêmes travées.) Nous devons participer à cet effort de rigueur, afin que notre pays réponde à l’engagement qu’a pris le Président de la République.
Je vous rappelle enfin, madame la sénatrice, que d’autres anciens candidats à la Présidence de la République annonçaient non pas treize, mais vingt milliards d’euros d’économies ! (Applaudissements sur les travées du groupe La République en marche.)
M. le président. La parole est à Mme Anne Chain-Larché, pour la réplique.
Mme Anne Chain-Larché. Madame la ministre, il me semblait pourtant que nous parlions le même français…
Mme Nicole Bricq. Vous lisez une réplique préparée !
Mme Anne Chain-Larché. La dotation d’action parlementaire et la dotation d’équipement des territoires ruraux, la DETR, ce sont, concrètement, une maison de retraite, une place de village, une cantine d’école, une église et son parvis, une maison de santé ; ce sont des entreprises qui travaillent, des emplois, une économie locale vivante.
Voilà quelques semaines encore, vous étiez, M. Mézard et vous-même, membres de notre assemblée. Vous n’aviez pas de mots assez durs, alors, pour dénoncer les difficultés budgétaires que rencontrent les collectivités territoriales, notamment en milieu rural… (Vifs applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur plusieurs travées du groupe Union Centriste, du groupe CRC et du groupe socialiste et républicain.)
M. le président. Il faut conclure !
Mme Anne Chain-Larché. Il serait à mon avis souhaitable, et bienvenu, que le ministre que vous êtes n’oublie pas le sénateur ! (Bravo ! et applaudissements sur les mêmes travées.)
M. Christian Favier. Très bien !
organisation des jeux olympiques
M. le président. La parole est à M. Gilbert Roger, pour le groupe socialiste et républicain.
M. Gilbert Roger. Monsieur le président, mes chers collègues, ma question s'adresse à Mme la ministre des sports.
Je me félicite de la qualité de la candidature de Paris pour l’organisation des jeux Olympiques en 2024, notamment pour la Seine-Saint-Denis, qui accueillera neuf sites olympiques. Je tiens à saluer la déclaration de candidature de Los Angeles pour 2028. C’est avec impatience, tout comme vous, que j’attends la décision d’attribution du 13 septembre.
Ce projet n’aurait pu voir le jour sans l’engagement du mouvement sportif, qui a su porter avec conviction cette candidature, avec le soutien de l’État, initié par le président Hollande et engagé par le président Macron, et des collectivités territoriales concernées.
M. David Assouline. Anne Hidalgo en tête !
M. Gilbert Roger. Ce projet a vocation à laisser au territoire un héritage durable en équipements sportifs, en logements et en infrastructures de transport. Aussi la Seine-Saint-Denis, territoire jeune et dynamique, doit-elle se saisir de ce projet fédérateur pour transformer son image en requalifiant son territoire et en créant des emplois.
Madame la ministre, je souhaiterais obtenir du Gouvernement plusieurs précisions.
En matière de sport, tout d’abord : au-delà des grands équipements olympiques, quel engagement le Gouvernement pourrait-il prendre pour encourager l’accès à la pratique sportive de tous les enfants de Seine-Saint-Denis ? Je pense en particulier au plan Piscine du conseil départemental, alors qu’un enfant sur deux en sixième ne sait pas nager – je sais de quoi je parle, étant moi-même maître-nageur sauveteur ! (Sourires.)
En matière d’activité et d’emploi, quelles mesures le Gouvernement mettra-t-il en œuvre pour favoriser l’accès des PME à la commande publique, face aux très grandes entreprises, ainsi que pour généraliser les clauses d’insertion ?
M. le président. Il vous faut conclure, mon cher collègue.
M. Gilbert Roger. Enfin, les sociétés d’aménagement des sites olympiques pourront-elles participer à SOLIDEO, l’établissement chargé de la livraison des sites à construire ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et du CRC.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre des sports.
Mme Laura Flessel, ministre des sports. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, monsieur le sénateur Gilbert Roger, l’attribution des jeux Olympiques à Paris en 2024 est un rêve. Depuis hier, ce rêve est à portée de main. Le 13 septembre, il devrait se réaliser. Cent ans après les jeux Olympiques de 1924, des jeux Olympiques de 2024 à Paris seraient l’incarnation de la France qui rayonne !
Je remercie tous ceux qui se sont investis et qui ont porté cette candidature. Merci à Nicolas Sarkozy, François Hollande, Emmanuel Macron et Anne Hidalgo. Merci à cette France unie qui défend les valeurs du sport, les valeurs humaines, à cette France qui se rassemble derrière notre candidature et la soutient d’une seule voix.
Pour Paris et le Grand Paris, qui concentreront une part importante des sites et des villages, mais aussi pour la France entière – car les épreuves se dérouleront dans tout le pays et un programme national d’animation sera mis en œuvre sur l’ensemble du territoire d’ici à 2024 –, ces jeux nous offriront une opportunité, en faisant du sport un vecteur de nos politiques sportives publiques dans les domaines de la santé, de l’éducation, de la jeunesse, de la culture et de la lutte contre les discriminations.
Ce projet fédérateur mis au service de la France et des Français créera 250 000 emplois et 4 500 logements, et ses retombées économiques sont estimées à plus de 11 milliards d’euros. Il sera pour les territoires du nord de Paris un accélérateur de développement exceptionnel, ainsi qu’un facteur d’évolution.
Les jeux Olympiques de 2024 seront la vitrine de l’excellence sportive française et offriront de nouveaux équipements nécessaires à la population, ainsi qu’il a été prévu en concertation avec les élus locaux. Par exemple, monsieur le sénateur, un centre nautique verra le jour en Seine-Saint-Denis, où, en effet, 50 % des enfants de moins de onze ans ne savent pas nager.
Le 13 septembre prochain, de nouvelles responsabilités et de nouveaux défis seront devant nous. Les acteurs sportifs seront au cœur des performances attendues. C’est pourquoi, messieurs les sénateurs, je compte sur votre soutien ! (Applaudissements sur les travées du groupe La République en marche et sur de nombreuses travées du groupe socialiste et républicain.)
M. le président. Nous en avons terminé avec les questions d’actualité au Gouvernement.
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Hommage au secrétaire général du Sénat
M. le président. Monsieur le Premier ministre, mesdames, messieurs les membres du Gouvernement, mes chers collègues, je voudrais, au nom du Sénat, et en mon nom personnel, rendre un hommage particulier au secrétaire général du Sénat, M. Jean-Louis Hérin, présent à mes côtés. (Mmes et MM. les sénateurs, ainsi que Mmes et MM. les membres du Gouvernement, se lèvent et applaudissent longuement M. Jean-Louis Hérin, secrétaire général du Sénat.)
Alors que M. Hérin s’apprête à quitter ses fonctions au terme d’une carrière de plus de quarante ans au service de notre institution, je tiens à saluer devant vous, mes chers collègues, au nom aussi de tous les présidents du Sénat qui m’ont précédé à ce fauteuil et qu’il a connus, l’indéfectible loyauté et le dévouement de ce haut fonctionnaire à l’égard de notre assemblée, au sein de laquelle il fut notamment chef du service de la commission des lois, puis directeur de la séance et enfin secrétaire général.
Combien d’heures passées dans cet hémicycle… Aucun d’entre nous n’atteindra jamais le total de M. Jean-Louis Hérin !
Monsieur le secrétaire général du Sénat, tout l’hémicycle se joint à moi, vous pouvez le mesurer, pour vous adresser ce message chaleureux.
Vous avez été et demeurez un ardent défenseur non seulement du Sénat, mais tout autant d’un bicamérisme indispensable à l’équilibre de nos institutions.
À la place qui est la vôtre, vous avez constamment eu à cœur de nous aider à bâtir ce qui fait la spécificité sénatoriale : l’attachement au pluralisme, au temps long, au contrôle, à la prospective et à un débat qui, sans ignorer les clivages, privilégie, chaque fois qu’il est possible, la recherche de convergences dans un esprit de respect et d’écoute mutuels.
Voilà pourquoi, monsieur le secrétaire général du Sénat, je ne voulais pas laisser s’achever cette séance sans vous saluer personnellement. (Mmes et MM. les sénateurs, ainsi que Mmes et MM. les membres du Gouvernement, applaudissent.)
La séance, au bout de quarante ans, peut maintenant être levée. (Sourires.)
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Nominations de membres d'une commission
M. le président. Je rappelle au Sénat que le groupe socialiste et républicain a présenté une candidature pour la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale.
Le délai prévu par l’article 8 du règlement est expiré.
La présidence n’a reçu aucune opposition.
En conséquence, je déclare cette candidature ratifiée et je proclame M. Laurent Dutheil membre de la commission lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale, en remplacement de M. Luc Carvounas, dont le mandat a cessé.
Je rappelle en outre au Sénat que le groupe Union Centriste a présenté une candidature pour cette même commission.
Le délai prévu par l’article 8 du règlement est expiré.
La présidence n’a reçu aucune opposition.
En conséquence, je déclare cette candidature ratifiée et je proclame M. Philippe Bonnecarrère membre de la commission lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale, en remplacement de Mme Jacqueline Gourault, dont le mandat a cessé.
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Ordre du jour
M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au demain, mercredi 2 août 2017, à seize heures :
1. Conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi pour la confiance dans la vie politique ;
Rapport de M. Philippe Bas, rapporteur pour le Sénat, fait au nom de la commission mixte paritaire (n° 699, 2016-2017) ;
Texte de la commission mixte paritaire (n° 700, 2016-2017).
2. Conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi d’habilitation à prendre par ordonnances les mesures pour le renforcement du dialogue social ;
Rapport de M. Alain Milon, rapporteur pour le Sénat, fait au nom de la commission mixte paritaire (n° 697, 2016-2017) ;
Texte de la commission mixte paritaire (n° 698, 2016-2017).
Mes chers collègues, je vous rappelle que vous avez approuvé à l’unanimité ma proposition : nous siégeons vendredi 4 août, à quinze heures. (Nouveaux sourires.)
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
(La séance est levée à dix-sept heures quarante-cinq.)
Direction des comptes rendus
GISÈLE GODARD