M. Hervé Novelli, secrétaire d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services et de la consommation. Madame la sénatrice, la question que vous soulevez, relative aux frais facturés par les banques en cas de dépassement d’une autorisation de découvert et au calcul du taux effectif global, est importante et préoccupe depuis longtemps tant les associations de consommateurs que les pouvoirs publics.
S’agissant de l’assiette du TEG, le code de la consommation pose aujourd’hui une règle claire : sont intégrés au TEG l’ensemble des frais, directs ou indirects, intervenus de quelque manière que ce soit dans l’octroi du crédit. Le juge a l’occasion de rappeler régulièrement la portée de cette règle, et c’est à juste titre que vous avez cité l’arrêt de la Cour de cassation du 5 février 2008 à propos des frais de forçage.
Cette jurisprudence, mentionnée dans votre question, ne s’applique qu’aux frais de forçage qui sont directement liés aux crédits accordés. En revanche, elle ne s’applique pas aux commissions d’intervention. En effet, ces dernières sont facturées quel que soit le sort réservé à l’incident et que cela se traduise ou non par une acceptation du dépassement de découvert. Ces frais ne sont donc pas liés à l’opération de crédit.
Comme la Cour de Cassation, le Gouvernement considère que les frais qui ne sont pas accessoires au crédit ne doivent pas entrer dans le calcul du TEG. Cela risquerait de faire perdre à celui-ci sa signification et son efficacité.
Pour autant, les frais bancaires pèsent effectivement sur la situation financière des consommateurs, en particulier des plus fragiles d’entre eux. Le Gouvernement est favorable à une tarification des services bancaires qui soit à la fois juste et adaptée. C’est la raison pour laquelle nous avons déjà adopté une série de mesures visant à encadrer les frais bancaires.
Ainsi, le décret du 16 novembre 2007 a prévu un dispositif de plafonnement des frais pour incidents de paiement qui est entré en vigueur en mai 2008.
S’agissant des frais pour chèque impayé, le décret prévoit que le montant maximal des frais bancaires dans le cas du rejet d’un chèque d’un montant supérieur à 50 euros est fixé à 50 euros. Dans le cas du rejet d’un chèque d’un montant inférieur ou égal à 50 euros, le plafond est fixé à 30 euros.
S’agissant des frais pour incident de paiement autre qu’un chèque impayé, le décret prévoit que le montant maximal des frais bancaires dans le cas du rejet d’un virement ou d’un prélèvement est inférieur au montant de l’ordre de paiement pour les paiements de moins de 20 euros et à 20 euros pour les paiements d’un montant supérieur.
Plus largement, et au-delà de la seule question du plafonnement, le Gouvernement a mis récemment en œuvre plusieurs réformes importantes visant à accroître l’information des consommateurs sur les frais bancaires.
Depuis le 1er janvier 2009, les consommateurs reçoivent chaque année un récapitulatif annuel des frais bancaires qui ont été facturés durant l’année écoulée.
En outre, le 28 mai 2008, les banques ont pris l’engagement de mettre en place un nouveau service d’aide à la mobilité bancaire, destiné à faciliter le changement de banque.
Par ailleurs, Christine Lagarde a demandé à Emmanuel Constans, président du comité consultatif du secteur financier, et à Georges Pauget, ancien directeur général du Crédit agricole, de réaliser une mission visant à établir, en concertation notamment avec les associations de consommateurs, un diagnostic sur l’ensemble des frais bancaires.
Cette mission portera sur les pratiques des professionnels et l’usage par les Français de leurs comptes et de leurs moyens de paiement. L’objectif est d’identifier les principales causes d’incidents et les moyens, pour les clients, de mieux utiliser les services bancaires. Les découverts bancaires et les moyens de paiement feront l’objet d’une attention particulière. La question que vous soulevez sera examinée dans le cadre de cette mission, dont les conclusions inspireront le Gouvernement pour réformer, si cela s’avère nécessaire, les règles de tarification des frais bancaires.
M. le président. La parole est à Mme Patricia Schillinger.
Mme Patricia Schillinger. Monsieur le secrétaire d’État, je vous remercie de votre réponse, mais je tiens à souligner l’existence de certaines pratiques regrettables. Ainsi, le montant d’un chèque n’est crédité sur le compte en banque que trois ou quatre jours après le dépôt, alors que, entre-temps, des prélèvements automatiques ont pu intervenir et entraîner la perception d’agios en cas de découvert, fût-il d’un faible montant. C’est là que le bât blesse. Il faut absolument remédier à ces situations, dont pâtissent, en période de crise, les ménages aux budgets modestes. J’attends donc avec impatience les conclusions de la mission que vous avez évoquée.
compatibilité entre un office de tourisme intercommunal et des syndicats d'initiative communaux existants
M. le président. La parole est à M. Claude Biwer, auteur de la question n° 840, adressée à M. le secrétaire d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services et de la consommation.
M. Claude Biwer. Monsieur le secrétaire d’État, je voudrais tout d’abord souligner, pour faire suite à l’intervention de Mme Schillinger, que les PME rencontrent elles aussi des difficultés liées à certaines pratiques bancaires.
Ma question portera sur les conséquences, pour les syndicats d’initiatives communaux déjà existants, de la création d’un office de tourisme par la communauté de communes.
En effet, lorsque le nouvel office de tourisme intercommunal exerce les missions d’accueil, d’information et de communication, les syndicats d’initiative communaux se trouvent purement et simplement vidés de leur substance, même s’ils avaient jusqu’alors parfaitement exercé ces fonctions.
Les textes prévoient pourtant qu’un partage des compétences entre l’échelon communautaire et l’échelon communal peut intervenir.
Si l’élaboration et la mise en œuvre de la politique locale de tourisme et des programmes locaux de développement touristique, de même que les actions de promotion concernant l’ensemble du territoire de la communauté de communes, doivent, tout naturellement, relever de la responsabilité de l’office de tourisme intercommunal, les missions d’accueil, d’information, de promotion touristique de chaque commune devraient pouvoir être exercées conjointement par ce dernier et par les syndicats d’initiative communaux.
Il ne faut pas perdre de vue que chaque syndicat d’initiative fédère tout un réseau de bénévoles qui apportent leur concours à la promotion de la commune. Il serait donc regrettable de casser un outil efficace qui donne entière satisfaction.
Monsieur le secrétaire d'État, je souhaiterais que vous puissiez me préciser quelles initiatives vous comptez prendre pour permettre aux syndicats d’initiative de continuer à participer, à leur échelon, à la mise en œuvre d’une véritable politique touristique locale.
J’ajoute que, au-delà de la question des offices de tourisme intercommunaux, les maires ont conscience de ne plus pouvoir s’occuper de développement, ce qu’ils regrettent quelquefois. Il ne me semble pas souhaitable que leur rôle se réduise à la transmission de consignes ou à l’exercice de missions de police judiciaire – quand ils ont les moyens de les assurer !
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Hervé Novelli, secrétaire d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services et de la consommation. Monsieur le sénateur, la loi apporte une réponse claire à la question intéressante que vous avez posée.
Si la compétence « tourisme » a été transférée à un établissement public de coopération intercommunale, avec la création d’un office de tourisme communautaire, il est clair que les organismes locaux de tourisme – offices de tourisme ou syndicats d’initiative – voient leur compétence, et donc leur existence, cesser, au nom du principe d’exclusivité.
En revanche, l’office de tourisme communautaire peut se déconcentrer sur son territoire. En effet, la loi du 22 juillet 2009 de développement et de modernisation des services touristiques, qui a été adoptée à la quasi-unanimité et dont les dispositions ont été précisées par une circulaire aux préfets du 29 décembre 2009, a introduit dans le code du tourisme un article précisant que l’office de tourisme peut implanter un ou plusieurs bureaux, permanents ou non, chargés notamment de l’information touristique.
Certes, ces bureaux ne sont pas dotés de la personnalité juridique, mais ils peuvent être considérés comme un échelon déconcentré de l’office de tourisme, personne morale dont ils sont un élément constitutif. Ils peuvent être soit pérennes, soit temporaires. Il appartient aux collectivités territoriales de décider de l’organisation la plus adéquate en fonction des saisonnalités touristiques, de la localisation des centres d’intérêt attirant les clientèles et des modes de transport permettant de les atteindre.
Compte tenu de ces dispositions, le syndicat d’initiative transfrontalier de Marville, commune membre de la communauté de communes du pays de Montmédy, n’a plus d’existence légale, mais peut, le cas échéant, devenir un bureau de l’office de tourisme communautaire.
La circulaire d’application précitée de la loi du 22 juillet 2009 apporte d’autres précisions sur la simplification et l’actualisation du dispositif de classement des offices de tourisme. Cette loi réaffirme le principe de liberté organisationnelle de l’office de tourisme. Les groupements de communes ont désormais la liberté du choix statutaire. Il résulte de la circulaire que, à l’instar des communes, les syndicats mixtes ont désormais toute liberté pour déterminer le statut qu’ils souhaitent adopter en créant leur office de tourisme. Plusieurs solutions sont envisageables : la régie dotée de la seule autonomie financière, la régie qui dispose de la personnalité morale et de l’autonomie financière, l’établissement public industriel et commercial, l’association relevant de la loi de 1901, la société d’économie mixte ou le groupement d’intérêt économique. Comme vous le voyez, monsieur Biwer, la palette est assez large.
En ce qui concerne la procédure de classement des offices de tourisme, le dossier présenté par la commune demanderesse est constitué conformément à un formulaire type. Le maire transmet au préfet un dossier de demande de classement approuvé par délibération du conseil municipal sur proposition de l’office de tourisme. Le préfet doit se prononcer dans un délai de deux mois à réception du dossier complet. Les formalités préalables de consultation de la commission départementale de l’action touristique et de l’union départementale concernée de la Fédération nationale des offices de tourisme et syndicats d’initiative sont supprimées. Cette simplification est l’un des avantages de la réforme. La décision du préfet est exempte de tout avis obligatoire et se fonde sur les seuls éléments versés au dossier. Le classement est prononcé par arrêté préfectoral pour une durée de cinq ans.
Tels sont, monsieur le sénateur, les éléments que je souhaitais vous communiquer en réponse à votre fort pertinente question.
M. le président. La parole est à M. Claude Biwer.
M. Claude Biwer. Monsieur le secrétaire d’État, je vous remercie de ces précisions.
Mon seul objectif est de souligner qu’il convient de permettre le maintien, fût-ce sous la forme d’annexes d’un office de tourisme communautaire, des syndicats d’initiative qui travaillent bien. En effet, leur action répond parfois à des circonstances très particulières au regard de la situation du reste de l’intercommunalité.
L’essentiel est que les syndicats d’initiative et ceux qui les animent puissent continuer à travailler. J’ai cru comprendre qu’ils pourraient poursuivre leur action – à titre bénévole… (Sourires.)
INÉGALITÉS DES ARRONDISSEMENTS PARISIENS EN MATIÈRE D'ÉLUS
M. le président. La parole est à M. Roger Madec, auteur de la question n° 814, adressée à M. le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales.
M. Roger Madec. Le statut régissant l’organisation administrative de Paris, de Lyon et de Marseille résulte de la loi du 31 décembre 1982. Le nombre de conseillers municipaux et leur répartition par arrondissement ou par secteur se fondent sur le recensement de 1982.
Or, entre 1982 et 2010, la population parisienne a sensiblement évolué et la répartition des sièges de conseiller de Paris entre les arrondissements n’a pas fait l’objet d’aménagements.
J’avais déjà déposé une question écrite sur ce sujet. Je rappelle que le Gouvernement a en principe un délai d’un mois, éventuellement prolongé d’un mois supplémentaire, pour y répondre. L’absence de réponse gouvernementale m’amène aujourd’hui à poser la présente question orale.
En 2006, j’avais interrogé le ministre de l’intérieur de l’époque sur la répartition des sièges de conseiller de Paris entre les arrondissements. Faisant montre de prudence, celui-ci nous avait incités à attendre la publication du recensement général de 2008. Nous sommes en 2010, et j’espère, monsieur le secrétaire d’État, que votre réponse, dans sa prudence, ne m’invitera pas à attendre la publication des résultats du recensement général de 2013…
Paris compte 163 conseillers, dont la répartition entre les arrondissements est fortement inégale. En effet, à l’exception du XVe arrondissement, plus l’arrondissement est peuplé, moins il est représenté. Certains ratios entre le chiffre de la population et le nombre d’élus vont même à l’encontre de l’article L. 2121-2 du code général des collectivités territoriales.
À titre d’exemples, le XIXe arrondissement compte douze élus au Conseil de Paris pour 186 180 habitants, soit un conseiller pour 15 515 habitants ; le XVIe arrondissement, avec 153 920 habitants, a treize élus au Conseil de Paris, représentant chacun 11 840 habitants ; le XVIIe arrondissement, dont la population est moindre, dispose de treize sièges de conseiller, soit un pour 12 409 habitants : force est de constater que les écarts entre les arrondissements sont aujourd’hui si importants que les Parisiens ne sont plus représentés de façon égale au Conseil de Paris. Tout un chacun admettra qu’il n’est pas normal qu’un certain nombre de Parisiens ne soient pas pris en compte dans la représentation de leur arrondissement.
Depuis le dépôt de cette question orale, la réforme des collectivités territoriales a été adoptée. Les scenarii tendent à indiquer que Paris devrait perdre 100 élus, sa représentation passant de 163 conseillers de Paris à 63 conseillers territoriaux.
Paris est une ville-département où un conseiller est à la fois conseiller municipal et conseiller général. La fusion des entités territoriales et la création des conseillers territoriaux par les articles L. 3121-1 et L. 4131-1 du code général des collectivités territoriales m’amènent à m’interroger sur l’avenir des conseillers de Paris.
En premier lieu, le nombre des conseillers de Paris sera-t-il corrigé afin de compenser cette carence de démocratie ? Avez-vous des indications chiffrées à nous fournir ?
En second lieu, dans le cadre de la mise en place de la réforme des collectivités territoriales, pouvez-vous nous indiquer expressément si l’objectif est de passer de 163 conseillers de Paris à 63 conseillers territoriaux ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Alain Marleix, secrétaire d'État à l'intérieur et aux collectivités territoriales. Monsieur le sénateur, vous soulevez deux questions de nature différente, la première tenant aux effectifs des conseils d’arrondissement et la seconde à la représentation des arrondissements au sein du Conseil de Paris.
Les effectifs des conseils d’arrondissement échappent au droit commun des conseils municipaux et ne relèvent pas de l’article L. 2121-2 du code général des collectivités territoriales. En effet, comme vous l’avez vous-même rappelé, la loi du 31 décembre 1982, adoptée par la majorité socialiste de l’époque, a introduit dans ledit code des dispositions selon lesquelles « le nombre des conseillers d’arrondissement est le double de celui des conseillers municipaux, sans toutefois pouvoir être inférieur à dix ni supérieur à quarante ». Les arrondissements ne disposant pas des mêmes compétences que les communes, il n’est pas nécessaire de prévoir pour leur conseil un effectif correspondant exactement à celui du conseil municipal d’une commune de taille équivalente. Telle est la réponse qui a été faite par tous les gouvernements à la question que vous avez posée.
Pour ce qui concerne la représentation des arrondissements au Conseil de Paris, votre question touche à la fois au principe de l’égalité du suffrage et au bon fonctionnement tant de notre système électoral que des assemblées locales.
Le Conseil constitutionnel, dans sa décision du 28 décembre 1982, a déclaré conforme à la Constitution la loi relative à l’organisation administrative de Paris, Marseille, Lyon et des établissements publics de coopération intercommunale. Par là même, il a validé l’actuelle répartition des sièges de conseiller de Paris entre les arrondissements, qui prend naturellement en compte les écarts de population entre ces derniers.
D’autres motifs d’intérêt général entrent cependant en considération.
En premier lieu, il s’agit d’assurer ainsi le bon fonctionnement du mode de scrutin proportionnel avec application d’une prime majoritaire. Le recours à la représentation proportionnelle a pour objet de permettre la représentation de la minorité et constitue donc une garantie du pluralisme. Afin que cela fonctionne, il convient que trois conseillers de Paris au moins soient élus dans chaque arrondissement.
En second lieu, il n’est pas envisageable en l’état d’augmenter le nombre global de conseillers de Paris afin de mieux doter certains arrondissements. Le Conseil de Paris compte déjà 163 membres, ce qui en fait la deuxième plus importante assemblée délibérante de collectivité locale, après le conseil régional d’Île-de-France. L’augmentation de son effectif induirait des coûts supplémentaires et rendrait son fonctionnement plus lourd et plus complexe.
Cela étant, la loi Jospin-Vaillant de 2002 a mis en place une nouvelle forme de recensement annuel pour les grandes villes. Il en sera bien entendu tenu compte pour les prochaines élections municipales, comme il en a été tenu compte lors du découpage en vue des élections législatives.
M. le président. La parole est à M. Roger Madec.
M. Roger Madec. Monsieur le secrétaire d’État, je pense que vous m’avez mal entendu : je n’ai pas demandé que l’on augmente le nombre des conseillers de Paris et je n’ai pas remis en cause l’élection d’au moins trois conseillers par les arrondissements peu peuplés du centre de la capitale.
Il sera tenu compte des résultats du recensement annuel pour les prochaines élections municipales, dites-vous ; dont acte. Cependant, je reste sur ma faim concernant la déclinaison de la réforme que vous avez portée devant le Parlement : que deviendra le statut particulier de Paris, qui est une ville-département, et quel sera le nombre de ses conseillers territoriaux ? J’espère que nous y verrons plus clair prochainement.
désignation des membres de l'observatoire de la laïcité
M. le président. La parole est à Mme Françoise Laborde, auteur de la question n° 823, adressée à M. le Premier ministre.
Mme Françoise Laborde. Monsieur le secrétaire d’État, bien que je déplore l’absence ce matin de M. le Premier ministre, je n’en serai pas moins très attentive à la réponse que vous m’apporterez. C’est en effet pour mettre un terme à trois ans d’attente que je l’avais interrogé sur la publication du décret du 25 mars 2007 créant l’observatoire de la laïcité, décret qui reste encore sans suite à ce jour.
C’est en 2003 que, parallèlement aux travaux de la commission Stasi consacrés à la laïcité, le Président de la République de l’époque, M. Jacques Chirac, avait pris l’engagement de constituer cet organisme. L’objectif affiché était clair : mieux faire respecter la laïcité dans les hôpitaux et les services publics et surtout alerter les Français et les pouvoirs publics sur les risques de dérive ou d’atteinte au principe de la séparation des églises et de l’État.
Selon les termes mêmes du décret, l’observatoire « réunit les données, produit et fait produire les analyses, études et recherches » en lien avec la laïcité et « remet chaque année au Premier ministre un rapport qui est rendu public ».
En outre, la composition de l’observatoire doit garantir une approche transversale de la question. Celui-ci compte parmi ses membres deux députés et deux sénateurs désignés respectivement par le président de l’Assemblée nationale et le président du Sénat, dix personnalités désignées en raison de leur compétence et de leur expérience, ainsi que des représentants de la haute administration issus des ministères de l’intérieur, des affaires étrangères, de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur, de la justice, de la santé, de la fonction publique, de l’outre-mer.
Je déplore que le Gouvernement saisisse chaque occasion d’instrumentaliser les questions relatives aux religions et à la laïcité, comme nous avons encore pu le voir cette semaine. Plutôt que de jouer d’effets d’annonce, il est urgent que le Gouvernement donne enfin à l’observatoire les moyens de vivre et de remplir son rôle en matière de mesure et de promotion de la laïcité. Un tel outil, à l’instar de la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité, est nécessaire à notre République. La laïcité, grand principe fondateur de la République et de la paix sociale dans notre pays, le vaut bien ! Trois ans après la publication du décret, qu’en est-il concrètement de l’observatoire de la laïcité ? Quand comptez-vous procéder à la désignation de ses membres ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Alain Marleix, secrétaire d'État à l'intérieur et aux collectivités territoriales. Madame Laborde, M. le Premier ministre vous prie de bien vouloir l’excuser.
Le Gouvernement est bien entendu extrêmement attaché au principe de laïcité. Énoncé à l’article 1er de la Constitution, il constitue l’un des piliers de notre pacte républicain. C’est assurément l’une des valeurs dans lesquelles nos concitoyens se reconnaissent le plus.
Vous l’avez rappelé, un décret en date du 25 mars 2007 avait prévu la création d’un observatoire de la laïcité ayant vocation à assister « le Gouvernement dans son action visant au respect du principe de laïcité dans les services publics ».
Comme vous l’avez souligné, cet observatoire ne s’est jamais réuni. En effet, bien que l’attention des pouvoirs publics à ces questions ne se soit jamais démentie, il a semblé opportun, dans le contexte de la révision générale des politiques publiques, la RGPP, qui prévoit la suppression de commissions administratives et la reconfiguration des instances chargées de veiller au respect des libertés fondamentales, de s’appuyer sur des institutions existantes, à l’autorité reconnue, plutôt que de favoriser l’émergence de nouvelles structures.
C’est la raison pour laquelle le Gouvernement envisage de confier à brève échéance à une institution dont les compétences pourraient utilement reprendre celles de l’observatoire de la laïcité le soin d’orienter l’action des pouvoirs publics en la matière. Cette mission pourrait ainsi être confiée au Défenseur des droits ou au Haut conseil à l’intégration. J’en prends l’engagement devant vous aujourd’hui, le Gouvernement fera connaître sa position définitive avant l’été, après avoir évalué la pertinence de ces deux options.
M. le président. La parole est à Mme Françoise Laborde.
Mme Françoise Laborde. L’observatoire n’ayant pas été constitué à cause de la RGPP, qui est mise à toutes les sauces, il ne pouvait se réunir…
Je tiens à souligner la disparition d’un certain nombre de lieux de vigilance : plus de secrétariat d’État aux droits des femmes, bientôt plus de Défenseure des enfants. Plutôt que de créer un nouvel organisme, vous jugez préférable de recourir à une institution reconnue, mais je crains que le Défenseur des droits n’ait beaucoup de missions à mener de front à l’avenir. En tout cas, comptez sur notre vigilance !
marge des distributeurs sur les prix des produits agricoles
M. le président. La parole est à M. René-Pierre Signé, auteur de la question n° 754, adressée à M. le ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche.
M. René-Pierre Signé. Monsieur le ministre, je veux appeler votre attention sur la hausse vertigineuse des prix en rayons des aliments peu transformés au regard de la stagnation ou de la baisse des prix à la production.
L’abandon des prix agricoles aux lois du marché et de la concurrence a entraîné une dérégulation, mise à profit par les prédateurs de la grande distribution qui, en vérité, fixent les prix.
Une enquête portant sur les prix agricoles, tels que ceux de la volaille, du porc ou du lait, relève une hausse à la vente alors que, dans le même temps, on note une baisse du prix payé aux producteurs ; pour le lait, particulièrement, on observe une baisse de 7 % des prix à la production et une hausse de 5 % à 11 % des prix de vente. On constate évidemment des écarts suivant les distributeurs, mais on retrouve toujours la même opacité pour les étapes intermédiaires.
Pour que le consommateur ne soit plus victime de ces déréglementations qui l’inquiètent, il paraît nécessaire de fixer le prix de vente d’un produit en se fondant sur son prix agricole. Les agriculteurs, qui répondent à toutes les exigences de l’Union européenne, veulent, c’est bien le moins, vivre de la vente de leurs produits estimés à leur juste valeur, d’autant que la prochaine révision de la PAC risque de les pénaliser.
Monsieur le ministre, le Gouvernement peut-il envisager de prendre des dispositions pour lutter contre ces prix et ces marges injustifiés ? Le coefficient multiplicateur, déjà appliqué aux fruits et légumes, peut-il être étendu aux produits bruts ou peu transformés, même si je n’ignore pas qu’il ne favorise pas la concurrence ?
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Bruno Le Maire, ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche. Monsieur Signé, vous avez raison : il faut redonner une plus grande part de la valeur ajoutée aux producteurs agricoles, qui sont aujourd'hui les acteurs les plus lésés au sein de l’ensemble de la filière alimentaire. Toute la politique du Gouvernement vise à renforcer leur pouvoir dans les négociations et à faire en sorte qu’ils récupèrent une part plus importante de la valeur ajoutée.
À cette fin, le Gouvernement présentera un certain nombre de dispositions dans le projet de loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche, qui sera examiné en première lecture au Sénat à partir du 18 mai prochain.
Une première mesure consistera à renforcer l’Observatoire des prix et des marges, aujourd’hui simplement présent sur internet et dont les travaux ne donnent lieu à aucune suite. Je souhaite qu’il puisse à l’avenir couvrir l’ensemble des produits agricoles, prendre en compte les coûts de production et commander des études spécifiques sur la formation des marges. Il devra remettre chaque année un rapport au Parlement, qui exercera un droit de suite.
Une deuxième mesure visera à instaurer, dans chaque filière, le recours obligatoire au contrat écrit, ce qui permettra de négocier un prix plus rémunérateur qu’actuellement pour les producteurs.
Une troisième mesure tendra à renforcer le rôle des organisations de producteurs. Elles pourront alors négocier en position de force pour conclure des contrats efficaces. Une telle évolution suppose une modification du droit de la concurrence européen, car en son état actuel le droit communautaire ne permet pas aux producteurs de se regrouper de manière plus cohérente pour mieux négocier les prix, et donc les marges, avec les industriels et les distributeurs.
J’ai déjà demandé à M. Joaquin Almunia une telle modification du droit de la concurrence, dont je parlerai demain à M. Dacian Cioloş, commissaire européen à l’agriculture et au développement durable. Je souhaite que nous avancions sur ce sujet. La bataille sera longue et difficile, mais il me paraît indispensable de la livrer.
Enfin, je suis réservé sur l’extension du coefficient multiplicateur, car je crains que les inconvénients ne l’emportent sur les avantages. Les prix risqueraient de s’établir à un niveau trop élevé, au détriment du consommateur. Il convient de trouver un équilibre entre la défense des intérêts des producteurs et la valorisation de leurs marges, d’une part, et la préservation du pouvoir d’achat des consommateurs, d’autre part.
M. le président. La parole est à M. René-Pierre Signé.
M. René-Pierre Signé. Monsieur le ministre, je prends bonne note de votre réponse encourageante. Sur l’essentiel, nous sommes d’accord.
J’insiste sur le fait que le maintien de prix de vente élevés n’a, a priori, aucune justification. Cela ne profite qu’à la grande distribution et pénalise les consommateurs.
Par ailleurs, la chaîne de commercialisation des produits agricoles et le mécanisme de formation des prix doivent devenir plus transparents. À cet égard, il me paraît en effet nécessaire de renforcer le rôle des organisations des producteurs et de développer un système de nature réglementaire permettant d’encadrer les marges, dont la progression peut être injustifiée.
Enfin, si le dispositif du coefficient multiplicateur présente à l’évidence certains défauts, son extension, fût-ce pour une période limitée, pourrait néanmoins avoir pour effet bénéfique de freiner l’envolée des prix en rayons et de stabiliser le système de commercialisation.
perspectives de l'enseignement agricole
M. le président. La parole est à Mme Françoise Férat, auteur de la question n° 770, adressée à M. le ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche.
Mme Françoise Férat. Monsieur le ministre, j’ai souhaité attirer votre attention sur un sujet qui me tient particulièrement à cœur : l’enseignement agricole. Rapporteur pour avis de ce budget depuis neuf années, c’est toujours avec enthousiasme que je le défends. Je salue d’ailleurs votre engagement pour lui redonner des perspectives : je pense notamment à l’organisation des assises nationales de l’enseignement agricole public et à la mise en œuvre du pacte renouvelé pour cet enseignement.
À ce sujet, je souhaiterais connaître les principales orientations fixées pour les prochaines années et les suites concrètes qui seront données à ces assises, s’agissant plus particulièrement des complémentarités qui pourraient être cultivées entre le ministère de l’éducation nationale et celui de l’alimentation, de l’agriculture et de la pêche.
En effet, un tel partenariat entre les deux systèmes d’éducation aurait tout son sens et correspondrait parfaitement à l’esprit de la loi organique relative aux lois de finances. Il permettrait de rendre plus perméables et de conforter les deux principaux dispositifs d’éducation de notre pays, tout en reconnaissant la culture et les spécificités de chacun d’entre eux.
Comme vous le savez, j’ai toujours soutenu une logique de recherche et de mutualisation en vue d’optimiser la gestion des moyens d’enseignement. Développer les liens entre les deux ministères me semble être une bonne solution. Cela contribuerait à redonner à l’enseignement agricole une place de choix au sein de notre système éducatif.
M. le président. La parole est à M. le ministre.