INTRODUCTION
Le 7 janvier 1997, Alain JUPPÉ, Premier Ministre
m'avait demandé, en me confiant une mission parlementaire, de mener une
large réflexion sur les conséquences qu'auraient les Nouvelles
Technologies de l'Information et de la Communication (NTIC) sur la
Société Française, à l'aube du 3
e
millénaire.
Il m'avait demandé de lui préparer un ensemble de mesures qui
seraient à mettre en oeuvre, pour que la France puisse ainsi mieux
entrer dans le 21
e
siècle.
Je devais remettre mon rapport, au Premier Ministre, le 6 Juillet 1997...
Le Premier Ministre et son gouvernement ayant changé le 2 Juin 1997 et
les usages obligeant, lors d'un changement de majorité, qu'un
parlementaire, ainsi mandaté, se décharge de sa mission, j'ai
rencontré, début Juin 1997, le Président du Sénat,
Monsieur René MONORY, qui m'a demandé de poursuivre mon travail,
et même de l'élargir.
Sous l'autorité de Monsieur Christian PONCELET, la Commission des
Finances du Sénat, commission à laquelle j'ai l'honneur
d'appartenir, a décidé le 3 Juillet 1997 de me confier une
nouvelle et large mission sur les Nouvelles Technologies de l'Information et de
la Communication.
Mes collègues, Pierre LAFFITTE, Alain GERARD et Franck SERUSCLAT, ainsi
que le Député Patrice MARTIN-LALANDE et la mission : "
Maîtriser la société de l'information : Quelles
stratégies pour la France ? " dont les rapporteurs étaient
Messieurs Alex TÜRK, Pierre HERISSON et Alain JOYANDET, ayant remis en
1997 un ensemble de rapports particulièrement bien instruits, j'ai
complété mes travaux, à partir de Juillet 1997, par une
nouvelle approche, pour éclairer sous un jour nouveau, la
problématique posée par la montée en puissance des NTIC,
dans notre Pays.
Appuyant les fondations de mon travail sur plus de cinq siècles de notre
Histoire, j'ai essayé de comprendre pourquoi la France, depuis le
début de la révolution industrielle, avait quasi
systématiquement un comportement atypique, si nous le comparons aux
démocraties anglo-saxonnes, face aux ruptures technologiques.
En me promenant ainsi sur les sentiers de l'Histoire, j'ai pu arrimer mon
raisonnement sur quelques points d'ancrage forts, qui prennent appui sur la
découverte de l'Imprimerie, en passant par le Concile de Trente et la
Réforme, en observant l'Edit de Nantes et sa révocation avec la
fuite des Huguenots, pour mieux comprendre la France Moderne qui, malgré
sa volonté profonde de s'ouvrir, continue à vouloir s'abriter
sous l'aile d'un Etat fort tel que l'avait conçu Colbert.
Les Nouvelles Technologies de l'Information et de la Communication permettant
de tisser à une vitesse foudroyante, avec Internet, une toile mondiale
qui, déjà, relie plus de 100 millions d'êtres humains, et
qui devrait fondre dans une même communauté plus d'un milliard
d'hommes avant 10 ans, posera inexorablement des problèmes fondamentaux
à notre société pyramidale héritée de la
Rome Antique et de la Rome Catholique.
Aussi, après m'être ainsi promené dans la Passé,
j'ai décidé de plonger dans le Futur en allant à la
rencontre des " Internautes " qui, avec un esprit de pionniers, sont
en train
de défricher les sentiers de l'avenir.
Comme cela se fait dans ce monde nouveau, j'ai allumé une petite
lumière, qui s'appelle une page Web, pour dire à cette
Communauté que j'existais. Comme la curiosité est un des traits
marquants de ces aventuriers de la toile, mon site a accueilli plus de 16 000
visiteurs en un an.
Ils ont été des milliers et des milliers à répondre
à mes longs questionnaires, qui m'ont permis de mieux comprendre leurs
attentes, et à m'envoyer des e-mails (messages électroniques) ou
à laisser souvent de longs développements sur le Livre d'Or ou
dans le cadre du forum.
Ainsi, j'ai eu le privilège en faisant ce long plongeon dans l'avenir,
d'être le premier parlementaire français qui aura autant appris
des intervenants du réseau, que des longues et intéressantes
auditions des personnalités placées au sommet de nos diverses
structures pyramidales.
Je ne transcris, dans le deuxième tome de ce rapport, qu'une infime
partie des remarques, souvent pertinentes, même si parfois elles
étaient décapantes, des Internautes de la base.
J'ai tant appris, dans cette année écoulée sur le
réseau, que je porte en moi l'intime conviction que, pour tout travail
en profondeur sur des problèmes de société, les
parlementaires en mission, comme les commissions d'enquêtes
parlementaires, se feront un devoir, dorénavant, d'aller consulter un
vaste public d'internautes, en utilisant un langage nouveau et non pas en
transcrivant simplement nos documents administratifs trop souvent abscons.
Puisse ce rapport, dans les trois domaines majeurs de l'avenir, l'Education,
l'Entreprise et le Citoyen, inspirer l'ensemble des hommes et des femmes qui
gouvernent et administrent notre Pays, car les temps seront vite venus
où une nouvelle ère va s'ouvrir pour toutes les
Démocraties du Monde.
Il serait dommageable, pour notre Pays, que ses gouvernants, hauts
fonctionnaires et aussi chefs d'entreprise qui se croient à l'abri,
depuis des siècles, en haut de leur structure ne sentent pas que la
mutation profonde portée par les réseaux est en train d'imbiber
la base de nos vieilles pyramides, et ne pressentent pas la
nécessité de ressourcer leur légitimité dans cette
nouvelle eau de jouvence.
René TREGOUET
e-mail : tregouet@senat.fr