Rapport d'information n° 471 (2008-2009) de M. Yves KRATTINGER et Mme Jacqueline GOURAULT , fait au nom de la mission commune d'information, déposé le 17 juin 2009

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N° 471

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2008-2009

Annexe au procès-verbal de la séance du 17 juin 2009

RAPPORT D'INFORMATION

FAIT

au nom de la mission temporaire sur l' organisation et l' évolution des collectivités territoriales (1)

Par M. Yves KRATTINGER et Mme Jacqueline GOURAULT,

Sénateurs.

(1) CETTE MISSION TEMPORAIRE EST COMPOSÉE DE : M. CLAUDE BELOT, PRÉSIDENT ; M. PIERRE-YVES COLLOMBAT, MME ANNE-MARIE ESCOFFIER, MM. CHARLES GUENÉ, RÉMY POINTEREAU, JEAN-FRANÇOIS VOGUET, VICE-PRÉSIDENTS ; MM. YVES DÉTRAIGNE, BRUNO RETAILLEAU, SECRÉTAIRES ; MME JACQUELINE GOURAULT, M. YVES KRATTINGER, RAPPORTEURS ; MME MARIE-FRANCE BEAUFILS, MM. CLAUDE BÉRIT-DÉBAT, DOMINIQUE BRAYE, MME CLAIRE-LISE CAMPION, MM. BERNARD CAZEAU, JEAN-PATRICK COURTOIS, PHILIPPE DALLIER, ÉRIC DOLIGÉ, MME JOSETTE DURRIEU, M. JEAN-PAUL FOURNIER, EDMOND HERVÉ, PIERRE JARLIER, SERGE LAGAUCHE, ALAIN LAMBERT, MARC LAMÉNIE, PHILIPPE LEROY, CLAUDE LISE, HERVÉ MAUREY, JACQUES MÉZARD, FRANÇOIS PATRIAT, JEAN-CLAUDE PEYRONNET, LOUIS PINTON, BERNARD PI

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

Créée en octobre dernier à l'initiative de M. le Président du Sénat, votre mission temporaire s'est vu confier le soin de réfléchir en amont et formuler des propositions en toute indépendance d'esprit sur la réorganisation territoriale. Elle a inscrit sa démarche dans la perspective de la réforme lancée par le M. le Président de la République, ainsi que des travaux et réflexions qu'elle a suscités depuis qu'elle a été annoncée.

Votre mission s'est mise à l'ouvrage en étant consciente de la responsabilité particulière qui lui incombait d'éclairer le Sénat. Car c'est à lui que reviendra d'examiner en premier, à l'automne, le projet de loi que prépare actuellement le gouvernement.

Vos rapporteurs tiennent à se féliciter de l'excellent climat qui a caractérisé le déroulement des travaux de la mission dans un esprit d'ouverture et de consensus, et avec le souci de dégager des solutions opérationnelles et réalistes. Cela a été d'autant plus aisé que les membres de la mission ont tous, à un titre ou à un autre, l'expérience des responsabilités locales et, par conséquent, une connaissance approfondie de la réalité des territoires.

La mission a travaillé en toute indépendance d'esprit, respectant les différentes opinions qui ont pu s'exprimer en son sein.

Au terme des huit mois sur lesquels se sont étendus ses travaux, votre mission temporaire est en mesure de présenter un ensemble cohérent de propositions, susceptible de modifier en profondeur notre organisation territoriale, d'améliorer le fonctionnement des collectivités qui font vivre les territoires au quotidien et de renforcer la démocratie locale

Rappelant le rôle irremplaçable joué par les collectivités territoriales, qui, en 2008, ont assuré 73 % de l'investissement public, et dont la dette représente moins de 10 % de l'endettement national, votre mission a souhaité placer ses orientations de réforme sous le signe de la responsabilité et de la confiance à rétablir entre l'Etat et les collectivités territoriales, tout en souhaitant que ses propositions offrent l'opportunité de nouvelles avancées à la décentralisation.

Rappelons qu'à l'issue de la première phase de ses travaux, votre mission temporaire a présenté, en mars dernier, dans son rapport d'étape, un ensemble de vingt-sept préconisations, qui ont recueilli un large consensus en son sein et ont été accueillies favorablement par les grandes associations nationales d'élus dont elles relayaient assez largement les préoccupations et les attentes.

Fondées sur le constat de la diversité territoriale et de la nécessité d'apporter des réponses différenciées à la spécificité des situations, les préconisations ont plus particulièrement mis l'accent sur la nécessité d'achever la réforme de l'intercommunalité d'ici 2011, et de renforcer la démocratie locale à ce niveau, en laissant encore ouvertes les questions relatives aux collectivités à statut particulier.

Le débat auquel ont donné lieu ces premières orientations de la mission, lors de la séance publique du 18 mars dernier, a permis de mettre en lumière les attentes du Sénat en matière de réorganisation territoriale.

Sur cette base, la mission a engagé la seconde phase de ses travaux, avec la volonté d'aller plus loin, en mettant l'accent sur l' amélioration de la gouvernance territoriale , la clarification des compétences et la remise à plat des finances locales .

Elle a étayé sa réflexion sur une nouvelle série d'auditions (68 au total) et deux déplacements supplémentaires en Tarn-et-Garonne et dans les Hautes-Pyrénées 1 ( * ) , où elle a pu étudier les problématiques particulières des territoires ruraux et de montagne. Elle a ainsi pu prendre toute la mesure du rôle des collectivités territoriales en faveur du développement économique des territoires ruraux et de leur desserte en services publics.

Parvenue au terme de ses travaux, votre mission vous présente un ensemble de 90 propositions dont certaines, particulièrement audacieuses, s'appuient sur les nouveaux moyens offerts par la réforme constitutionnelle de 2003 : expérimentation et recours à la collectivité « chef de file » .

Au chapitre de la gouvernance, la mission a retenu trois axes :


• la création de métropoles , qui seraient dotées par la loi d'un statut d'EPCI à fiscalité propre, plus intégré encore que celui des communautés urbaines. Ce statut serait réservé, en fonction de critères définis par la loi, aux plus grandes agglomérations de France de taille européenne. Elles pourraient devenir par la suite des collectivités territoriales de plein exercice bénéficiant de la mise en commun des ressources communales (dotations et ressources fiscales), à condition que les communes membres en décident ainsi, par délibérations concordantes ;


• s'agissant de l'intercommunalité , la mission a réaffirmé ses premières préconisations, en précisant que l'élection au suffrage universel direct des conseillers communautaires se ferait par fléchage sur les listes municipales dans toutes les communes de plus de 500 habitants , en prenant dans l'ordre les premiers élus. Elle a souhaité, en outre, limiter le nombre des vice-présidents des bureaux communautaires en fonction de la population ;


• le renforcement de la coordination des politiques territoriales .

Dans ce but, la mission a débattu de deux options non exclusives l'une de l'autre :

- celle des conseillers territoriaux, défendue par les membres de l'UMP 2 ( * ) , mais que la mission n'a pas retenue ;

- et celle de créer une instance de coordination nouvelle, le conseil régional des exécutifs , solution en faveur de laquelle la mission s'est prononcée.

Rassemblant sous la présidence du président du conseil régional, les présidents des conseils généraux, des conseils d'agglomération et des représentants des communautés de communes, ce conseil se réunirait obligatoirement tous les trimestres pour fixer les orientations et faciliter les arbitrages nécessaires à la conduite des politiques territoriales. Pour sa part, une conférence départementale des exécutifs assurerait la concertation entre les acteurs de terrain sur leurs projets.

Au chapitre des compétences, la mission a souhaité tout d'abord préserver la capacité d'initiative des différentes collectivités territoriales sur le fondement de leur intérêt territorial respectif. Elle a ensuite ordonné ses propositions à partir des vocations propres à chaque niveau.


• Sur ces bases, la mission a proposé de confier aux régions , confortées dans leur rôle stratégique, d'être chef de file en matière de développement économique , avec la création, dans chaque région d'une structure de coordination « partenariale » regroupant tous les acteurs , et la mise en place d'un « portail » unique pour l'attribution des aides à la création et au développement des entreprises .

Serait, en outre, généralisé le transfert de la gestion des fonds européens aux régions, qui assureraient également le pilotage d'une autorité organisatrice de transport (AOT) « partenariale » unique et également le rôle de « chef de file » pour les interventions locales en faveur de l'enseignement supérieur , de la recherche et de l'innovation , en partenariat avec l'Etat.

Enfin, pour donner sa cohérence au pôle formation, recherche, innovation, la mission propose, par la voie de l'expérimentation , de transférer à quelques régions volontaires la compétence de l'emploi , actuellement assurée par l'Etat.


• Pour leur part, les départements , garants des solidarités territoriales et sociales , verraient conforter leurs responsabilités en la matière.

La lisibilité du rôle du département serait renforcée en ce qui concerne la prise en charge des personnes handicapées , par le financement de l'allocation adulte handicapé .

Egalement, dans le cadre d'une expérimentation , proposée par la mission, serait offerte aux départements et aux régions la possibilité d'exercer à titre expérimental la compétence en matière de médecine scolaire.

Il a paru utile à la mission de transférer aux départements et aux régions les personnels d'intendance chargés de l'encadrement des TOS dans les collèges et les lycées .


• Pour les communes et les intercommunalités : la mission recommande, par ailleurs, de rationaliser l'exercice des compétences de proximité confiées au « bloc communal », en augmentant progressivement les compétences confiées aux intercommunalités, en particulier en matière d'aménagement, d'urbanisme et d'environnement.

En revanche, il n'a pas paru justifié de remettre en cause les compétences partagées dans les domaines du tourisme , de la culture , de la jeunesse et des sports . La réunion régulière du conseil régional des exécutifs permettra d'instaurer une grande cohérence des interventions, en s'appuyant sur le conventionnement et la mutualisation des moyens.

Au chapitre crucial des finances locales , la mission n'a pu, à son tour, que déplorer l'archaïsme et la complexité croissante d'un système à bout de souffle . Partant de ce constat, elle a souhaité tracer les pistes d'une remise à plat.

Il importe d'abord d'améliorer les liens financiers entre l'Etat et les collectivités territoriales qui placent actuellement celles-ci dans une situation de dépendance contraire à l'esprit de la décentralisation.

La mission propose un ensemble de mesures inscrites dans une cohérence globale :

- actualiser en permanence les valeurs locatives , chantier toujours remis à plus tard, et de plus en plus nécessaire ;

- cesser de créer de nouveaux dégrèvements et de nouvelles exonérations ;

- face à la suppression de la taxe professionnelle, la mission a réaffirmé son attachement au maintien d'un impôt économique local, préservant le lien entre collectivités locales et entreprises . Cet impôt économique serait scindé en deux parts , la première, assise sur la valeur foncière - ce qui supposerait la modernisation des valeurs locatives - et la seconde, sur la valeur ajoutée des entreprises.

La mission souhaite enfin le développement de la péréquation tant verticale (par un renforcement des dotations péréquatrices ) qu'horizontale, en appliquant à l'ensemble du territoire, sur des bases régionales, les mécanismes du fonds de solidarité de la région Ile-de-France.

*

* *

Examinées et adoptées le 17 juin par la mission, l'ensemble de ces propositions feront l'objet d'un nouveau débat public interactif au Sénat, le 30 juin prochain, dans la perspective de préparer la discussion du projet de loi qui s'ouvrira au Sénat, à l'automne prochain.

CHAPITRE PRÉLIMINAIRE : LES ENSEIGNEMENTS DU DÉBAT PUBLIC DU 18 MARS AU SÉNAT SUR LA RÉORGANISATION TERRITORIALE

Lors de sa séance du mercredi 18 mars 2009, le Sénat a organisé un débat en séance publique sur l'organisation et l'évolution des collectivités territoriales, à l'initiative et sous la présidence de M. Gérard Larcher, Président du Sénat, dans le cadre de la première semaine sénatoriale de contrôle de l'action gouvernementale.

Conçu dans un esprit de dialogue et d'ouverture, ce débat, qui a eu lieu en présence de Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de l'Intérieur, de l'Outre-mer et des Collectivités territoriales, et de M. Alain Marleix, secrétaire d'Etat à l'Intérieur et aux Collectivités territoriales, a tout à la fois constitué pour votre mission un premier aboutissement et un enrichissement important de ses travaux grâce aux observations et aux prises de positions formulées par chacun de nos collègues présents.

Cette séance d'un genre nouveau, qui inaugurait la pratique des débats en séance publique lors de la semaine de contrôle parlementaire, a en effet pris pour base le rapport d'étape de votre mission. Après une présentation des travaux de la mission et de ses premières préconisations par votre président, M. Claude Belot, vos deux premiers vice-présidents, MM. Pierre-Yves Collombat et Rémy Pointereau, et vos rapporteurs, les différents orateurs des groupes politiques se sont prononcés autant sur la méthode suivie que sur les analyses et les conclusions du rapport d'étape. Puis, un débat libre s'est engagé pour permettre aux sénateurs qui le souhaitaient d'intervenir et, le cas échéant, d'interroger les ministres ou les membres de la mission présents au banc des commissions.

Le succès rencontré par ce débat public a clairement montré, s'il en était besoin, combien les collectivités territoriales constituent, pour tous les sénateurs, un sujet majeur de préoccupation et de réflexion.

L'objet assigné par le Président Larcher à la mission est de produire une base de réflexion commune permettant au Sénat d'engager efficacement la discussion sur la réforme à venir des collectivités territoriales. Dans l'esprit de vos rapporteurs, il est donc tout à fait nécessaire que les travaux de la mission s'enrichissent pleinement des enseignements que l'on peut tirer du débat qui s'est tenu et des orientations principales qu'il a fait ressortir.

C'est pourquoi, avant de présenter les axes complémentaires de la réforme auxquels les travaux de la mission ont abouti, vos rapporteurs ont souhaité analyser les observations et réflexions que ses premières préconisations ont suscitées.

I. LE RENFORCEMENT DE L'INTERCOMMUNALITÉ

Il s'agit là d'un thème qui, au sein de la mission, a fait l'objet d'un large consensus ayant permis de formuler des préconisations abouties dans trois directions : l'achèvement et la rationalisation de la carte intercommunale, le développement des compétences des intercommunalités et le renforcement de la démocratie locale.

Le débat en séance publique a montré que ces préconisations recevaient, de la part de nos collègues, le même accueil favorable, sous réserve de quelques modifications ou précisions.

A. L'ACHÈVEMENT ET LA RATIONALISATION DE LA CARTE INTERCOMMUNALE

Dans son rapport d'étape la mission a préconisé l'achèvement de la carte intercommunale avant fin 2011, sur une base incitative. Les périmètres pertinents des intercommunalités seraient établis sur la base des travaux des commissions départementales de coopération intercommunale (CDCI) dont la composition serait rénovée afin d'en améliorer la représentativité (préconisations n° 1 et 2).

Dans le même temps, la mission a suggéré de supprimer les dispositions législatives réglementant l'existence des pays, sans que cela ne puisse porter atteinte à la liberté de coopérer des communes et des communautés (préconisation n° 7).

Au cours du débat, nos collègues ont très largement marqué leur accord avec ces propositions, sous quelques réserves toutefois. Ainsi, M. Dominique Braye a émis le voeu que soient précisés les moyens - incitatifs ou non - par lesquels l'achèvement et la rationalisation de la carte intercommunale pourraient être réalisés dans les délais prévus. MM. Jean-Pierre Chevènement et Hervé Maurey, pour leur part, ont marqué leur attachement aux communes et souligné que le succès de l'intercommunalité ne devait pas se faire à leurs dépens.

B. LE DÉVELOPPEMENT DES COMPÉTENCES DES INTERCOMMUNALITÉS

Considérant que l'intercommunalité constituait une des dynamiques majeures de la décentralisation, et estimant qu'il convenait de la renforcer encore, la mission a recommandé que le nombre des compétences obligatoires et optionnelles des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) soit progressivement augmenté, afin de rendre plus consistant le socle commun des compétences qu'ils exercent (préconisation n° 3).

Parallèlement, elle a proposé qu'avant fin 2012, sur proposition du représentant de l'Etat validée par la CDCI après une large concertation départementale, le nombre des syndicats intercommunaux soit fortement réduit, leurs compétences d'attribution étant transférées aux intercommunalités concernées (préconisation n° 4).

Ni l'une ni l'autre de ces préconisations n'ont été contestées, certains de nos collègues soulignant même, comme M. Jean-Patrick Courtois, l'intérêt qui pouvait s'attacher à la suppression d'un certain nombre de syndicats intercommunaux. D'une manière générale, il semble que les sénateurs s'accordent sur la nécessité de poursuivre le renforcement des intercommunalités, à la condition cependant, comme l'a relevé M. Claude Bérit-Débat, qu'il ne s'effectue pas au prix de la suppression des communes.

C. LE RENFORCEMENT DE LA DÉMOCRATIE LOCALE

Etendue à l'ensemble du territoire, confortée dans ses missions et dotée de compétences élargies, l'intercommunalité ne pourrait rester étrangère aux exigences de la démocratie locale. C'est pourquoi la mission a recommandé que les conseillers communautaires soient élus par « fléchage » sur les listes des candidats aux élections municipales. Afin de rendre applicable ce système au plus grand nombre possible de communes, elle a corrélativement proposé que le mode de scrutin actuellement applicable dans les communes de 3 500 habitants et plus soit étendu aux communes de 500 habitants et plus, une obligation de candidature étant par ailleurs établie dans toutes les communes (préconisations n° 5 et 6).

Ces préconisations, qui correspondaient aux souhaits des associations d'élus municipaux et intercommunaux, ont fait l'objet d'un large consensus, même si certains de nos collègues, à l'instar de M. Jean-Pierre Chevènement, ont fait état des réserves que l'élection par fléchage leur inspirait.

Par ailleurs, Mme Nathalie Goulet a attiré l'attention de la mission sur le fait que, si le système proposé était adopté, il conviendrait de réexaminer la situation des présidents d'intercommunalité au regard des règles relatives au cumul des mandats, ce dont est convenu le président de la mission, M. Claude Belot.

II. LES VOCATIONS RESPECTIVES DES NIVEAUX ET LEUR ARTICULATION

Les travaux de la mission sur la réorganisation des collectivités territoriales, la clarification de la répartition des compétences entre elles et la refondation des finances locales ont abouti, dans le cadre du rapport d'étape, à près d'une vingtaine de préconisations dont la très grande majorité, comme l'a souligné M. Rémy Pointereau au cours du débat, ont été adoptées à l'unanimité. Reste que sur un nombre très restreint de questions, aucun accord n'a pu être trouvé, la mission devant poursuivre sa réflexion.

Il semble à vos rapporteurs que les débats en séance publique ont très largement reflété ceux qui se sont tenus au sein de la mission. Si la plupart des préconisations du rapport d'étape ont été favorablement accueillies et ont fait l'objet d'observations très enrichissantes, certains de nos collègues ont fait valoir leurs réserves voire leur désaccord ponctuel sur quelques unes d'entre elles, tandis que les points non tranchés par la mission ont été âprement discutés. Tel fut en particulier le cas de la question des conseillers territoriaux censés se substituer à la fois aux conseillers régionaux et aux conseillers généraux, question qui a révélé le plus de désaccords parmi les sénateurs.

Par ailleurs si, comme l'a rappelé M. Jean-Patrick Courtois, l'un des principes qui ont guidé la mission pour concevoir la réforme de l'organisation territoriale a été celui de permettre aux collectivités territoriales d'accomplir plus parfaitement leurs missions à un moindre coût, Mme Nicole Borvo Cohen-Seat a estimé que l'évaluation des coûts actuels et celle des gains escomptés par certaines propositions de réforme n'a pas été suffisamment effectuée.

A. L'ADAPTATION DES STRUCTURES À LA DIVERSITÉ DES TERRITOIRES

1. La création d'un nombre restreint de métropoles

Jugeant nécessaire de donner au fait métropolitain une traduction institutionnelle pertinente, afin de tirer pleinement parti des dynamiques qu'il génère, la mission s'est prononcée pour la création législative d'un nombre limité de métropoles, dont les compétences seraient renforcées par le transfert de certaines des compétences des communes ou la délégation d'un large éventail des compétences des communes, des départements ou des régions (préconisations n° 8 et 9).

Vos rapporteurs notent que la question des métropoles a largement retenu l'attention de nos collègues au cours du débat du 18 mars. Les sénateurs présents se sont en effet interrogés tant sur les conséquences que l'institutionnalisation des métropoles pourrait avoir sur les communes qui les composeraient ou les territoires qui les enserreraient, que sur leur périmètre et sur leur nombre.

Ainsi, M. Gérard Longuet a marqué sa préférence pour la solution retenue par la mission sur celle formulée par le Comité présidé par M. Edouard Balladur, dans la mesure où elle reposait moins sur la contrainte et conduisait à limiter le nombre de métropoles en ne retenant que celles de taille suffisamment importante.

Faisant également référence aux propositions formulées par le Comité pour la réforme des collectivités territoriales, M. Jean-Claude Peyronnet s'est inquiété de ce qu'elles devaient aboutir à la suppression des communes comprises dans l'aire métropolitaine.

Insistant à la fois sur la nécessité d'offrir à la diversité des situations locales des réponses adaptées et sur l'importance que revêtait la création, au sein des agglomérations de plus d'un million d'habitants, de structures institutionnelles efficaces et démocratiques, M. Michel Mercier a proposé que les cinq ou six métropoles créées par la loi se voient transférer, sur leur territoire, les compétences du département et certaines de celles des communes qui les composent, ces dernières conservant la personnalité morale de droit public.

M. Pierre Mauroy s'est en revanche opposé à la transformation des communes de l'aire métropolitaine en simple personnes morales et il a plaidé pour leur maintien en tant que collectivités territoriales de plein exercice. Il s'est par ailleurs prononcé en faveur d'un nombre plus important de métropoles - une vingtaine - afin que soit ainsi pleinement prise en compte l'urbanisation étendue de la France.

Jugeant que la compétitivité européenne des métropoles françaises était un enjeu crucial du débat, M. Gérard Collomb a posé la question du périmètre qu'il conviendrait leur reconnaître.

Enfin, MM. François Fortassin et Jean-Pierre Chevènement se sont inquiétés, pour le premier, du déséquilibre de développement pour les territoires périphériques et, pour le second, du démantèlement du département que la création de métropoles pourrait engendrer.

2. La promotion des regroupements volontaires de collectivités

Consciente que l'organisation territoriale actuelle devait pouvoir être modifiée pour prendre en compte les nouvelles dynamiques locales et nationales, la mission a proposé, dans son rapport d'étape, plusieurs possibilités de regroupements ou de fusions volontaires de collectivités territoriales entre elles, notamment le regroupement d'une région et des départements qui la composent, possibilités qui toutes obéiraient à la procédure suivante : le regroupement n'aurait lieu que sur proposition concordante des assemblées des territoires concernés statuant à la majorité et devrait être ratifié par un référendum organisé par les pouvoirs public à l'issue d'un large débat. Les fusions volontaires de communes se verraient, quant à elles, encouragées au moyen d'outils incitatifs, et la coopération entre les collectivités territoriales et leurs établissements publics réaffirmée (préconisations n° 10, 11, 12, 13 et 14).

Lors du débat en séance publique, ces possibilités de regroupements conçues sur une base exclusivement volontaire n'ont pas rencontré d'opposition, à l'exception de celles de M. Jean-Pierre Chevènement, qui a marqué sa réserve quant à de telles solutions, et de M. Adrien Gouteyron, qui s'est interrogé sur la nature uniquement incitative des dispositifs suggérés pour encourager les fusions de communes. Il a en effet considéré qu'ils pourraient, s'ils étaient mal conçus, permettre de forcer la main aux élus municipaux.

Les participants au débat ont, en revanche fait valoir un certain nombre d'observations sur le sujet. M. Alain Vasselle a relevé que le débat sur les regroupements de régions ou de départements avait été caricaturé alors que, selon lui, le principe qui devait le guider était celui de la subsidiarité, dont toute la réforme territoriale devait découler, une fois qu'une organisation territoriale pertinente par couples de collectivités aurait été identifiée.

M. Michel Mercier a estimé qu'en la matière, la bonne solution consistait à offrir aux collectivités territoriales une sorte de « boîte à outil » institutionnelle qui leur permette de se regrouper et de s'associer librement, sur une base volontaire, le législateur intervenant, le cas échéant, quelques années plus tard pour entériner et pérenniser les choix effectués.

S'attachant à la question de la fusion d'une région avec ses départements, et visant plus particulièrement le cas de l'Alsace, M. Philippe Richert a fait valoir que la simplicité devait primer et qu'il convenait de conserver les deux modes de scrutins cantonaux et régionaux, qui présentaient chacun leur mérite, quitte à réduire à la marge le nombre d'élus par des réaménagements justifiés de la carte électorale locale.

3. La prise en compte des spécificités de l'Outre-mer

Au stade du rapport d'étape, la mission, consciente de la nécessité de prendre en compte la spécificité des départements et régions d'Outre-mer, a réservé son analyse et n'a préconisé que le passage des régions monodépartementales à la collectivité unique (préconisation n° 26).

Seule Mme Lucette Michaux-Chevry s'est prononcée sur la question de l'Outre-mer au cours du débat en séance publique et vos rapporteurs ont pris note des réserves qu'elle a exprimées sur la pertinence du passage de tous les territoires concernés à la collectivité unique. La récente création par le Sénat, d'une mission commune d'information sur la situation des départements d'Outre-mer 3 ( * ) appelle à poursuivre l'examen de ces questions en étroite coordination avec celle-ci.

4. La poursuite de la réflexion sur le Grand Paris

La préconisation n° 27 du rapport d'étape proposait à la mission de poursuivre ses travaux sur la question du Grand Paris, des auditions propres à ce sujet devant être réalisées après la publication dudit rapport.

Le débat en séance publique a néanmoins permis à plusieurs de nos collègues de présenter leur analyse sur le sujet.

M. Yves Pozzo di Borgo a fait valoir que tout l'enjeu de la réflexion sur le Grand Paris était de parvenir à construire une structure permettant à la capitale de jouer pleinement son rôle de moteur pour la croissance de la région.

M. Philippe Dallier, pour sa part, estimant qu'il n'était pas possible de différer la réforme de la gouvernance pour l'agglomération parisienne, a défendu le projet du Grand Paris exposé dans son rapport pour l'Observatoire de la décentralisation, considérant que la conférence métropolitaine comme les grands projets d'infrastructure n'apportaient pas une réponse adaptée aux enjeux qui se présentaient.

M. Jean-Pierre Caffet a au contraire dénoncé la solution consistant à créer un unique département de la petite couronne, qui risquerait d'entraîner un développement à deux vitesses de l'Ile-de-France, et s'est prononcé pour le projet de Paris Métropole, dont il a estimé qu'il était un instrument fédérateur pour coordonner, impulser et renforcer les dynamiques propres à l'agglomération francilienne.

M. Jacques Gautier a quant à lui privilégié l'approche consistant à favoriser l'intégration des différents acteurs de la région Ile-de-France en recourant à des structures de type intercommunal.

B. LA QUESTION DU RAPPROCHEMENT INSTITUTIONNEL ENTRE CONSEILS GÉNÉRAUX ET CONSEILS RÉGIONAUX

Dans le rapport d'étape, vos rapporteurs avaient indiqué que cette question constituait un point sévère de blocage au sein de la mission, seule l'élection de tous les conseillers généraux en même temps tous les six ans ayant fait consensus (préconisation n° 15).

Au cours du débat en séance publique, des divergences identiques sont apparues entre partisans et opposants du rapprochement institutionnel entre les conseillers généraux et les conseillers régionaux.

Se sont ainsi exprimés en faveur de cette solution MM. Jean-Patrick Courtois et Rémy Pointereau, qui ont jugé qu'elle répondait à l'impératif de coordination des actions des collectivités territoriales, ainsi que M. Gérard Longuet, qui a considéré souhaitable de n'avoir qu'un élu par couple de collectivités (commune / intercommunalité et département / région).

Tout en se déclarant intéressé par cette solution, MM. Jacques Blanc et Hervé Maurey se sont inquiétés de la remise en cause du scrutin uninominal qu'un tel rapprochement pourrait engendrer, s'il était organisé sur la base d'un scrutin proportionnel commun, comme le préconise le rapport du Comité présidé par M. Edouard Balladur.

Se sont au contraire déclarés opposés au rapprochement des conseillers généraux et des conseillers régionaux M. Michel Mercier, qui a considéré que le couple département / région n'était pas un couple pertinent, au contraire du couple département / commune, ainsi que MM. Pierre Mauroy et Jean-Claude Peyronnet.

Soulignant que la vocation du département et celle de la région étaient très différentes, MM. Yves Daudigny et Philippe Adnot ont estimé que la fusion de leurs représentants n'était de ce fait pas souhaitable. M. François Patriat s'est aussi prononcé contre, considérant que le rapprochement envisagé était conçu sur le modèle Paris-Lyon-Marseille, les premiers élus des collectivités de rang n étant appelés à siéger au sein de la collectivité de rang n+1 , alors qu'à la différence de la commune et de l'intercommunalité, qui ont, a-t-il relevé, les mêmes compétences en partage, la région et le département ont des domaines de compétences très différents, ce qui interdit toute assimilation de l'un à l'autre.

C. LA CLARIFICATION DE LA RÉPARTITION DES COMPÉTENCES

Au stade du rapport d'étape, la mission s'est limitée à identifier les principes qui devaient guider la clarification de la répartition des compétences entre les différentes collectivités territoriales. Tout en réaffirmant le principe de libre administration, elle a retenu l'idée d'un recentrage des départements et des régions sur leur domaine de compétence propre, les solidarités sociales et territoriales pour les premiers et les missions stratégiques pour les secondes (préconisations n° 16, 17, 18 et 20). Parallèlement, elle a appelé à la suppression des services de l'Etat doublonnant ceux des collectivités territoriales compétentes, avec transfert du pouvoir réglementaire, et au développement du recours au « chef de filat » sur les compétences partagées entre différents niveaux de collectivités (préconisations n° 19, 21 et 23). Enfin, au plan de la méthode, la mission a proposé qu'il soit recouru à l'expérimentation pour certains transferts de compétences (préconisation n° 22).

Nos collègues se sont montrés divisés en séance sur la question de la réaffirmation du principe de libre administration. Si nombre d'entre eux, à l'instar de MM. Bruno Retailleau et Jean-François Voguet, ont salué cette réaffirmation qui garantit le maintien de la clause générale de compétence aux collectivités territoriales, dans la mesure où celle-ci leur semble indissociable de l'idée-même de décentralisation, d'autres, comme MM. Hervé Maurey et Daniel Dubois, ont estimé que ni les régions ni les départements ne devraient bénéficier de cette clause générale de compétence.

A l'inverse, le renforcement des compétences obligatoires des collectivités et le recentrage des départements et des régions sur leurs domaines propres ont été accueillis favorablement par les sénateurs présents, qui ont formulé un certain nombre d'observations à ce sujet.

Ainsi, Mme Josette Durrieu a marqué son accord avec l'idée que le département était la collectivité des solidarités sociales et territoriales, et la région celle des missions stratégiques. M. Bruno Sido a salué la solution du constat de carence qui permettrait à un échelon territorial d'exercer la compétence d'un autre échelon si ce dernier s'avérait défaillant. M. Jean Boyer a fait valoir qu'il fallait se prémunir contre le risque de dilution des compétences entre les collectivités. Enfin, Mme Dominique Voynet a souligné qu'au-delà de la question traditionnelle de la répartition des compétences entre la région et le département, il convenait désormais d'examiner avec attention la répartition des compétences entre la région et l'intercommunalité, eu égard à la montée en puissance de l'une et de l'autre sur des champs superposés.

S'agissant, enfin, de la clarification des rôles de l'Etat et des collectivités territoriales, Mme Anne-Marie Escoffier a quant à elle rappelé la nécessité de coordonner leurs réformes respectives.

III. LES RELATIONS FINANCIERES ENTRE L'ETAT ET LES COLLECTIVITÉS LOCALES

Vos rapporteurs avaient proposé que la question de la refonte des finances locales, sujet central de toute réforme territoriale, ne soit abordée que dans un second temps, lorsque les premières perspectives de la réorganisation territoriale auraient été posées. C'est pourquoi, au stade du rapport d'étape, après une première analyse des finances publiques locales, seules deux pistes avaient été présentées : celle d'une refondation des relations financières entre l'Etat et les collectivités territoriales qui subordonnerait toute nouvelle décision ayant un impact sur les budgets locaux à une concertation préalable avec les associations nationales d'élus locaux ; et celle d'une réforme de la fiscalité locale qui distinguerait deux types de ressources fiscales par niveau de collectivité territoriale, les cumuls d'impôts sur une même assiette étant limités et un impôt lié à l'activité économique étant conservé (préconisations n° 24 et 25).

Les pistes ainsi tracées n'ont pas fait l'objet d'un total consensus en séance publique. Cependant, plusieurs de nos collègues ont attiré l'attention de vos rapporteurs sur certains problèmes posés par la situation actuelle, auxquels il serait souhaitable d'apporter rapidement une réponse.

Ainsi, dénonçant la situation d'asphyxie financière dans laquelle les collectivités locales lui semblaient placées, Mme Marie-France Beaufils a à la fois défendu la pratique des financements croisés et émis le voeu que les entreprises contribuent de manière suffisante au financement des collectivités.

Mme Catherine Troendle s'est inquiétée des conséquences que pourrait avoir la suppression de la taxe professionnelle.

M. Jean-Pierre Fourcade, pour sa part, a souligné la nécessité de faire procéder à l'actualisation des valeurs locatives.

S'attachant au cadre général des finances locales, M. Gérard Longuet a contesté la pertinence du principe de l'autonomie financière des collectivités territoriales, qui lui est apparu en décalage avec la réalité de la vie locale où les dépenses, à la différence des recettes, sont de plus en plus mutualisées. A l'opposé, M. François Marc a défendu l'autonomie financière locale et il a insisté sur la nécessité de renforcer la péréquation, qui lui a semblé insuffisante à l'heure actuelle.

*

* *

Ce rapide aperçu des réactions exprimées par notre assemblée face aux premières analyses et préconisations de la mission démontre que l'esprit dans lequel elle a travaillé, sous l'autorité du président Claude Belot, a été favorable à l'émergence d'un diagnostic partagé et à la formulation de propositions autour desquelles un large consensus a pu se dégager.

Vos rapporteurs sont reconnaissants à nos collègues de la richesse des observations, remarques et critiques qu'ils ont formulées au cours du débat. Dans toute la mesure du possible, ils ont essayé d'en tenir compte dans la suite de leurs travaux, pour s'en inspirer ou pour y répondre.

PREMIÈRE PARTIE : POUR UNE GOUVERNANCE TERRITORIALE RÉNOVÉE

I. PERMETTRE AUX GRANDES MÉTROPOLES DE PRENDRE TOUT LEUR ESSOR

Rappel des premières préconisations de la mission dans son rapport d'étape

- Reconnaissance du fait métropolitain par la création législative d'un nombre limité de métropoles et prise en compte de ce fait par le renforcement des compétences communales transférées, avec possibilité complémentaire de délégation de compétences

- Renforcement des possibilités de délégation des compétences du département et de la région à la métropole

- Incitation à la fusion volontaire de communes sur la base de référendums proposés par une majorité qualifiée des membres des conseils municipaux des communes concernées

- Poursuite des réflexions sur le Grand Paris.

En 1964, huit métropoles ont été constituées pour contrebalancer la prédominance asséchante de Paris et rééquilibrer le développement du territoire national.

Cette politique, entre autres réalisations, a fondé la construction d'infrastructures (routes, ouvrages d'art, équipements aéroportuaires,...) pour améliorer l'accessibilité de ces espaces -tant nationale qu'internationale- et favoriser la spécialisation de leur activité. Elle a contribué de ce fait à l'émergence de leur identité (aéronautique à Toulouse, centres de recherche de Grenoble...).

Aujourd'hui, il s'agit de créer les conditions permettant de valoriser les atouts, les richesses, les dynamiques de ces différentes grandes zones fortement urbanisées et réparties sur le territoire de notre Hexagone, d'accroître leur ouverture sur l'extérieur, leur attractivité pour l'implantation d'entreprises internationales, en termes d'offre de service, de potentiel universitaire : c'est ce que soulignait le président du Grand Lyon, notre collègue Gérard Collomb, lorsqu'il a accueilli la mission, dans la salle du conseil de la communauté urbaine le 12 février 2009.

Dans le débat présent sur la réforme de l'organisation territoriale, le mot « métropole » est sur toutes les lèvres. Mais il recouvre, en réalité, des modèles très variés : si pour le comité présidé par l'ancien Premier ministre Edouard Balladur, les métropoles constitueraient des collectivités territoriales de plein exercice en lieu et place des communes membres, l'Association des Maires de France (AMF) et l'Association des Petites Villes de France (APVF) retiennent la voie pragmatique et collaborative.

Votre mission temporaire, pour sa part, a privilégié la piste d'une intercommunalité renforcée, complétée par des instruments plus contraignants de coopération afin de permettre à ces très grands pôles urbains de devenir les véritables moteurs de la compétitivité nationale, en s'affranchissant, si nécessaire, des limites administratives de leur implantation pour intégrer pleinement les espaces et les services nécessaires à leur développement et à leur vitalité.

A. CONFÉRER UN STATUT LÉGISLATIF AUX AIRES MÉTROPOLITAINES

Dès son rapport d'étape, votre mission a retenu la nécessité, pour le législateur, de reconnaître le fait métropolitain. Elle a insisté sur la nécessité de doter ces nouvelles entités d'un bloc renforcé de compétences communales complétées, le cas échéant, de délégations d'attributions exercées par les trois niveaux de collectivités territoriales -régions, départements et communes-. ( cf . préconisations n° 8 et 9 ci-dessous).

Rappel des préconisations du rapport d'étape

- Reconnaissance du fait métropolitain par la création législative d'un nombre limité de métropoles et prise en compte de ce fait par le renforcement des compétences communales transférées, avec possibilité complémentaire de délégation de compétences.

- Renforcement des possibilités de délégation des compétences du département et de la région à la métropole.

1. Définir le statut des métropoles

L'élaboration du statut métropolitain doit suivre une démarche pragmatique tenant compte des réalités locales afin d'encourager l'adhésion au développement des collectivités métropolitaines.

C'est pourquoi, dans un premier temps du moins, la métropole constituerait une intercommunalité très intégrée dont les communes membres resteraient des collectivités territoriales de plein exercice, contrairement aux propositions du comité Balladur qui propose de les transformer en personnes morales de droit public.

Cependant, cette nouvelle entité métropolitaine serait d'ores et déjà plus que ce qu'est aujourd'hui la communauté urbaine puisque, si les préconisations du rapport d'étape de la mission étaient confirmées, le conseil métropolitain serait élu au suffrage universel direct par fléchage et son périmètre rationalisé. D'autres outils devraient conforter la place de la métropole, notamment en matière financière et d'organisation de l'espace.

En tout état de cause, la loi devrait en permettre l'évolution statutaire en autorisant la transformation de la métropole de première génération en une collectivité territoriale de plein exercice en lieu et place des communes membres, sur délibérations concordantes de celles-ci. Le législateur interviendrait pour valider la volonté exprimée par les communes métropolitaines.

Le choix de la mission sera peut-être jugé trop timoré mais il lui a semblé que les esprits n'étaient pas encore mûrs pour opérer, dans de bonnes conditions, cette novation.

Ainsi, l'AMF, s'oppose nettement à la dissolution des communes dans la métropole 4 ( * ) .

La même position a été adoptée par l'APVF lors de ses XII èmes assises tenues à Chinon en présence du Président du Sénat, M. Gérard Larcher, le 15 mai 2009 : pour elle, les communes membres « ne doivent pas être « vassalisées » et garder leur rôle indispensable de proximité sans être transformées en mairies d'arrondissement aux compétences limitées » 5 ( * ) . L'Association des communautés urbaines de France (ACUF) retient le même principe en exprimant « les plus vives réserves quant au risque de minimisation du rôle de la commune » 6 ( * ) .

Les crispations, voire les rejets, que la création imposée d'une collectivité nouvelle absorbant les communes membres pourrait susciter, constitueraient autant de freins à leur développement et atténueraient les effets qui en sont attendus. Il semble donc préférable de prévoir leur transformation à terme en une nouvelle catégorie de collectivité territoriale sur une base volontaire qui fonderait un projet collectif et fédérateur, gage d'un succès commun.

Mieux vaut construire des fondations solides qui, par la démonstration de leur bien-fondé, encourageraient les évolutions nécessaires.

Propositions de la mission

- Créer, par la loi, une nouvelle catégorie d'EPCI dénommés « métropoles » dont les communes membres resteraient des collectivités territoriales de plein exercice.

- Prévoir la faculté, par la loi, d'ériger les métropoles en collectivités territoriales de plein exercice, en lieu et place des communes membres, sur délibérations concordantes de celles-ci.

2. Déterminer territorialement les métropoles

Les critères retenus pour identifier la métropole comme l'étendue donnée à son périmètre contribueront à l'efficacité qui en est attendue.

a)- Définir les critères de création d'une métropole

Différentes écoles s'opposent : pour certains, dont l'ancien Premier ministre, notre collègue Pierre Mauroy, il convient de retenir un nombre suffisant de métropoles (qu'il a estimé à une vingtaine) pour permettre aux villes françaises de se hisser à la hauteur de leurs concurrentes européennes et de rivaliser en puissance et en notoriété avec elles. Le comité Balladur l'a fixé à onze, soit les huit communautés urbaines (Lyon, Lille, Marseille, Bordeaux, Toulouse, Nantes, Nice, Strasbourg) et les trois communautés d'agglomération (Rouen, Toulon, Rennes) les plus peuplées.

Pour le président de l'ADF, M. Claudy Lebreton, la définition des métropoles devrait tenir compte de leur caractère européen et de l'existence de grandes fonctions métropolitaines.

Dans son rapport d'étape, la mission a entendu réserver le statut de métropole aux quelques très grands pôles urbains comparables aux agglomérations européennes les plus dynamiques. C'est pourquoi, elle les a identifiés par le jeu d'un critère démographique fixé autour de 500 000 habitants qui devrait être combiné à des critères fonctionnels, facteurs qui fondent leur réputation, leur attractivité, leur rayonnement et leur accessibilité : aéroport international, grand port, universités, centres de recherche, salon international,... ouverts sur l'extérieur et aux notions de bassin de vie, de continuité territoriale, de potentiel économique... Notre collègue, M. Edmond Hervé, a insisté sur la notion d'appartenance de l'agglomération métropolitaine à des réseaux, qui permettrait la mise en oeuvre de péréquations financières et foncières ou encore la mixité sociale.

Votre mission a souhaité que les métropoles soient créées en nombre limité, en ne retenant que les huit ou neuf plus grandes agglomérations de taille européenne, qui remplissent des fonctions bien spécifiques. Elle en a proposé une énumération, en se référant à la liste des plus peuplées d'entre elles.

Population des quinze groupements les plus peuplés ( données 2009 )

Lyon

(Communauté urbaine du Grand Lyon)

1.274.069

Lille

(Communauté urbaine Lille Métropole)

1.124.796

Marseille

(Communauté urbaine Marseille Provence Métropole)

1.034.304

Bordeaux

(Communauté urbaine de Bordeaux)

714.727

Toulouse

(Communauté urbaine du Grand Toulouse)

661.484

Nantes

(Communauté urbaine Nantes Métropole)

594.732

Nice

(Communauté urbaine Nice Côte d'Azur)

517.699

Strasbourg

(Communauté urbaine de Strasbourg)

473.828

Montpellier

(Communauté d'agglomération Montpellier Agglomération)

412.070

Rouen

(Communauté d'agglomération Rouennaise)

411.721

Toulon

(Communauté d'agglomération Toulon Provence Méditerrannée)

411.582

Grenoble

(Communauté d'agglomération de Grenoble Alpes Métropole)

403.217

Rennes

(Communauté d'agglomération Rennes Métropole)

395.710

Saint-Etienne

(Communauté d'agglomération de Saint-Etienne Métropole)

385.962

Aix-en-Provence

(Communauté d'agglomération du Pays d'Aix-en-Provence)

361.836

Source : DGCL

Afin d'assurer la cohérence de l'ensemble, il est proposé de fixer, dans la loi, les critères de détermination du périmètre métropolitain. Ce périmètre pourrait d'ailleurs s'étendre au-delà du territoire départemental d'implantation du noyau central ; cette extension n'impliquerait pas de modification des limites des départements.

Proposition de la mission

- Fixer dans la loi les critères d'accès au statut de métropole et de délimitation du périmètre métropolitain et créer par la loi un nombre limité de métropoles, par exemple : Lyon, Lille, Marseille, Toulouse, Nice, Bordeaux, Nantes, Strasbourg.

b)- Arrêter le périmètre métropolitain

La délimitation du périmètre métropolitain est une des clés de la réussite de ces nouvelles métropoles. Il faut, en effet, leur permettre d'administrer le territoire pertinent de l'aire urbaine pour optimiser tous leurs atouts et leurs potentialités.

On constate, en effet, que le territoire métropolitain devrait inclure quelques EPCI qui se sont créés à titre défensif pour ne pas être absorbés par la métropole ; ils constituent des « poches de résistance » qui peuvent s'analyser comme des rentes de situation bénéficiant de l'attractivité de la métropole, sans réciprocité. Il en est ainsi de la présence sur cette aire d'un aéroport ; de tels infrastructures et équipements devraient être intégrés dans le périmètre métropolitain pour contribuer au dynamisme et à la vitalité de l'ensemble.

Notons que ce regroupement de communes qui se ferait « d'un seul tenant et sans enclave », pour reprendre la définition du code général des collectivités territoriales pour les communautés urbaines, s'insère lui-même dans un ensemble plus vaste. En effet, il faut distinguer la métropole constituant donc un territoire continu, de sa zone de rayonnement : on peut y constater des mises en réseau avec des pôles urbains et des agglomérations situés dans cette aire d'attractivité, qui fonctionnent en complémentarité : c'est le cas, par exemple, de la communauté urbaine de Saint-Etienne pour le Grand Lyon.

Afin de construire des ensembles cohérents, une fois dessiné sur la base des critères évoqués précédemment, le périmètre métropolitain serait arrêté par décret après consultation des conseils municipaux des communes membres. Leur accord ne serait, cependant, pas requis.

Proposition de la mission

- Arrêter par décret le périmètre de la métropole après consultation des conseils municipaux concernés.

3. Régler les principes de gouvernance des métropoles

a)- Fixer la composition de l'organe délibérant

Rappelons que le critère essentiel est, là aussi, démographique en vertu de l'article 3 de la Constitution qui impose que le suffrage soit toujours égal.

Le législateur peut cependant le combiner avec d'autres données motivées par l'intérêt général.

Sur cette base, il est proposé de favoriser le fonctionnement des métropoles en y associant chaque commune membre et donc de retenir le principe de l'attribution d'un siège au moins, au conseil métropolitain, à chacune des communes de son ressort.

Pour le reste, la loi fixerait un ratio démographique pour l'attribution des sièges restant à répartir. Cette recommandation rejoindrait le souci exprimé par l'ACUF 7 ( * ) qui enjoint de « veiller à conserver une représentation équilibrée entre territoires et population ». L'Association cite le cas de Lille Métropole composée de 85 communes dont la plus petite compte 178 habitants et la plus importante, Lille, 226 000.

Cette répartition suppose la détermination préalable de l'effectif de l'assemblée délibérante : sur ce point, la mission recommande la limitation du nombre de conseillers métropolitains à la représentation suffisante des communes membres.

Propositions de la mission

- Attribuer un siège au moins à chaque commune membre dans le conseil métropolitain.

- Fixer un ratio démographique pour l'attribution des sièges restants.

b)- Déterminer les modalités de désignation des conseillers métropolitains

Votre mission a réaffirmé sa préconisation d'élire l'ensemble des conseillers communautaires au suffrage universel direct par « fléchage » sur les listes de candidats aux élections municipales : la désignation des conseillers métropolitains se ferait donc selon le modèle « PLM ».

Proposition de la mission

- Désigner les conseillers métropolitains au suffrage universel direct par fléchage sur les listes de candidats aux élections municipales.

c)- Fixer la composition des exécutifs métropolitains

La formation de l'exécutif devrait obéir aux règles communes applicables aux assemblées locales : un bureau composé d'un président, assisté de vice-présidents dont le nombre serait limité à 30 % au plus de l'effectif de l'organe délibérant. Chaque délégation devrait correspondre à un des véritables secteurs d'action de la métropole. Pour éviter des exécutifs pléthoriques, le nombre maximum serait fixé par décret en fonction de la population du groupement.

4. Etablir les compétences des métropoles

La mission, dans son rapport d'étape, a esquissé les principes qui devraient régir l'attribution de compétences aux métropoles, soit :

- le transfert d'un certain nombre de compétences exercées par les communes membres, complété par :

- la délégation facultative à la métropole de compétences détenues respectivement par les communes membres (hors transferts), les départements et régions de rattachement de l'aire métropolitaine.


• La détermination des compétences obligatoires devrait s'appuyer sur l'objectif assigné à la création de métropoles, la répartition des compétences entre la métropole et les communes du périmètre s'effectuant sur la base du principe de subsidiarité. Les communes membres demeureraient l'échelon de proximité.

a)- Un bloc fondateur

Proposition de la mission

- Définir un bloc minimal de compétences obligatoires des métropoles, à partir des compétences obligatoires des communautés urbaines créées après la loi du 12 juillet 1999 et qui correspondent aux grandes fonctions métropolitaines.

Ce sont donc les compétences en matière de :

- développement et aménagement économique, social et culturel de l'espace communautaire (zones industrielles, touristiques, portuaires, équipements et établissements culturels, sportifs ...) ;

- aménagement de l'espace communautaire (urbanisme, transports urbains ...) ;

- équilibre social de l'habitat ;

- politique de la ville ;

- gestion des services d'intérêt collectif ;

- protection et mise en valeur de l'environnement et politique du cadre de vie (déchets ...) ;

- organisation des grands événements culturels et sportifs.

b)- Des compétences d'attribution complétées par des délégations des autres niveaux

Pour certains, la métropole devrait exercer les compétences départementales dans les ressorts de son territoire et particulièrement les attributions sociales dévolues au conseil général. C'est notamment le principe retenu par le comité Balladur : l'exercice, par les métropoles, de la totalité des compétences départementales. C'est également le projet porté par le président du conseil général du Rhône 8 ( * ) .

Vos rapporteurs considèrent que la compétence sociale n'est pas du ressort évident de la métropole qui doit se consacrer essentiellement à l'exercice des fonctions concourant au développement économique, à la dynamique et à l'attractivité de son territoire et au renforcement des infrastructures, afin d'offrir un service coordonné et combiné aux usagers. Ils rejoignent le point de vue de l'ADF et de son président, M. Claudy Lebreton, pour qui le département doit conserver la responsabilité d'assurer l'équilibre entre les territoires et les populations 9 ( * ) .

En tout état de cause, si les caractéristiques locales de l'espace métropolitain impliquaient l'exercice de la compétence sociale par les métropoles, il suffirait d'étendre à cette nouvelle catégories de groupements le droit en vigueur : celui-ci, en effet, le permet déjà puisque l'article L. 5215-20 du code général des collectivités territoriales autorise les communautés urbaines à exercer par convention passée avec le département, tout ou partie des compétences d'aide sociale de celui-ci. C'est à ce titre que la communauté urbaine de Strasbourg met celle-ci en oeuvre dans son ressort.

Ainsi, l'action des métropoles ne serait pas uniforme pour l'ensemble de cette catégorie de structures territoriales. Au-delà du bloc minimum qui découle logiquement de leur raison d'être, ces nouvelles entités juridiques devraient pouvoir adapter leurs interventions aux réalités locales.

Dans le même objectif, l'Etat devrait également pouvoir déléguer certaines de ses compétences aux métropoles.

Proposition de la mission

- Réaffirmer la possibilité de délégations de compétences des départements et régions aux métropoles, et ouvrir la même possibilité de délégation pour l'Etat.

c)- Vers des schémas intégrés

La définition et la mise en oeuvre de stratégies communes ou concertées à l'échelle périmétropolitaine doit conforter le développement de la métropole, en amplifier l'attractivité, tout en améliorant les services rendus aux usagers.

C'est pourquoi l' « agglomération-phare », dans le respect de la libre administration des collectivités territoriales, doit pouvoir initier l'organisation de la mise en réseau des espaces urbains périmétropolitains.

La loi doit faciliter et promouvoir les coopérations spécifiques de la métropole avec les pôles situés non seulement à l'extérieur de son périmètre, mais également au-delà de son département, voire de sa région d'implantation. C'est notamment le cas du Grand Lyon et de ses connexions avec Saint-Etienne Métropole à l'est et la communauté d'agglomération des Portes de l'Isère au sud-est.

Pourtant, le code général des collectivités territoriales offre déjà des outils permettant aux collectivités de s'associer « en vue d'oeuvres ou de services présentant une utilité pour chacune de ces personnes morales » ( cf. article L. 5721-2). La formule la plus souple et la plus opérationnelle réside dans le syndicat mixte qui peut être constitué entre des régions, des départements, des communes, leurs groupements, avec un certain nombre d'établissements publics.

Devrait en conséquence être encouragée, sur la base du volontariat, la constitution de coopérations spécifiques avec l'espace périmétropolitain, permettant de mettre en oeuvre des réseaux organisés dans les domaines d'intérêt métropolitain tels que l' urbanisme et le logement , les transports , les grands équipements , l' aménagement du territoire , le développement économique , les universités , la recherche , la culture , les grands événements culturels et sportifs ,... Ces coopérations s'établiraient dans le respect des schémas régionaux correspondants. La métropole en serait en quelque sorte le chef d'orchestre.

Des initiatives multiples et novatrices ont déjà été mises en oeuvre dans l'Hexagone. C'est le cas des réseaux de villes : cette politique, initiée en 1991, a favorisé le rapprochement de collectivités pour coordonner leurs efforts d'équipement par l'adoption d'un programme de coopération.

Certaines rigidités freinent, cependant, les initiatives locales.

Ainsi, tous les syndicats mixtes ne peuvent pas adhérer à un autre syndicat mixte. Il y aurait lieu, sur ce point, à lever cette restriction pour permettre la prise en compte des situations locales.

Propositions de la mission

- Reconnaître la capacité d'initiative de la métropole pour proposer l'organisation d'un champ de compétences nouveau : la mise en réseau du territoire péri-métropolitain.

- Assouplir les outils de coopération existants pour les mettre à la disposition des métropoles, tels les syndicats mixtes.

Un exemple : l'intégration des prestations en matière de transports

La question des transports est déterminante dans le développement des métropoles.

Il apparaît nécessaire de globaliser l'offre dans ce domaine, afin de simplifier les déplacements tout à la fois à l'intérieur de l'aire métropolitaine et dans sa périphérie, pour y inclure les agglomérations confortant le rayonnement de la métropole et donnant sa cohésion à l'ensemble de l'espace métropolitain.

Cette exigence absolue a, tout d'abord, été prise en compte par la loi du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains qui a institué une catégorie particulière de syndicat mixte constitué entre autorités organisatrices de transports pour exercer trois compétences obligatoires : coordination des services organisés par ses membres, mise en place d'un système d'information des usagers et recherche d'un tarification coordonnée et de titres de transports uniques ou unifiés. Des compétences facultatives peuvent être exercées : organisation de services de transport régulier ou à la demande, réalisation et gestion des équipements et infrastructures des transports. Le périmètre d'intervention est librement fixé par le syndicat mixte. Ce dispositif très souple mais intégrateur se heurte, aujourd'hui, à l'interdiction mentionnée ci-dessus incitant les adhésions entre structures syndicales. Cette difficulté devrait être levée dès l'adoption, par le Parlement, du projet de loi portant engagement national pour l'environnement dit Grenelle II puisque son article 18 propose d'autoriser l'adhésion d'un syndicat mixte compétent en matière de transports publics à un syndicat mixte « SRU ».

La coordination des transports dans la région métropolitaine devrait être confortée par l'adoption d'une telle disposition qui pourrait permettre d'harmoniser l'offre de transport sur tout le réseau tant urbain qu'interurbain. Elle serait facilitée par l'institution d'une autorité organisatrice des transports sur la métropole. Il va de soi que le schéma métropolitain devrait être compatible avec le schéma régional.

Proposition de la mission

- Instituer une autorité organisatrice unique pour organiser les transports dans l'aire métropolitaine.

5. Permettre l'institution d'une DGF territoriale

Afin de favoriser la mise en oeuvre de l'intérêt communautaire et de permettre un développement harmonieux et équilibré sur l'ensemble du territoire métropolitain, il est proposé de prévoir l'institution d'une dotation globale de fonctionnement (DGF) territoriale à la demande des communes membres. Elle jouerait un rôle péréquateur majeur au sein du périmètre choisi.

La mission reprendrait ainsi une revendication déjà ancienne de l'Assemblée des communautés de France (AdCF).

La décision serait prise par les communes membres de la métropole, statuant à une majorité qualifiée renforcée, en vue d'opérer la mutualisation du montant de la DGF de toutes les collectivités incluses dans le périmètre, avec celle de la métropole. Fondée sur le volontariat et l'expérimentation , cette globalisation pourrait être modulée et encadrée précisément par le législateur, notamment en ce qui concerne sa durée et les dotations communales transférées à la métropole.

En contrepartie, afin de permettre l'exercice des compétences conservées par les collectivités de base, la métropole leur reverserait une dotation qui en permettrait le financement.

Cette réforme pourrait s'accompagner d'un transfert, également modulable, de la perception des impôts locaux des communes membres vers la métropole.

Ce dispositif, particulièrement intégrateur et péréquateur, devrait être conjugué avec le principe de libre administration des collectivités territoriales et pourrait être expérimenté par les collectivités volontaires.

Propositions de la mission

- Instituer une dotation globale de fonctionnement (DGF) métropolitaine à la demande des communes membres.

- Permettre l'institution, par décision des communes membres, d'une fiscalité communautaire se substituant progressivement aux fiscalités communales.

B. LA NÉCESSITÉ D'ASSURER L'AVENIR DE LA MÉTROPOLE PARISIENNE

A l'occasion de son rapport d'étape 10 ( * ) , votre mission avait déjà eu l'occasion de prendre position sur la nécessité d'agir rapidement pour doter la métropole parisienne des outils lui permettant de répondre aux besoins quotidiens de ses habitants et de soutenir son rang dans la compétition internationale.

A l'issue des auditions de MM. Edouard Balladur, Pierre Mauroy, Philippe Dallier, Jean-Pierre Chevènement, Daniel Canepa, il lui est apparu clairement que les institutions actuelles n'étaient pas adaptées et que de nouveaux modes de gouvernance étaient nécessaires comme pouvait en témoigner, par exemple, la démarche coopérative engagée par le maire de Paris, M. Bertrand Delanoë, dans le cadre du syndicat « Paris Métropole ».

Pour affiner son jugement, votre mission a donc souhaité procéder à des auditions complémentaires qui lui ont permis de conforter son analyse selon laquelle une nouvelle gouvernance était nécessaire mais qu'elle devait être envisagée au travers d'une démarche respectueuse des élus locaux et parallèlement à un réengagement de l'Etat dans le financement des infrastructures et la détermination de nouveaux dispositifs permettant la solidarité .

1. Une métropole parisienne dépourvue de pilote et de stratégie globale

Une métropole en panne de véritable stratégie économique

Lors de son audition par votre mission, M. Christian Blanc, secrétaire d'Etat au développement de la région capitale, a insisté sur le fait que la métropole parisienne, au contraire du Grand Londres, son homologue britannique, ne « tirait » pas la croissance de l'Ile-de-France et du reste du territoire national. Il a expliqué, en particulier, que son taux de croissance était similaire à celui du reste du territoire alors que sa vocation métropolitaine, comme la concentration des équipements et des travailleurs qualifiés, justifiaient qu'elle connaisse un taux de croissance sensiblement supérieur de nature à créer une dynamique d'entraînement. Il a insisté sur les obstacles dressés au développement économique de l'agglomération en citant l'exemple de l'absence de volonté de développer les abords des zones aéroportuaires alors même que la zone située entre l'aéroport de Roissy et les espaces urbains attenants était aujourd'hui dans une situation de détresse sociale.

Plus généralement, l'étude des politiques de développement économique en Ile-de-France fait apparaître la multiplicité des acteurs qui interviennent sur un même territoire. La région compte ainsi outre l'Agence Régionale de Développement (ARD), six agences départementales et deux services départementaux, ainsi que de nombreux EPCI qui ont chacun développé des actions en matière économique. Par ailleurs, l'Etat reste présent - comme sur le reste du territoire - notamment au moyen de ses agences (Oséo) mais aussi au travers d'opérations d'intérêt national (OIN) et d'établissements publics spécifiques (Etablissement Public d'Aménagement de la Défense - EPAD). Enfin, la Chambre de Commerce et d'Industrie de Paris (CCIP) joue un rôle particulier en faveur du développement économique, qui est sans comparaison avec les organismes consulaires de province.

Lorsqu'on examine la mise en oeuvre de chacune des grandes fonctions économiques au niveau local, on constate une différence entre les actions de développement exogène de promotion qui semblent être conduites de manière satisfaisante et les actions de développement endogène qui pourraient être plus efficaces. L'enjeu aujourd'hui semble être pour les acteurs publics d'apporter aux entreprises une expertise thématique à une échelle géographique pertinente qui, dans une zone aussi dense, ne semble pouvoir être le département.

En matière d'aides à la création d'entreprises, l'action des chambres consulaires est importante mais il subsiste des difficultés en matière de pépinières d'entreprises dont la création semble relever d'abord d'initiatives locales sans véritable coordination globale, ce qui constitue un facteur de morcellement de l'offre et d'incohérences. Cette relative inadaptation de l'offre immobilière se retrouve dans le développement des zones d'activités qui répond également davantage à des initiatives locales qu'à une cohérence globale et une juste appréciation des besoins. Enfin, en matière d'aides à l'innovation et d'ingénierie, la multiplication des niveaux d'intervention constitue un facteur de redondances qui ne permet pas d'assurer la meilleure utilisation des moyens.

Cette brève analyse de la politique de développement économique en Ile-de-France met donc en évidence des besoins importants en termes de développement endogène, un déficit de la fonction stratégique du niveau régional qui est souvent perçu comme trop éloigné des territoires, ainsi que des déperditions occasionnées par la multiplicité des acteurs.

Comme vos rapporteurs ont eu l'occasion de l'expliquer lors des travaux de la mission 11 ( * ) , la richesse de la région parisienne apparaît aujourd'hui davantage comme le produit d'une rente que celui de son dynamisme propre, ce qui invite à rechercher de nouveaux outils pour renforcer sa compétitivité économique.

Des élus locaux réservés sur toute évolution institutionnelle précipitée

Preuve sans doute que l'intérêt général métropolitain doit encore devenir une réalité, les élus locaux entendus par votre mission ont davantage insisté sur leur attachement à l'organisation territoriale existante, en dépit des difficultés croissantes et des insuffisances chroniques dans certains domaines, que sur le surcroît de capacité d'action que pourrait apporter une organisation nouvelle davantage adaptée aux enjeux.

Cette défense du statu quo peut, certes, être considérée comme une forme d'immobilisme comme l'ont regretté nos collègues Philippe Dallier et Charles Guené 12 ( * ) , ce dernier ayant estimé en particulier « qu'il était incompréhensible que l'on n'arrive pas à dépasser le niveau départemental dans cette métropole » , mais elle peut aussi traduire une forme d'inquiétude face à des projets trop novateurs qui mériteraient sans doute d'être encore affinés pour emporter une entière adhésion.

Au final, comme l'a expliqué M. Christian Blanc lors de son audition devant votre mission, les élus locaux sont conscients qu'une évolution est indispensable mais il leur faut encore du temps pour s'y résoudre et, surtout, ils attendent de connaître leur place dans ce nouveau dispositif et d'avoir la certitude que les engagements de l'Etat en termes de moyens seront bien tenus.

A cet égard, tous les élus locaux entendus par votre mission ont insisté sur la nécessité de renforcer les mécanismes de péréquation, M. Michel Berson, président du conseil général de l'Essonne considérant même que la réforme la plus urgente en la matière était moins celle des institutions que celle de la fiscalité locale et du renforcement des mécanismes de péréquation verticale et horizontale et en appelant à une intervention du législateur pour faire évoluer cette situation.

2. Un Grand Paris de l'urbanisme et des infrastructures initié par le Gouvernement

Compte tenu des résistances apparues concernant l'évolution de la gouvernance, le chef de l'Etat a décidé d'avancer d'abord sur le front de l'urbanisme et des transports. C'est dans cet esprit qu'il a déclaré que « le Grand Paris (était) un plan de cohésion urbaine qui (prolongeait) et qui (élargissait) le plan de cohésion sociale aux dimensions non plus des quartiers mais de la métropole toute entière » 13 ( * ) . Il a ainsi annoncé une modification de la réglementation afin de lever l'obstacle de la rareté du foncier estimant qu'il existait une réserve foncière de l'ordre de 200 km² « soit deux fois la superficie de Paris intra-muros - c'est-à-dire deux à trois fois supérieure à ce qui (était) nécessaire pour construire les 1,5 millions de logements nécessaires pour répondre aux besoins à horizon de 2030 » . Les modifications envisagées porteraient notamment sur l'élévation des coefficients d'occupation des sols et des mesures visant à rétablir la continuité du bâti dans les zones denses.

Concernant les transports, le chef de l'Etat a annoncé plusieurs mesures parmi lesquelles le développement des transports en commun de nuit, une régulation commune du trafic sur les réseaux de la RATP et de la SNCF, la création de nouvelles gares et surtout la densification du réseau grâce au prolongement de plusieurs lignes existantes.

Mais l'annonce la plus importante a sans nul doute concerné la création d'un nouveau système de transport rapide de grande capacité pour relier « les grandes polarités urbaines de demain ». M. Nicolas Sarkozy a ainsi indiqué que le projet préparé par M. Christian Blanc consistant à construire un nouveau réseau de 130 km de transports en commun ferré serait soumis à la concertation et a évalué à 35 milliards € le coût de l'ensemble des investissements envisagés qui seraient financés par la valorisation du foncier et le recours à des « partenariats public-privé ». Evoquant la nécessité de commencer les travaux avant 2012, le Président de la République a annoncé le dépôt d'un projet de loi en octobre afin de fixer les modalités de la maîtrise d'ouvrage, les outils juridiques et les moyens de financement .

Interrogé par les membres de votre mission sur le même sujet, M. Christian Blanc a apporté des informations complémentaires en estimant à 21 milliards € le réseau de transports primaire envisagé et en précisant que celui-ci serait financé « de la même manière que le métropolitain au début du siècle dernier, c'est-à-dire au moyen d'une dotation en capital public versée par l'Etat, qui serait complétée par des emprunts sur cinquante ou soixante ans » . Il a également expliqué qu'un établissement public serait chargé spécifiquement des nouveaux investissements envisagés.

3. Une démarche de projets partenariale qui doit aboutir à une nouvelle gouvernance

La perspective toujours d'actualité d'un statut particulier

Compte tenu des avancées déjà réalisées sur les transports, la question de la gouvernance de la métropole parisienne reste aujourd'hui le sujet qui appelle le plus l'attention et suscite le plus d'interrogations. Pourtant, la plupart des acteurs partagent le même diagnostic sur les insuffisances de l'organisation actuelle. C'est le cas en particulier de M. Vincent Eblé, président du conseil général de Seine-et-Marne qui a estimé devant votre mission qu'il était nécessaire de faire évoluer la gouvernance territoriale de l'Ile-de-France et de M. Christian Blanc qui a relevé la convergence des différents rapports élaborés par notre collègue Philippe Dallier, le comité Balladur et l'initiative du maire de Paris qui, tous, établissent la reconnaissance du fait urbain et la nécessité d'instituer des formes de gouvernance démocratique .

Auditionné par votre mission, M. Bertrand Delanoë, maire de Paris, a estimé que la région métropole devait avoir un statut original en raison de ses spécificités comme, par exemple, l'absence de continuité de son territoire.

Lors de son discours à la Cité de l'Architecture et du Patrimoine, le Président de la République a annoncé le lancement début 2010 des Etats généraux du Grand Paris au cours desquels tous les Franciliens pourraient s'exprimer. Vos rapporteurs estiment que ce large débat devrait permettre de mesurer l'avancement de la réflexion sur les questions institutionnelles et notamment d'évaluer les apports du syndicat « Paris Métropole », M. Bertrand Delanoë, maire de Paris, ayant notamment expliqué devant votre mission que « la seconde étape de ce dispositif résidait dans la délégation de compétences assortie d'instruments de gouvernance » . Vos rapporteurs observent également que cette volonté de poursuivre le dialogue est cohérente avec le fait que la question du Grand Paris a été déconnectée du débat législatif annoncé par le Gouvernement pour cet automne sur la réforme des collectivités territoriales et l'annonce par M. Christian Blanc, secrétaire d'Etat au développement de la région capitale qu'il ferait également des propositions concernant la gouvernance fin 2009 - début 2010 .

Dans ces conditions, votre mission, après avoir constaté le fait qu'aucun des projets présentés ne faisait l'unanimité, a souhaité se limiter à l'évocation de quelques grands principes pour déterminer l'avenir de la métropole parisienne parmi lesquels la nécessité absolue d'une réforme de la gouvernance de l'Ile-de-France . Elle a estimé en particulier qu'il serait paradoxal de réformer l'organisation territoriale de la France et de renforcer le rôle des métropoles de province sans apporter parallèlement de réponse aux dysfonctionnements évidents de la région capitale. Un deuxième principe doit, selon votre mission, tenir au caractère démocratique de la réforme institutionnelle à venir dans la région capitale afin de préserver les acquis de la décentralisation et de renforcer la légitimité des acteurs locaux.

L'utilité de développer des outils communs sur un mode partenarial

L'émergence d'une gouvernance métropolitaine restant un objectif de moyen terme, plusieurs de nos collègues ont insisté au cours des travaux de votre mission sur la nécessité de ne pas attendre, compte tenu en particulier de l'importance des enjeux auxquels était confronté la métropole parisienne, quitte à faire précéder l'adoption de réformes institutionnelles de la mise en oeuvre de nombreux projets.

Dans cette perspective, notre collègue Pierre-Yves Collombat 14 ( * ) , observant qu'il n'était pas possible d'en rester à des démarches fondées uniquement sur des échanges de vues, a estimé indispensable de faire émerger de nouveaux lieux de décision qui pourraient comporter une dimension thématique par exemple sous la forme de syndicats mixtes pour chaque grande problématique.

M. Bertrand Delanoë a également évoqué devant votre mission la perspective que les projets engagés par le syndicat « Paris Métropole » soient « suivis par des agences ad hoc, dont la dimension serait adaptée aux bassins de vie intéressés » 15 ( * ) , considérant que « la création d'agences était une solution efficace et économique » . M. Jean-Paul Huchon, président du conseil régional, a également proposé de « confier à des agences la mise en oeuvre des décisions prises par consensus dans le cadre de Paris Métropole » 16 ( * ) . Enfin, on peut également observer que notre collègue Edmond Hervé a approuvé la proposition de création d'agences formulée par le maire de Paris et le président du conseil régional et il a considéré qu'il était essentiel de retenir la notion de territoires spécialisés selon l'agence compétente.

Une telle évolution semble particulièrement pertinente sur le territoire métropolitain du fait, en particulier, de la bonne complémentarité observée entre les agences départementales et l'ARD notamment en matière de développement exogène. Par ailleurs, la mise en oeuvre d'une agence unique territorialisée et dotée d'un maillage fin et adapté aux caractéristiques économiques des territoires semble constituer une piste de nature à répondre à la sous-utilisation des moyens actuellement mobilisés en faveur du développement économique.

Propositions de la mission

- Faire émerger une gouvernance métropolitaine démocratique sur le périmètre de la métropole parisienne.

- Apporter un soutien au plan de développement des transports en Ile-de-France élaboré conjointement par l'Etat et le conseil régional.

- Recourir à des agences, en particulier dans le domaine économique, pour mutualiser les moyens et créer des outils communs à la métropole parisienne.

- Renforcer les mécanismes de solidarité entre les territoires qui composent la métropole parisienne.

II. CONFÉRER AUX INTERCOMMUNALITÉS LA PLACE QUI LEUR REVIENT DANS LA GOUVERNANCE TERRITORIALE

Dès son rapport d'étape votre mission avait souhaité formuler des préconisations pour renforcer la légitimité des intercommunalités et achever la carte intercommunale, afin de permettre à ces structures de jouer pleinement le rôle d'intégration et de coopération qui doit être le leur dans la gouvernance de nos territoires.

Rappel des premières préconisations de la mission dans son rapport d'étape

- Recomposition préalable et amélioration de la représentativité des commissions départementales de coopération intercommunale (CDCI) et renforcement de leur rôle pour déterminer les périmètres pertinents d'intercommunalités

- Achèvement de la carte de l'intercommunalité à fiscalité propre avant fin 2011 en envisageant d'utiliser des outils incitatifs

- Augmentation progressive du nombre des compétences obligatoires et optionnelles des intercommunalités à fiscalité propre pour tendre vers un socle commun plus consistant

- Avant fin 2012, sur proposition du représentant de l'Etat validée par la CDCI, après une large concertation départementale, forte réduction du nombre des syndicats intercommunaux (SIVU, SIVOM) et transfert des compétences correspondantes aux groupements à fiscalité propre

- Election des conseillers communautaires par « fléchage » sur les listes de candidats aux élections municipales

- Corrélativement, application du mode de scrutin des communes de plus de 3 500 habitants aux communes de plus de 500 habitants et obligation de candidature au conseil municipal dans toutes les communes

- Suppression des dispositions législatives réglementant l'existence des pays, sans porter atteinte à la liberté de coopérer des communes et des intercommunalités dans le périmètre des pays existants.

Ces préconisations, qui ont fait l'objet d'un accueil favorable lors du débat en séance publique du 18 mars 2009, n'appellent pas de développements particuliers dans le présent rapport, si ce n'est sur deux points.

En effet, les travaux menés par votre mission dans le second temps de ses réflexions ont permis à la fois d'apporter une précision concernant l'organisation du « fléchage » des conseillers communautaires et de formuler deux nouvelles propositions, l'une visant à rationaliser la composition des exécutifs des assemblées communautaires et l'autre à supprimer l'effet dissuasif, au regard de l'objectif de renforcement de l'intégration intercommunale, que certains seuils d'attribution de dotations peuvent avoir.

A. L'ÉLECTION DES CONSEILLERS COMMUNAUTAIRES PAR FLÉCHAGE

Votre mission a en effet définitivement tranché le mode de scrutin par lequel seront élus les conseillers communautaires. Elle propose de s'inspirer du modèle Paris-Lyon-Marseille (PLM) : dans les communes de plus de 500 habitants , auxquelles seraient étendus le mode de scrutin de liste à prime majoritaire, la répartition des sièges de conseillers communautaires s'effectuerait de la même manière que celle des conseillers municipaux, ce qui devrait assurer une représentation limitée de l'opposition . Par souci de simplicité et pour encourager la parité, les conseillers « fléchés » correspondraient, dans l'ordre, aux premiers candidats de chaque liste, à concurrence du nombre de conseillers communautaires à élire 17 ( * ) . Leur remplacement éventuel serait assuré par les suivants de liste.

Un tel choix, qui concilie prime majoritaire et répartition proportionnelle à la plus forte moyenne, emporte plusieurs conséquences : l'extension aux communes de plus 500 habitants du scrutin de liste à prime majoritaire confère mécaniquement un plus grand nombre de poste aux listes minoritaires dans les communes de moins de 3 500 habitants , tandis que l'application du mode de scrutin PLM, dans les communautés d'agglomération et les communautés de communes, modifie les rapports de représentation existant pour les conseillers communautaires entre la majorité et les conseillers municipaux d'opposition en faveur de ces derniers 18 ( * ) .

En effet, dans ces deux types de communautés, les conseillers communautaires sont élus au scrutin majoritaire à trois tours, ce qui permet souvent à la majorité municipale de recueillir la totalité des postes. A l'avenir, si une telle proposition était adoptée par le législateur, une partie des conseillers communautaires seraient issus des rangs des conseillers municipaux minoritaires. Compte tenu cependant du mécanisme de la prime majoritaire, la modification ainsi opérée devrait être de faible ampleur.

Vos rapporteurs souhaitent souligner que le changement de mode de scrutin devrait accentuer la représentativité démographique des conseils communautaires, mais amoindrira leur caractère de conseil des équipes municipales, voire remettra en cause les équilibres de représentation tels qu'ils ont été négociés dans les statuts des communautés. Si l'on prend par exemple le cas de la ville centre, qui ne peut détenir, dans l'état actuel du droit, que moins de la moitié des sièges de délégués communautaires, le poids politique de son équipe municipale sera diminué du nombre des conseillers d'opposition qui auront été élus aussi conseillers communautaires.

De telles modifications conduisent ainsi nécessairement à se poser la question du maintien ou non des équilibres de représentation des communes, et donc de leur population, tels qu'ils ont été négociés entre les différentes communes associées au sein d'une intercommunalité.

Il n'a cependant pas semblé à vos rapporteurs qu'il leur appartenait de se prononcer sur ce dernier point dans le cadre de la réforme que la mission s'attache à proposer. En revanche, à ce stade, ils ont considéré que la mise en place du fléchage sur le modèle PLM pour l'élection au suffrage universel direct des conseillers communautaires était tout à fait justifiée au regard de la nécessité qui s'attache à garantir une meilleure représentativité et une plus grande légitimité aux conseils communautaires.

Proposition de la mission

- Dans les communes de plus de 500 habitants, répartir les sièges de conseillers communautaires de la même manière que pour les conseillers municipaux.

B. LA RATIONALISATION DES EXÉCUTIFS DES CONSEILS COMMUNAUTAIRES

Attachés à renforcer la légitimité et l'efficacité des assemblées communautaires, vos rapporteurs ont noté que le développement de l'intégration des intercommunalités s'accompagnait généralement d'une réduction du nombre des conseillers communautaires voire d'une réduction du nombre de vice-présidents. Récemment, la communauté d'agglomération de Metz-Métropole a engagé une réforme qui a permis de réduire de 170 à 105 le nombre de ses conseillers communautaires et de 48 à 20 le nombre de ses vice-présidents.

Cependant, il est apparu à vos rapporteurs qu'il serait excessif d'imposer aux communautés une solution uniforme qui dénaturerait les accords qui avaient permis à la communauté de se constituer. C'est pourquoi, ils se sont bornés à proposer de limiter, en fonction de la population, la taille des exécutifs des conseils communautaires.

Proposition de la mission

- Limiter par la loi, en fonction de la population, la taille des exécutifs des conseils communautaires.

C. LA SUPPRESSION DE CERTAINS SEUILS DISSUASIFS

Les travaux de votre mission ont montré que les règles applicables en matière d'éligibilité des communes et de leurs regroupements à certaines dotations pouvaient parfois avoir un effet contreproductif au regard de l'objectif, auquel elle souscrivait, de renforcement de l'intégration intercommunale. En effet, il est apparu que certaines communes étaient dissuadées de se regrouper entre elles, parce qu'elles atteindraient alors ensemble un niveau démographique qui ne leur permettraient plus de bénéficier de la dotation qu'elles percevaient. Tel est le cas notamment, pour la Dotation de Développement Rural.

C'est pourquoi, à l'initiative de son Président, M. Claude Belot, la mission vous propose de supprimer les seuils qui peuvent avoir un tel effet dissuasif.

Proposition de la mission

- Faire disparaître les seuils ayant un effet dissuasif sur les groupements de communes à fiscalité propre ou sur l'élargissement des communautés existantes.

III. GARANTIR UNE MEILLEURE COORDINATION DES POLITIQUES TERRITORIALES

Rappel des premières préconisations de la mission dans son rapport d'étape

- Possibilité de regroupement volontaire ou de modification des limites territoriales des régions, sur proposition concordante des assemblées délibérantes des territoires concernés statuant à la majorité et ratifiée par un référendum organisé par les pouvoirs publics à l'issue d'un large débat

- Possibilité de regroupement volontaire ou de modification des limites territoriales des départements selon la même procédure que ci-dessus

- Possibilité de regroupement volontaire entre une région et les départements qui la composent selon la même procédure que ci-dessus

- Réaffirmation du principe de coopération entre les collectivités territoriales et leurs établissements publics

- Election de tous les conseillers généraux en même temps pour une durée de six ans

Telle qu'elle a été esquissée dans le rapport d'étape, la réforme de l'organisation territoriale de la France que propose votre mission vise à clarifier les compétences et les responsabilités, sans toutefois mettre en péril la libre administration des collectivités territoriales sans laquelle il n'est pas de démocratie locale .

C'est pour cette raison que la clarification des compétences proposée par la mission s'accompagne, pour offrir suffisamment de souplesse de fonctionnement à nos institutions locales, d'un renforcement des instruments susceptibles de fournir aux collectivités les moyens de mieux articuler leurs compétences pour la mise en oeuvre de leurs projets communs, dans le respect de leurs spécificités territoriales.

Mais il est apparu au cours des débats, que, pour améliorer la coordination entre les collectivités locales, il convenait aussi de réfléchir aux procédures les plus efficaces pour atteindre cet objectif.

Deux options ont été débattues au sein de la mission.

La première correspond à la création des conseillers territoriaux , qui vise à assurer la coordination souhaitée entre le niveau régional et le niveau départemental par la substitution aux élus actuels de nouveaux élus, chargés d'exercer à la fois le mandat de conseiller régional et celui de conseiller général.

La seconde option , finalement privilégiée, vise à mettre en place une coordination qui ne se limite pas à la région et aux départements, mais qui s'adresse aux principaux responsables des politiques territoriales .

A. UNE SOLUTION DÉBATTUE AU SEIN DE LA MISSION : LA MISE EN PLACE DE CONSEILLERS TERRITORIAUX

Ainsi qu'elle a été présentée à votre mission, la solution des conseillers territoriaux vise à apporter une réponse à la question de la meilleure articulation possible entre les compétences des départements et celles de la région, dans le respect des prérogatives de chacun de ces deux niveaux de collectivité.

Formulée une première fois dans deux propositions de loi 19 ( * ) , elle a été reprise dans le rapport du Comité pour la réforme des collectivités territoriales.

Le rapport d'étape de votre mission en a rendu compte, indiquant qu'elle avait été évoquée à plusieurs reprises au cours de ses travaux par certains des intervenants et qu'elle faisait l'objet de débats. Il appelait en conséquence à un approfondissement de la réflexion sur le sujet. Ainsi qu'on l'a vu précédemment, le débat en séance publique du 18 mars a permis aux promoteurs de cette solution, comme à ses détracteurs, de s'exprimer sur cette proposition.

Dans le second temps des travaux de votre mission, MM. Charles Guené et Rémy Pointereau, au nom du groupe UMP, ont défendu la solution tendant à mettre en place des conseillers territoriaux 20 ( * ) .

Si toutes les propositions relatives à la création des conseillers territoriaux poursuivent le même objectif, elles prévoient des modalités de mise en oeuvre très différentes, que ce soit sur le nombre d'élus concernés, sur l'identification de la totalité des conseillers généraux ou de seulement une partie d'entre eux aux conseillers territoriaux appelés à siéger à la région, ou sur le mode de scrutin et le type de circonscriptions retenus pour les désigner.

Parmi toutes les options possibles, la proposition présentée devant votre mission par M. Charles Guené consiste à augmenter le nombre de mandats régionaux et diminuer à due proportion le nombre de mandats départementaux 21 ( * ) , pour permettre à tous les élus au conseil général d'être conseiller territorial et de siéger, en même temps, à la région.

Pour conserver le lien fort avec le territoire qui caractérise le conseiller général dans les zones rurales, le scrutin uninominal majoritaire serait maintenu pour désigner les conseillers territoriaux élus dans ces zones. Cependant, les limites des cantons seraient revues pour en harmoniser la taille et mieux tenir compte de la démographie. Dans les zones urbaines, les conseillers territoriaux seraient désignés à la proportionnelle.

Les promoteurs de cette proposition considèrent qu'elle est susceptible d'apporter la coordination nécessaire à l'exercice des compétences respectives du département et de la région, puisque les mêmes élus qui mettraient en oeuvre leurs projets au niveau départemental, se réuniraient ensuite régulièrement au sein du conseil régional pour les coordonner avec ceux qu'ils conduiraient à ce niveau.

La mission n'a pas retenu cette solution parmi ses propositions. En conséquence, le groupe de l'UMP a souhaité la présenter dans sa contribution, qui figure à la fin du présent rapport.

B. UNE INSTANCE DE COORDINATION SPÉCIFIQUE : LE CONSEIL RÉGIONAL DES EXÉCUTIFS

Constatant la faiblesse et le morcellement des instances de concertation actuellement existantes au niveau régional, vos rapporteurs jugent nécessaire de conférer une force nouvelle à l'actuelle conférence des exécutifs en l'érigeant en « conseil régional des exécutifs », qui se réunirait périodiquement et obligatoirement. Dans le même esprit, ils vous proposent d'instaurer une concertation à l'échelle départementale, afin de favoriser l'émergence de véritables politiques territoriales communes auxquelles les principaux acteurs locaux seraient associés systématiquement.

1. Le constat : une coordination morcelée et inégalement assurée selon les territoires

Dès les débuts de la décentralisation, à mesure que les collectivités se voyaient dotées de nouvelles prérogatives, une meilleure coordination des politiques menées par chaque échelon territorial est apparue nécessaire. Tout en reconnaissant dès 1972 le rôle essentiel de la région en la matière 22 ( * ) , le législateur a pu ponctuellement prévoir de tels dispositifs, comme pour les conférences d'harmonisation des investissements qui réunissent, au moins deux fois par an les services de l'Etat, avec les représentants des départements et des régions 23 ( * ) , ou la conférence de coordination des collectivités territoriales de Corse qui rassemble les présidents du conseil exécutif de la collectivité territoriale de Corse, de l'Assemblée de Corse, des deux conseils généraux, ainsi que, en tant que de besoin, des présidents d'établissements publics de coopération intercommunale et des maires 24 ( * ) .

La forme la plus aboutie de ces dispositifs de coordination est celle des « conférences des exécutifs » constituées sur une base régionale. Celles-ci, dont le régime juridique est organisé à l'article L. 1111-4 du code général des collectivités territoriales, ont été créées par la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales . Elles s'inspirent des instances informelles qu'un certain nombre de collectivités territoriales avaient mises en place pour mieux coordonner leurs actions respectives.

Rassemblant le président du conseil régional, les présidents des conseils généraux, ceux des communautés urbaines et des communautés d'agglomération, elles constituent des instances de négociation ayant vocation à étudier et débattre de tout sujet qui concernerait l'exercice de compétences pour lesquelles une concertation est prévue par la loi et tout domaine qui pourrait nécessiter une harmonisation entre les deux niveaux de collectivités départementale et régionale. Les conférences des exécutifs sont réunies, à l'initiative du président du conseil régional, au moins une fois par an.

A ces quelques dispositifs, il convient d'ajouter les multiples instances de coordination ad hoc ou thématiques, prévues par les textes ou totalement informelles, mais qui toutes permettent aux différentes collectivités et à l'Etat de se parler, de négocier et d'agir ensemble.

Il n'existe pas d'études dressant un bilan exhaustif de tous ces dispositifs de concertation. Toutefois, les auditions auxquelles vos rapporteurs ont procédé, leur propre expérience, comme les échanges qu'ils ont pu avoir à ce sujet avec des élus locaux, les ont confirmés dans l'idée que la concertation ainsi mise en place était bien une nécessité, mais que la dispersion des instances de concertation nuisait parfois à l'efficacité de celle-ci.

S'intéressant plus particulièrement aux conférences des exécutifs, ils ont constaté que leur succès était très inégal, certains territoires en tirant un profit évident, tandis que d'autres n'en percevaient pas l'intérêt. Pour ces derniers, le dispositif s'est avéré inefficace, faute d'avoir été mis en oeuvre ou en raison d'oppositions internes rendant impossible toute négociation. Cependant, vos rapporteurs ont bien noté que là où les collectivités jouaient le jeu de la concertation, les conférences des exécutifs constituaient un espace irremplaçable de dialogue et de projection vers l'avenir, qui permettait, à échéance régulière, à chaque échelon territorial de prendre conscience de la nécessaire coordination de son action avec celle de ses partenaires et d'envisager certaines de ses problématiques locales dans un cadre plus large, pour le bénéfice de tous.

2. La solution : un conseil régional des exécutifs, chargé de la coordination des politiques territoriales

C'est pourquoi vos rapporteurs ont proposé à la mission de réfléchir aux moyens de renforcer les prérogatives des conférences des exécutifs, en les érigeant en conseil régional des exécutifs, afin de donner l'impulsion nécessaire à la coordination des politiques territoriales qu'exige le nouveau schéma d'organisation à mettre en place.

Le pari qu'ont fait vos rapporteurs en proposant la création du conseil régional des exécutifs, c'est que cette instance amènera les représentants des collectivités à travailler ensemble et à collaborer, ce qui devrait conduire à l'adoption de solutions de développement communes et coordonnées, et faire procéder des collectivités territoriales elles-mêmes la clarification tant attendue de leur action et des politiques territoriales.

• La création d'un conseil régional des exécutifs en lieu et place de la conférence régionale des exécutifs

Si l'intitulé « conférence des exécutifs » présentait le mérite d'indiquer clairement qu'il s'agissait avant tout de faciliter la négociation et la concertation, il n'apparaît plus adapté à la nouvelle instance que vos rapporteurs proposent de mettre en place, dans la mesure où, tout en conservant sa fonction de lieu de concertation, ils ont entendu lui conférer une place centrale parmi tous les dispositifs de négociation existants.

Ainsi conçu, le « conseil régional des exécutifs » aurait vocation à être une instance resserrée qui retiendrait des orientations et dessinerait des arbitrages au terme d'une négociation conduite entre ses membres, sous la présidence du président du conseil régional.

Proposition de la mission

- Remplacer la conférence régionale des exécutifs par un conseil régional des exécutifs, dont les réunions seraient obligatoires, pour retenir les orientations et faciliter les arbitrages nécessaires à la conduite des politiques territoriales.

• Une composition adaptée

L'efficacité du conseil régional des exécutifs tiendrait notamment à sa composition resserrée. Cette dernière comprendrait en effet en son sein les représentants des grandes collectivités de la région.

Par coordination avec les autres propositions de la mission, il convient d'ajouter à la liste des membres des actuelles conférences des exécutifs les présidents des métropoles régionales. Il serait aussi souhaitable pour garantir une représentation minimale des communautés de communes de la région, que celles qui comptent plus de 50 000 habitants en fassent partie, et que les communautés plus petites aient la possibilité de désigner, pour chaque département, un représentant.

De plus, dans la mesure où le conseil régional des exécutifs aura vocation à accueillir la plupart des négociations portant sur des projets de développement d'envergure ou d'actions communes entre les collectivités territoriales, il conviendrait de prévoir, en tant que de besoin, que les responsables de la collectivité d'implantation d'un projet puissent être associés aux discussions en cours. Ceci devrait permettre que, ponctuellement, certains présidents de communautés de communes ou certains maires de communes importantes participent aux travaux du conseil.

Cependant, pour éviter d'alourdir les procédures, et afin de ne pas porter atteinte à l'efficacité du conseil, il ne serait pas recouru à cette faculté de manière systématique. Il serait ainsi souhaitable que le président du conseil régional des exécutifs, chargé d'en organiser les travaux, décide de l'opportunité de l'invitation proposée.

Propositions de la mission

- Inclure, dans la composition du conseil régional des exécutifs, le président du conseil régional, les présidents des conseils généraux, les présidents des communautés urbaines, des communautés d'agglomération et des communautés de communes de plus de 50 000 habitants et un représentant par département des communautés de communes de moins de 50 000 habitants, désigné par elles, ainsi que, le cas échéant, les présidents de métropole.

- En tant que de besoin, le président du conseil régional des exécutifs peut associer à une négociation en cours le responsable d'une collectivité locale non représentée au conseil.

• Des réunions trimestrielles sur un ordre du jour partagé

L'une des principales raisons de l'inégal succès remporté par les conférences régionales des exécutifs tient à ce qu'elles ne devaient être convoquées, à l'initiative du président du conseil régional, qu'une fois par an. Il arrivait ainsi qu'après quelques réunions, la conférence ne soit plus réunie, les négociations dont elle aurait pu avoir à connaître se déroulant à l'extérieur de cette instance.

Une autre raison a sans doute tenu à l'absence d'ordre du jour prédéfini, pour les réunions annuelles. Il en est souvent résulté que, faute de questions inscrites à l'ordre du jour par le président de la conférence, la réunion de celle-ci ait pu apparaître sans objet et sans véritable enjeu.

Vos rapporteurs ont estimé qu'il était possible de remédier à ces difficultés et de renforcer ainsi la position du futur conseil régional des exécutifs, en définissant des règles de fonctionnement plus contraignantes et plus précises.

Le conseil régional des exécutifs aurait obligation de se réunir au moins une fois par trimestre. Le raccourcissement de la périodicité des réunions serait pleinement justifié d'une part par le fait que les compétences du conseil seraient étendues ( cf. infra ) et qu'il conviendrait de disposer de plus de temps pour les exercer, et d'autre part par la fixation d'un ordre du jour obligatoire dont devraient débattre les présidents des différentes collectivités membres du conseil.

L'instauration d'un ordre du jour obligatoire , établi sur la base des nouvelles compétences reconnues au conseil, mettrait à même le conseil régional des exécutifs de se saisir des principales politiques d'intérêt régional ou interdépartemental, dans le but de favoriser la coordination des interventions des différents acteurs.

Il reviendrait au président du conseil régional, qui assurerait, comme aujourd'hui, la présidence du conseil régional des exécutifs, d'établir cet ordre du jour obligatoire , sur la base des prescriptions législatives. Il pourrait y ajouter, en tant que de besoin, toute question entrant dans le champ de compétence de la nouvelle instance. Afin que soient offertes des garanties suffisantes à chaque membre du conseil, le droit leur serait reconnu d'obtenir l'inscription à l'ordre du jour de la plus prochaine réunion du conseil, des questions de sa compétence dont ils souhaiteraient débattre. En tant que de besoin, ou en cas d'urgence, des réunions supplémentaires pourraient avoir lieu pour examiner des sujets déterminés, le cas échéant à la demande d'un ou plusieurs membres.

Pour lui permettre d'être à la fois une instance de négociation et un lieu d'information, le conseil aurait la possibilité d'organiser des auditions sur les questions en débat.

Ainsi conçu, le fonctionnement du conseil régional des exécutifs présenterait plusieurs avantages :

- en raison de la périodicité régulière de ses réunions, il serait le lieu incontournable du dialogue sur les grandes politiques territoriales ;

- grâce à l'ordre du jour imposé, les collectivités membres seraient obligées de considérer un certain nombre d'actions ou de projets qu'elles pourraient mener en commun. Il y aurait là une incitation forte à plus de coordination, dans le respect de la libre administration de chaque collectivité ou groupement représenté ;

- en raison de la publicité qui serait apportée aux résultats des négociations engagées, l'articulation des compétences entre les différents niveaux serait clarifiée et les acteurs territoriaux pourraient plus aisément identifier quelle collectivité est responsable de telle politique. De plus, le refus de certaines collectivités de s'engager au côté d'autres s'affirmerait, quant à lui, de manière explicite. Ceci contribuerait à affermir la responsabilité de chaque échelon devant les électeurs, dans la conduite des actions d'envergure régionale ;

- le rôle de « chef de file » de la région dans la conduite des négociations serait affirmé puisque le président du conseil régional assurerait la présidence du conseil régional des exécutifs, tout comme le seraient les prérogatives des autres membres de ce conseil, puisque ces derniers auraient la possibilité d'obtenir la convocation de réunions supplémentaires ou d'appeler à la discussion des questions dont ils souhaiteraient débattre.

L'ordre du jour obligatoire a vocation à porter sur les principaux champs de compétence du conseil régional des exécutifs, en échelonnant les sujets pour éviter que toutes les questions soient évoquées en même temps lors d'une même réunion. Cet étalement dans le temps des sujets à examiner serait de la responsabilité du président du conseil régional.

Le conseil régional des exécutifs aurait pour mission de fixer les objectifs des politiques territoriales engagées par chacun des membres, de définir les schémas d'orientation qu'ils auraient à mettre en oeuvre, de préparer les accords et les conventions à passer entre eux et de déterminer , pour les compétences exercées en commun, les chefs de file pour chaque projet, les conditions de création de guichets uniques et l'organisation d'une instruction unique .

Un sort particulier pourrait être réservé aux questions qui auraient vocation à être fixées pour la totalité de la mandature (conventions de répartition des compétences ou d'organisation de chef-de-filat par exemple), qui devraient être discutées et tranchées dans la première année suivant le renouvellement intégral de l'un des conseils territoriaux dont les présidents siègent au conseil régional des exécutifs.

Propositions de la mission

- Assurer une périodicité trimestrielle aux réunions du conseil régional des exécutifs, sous la présidence du président du conseil régional.

- Fixer un ordre du jour obligatoire pour les réunions du conseil régional des exécutifs portant sur les sujets entrant dans les attributions confiées à celui-ci.

- En tant que de besoin ou en cas d'urgence, prévoir la réunion du conseil régional des exécutifs, sur demande d'un de ses membres, sur un ordre du jour comportant la question dont il souhaite débattre.

- Prévoir la fixation par le conseil régional des exécutifs des objectifs des politiques territoriales engagées par chacun des membres et la définition des schémas d'orientation qu'ils ont à mettre en oeuvre.

- Prévoir la possibilité pour le conseil régional des exécutifs de procéder à des auditions sur les sujets dont il a à connaître.

• Des compétences étendues

Actuellement, la loi prévoit que les conférences régionales des exécutifs connaissent de tous les sujets concernant l'exercice de compétences pour lesquelles une concertation est prévue par la loi et de tous les domaines nécessitant une harmonisation entre les deux niveaux de collectivités.

Le mérite d'une telle définition est d'embrasser un champ assez vaste. Cependant, elle reste par trop lacunaire, puisque, pour une part, elle se limite aux concertations prévues par la loi, laissant ainsi de côté la répartition uniquement contractuelle des compétences, et, pour l'autre part, elle ne vise que les deux niveaux de collectivités départementale et régionale, alors que les actions concertées peuvent concerner à la fois le conseil régional, les conseils généraux, les communautés urbaines, les communautés d'agglomération, certaines communautés de communes, voire les métropoles.

Il convient dès lors, pour faire du conseil régional des exécutifs l'instance incontournable du dialogue territorial, de lever ces restrictions et de prévoir qu'il est compétent pour tous sujets relatifs à l'exercice négocié d'une compétence, et pour tous les domaines nécessitant une harmonisation ou une coordination des collectivités membres entre elles , comme par exemple en matière de politiques d'investissement ou pour l'articulation des schémas régionaux avec les schémas infrarégionaux.

Parallèlement, certains champs ou domaines de négociation, dont la mission entend favoriser le développement, et qui entrent dans les missions des conseils régionaux des exécutifs, pourraient être visés plus explicitement , comme les conventions de délégation ou de répartition de compétences, celles organisant le chef-de-filat et les guichets ou instructions uniques.

Ainsi qu'il a été dit précédemment, de tels sujets de discussion seraient inscrits à l'ordre du jour obligatoire, notamment en début de mandature, afin de fixer, pour une durée suffisamment longue, une répartition des compétences et des moyens sur laquelle les différentes collectivités se seraient entendues dans le cadre de leurs actions communes.

Les accords négociés au sein du conseil régional des exécutifs serviraient alors de base à l'établissement du « constat de carence » . Le refus exprimé par une collectivité de déléguer à une autre une compétence dont elle serait titulaire, serait en effet au nombre des éléments pris en considération pour apprécier la réalité de la carence dénoncée.

Instances de concertation placées au centre du dispositif territorial, les conseils régionaux des exécutifs devraient aussi avoir vocation à se substituer, dans leurs champs de compétence respectifs, aux autres instances de coordination ou de négociation, existantes ou en projet. Le cas échéant, les conseils siégeraient en formation restreinte pour les seuls membres concernés, ou étendue aux autres collectivités intéressées.

Enfin, il serait pertinent qu'en plus d'être un lieu d'échange et de dialogue, les conseils régionaux des exécutifs soient aussi un lieu d'information pour leurs membres . Ainsi, le conseil pourrait-il être l'instance au sein de laquelle le président du conseil régional informerait ses collègues de l'avancée des discussions ainsi que sur la mise en oeuvre des contrats de projets Etat-région, par exemple deux fois par an . D'une manière plus générale, ces conseils pourraient être destinataires de toute information utile pour tracer les perspectives du développement économique, social et humain du territoire régional.

Propositions de la mission

- Faire figurer dans les compétences du conseil régional des exécutifs les sujets relatifs à l'exercice négocié de compétences ou nécessitant une coordination (politique d'investissement, articulation des schémas locaux avec les schémas régionaux).

- Inscrire à l'ordre du jour obligatoire du conseil régional des exécutifs, pour l'exercice des compétences partagées, des conventions de délégation ou de répartition de compétences, de l'organisation des chefs-de-filat et les conditions de mise en place de guichets et d'instructions uniques.

- Affirmer la vocation du conseil régional des exécutifs à se substituer, dans la limite de leurs compétences, aux instances de négociation entre collectivités déjà existantes ou en projet.

- Informer régulièrement le conseil régional des exécutifs sur les sujets d'intérêt régional, et notamment sur l'avancée de la mise en oeuvre des contrats de projet Etat-région.

• Un rôle d'instance de négociation réaffirmé, dans le respect de la libre administration des collectivités territoriales

Vos rapporteurs considèrent que le succès des conseils régionaux des exécutifs reposera sur leur capacité à susciter le dialogue et la concertation entre les différents acteurs territoriaux. Mais une telle ambition serait vouée à l'échec si, au-delà de l'obligation faite d'engager un dialogue, elle aboutissait à contraindre l'une des parties à céder aux exigences d'une autre.

C'est pourquoi, la mission a entendu écarter toutes les solutions qui auraient pu introduire une inégalité entre les membres du conseil régional des exécutifs ou opposer une majorité à une minorité. Au contraire, elle souhaite réaffirmer l'approche consensuelle du dispositif envisagé : chacun des membres doit pouvoir négocier librement et aucun accord négocié au sein du conseil régional des exécutifs ne doit être imposé, s'il la concerne, à l'une des parties en présence contre sa volonté.

En outre, en tout état de cause, les orientations adoptées au sein du conseil régional des exécutifs devraient faire l'objet, dans un délai rapproché, d'une confirmation par les assemblées délibérantes des collectivités territoriales concernées .

Proposition de la mission

- Prévoir la mise en délibération, dans un délai suffisamment rapproché, au sein des assemblées délibérantes des collectivités représentées au conseil régional des exécutifs, des orientations retenues par le conseil.

3. La création au niveau départemental d'une conférence départementale des exécutifs

La négociation locale doit être la clé du développement harmonieux des territoires. Il convient dès lors de la décliner aux différents niveaux territoriaux . Si l'importance du niveau régional destine tout naturellement le conseil régional des exécutifs à être le lieu principal de la coordination des politiques territoriales majeures, le niveau départemental devrait lui aussi tirer profit d'un dispositif semblable de négociation organisée, la « conférence départementale des exécutifs ».

Cependant, pour éviter toute concurrence, entre les deux instances, il conviendrait de circonscrire les attributions de la conférence aux questions d'intérêt départemental . Elle serait présidée par le président du conseil général. En outre, il serait souhaitable que contrairement au conseil régional des exécutifs, la conférence départementale des exécutifs compte un nombre plus important de membres, afin qu'elle offre la possibilité à toutes les communautés de communes de participer à la négociation territoriale. Ainsi la conférence pourrait-elle utilement réunir le président du conseil général et les présidents de toutes les métropoles, communautés urbaines, d'agglomération et de communes.

Son fonctionnement (périodicité, tenue du débat, adoption des décisions) pourrait être calqué sur celui du conseil régional des exécutifs, tout comme ses compétences, dans le respect cependant des prérogatives de ce dernier.

Les principales missions des conférences départementales des exécutifs devraient être de faciliter la conduite de négociations et l'échange entre ses membres et de favoriser l'émergence de projets communs . Les conférences départementales des exécutifs devraient aussi tout particulièrement jouer le rôle de courroie de transmission des attentes exprimées par les territoires, à destination du président du conseil général et, par son intermédiaire, du conseil régional des exécutifs .

Elle servira aussi de courroie de transmission utile à la mise en oeuvre des politiques territorialisées initiées par l'Etat.

Propositions de la mission

- Créer dans chaque département une conférence départementale des exécutifs regroupant le président du conseil général et les présidents d'intercommunalité et, le cas échéant, de métropole.

- Réunir cette conférence chaque trimestre, sous la présidence du président du conseil général. Elle serait chargée d'organiser la coordination locale et l'échange entre ses membres. Elle jouerait le rôle de courroie de transmission de l'information à destination du conseil général et du conseil régional des exécutifs.

IV. L'OUTRE-MER : LE CHOIX DE S'EN REMETTRE AUX CONCLUSIONS DE LA MISSION DU SÉNAT SUR LES DROM

Rappel des premières préconisations de la mission dans son rapport d'étape

- Instauration d'une collectivité unique dans chaque département et région d'outre-mer

Lorsqu'elle a engagé ses travaux, la mission avait souhaité embrasser l'ensemble des problématiques territoriales de la République, de métropole comme de l'outre-mer, spécialement les régions et départements d'outre-mer (DROM).

En effet, la mission n'avait pas estimé devoir examiner la situation des collectivités ultramarines qui sont dotées, de par la loi, d'un statut particulier. D'ailleurs, Mayotte, après la consultation du 29 mars 2009, et la Nouvelle-Calédonie connaîtront des évolutions institutionnelles dans les prochaines semaines.

Les événements survenus dans les régions et départements d'outre-mer (DROM), au cours des premiers mois de cette année 2009, particulièrement en Guadeloupe, ont cependant amené votre mission à s'adapter aux circonstances dans la conduite de ses travaux : le Sénat, en effet, a créé une mission d'information sur la situation des départements d'outre-mer.

C'est pourquoi, s'il lui paraît toujours d'actualité de réaffirmer les premières conclusions qu'elle avait adoptées, le 11 mars 2009, dans son rapport d'étape, il lui semble pertinent, aujourd'hui, de prendre en compte les travaux spécifiquement menés sur les collectivités ultramarines par la mission sénatoriale présidée par M. Serge Larcher et dont le rapporteur, M. Eric Doligé, est par ailleurs membre de notre mission temporaire.

A. LES PREMIÈRES ORIENTATIONS DE LA MISSION : PRIVILÉGIER LE CHOIX D'UNE COLLECTIVITÉ UNIQUE

Dans son rapport d'étape, la mission a préconisé, pour les DROM, la fusion de la région et du département.

Elle a retenu ce principe après, notamment, avoir entendu le sénateur et président du conseil général de la Martinique, M. Claude Lise, qui avait souligné combien l'enchevêtrement des compétences et la multiplicité des centres de décision brouillaient la lisibilité de l'action publique et la bonne gestion des finances locales.

La mission était cependant consciente de la contrainte constitutionnelle à laquelle était assujetti le choix de la collectivité unique : le consentement des populations intéressées.

Elle a alors souhaité poursuivre sa réflexion et organisé la consultation de l'ensemble des présidents de conseils régionaux et généraux d'outre-mer.

B. UNE RÉFLEXION BOUSCULÉE PAR LES CONTRAINTES DE L'ACTUALITÉ

Devant l'inquiétude exprimée par les sénateurs des départements d'outre-mer, le Sénat a créé, le 5 mars 2009, une mission commune d'information chargée d'évaluer la situation des départements d'outre-mer.

Entre autres thèmes, celle-ci a décidé d'examiner la situation financière des collectivités territoriales et la question de leur gouvernance.

Il semble donc aujourd'hui plus sage de suspendre les travaux de notre mission concernant les collectivités ultramarines et de s'en remettre aux conclusions qu'adoptera cette mission d'information au terme de plusieurs mois de travaux spécifiquement conduits sur l'outre-mer. Ayant embrassé les divers aspects des problèmes de ces territoires et ayant rencontré sur place tous les présidents de conseils régional et général, la mission « outre-mer » aura nécessairement une analyse plus fine que celle à laquelle a pu parvenir votre mission dans le cadre de ses propres travaux.

En conséquence, la mission temporaire sur l'organisation et l'évolution des collectivités territoriales ne formule pas, en conclusion de son rapport, de propositions pour l'outre-mer.

Elle transmettra à la mission ad hoc le fruit de ses réflexions et les diverses contributions qu'elle a recueillies au fil des mois, et qui pourront nourrir la réflexion de celle-ci.

DEUXIÈME PARTIE : POUR UNE CLARIFICATION DES COMPÉTENCES

Rappel des premières préconisations de la mission relatives à la clarification des compétences dans son rapport d'étape

- Réaffirmation du principe de libre administration des collectivités territoriales.

- Renforcement des compétences exclusives par niveau de collectivités territoriales avec faculté de délégation de compétences d'un niveau à l'autre, et possibilité pour un niveau d'exercer une compétence attribuée à un autre sur la base d'un « constat de carence ».

- Affirmation des départements dans leur rôle de garant des solidarités sociales et territoriales, et des régions dans leurs missions stratégiques et liées à la préparation de l'avenir.

- Attribution des parties du pouvoir réglementaire liées à leurs compétences aux départements et aux régions.

- Attribution aux régions de la compétence de répartir les fonds européens.

- Reconnaissance d'un « chef de filat » pour les compétences partagées entre plusieurs niveaux et instauration d'un guichet et d'un dossier d'instruction uniques.

- Développement du droit à l'expérimentation, par exemple pour le transfert de la compétence emploi aux régions.

- Dans les domaines de compétences transférées, suppression des interventions des services déconcentrés de l'Etat et transfert de leurs personnels aux collectivités territoriales.

I. LES PRINCIPES ET INSTRUMENTS D'UNE CLARIFICATION DES COMPÉTENCES

Dans le premier temps de ses travaux, votre mission s'est employée à établir un diagnostic sur l'organisation territoriale française et à identifier les enjeux auxquels devrait inévitablement répondre toute réforme future. Cet état des lieux lui a permis de formuler les principes qui devaient guider la suite de ses réflexions.

S'agissant des compétences, votre mission a jugé indispensable d'en améliorer la répartition, sans pour autant que la clarification engagée n'aboutisse à un cloisonnement rigide entre les différents niveaux de collectivités, qui ne serait pas souhaitable compte tenu de la nécessaire imbrication des intérêts territoriaux.

Dans cette perspective, votre mission a entendu privilégier la voie de la spécialisation de l'action des collectivités territoriales , fondée sur la prise en compte du principe de subsidiarité, tout en garantissant le respect des initiatives locales , nécessaire pour assurer l'adaptation aux spécificités des territoires. En parallèle, le besoin impérieux de coordination des interventions est au coeur de l'objectif de clarification, de lisibilité et surtout d'efficacité de l'action publique locale : le conseil régional des exécutifs, outil de gouvernance des territoires dont les modalités de fonctionnement ont été présentées plus haut, jouera un rôle majeur dans ce cadre.

A. CLARIFIER LA « VOCATION » SPÉCIFIQUE DE CHACUN DES NIVEAUX DE COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

Dans son rapport d'étape, votre mission temporaire a mis en évidence la « légitimité historique » des communes et des départements, l'attachement très fort que leur manifestent nos concitoyens, ainsi que l'émergence plus récente du fait régional dont nul ne conteste à présent la pertinence.

Cependant, les attentes de simplification du paysage institutionnel local, de cohérence de l'action publique et de clarification de l'exercice des compétences rendent nécessaire de réaffirmer au préalable, par-delà l'hétérogénéité qui les caractérise, quelle est la « vocation » spécifique de chacun des niveaux de collectivités territoriales . Il s'agit de définir clairement leur rôle fondamental, de préciser le champ de leurs compétences et de mieux cerner les attentes qu'il convient de placer en chacun d'eux , afin de renforcer leur visibilité, de consolider la lisibilité de leurs actions aux yeux des citoyens, et d'améliorer, ce faisant, l'identification des responsabilités et l'articulation ou la complémentarité de leurs interventions.

Cette clarification repose, en parallèle, sur l'application du principe de subsidiarité , introduit à l'article 72 de la Constitution en 2003 25 ( * ) , qui permet de déterminer le bon niveau d'exercice des compétences, en fonction de ces vocations spécifiques, mais aussi en s'adaptant à la diversité des territoires.

Avant d'aborder une analyse thématique approfondie, par grands domaines de compétences, la mission a jugé utile d'avoir une approche de la clarification des compétences par niveaux de collectivités , en rappelant quelques grands principes de nature à renforcer l'efficacité de l'action publique et la pertinence de notre organisation territoriale : en effet, cette dernière apparaît comme un élément clé de la compétitivité de notre économie, un facteur de développement local, et un moyen de garantir un équilibre et une solidarité entre les différents espaces qui structurent notre territoire.

1. Le « bloc communal » : l'échelon de la proximité

Les communes, qui se prolongent et se « transcendent » désormais dans la coopération intercommunale, restent l'échelon de base, le « noyau dur », de notre organisation territoriale et de notre démocratie locale.


• Il ressort des travaux de la mission que le « bloc communal » incarne la proximité de l'action publique , proximité qui apparaît nécessaire pour répondre, de façon réactive et appropriée, aux attentes de la population en matière de services publics et aux besoins de la vie quotidienne (état civil, garderies, crèches, écoles, études surveillées, bibliothèques municipales, soutien à la vie associative, distribution de l'eau potable, collecte des déchets ménagers, logement et urbanisme...).

C'est en effet au niveau de la commune que, par exemple, peut être pris en charge de la façon la plus efficace le déneigement des voiries communales ou encore l'entretien des espaces publics. C'est en tout cas au maire que les habitants s'adressent en premier pour traiter de ces problèmes du quotidien.

Comme la mission l'a souligné dans son rapport d'étape, les communes, « point de contact » avec les habitants et usagers des services publics, doivent ainsi conserver une capacité d'initiative dans tous les domaines d' intérêt communal .


• Par ailleurs, la loi dite « Chevènement » du 12 juillet 1999, relative au renforcement et à la simplification de la coopération intercommunale, a permis aux communes de s'organiser pour répondre au mieux aux demandes de service des citoyens, en leur offrant des structures de regroupement adaptées.

Le renforcement de l'intercommunalité fait l'objet de propositions spécifiques dans la partie « gouvernance » du présent rapport.

L'échelon intercommunal, à condition qu'il soit rendu parfois plus cohérent, permet d'atteindre une échelle d'action plus pertinente ou une « taille critique » nécessaire pour la mise en oeuvre de services qu'il serait trop coûteux ou inopportun pour une seule commune de prendre en charge (par exemple dans le domaine de l'eau ou des déchets, en raison de la technicité croissante des normes, ou encore pour les activités périscolaires...), ou pour favoriser le développement économique local (zones d'activité, accueil d'entreprises...), dans un souci d'aménagement concerté du territoire plutôt que selon une logique de concurrence entre les communes.

La définition de l'intérêt communautaire rend possible, par ailleurs, la mutualisation de la gestion d'équipements plus structurants dont le rayonnement dépasse l'aire communale, par exemple dans le domaine de la culture ou du sport.

2. Le département : le niveau des solidarités sociales et territoriales

Selon une logique de clarification et de « spécialisation » des compétences des différents niveaux de collectivités, et comme l'a relevé M. Claudy Lebreton, président de l'Assemblée des départements de France (ADF) lors de son audition devant la mission, le département doit être reconnu, pour sa part, comme l'échelon des solidarités sociales et territoriales .

Cette vocation ne lui est d'ailleurs pas contestée, en raison des attributions larges qui lui ont déjà été confiées par la loi dans ce domaine, et, d'une façon plus générale, du rôle qu'il est appelé à jouer au service des territoires. En effet, son positionnement « intermédiaire » et le mode de désignation de ses élus, lui confèrent à la fois un véritable ancrage territorial et une capacité d'assurer un aménagement équilibré et cohérent de l'espace local, en particulier dans les zones rurales.

Dans l'esprit du législateur, en effet, le département apparaît à bien des égards comme le garant des solidarités.


• Ses compétences « exclusives » le placent, tout d'abord, au coeur de la vie quotidienne de nos concitoyens et au plus près des réalités sociales des territoires . Les départements consacrent ainsi plus de 50 % de leurs dépenses à l' action sociale au sens large. Si les communes et leurs groupements conservent, au titre de leur rôle de proximité, des responsabilités dans ce domaine, via les centres communaux et intercommunaux d'action sociale (CCAS et CIAS), l'essentiel du « bloc » de compétences en matière d'aide sociale a été progressivement confié à l'échelon départemental, par des lois successives (gestion de l'APA, du RMI/RMA puis du RSA, allocations aux personnes handicapées, aides sociales à l'enfance, etc.).

Comme cela sera précisé dans les développements ci-après consacrés à la clarification des compétences en matière d'action sociale, la mission a entendu aller, dans ce domaine, jusqu'au bout de la logique de « spécialisation », en renforçant la cohérence des champs d'intervention du département (en matière d'aide sociale et d'insertion des publics en difficulté) et en le dotant des « moyens de ses compétences », y compris réglementaires.


• Le département a également pour vocation d'être au service des territoires .

A cet effet, il est chargé, notamment de la construction, de l'entretien et de la gestion de la voierie départementale et intervient pour améliorer l'environnement économique des entreprises.

Par ailleurs, au cours des travaux de la mission, notre collège Edmond Hervé, notamment, a tenu à insister sur le rôle d'ingénierie et de conseil juridique, administratif et technique que le département peut apporter aux communes et aux intercommunalités n'ayant pas les moyens de se doter de tels services d'expertise. Ce rôle apparaît essentiel, en particulier, dans les territoires ruraux, au sein desquels la mission a pu mesurer, à l'instar de ce qu'a souligné notre collègue Bruno Retailleau notamment, que le département joue un rôle clé en faveur du développement et de soutien à la ruralité , par son rôle de péréquation financière et par sa connaissance fine du territoire.

Tel est le cas, par exemple, dans le domaine de la culture, où le département apporte un soutien au patrimoine rural des petites communes 26 ( * ) , favorise l'accès à la lecture publique ou aux enseignements artistiques dans les zones rurales via le réseau des bibliothèques de prêt ou des écoles départementales de musique, etc. Tel est également le cas dans le domaine de l'eau ou de l'assainissement, dans lesquels le département peut apporter une assistance technique aux communes et à leurs groupements 27 ( * ) .

3. La région : l'échelon des missions stratégiques et de préparation de l'avenir

La mission a rappelé, dans son rapport d'étape, que le cadre de référence régional a d'abord émergé, au sortir de la seconde guerre mondiale, dans un objectif de développement économique, de modernisation du pays et d'aménagement du territoire.

Érigée en collectivité territoriale de plein exercice, la région a été progressivement dotée par la loi de compétences - notamment en matière de formation (gestion des lycées, politique de formation professionnelle des jeunes et des adultes et d'apprentissage), d'action économique ou de transports - qui en font, potentiellement, un niveau d'avenir.

La mission a jugé essentiel de consolider les régions dans leurs missions stratégiques et de préparation de l'avenir , en leur donnant les outils nécessaires pour qu'elles soient réellement en mesure d'assumer ce rôle, au service de la compétitivité des territoires. Il est apparu, en effet, que certaines régions n'avaient pas complètement répondu aux attentes dans ce domaine et qu'il était donc nécessaire de clarifier leurs missions et d'en améliorer, dans certains cas, la cohérence ou le caractère « opérationnel ».


• En ce sens, il convient d'abord de reconnaître les régions comme des acteurs publics, au plus haut niveau, dans les territoires , et de structurer , en conséquence, leur dialogue avec l'Etat pour qu'il devienne plus constructif et plus équilibré.

La réorganisation, en cours, des services déconcentrés de l'Etat autour de pôles régionaux renforcés, dans le cadre de la révision générale des politiques publiques, plaide d'ailleurs en faveur d'un renforcement de la région dans sa mission de coordination et dans son partenariat avec l'Etat sur les grands projets ou politiques stratégiques (infrastructures, recherche et innovation, environnement et développement durable...). Par ailleurs, la région est le niveau de référence de plusieurs politiques européennes.

Rappelons que la mission avait préconisé, dès son rapport d'étape, d'attribuer aux régions la compétence de répartir les fonds européens ainsi que des parties du pouvoir réglementaires liées à leurs compétences.


• Dans un souci de clarification, en outre, les compétences des régions méritent d'être « tirées vers le haut » et non de se disperser, au risque de se diluer, dans des actions de proximité qui ne relèvent ni de leur échelle ni d'un véritable intérêt régional.

Ainsi que l'ont souligné aussi bien M. Alain Rousset, président de la région Aquitaine et président de l'Association des régions de France, que M. Adrien Zeller, président de la région Alsace, les régions doivent être reconnues comme des partenaires dans les domaines de l'enseignement supérieur et de la recherche ou encore de l'innovation , où nombre d'entre elles jouent déjà un rôle majeur (par exemple dans le cadre d'Agence régionale de l'innovation comme celles mises en place dans ces deux régions), avec, selon les territoires, l'appui d'autres niveaux de collectivités territoriales. Leurs domaines de compétences pourraient également, comme la mission l'avait suggéré dans son rapport d'étape, être étendus à l'emploi, à titre expérimental, par cohérence avec la « chaîne » formation-développement économique relevant de leur responsabilité.


• Par ailleurs, en tant que « collectivité de la stratégie » , la région est également l'échelon pertinent en matière de programmation , de planification de politiques ou de grands équipements structurants , et de concertation ou contractualisation entre les différents acteurs locaux et/ou avec l'Etat, notamment dans le cadre de plans ou de schémas permettant à la fois une approche globale des politiques menées au niveau d'un territoire et une vision plus cohérente en termes d'aménagement du territoire (contrat de projet Etat-région, schéma régional de développement économique, schéma régional de développement et d'aménagement du territoire, plan régional de développement des formations professionnelles, schéma prévisionnel des formations, etc.). Dans certains cas, cependant, l'approche interrégionale peut également apparaître comme l'échelle pertinente, soit par souci de cohérence et de continuité territoriale (par exemple dans le cadre des actuels schémas interrégionaux de littoral, ou dans le domaine des transports), soit pour atteindre la « taille critique » nécessaire à la conduite de certaines politiques (par exemple en matière d'enseignement supérieur et de recherche).

B. RENFORCER LA COORDINATION DES INTERVENTIONS

1. La réaffirmation d'une compétence d'initiative fondée sur l'intérêt territorial


• Comme elle l'avait déjà esquissé dans son rapport d'étape, en réaffirmant le principe de libre administration des collectivités territoriales, votre mission a décidé de ne pas tomber dans le piège du faux-débat sur la « clause générale de compétence ». Elle a refusé d'en annoncer la suppression, qui lui a paru douteuse tant sur le plan technique que sur le plan juridique.

Pour la très grande majorité des participants aux travaux de la mission, les collectivités territoriales doivent continuer de disposer, de manière subsidiaire, d'une « compétence d'initiative », qui est par principe consubstantielle à l'esprit même de la décentralisation .

Il ne s'agit en rien, cependant, d'une liberté d'agir dans tous les domaines puisque cette capacité d'initiative s'arrête là où commencent les compétences attribuées à un autre échelon territorial, selon la logique de clarification et de plus forte spécialisation des compétences de chacun des échelons territoriaux envisagée par la mission. Par ailleurs, elle est uniquement destinée à permettre aux collectivités locales d'intervenir sur le fondement d'un intérêt territorial clairement identifié, sur la base du principe de subsidiarité, ou encore de prendre en charge des problématiques « émergentes » qui n'auraient pas encore fait l'objet d'une attribution à une collectivité donnée.


• Par ailleurs, la procédure du « constat de carence » pourrait constituer, dans ce cadre, un instrument souple de coordination des initiatives locales.

Dans son rapport d'étape, votre mission avait prévu que le renforcement des compétences exclusives des niveaux de collectivités s'accompagnait de l'accroissement des possibilités de délégation de compétence et de l'institution d'une procédure de « constat de carence » permettant à une collectivité d'exercer, sur son territoire, la compétence attribuée à une autre, lorsque cette dernière refuse de l'exercer elle-même.

Les travaux menés par votre mission depuis lors lui ont permis d'affiner la procédure du « constat de carence ». Celui-ci prévoirait qu'une collectivité, qui estimerait être victime de l'inaction de la collectivité en charge de la compétence, puisse la mettre en demeure de l'exercer. À défaut de réponse positive à cette demande, la première collectivité pourrait saisir le préfet du constat de carence qu'elle aurait établi, en y joignant la réponse apportée à sa mise en demeure. Il appartiendrait alors au préfet d'indiquer à la collectivité intéressée s'il entend ou non déférer, pour incompétence, les actes qu'elle serait susceptible d'adopter pour mettre en oeuvre, sur son territoire, la compétence dont elle réclamerait l'exercice. Le préfet apprécierait ainsi dans quelle mesure l'action envisagée par la collectivité, strictement limitée à son territoire, relève bien de sa compétence d'initiative, fondée sur un intérêt territorial.

Une telle procédure permettrait d' offrir une certaine sécurité juridique aux collectivités concernées, puisqu'elles pourraient connaître l'appréciation du préfet sur la légalité de leur demande. Elle conserverait en outre intacte la liberté d'appréciation du juge, qui pourrait être saisi par la collectivité visée par le constat de carence. Elle éviterait de mettre en place, directement ou indirectement, une tutelle d'une collectivité sur une autre .

Par ailleurs, dans son rapport d'étape, la mission avait formulé une préconisation tendant au renforcement des compétences exclusives des collectivités territoriales de chaque niveau. A la suite des observations de M. Edmond Hervé, et suivant vos rapporteurs, la mission souhaiter reformuler cette proposition en visant de façon plus logique le renforcement des compétences obligatoires.

Enfin, elle favoriserait l'approche négociée de la répartition des compétences .

Propositions de la mission

-  Reconnaître à chacun des niveaux de collectivités une « compétence d'initiative » fondée sur l'intérêt territorial, dans le respect de la répartition des compétences entre les différents échelons et du principe de subsidiarité.

- Renforcer les compétences obligatoires par niveau de collectivités territoriales.

- Ouvrir la possibilité pour une collectivité d'agir sur la base d'une procédure de « constat de carence », favorisant une approche négociée de la répartition des compétences.

2. L'institutionnalisation de la négociation territoriale au sein d'un conseil régional des exécutifs aux prérogatives renforcées

Favorable au respect des initiatives locales et consciente que la spécialisation, aussi poussée soit-elle, devait laisser subsister des domaines de compétences partagés, pour lesquels une coopération entre les différentes collectivités territoriales est absolument nécessaire, votre mission s'est fixé pour objectif de réfléchir, à chaque fois que cela était possible, aux instruments juridiques qui pourraient être mis en place pour renforcer la coordination des actions menées par chaque acteur territorial . C'est pourquoi elle a préconisé que, dans de tels cas, soit plus fréquemment désignée une collectivité chef de file ou qu'en amont, des conventions règlent les délégations de compétence ou les mutualisations de service envisageables.

Au cours des travaux de la mission, il est cependant apparu à vos rapporteurs que, quels que soient les moyens juridiques de coopération qui pourraient être mis en place, ils seraient voués à l'échec si, dans le même temps, le dialogue et la concertation entre les différents acteurs intéressés n'étaient pas eux-mêmes encouragés. Or, il a semblé à vos rapporteurs que ceci passait nécessairement par une institutionnalisation de la négociation territoriale et par la création, à partir de la conférence régionale des exécutifs, d'un lieu de concertation aux prérogatives renforcées où auraient vocation à être discutées, à échéances régulières, les principales problématiques engageant plusieurs collectivités et où seraient organisée la coordination des politiques menées par les acteurs territoriaux.

Cette instance baptisée « conseil régional des exécutifs », dont les modalités de fonctionnement ont été présentées dans la partie du présent rapport consacrée à la gouvernance territoriale, présente l'avantage, dans le cadre du schéma de réorganisation territoriale retenu par la mission, de satisfaire à la fois l'impératif de clarification de la répartition des compétences et le principe de libre administration des collectivités locales .

Elle serait notamment chargée d' organiser la coordination des interventions de chacun des acteurs locaux et de renforcer la cohérence de leurs actions, en organisant les « chefs de filat » ou en procédant, dans le cadre des domaines de compétences partagées, à l'identification de « guichets uniques » permettant de simplifier les modalités d'instruction et de financement des projets.

Les développements qui suivent, dans l'analyse thématique par grands domaines de compétences, renverront, chaque fois que nécessaire, à ce « conseil régional des exécutifs ».

C'est à la lumière de ces grands principes de « spécialisation » de l'action des différents niveaux de collectivités territoriales et de coordination des interventions que la mission aborde ci-après, à partir d'une analyse plus approfondie, les voies d'une clarification de la répartition des compétences dans les principaux domaines de l'action publique.

II. LES PROPOSITIONS DE VOTRE MISSION CONCERNANT L'ÉVOLUTION DES COMPÉTENCES DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

Dans son rapport d'étape, votre mission avait déjà pris soin de souligner qu'il n'était pas possible de procéder à une répartition abstraite des compétences qui ne tienne pas compte du rôle que l'on souhaitait voir jouer à chaque niveau de collectivité. Mais elle avait également reconnu le fait que les exigences de lisibilité, de responsabilité et d'efficacité de l'action publique appelaient une clarification des compétences 28 ( * ) .

Votre mission a ainsi été amenée à déterminer les principes à respecter pour conduire la nécessaire entreprise de clarification, parmi lesquels on trouve :

- le principe de subsidiarité , inscrit depuis 2003 dans la Constitution 29 ( * ) , et qui peut permettre des délégations de compétences par exemple des départements aux métropoles ;

- le principe du « décideur-payeur » qui tend à faire coïncider le décideur et le financeur ;

- le principe de « modularité » qui implique d'apporter des réponses adaptées à la diversité des territoires ;

- la reconnaissance de l'expertise acquise qui peut amener à préserver une situation existante au motif que la collectivité concernée a développé un savoir-faire reconnu ;

- le développement du « chef de filat » afin de permettre les coopérations verticales entre collectivités et de favoriser la création de « guichets uniques » ;

Afin de conduire sa réflexion au plus près des réalités, votre mission a poursuivi son travail d'auditions en accordant une place particulière aux associations d'élus locaux qui ont été associées en amont à ses réflexions sur l'exercice des compétences 30 ( * ) .

Par ailleurs, une autre préoccupation de la mission a consisté à analyser les actions conduites par les collectivités territoriales à l'invitation de l'Etat dans le cadre de la mise en oeuvre de ses propres compétences notamment dans le champ du social et des transports. L'expérience montre, en effet, que l'Etat est le premier responsable du développement des financements croisés 31 ( * ) et qu'une remise en cause catégorique de ces derniers aurait pour conséquence de mettre en péril la conduite de certains investissements comme en matière d'infrastructures ferrées à grande vitesse, ce qui ne serait pas sans conséquences...

Afin de conduire sa propre réflexion sur l'exercice des compétences conformément aux principes précités, vos rapporteurs ont décidé au mois de décembre 2008 de confier à un cabinet spécialisé une étude portant à la fois sur la réorganisation des collectivités territoriales et sur la clarification de leurs compétences. C'est ainsi que dix compétences 32 ( * ) ont chacune fait l'objet d'un diagnostic détaillé en distinguant selon le type de territoire (grande métropole, ville moyenne, territoire rural).

Ce diagnostic confirme les informations recueillies lors des auditions sur le rôle de chaque niveau d'administration : l'affectation des compétences par niveau de collectivité s'avère en réalité peu opérante . Le législateur a, en effet, cherché dès les premières lois de décentralisation à attribuer une mission spécifique à chaque niveau de collectivité en positionnant l'Etat dans un rôle d'expertise, de régulateur et de contrôle ; la région dans une fonction de programmation et de planification régulièrement partagée avec les départements ; le département pour assurer la cohérence et la continuité territoriale, tout particulièrement en zones rurales où il dispense également des services de proximité ; et les communes et leurs groupements dans les fonctions de proximité, les métropoles et les intercommunalités importantes s'acquittant de ces services de proximité dans leur aire urbaine dont les contours se rapprochent parfois de ceux des départements.

Or, l'un des apports de l'étude précitée est de mettre en évidence l'existence de nombreux chevauchements de compétences et de redondances dans les moyens mobilisés et leurs conséquences préjudiciables à l'efficacité des services rendus. La multiplicité des intervenants dans le développement économique se traduit ainsi par l'inefficience de certaines actions, notamment en ce qui concerne l'observation économique des territoires. De même, le nombre et la diversité des acteurs, ainsi que la multiplicité des intervenants en matière de programmation et de mise en oeuvre des politiques de tourisme sont notables. Les rôles juxtaposés de l'Etat et des départements dans la planification, l'autorisation et la tarification des établissements sociaux et médico-sociaux ne favorisent pas la cohérence de la programmation. Quant à l'intervention conjointe de la région et du département dans la construction et l'entretien des établissements scolaires du second degré, elle ne permet pas d'optimiser les moyens de pilotage, de coordination et de gestion. Comme l'observe l'étude précitée : « les enchevêtrements d'interventions aux différents échelons sont en définitive la situation la plus couramment observée, bien que les textes aient tenté, à de nombreuses reprises, d'opérer les clarifications souhaitables » .

Concernant ces tentatives de clarification inabouties, il convient d'évoquer notamment :

- les schémas régionaux de développement économique (SRDE) qui, du fait de leur caractère non contraignant, n'ont pas eu d'impact sur le chevauchement des interventions ;

- la possibilité offerte par la loi sur les transports intérieurs (LOTI) de créer des syndicats mixtes regroupant les différentes autorités organisatrices, qui n'a été que très peu utilisée ;

- les schémas régionaux d'organisation sociale et médico-sociale institués par la loi du 2 janvier 2002, qui n'ont pas réussi à intégrer les éléments des schémas départementaux afférents aux établissements et services relevant de la compétence de l'Etat ;

- ou encore la réforme de la protection de l'enfance instituée par la loi du 5 mars 2007, qui ne résout pas pleinement le manque de coordination entre les différents acteurs.

Compte tenu des difficultés des textes législatifs et réglementaires à organiser les complémentarités territoriales, les divers intervenants sont renvoyés à leurs propres responsabilités.

Dans la pratique, il apparaît en effet que les collectivités territoriales n'hésitent pas à intervenir pour répondre aux besoins de leurs territoires afin d'assumer leur responsabilité en matière de développement et de cohérence , y compris en s'appuyant sur la clause de compétence générale, lorsqu'elles n'ont pas de compétence particulière dévolue par les textes. Elles s'engagent ainsi, par exemple, dans des programmes de soutien à l'offre de soins, qui constituent pourtant une compétence de l'Etat, elles s'impliquent dans le développement de l'enseignement supérieur, autre compétence de l'Etat visant à favoriser un maillage cohérent et attractif , les communes complètent l'action des départements en matière d'action sociale, les collectivités locales sont enfin nombreuses à être sollicitées par l'Etat pour participer au financement des infrastructures , telles que le réseau ferroviaire de Réseau Ferré de France (RFF), les routes nationales restées à l'Etat, le canal Seine-Nord ou l'aéroport Notre-Dame-des-Landes, alors même qu'elles ne sont compétentes dans aucun de ces domaines.

Le rôle de l'Etat évolue également. D'une part, la place de ses services déconcentrés tend à s'amenuiser, tant en matière de développement économique (Direction régionale de l'industrie, de la recherche et de l'environnement -DRIRE-, Délégation régionale à la recherche et à la technologie -DRRT-, Direction régionale du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle -DRTEFP-) que d'enseignement supérieur, où le rôle des rectorats se limite maintenant aux fonctions de contrôle et d'inspection, tandis que les régions impulsent les politiques, à travers les schémas régionaux d'enseignement supérieur et de recherche . D'autre part, l'action de l'Etat se redéploie sous des formes rénovées à travers de nouvelles agences (Oséo, Pôle emploi, Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie -ADEME-, Allocation de rentrée scolaire -ARS-,...) qui jouent un rôle déterminant.

Dans cet ensemble, le niveau d'administration locale qui rencontre le plus de difficultés à répondre aux besoins semble être le niveau intercommunal du fait, en particulier, des transferts trop partiels de compétences dont il a fait l'objet, notamment en ce qui concerne le développement économique , le tourisme , l' aménagement urbain et les équipements culturels structurants .

L'intercommunalité , qui devrait constituer le niveau naturel de mutualisation des expertises et des moyens, ne remplit pas suffisamment ce rôle, selon l'étude précitée. Par ailleurs, il apparaît que le périmètre des EPCI n'est pas toujours pertinent, en particulier lorsqu'il ne correspond pas à celui des bassins de vie ou des agglomérations, en zone urbaine comme en zone rurale. Cela conduit à la multiplication de structures intermédiaires de type syndicat mixte et, en zone rurale, confère le plus souvent au département un rôle d'acteur structurant.

Les propositions de votre mission visent à apporter des réponses concrètes aux dysfonctionnements rencontrés sans remettre en cause le succès de la décentralisation. Elles sont le reflet de l'expérience de terrain de ses membres, du travail important d'auditions réalisé et de l'ensemble des réflexions dont elle a pu prendre connaissance.

A. ANIMER ET DÉVELOPPER DURABLEMENT LE TERRITOIRE

Le développement économique ne se limite pas au soutien au développement des entreprises mais comprend également au sens large l'aménagement du territoire, le tourisme, les transports et les infrastructures qui déterminent la compétitivité et le dynamisme d'un territoire. La capacité d'initiative des collectivités territoriales doit rester forte en ce domaine car elles seules ont la connaissance de besoins de proximité et nul autre acteur ou institution ne se substituerait à elles pour les remplacer en cas de limitation de leur champ d'action.

1. Mieux structurer le développement économique

La préservation de la capacité d'action de chaque niveau de collectivité territoriale doit aller de pair, chaque fois que cela est possible, avec une mutualisation des moyens et une simplification des procédures.

Une compétence partagée et trop souvent inorganisée

La compétence « développement économique » constitue probablement le meilleur exemple des difficultés rencontrées pour organiser l'exercice des compétences entre les différentes collectivités territoriales.

L'organisation de l'intervention de chacun des acteurs apparaît, en effet, particulièrement complexe puisque la compétence économique n'a pas été attribuée par le législateur à un acteur en particulier.

Comme le regrettait devant la mission notre collègue et ancien Premier ministre Jean-Pierre Raffarin, les régions n'ont pas été dotées des moyens nécessaires pour assumer véritablement le rôle de « chef de file » évoqué par le législateur.

Dès lors, tous les niveaux d'administration locale participent au développement économique des territoires, ainsi que l'Etat qui a conservé des moyens d'intervention importants.

Si le rôle de ses administrations déconcentrées (DRIRE, DRCE, DRRT) tend à diminuer, on assiste à un repositionnement de son intervention à travers l'affirmation d'agences spécialisées comme Oséo et l'Agence française pour les investissements internationaux (AFII) et la persistance du rôle de la Caisse des dépôts et consignations (CDC).

Par ailleurs, les intercommunalités apparaissent de plus en plus comme des acteurs essentiels du développement économique, en particulier dans les zones agglomérées où elles se substituent au département, celui-ci conservant toutefois un rôle incontournable en zone rurale, le plus souvent dans le cadre de cofinancements. Enfin, au-delà de la question de la répartition de la compétence économique entre les différents niveaux se pose également celle de la multiplicité des outils d'intervention (agences de l'Etat, plateformes d'initiative locale et SEM d'aménagement) et du rôle dévolu aux chambres de commerce et d'industrie.

Au sens strict, c'est-à-dire sans tenir compte des dépenses liées à la promotion du tourisme et au soutien de l'agriculture, les dépenses en faveur du développement économique s'élevaient en 2006 à 1,97 Md € pour l'Etat, 1 Md € pour les régions, 876 millions € pour les départements, 806 millions € pour les EPCI et 426 millions € pour les communes.

Pour autant, cette complexité est aujourd'hui considérée comme inévitable compte tenu, en particulier, de la légitimité de l'intervention de chacun des acteurs. Par ailleurs, la pratique a permis de spécialiser l'intervention des uns et des autres, les régions prenant en charge les dépenses en faveur de l'innovation et de l'internationalisation des entreprises , les EPCI s'impliquant dans l'aménagement des zones d'activités et dans l'animation économique et les communes continuant à soutenir le commerce de proximité. Comme le souligne l'étude précitée : « D'une manière générale, les collectivités infrarégionales tendent à intervenir sur des services à faible valeur ajoutée, nécessitant peu de compétences techniques mais une proximité avec les entreprises, tandis que les collectivités régionales et nationales se spécialisent sur les services à forte valeur ajoutée » .

L'expérience des pôles de compétitivité constitue un exemple de l'évolution des modalités d'intervention de l'Etat, qui privilégie maintenant un rôle d'impulsion, de financement et d'évaluation du dispositif, les collectivités locales intervenant dans un rôle de soutien financier et de facilitateur de la mise en oeuvre.

Des pôles de compétitivité à l'image des territoires

Parmi les 71 pôles de compétitivité, tous n'ont pas la même importance . On observe une corrélation entre le nombre des pôles de compétitivité et la puissance des territoires. Ainsi, la Picardie n'accueille aucun siège de pôle, la Champagne-Ardenne en compte un et le Limousin deux, alors que l'Ile-de-France en accueille neuf (dont six de rang mondial) et Rhône-Alpes onze (dont trois de rang mondial). Certains pôles ont compensé leur relatif manque de puissance par des regroupements interrégionaux, à l'image de Capénergie (PACA et Guadeloupe) et MOVE'O (Ile-de-France, Haute-Normandie et Basse-Normandie).

Parmi les autres facteurs expliquant le succès d'un pôle, on retient l'antériorité de projets structurants qui ont permis de rapprocher les acteurs et d'établir des habitudes de coopération mais également la qualité de la gouvernance économique. Ainsi, on observe que la région Ile-de-France bénéficie de moins de pôles que PACA et Rhône-Alpes proportionnellement à la puissance de son territoire, ce qui peut s'expliquer par le déficit de gouvernance qui ne favorise pas l'émergence d'une coalition de partenaires. Enfin, un dernier facteur tient à la volonté d'intervention des collectivités locales qui, en se mobilisant, vont permettre d'accroître le niveau des investissements structurants.

Parmi les principaux dysfonctionnements relevés peuvent être mentionnés les défauts inhérents à la multiplicité des acteurs : l'absence de cohérence des politiques menées, la visibilité insuffisante des territoires qui ne peuvent bénéficier d'une « marque » unique et le défaut de réactivité qui décourage les investisseurs du fait des tours de table successifs nécessaires à l'élaboration de projets.

En termes d'affectation des moyens, on observe également des incohérences puisqu'une part essentielle de ceux-ci est mobilisée sur des fonctions comme l'aide à la création d'entreprise et à l'immobilier d'entreprise, alors qu'il existe un déficit de compétences et d'acteurs en ingénierie (ingénierie financière, valorisation de la propriété intellectuelle).

La diversité territoriale apparaît enfin comme un critère essentiel en matière de développement économique. Dans une grande zone métropolitaine comme Lyon par exemple, on assiste à l'émergence d'un binôme « région-intercommunalité » (région Rhône-Alpes/Grand Lyon) qui agit de manière efficace. C'est la métropole qui assure la visibilité internationale de l'ensemble à travers la marque « Grand Lyon » et des initiatives sont développées pour intégrer l'action des différents acteurs.

La situation se présentera différemment dans une agglomération de taille moyenne où l'absence de dispositifs de développement économique au niveau intercommunal et l'éloignement du département et de la région favorisent la mise en oeuvre de dispositions innovantes comme l'instruction unique des dossiers d'aide, au niveau régional, en remplacement des cofinancements.

Dans un territoire rural , enfin, l'échelon départemental apparaît indispensable pour structurer les dispositifs d'aide et assister les communes et les intercommunalités comme l'ont rappelé les déplacements organisés par votre mission dans le Tarn-et-Garonne où le conseil général intervient pour financer une zone d'activité et dans les Hautes-Pyrénées où le conseil général se mobilise pour aider au développement du tourisme en moyenne montagne et pour favoriser les transitions post-industrielles en fond de vallées 33 ( * ) .

Services publics locaux et développement des territoires ruraux

Votre mission a conduit deux déplacements 34 ( * ) dans le Tarn-et-Garonne et les Hautes-Pyrénées , les 18 et 19 mai 2009, pour examiner la question des services publics et celle du développement des territoires ruraux.

Concernant les services publics, de nombreuses inquiétudes ont été entendues concernant en particulier la présence territoriale de La Poste. Des élus ont présenté leurs initiatives afin de permettre à La Poste de maintenir son implantation territoriale notamment grâce à l'élaboration d'un schéma départemental de la présence postale à l'issue d'un dialogue conduit entre La Poste et les élus locaux. Au cours de ce déplacement, M. Gérard Larcher, Président du Sénat, qui conduisait la délégation sénatoriale, a insisté sur la nécessité de favoriser la qualité et l'adaptabilité des services publics locaux pour améliorer la compétitivité des territoires et a prôné le développement des schémas d'organisation territoriale .

Concernant le développement des territoires ruraux, les débats ont permis de mettre en évidence le rôle des élus locaux dans l'élaboration de nouveaux outils permettant de recréer un tissu économique dynamique, notamment en zones de montagne. La fonction de solidarité sociale et territoriale du conseil général a également été rappelée tandis que certains élus ont évoqué la nécessité de faire émerger une structure unique de développement économique permettant de faire travailler ensemble les différents acteurs. Par ailleurs, le maintien des « pays » a été acté lorsque ceux-ci avaient démontré leur utilité.

Au final, si le foisonnement des initiatives en matière de développement économique permet d'atteindre des résultats non négligeables, il existe cependant des marges de progression, par exemple pour mieux structurer les réseaux intervenant en faveur de la création d'entreprises et pour rationaliser les dépenses engagées en faveur de l'attractivité et du développement des filières afin de rechercher une plus grande cohérence et une économie des moyens.

a) Mieux structurer cette compétence en préservant la liberté d'initiative

Concernant l'évolution de la compétence « développement économique », les travaux de la mission ont permis d'établir qu' il serait contreproductif de remettre en cause la capacité de chaque niveau d'administration locale à agir même si un renforcement de la coordination régionale est sans nul doute souhaitable .

Comme le rappelait notre collègue Jean-Pierre Chevènement au cours du débat en séance publique 35 ( * ) , la région ne peut pas tout faire car elle n'est pas un échelon de proximité, « elle ne peut répondre aussi efficacement que le département ou les intercommunalités à la demande de développement endogène des entreprises, même si elle peut éventuellement favoriser leur croissance exogène » .

C'est pourquoi il apparaît important que les autres niveaux de collectivités puissent conserver une capacité d'action, par exemple pour créer des zones d'activités. A cet égard, votre mission rejoint le Comité pour la réforme des collectivités locales lorsqu'il préconise que « sauf délégations de compétences, la région ait le monopole de l'attribution des aides aux entreprises et de la participation aux pôles technologiques » 36 ( * ) . La région constitue, en effet, le niveau adéquat pour engager les investissements stratégiques mais les autres échelons de collectivité doivent pouvoir également intervenir, ce qui justifie d'envisager une adaptation du rôle de chacun.

Dans cette perspective, la mission a examiné trois pistes d'évolution.

(1) La création de « binômes territoriaux »

La première piste consiste à favoriser l'émergence de « binômes territoriaux ». Dans les grandes zones agglomérées, c'est le couple « région-EPCI » qui aurait vocation à structurer le développement économique tandis que dans les territoires intermédiaires et ruraux le binôme pertinent serait composé du département, d'une part, et des intercommunalités ou des communes, d'autre part, le département apportant la capacité financière en préservant la proximité avec les territoires.

Cette piste rejoint une proposition faite par le Comité pour la réforme des collectivités locales qui préconise d'exercer, au niveau de l'échelon intercommunal ou métropolitain, « la création, l'aménagement, l'entretien et la gestion des zones communales ou communautaires » 37 ( * ) . Dans chacun de ces cas, la région pourrait conserver sa position de « chef de file » , quitte à déléguer ses attributions à un niveau plus approprié en fonction de la nature des territoires.

Ce scénario apparaît surtout pertinent pour les zones métropolitaines comme le Grand Lyon qui favorise la polarisation région/métropole. Mais il ne répond qu'imparfaitement aux besoins exprimés sur le terrain en particulier dans les zones rurales où les interventions de la région, du département et des intercommunalités sont à la fois légitimes et complémentaires et nécessite donc d'être complété par d'autres approches. Votre mission n'a donc pas souhaité en rester là.

(2) La répartition des activités par échelon territorial

La deuxième piste examinée consisterait à répartir la compétence du développement économique en fonction de chacune de ses composantes. Le commerce et l'artisanat reviendrait aux communes. La promotion et l'attractivité du territoire, l'immobilier d'entreprise, l'aménagement et la gestion des ZAE et l'animation économique seraient attribués aux EPCI ou aux départements selon les cas. Les régions recevraient pour mission de s'occuper de l'innovation, de l'internationalisation et de l'ingénierie financière, de l'appui à la création d'entreprise et du développement des filières. Ce scénario n'exclut pas les coopérations entre collectivités et la coproduction de services.

Cette piste est utile en ce qu'elle met en évidence la nécessité de mieux coordonner l'action des différents niveaux de collectivités et donc de renforcer l'effort de planification stratégique régionale et sa déclinaison départementale afin de donner toute sa portée au contrat de plan Etat-région par exemple sans négliger les initiatives locales comme c'est trop souvent le cas. Votre mission estime nécessaire de s'inspirer également de ce scénario dans ses propositions.

(3) La délégation de compétences à des agences de moyens territorialisées

La dernière piste reviendrait à constituer des agences de moyens territorialisées afin d'organiser un maillage homogène du territoire, par exemple au niveau du bassin d'emploi, d'associer tous les partenaires publics et privés et de mutualiser les moyens.

Ce scénario pourrait être particulièrement pertinent pour organiser la compétence « développement économique » dans les zones métropolitaines mais aussi au niveau régional pour permettre de donner du contenu au « chef de filat » de la région sans remettre en cause la capacité d'action des autres niveaux de collectivités. Il est également utile pour promouvoir le développement de « guichets uniques » pour instruire les demandes d'aides aux entreprises et assurer le suivi de leur développement. Votre mission réaffirme ainsi sa position exprimée dans son rapport d'étape 38 ( * ) en faveur de la reconnaissance d'un « chef de filat » pour les compétences partagées entre plusieurs niveaux et du développement des « guichets uniques ».

*

Votre mission estime qu'aucun de ces scénarios ne suffit à lui seul à permettre la réorganisation de cette compétence mais que leur association est de nature à répondre à la diversité des situations et à la nécessité d'accroître la lisibilité et l'efficacité sans remettre en cause la liberté d'initiative des collectivités territoriales en matière de développement économique. Cette réorganisation de la compétence économique des collectivités territoriales aurait vocation à s'inscrire pleinement dans le cadre de l'action des conseils régionaux des exécutifs qui veilleraient à la mise en oeuvre des outils de planification et au fonctionnement harmonieux des agences de moyens.

En particulier, il avait paru, à vos rapporteurs, opportun de mettre en place au niveau régional une agence de développement économique rassemblant tous les acteurs, afin de leur fournir un lieu de débat, propice au travail en commun.

Au cours de l'examen des conclusions du rapport, votre mission a tenu compte des préventions exprimées par notre collègue Bruno Retailleau à l'encontre du mot « agence » qui renvoie à l'idée d'une structure. En s'appuyant sur les expériences vécues en Bourgogne, en Saône-et-Loire, en Haute-Saône et en Loir-et-Cher, la mission a considéré qu'il serait opportun de n'avoir à terme qu'une seule agence de développement par département et une structure de coordination partenariale au niveau de la région .

Propositions de la mission

- Renforcer le « chef de filat » de la région en matière de développement économique et, dans cette perspective, créer par la loi dans chaque région une structure de coordination partenariale rassemblant tous les acteurs et notamment toutes les agences de développement économique locales.

- Créer un portail unique au niveau régional en faveur des aides à la création et au développement des entreprises qui rassemblerait tous les intervenants.

- Créer une agence de développement économique unique propre à chacune des métropoles 39 ( * ) créées par la loi, qui rassemblerait tous les acteurs locaux et travaillerait en lien étroit avec l'agence régionale.

- Spécialiser davantage le rôle de chacun des niveaux : les communes et intercommunalités se répartissant les compétences relatives à la promotion et l'accueil des entreprises et au commerce de proximité, les départements se chargeant de l'aménagement, de l'attractivité et de l'animation économiques, et les régions de l'innovation, de l'internationalisation et de l'ingénierie financière.

2. Soutenir la dynamique d'aménagement du territoire

Si le rôle des collectivités territoriales est incontournable en matière d'aménagement du territoire, il doit s'accompagner du maintien de l'ingénierie des services de l'Etat et de celle des départements au profit des collectivités rurales, ainsi que d'une forte présence des services publics.

Des outils de programmation incomplets et insuffisants

La compétence « aménagement du territoire » recouvre plusieurs types d'actions. La programmation et la planification relèvent ainsi de la région, qui a compétence pour réaliser le schéma régional d'aménagement et de développement du territoire 40 ( * ) (SRADT) et pour négocier le contrat de projet Etat/Région 41 ( * ) (CPER) permettant de le mettre en oeuvre. Ensuite, la réalisation de la politique d'aménagement du territoire se traduit par l'établissement de règles d'urbanisme adaptées, la nécessité de gérer le foncier de manière prévisionnelle et l'attribution de la maîtrise d'ouvrage des investissements. Par ailleurs, il convient de mentionner les contrats de massifs et « les plans fleuve », qui permettent de gérer de manière coopérative des espaces spécifiques.

L'examen de la mise en oeuvre de la compétence « aménagement du territoire » laisse apparaître des incohérences dans les initiatives des différents niveaux de collectivités. Si les CPER permettent d'assurer la coordination des actions de l'Etat et des régions, il semble que la déclinaison au niveau infrarégional des objectifs fixés au niveau régional peut entrer en concurrence avec les schémas développés par les départements pour assurer la cohérence territoriale. Quant au financement des investissements, il repose sur des cofinancements qui sont programmés dans le CPER mais également sur des fonds européens qui, sauf exception, sont alloués par l'Etat. On peut rappeler à cet égard que l'Etat a confié à la région Alsace les fonctions d'autorité de gestion et d'autorité de paiement du programme de l'objectif 2 pour la période 2005-2006 et que la généralisation de ce transfert est envisagée pour accroître les enseignements de l'expérimentation, la priorité étant donnée, dès lors, à l'innovation et aux questions environnementales.

Si ces modalités de financement ne permettent pas toujours de favoriser une grande lisibilité et s'opèrent au travers de processus de décision longs et complexes, elles présentent néanmoins l'avantage de permettre le bouclage des plans de financement et, ce faisant, la réalisation des projets.

Enfin, les travaux de votre mission ont permis de mettre en évidence le fait que l'initiative des collectivités territoriales était indispensable au maintien et au développement des équipements sur le territoire à l'image de l'Observatoire du Pic du midi dont la réouverture a été permise par l'engagement de l'ensemble des collectivités territoriales grâce au développement d'un projet associant objectifs scientifiques et activités touristiques 42 ( * ) à travers la création d'un syndicat mixte.

La clarification du rôle des acteurs en matière d'aménagement du territoire

Comme pour le développement économique, votre mission a estimé qu'il était nécessaire de mieux structurer les outils et les politiques en faveur de l'aménagement du territoire sans pour autant porter atteinte à la mission et aux moyens des différents échelons de collectivités territoriales.

(1) Une clarification des rôles de chaque échelon territorial à « cadre constant »

Une première clarification opérée à « cadre constant » pourrait consister à assurer une meilleure coordination entre le schéma régional d'aménagement du territoire et ses déclinaisons départementales pour rechercher la complémentarité entre les actions du CPER et celles des départements. Dans cette perspective, la création de plans région-département obligatoires pourrait être envisagée 43 ( * ) . Leur réalisation serait coordonnée par les conseils régionaux des exécutifs. De même, votre mission préconise la création de schémas régionaux spécifiques en matière de couverture numérique, ainsi que le maintien de la mise à disposition des intercommunalités et des départements d'une ingénierie publique au niveau des préfectures et des cours régionales des comptes. Au cours du débat, lors de l'adoption des conclusions du présent rapport, vos rapporteurs ont précisé que l'aide du département n'était pas exclusive de l'action que pouvaient exercer les intercommunalités qui en avaient la capacité.

Par ailleurs, compte tenu des résultats satisfaisants obtenus dans le cadre de l'expérimentation de la gestion des fonds européens au niveau régional (augmentation des taux de consommation des crédits, simplification des procédures d'instruction), il pourrait être proposé de généraliser le transfert de cette gestion aux régions , comme votre mission l'a déjà préconisé dans son rapport d'étape.

(2) L'accroissement des compétences des EPCI à fiscalité propre

Une seconde piste pourrait consister à favoriser l'intégration des Syndicats intercommunaux à vocation unique (SIVU) et des Syndicats intercommunaux à vocations multiples (SIVOM) dans les structures intercommunales à fiscalité propre afin de mieux identifier leur rôle auprès de la population, de renforcer la capacité d'expertise et de négociation et de réduire les dépenses de structure qui, même si elles sont souvent limitées, ne sont pas pour autant négligeables.

Dans cette perspective, il pourrait par exemple être proposé de modifier l'article L. 5216-5 du code général des collectivités territoriales (CGCT) relatif aux compétences des communautés d'agglomération pour augmenter le nombre des compétences à choisir de manière obligatoire sur une liste prédéterminée qui serait elle-même élargie à plus de six thématiques. La même évolution pourrait être engagée dans la même logique pour les communautés de communes, dont les compétences sont déterminées par l'article L. 5214-16 du CGCT.

Si les syndicats mixtes ont joué un rôle essentiel dans l'aménagement du territoire, les progrès de l'intercommunalité à fiscalité propre justifient aujourd'hui une réappropriation de ces compétences par les « nouvelles communautés » 44 ( * ) . C'est pourquoi votre mission préconise une intégration progressive des SIVU et des SIVOM au sein des EPCI à fiscalité propre ou, selon les cas, une gestion des syndicats par les EPCI lorsque le territoire d'action de ceux-ci recouvre le périmètre de plusieurs communautés.

Propositions de la mission

- Rendre obligatoire l'élaboration d'un plan région/département qui aurait pour objet de décliner les objectifs du CPER et d'intégrer les principaux projets des autres niveaux de collectivité. La mise en oeuvre de ce plan serait coordonnée par le conseil régional des exécutifs.

- Généraliser le transfert aux régions de la gestion des fonds européens.

- Adopter des schémas régionaux spécifiques en matière de couverture numérique : téléphonie, haut et très haut débit, télévision numérique terrestre.

- Maintenir à disposition des intercommunalités et des départements une ingénierie publique au niveau des préfectures et des chambres régionales des comptes.

- Confirmer la vocation des départements de mettre à disposition des territoires infradépartementaux les outils de conseils juridiques et techniques nécessaires.

3. Des transports en quête d'intermodalité

Les transports constituent par essence une compétence transversale qui doit être mieux coordonnée, notamment au niveau régional, afin de renforcer l'intermodalité.

Des redondances et des incohérences entre les différents réseaux de transports

L'examen de la compétence « transports » met en évidence la prédominance en nombre de voyageurs de la fonction « transports urbains » à la charge des communes par rapport au transport interurbain et au transport scolaire, qui relèvent des conseils généraux, ou au transport ferroviaire, qui incombe aux régions. En la matière, le principe est bien celui de l'intervention de chaque niveau de collectivité dans son domaine de compétence trop souvent sans recherche de gestion en commun à travers, par exemple, la création de syndicats mixtes.

De plus, les conditions applicables à la gestion de la compétence transport diffèrent sensiblement selon le type de transport. Les transports urbains sont ainsi les seuls à bénéficier d'une ressource fiscale spécifique avec le versement transport , ce qui a pour effet de défavoriser les territoires les plus enclavés où le rendement de l'impôt est le plus faible. Par ailleurs, alors que le transport ferré fait aujourd'hui l'objet d'un monopole de la SNCF, les partenariats avec le secteur privé sont répandus pour exploiter les transports urbains et interurbains.

En fait, trois types d'insuffisances apparaissent dans l'organisation des transports. Il s'agit tout d'abord de redondances dans les compétences confiées à chaque niveau de collectivité , qui les amènent à devoir toutes mobiliser des moyens et des capacités d'expertise équivalentes. Il s'agit ensuite du manque de coordination entre les différentes autorités organisatrices , qui se traduit par des difficultés résultant de l'absence d'interopérabilité et d'inter-mobilité entre les différents réseaux 45 ( * ) . Ces caractéristiques se traduisent au final par l'incapacité de l'usager à s'y retrouver quant à l'organisation de son déplacement dans le territoire . Il n'est ainsi pas rare qu'un usager qui souhaite se rendre dans une ville située hors de son agglomération doive parfois acheter trois titres de transport : le titre de transport de l'aire urbaine dans laquelle il habite, le titre TER/LER ou de transport départemental interurbain et, enfin, le titre de transport de l'aire urbaine dans laquelle il se rend.

Votre mission a estimé qu'il ne pouvait y avoir de priorité accordée au transport collectif sans que des progrès soient réalisés de manière concomitante en matière d'unification de la tarification et donc de rapprochement des autorités organisatrices de transport .

a) Une évolution nécessaire en faveur de l'intermodalité et d'une plus grande cohérence

Concernant l'évolution de la compétence « transport », la mission d'information de l'Assemblée nationale sur l'organisation territoriale française a estimé pour sa part que « dès lors que les régions se voient reconnaître une compétence globale en matière d'enseignement secondaire, il serait plus cohérent de leur attribuer la compétence relative aux transports scolaire et, plus généralement, l'organisation des transports terrestres qu'il s'agisse des transports routiers ou des transports ferroviaires » 46 ( * ) .

La mission présidée par M. Jean-Luc Warsmann a considéré également que « l'attribution exclusive à la région de cette compétence spécifique permettra d'éviter les chevauchements et concertations inutiles entre différents échelons d'administration territoriale » 47 ( * ) . Sans remettre en cause le STIF, eu égard aux spécificités de la région parisienne, elle a jugé enfin que « concernant les transports collectifs, la multiplicité des autorités organisatrices des transports est à l'origine d'incohérences ou d'un manque de coordination entre les différents services de transport collectif offerts à la population » .

Ce scénario aurait pour avantage de favoriser une meilleure coordination des intervenants et une harmonisation des services rendus. Dans une logique de proximité, la région pourrait déléguer la compétence « transport urbain » aux EPCI , tout en conservant la responsabilité d'une coordination globale permettant de rechercher une harmonisation tarifaire, la coordination des réseaux, une meilleure péréquation financière et la lisibilité pour l'usager.

Mais un tel scénario présente également des difficultés liées à la complexité des transferts de compétences et de responsabilités, ce qui ne lui permet pas d'apparaître vraiment préférable à la situation présente. De plus, on peut observer que le principe même d'un transfert de la totalité de la compétence « transport » à la région n'a pas convaincu tous les membres de la mission , à l'image de M. Edmond Hervé qui a considéré qu'une seule catégorie de collectivité ne pouvait pas avoir le monopole de la compétence « transport » 48 ( * ) . Malgré ses avantages en termes de clarification, votre mission n'a donc pas retenu ce scénario, qui ne lui semble pas de nature à répondre efficacement aux besoins de proximité .

Votre mission a estimé qu'il existait des scénarios alternatifs au transfert de la compétence « transport » à un seul échelon qui méritaient d'être pris en considération. Elle a ainsi examiné trois scénarios.

(1) Le transfert aux régions du transport interurbain

Ce scénario vise, sans bousculer véritablement le système actuel, à le rendre plus lisible dans son organisation et plus efficace dans sa gouvernance en transférant aux régions la seule responsabilité du transport public interurbain 49 ( * ) . Le territoire se retrouverait ainsi structuré autour de deux types d'autorités organisatrices, les autorités organisatrices locales ou urbaines et les autorités organisatrices régionales pour le transport ferré et le transport routier. Dans ce scénario, les départements continueraient à intervenir au niveau du transport scolaire tout en ayant la possibilité de déléguer cette compétence à l'intercommunalité. On peut attendre d'une telle organisation davantage de lisibilité et des progrès en termes de tarification. Toutefois, les problèmes de coordination entre le niveau régional et les autorités organisatrices urbaines ne seraient pas résolus.

Auditionné par votre mission, M. Claudy Lebreton, président de l'ADF a estimé que les départements pourraient utilement abandonner la compétence du transport interurbain aux régions afin de promouvoir l'intermodalité et éviter la concurrence entre les différents modes de transport 50 ( * ) .

(2) La création nécessaire d'une structure régionale de coordination

Pour répondre pleinement au problème de la coordination entre les différents niveaux, un deuxième scénario pourrait consister à créer un syndicat qui deviendrait l'autorité organisatrice unique . Les anciennes autorités organisatrices deviendraient membres du conseil d'administration de ce syndicat et participeraient ainsi à la détermination de sa politique. Outre les avantages du précédent scénario, la création d'un syndicat permettrait de renforcer la péréquation à travers un partage du versement transport . Le pouvoir de négociation vis-à-vis des sociétés privées de transport serait également accru. Le principal inconvénient de ce scénario tiendrait à la complexité de sa mise en oeuvre, notamment au regard de la gestion des flux financiers entre les différents intervenants.

Votre mission est néanmoins favorable au développement d'autorités organisatrices « partagées » et non hiérarchisées qui permettraient aux différentes collectivités territoriales d'adopter des solutions uniques en termes de billettique et de transport. Auditionné par votre mission, M. Jacques Pélissard s'est déclaré 51 ( * ) tout à fait ouvert à ce que des syndicats mixtes exerçant cette compétence soient ainsi mis en place au sein d'un même bassin de population.

Votre mission estime, pour sa part, que c'est au niveau régional, en lien avec le conseil régional des exécutifs, qu'il conviendrait de favoriser l'émergence de ces nouvelles autorités organisatrices, en particulier lorsque la région comprend une métropole qui étend son influence sur tout le territoire régional.

(3) La généralisation indispensable du versement transport

Si la qualité des transports urbains est généralement considérée favorablement dans notre pays, elle le doit principalement au versement transport acquitté par les entreprises en fonction de la masse salariale pour financer les transports urbains collectifs.

En Ile-de-France, l'article L. 2531-2 du code général des collectivités territoriales prévoit que le versement transport est dû sur l'ensemble du territoire régional par les employeurs comptant plus de neuf salariés. Sur le reste du territoire national, l'article L. 2333-64 prévoit que ce versement est dû dans les communes ou communautés urbaines de plus de 10 000 salariés ainsi que dans les autres EPCI de la même taille disposant de la compétence transports urbains. Le taux du versement, voté par le conseil municipal ou communautaire, est calculé en pourcentage des salaires et plafonné par la loi 52 ( * ) .

Une des questions qui se pose aujourd'hui concerne la limitation territoriale du versement transport dans les territoires, ce qui restreint le produit de cette ressource et crée ainsi des inégalités selon que l'entreprise est ou non assujettie, en particulier lorsqu'elle se situe à la frontière de la zone d'assujettissement et peut ainsi bénéficier du système de transports collectifs sans en supporter le coût.

Étendre le versement transport

En décembre 2003, M. Christian Philip, député du Rhône, a rendu un rapport à Jean-Pierre Raffarin, Premier ministre sur « Le financement des déplacement urbains » dans lequel il se prononçait pour une évolution du versement transport (cf. p. 29 du rapport).

Observant « qu'aujourd'hui les points de congestion les plus difficiles se rencontrent à la périphérie de nos agglomérations, sachant aussi qu'il faudra développer toutes les formes possibles d'intermodalité et qu'il faudra principalement faire porter les efforts budgétaires sur ces questions au cours des prochaines années » M. Christian Philip considère qu'il n'est pas inutile de « s'interroger sur l'assiette géographique du versement transport » . Il pose ensuite une série de questions qui ont conservé toute leur pertinence : « en dehors de la région Ile-de-France où le versement transport s'applique sur tout le territoire régional, est-il normal que les entreprises situées dans l'aire urbaine, mais hors du PTU, périmètre à l'intérieur duquel les employeurs paient le versement transport au taux plein, soient totalement exonérés de cette imposition ? Peut-on maintenir le système actuel porteur d'effets frontières et source d'étalement urbain ? Ne faudrait-il pas prévoir un versement transport à taux réduit au-delà du PTU ? Un taux de l'ordre de 50% de celui appliqué dans la zone centrale ne pourrait-il pas être envisagé ? Sur quel territoire ce versement à taux réduit pourrait-il être prélevé : la région, le département, l'aire urbaine, l'aire du schéma de cohérence territorial (SCOT), les communes limitrophes au périmètre de transport urbain... ? » .

Afin de desserrer la contrainte financière que rencontrent notamment les régions pour financer les transports, notre collègue Hubert Haenel a proposé dans son rapport 53 ( * ) au premier ministre de généraliser par la loi le versement transport 54 ( * ) aux grands bassins d'emplois desservis par des liaisons nouvellement mises en service. Auditionné par votre mission, M. Jean-Jack Queyranne, intervenant au nom de l'ARF, a proposé 55 ( * ) que le versement transport soit unifié sur un bassin de déplacement qui corresponde à un bassin d'emploi. Par ailleurs, notre collègue Claude Bérit-Débat a rappelé que des propositions d'extension du versement transport avaient déjà été faites 56 ( * ) , jusqu'ici sans succès, afin notamment de reconnaître les efforts des collectivités territoriales engagées dans le développement des transports en commun.

Pour sa part votre mission estime que le versement transport devrait être étendu au périmètre des nouvelles autorités organisatrices « partenariales » dont elle propose la création au niveau régional sur le modèle du STIF qui se verraient dès lors reconnaître la compétence pour fixer le taux du versement transport, celui-ci variant selon la densité et les caractéristiques économiques propres des territoires composant la région.

Propositions de la mission

- Créer par la loi des structures régionales de coordination sous la forme d'autorités organisatrices de transport « partenariales » et non hiérarchisées associant les différents intervenants afin de favoriser l'intermodalité, la lisibilité et la péréquation.

- Transférer la totalité de la compétence transport interurbain à la région afin notamment d'éviter la concurrence entre différents modes de transport collectif.

- Généraliser le versement transport au bénéfice des nouvelles autorités organisatrices de transport « partenariales » régionales auxquelles il reviendrait d'assurer sa modulation pour chaque territoire desservi en tenant compte du service rendu et en encourageant l'adoption de PDU dans les agglomérations.

4. Des infrastructures à la recherche de nouveaux moyens

Le désengagement de l'Etat se traduisant par une multiplication des sollicitations adressées aux collectivités territoriales pour financer les grands projets d'infrastructures pose la question du rôle de l'Etat, notamment pour préserver la compétitivité du territoire. Il importe aussi de faire appel à de nouvelles ressources pour financer les grandes infrastructures.

Des collectivités territoriales de plus en plus sollicitées

Les investissements dans les infrastructures concernent essentiellement les routes et le ferroviaire et appellent une intervention importante des collectivités territoriales. Si le rôle de chacun des acteurs apparaît clairement identifié, cela ne signifie pas pour autant que certaines collectivités ne rencontrent pas des difficultés. C'est le cas, par exemple, des communes ou des EPCI de petite taille qui ne disposent pas nécessairement des moyens techniques leur permettant de conduire les études relatives aux infrastructures routières. Par ailleurs, la compétence de chaque niveau de collectivité en matière routière rend plus difficile la recherche d'économies d'échelle et accroît les redondances dans les fonctions d'expertise. Ceci dit, il convient d'observer également que les collectivités territoriales exercent avec efficacité cette compétence et qu'on n'observe pas de défaillances, que ce soit en termes de construction ou d'entretien.

Pour sa part, le Comité pour la réforme des collectivités locales a estimé « qu'il y avait quelque logique à ce que la région, compétente en matière de transports ferroviaires, assure également la gestion des routes » . Toutefois, compte-tenu des importants transferts opérés par la loi du 13 août 2004 en faveur des départements, il ne lui a pas semblé « qu'il y aurait avantage à revenir sur cette attribution de compétence » 57 ( * ) .

La principale difficulté concerne, en fait, le financement des infrastructures car les collectivités territoriales sont de plus en plus sollicitées pour participer à celui des infrastructures de l'Etat . Un quart du montant de crédits nécessaires à la construction de la LGV Est a ainsi été pris en charge par les collectivités locales. On observe par ailleurs un manque de cohérence entre les recettes générées par les infrastructures (TIPP en particulier), qui bénéficient largement à l'Etat, et les dépenses qui sont quant à elles très majoritairement prises en charge par les collectivités locales.

Compte-tenu de cette situation, plusieurs pistes d'évolution sont envisageables afin d'augmenter les ressources des collectivités locales et de clarifier les conditions de leur participation au financement des infrastructures relevant de l'Etat. Le Sénat a déjà eu l'occasion de faire des propositions à ce sujet à travers l'excellent rapport de notre commission des Affaires économiques sur les infrastructures de transport 58 ( * ) . Votre mission temporaire a souhaité, à cet égard, rappeler l'intérêt et l'actualité de ces propositions, dont la mise en oeuvre est pour certaines déjà engagée.

Les pistes de clarification du rôle des collectivités territoriales en matière d'infrastructures

(1) La nécessité de limiter les sollicitations locales pour financer les projets nationaux

Aujourd'hui, il n'est pas un projet d'infrastructure d'envergure nationale engagé par l'Etat qui ne fasse l'objet d'un appel à contribution « volontaire » auprès des collectivités territoriales. C'est en particulier le cas du financement des lignes à grandes vitesse (LGV).

L'exemple du financement du TGV Est est, à cet égard, particulièrement significatif puisque le montant des crédits accordés par les collectivités territoriales s'est élevé à 736,3 millions d'euros sur un coût total estimé à l'origine à 3.125 millions d'euros, l'Etat contribuant à hauteur de 1.219,6 millions d'euros 59 ( * ) . Ce ne sont pas moins de 17 collectivités territoriales françaises (voir tableau ci-dessous) qui ont ainsi été sollicitées alors même que le financement de ce type d'infrastructures ne relève pas de leur compétence.

Le coût et le financement du projet (M€) de la LGV Est

Ile-de-France

76,2

Champagne-Ardenne

124,2

Région Champagne-Ardenne

42,1

Ville de Reims

45 ,7

District de Reims

4,0

Conseil Général des Ardennes

7,6

Conseil Général de la Marne

24,8

Lorraine

253,8

Région Lorraine

203,1

Conseil Général de la Meuse

4,1

Conseil Général de la Meurthe-et-Moselle

15,7

Conseil Général de la Moselle

22,4

Conseil Général des Vosges

8,5

Alsace

282,0

Région Alsace

141,0

Conseil Général du Bas-Rhin

70,6

Communauté Urbaine de Strasbourg

35,4

Conseil Général du Haut-Rhin

24,4

Ville de Colmar

3,7

Ville de Mulhouse

7,0

Total collectivités territoriales

736,3

Source : SNCF (estimations initiales)

Certains élus locaux sont inquiets devant l'idée d'interdire les cofinancements d'infrastructures nationales au motif que l'Etat leur ferait comprendre qu'elles risqueraient ainsi d'être tenues à l'écart de ces équipements, ce qui explique sans doute le haut niveau de mobilisation de la ville de Reims pour financer la LGV Est.

Pour autant, le temps est venu de réaffirmer la nécessité pour l'Etat d'assumer pleinement sa mission concernant les investissements d'intérêt national . Si votre mission n'a pas souhaité préconiser une interdiction générale des cofinancements par les collectivités territoriales des infrastructures nationales, il ne lui a pas échappé qu'il existait une grande inégalité de traitement, en particulier en ce qui concerne les lignes à grande vitesse, les grandes métropoles n'ayant pas été sollicitées pour financer les LGV de première génération. Cette situation lui a semblé suffisamment inéquitable pour justifier que l'Etat renonce de lui-même à mettre à contribution les collectivités territoriales pour des investissements qui relèvent de ses seules compétences et qui doivent être répartis de manière harmonieuse sur le territoire national.

(2) Le renforcement du rôle de l'échelon départemental en matière d'infrastructures routières

Le partage d'une compétence a souvent pour effet la redondance des services, des expertises mobilisées et, par conséquent, des coûts. Il en est ainsi en particulier des infrastructures routières et de la voirie qui relèvent à la fois des communes, des intercommunalités et des départements.

Mais le rôle des départements qui vont recevoir prochainement les parcs de l'équipement apparaît comme majeur et doit donc être préservé et même renforcé. On peut envisager jusqu'à la constitution de syndicats mixtes au niveau départemental qui s'occuperaient des routes pour le compte des collectivités territoriales.

(3) La diversification des ressources des collectivités territoriales pour financer les infrastructures

Compte tenu du fait que le financement par les collectivités territoriales des infrastructures d'intérêt local est inéluctable et qu'il apparaît aujourd'hui qu'elles ne disposent pas des moyens suffisants pour s'en acquitter, il est apparu justifié à votre mission de prendre position sur les différentes pistes envisagées dans le débat actuel pour accroître les ressources des collectivités territoriales destinées à les financer.

(a) La création d'une redevance kilométrique pour les poids lourds

La redevance d'usage pour les poids lourds constitue une mesure phare du Grenelle de l'environnement. Dans le rapport précité, la mission sénatoriale sur les infrastructures de transport plaidait pour « une application de la redevance sur la totalité du réseau routier structurant ainsi que sur le réseau autoroutier » et soulignait son attachement à deux principes :

- « il reviendra au Conseil général de décider de soumettre l'utilisation du réseau départemental à la redevance d'usage » ;

- « le produit de la redevance perçu sur ce réseau départemental devra être reversé aux départements, ces derniers constituant désormais des contributeurs de tout premier plan au financement des infrastructures routières » 60 ( * ) .

L'article 153 loi de finances pour 2009 a acté le principe de l'application de cette taxe en Alsace avant le 31 décembre 2010 et à l'ensemble de l'Hexagone au plus tard le 31 décembre 2011. Cet article prévoit également :

- que les assemblées délibérantes des collectivités territoriales sont amenées à se prononcer pour avis sur les routes et autoroutes (non soumises à péage) de leur ressort ;

- que le produit de la taxe correspondant aux sommes perçues pour l'usage du réseau routier national soit affecté à l'Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF) et que l'Etat rétrocède aux collectivités territoriales le produit de la taxe correspondant aux sommes perçues pour l'usage du réseau routier dont elles sont propriétaires.

Votre mission considère que la redevance sur les poids lourds constitue une ressource financière de nature à permettre aux collectivités territoriales de pouvoir assumer les investissements qui leur incombent de droit ou de fait. Elle souhaite ainsi que le système qui sera mis en oeuvre en Alsace soit généralisé pour que les collectivités territoriales puissent soumettre à la taxe tous les axes de transports routiers de leur compétence qui concentrent le trafic international, national et interrégional.

(b) La décentralisation du produit des amendes de circulation routière

Le produit des amendes de police relatives à la circulation routière est actuellement réparti entre les collectivités locales, à hauteur de 680 millions en 2008 au titre des amendes forfaitaires, et l'Etat, qui a reçu 950 millions € en 2008 au titre des amendes forfaitaires majorées. Par ailleurs, il est à noter que l'AFITF perçoit également une part du produit des amendes forfaitaires issues du système de contrôle automatisé, qui s'élevait en 2008 à 226 millions €.

Alors que la mission sénatoriale sur les infrastructures de transport proposait d'affecter à l'AFITF une part du produit des amendes forfaitaires majorées qui bénéficie à l'Etat, votre mission préconise d'aller plus loin et de répartir le produit de ces amendes forfaitaires majorées entre l'AFITF et les collectivités territoriales , afin de tenir compte du fait que ces dernières sont de plus en plus sollicitées par l'Etat pour financer des infrastructures dont elles n'ont pas la responsabilité.

(c) La modulation des péages ferroviaires

La mission sénatoriale sur les infrastructures a considéré 61 ( * ) que la modulation des péages ferroviaires était indispensable pour à la fois optimiser les flux, augmenter les tarifs lorsque cela était possible et favoriser les comportements vertueux. Toutefois, compte-tenu de son sujet d'étude, la mission s'est plus intéressée aux moyens de renflouer RFF qu'à la problématique relative aux investissements financés par les régions.

Ce dernier sujet a, en revanche, été largement abordé par notre collègue Hubert Haenel dans un rapport au Premier ministre 62 ( * ) qui comprend de nombreuses propositions concernant tant l'organisation des transports ferroviaires que le financement des infrastructures ferroviaires. Considérant que le déficit d'exploitation du service ferroviaire régional semble « s'auto-entretenir » et que les contrats de projet pour 2007-2013 prévoyaient un doublement des dépenses régionales inscrites en faveur de l'infrastructure ferroviaire, le président Haenel a considéré qu'il n'était « pas acceptable que les efforts des collectivités puissent servir d'éventuel prétexte à un désengagement (de l'Etat) », préférant envisager la possibilité d'une « évolution progressive vers une forme de cogestion du réseau entre les régions, leur principale utilisatrice et RFF » .

Afin de desserrer la contrainte financière que connaissent les régions, notre collègue Hubert Haenel a proposé que RFF accorde des péages à tarif préférentiel pour les trains régionaux qui circulent sur des voies qui ont fait l'objet d'investissements financés en tout ou partie par les régions . Il est, en effet, difficilement compréhensible que les régions financent des trains et des voies de chemins de fer et doivent, en plus, s'acquitter des péages au prix fort pour faire circuler les premiers sur les secondes.

(d) La taxation des plus-values foncières liées aux infrastructures de transport

La création d'une infrastructure de transport a souvent pour effet d'accroître le prix des terrains constructibles à proximité ou des immeubles déjà construits. Afin de pouvoir capter une partie de cette rente, la loi portant engagement national pour le logement a institué en 2006 une taxe forfaitaire sur les terrains rendus constructibles que la mission sénatoriale sur les infrastructures de transports a proposé de réformer pour permettre aux collectivités territoriales de financer des projets importants d'infrastructure.

Dans cette perspective, le Sénat a adopté, le 30 janvier 2009, un amendement de notre collègue Thierry Repentin cosigné par plusieurs de nos collègues 63 ( * ) au projet de loi relatif au Grenelle de l'environnement lors de sa première lecture, qui prévoit que « l'Etat étudiera la possibilité que les collectivités territoriales et les autorités organisatrices de transports urbains instituent une taxe sur la valorisation des terrains nus et des immeubles bâtis résultant d'un projet de réalisation d'infrastructures de transports collectifs » .

Votre mission temporaire s'associe pleinement à cette démarche et souhaite que des avancées rapides puissent être réalisées afin de permettre aux collectivités territoriales de bénéficier de ce mécanisme de taxation des plus-values foncières pour financer leurs programmes d'investissement dans les infrastructures de transport.

(e) Instauration d'un livret d'épargne populaire dédié aux infrastructures.

Votre mission propose de créer, sur le modèle des livrets d'épargne consacrés au financement du logement social et du livret de développement durable, un livret d'épargne populaire dédié au financement des infrastructures. Cette nouvelle modalité d'épargne aidée serait de nature à associer les Français aux investissements permettant de préparer l'avenir tout en encourageant une épargne populaire sans risque.

Propositions de la mission

- Rappeler à l'Etat ses engagements, sa mission qui est de financer seul les infrastructures d'intérêt national (LGV, autoroutes, routes nationales...).

- Développer, au bénéfice des collectivités territoriales, des ressources financières issues des infrastructures pour leur permettre de contribuer au financement des infrastructures de transport d'intérêt local (généralisation de la taxe sur les poids lourds, transfert à l'AFITF et aux collectivités territoriales de la part de l'Etat dans le produit des amendes pour infraction au code de la route, mise en place d'une taxation des plus-values foncières, mise en place d'une modulation des péages ferroviaires pour les TER).

- Instaurer un livret d'épargne populaire de financement des infrastructures de transport ouvrant la voie à des prêts bonifiés permettant le financement des grandes infrastructures par les collectivités.

5. Préserver le rôle d'acteurs du développement touristique des collectivités territoriales

Les collectivités territoriales sont des acteurs majeurs du développement touristiques d'autant plus qu'elles peuvent exercer des fonctions d'opérateurs ce qui plaide pour une planification renforcée des investissements et une mutualisation des moyens.

Une compétence tourisme partagée entre les niveaux de collectivités

Comme la expliqué notre collègue Jean-Pierre Vial lors des travaux de la mission 64 ( * ) , la dimension « tourisme » fait partie intégrante du développement économique au sens large , compte-tenu du fait qu'elle participe notamment à l'attractivité du territoire et présente un caractère « industriel » à travers les activités d'hôtellerie et de restauration. Cependant, le tourisme participe également à la dynamique d'aménagement d'un territoire en raison des besoins qu'il suscite en dessertes routière, ferroviaire et aérienne, ainsi qu'au développement de la politique culturelle à travers les musées, les festivals et la valorisation du patrimoine.

La transversalité de la compétence « tourisme » comme la diversité des actions nécessaires à son développement (création d'équipements à vocation touristique par exemple) expliquent qu'elle soit aujourd'hui exercée par chacun des échelons territoriaux, ce qui est souvent à l'origine d'initiatives peu coordonnées - à l'image de la promotion des châteaux de la Loire qui est réalisée par chaque niveau de collectivités sans coordination - ou, au contraire, de processus décisionnels particulièrement longs et peu lisibles.

L'analyse de l'exercice de cette compétence par les différents niveaux de collectivité met en évidence l'importance de la surface financière pour conduire des projets d'équipement ainsi que le rôle clé des départements tant pour initier que pour mettre en oeuvre les projets. Comme l'a souligné le président Claude Belot lors des travaux de la mission, il convient en effet de garder à l'esprit qu' en matière de tourisme les collectivités locales allaient plus loin que ce n'était le cas pour le développement économique car il leur arrivait de créer et de gérer elles-mêmes des infrastructures .

Si des améliorations sont à apporter à l'exercice de cette compétence, elles devraient d'abord concerner la « commercialisation » des offres touristiques qui est aujourd'hui réalisée par les nombreux comités régionaux, comités départementaux, maisons des régions, maisons des départements et autres offices de tourisme. La gouvernance des offices de tourisme concentre aujourd'hui toutes les attentions du fait, en particulier, de leur autonomisation croissante par rapport aux collectivités territoriales.

Un autre aspect qui fait débat concerne la multiplicité des outils de planification créés par la loi. L'article L. 131-7 du code du tourisme prévoit ainsi la réalisation d'un « schéma régional de développement du tourisme et des loisirs » établi après de nombreuses consultations tandis que l'article L. 132-1 reconnaît au conseil général la possibilité d'établir un « schéma d'aménagement touristique départemental » qui doit prendre en compte les orientations du schéma régional. Enfin, l'article L. 361-1 du code de l'environnement charge le conseil général d'établir « après avis des communes intéressées, un plan départemental des itinéraires de promenade et de randonnées » . Or il apparaît que l'ensemble de ces instruments de planification ne sont pas véritablement coordonnés, ce qui leur ôte une part importante de leur effectivité et de leur pertinence.

Pour essayer de clarifier l'exercice de cette compétence, plusieurs évolutions sont donc envisageables.

a) Une coordination à renforcer dans le respect de la capacité d'action de chacun
(1) Le transfert impossible de la compétence à un échelon unique

Le premier scénario, évoqué notamment par la mission d'information de l'Assemblée nationale 65 ( * ) , reviendrait à attribuer l'intégralité de la compétence tourisme à un seul niveau de collectivités territoriales. Dans cet esprit, selon les députés, « le département pourrait être, le plus souvent, la collectivité la plus pertinente, compte tenu de la taille des projets concernés, mais aussi des compétences prédominantes de cet échelon en matière environnementale et culturelle » . Le rapport précise toutefois que les départements d'une même région pourraient décider de lui confier cette compétence et que « l'attribution d'une compétence exclusive au département dans ce domaine ne devrait pas remettre en cause l'existence dans les communes ou les communautés des offices du tourisme, qui continueraient à fournir des informations pratiques, tout en appliquant localement la politique touristique définie au niveau départemental » .

Cette proposition, qui permettrait de clarifier l'exercice de la compétence « tourisme », présente néanmoins des inconvénients, dont celui de ne pas tenir pleinement compte de la diversité des situations. Autant, par exemple, certains départements du littoral atlantique sont bien placés pour développer une politique adaptée à l'ensemble de leur territoire, autant le département n'apparaît pas légitime pour se substituer à des communes qui ont une renommée mondiale à l'image de Nice, Bordeaux, Cannes, Saint-Tropez, Biarritz, Chamonix, Courchevel, Megève... Pour ces dernières, il est essentiel de pouvoir disposer de tous les « outils » permettant de renforcer leur « marque », ce qui exclue un transfert de leur compétence au département. Comme l'a remarqué notre collègue Jean-Pierre Vial au cours des travaux de la mission « les budgets des grandes stations de sport d'hiver comme Tignes ou Val d'Isère sont chacun supérieurs au budget de promotion de Savoie Mont-Blanc, organisme commun aux deux départements de Savoie, qui lui-même est supérieur au budget du comité régional de tourisme (CRT) » 66 ( * ) .

Si l'idée de réserver la compétence exclusivement au niveau départemental n'apparaît donc pas judicieuse, il serait toutefois également inopportun d'en priver d'exercice ce dernier ainsi que le propose le rapport du Comité pour la réforme des collectivités locales, selon qui « il n'y aurait (...) qu'avantage à réserver cette compétence aux communes ou à leurs groupements et aux régions, l'échelon départemental n'apparaissant pas, en cette matière comme le plus approprié » 67 ( * ) . Lorsque le territoire ne comprend pas de sites exceptionnels qui confèrent à certaines communes une visibilité particulière ou que le développement touristique est homogène le long d'une côte littorale par exemple, le département possède une légitimité naturelle qu'il convient de préserver pour développer des projets et des structures d'intérêt supra communal.

(2) Une répartition des fonctions par niveau de territoire difficile à organiser

Un deuxième scénario pourrait consister à identifier chaque aspect de la politique en faveur du tourisme et à l'attribuer au niveau de collectivité le plus adéquat. La région conserverait ainsi une mission de planification qui pourrait même être renforcée. Le département serait alors chargé de mettre en oeuvre les infrastructures tandis que les fonctions de commercialisation seraient attribuées aux EPCI ou aux villes selon les cas.

Ce schéma d'organisation a, certes, pour mérite de simplifier en apparence l'organisation de la compétence mais, comme le précédent, il ne tient pas compte de la diversité des territoires ni des problématiques propres à ceux situés à la « frontière » régionale, qui ne peuvent être traités en dehors d'une approche à la fois locale et interrégionale.

En outre, il peut être difficile d'identifier précisément chaque action de développement touristique en fonction de ces critères compte tenu du fait que certains projets peuvent présenter l'ensemble de ces caractéristiques.

(3) Une organisation de la compétence tourisme adaptée aux caractéristiques du territoire

Le troisième scénario pourrait s'appuyer sur les conclusions qui ont conduit votre mission à écarter les deux précédents, considérant que la diversité du territoire excluait de retenir une solution uniforme et un transfert exclusif à une catégorie de collectivités de même qu'une répartition trop artificielle niant la complexité locale.

C'est pourquoi, elle a considéré qu'il n'y avait pas lieu d'attribuer de manière exclusive la compétence tourisme à un niveau de collectivité particulier.

Nouvelle définition des communes touristiques

Le Sénat a adopté le 8 avril 2009 en première lecture 68 ( * ) le projet de loi de développement et de modernisation des services touristiques qui prévoit, dans son article 13, d'adapter la mise en oeuvre de la nouvelle procédure de classement des communes touristiques adoptée par l'article 21 de la loi du 14 avril 2006.

La nouvelle rédaction de l'article L. 133-13 de code du tourisme définit la « commune touristique » soit comme une commune mettant en oeuvre une politique locale du tourisme et offrant des capacités d'hébergement pour l'accueil des non-résidents, soit comme une commune bénéficiant, au titre du tourisme, de la dotation supplémentaire ou de la dotation particulière identifiée au sein de la part forfaitaire de la DGF.

Compte tenu du fait que le bilan de la compétence touristique des collectivités territoriales apparaît globalement satisfaisant votre mission a estimé qu'il n'était pas opportun d'envisager de modifications radicales concernant l'exercice de cette compétence .

Elle a toutefois considéré que des clarifications pourraient être apportées pour identifier les vocations de chaque niveau : conforter la commune et les intercommunalités dans leur mission d'accueil et de promotion, et renforcer la capacité des communes, des intercommunalités et des départements à financer les grands équipements avec le soutien de la région dans le cadre d'une démarche de programmation concertée.

Propositions de la mission

- Affirmer la compétence des communes et des intercommunalités pour l'accueil et la promotion locale.

- Assurer le financement des équipements touristiques structurants par les communes, les intercommunalités et les départements, avec le soutien des régions pour les équipements de niveau régional.

- Élaborer une convention Région / Départements / Intercommunalités pour préciser les champs d'intervention de chaque niveau de collectivité et des communautés. La réalisation et le suivi de cette convention seraient assurés par le conseil régional des exécutifs.

B. ASSURER LES SOLIDARITÉS SOCIALES

La légitimité des collectivités territoriales, et tout particulièrement des départements, à mettre en oeuvre des politiques destinées à assurer les solidarités sociales , aux côtés de l'Etat et des partenaires sociaux, ne fait aujourd'hui l'objet d'aucune contestation.

Les collectivités territoriales ont fait la preuve de leur capacité à exercer les larges compétences qui leur ont été transférées dans le domaine social . Ces compétences concernent tous les publics, petite enfance, population en situation de précarité , personnes handicapées , personnes âgées , et leur mise en oeuvre prend des formes multiples, services à l'usager, versement de prestations , mise en place de structures d'accueil.

Les collectivités territoriales n'ont, par ailleurs, pas hésité à se saisir d'autres problématiques relevant de la compétence de l'Etat afin, par exemple, de lutter contre la désertification médicale qui frappe des parties de plus en plus importantes du territoire.

Tout en soulignant la qualité du travail accompli par les collectivités territoriales en matière d' action sociale , votre mission s'est attachée à clarifier la répartition des compétences entre les différents acteurs. Elle a souhaité également attirer l'attention des pouvoirs publics, et des décideurs locaux, sur les évolutions profondes entrainées par la création des agences régionales de santé.

1. L'action sociale et médico-sociale

Le département, garant des solidarités sociales et territoriales, doit être conforté dans son rôle de chef de file de l'action sociale. Vos rapporteurs vous proposent dans cet objectif de renforcer la cohérence de son intervention avec les autres acteurs (en particulier l'ARS et les organismes de sécurité sociale) et de prévoir de nouveaux transferts de compétences (AAH, financement des ESAT et, à titre expérimental, médecine scolaire).

Conforter le département comme chef de file de l'action sociale

Les départements sont des acteurs majeurs de l'action sociale. Leur rôle n'a cessé de s'amplifier depuis les premières lois de décentralisation, au travers des réformes successives qui ont eu pour effet d'accroitre les compétences dévolues aux conseils généraux en la matière.

Les réformes les plus récentes n'ont fait que conforter cette évolution. C'est ainsi que :

- depuis 2002, les conseils généraux gèrent l'allocation personnalisée d'autonomie (APA) destinée aux personnes âgées, et qui a succédé à la prestation sociale autonomie et à l'allocation compensatrice pour tierce personnes ;

- depuis 2004, ils prennent en charge l'intégralité de la gestion du revenu minimum d'insertion, auquel se substitue à compter du 1 er juin 2009 le revenu de solidarité active ;

- depuis 2006, ils financent également la prestation de compensation du handicap (PCH) qui assure la prise en charge des besoins liées à la perte d'autonomie des personnes handicapées et qui remplace l'allocation compensatrice pour tierce personne.

Ce mouvement continu de transferts de compétences en matière d'action sociale a permis aux conseils généraux de jouer un rôle primordial dans la prise en charge des nouveaux besoins exprimés par les usagers.

Ces transferts constituent également une reconnaissance de la capacité des départements à mettre en oeuvre des politiques d'action sociale efficaces par différents moyens tels que l'action de proximité et l'adaptation des politiques publiques au contexte local.

Ces politiques mobilisent des moyens importants ainsi que le démontre l'analyse des dépenses d'aide sociale. en 2007, le montant global de ces dépenses s'élève à 28,7 milliards d'euros sur un budget global de 45,4 milliards d'euros, représentant ainsi environ 62 % des dépenses de gestion courante.

Afin de mieux appréhender l'action des départements, il convient de préciser que ces dépenses se répartissent en quatre grandes catégories :

- l'aide sociale aux personnes âgées qui recouvre les dépenses relatives à l'aide à domicile (aides ménagères et APA, ACTP pour les personnes de plus de soixante ans et PCH pour les personnes de plus de soixante ans) ainsi que les dépenses liées aux prises en charge en hébergement ;

- l'aide sociale aux personnes handicapées qui recouvre les dépenses relatives à l'aide à domicile (aides ménagères ou auxiliaires de vie, ACTP et PCH pour les personnes de moins de soixante ans) ainsi que les aides à l'hébergement (accueil en établissement, accueil familial et accueil de jour tient compte des dépenses pour les enfants placés. Elle intègre les mesures d'aide éducative : action en milieu ouvert et actions éducatives à domicile ;

- l'aide sociale à l'enfance ;

- les dépenses afférentes au revenu minimum d'insertion (RMI) ;

Ces quatre postes représentent 89 % des dépenses brutes d'aide sociale des départements, le RMI étant le premier poste de dépenses (29 %) parmi ces derniers. Les dépenses nettes d'action sociale aux personnes âgées s'élèvent à 5,8 milliards d'euros et ont concerné 1,2 million de personnes. Les dépenses d'APA représentent à elles seules 44% des dépenses destinées aux personnes âgées accueillies en établissement. Les dépenses nettes consacrées aux personnes handicapées ont atteint 4,4 milliards en 2007, elles ont concerné environ 256 000 personnes réparties pour moitié entre aides à domicile et accueil familial en établissement. L'évolution de ces dépenses est particulièrement dynamique, selon l'Odas les crédits affectés au paiement de la prestation de compensation du handicap seraient passés de 270 millions en 2007 à 550 millions en 2008.

Ces quelques chiffres démontrent la place centrale qu'occupe le département en matière d'action sociale et les responsabilités qui sont les siennes en matière de prise en charge de certains publics comme les personnes âgées dépendantes ou les personnes handicapées.

Ce rôle primordial est confirmé par les compétences que le département détient en matière de programmation médico-sociale . L'ensemble de ces compétences affirme le chef de filat de cette collectivité dans le domaine de l'action sociale.

(1) Un rôle incontournable de planification et de coordination

Depuis 2004, les départements se sont vus confier une compétence de principe en matière de planification qui consacre leur rôle décisionnaire pour l'élaboration des schémas d'organisation sociale et médico-sociale.

Ce schéma départemental est arrêté conjointement par le représentant de l'Etat dans le département et le président du conseil général. Il rassemble, pour une durée de cinq ans, les éléments prospectifs pour l'ensemble du champ de l'action sociale. Les éléments élaborés dans ce cadre sont regroupés dans le cadre d'un schéma régional qui intègre les schémas départementaux d'une même région. L'existence de cet échelon régional ne remet donc pas en cause la prédominance du schéma départemental.

Le schéma national, quant à lui, ne concerne que les établissements ou services accueillant des catégories de personnes dont la liste est fixée par décret et pour lesquelles les besoins ne peuvent être appréciés qu'à ce niveau (essentiellement des établissements accueillant des individus en situation de handicap rare)

A ces schémas se sont ajoutés depuis 2005, les programmes interdépartementaux d'accompagnement de la perte d'autonomie (Priac) établis par les préfets de région afin d'assurer la lisibilité des choix et l'équité de traitement dans l'allocation budgétaire des financements des établissements médico-sociaux.

Dans le cadre de ces schémas, les départements doivent assurer la coordination des actions menées par les différents intervenants de la prise en charge des personnes âgées dépendantes, ils veillent à la cohérence des actions respectives des centres locaux d'information et de coordination (Clic), des équipes médico-sociales chargées d'élaborer le plan d'aide des bénéficiaires de l'APA à domicile et des établissements et servies médico-sociaux.

(2) Le caractère incomplet des procédures de planification

L'adoption de la loi portant réforme de l'hôpital et relative aux patients à la santé et aux territoires (HPST) va modifier les règles relatives à la programmation médico-sociale . Ce texte redéfini en effet le rôle autorités compétentes en matière de planification en confiant notamment au directeur général de l'agence régionale de santé (ARS) la charge d'établir un schéma régional médico-social. L'objet de cette programmation régionale est de prévoir les évolutions nécessaires dans l'offre des établissements et services médico-sociaux afin de répondre aux besoins de prise en charge et d'accompagnement médico-sociaux de la population handicapée ou en perte d'autonomie.

Le rôle ainsi confié au directeur général de l'ARS pouvait laisser craindre une recentralisation de la compétence de programmation que la loi de 2004 avait confiée au conseil général. Afin de clarifier cette situation, il a été précisé, lors de l'examen de ce projet de loi au Sénat que ce schéma régional sera actualisé au regard des schémas départementaux d'organisation sociale relatifs aux personnes handicapées ou en perte d'autonomie arrêtés par les conseils généraux de la région . La nouvelle réglementation semble donc préserver la prédominance du schéma départemental.

Soucieuse de résorber certains dysfonctionnements du secteur médico-social, la loi HPST propose également de refondre les procédures en matière d'autorisation de création, de transformation ou d'extension d'établissement ou de service social ou médico-social et de mettre ne oeuvre un nouvel outil de conventionnement entre les établissements et les autorités de tutelle.

La procédure d'autorisation délivrée pour une durée de quinze ans par l'autorité administrative compétente est supprimée. Le projet de loi lui substitue une procédure d'appel à projet social ou médico-social dont l'objectif est de mieux organiser la sélection des projets et d'offrir des garanties financières supplémentaires aux promoteurs, dans la mesure ou une fois retenus, les projets auront vocation a recevoir une aide financière ce qui n'était pas toujours le cas auparavant, notamment de la part de l'Etat.

Par ailleurs, le projet de loi entend simplifier et renforcer le régime de conventionnement liant les établissements et leur tutelle . Les établissements qui atteignent un certain seuil feront désormais l'objet d'un contrat pluriannuel d'objectifs et de moyens (Cpom) conclu avec l'autorité chargé de la tarification. Pour cette catégorie d'établissements, ce contrat a vocation à se substituer aux conventions tripartites.

L'ambition affichée du projet de loi est de créer les conditions d'un décloisonnement entre le secteur sanitaire et le secteur médico-social afin d'assurer une meilleure prise en charge des patients. Dans ce cadre, la réforme des règles de programmation, de création des établissements sociaux et médico-sociaux ou du conventionnement ont pour objectif d'améliorer le fonctionnement du secteur médico-social dans le cadre régional.

Cette solution favorise un dialogue entre l'Etat, par l'intermédiaire des ARS, et les départements dans un cadre régional. Elle ne permet pas à elle seule de résoudre l'ensemble des difficultés liées à la programmation en matière médico-sociale, et notamment à sa mise en oeuvre .

C'est pour cette raison de que la mission d'information vous propose de prévoir l'élaboration conjointe par l'ARS et le département d'un schéma prescriptif pluriannuel fixant des objectifs partagés dans le domaine médico-social. Ce document permettrait d'assurer l'opposabilité des dispositions arrêtées conjointement.

Proposition de la mission

- Confier aux ARS et aux départements l'élaboration conjointe d'un schéma prescriptif fixant les objectifs pluriannuels partagés dans le domaine médico-social.

Ce schéma prescriptif serait complété par une contractualisation (sur les objectifs et les calendriers) entre les différents acteurs afin de déterminer les modalités d'exécution des orientations fixées par le schéma médico-social dont l'objet serait de s'assurer de la collaboration de l'ensemble des acteurs (Etat, conseil général, ensemble des établissements intervenant dans le champ médico-social et organismes de sécurité sociale)

Proposition de la mission

- Prévoir une contractualisation entre les différents acteurs afin de déterminer en commun les modalités d'exécution des orientations fixées par le schéma départemental médico-social.

Ces deux propositions permettraient de clarifier le rôle des acteurs chargés de la programmation et de la planification des établissements et services médico-sociaux. Elles permettraient de d'optimiser la mise en oeuvre des schémas d'organisation médico-sociale.

Renforcer la lisibilité du rôle du département dans la prise en charge des personnes handicapées

Les départements jouent également un rôle central en matière de prise en charge des personnes handicapées comme le démontrent l'importance des crédits affectés à ces politiques, mais également la création depuis le 1 er janvier 2006 des maisons départementales des personnes handicapées.

L'instauration de ces structures a constitué une étape décisive dans la prise en charge des besoins des personnes handicapées à trois niveaux : la constitution d'équipes pluridisciplinaires d'évaluation, le regroupement des services sur un même lieu et le tissage de nouveaux partenariats.

Elles ont favorisé l'accueil des personnes handicapées et permis l'amélioration du fonctionnement des commissions des droits et de l'autonomie des personnes handicapées.

La mise en oeuvre des MDPH s'est également accompagnée de la prise en charge, par les départements, de la prestation de compensation du handicap (PCH) et par le développement d'une politique d'insertion spécifique aux personnes handicapées qui fait l'objet de partenariats locaux au sein des plans départementaux d'insertion des travailleurs handicapés.

La qualité de l'intervention des MDPH, et le soutien apporté par les conseils généraux, sont salués par l'ensemble des acteurs concernés, aussi bien par la caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA) que par les associations d'usagers .

Votre mission vous propose donc de renforcer les compétences des conseils généraux en matière de prise en charge du handicap en leur transférant le financement de l'allocation adulte handicapé (AAH) et de l'ensemble des établissements et services d'aide par le travail (ESAT) afin de former un bloc de compétences renforcé au niveau départemental en matière de prise en charge du handicap. Le département serait ainsi en charge de la totalité des politiques d'aide aux adultes handicapés, situation de nature à favoriser une meilleure synergie avec les autres politiques départementales dans le domaine de l'action sociale, notamment en matière d'insertion.

Proposition de la mission

- Transférer aux départements le financement de l'allocation adulte handicapé (AAH) et de l'ensemble du financement des ESAT.

Ces propositions permettent de réaffirmer le rôle des départements comme garants des solidarités sociale et territoriale, ainsi que votre mission l'avait préconisé dans son rapport d'étape.

Favoriser la concertation avec les organismes de sécurité sociale

Soucieuse d'aborder la problématique de l'enchevêtrement des compétences dans toute sa complexité, la mission d'information a souhaité évoquer la question des relations entre collectivités territoriales et organismes de sécurité sociale à travers le prisme du financement de l'accueil de la petite enfance , sujet qui constitue un enjeu majeur pour les collectivités territoriales gestionnaires.

Les communes et les établissements publics de coopération intercommunale ont développé et développent encore une politique très active en ce domaine. La construction et le fonctionnement de ces structures d'accueil font l'objet d'un financement croisé auquel participent, outre les collectivités territoriales, les caisses d'allocations familiales (CAF)

Les Caf sont donc des partenaires financiers des collectivités territoriales. Elles bénéficient des crédits du fonds national d'action sociale de la caisse nationale d'allocations familiales pour développer cette politique. Cette politique en faveur de l'accueil des jeunes enfants représente près de la moitié des crédits de l'action sociale de cette branche de la sécurité sociale, presque 700 millions d'euros par an. Ces interventions sont regroupées au sein des contrats enfance et jeunesse. (CEJ)

La politique de la branche famille en matière d'accueil de la petite enfance est mise en cause par de nombreux intervenants.

Par la Cour des comptes d'abord, qui son rapport de septembre 2006 sur la sécurité sociale qui a considéré que la politique d'action sociale des caisses n'avait pas vocation à financer des dépenses de fonctionnement des structures d'accueil des jeunes d'enfants. La Cour a également souligné que les aides apportées aux collectivités territoriales devaient faire l'objet d'un cahier des charges préalable, définissant notamment la part de financement apportée par la CAF et de critères de sélection des projets tenant compte du potentiel fiscal de la collectivité territoriale et de la situation des populations concernées.

A la suite de ce rapport de la Cour des comptes qui estimaient que les dépenses liées à cette action n'étaient pas contrôlées, l'Etat a modifié les règles d'attribution des crédits du fonds d'action sociale. Désormais la participation des CAF a été plafonnée à 55 % des dépenses engagées ce qui constitue un changement important puisque les caisses finançaient parfois jusqu'à 70 % des dépenses, les projets qui lui étaient soumis. Simultanément de nouveaux critères d'attribution ont été définis.

Cette évolution n'a pas tenu compte de la situation des collectivités territoriales. C'est ainsi que les communes déjà fortement impliquées dans le développement de structures d'accueil des jeunes enfants doivent faire face à une baisse progressive des subventions versées par leur CAF ce qui les contraint à trouver d'autres sources de financement.

Outre les difficultés provoquées par la modification unilatérale des règles de financement, les collectivités territoriales déplorent un certain manque de transparence des critères retenus par les CAF pour apporter leur contribution financière à des projets locaux et plus généralement les conditions générales de collaboration avec les organismes de sécurité sociale . Elles regrettent que certains projets indispensables au développement de la collectivité, ou conçus dans le cadre de la politique de la ville, puissent ne pas faire l'objet d'une participation financière des organismes de sécurité sociale. Cette difficulté à construire des projets en partenariats selon des critères transparents ne favorise pas une collaboration suffisamment sereine entre ces deux partenaires et peut se traduire par des remises en cause de la légitimité des CAF à refuser leur participation financière ainsi que l'a souligné Patrick Kanner, président de l'Union nationale des centres communaux d'action sociale lors de son audition.

Dans ce contexte, la nécessité de développer des échanges réguliers entre les collectivités territoriales et les CAF a été réaffirmée à plusieurs reprises par les membres de la mission , notamment par Pierre-Yves Collombat, tout comme la nécessaire instauration de règles de collaboration transparentes et connues de l'ensemble des acteurs.

Ce travail de concertation ne trouve pas sa place parmi les compétences de la commission départementale de l'accueil du jeune enfant présidée par le président du conseil général et vice-présidée par un représentant de la CAF qui est une instance de réflexion, de conseil et d'appui pour les institutions et organismes qui interviennent dans le domaine de l'accueil des jeunes enfants.

Votre mission vous propose donc la mise ne oeuvre d'une commission de concertation réunissant les représentants des maires du département, des établissements publics de coopération intercommunale, du conseil général et des caisses locales d'allocations familiales concernées afin que les différents acteurs puissent évoquer leurs objectifs, leurs critères d'intervention et coordonner leurs participations dans les différents projets nécessitant le recours à des financements croisés.

Proposition de la mission

- Créer dans chaque département une commission de concertation réunissant les représentants des communes, des EPCI, du conseil général et des caisses d'allocations familiales.

2. Les questions de santé

Le projet de loi portant réforme de l'hôpital et relatif aux patients, à la santé et aux territoires (HPST), qui modifie les règles d'organisation du secteur médico-social, va également bouleverser le paysage institutionnel dans le domaine sanitaire. La création des agences régionales de santé (ARS) se traduira par la disparition, ou la réorganisation de structures jouant un rôle central dans les politiques sanitaires au niveau déconcentré, c'est le cas notamment des DRASS et DDAS, ou de structures de coopération entre les collectivités locales et les autres acteurs du système de santé tels que les groupements régionaux de santé publique.

Cette réorganisation administrative au profit des ARS aura pour conséquence la définition de nouvelles relations entre cet établissement public et les collectivités territoriales sur des sujets tels que la santé publique et l'offre de soins.

Des modifications institutionnelles profondes

Le projet de loi portant réforme de l'hôpital et relatif aux patients, à la santé et aux territoires apporte des modifications profondes quant aux conditions de participation des collectivités territoriales à la gestion du système de santé.

Trois lois votées en 2004, la loi relative aux libertés et responsabilités locales, la loi relative à l'assurance maladie et la loi relative aux politiques de santé publique avaient défini les modalités de participation des collectivités territoriales à la gestion de certaines instances sanitaires.

C'est ainsi que les conseils régionaux étaient devenus membres, à titre consultatif, de la commission exécutive des agences régionales d'hospitalisation (ARH) en charge de la gestion des établissements de santé publics et privés. Une expérimentation avait prévu d'offrir la possibilité aux conseils régionaux de participer aux travaux de l'ARH avec une voix délibérative mais une seule région, la région Nord-Pas-de-Calais, a souhaité participer à cette expérimentation.

Les collectivités territoriales pouvaient également rejoindre les groupements régionaux de santé publique (GRSP) et financer les projets pilotés par ces structures.

Enfin, la création à titre expérimental d'une agence régionale de santé réunissant l'Etat, la sécurité sociale et les régions était prévue, mais cette expérimentation n'a finalement pas vu le jour.

Le projet de loi HPST rend caduques ces dispositions en prévoyant la suppression des ARH et des GRSP. Par ailleurs, la création d'agences régionales de santé sur un modèle déconcentré, et non pas décentralisé, réaffirme le caractère régalien des politiques de santé publique.

La première conséquence de cette réforme est donc de réduire le rôle institutionnel des collectivités territoriales en matière de politique de santé. Désormais, elles participent au conseil de surveillance de ces agences, sans capacité opérationnelle.

Par ailleurs, les modes de collaboration entre les ARS et les collectivités territoriales en matière de santé publique seront limitées , les ARS pourront être signataires du volet sanitaire des contrats urbains de cohésion sociale et auront la possibilité de conclure des contrats locaux de santé avec les collectivités territoriales sur la promotion de la santé, la prévention, les politiques de soins et l'accompagnement médico-social.

L'accès aux soins : une question en suspens

Cette situation va influer sur la prise en compte de difficultés apparues en de nombreux points du territoire et auxquelles les collectivités territoriales ont tenté d'apporter une réponse, en l'absence d'une intervention claire des autorités compétentes : l'Etat et la sécurité sociale. C'est notamment le cas vis-à-vis des restrictions dans l'offre de soins qui se sont aggravées au cours des dernières années en raison de la crise de la démographie médicale et de l'émergence de difficultés d'accès aux médecins généralistes ou spécialistes sur des parties de plus en plus importantes de notre pays. Cette question de l'accès aux soins prend une dimension d'autant plus importante qu'elle comporte un second volet relatif au maintien en activité des établissements de santé, et notamment des établissements dont l'activité médicale et chirurgicale se réduit.

Les collectivités territoriales ont développé plusieurs dispositifs destinés à favoriser l'installation ou le maintien des médecins sur leur territoire . Ces mesures prennent essentiellement la forme d'aides financières, immobilières ou fiscales. Dans certaines régions (Aquitaine, Bretagne) la mise en oeuvre de ces mesures a fait l'objet d'une action coordonnée au niveau régional. Les actions des collectivités territoriales en la matière ont parfois été complétées par des aides versées par la sécurité sociale.

L'éventail des actions est large : bourses aux étudiants en médecine, mise à disposition de locaux professionnels ou à usage de logement, aides à l'installation ou au fonctionnement voire exonération de la taxe professionnelle.

La création des ARS, dont la mission principale est d'organiser l'offre de soins, va nécessiter une articulation avec les interventions des collectivités territoriales.

Tout d'abord parce chaque ARS établira un schéma régional d'organisation des soins destiné à évaluer les besoins en implantations pour l'exercice des soins de premier recours. L'action des collectivités locales sera donc encadrée par les décisions des ARS en matière de planification de l'accès aux soins.

Ensuite, parce que les ARS sont chargées de contribuer à la création d'un guichet unique qui centralisera les aides mises à la disposition des médecins susceptibles de s'installer dans les zones dites sous-médicalisées. Là encore, les collectivités territoriales seront sollicitées pour participer à des financements croisés sur des projets dont elles n'assurent pas le chef de filat et qui ne relèvent pas de leurs compétences.

Le deuxième point important en matière d'accès aux soins concerne les établissements de santé.

Le directeur général de l'ARS disposera d'une autorité renforcée sur les établissements de santé. Par ailleurs, le Gouvernement a affiché sa volonté de poursuivre la restructuration de la « carte » hospitalière.

La création des futures communautés hospitalières de territoire dont l'objectif est de permettre la mutualisation des moyens entre plusieurs établissements, la fermeture de certains services pour des raisons de sécurité des patients, la transformation des établissements de soins aigus en établissement de rééducation ou d'hébergement des personnes âgées nécessiteront des contacts directs entre les ARS et les présidents de conseil de surveillance des établissements de santé concernés selon des modalités qui ne sont pas institutionnalisées.

Cette situation éveille des craintes chez les élus locaux, notamment dans les communes hébergeant des établissements de petite taille susceptibles d'être fermés.

La question de l'offre de soins illustre la difficulté d'organiser un dialogue entre l'Etat (les autorités de tutelle du secteur de la santé) et les collectivités territoriale sur des sujets d'intérêt commun mais pour lesquels l'approche des dossiers est radicalement différente. Cette absence de concertation est d'autant plus dommageable, que les collectivités locales sont contraintes d'intervenir en cas de carence de l'action de l'Etat pour tenter de maintenir une offre de soins indispensable aux habitants et au dynamisme économique des territoires.

La médecine scolaire

Les carences de l'Etat en matière d'organisation de l'accès aux soins, ou de suivi sanitaire de la population, se constatent par ailleurs dans de nombreux domaines. C'est ainsi que les analyses convergent pour dénoncer les dysfonctionnements et les défaillances de la médecine scolaire, alors que son importance dans la prise en charge sanitaire des jeunes fait l'objet d'un consensus général.

La mission souhaite réaffirmer la responsabilité première de l'Etat dans ce domaine crucial pour la politique de prévention, mais souffrant d'un déficit récurrent de médecins scolaires de l'éducation nationale. En raison des complémentarités qui pourraient être recherchées avec les interventions des collectivités territoriales dans le domaine de l'action médico-sociale, et notamment celles des départements en matière de protection maternelle et infantile 69 ( * ) , votre mission propose néanmoins d' ouvrir une possibilité d'expérimentation de l'exercice de la compétence médecine scolaire par les départements et régions volontaires. Par souci de continuité de l'école au lycée, cette expérimentation pourrait se faire au niveau d'une région et des départements qui la composent. Les modalités de compensation financière devraient faire l'objet d'un examen très attentif tant l'implication de l'Etat s'est progressivement effritée.

Rappelons que lors de l'examen en 2003 du projet de loi relatif aux libertés et responsabilités locales, c'est au nom de la cohérence mais aussi et surtout de l'efficacité que le Sénat avait voté, en première lecture, à l'initiative notamment de notre collègue Philippe Richert, rapporteur pour avis au nom de la commission des affaires culturelles, un transfert aux départements de la médecine scolaire.

Proposition de la mission

- Ouvrir, pour les départements et régions volontaires, une possibilité d'exercer à titre expérimental la compétence en matière de médecine scolaire.

C. OFFRIR UN CADRE DE VIE AMÉLIORÉ

Les politiques environnementales sont l'affaire de tous et appellent, par nature, la coopération entre les différentes collectivités, qu'il s'agisse de la protection des espaces naturels, des actions pour la qualité de l'air, de la gestion des ressources en eau ou encore de l'assainissement, de la collecte et de l'élimination des déchets.

La prise en charge et l'amélioration de ces différents éléments du cadre de vie placent au premier plan les intercommunalités, avec le soutien des départements, notamment au bénéfice des zones rurales.

Pour sa part, la région affirme là encore son rôle stratégique et de programmation. En cohérence avec les projets de loi Grenelle I et II, votre mission se prononce pour un renforcement du rôle de coordination des politiques environnementales au niveau de la région, ainsi que pour une mutualisation des moyens, à chaque fois que cela est possible.

1. Environnement

Les politiques environnementales nécessitent la coopération entre les collectivités :

- d'une part, certains défis, tels que la pollution atmosphérique et le réchauffement climatique, ont une portée qui dépasse tout cadre territorial ;

- d'autre part, les territoires qui peuvent faire l'objet d'une délimitation (bassin, espace naturel sensible, trame bleue et trame verte...) coïncident rarement avec les limites administratives.

Votre mission a pris note des propositions émanant du Grenelle de l'environnement et qui trouvent leur traduction dans le projet de loi portant engagement national pour l'environnement, en cours d'examen par la commission des affaires économiques du Sénat.

Un besoin d'information à satisfaire

La complexité des enjeux soulevés par l'environnement requiert une connaissance précise, recueillie au plus près du terrain.

Instauré par la loi n° 2002-276 du 27 février 2002 relative à la démocratie de proximité, l'inventaire du patrimoine naturel répertorie ainsi les richesses écologiques, faunistiques, floristiques, géologiques, minéralogiques et paléontologiques.

L'Etat en assure la conception, l'animation et l'évaluation. Les régions peuvent être associées à la conduite de cet inventaire dans le cadre de leurs compétences. En outre, les collectivités territoriales peuvent contribuer à la connaissance du patrimoine naturel par la réalisation d'inventaires locaux.

Des espaces naturels à préserver

Comme l'énonce le code de l'urbanisme dès son article premier: « Le territoire français est le patrimoine commun de la nation. Chaque collectivité publique en est le gestionnaire et le garant dans le cadre de ses compétences. ».

Le même article poursuit en indiquant que « les collectivités publiques harmonisent, dans le respect réciproque de leur autonomie, leurs prévisions et leurs décisions d'utilisation de l'espace. »

Le département a ainsi reçu la charge, dans le cadre de l'acte I de la décentralisation 70 ( * ) , de préserver la qualité des sites, des paysages, des milieux naturels et des champs naturels d'expansion des crues et d'assurer la sauvegarde des habitats naturels.

Il est compétent à ce titre pour protéger, gérer et ouvrir au public les espaces naturels sensibles.

Le financement de cette politique est généralement assuré par l'institution d'une taxe départementale des espaces naturels sensibles (TDENS). Cette taxe est perçue sur la totalité du territoire du département, assurant ainsi la participation de l'ensemble des acteurs locaux à la gestion des espaces naturels sensibles .

Le projet de loi « Grenelle II » précise le cadre de préservation de la continuité écologique au moyen de la « trame bleue » et de la « trame verte » définies dans le projet de loi « Grenelle I », avec la définition par l'Etat d'orientations stratégiques et l'élaboration de schémas de cohérence écologique par l'Etat et la région . Ces schémas sont pris en compte par les documents d'urbanisme et d'aménagement (SCOT, plan local d'urbanisme).

La trame verte et la trame bleue
(article 21 du projet de loi « Grenelle I » 71 ( * ) )

« L'Etat se fixe comme objectif la création, d'ici 2012, d'une trame verte constituée, sur la base de données scientifiques, des espaces protégés en application du droit de l'environnement et des territoires assurant leur connexion et le fonctionnement global de la biodiversité , et d'une trame bleue, son équivalent pour les eaux de surfaces continentales et leurs écosystèmes associés.

« Leur élaboration associera l'Etat, les collectivités territoriales et les parties concernées sur une base contractuelle. L'élaboration de la trame bleue s'effectuera en cohérence avec les travaux menés par les commissions locales de l'eau.

« Leur pilotage s'effectuera dans chaque région en association étroite avec les collectivités territoriales et en concertation avec les acteurs de terrain dans un cadre cohérent garanti par l'Etat.

« Les modalités de leur prise en compte par les documents d'urbanisme, les schémas d'aménagement et de gestion des eaux, les schémas d'infrastructures, la fiscalité locale et les concours financiers de l'Etat seront précisées à l'issue d'un audit qui aboutira avant fin 2009.

« À cet effet, l'action des conservatoires d'espaces naturels sera confortée par une reconnaissance spécifique. »

L'enjeu climatique et énergétique : vers une implication croissante des acteurs locaux

De même que la préservation du territoire, la lutte contre les pollutions atmosphériques, la préservation de la qualité de l'air et l'effort d'économie et d'utilisation rationnelle de l'énergie relèvent de l'ensemble des acteurs publics et privés 72 ( * ) :

- l'Etat assure la surveillance de la qualité de l'air et de ses effets sur la santé et sur l'environnement 73 ( * ) , avec le concours des collectivités territoriales. Le plan de protection de l'atmosphère est élaboré par le préfet 74 ( * ) ;

- s'agissant de la qualité de l'air , la région a un rôle de stratège et de coordinateur : le président du conseil régional a depuis 2002 75 ( * ) la charge d'élaborer le plan régional pour la qualité de l'air 76 ( * ) , qui relevait auparavant de l'Etat. Ce plan fixe des orientations permettant de prévenir ou de réduire la pollution atmosphérique ou d'en atténuer les effets.

L'article 23 du projet de loi « Grenelle II » instaure des schémas régionaux du climat, de l'air et de l'énergie , élaborés par le préfet de région et le président du conseil régional.

Ces plans se substituent aux plans régionaux pour la qualité de l'air, qui relevaient de la compétence du préfet. Ils doivent permettre une approche globale et intégrée des politiques climatiques locales. Notamment :

- les plans de protection de l'atmosphère et les zones de développement de l'éolien doivent être compatibles avec ces schémas ;

- le gestionnaire du réseau public de transport d'électricité tient compte des objectifs définis par le schéma.

Pour une meilleure coordination des politiques environnementales

Votre mission considère que les lignes stratégiques des politiques menées par les collectivités publiques doivent être coordonnées au niveau régional . A ce titre, le conseil régional des exécutifs dont la mission propose la création serait le lieu de concertation approprié pour élaborer les politiques environnementales en cohérence avec les territoires.

La mise en oeuvre de ces politiques suppose une connaissance fine du terrain et une remontée des informations locales . Celle-ci relève donc plus particulièrement du département , compte tenu de son expérience dans la gestion des espaces naturels sensibles, et des intercommunalités , qui interviennent notamment sur les agendas 21. Le conseil régional des exécutifs pourrait organiser cette coopération, en cohérence avec la stratégie régionale, en prenant en compte les caractéristiques de chaque région : présence d'espaces naturels sensibles, d'activités génératrices d'émissions polluantes, nécessité de préserver les continuités écologiques, dialogue éventuel avec les régions voisines.

Proposition de la mission

- Coordonner les politiques environnementales au niveau de la région sur les sujets d'intérêt régional, concernant notamment la préservation et la restauration des continuités écologiques, en cohérence avec les orientations nationales fixées par l'Etat.

2. Le logement et l'urbanisme

La politique de l'habitat se conçoit de plus en plus à l'échelle du bassin de vie avec le support des intercommunalités. Toutefois, le département a également une responsabilité importante au travers du plan départemental de l'habitat et le plan départemental d'action pour le logement des personnes défavorisées. Vos rapporteurs se félicitent de la clarification des compétences déjà engagée dans le domaine du logement social.

En outre, une meilleure articulation des documents d'urbanisme peut être escomptée d'une élaboration effectuée au niveau intercommunal, ce que devrait permettre l'achèvement et la mise en cohérence de la carte des intercommunalités à fiscalité propre.

La loi du 7 janvier 1983 relative à la répartition de compétences entre les communes, les départements, les régions et l'Etat a posé comme principe que « les communes, les départements, les régions définissent, dans le cadre de leurs compétences respectives, leurs priorités en matière d'habitat » (article 76). Dans ce cadre général, le rôle principal en la matière réside au niveau intercommunal , avec une coordination au niveau départemental .

Une compétence fortement liée au bassin de vie

Les débats au sein de la mission ont fait apparaître à plusieurs reprises la pertinence du bassin de vie comme échelon de l'action publique. D'après l'INSEE, le bassin de vie est « le plus petit territoire sur lequel les habitants ont accès à la fois aux équipements et à l'emploi ». Il détermine la majeure partie des déplacements quotidiens et conditionne la manière dont le citoyen « vit » son territoire. Il est donc nécessaire d'envisager la question du logement à cette échelle.

Le bassin de vie

Constatant que les territoires administratifs traditionnels -communes, cantons- correspondent de moins en moins à des espaces pertinents pour décrire et étudier les conditions de vie des Français, un groupe de travail pluridisciplinaire autour de l'INSEE a défini en 2003 un découpage du territoire national en 1 745 « bassins de vie » centrés autour de bourgs et de petites villes, auxquels s'ajoutent les 171 agglomérations de plus de 30 000 habitants. Il s'agissait d'identifier les plus petits territoires dans lesquels puissent s'accomplir la majorité des actes de la vie quotidienne : accès à l'emploi et aux services privés ou publics les plus courants.

Pour la DIACT, le bassin de vie est un « territoire présentant une cohérence géographique, sociale, culturelle et économique, exprimant des besoins homogènes en matière d'activités et de services. ». Structuré à partir des flux migratoires quotidiens de la population, il est considéré comme une échelle pertinente en matière d'aménagement du territoire pour l'Etat, mais également de qualification de l'orientation économique locale autour de projets ou de branches données (agriculture, industrie...).

En matière de logement social , une clarification de la répartition des compétences a déjà été engagée, s'agissant des offices publics d'habitations à loyer modéré (OPHLM) et des offices publics d'aménagement et de construction (OPAC). Avec le temps, ces deux catégories d'établissements publics, rattachées aux communes ou aux départements, en venaient à exercer des missions proches. En conséquence, la loi du 13 juillet 2006 portant engagement national pour le logement a unifié leurs statuts et l'ordonnance du 1 er février 2007 les a transformés en « offices publics de l'habitat » (OPH).

Concernant la politique du logement , elle est assurée principalement au niveau intercommunal depuis la loi du 13 août 2004, qui a confié aux intercommunalités la charge d'élaborer cette politique dans le cadre du programme local de l'habitat (PLH) 77 ( * ) . Les départements n'interviennent sur cette compétence qu'en complément des intercommunalités, par l'intermédiaire du plan départemental de l'habitat (PDH) qui permet de favoriser la cohérence des politiques locales de l'habitat. La loi exige que les orientations du PDH soient conformes à celles des PLH et des schémas de cohérence territoriale (SCOT).

Le programme local de l'habitat « définit, pour une durée de six ans, les objectifs et les principes d'une politique visant à répondre aux besoins en logements et en hébergement, à favoriser le renouvellement urbain et la mixité sociale et à améliorer l'accessibilité du cadre bâti aux personnes handicapées en assurant entre les communes et entre les quartiers d'une même commune une répartition équilibrée et diversifiée de l'offre de logements » 78 ( * ) .

Le plan départemental de l'habitat « est élaboré dans chaque département afin d'assurer la cohérence entre les politiques d'habitat menées dans les territoires couverts par un programme local de l'habitat et celles menées dans le reste du département » 79 ( * ) . Notamment, il « définit des orientations conformes à celles qui résultent des schémas de cohérence territoriale et des programmes locaux de l'habitat ». Il est élaboré conjointement par l'Etat, le département et les EPCI qui ont adopté ou ont engagé la procédure d'adoption d'un PLH.

Au total, selon l'Assemblée des communautés de France (ADCF), plus des deux tiers des intercommunalités exercent la compétence de politique du logement 80 ( * ) .

Enfin les trois niveaux de collectivités territoriales contribuent au financement du logement .

S'agissant de la lutte contre l'habitat indigne , le rapport CGPC-IGA-IGAS rendu au ministre de l'intérieur en mai 2007 81 ( * ) met en cause la pluralité des autorités en charge du pouvoir de décision : le préfet (police de la salubrité, saturnisme), le maire agissant au nom de l'Etat (dans les communes dotées d'un service communal d'hygiène et de sécurité) ou au nom de la commune (police des immeubles menaçant ruine), auxquels s'ajoute l'intercommunalité pour certaines compétences en matière de logement. Quant à la mise en oeuvre de cette politique, elle fait appel à de nombreux services de l'Etat et des communes. Enfin le financement relève aujourd'hui d'actions insuffisamment coordonnées entre l'Agence nationale de l'habitat (ANAH), les organismes sociaux et les collectivités territoriales (notamment le département). Le rapport propose, afin d'améliorer l'efficacité de cette politique, de la structurer autour du préfet au niveau du département, sur la base d'un partenariat avec les collectivités territoriales dans le cadre du plan départemental d'action pour le logement des personnes défavorisées (PDALPD). Il suggère également de regrouper les financements dans un fonds départemental de lutte contre l'habitat indigne.

Concernant les permis de construire , le maire d'une commune de moins de 10 000 communes ou le président d'un EPCI comptant moins de 20 000 habitants peuvent disposer gratuitement des services déconcentrés de l'Etat pour l'étude technique de certaines demandes de permis ou de déclarations préalables 82 ( * ) .

Les règles d'urbanisme, un domaine en cours d'évolution dans le cadre du projet de loi Grenelle II

L'élaboration du plan local d'urbanisme est actuellement une compétence des communes , qu'elles peuvent déléguer à un EPCI. Seules les communautés urbaines exercent obligatoirement cette compétence. Au 1 er janvier 2008, seules 40 communautés d'agglomérations sur 136 et 287 communautés de communes sur 2 312 ont reçu délégation pour élaborer un plan local d'urbanisme (PLU).

Le projet de loi portant engagement national pour l'environnement , dit « Grenelle II », prévoit d'améliorer l'articulation des documents d'urbanisme .

Ce projet de loi privilégie notamment l'élaboration d'un PLU au niveau de l'ensemble du territoire couvert par l'EPCI , même si l'élaboration d'un PLU communal demeure possible. Lorsqu'il sera élaboré au niveau intercommunal, le PLU devra inclure les dispositions portant sur l'aménagement , sur l'habitat , sur les transports et les déplacements , alors que ces dispositions figurent aujourd'hui dans des plans séparés (plan local de l'habitat, plan de déplacements urbains).

Une efficacité liée à l'amélioration des périmètres intercommunaux

La mission constate que l'habitat est une question d'intérêt essentiellement communal et intercommunal , le département conservant une compétence de coordination.

Elle considère toutefois que cette politique ne peut atteindre sa pleine efficacité que si elle est menée à l'échelle la plus pertinente , en tenant compte du périmètre du bassin de vie et d'emploi . L'achèvement et la rationalisation de la carte intercommunale, proposition formulée par votre mission, sont donc une nécessité, qui rendra plus aisé l'exercice de cette compétence au niveau des intercommunalités.

Tenant compte en particulier des observations de M. Pierre Jarlier, votre mission préconise la mise en cohérence des différents documents d'urbanisme et de planification urbaine entre eux et avec le SCOT. En outre, elle renvoie aux travaux en cours au Sénat, relatifs au projet de loi « Grenelle II ».

Proposition de la mission

- Appeler à une mise en cohérence des différents documents d'urbanisme et de planification (PLU, PLH, PDU) en lien avec les SCOT.

3. Eaux, assainissement et gestion des déchets

La politique de gestion de l'eau, de l'assainissement et des déchets illustre parfaitement le rôle de proximité joué par le niveau communal et, en zone rurale, par le département vis-à-vis des usagers . La région et l'Etat interviennent plutôt sur des questions stratégiques ou sur des domaines demandant une expertise technique particulière.

Cette politique se place aujourd'hui dans le cadre des politiques locales de développement durable, notamment des agendas 21 et des plans climat-énergie territoriaux (PCET) prévus par le Grenelle de l'environnement.

L'eau et l'assainissement, des services alliant la proximité et une exigence croissante de technicité

La gestion de l'eau et de l'assainissement représente, au niveau local, l'un des services publics essentiels que doit garantir la collectivité afin de préserver l'hygiène et la qualité de vie. Il s'agit aussi bien d'un service de réseau qui maille l'ensemble du territoire jusqu'au niveau de chaque maison et chaque appartement, que d'une ressource stratégique de la plus haute importance au niveau régional et national. Or les limites de bassin coïncident rarement avec les limites administratives : la gestion des ressources en eau a ainsi servi, avec les SDAGE, de laboratoire à la coopération entre les collectivités .

Les dispositions relatives à la distribution d'eau et à l'assainissement sont énoncées aux articles L. 2224-7 à L. 2224-12-5 du CGCT et aux articles L. 1331-1 à L. 1331-16 du code de la santé publique. Les redevances d'eau potable et d'assainissement couvrent les charges consécutives aux investissements, au fonctionnement et aux renouvellements nécessaires à la fourniture des services, ainsi que les charges et les impositions de toute nature afférentes à leur exécution (CGCT, art. L. 2224-12-3).

(1) L'eau potable : un service au plus près de l'usager

La distribution d'eau potable est d'abord un service public de proximité, assuré principalement au niveau communal et intercommunal . L'intérêt local provient notamment de la nature même de l'eau, qui est facile à stocker mais difficile à transporter sur de longues distances.

Le code général des collectivités territoriales (CGCT) donne la compétence aux communes (art. L. 2224-7-1), qui peuvent assurer la production, le transport et le stockage de l'eau potable. Toutefois, les départements et certaines associations syndicales peuvent conserver certaines compétences en la matière.

Concernant l'intercommunalité, les compétences relatives à l'eau sont exercées obligatoirement par les communautés urbaines 83 ( * ) et font partie des six compétences dont trois au moins doivent être exercées par les communautés d'agglomération 84 ( * ) .

(2) L'assainissement et l'évacuation des eaux pluviales : la nécessaire coordination des services

Les communes sont compétentes en matière d'assainissement des eaux usées (CGCT, art. L. 2224-8).

L'assainissement est exercé obligatoirement par les communautés urbaines et fait partie des six compétences dont trois au moins doivent être exercées par les communautés d'agglomération . Il fait également partie des six compétences dont au moins une doit être exercée par les communautés de communes .

Selon les collectivités, les eaux usées et les eaux pluviales partagent les mêmes réseaux (réseau unitaire) ou sont évacuées séparément (réseaux séparatifs). Leurs caractéristiques justifient un traitement différencié : le débit des eaux usées fluctue beaucoup moins que celui des eaux pluviales, dont le système d'évacuation doit être en mesure de prévoir des situations de fortes intempéries.

Ces deux services publics présentent d'autre part des statuts juridiques différents : l'évacuation des eaux pluviales, mission de la puissance publique au profit de la collectivité, est un service public administratif (SPA) alors que l'assainissement, qui comporte une prestation de service à des personnes physiques ou morales, est un service public industriel et commercial (SPIC) 85 ( * ) .

Une coordination entre ces services apparaît toutefois souhaitable en raison d'enjeux techniques communs, concernant notamment la conformité des branchements et le traitement des effluents.

C'est pourquoi le projet de loi « Grenelle II » propose de lier la compétence « eaux pluviales » à la compétence « assainissement » afin de favoriser une gestion globale des problèmes d'évacuation des eaux .

(3) Des compétences importantes de l'Etat, en coordination avec les collectivités

La police de l'eau , compétence de l'Etat, est assurée sous l'autorité du préfet de département, une coordination étant confiée au niveau régional à la direction régionale de l'environnement (DIREN, intégrée dans la nouvelle direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement ou DREAL).

Les services départementaux d'incendie et de secours (SDIS) interviennent sur les pollutions. Les SDIS constituent un exemple de coopération entre l'ensemble des autorités locales concernées au niveau départemental et infra-départemental : agissant sous l'autorité du maire ou du préfet, dans le cadre de leurs pouvoirs respectifs de police, ils sont administrés par un conseil d'administration composé de représentants du département, des communes et des EPCI compétents.

Enfin le maire d'une commune , en temps qu'officier de police judiciaire, peut constater les infractions ou pollutions sur sa commune et prendre, en cas d'urgence, un arrêté municipal de protection.

(4) La gestion de l'eau au niveau des bassins : un exemple de coopération multi-partenariale

La gestion de l'eau peut servir d'exemple à une coopération entre un grand nombre de collectivités et de personnes privées pour la gestion d'une ressource limitée.

Dans chaque bassin versant, un schéma d'aménagement et de gestion des eaux (SAGE, art. L. 212-3 et suivants du code de l'environnement) est élaboré par une commission locale de l'eau, créée par le préfet et réunissant des représentants de l'Etat, des collectivités locales (au moins 50 % des sièges) et des usagers (au moins 25 % des sièges). Il est approuvé par arrêté du préfet.

Le SAGE se conforme aux orientations fixées par le schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux (SDAGE, article L. 212-1 et suivants du code de l'environnement), instauré par la loi sur l'eau du 16 décembre 1964. Le SDAGE précise pour chaque bassin hydrographique métropolitain les orientations fondamentales d'une gestion équilibrée de la ressource en eau dans l'intérêt général et dans le respect des principes de la loi sur l'eau. Le SDAGE est élaboré et adopté par le Comité de bassin puis approuvé par le préfet coordonnateur de bassin. Le Comité de bassin regroupe lui aussi des représentants des collectivités territoriales et des acteurs publics et privés qui agissent dans le domaine de l'eau.

Des établissements publics territoriaux de bassin (EPTB) mettent en oeuvre des opérations à l'échelle du bassin versant ou d'un sous-bassin. Formés par association de collectivités territoriales et de leurs groupements , les EPTB agissent pour le compte des collectivités pour la mise en valeur et l'aménagement des nappes, des fleuves et des grandes rivières. Ils interviennent notamment pour la prévention des inondations 86 ( * ) .

(5) La position de la mission

Un rapport de la Cour des comptes rendu en décembre 2003 87 ( * ) plaide pour une gestion des services publics d'eau et d'assainissement au niveau intercommunal , au motif qu'elle permettrait :

- d'améliorer le service rendu aux usagers, notamment par le regroupement des services ;

- d'uniformiser les tarifs, ce qui répond à un objectif d'équité ;

- de rééquilibrer, par un effet « taille », les rapports des collectivités avec les opérateurs dans la négociation des contrats, sur un périmètre plus pertinent.

Le même rapport relève que l'EPCI a souvent du mal à s'imposer face aux divers syndicats mixtes ou intercommunaux préexistants en matière d'assainissement et plus encore de distribution d'eau.

Un rapport récent du Conseil économique, social et environnemental 88 ( * ) , tout en réaffirmant que le prix du service public de l'eau doit rester fixé au niveau local par les collectivités organisatrices selon le principe utilisateur-payeur, considère que la charge des coûts fixes doit être mutualisée au niveau intercommunal .

Concernant la gestion de l'eau, M. Guy Pustelnik, délégué général de l'Association française des établissements publics territoriaux de bassins (EPTB), a souligné, lors de son audition par la mission, la pertinence du niveau départemental pour coordonner l'alimentation en eau potable . Il a également fait valoir que le bassin versant constituait l'échelle la mieux adaptée en matière de lutte contre les inondations et de protection coordonnée des zones humides. Il a enfin dressé un bilan positif des conventionnements entre EPTB et communautés de communes .

La mission estime qu'il convient d'encourager la mutualisation des moyens d'assainissement au niveau de l'intercommunalité et de favoriser l'organisation de la distribution d'eau potable au niveau intercommunal , dans un but d'amélioration du service rendu en matière de distribution d'eau potable.

Elle estime toutefois que cet objectif ne saurait être atteint d'une manière immédiate et uniforme à l'échelle nationale. Ainsi, la mise en place d'une tarification unique au niveau intercommunal peut faire face, localement, à de nombreuses résistances, la baisse des tarifs dans certaines communes devant être compensée par leur augmentation dans les autres.

Les déchets ménagers, une compétence partagée entre communes et départements

Le code général des collectivités territoriales (CGCT) confie aux communes et à leurs groupements l'élimination des déchets des ménages (art. L. 2224-13), éventuellement en liaison avec les départements et les régions. On note en pratique que les départements participent de manière importante à cette compétence en zone rurale .

Les charges d'élimination des déchets sont financées par plusieurs taxes différentes selon les cas : taxe d'enlèvement des ordures ménagères, redevance d'enlèvement des ordures ménagères, redevance pour l'enlèvement des déchets de camping. Il existe dans le domaine des déchets d'autres taxes et redevances dont le produit revient aux collectivités, notamment la taxe de balayage, la redevance spéciale pour l'enlèvement des déchets assimilés ne provenant pas des ménages et la taxe sur les installations d'élimination des déchets non dangereux.

(6) Collecte et élimination des déchets ménagers

Les déchets municipaux représentent 725 kg par habitant et par an, dont 550 kg de déchets ménagers et assimilés et 175 kg de déchets de la collectivité 89 ( * ) . Alors que la collecte et le traitement de ces déchets ont longtemps été considérés sous le seul angle de l'hygiène et de la santé publique, l'impératif de protection de l'environnement a été le moteur de la mise en place d'une gestion modernisée des déchets avec notamment les lois de 1975 et de 1992 90 ( * ) .

L'élimination des déchets ménagers et assimilés revient aux communes et à leurs groupements (CGCT, art. L. 2224-13), qui éliminent également les déchets qu'ils produisent eux-mêmes. Elle constitue une compétence obligatoire des communautés urbaines et fait partie des six compétences dont au moins trois doivent être exercées par les communautés d'agglomération .

Le département (la région en Ile-de-France) joue un rôle de coordination par la définition et la mise en oeuvre d'un plan départemental (régional en Ile-de-France) d'élimination des déchets ménagers et assimilés. Il peut également participer directement à l'élimination des déchets ménagers par délégation des communes ou EPCI.

La gestion des déchets ménagers se subdivise en deux compétences : collecte et traitement, qui doivent respecter un double objectif de proximité et d'efficacité :

- la collecte est marquée par la nécessité d'aller au plus près des usagers mais doit respecter des logiques de desserte et de remplissage optimal des camions-benne ; en dehors des agglomérations, elle est souvent exercée par des syndicats intercommunaux de taille modérée ou par des communautés de communes, voire par des communes seules ;

- le traitement des déchets bénéficie d'économies d'échelle plus importantes, ce qui justifie l'implantation d'installations de haute performance au niveau de grandes intercommunalités , voire à l'échelle du département .

La distinction entre la collecte et le traitement demeure assez souple 91 ( * ) . Ainsi, selon les territoires, la gestion des déchèteries sera rattachée à la collecte ou au traitement.

Par ailleurs, les départements et les régions financent certains projets, notamment dans le cadre de procédures conjointes avec l'ADEME.

Exemple du département de la Creuse :

« Au titre de la gestion des déchets ménagers et assimilés, le Conseil général aide financièrement les collectivités qui réalisent des projets compatibles avec les données du Plan départemental de gestion des déchets ménagers et assimilés et entrant dans le champ d'application de l'accord cadre conclu entre l'ADEME et le département pour la période 2004-2009. » 92 ( * )

Enfin, l'Etat conserve un pouvoir normatif relatif à la fixation des conditions minimales d'exécution de ces services, notamment quant aux fréquences de collecte.

(7) Élimination des déchets non ménagers

Les professionnels sont responsables de l'élimination de leurs déchets.

La région adopte, par délibération du conseil régional, un plan régional ou interrégional d'élimination des déchets industriels spéciaux (CGCT, art. L. 541-13).

Enfin, l'Etat définit des plans nationaux d'élimination pour certaines catégories de déchets (CGCT, art. L. 541-11).

(8) La position de votre mission

La gestion des déchets est aujourd'hui un enjeu important des politiques environnementales menées par les collectivités . Le Grenelle de l'environnement fixe de nombreux objectifs chiffrés : réduction de la production d'ordures ménagères, recyclage, diminution des volumes enfouis ou incinérés.

S'agissant toutefois de la répartition de cette compétence entre les collectivités, il n'est pas apparu indispensable à votre mission, au cours de ses débats, de remettre en cause les dispositions actuelles. Les possibilités de transfert aux intercommunalités et au département sont en effet largement utilisées et permettent d'adapter les modes de gestion des déchets aux conditions propres à chaque territoire.

Proposition de la mission

- Renforcer les compétences des communautés de communes et des communautés d'agglomération afin de leur donner davantage de moyens pour peser sur l'aménagement du territoire et les questions environnementales, en particulier pour la gestion de l'eau et l'assainissement.

D. PROMOUVOIR LA FORMATION PERSONNELLE ET PROFESSIONNELLE ET PRÉPARER L'AVENIR

L'enjeu de la formation tout au long de la vie requiert la mobilisation de tous les acteurs publics. Chacun des échelons territoriaux joue ainsi un rôle important, aux côtés de l'Etat, aux différents maillons de la « chaîne éducative », de l'école maternelle jusqu'à l'université. Les régions, en particulier, conformément à leur vocation, sont appelées à s'affirmer dans ces missions stratégiques et de préparation de l'avenir, à travers notamment la consolidation des prérogatives qu'elles exercent déjà dans le domaine de la formation professionnelle des jeunes et des adultes.

Dans d'autres domaines comme la culture, la jeunesse ou le sport, massivement investis par les collectivités territoriales, l'addition des initiatives peut certes nuire à la lisibilité des interventions, mais s'avère le plus souvent indispensable pour satisfaire aux attentes de nos concitoyens. Pour vos rapporteurs, l'objectif de clarification des compétences doit alors être concilié avec la nécessaire prise en compte de la diversité des territoires.

1. Formation professionnelle et politique de l'emploi

La compétence régionale en matière de formation professionnelle s'est construite progressivement. Aujourd'hui, les régions sont actives dans ces politiques qui s'inscrivent parfaitement dans le rôle que vos rapporteurs souhaitent conférer aux régions pour la préparation de l'avenir. Il faut toutefois poursuivre la clarification des compétences entre l'Etat et les régions et renforcer le rôle de ces dernières dans le domaine de l'apprentissage.

Par ailleurs, afin de conférer aux régions un bloc de compétences solide et cohérent dans le domaine de l'emploi et de la formation professionnelle, gage d'une préparation active et efficace de l'avenir, il est proposé d'expérimenter dans des régions volontaires le transfert des compétences détenues par l'Etat dans le domaine de l'emploi.

Des régions actives dans le domaine de la formation professionnelle

La formation professionnelle qui était traditionnellement gérée par l'Etat et les partenaires sociaux a fait l'objet d'une décentralisation progressive en direction des conseils régionaux à partir de 1983.

A compter de cette date, et à travers les réformes successives, les régions se sont vues progressivement reconnaître une compétence de principe pour la mise en oeuvre des actions d'apprentissage et de formation professionnelle continue.

Deux étapes marquent cette construction. Tout d'abord, la loi quinquennale du 20 décembre 1993 relative au travail, à l'emploi et à la formation professionnelle qui a permis de franchir un palier en prévoyant la création d'un plan régional de développement des formations professionnelles des jeunes et le transfert des programmes antérieurement mis en oeuvre par l'Etat pour la formation et l'insertion des jeunes en difficulté.

Puis, la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et aux responsabilités locales qui a consacré la compétence des régions en matière de formation professionnelle . Les conseils régionaux ont désormais l'entière responsabilité de l'apprentissage et de la formation professionnelle des jeunes et des adultes à la recherche d'un emploi, ils assurent la formation des travailleurs sociaux et des auxiliaires de santé (infirmières, masseurs-kinésithérapeutes) et élaborent un schéma régional des formations sanitaires et sociales. Ils deviennent également les donneurs d'ordre exclusifs de l'association nationale pour la formation professionnelle des adultes (AFPA).

Cette construction progressive de la compétence régionale en matière de formation professionnelle s'inscrit dans une perspective plus large qui vise à confier au niveau régional des compétences stratégiques et de préparation de l'avenir, ce que votre mission avait déjà préconisé dans son rapport d'étape . Le renforcement du rôle de la région en matière de formation se poursuit d'ailleurs encore aujourd'hui avec le développement des interventions en direction des universités, domaine dans lequel les conseils régionaux ne veulent plus être considérés comme une force d'appoint mais bien comme un partenaire associé à la définition des intérêts stratégiques.

(1) Des interventions constantes de l'Etat en raison de l'enchevêtrement des compétences

Or, malgré ce transfert de compétences et la construction d'un bloc de compétences élargi confié aux régions, il convient de souligner que l'Etat a conservé de nombreux leviers d'action dans le domaine de la formation professionnelle : la compétence normative bien sûr, le contrôle de la formation continue, le financement mais aussi l'organisation des actions à portée générale intéressant l'apprentissage et la formation professionnelle continue.

Toutefois, le levier d'action principal à la disposition de l'Etat réside bien entendu dans sa capacité à définir la politique de l'emploi au plan national. Or, en raison du lien très étroit entre les politiques de l'emploi et de la formation professionnelle, l'Etat est amené à intervenir dans des domaines relevant de la compétence régionale, par exemple en finançant des stages destinés aux demandeurs d'emploi jeunes et adultes. Enfin, l'Etat exerce la tutelle du service de l'emploi qui depuis la loi n° 2008-126 du 13 février 2008 relative à la réforme de l'organisation du service public de l'emploi est placé sous l'autorité le Pôle emploi. Née de la fusion entre les Assedic et l'ANPE, cette institution nationale au statut juridique sui generis doit assurer l'indemnisation et le placement des demandeurs d'emploi.

Cette imbrication des compétences entre l'Etat et les régions est à l'origine de nombreuses difficultés, ou d'empiétements, par exemple dans le domaine de la politique d'apprentissage. Par deux fois, en 2005 (loi du 18 janvier 2005 de programmation pour la cohésion sociale) et 2006 (loi du 31 mars 2006 pour l'égalité des chances), les conseils régionaux ont ainsi vu leurs compétences remises en cause par l'Etat lors de la création du fonds national de modernisation de l'apprentissage dont l'objectif était de financer 500 000 apprentis en cinq ans, puis le développement de l'apprentissage junior. A ces deux occasions, le Gouvernement s'est justifié en soulignant sa volonté de développer et de dynamiser l'apprentissage, sans remettre en cause la compétence des conseils régionaux.

Face à cette situation confuse, la mission se propose de réaffirmer les compétences des régions en matière de formation professionnelle, domaine qui constitue un élément majeur des politiques structurantes devant être pilotées au niveau régional.

(2) Renforcer la compétence régionale en matière de formation professionnelle.

Tout d'abord, et compte tenu de l'enchevêtrement des interventions entre l'Etat et les régions, il convient de poursuivre la clarification des compétences . Trois ajustements techniques pourraient ainsi être mis en oeuvre afin de limiter les chevauchements institutionnels et renforcer la cohérence des missions confiées aux conseils régionaux.

L'Etat finance aujourd'hui les actions de formation professionnelle mises en oeuvre dans le cadre des ateliers pédagogiques personnalisés. Cette compétence pourrait être transférée aux conseils régionaux et compléter ainsi les actions de formation en direction des demandeurs d'emploi.

Une démarche identique pourrait être suivie à l'égard des programmes IRILL (insertion, réinsertion, lutte contre l'illettrisme) qui regroupent des actions en direction de publics fragiles. Ce transfert se justifie également par le fait que les régions mènent déjà des actions en matière de lutte contre l'illettrisme.

Enfin, le programme « Objectif cadres » qui a pour objet d'aider les techniciens les cadres intermédiaires et les demandeurs d'emploi à réaliser un parcours de formation leur permettant d'accéder à une certification de niveau II constitue une autre intervention de l'Etat dans le champ des compétences régionales, il pourrait également faire l'objet d'un transfert.

Proposition de la mission

- Transférer aux régions le financement des actions concernant les publics spécifiques : ateliers pédagogiques personnalisés (APP), gestion du volet illettrisme du programme IRILL et du programme « Objectif cadres »

Outre ces transferts de dimension technique, qui affirment la compétence de principe des conseils régionaux dans tous les domaines de la profession professionnelle, les régions pourraient acquérir de nouvelles compétences en matière d'apprentissage, renforçant ainsi leur rôle dans le domaine de la formation professionnelle .

Cette démarche poursuivrait un objectif de clarification des compétences, mais permettrait également de contribuer à la réduction des inégalités de répartition de la taxe professionnelle entre les différentes structures bénéficiaires, centres de formation des apprentis (CFA) et centres de formation professionnelle et de promotion agricoles (CFPPA).

Une étude réalisée en Île-de-France a mis en exergue le fait que les CFA qui proposent des formations supérieures, ou qui relèvent de l'industrie, bénéficient de ressources financières plus élevées que ceux qui appartiennent au secteur des services. Même s'il faudrait simultanément mesurer les coûts spécifiques liés à chacune des formations, les résultats de ces études ont été confirmés par d'autres exemples évoqués lors des différentes réunions de la mission, notamment par François Patriat. Ces inégalités sont en partie liées aux modes de répartition de la taxe d'apprentissage. En effet, près de 20 % du montant de la taxe d'apprentissage ne fait pas l'objet de voeu d'affectation de la part des entreprises qui laissent ainsi les organismes collecteurs de la taxe d'apprentissage (OCTA) compétents déterminer l'affectation des fonds.

Le recours de plus en plus fréquents des établissements d'enseignement supérieur (universités, grandes écoles) à cette ressource financière qu'est la taxe d'apprentissage rend d'autant plus nécessaire une clarification des modalités de répartition de ces crédits. Une telle évolution va au-delà de la question du rôle des conseils régionaux et englobe des questions relatives au rôle des chambres consulaires et des OCTA qui devront être évoquées dans le cadre de la réforme de la formation professionnelle pour laquelle un projet de loi spécifique a été annoncé par le Gouvernement.

Toutefois, afin de contribuer à clarifier cette situation, la mission propose de confier aux régions la responsabilité d'autoriser la création des centres de formation des apprentis afin de permettre aux conseils régionaux de disposer d'un pouvoir d'impulsion plus fort dans ce domaine très important. Cette compétence devra s'exercer dans sa plénitude, les régions seront donc chargées de financer la construction et l'entretien des bâtiments abritant ces centres de formation nouvellement autorisés.

Proposition de la mission

- Confier aux régions la responsabilité d'autoriser la création des centres de formation des apprentis (CFA) et des centres de formation professionnelle et de promotion agricoles (CFPPA) ; assurer la construction et l'entretien des bâtiments nécessaires.

Il s'agit à travers ces dispositions de réaffirmer la primauté de la compétence régionale dans l'ensemble du champ de la formation professionnelle.

Une expérimentation ambitieuse dans le domaine de l'emploi

La compétence des collectivités territoriales et leur capacité à gérer des actions de proximité ou d'adaptation des politiques publiques aux spécificités locale étant reconnues, la mission a souhaité tracer les contours d'une expérimentation ambitieuse dans le domaine de l'emploi .

Cette expérimentation se déroulerait dans une ou plusieurs régions volontaires, selon les règles déterminées par la Constitution et la loi organique n°2003-704 du 1 er août 2003 relative à l'expérimentation par les collectivités territoriales.

Cette expérimentation consisterait en un transfert à ces régions volontaires des compétences détenues par l'Etat en matière de politique de l'emploi , et notamment de celles relatives à la prise en charge des demandeurs d'emploi, ainsi que de toute action en lien avec la formation professionnelle. La région est en effet légitime à détenir l'ensemble des compétences relatives aux politiques d'insertion professionnelle qui constituent une priorité pour favoriser la formation et de reclassement professionnel des jeunes et des demandeurs d'emplois.

L'objet d'une telle démarche est de constituer un bloc homogène en matière d'emploi au niveau régional , en liaison avec les politiques départementales d'insertion, afin d'évaluer l'efficacité de ce dispositif plus cohérent en termes de répartition des compétences et d'action de proximité . La capacité des régions à établir un lien entre leur tissu économique et leur stratégie de développement pourra être mise à profit pour renforcer l'efficience de ces actions. La coordination de l'intervention de l'ensemble des acteurs locaux dans le cadre de cette politique globale en faveur de l'emploi pourrait être assurée au sein du conseil régional des exécutifs dont la mission propose la création.

Cette démarche permettra de mettre en valeur la capacité d'innovation des régions, en particulier, et des collectivités territoriales en général, en matière de politique de l'emploi. De nombreux exemples peuvent d'ores et déjà illustrer cet état de fait, notamment dans le cadre de la contribution des collectivités territoriales au plan de relance de l'économie. En Franche-Comté, le conseil régional a instauré un dispositif qui améliore l'accord national sur l'indemnisation du chômage partiel en le complétant par des périodes de formation. En Picardie, le conseil régional a lancé depuis le mois d'avril un dispositif visant à renforcer l'employabilité des salariés qui associe la région, les entreprises et les partenaires sociaux.

Proposition de la mission

- Transférer aux conseils régionaux volontaires, à titre expérimental, les compétences détenues par l'Etat en matière de politique de l'emploi

Votre mission ne mésestime pas les obstacles juridiques liés à la mise ne oeuvre d'une expérimentation d'une telle dimension, notamment celles liées aux transferts vers les régions des missions assurées par le Pôle emploi.

Elle considère toutefois qu'une telle expérimentation consacrerait la capacité des conseils régionaux à prendre en charge une politique globale dans le domaine de l'emploi.

2. Consolider l'action des collectivités territoriales dans le domaine de l'éducation

Dans le domaine de l'éducation, le bilan des derniers mouvements de décentralisation et de l'état actuel de la répartition des compétences entre l'Etat, les régions, les départements et les communes apparaît comme globalement satisfaisant : une remise en question pourrait soulever plus de difficultés qu'elle n'en réglerait. Il est néanmoins encore possible d'aller plus loin dans la clarification des compétences.

Une compétence de l'Etat dont l'exercice est partagé avec les différents niveaux de collectivités


• L'éducation constitue un domaine d'exercice partagé des compétences entre l'Etat et les collectivités territoriales , ces dernières étant « associées » au développement de ce service public national 93 ( * ) .

Le partage des compétences est organisé selon un principe en apparence simple : l'Etat est le responsable exclusif de l'organisation pédagogique des enseignements, il recrute et gère les personnels enseignants et d'encadrement notamment ; les collectivités territoriales ont la charge, principalement, de la gestion des bâtiments scolaires - la construction, l'équipement, l'entretien, et le fonctionnement des écoles pour les communes depuis les lois scolaires du dix-neuvième siècle, des collèges pour les départements et des lycées pour les régions depuis les lois de 1983 - ainsi que des personnels de services y exerçant leurs missions 94 ( * ) . Elles ont également développé, sur la base du cadre légal existant et/ou du volontarisme local, des activités et services complémentaires (restauration scolaire, internats, transports, activités périscolaires, aides aux élèves et aux familles, etc.).

En outre, les interventions des intercommunalités se développent (via un transfert de la compétence à un EPCI ou - le plus souvent - à un syndicat à vocation scolaire, ou bien sans que le cadre juridique soit véritablement formalisé 95 ( * ) ), dans le cadre de regroupements pédagogiques permettant, en zone rurale notamment, de proposer aux familles une offre de services scolaires et périscolaires plus large et plus attractive.


• Comme votre mission l'a souligné dans son rapport d'étape, la décentralisation dans le domaine éducatif a permis d'améliorer de façon significative la qualité du service rendu aux citoyens, illustrant la nécessité de rapprocher le niveau de prise de décision de la réalité du terrain.

Néanmoins, ainsi que l'a mis en évidence l'étude réalisée à la demande de la mission, cette forme de « segmentation » des responsabilités contraint chaque niveau de collectivités à mobiliser des moyens et compétences similaires , en matière de planification, d'expertise, de programmation des investissements et des équipements, de gestion technique des établissements, de gestion administrative des personnels techniciens, ouvriers et de service, d'équipes de réparation ou de maintenance, etc. Cette organisation, même si elle ne présente pas de dysfonctionnements majeurs, ne favorise pas les mutualisations au niveau d'un territoire. Notons toutefois, qu'à la faveur des nouveaux transferts intervenus sur le fondement de la loi du 13 août 2004, les départements et régions ont cherché à optimiser la gestion des personnels TOS, en mettant en place, par exemple, des « équipes mobiles » intervenant sur plusieurs établissements.


• Par ailleurs, la coordination entre chaque niveau de collectivités territoriales et l'Etat peut apparaître insuffisante. Si les collectivités financent près d'un quart de la dépense publique d'éducation , elles ont souvent le sentiment de ne pas être suffisamment associées, par l'Etat, aux décisions dont elles auront à assumer les coûts, direct ou indirect.

La loi du 13 août 2004 a tenté de répondre à cette situation en instituant, au niveau national, un conseil territorial de l'éducation nationale 96 ( * ) . Cependant, les instances existant au niveau local ont un fonctionnement inadapté pour assurer cette fonction d'échange et de coordination. Or, certaines décisions prises - par exemple en matière d'ouverture ou de fermeture de classes dans le premier degré, de mise en place de la semaine de quatre jours ou des études surveillées après la classe - concernent non seulement les communes, mais également les départements, en raison de leur incidence directe sur l'organisation des transports scolaires.

Ce manque de coordination entraîne également des articulations insuffisantes et parfois des chevauchements d'interventions entre les dispositifs de l'Etat et ceux des collectivités, dans certains domaines comme l'action médico-sociale, l'information et l'orientation ou l'accompagnement éducatif. Enfin, l'Etat continue de peser sur les compétences transférées : il reste par exemple responsable de l'affectation des élèves alors que les communes pour les écoles, et les départements pour les collèges depuis la loi de 2004, sont chargés de la sectorisation.

a) Les pistes de clarification, dans le respect de l'expérience acquise par chacun des échelons territoriaux


• Il ressort des travaux de la mission que le partage des compétences dans le domaine éducatif, même s'il ne favorise pas les mutualisations et la cohérence territoriale des interventions dans certains domaines, ne présente pas de problème majeur en termes de lisibilité et d'efficacité de l'action publique, chacun des niveaux assumant ses missions de façon satisfaisante.

Si l'attachement des maires à l'« école communale », premier service public de proximité, est ancien et viscéral, la décentralisation s'est désormais doublée d'une attention grandissante des conseils généraux et régionaux aux collèges et lycées, auxquels ils consacrent, respectivement, près de 8 % et 20 % de leur budget (soit environ 85 euros par habitant dans les deux cas).

Aussi, bien que l'idée de confier à un seul échelon la gestion des établissements d'enseignement secondaire ait pu être évoquée dans le débat public 97 ( * ) ou au cours des travaux de votre mission, celle-ci a constaté que l'opportunité d'une redistribution des compétences suscitait des réserves et des interrogations, en raison de l'expérience acquise par chacun des niveaux de collectivités et du caractère incertain des gains en termes d'efficacité et d'efficience qu'il conviendrait d'en attendre . Pour le président de l'Association des régions de France, un rapprochement de la gestion des collèges et lycées présenterait sans doute plus d'inconvénients que d'avantages et ne serait pas une source réelle d'économie. Selon M. Jean-Jack Queyranne, également entendu par la mission, la compétence des régions en matière de gestion des lycées est cohérente avec leurs attributions en direction des jeunes, en matière de formation professionnelle et d'apprentissage.


• Si elle a écarté toute « remise à plat » de la répartition des compétences dans un domaine qui a avant tout besoin de stabilité pour bien fonctionner, la mission a envisagé, néanmoins, des voies de clarification :

- Tout d'abord, dans le prolongement du transfert des personnels TOS des collèges et lycées aux départements et aux régions, le transfert à ces mêmes collectivités des personnels d'intendance (les gestionnaires) chargés notamment de l'encadrement des TOS et de la gestion « matérielle » dans les établissements scolaires contribuerait à renforcer la cohérence globale des domaines d'intervention décentralisés 98 ( * ) et permettrait d'assurer une plus grande continuité de la « chaîne hiérarchique ». Reste néanmoins que le chef d'établissement exerce également, en parallèle du président de l'exécutif local qui recrute et rémunère les personnels, une autorité « fonctionnelle » sur les agents exerçant au sein de l'établissement scolaire.

- En matière de médecine scolaire , la mission, tout en réaffirmant la responsabilité première de l'Etat dans ce domaine crucial, a proposé plus haut, dans l'analyse de la clarification des compétences en matière de santé, d'ouvrir une possibilité d'expérimentation de l'exercice de la compétence par une collectivité territoriale volontaire , dans un souci d'efficacité et afin d'assurer une meilleure coordination de ces actions avec les interventions des départements en matière de protection maternelle et infantile 99 ( * ) notamment.

- Enfin, s'agissant de l' orientation , votre mission relève que la mission commune d'information du Sénat sur la politique en faveur des jeunes 100 ( * ) , qui a présenté ses conclusions le 26 mai, a formulé des propositions afin de remédier à un besoin de coordination entre les différents acteurs et dispositifs dans ce domaine (qui relèvent de 22 réseaux différents). Elle a préconisé, d'une part, de poursuivre les avancées engagées en vue de la construction d'un service public de l'orientation et d'une « coordination locale » (sans en figer l'échelle géographique) ; elle a proposé, d'autre part, de généraliser les expériences locales réussies répondant à une logique de « guichet unique » pour simplifier les démarches d'orientation et « aiguiller » les jeunes vers les structures plus spécialisées, citant l'exemple des « plateformes régionales multiservices d'information » mises en place en Rhône-Alpes (Pôle Rhône-Alpes de l'orientation) ou Nord-Pas-de-Calais (Plateforme régionale d'information sur les métiers), en partenariat avec les régions et l'Etat notamment, et prenant appui sur le plan régional de développement des formations professionnelles.

Proposition de la mission

- Transfert aux collectivités de rattachement des gestionnaires chargés de l'encadrement des personnels TOS dans les collèges et lycées.

3. L'enseignement supérieur et la recherche : des enjeux clés pour l'attractivité et le développement des territoires

Une compétence de l'Etat qui s'appuie sur les concours croissants des collectivités territoriales

Bien qu'il s'agisse, aux termes de la loi, d'une compétence étatique, la politique d'enseignement supérieur et de recherche a bénéficié dans les faits, dès les années 1980, du concours financier croissant des collectivités territoriales, et en particulier des régions . Celles-ci sont intervenues sur leur libre volonté, mais aussi en réponse aux sollicitations dont elles ont pu faire l'objet, notamment de la part de l'Etat, pour faire face aux besoins liés à la massification de l'enseignement supérieur.

La contribution financière des collectivités locales représente environ 6 % de la dépense nationale d'enseignement supérieur (1,9 milliard d'euros en 2006) et a été multipliée par quatre en vingt ans. Les régions consacrent en moyenne 1,7 % de leur budget à l'enseignement supérieur et 2,2 % à la recherche et à l'innovation, avec de fortes disparités entre elles, compte tenu de la concentration territoriale de l'offre de formation et de recherche.

Les interventions des collectivités s'inscrivent, pour partie, dans le cadre de la contractualisation avec l'Etat (contrats de projet Etat-région) 101 ( * ) , sous la forme d'investissements principalement : elles portent sur des opérations d'immobilier universitaire, y compris de logement des étudiants (dans le cadre du plan Université 2000 dans les années 1990, du plan « U3M » et plus récemment de l'opération Campus), le soutien à la réalisation d'équipements scientifiques et de recherche, à la mise en réseau des acteurs dans le cadre des « politiques de site » (accompagnement des pôles de compétitivité, des pôles de recherche et d'enseignement supérieur (PRES), des réseaux thématiques de recherche avancée (RTRA)), aux stratégies d'innovation et aux actions de valorisation et de transfert de technologie (plates-formes partenariales, accompagnement des « jeunes pousses », agences régionales de l'innovation comme en Aquitaine ou en Alsace, etc.), aux initiatives de culture scientifique, technique et industrielle, etc.

Le volontarisme local a également répondu à un souci d'aménagement du territoire et de répartition de l'offre de formation. Des départements, ainsi que des villes, se sont montrés particulièrement actifs, dès le milieu des années 1980, pour appuyer la réalisation de projets d'implantation d'antennes universitaires, d'établissements autonomes ou d'IUT 102 ( * ) , en dehors des grandes métropoles régionales notamment.

Il résulte de ces initiatives, dans le cadre des CPER, des imbrications en termes de financements et de maîtrise d'ouvrage , comme l'a relevé l'étude réalisée à la demande de la mission, voire parfois un manque de vision stratégique sur l'offre globale de formation au niveau du territoire.

En outre, au-delà des CPER, les champs d'intervention des collectivités se sont progressivement enrichis et diversifiés : des régions, des départements ou des agglomérations ont engagé des actions parallèles ou complémentaires à celles de l'Etat et des CROUS 103 ( * ) en faveur des aides aux étudiants (bourses de mobilité, bourses doctorales, aide au financement d'équipement informatique comme en Région Centre), de la vie étudiante (accès à la santé, aux activités et équipements culturels et sportifs, soutien financier aux bibliothèques universitaires, transport, logement et restauration) ou encore de l'accueil des chercheurs étrangers ou du financement de chaires d'excellence. Comme le souligne l'étude précitée, c'est notamment dans ces domaines que l'on constate le plus d' imbrications et de croisements d'interventions nationales et locales, au détriment de la lisibilité, voire parfois de la cohérence globale, de ces actions . Pour autant, ces initiatives à géométrie variable contribuent également, en s'additionnant, à enrichir l'offre proposée aux populations étudiantes et enseignantes sur un territoire donné.

a) Une coordination à renforcer en réaffirmant le rôle des régions sur ces politiques stratégiques


• La responsabilité de l'Etat en matière d'enseignement supérieur et de recherche, reste primordiale et n'est nullement remise en cause. Dans le cadre de ses attributions « régaliennes » (définition de la politique nationale, habilitations des formations, monopole de la collation des grades et diplômes, gestion des enseignants-chercheurs), il est en effet le garant de l'excellence académique et scientifique des programmes, de la cohérence nationale de l'offre et de l'équité sur l'ensemble du territoire.


• En parallèle, cependant, les collectivités territoriales, et en particulier les régions , sont désormais des acteurs incontournables , aux côtés des acteurs privés. Celles-ci demandent à être reconnues comme de véritables partenaires pour la définition d'intérêts stratégiques , à l'instar des collectivités d'un grand nombre de nos pays voisins (Italie, Espagne, Allemagne...), et non seulement des « forces d'appoint » sur les questions immobilières et financières, pour pallier le désengagement de l'Etat.

La légitimité de leur intervention est largement reconnue : les politiques de formation, de recherche et d'innovation sont en effet des enjeux clés pour la compétitivité, l'attractivité et le rayonnement des territoires .

Par ailleurs, comme le souligne un rapport présenté par M. Jean-Pierre Duport devant le Conseil économique et social 104 ( * ) , les mutations en cours du paysage universitaire et de recherche - avec la « territorialisation » de ces politiques dans le cadre des PRES notamment, le renforcement de l'autonomie des établissements d'enseignement supérieur et l'affirmation de leur mission d'insertion professionnelle des étudiants - rendent nécessaires, en même temps que la recherche d'une plus grande visibilité internationale (par la constitution de pôles bénéficiant d'une « taille critique »), l' ancrage territorial des établissements et leur ouverture sur l'environnement local , au contact des bassins d'emploi, des milieux économiques et des collectivités locales. Rappelons que la loi du 10 août 2007 relative aux libertés et responsabilités des universités 105 ( * ) a fait un premier pas, encore timide, vers une participation des collectivités à la définition des politiques de formation, en prévoyant que deux à trois de leurs représentants (dont au moins un représentant du conseil régional) siègent au conseil d'administration des établissements.


• Dans ce contexte, la mission n'a pas souhaité que la réaffirmation des prérogatives des régions et des collectivités dans le domaine de l'enseignement supérieur passe par le transfert, en leur faveur, du patrimoine immobilier universitaire 106 ( * ) . En effet, l'affirmation de l'autonomie des établissements va conduire à les responsabiliser en matière de gestion des bâtiments : la loi du 10 août 2007 a ainsi prévu un transfert à ceux qui en feraient la demande des biens mobiliers et immobiliers de l'Etat qui leur sont affectés. Par ailleurs, un tel transfert peut susciter des incertitudes, au sein de certaines régions, étant donné l'ampleur des investissements nécessaires et du risque de les placer dans une logique gestionnaire plutôt que stratégique.


• Néanmoins, afin de réaffirmer le partenariat avec les collectivités, dans le respect des attributions de l'Etat et de l'autonomie des établissements, et de clarifier l'exercice des compétences, sans préjudice des initiatives des autres échelons, il ressort des travaux de la mission que la région , échelon des politiques stratégiques et de préparation de l'avenir , constitue le niveau pertinent pour assurer un rôle de « chef de file » des interventions locales en faveur de l'enseignement supérieur et de la recherche. La forte connexion de ces enjeux avec les compétences des régions en matière de formation professionnelle, de développement économique ou d'aménagement du territoire plaide également en ce sens.

Rappelons que la loi a déjà consacré le rôle de la région en matière de recherche et de développement technologique, puisque celle-ci est « associée à l'élaboration de la politique nationale » et « participe à sa mise en oeuvre » 107 ( * ) ; presque toutes les régions se sont dotées, en outre, d'un comité consultatif de recherche et de développement technologique, prévu à l'article L. 4252-3 du CGCT. Par ailleurs, « dans le cadre des orientations du plan national, la région peut définir des plans régionaux de développement des formations de l'enseignement supérieur et déterminer des programmes pluriannuels d'intérêt régional en matière de recherche » et elle est « consultée sur les aspects régionaux de la carte des formations supérieures et de la recherche » (article L. 214-2 du code de l'éducation), sans que ces dispositions soient devenues opérationnelles en l'absence de formalisation d'une telle « carte » des formations supérieures.

A l'instar de la démarche initiée en 2005 par le conseil régional de Rhône-Alpes, la région serait chargée d'élaborer un schéma régional de l'enseignement supérieur et de la recherche , outil de programmation permettant de décliner, d'une façon opérationnelle, les principaux objectifs et engagements dans les différents volets (vie étudiante, logement, information et orientation professionnelle, structuration de l'offre de formation et des acteurs, soutien à la recherche, innovation, culture scientifique et transfert de technologie...), et servant de base à la contractualisation pluriannuelle avec les établissements et organismes de recherche. Comme le soulignait un rapport de l'inspection générale, l'émergence de tels schémas régionaux « marque un saut qualitatif par rapport aux actions passées et non le simple passage à un degré d'implication supérieur » 108 ( * ) des régions.

La coordination entre les actions de chacun des niveaux de collectivités est une priorité dans ce cadre : elle trouverait notamment à s'exercer au sein du conseil régional des exécutifs dont votre mission préconise la mise en place. En effet, l'addition des initiatives est une richesse et une nécessité compte tenu de la pluralité des champs d'intervention et de la diversité des territoires :

- les agglomérations sont appelées à intervenir, au titre de leurs compétences de proximité et d'aménagement urbain, en faveur de l'accueil des étudiants et enseignants et de la vie étudiante (logement 109 ( * ) , accès au sport et à la culture), en particulier dans les centres universitaires denses ;

- les départements , en tant que garants des solidarités sociales et territoriales, sont davantage fondés à intervenir dans les zones les plus éloignées des grands pôles universitaires.

En outre, la mission souligne la nécessité de favoriser, à l'image de la structuration des PRES, la coordination à l'échelle interrégionale , dans les régions les moins pourvues en établissements d'enseignement supérieur et centres de recherche, afin d'atteindre la « taille critique » nécessaire pour les actions engagées dans ces domaines, ou bien la coordination à l'échelle métropolitaine , dans les grands pôles universitaires. Comme la mission a pu l'entendre lors de ses déplacements à Lyon ou Bordeaux, la qualité du système d'enseignement supérieur et de recherche est en effet un attribut majeur du rayonnement des grandes métropoles et de leur attractivité.


• Enfin, dans le respect de l'autonomie des universités et des prérogatives de l'Etat en matière d'habilitation des diplômes, il convient d' associer les régions à la définition de la carte des formations supérieures professionnalisantes . Lors de son audition devant la mission, M. Adrien Zeller, président de la région Alsace, a notamment souhaité une plus grande implication des régions dans l'élaboration des licences professionnelles, qui relève des universités, en lien avec les milieux professionnels concernés. Cela permettrait de consolider les régions dans leur rôle de partenaire stratégique, de renforcer la cohérence de l'offre de formation et de mieux articuler celle-ci avec les besoins de l'économie et du territoire.

Propositions de la mission

- Confier à la région un rôle de « chef de file » des interventions locales en faveur de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation, en partenariat avec l'Etat (élaboration d'un schéma régional de l'enseignement supérieur et de la recherche et contractualisation avec les établissements), ainsi que la coordination, dans ce cadre, avec les agglomérations pour les actions relatives à la vie étudiante, ou avec les départements.

-  Associer les régions à la définition de la carte des formations supérieures professionnalisantes, en étroite collaboration avec l'Etat.

4. La décentralisation culturelle : renforcer la coordination des interventions dans le respect des initiatives locales et de la diversité des territoires

Le domaine culturel a été massivement investi par les collectivités territoriales de tous niveaux : les élus locaux y sont très attachés et l'addition des initiatives et des financements y est bien souvent vitale. La coordination des initiatives doit toutefois être améliorée.

Un foisonnement d'initiatives parfois « désordonnées »

Dans l'esprit du législateur, la décentralisation en matière culturelle a répondu à une logique non pas de « blocs de compétences » mais d' exercice conjoint d'une compétence générale par chacun des niveaux de collectivités publiques . Tel a été le cas, avec parfois quelques nuances, dans les domaines des archives 110 ( * ) , de la lecture publique 111 ( * ) , du patrimoine 112 ( * ) , de la gestion des musées, des enseignements artistiques et des arts plastiques ou encore de l'archéologie préventive, l'Etat restant, dans tous les cas, le garant de la cohérence nationale, par l'édiction de règles et l'exercice du contrôle scientifique.

Toutefois, l'action culturelle locale ne s'est pas limitée aux transferts de compétences et relève, pour grande partie, de la libre volonté des collectivités territoriales , dans le cadre de leur clause générale de compétence. Celles-ci ont massivement investi ce champ, y compris avant les premières lois de décentralisation. Elles engagent dans ce domaine des crédits plus de deux fois supérieurs au budget du ministère de la culture : d'après une récente étude 113 ( * ) , les dépenses culturelles locales représentent 7 milliards d'euros en 2006, avec un poids prépondérant des villes , propriétaires de la plupart des équipements culturels et monuments historiques (4,4 milliards d'euros pour les seules communes de plus de 10 000 habitants, soit en moyenne 8 % de leur budget), une émergence de l'action intercommunale (840 millions d'euros pour les groupements à fiscalité propre dotés de la compétence culture), et un appui, selon des modalités et niveaux d'engagement variables, des départements (1,3 milliard d'euros, soit en moyenne 2,2 % des budgets départementaux, avec un poids variant dans une proportion de 1 à 8) et des régions (556 millions d'euros, soit en moyenne 2,5 % des budgets régionaux, avec poids variant de 1,6 % à 4 %).

54 % des dépenses culturelles des départements concernent la conservation et la diffusion des patrimoines (archives et bibliothèques départementales, musées, soutien au patrimoine non protégé des communes) et 40 % regroupent essentiellement des subventions à des associations et à des communes ou leurs groupements en faveur de l'expression artistique et de l'action culturelle. Ce dernier domaine regroupe près de 78 % des dépenses des régions (via notamment des subventions aux communes ou leurs groupements et à des acteurs privés : soutien à la création, audiovisuel et cinéma, orchestres, théâtres, grands évènements et festivals, fonds régionaux d'art contemporain, formations artistiques...) ; 20 % des dépenses des régions concernent la conservation et la diffusion des patrimoines (monuments, archives, musées...).

66 % des EPCI ont adopté la compétence culturelle et les trois quarts sont « actifs » en matière culturelle (ayant ou non adopté la compétence) 114 ( * ) ; ils interviennent notamment dans le financement ou la gestion d'équipements structurants transférés (44 % sont des lieux de lecture publique, 17 % des écoles de musique, de danse ou de théâtre, 16 % des lieux de spectacle vivant), permettant un partage des « charges de centralité » pesant sur les villes, tout en favorisant un aménagement plus cohérent du territoire, une mise en réseau des structures voire une harmonisation des tarifs (par exemple pour les écoles de musique).

La décentralisation culturelle a été et reste ainsi un levier essentiel de la démocratisation de l'accès à la culture, les collectivités contribuant à la diffusion de l'action culturelle sur l'ensemble du territoire, à travers le soutien à un réseau de structures très dense. Elles ont souvent assuré la mise en oeuvre « opérationnelle » - et notamment le financement - des grandes politiques culturelles définies par l'Etat , par exemple pour le développement de l'enseignement musical ou de l'éducation artistique. Leur intervention est, en outre, de plus en plus sollicitée, dans le domaine de l'archéologie préventive, du patrimoine ou du spectacle vivant, pour pallier la faiblesse des crédits engagés par l'Etat.


• Reposant pour grande partie sur le volontarisme local, le paysage institutionnel de l'action culturelle, largement empirique , peut apparaître quelque peu « confus », « désordonné » et caractéristique de l'enchevêtrement des interventions de l'Etat et des différents échelons territoriaux.

D'après l'étude précitée sur les dépenses culturelles des collectivités locales, les subventions versées entre collectivités représentent 231 millions d'euros en 2006, soit 3,4 % des dépenses culturelles nettes locales.

Les subventions culturelles croisées entre les niveaux de collectivités locales

Source : « Les dépenses culturelles des collectivités locales en 2006 », Culture Chiffres, 2009

En outre, dans un rapport établi en 2003 à la demande de la commission des finances du Sénat 115 ( * ) , la Cour des comptes relevait un manque de cohérence entre les interventions et un empilement de dispositifs contractuels complexes , consommateurs de temps et de moyens. Ce diagnostic a été confirmé à l'occasion des « Entretiens de Valois » pour le spectacle vivant 116 ( * ) , engagés par le ministère de la culture, qui ont permis de relever, notamment, la multiplicité des guichets auxquels les acteurs culturels doivent s'adresser pour faire vivre leur institution ou monter leurs projets, ainsi que certaines divergences dans les attentes formulées par les différentes collectivités publiques, avec des cahiers des charges parfois contradictoires.


• En outre, en dépit de leur rôle incontournable pour le dynamisme culturel des territoires, les collectivités locales ont bien souvent le sentiment de n'être que des « guichets » possibles, le dialogue et le partenariat avec l'Etat restant perçu comme déséquilibré voire déresponsabilisant . Dans le rapport sur le bilan de la décentralisation rendu en 2000, notre collègue Michel Mercier pointait ainsi du doigt une certaine « instrumentalisation » des participations croisées par l'Etat, celui-ci prenant, de fait, le pilotage de projets bien qu'étant minoritaire dans leur financement.

Privilégier la voie de la contractualisation et du partenariat entre les acteurs


La clarification des responsabilités est un exercice délicat dans le domaine culturel : la logique de compétence « exclusive », appliquée à tel ou tel secteur de l'action culturelle, revêtirait bien souvent un caractère arbitraire, étant donné la diversité des situations locales ; elle pourrait avoir pour effet pervers de nuire à la réalisation de projets importants pour lesquels le partenariat entre plusieurs acteurs, qu'ils soient publics ou privés, s'avère indispensable. Comme cela a été souligné devant la mission, l'addition des initiatives et des financements est bien souvent « vitale » dans un domaine comme celui-ci, et contribue au foisonnement de la vie culturelle locale.

En outre, la mission est sensible à l'attachement des élus locaux , de tous niveaux de collectivités, à conserver une marge d'initiative et d'autonomie dans un domaine qui est un levier de cohésion sociale, d'expression d'une identité locale, d'attractivité, de rayonnement, de développement économique et touristique des territoires.

Pour autant, des voies de clarification sont à rechercher, ne serait-ce que pour assurer meilleure coordination entre les interventions des collectivités publiques et améliorer leur lisibilité .


• La voie de la contractualisation et les structures de partenariat entre les différents acteurs territoriaux - y compris, le cas échéant, les acteurs privés et les professionnels - offrent un cadre souple pour parvenir à cet objectif, tout en prenant en compte la diversité des situations locales et l'implication hétérogène de chacun des échelons d'un territoire à l'autre.

Certaines structures existent déjà et constituent des « outils » de la décentralisation culturelle.

Rappelons ainsi qu'à la demande des principales associations d'élus, la ministre de la culture et de la communication a « réactivé », en juillet 2008, le Conseil des collectivités territoriales pour le développement culturel 117 ( * ) , cadre de dialogue et d'échanges entre l'Etat et les collectivités au niveau national, permettant d'associer celles-ci à la définition des grandes politiques culturelles et de clarifier les bases d'un partenariat plus équilibré avec l'Etat.

Par ailleurs, la création des établissements publics de coopération culturelle (EPCC) 118 ( * ) a été pensée pour organiser, sur la base du volontariat, le partenariat entre l'Etat et les collectivités territoriales, ou seulement entre ces dernières, afin de créer et gérer des services publics culturels, en ayant la possibilité de s'associer à d'autres personnes morales (établissements publics, fondations...) et donc de partager les coûts entre les différents partenaires.

Il a semblé à la mission que la priorité, dans le domaine de la culture, allait vers la généralisation de la contractualisation via des outils ou lieux de concertation entre les acteurs territoriaux, en vue d'assurer le partage d'expérience, la coordination entre les différents niveaux de collectivités publiques par la clarification des responsabilités, la simplification de certaines modalités d'interventions financières et la définition d'objectifs partagés.

En ce sens, dans le domaine des enseignements artistiques de la musique, de la danse et du théâtre, notre collègue Catherine Morin-Desailly a recommandé, dans un récent rapport 119 ( * ) , l'institution d'une commission de coordination, à l'échelle régionale , afin de remédier aux difficultés d'articulation des interventions - légitimes et diverses d'un territoire à l'autre - de chacun des échelons, l'enseignement initial pour les communes et leurs groupements, l'équité d'accès via l'élaboration d'un « schéma départemental » pour ce qui concerne les départements et l'organisation des « cycles d'enseignement préprofessionnel initial » pour les régions.

Par ailleurs, dans le cadre du volet des « Entretiens de Valois » sur la clarification du rôle des acteurs publics, et sur la base du constat partagé rappelé plus haut, une première piste de travail, avancée en février 2009, a concerné la mise en place de « conférences » au niveau régional réunissant l'Etat, les collectivités territoriales et les professionnels. Les conclusions de ces réflexions devraient être rendues en juillet.

Cette coordination pourrait prendre appui, selon les domaines, sur l'élaboration de schémas régionaux (par exemple pour les enseignements professionnels artistiques), de conventions d'engagement pluriannuel précisant le rôle de chacun des partenaires, la constitution d'EPCC ou encore le lancement de nouvelles expérimentations - à la suite de celles engagées sur la base de la loi du 27 février 2002 relative à la démocratie de proximité, dans le cadre des « protocoles de décentralisation » ou de la loi du 13 août 2004 -, permettant de clarifier les champs d'intervention respectifs de chacun des échelons voire d'identifier des « chefs de file », dans le respect du principe de subsidiarité et de la diversité des territoires.

La mission note, par ailleurs, les attentes de nombreux élus ou acteurs du monde de la culture quant à une clarification du rôle de l'Etat , par son repositionnement sur ses missions essentielles (impulsion, grandes politiques nationales, conseil et expertise plutôt que prescription...) et le maintien de son engagement financier en faveur de la politique culturelle. La participation de l'Etat joue bien souvent un effet de levier et d'entraînement des autres financements, publics ou privés.

Proposition de la mission

- Généraliser des instances et outils de concertation entre les acteurs au niveau régional pour assurer, dans le respect des autonomies locales, la coordination des actions, la simplification de certaines modalités d'intervention financière et la définition d'objectifs partagés (conventions d'engagement pluriannuels, schémas régionaux, EPCC...).

5. Le sport et la jeunesse : répondre à un besoin de lisibilité

Tout comme pour le domaine culturel, tous les niveaux de collectivités ont investi le domaine du sport et de la jeunesse, aux côtés de l'Etat et du mouvement sportif. Une coordination de ces interventions serait néanmoins utile.

a) Un domaine d'interventions conjointes des collectivités territoriales, acteurs majeurs du développement du sport et des politiques de jeunesse

Le soutien au développement du sport et aux associations de jeunesse est caractérisé par les interventions conjointes des différents niveaux de collectivités publiques , facteur d'une certaine complexité dans le montage des projets et d'un manque de lisibilité dans l'exercice des responsabilités, par le recours, notamment, à la pratique de financements « croisés » et par l'instruction successive des dossiers par différents services.

Le législateur est resté, en effet, relativement silencieux sur les compétences confiées à chacun des échelons territoriaux, dans un domaine largement laissé à la libre volonté des collectivités locales, qui interviennent dans le cadre de leur clause de compétence générale ou de divers dispositifs contractuels (politique de la ville, etc.).

Ainsi, dans le domaine du sport, la loi n'encadre que la construction, l'entretien et la mise aux normes des équipements sportifs nécessaires à la pratique de l'éducation physique et sportive (EPS), dont la responsabilité incombe aux régions dans les lycées, aux départements dans les collèges et aux communes dans les écoles, par cohérence avec leurs prérogatives en matière scolaire ; elle charge également le département de favoriser le développement des sports de nature 120 ( * ) . La loi du 16 juillet 1984 121 ( * ) s'est limitée à prévoir que les collectivités territoriales et leurs groupements contribuent, aux côtés de l'Etat, des associations et fédérations sportives et du secteur privé, « à la promotion et au développement des activités physiques et sportives » , et qu'elles peuvent concourir au développement du sport de haut niveau 122 ( * ) .

Dans le domaine de la jeunesse, seule la loi du 22 janvier 2002 a mentionné explicitement la compétence de la collectivité territoriale de Corse pour conduire les actions en matière de promotion des activités physiques et sportives, mais aussi d'éducation populaire et d'information de la jeunesse 123 ( * ) .

Pour autant, les collectivités territoriales jouent un rôle prépondérant : aux côtés des financements privés issus du mouvement sportif, elles assument près des trois quarts du financement public du sport (90 % de cet effort relevant des communes), intervenant notamment pour la construction et l'entretien des équipements sportifs et les subventions aux 170 000 clubs sportifs et associations ; elles assurent, par ailleurs, l'essentiel du financement des centres de loisirs - organisés, dans la majorité des cas, par les municipalités ou EPCI - ou encore des centres régionaux ou points communaux d'information des jeunes. Elles sont soumises, dans ces champs d'intervention, aux normes et réglementations édictées par l'Etat et les fédérations sportives. Un alourdissement de leurs exigences peut avoir un impact financier parfois non négligeable pour les collectivités.

C'est pourquoi la mission s'est interrogée , à l'instar de plusieurs personnes auditionnées, sur le rôle des services déconcentrés de l'Etat et notamment des directions départementales de la jeunesse et des sports (DDJS) , dans un domaine relevant largement de l'initiative locale. Dans le cadre de la révision générale des politiques publiques (RGPP), la question du maintien de ces services mérite d'être clairement posée. Un transfert de leurs personnels et attributions aux collectivités devrait très rapidement être envisagé.

Renforcer la coordination entre les acteurs par des réponses adaptées aux spécificités des territoires

Comme pour l'action culturelle, les collectivités territoriales de tous les niveaux sont attachées à conserver une marge d'initiative pour intervenir en faveur du développement d'activités sportives et associatives qui sont des vecteurs de lien social et d'attractivité des territoires. En outre, la logique de répartition des compétences se heurte, là aussi, à des limites, en raison notamment des fortes disparités locales constatées dans ce domaine.


• Cependant, comme l'a fait observer M. Claudy Lebreton lors de son audition devant la mission, en évoquant l'idée d'un « schéma régional de compétences partagées », la clarification des compétences et responsabilités de chacun des niveaux de collectivités pourrait se faire par la voie d'un conventionnement au niveau territorial , qui permet d'apporter une réponse souple et adaptée à la spécificité des territoires. La désignation de « guichets uniques » ou de dossiers d'instruction uniques, pourrait conduire à simplifier et clarifier les modalités de financement des projets. Dans ce cadre, le conseil régional des exécutifs dont votre mission propose l'institution jouera un rôle majeur pour assurer la coordination des interventions.

Des voies de « spécialisation » des interventions de chacun des niveaux de collectivités se dessinent et pourraient être explicitées, via la désignation d'un « chef de file » en fonction des dossiers ou domaines d'intervention. En tenant compte du principe de subsidiarité et de la cohérence avec les autres compétences, il apparaît ainsi, dans le domaine du sport, que les communes sont les premiers interlocuteurs des clubs locaux tandis que les régions sont d'abord en relation avec les ligues et le soutien au développement du sport de haut niveau ; l'intervention du département pour favoriser l'accès aux sports des publics handicapés ou en insertion est cohérent avec leur rôle de garant des solidarités et leurs attributions exclusives.


• En matière d'équipements sportifs, la responsabilité de leur construction et de leur gestion pourrait être confiée aux communes et à leurs groupements - déjà propriétaires de près de 80 % des équipements et gestionnaires de 70 % d'entre eux 124 ( * ) - avec l'appui financier des départements ou des régions pour les grands équipements structurants.

Notons que cette compétence tend de plus en plus à être exercée à l'échelon intercommunal , dans un souci de mutualisation des moyens et d'aménagement cohérent du territoire. Certaines subventions sont d'ailleurs réservées aux équipements « d'intérêt communautaire », afin d'inciter les communes à transférer la compétence.

Cependant, les compétences des départements et des régions en matière d'équipements sportifs dans les collèges et lycées (qui représentent une dépense obligatoire pour les établissements dont ils ont la charge depuis les lois de 1983) sont suffisamment lisibles pour ne pas être remises en cause. Afin d'assurer, toutefois, une utilisation optimale de ces équipements et de garantir un bon usage des investissements publics, leur mise à disposition gagnerait à être favorisée en dehors des horaires de fréquentation par les publics scolaires, dans le cadre de conventions locales , comme cela se fait déjà par endroits.

Par ailleurs, il convient de bien rappeler que les collectivités territoriales sont tenues de verser une contribution financière, correspondant aux frais de fonctionnement de l'équipement, à la collectivité mettant à leur disposition les installations sportives dont elle est propriétaire 125 ( * ) .

Propositions de la mission

-  Instituer une contractualisation au niveau régional afin d'assurer la coordination des interventions et la simplification des modalités d'instruction et de financement des projets (via notamment la désignation de « chef de file » en fonction des domaines d'intervention, la création d'un guichet unique et d'une instruction unique).

-  Confier aux communes et à leurs groupements la construction et la gestion des équipements sportifs, sans préjudice de la responsabilité des départements et régions pour la construction d'installations sportives dans les collèges et lycées ; généraliser la mise à disposition des équipements des collèges et lycées par voie de conventions locales.

E. TABLEAU RÉCAPITULATIF DES PROPOSITIONS CONCERNANT L'ÉVOLUTION DES COMPÉTENCES DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

Compétences actuelles

Les propositions
de la mission

Communes et intercommunalités

Départements

Régions

Développement économique

Financement des régimes d'aides directes aux entreprises par convention avec la région

Mise en oeuvre des aides indirectes aux entreprises. Participation au capital d'une société de garantie. Création d'un fonds de garantie.

Financement des régimes d'aides directes aux entreprises par convention avec la région

Aides en faveur des entreprises en difficulté

Mise en oeuvre des aides indirectes aux entreprises. Participation au capital d'une société de garantie. Création d'un fonds de garantie.

Schéma régional de développement économique

Aides en faveur des entreprises en difficulté

Mise en oeuvre des aides indirectes aux entreprises. Participation au capital d'une société de garantie. Création d'un fonds de garantie.

- Renforcer le « chef de filat » de la région et créer par la loi une structure régionale de coordination du développement économique

- Créer un portail unique régional en faveur des aides à la création et au développement des entreprises qui rassemblerait tous les intervenants

- Créer par la loi une agence de développement économique dans chaque métropole

- 141- -

- Clarifier les domaines d'intervention des différentes collectivités en matière de développement économique (promotion, accueil des entreprises et commerce de proximité pour les communes et les intercommunalités, aménagement, attractivité et animation pour les départements, innovation, internationalisation et ingénierie financière pour les régions)

Aménagement
du territoire
et environnement

Infrastructures pour réseaux de télécommunication

Consultation sur le contrat de projet État-Région (CPER)

Fixation par voie contractuelle des orientations du schéma régional de développement et d'aménagement du territoire

Concession ou gestion directe des réseaux de distribution d'énergie et de gaz

Élimination des déchets ménagers et assimilés

Distribution de l'eau potable

Assainissement individuel et collectif

Inventaires locaux du patrimoine naturel

Zones de protections du patrimoine architectural et urbain

Infrastructures pour réseaux de télécommunication

Consultation sur le contrat de projet État-Région (CPER)

Fixation par voie contractuelle des orientations du schéma régional de développement et d'aménagement du territoire

Établissement d'un programme d'aide à l'équipement rural

Plan départemental ou interdépartemental d'élimination des déchets ménagers

Inventaires locaux du patrimoine naturel

Espaces naturels sensibles

Infrastructures pour réseaux de télécommunication

Élaboration du Contrat de plan Etat-Région (CPER) et du Schéma Régional de développement et d'aménagement du territoire (SRDAT)

Schéma interrégional de littoral

Schéma interrégional de massif

Gestion des fonds européens

Plan régional ou interrégional d'élimination des déchets industriels spéciaux

Inventaires locaux du patrimoine naturel

Plan régional pour la qualité de l'air

Parcs naturels régionaux et réserves naturelles régionales

- Rendre obligatoire l'élaboration d'un plan Région/Départements pour décliner les objectifs du CPER et intégrer les projets des autres collectivités

- Généraliser le transfert aux régions de la gestion des fonds européens

- Adopter des schémas régionaux spécifiques en matière de couverture numérique (téléphonie, haut et très haut débit, télévision numérique terrestre...)

- Maintenir à disposition des interommunalités et des départements une ingénierie publique

- Confirmer la vocation des départements à apporter conseils juridiques et techniques aux collectivités infradépartementales

- 142 -

- Coordonner les politiques environnementales au niveau de la région sur les sujets d'intérêt régional

- Renforcer les compétences des intercommunalités sur les questions environnementales, en particulier pour la gestion de l'eau et l'assainissement

Tourisme

Offices de tourisme

Schéma d'aménagement touristique départemental et Comité départemental de tourisme

Plan départemental des itinéraires de promenade et de randonnée

Schéma régional de développement du tourisme et Comité régional de tourisme

- Affirmer la compétence des communes et des intercommunalités pour l'accueil et la promotion locale

- Assurer le financement des équipements touristiques structurants par les communes, les intercommunalités et les départements avec le soutien des régions

- Élaborer une convention Région/ Départements/Intercommunalités pour préciser les champs d'intervention de chaque niveau de collectivité et des communautés

Transports

Financement, organisation et fonctionnement des transports urbains

Plan de développement urbain

Plan de transports urbains

Financement, organisation et fonctionnement des transports hors zones urbaines

Organisation des transports routiers interurbains

Organisation des transports ferroviaires régionaux

- Créer par la loi des structures régionales de coordination sous la forme d'autorités régionales organisatrices des transports « partenariales »

- Transférer à la région la totalité de la compétence transport interurbain

- Généraliser le versement transport pour les nouvelles autorités organisatrices de transport

Infrastructures

Voirie communale

Chemins ruraux

Participation au financement des infrastructures routière, autoroutières et LGV

Voirie départementale

Participation au financement des infrastructures routière, autoroutières et LGV

Schéma régional des infrastructures et des transports

Participation au financement des infrastructures routière, autoroutières et LGV

- 143 -

-Rappeler à l'Etat ses engagements et sa mission de financer seul les infrastructures d'intérêt national (LGV, autoroutes, routes nationales...)

- Attribuer aux collectivités territoriales des ressources financières nouvelles (généralisation de la taxe sur les poids lourds, transfert à l'AFITF et aux collectivités territoriales de la part de l'État dans le produit des amendes pour infraction au code de la route, mise en place d'une taxation des plus-values foncières, mise en place d'une modulation des péages ferroviaires pour les TER)

- Instaurer un livret d'épargne populaire de financement des infrastructures de transport ouvrant la voie à des prêts bonifiés permettant le financement des grandes infrastructures par les collectivités territoriales

Éducation

Construction, entretien et fonctionnement des écoles - personnels ATSEM

Détermination des secteurs de recrutement des écoles publiques

Cantine scolaire, études surveillées ; service minimum d'accueil

Construction, entretien et équipement des collèges - Accueil, restauration et hébergement des élèves - Gestion des TOS

Détermination des secteurs de recrutement des collèges

Accord sur le schéma prévisionnel des formations pour la partie collèges

Construction, entretien et équipement des lycées et établissements d'éducation spéciale - Accueil, restauration et hébergement des élèves - Gestion des personnels TOS

Schéma prévisionnel des formations des collèges et lycées

- Transférer aux collectivités de rattachement les personnels d'intendance chargés de la gestion des TOS

Enseignement supérieur, recherche
et innovation

Maîtrise d'ouvrage des constructions universitaires (par délégation)

Aides sociales spécifiques aux étudiants

Construction et équipement des logements destinés aux étudiants (sur la base du volontariat)

Maîtrise d'ouvrage des constructions universitaires (par délégation)

Aides sociales spécifiques aux étudiants

Maîtrise d'ouvrage des constructions universitaires (par délégation)

Aides sociales spécifiques aux étudiants

Possibilité de définir des plans régionaux de développement des formations de l'enseignement supérieur et de déterminer des programmes pluriannuels d'intérêt régional en matière de recherche

Consultation sur aspects régionaux de la carte des formations de l'enseignement supérieur et de la recherche

Participation à la mise en oeuvre de la politique nationale de recherche et de technologie

- 144 -

- Confier à la région un rôle de chef de file en faveur de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation, en partenariat avec l'Etat

- Associer les régions à la définition de la carte des formations supérieures professionnalisantes

Culture

Bibliothèques municipales ou intercommunales - Archives - Musées - Services d'archéologie

Propriété de monuments historiques

Inventaire général du patrimoine culturel (par délégation)

Enseignement initial de la musique de la danse et du théâtre

Bibliothèques départementales de prêt - Archives départementales (et, par délégation ou convention, archives communales, intercommunales ou régionales) - Musées - Services d'archéologie

Propriété de monuments historiques - Gestion (par expérimentation) des crédits d'entretien et de restauration

Inventaire général du patrimoine culturel (par délégation)

Schéma départemental de développement des enseignements artistiques

Archives - Musées - Services d'archéologie

Propriété de monuments historiques

Inventaire général du patrimoine culturel

Enseignements artistiques : organisation et financement des cycles d'enseignement professionnel initial

- 145 -

- Privilégier la concertation entre les acteurs, dans le respect des initiatives locales et de la diversité des territoires au travers d'une contractualisation au niveu régional

Sport

Subvention aux associations et clubs sportifs

Équipements sportifs

Subvention aux associations et clubs sportifs

Équipements sportifs (dans les collèges)

Subvention aux associations et clubs sportifs

Équipements sportifs (dans les lycées)

- Substituer une contractualisation au niveau régional (désignation de « chefs de file » ; création d'un guichet et d'une instruction uniques)

- Confier la construction et la gestion des équipements sportifs aux communes et à leurs groupements (à l'exception de ceux des collèges et lycées)

Action sociale
et santé

Centre communal ou intercommunal d'action sociale

(+ par délégation du département)

Délibération dans le cadre de la création d'un établissement social ou médico-social



Crèches, garderies, accueil des sans abri

Présidence du conseil d'administration des établissements publics de santé communaux

Cimetières et pompes funèbres

Bureaux municipaux d'hygiène

Gestion de l'APA (y compris hébergement en maison de retraite)

Gestion du RMI/RMA puis du RSA

Aides aux personnes handicapées (prestation de compensation du handicap)


Aide sociale à l'enfance (ASE)

Financement des équipes de prévention spécialisées de la protection judiciaire de la jeunesse

Présidence du conseil d'administration des établissements publics de santé spécialisés ou départementaux

Centres et consultation de PMI et de planification familiale

Objectifs particuliers de santé

Commissions exécutives des agences régionales de l'hospitalisation

Financement d'équipements sanitaires (expérimental)

- Confier aux ARS et aux départements l'élaboration conjointe d'un schéma prescriptif fixant des objectifs pluriannuels partagés dans le domaine médico-social


- Prévoir une contractualisation entre les différents acteurs, afin de déterminer en commun les modalités d'exécution des orientations fixées par le schéma départemental médico-social

- Transférer aux départements le financement de l'allocation adultes handicapés (AAH) et de l'ensemble du financement des ESAT

- 146 -

- Créer dans chaque département une commission de concertation réunissant des représentants des communes, des EPCI, du conseil général et des caisses d'allocations familiales

- Transférer aux départements et régions volontaires, à titre expérimental, la médecine scolaire

Formation professionnelle
et emploi

Association à l'élaboration du plan régional de développement des formations professionnelles (PRDFP)

Association à l'élaboration du plan régional de développement des formations professionnelles (PRDFP)

Politique régionale de formation professionnelle et d'apprentissage

Adoption et suivi du plan régional de développement des formations professionnelles (PRDFP)

Bourses pour la formation des travailleurs sociaux

Organisation et financement des stages de l'AFPA

- Transférer aux régions le financement des actions concernant les publics spécifiques :
ateliers pédagogiques personnalisés, gestion du volet illettrisme du programme « Insertion, réinsertion, lutte contre l'illettrisme », dispositif « objectif cadres »



- Confier aux régions la responsabilité d'autoriser la création des centres de formation des apprentis (CFA) et des centres de formation professionnelle et de promotion agricoles (CFPPA) ; assurer la construction et l'entretien des bâtiments nécessaires

- Transférer aux conseils régionaux volontaires, à titre expérimental, les compétences détenues par l'Etat en matière de politique de l'emploi

- 147 -

Logement
et
urbanisme

Offices publics de l'habitat

Programme local de l'habitat

Aires d'accueil des gens du voyage

Commissions d'attribution des logements sociaux

Construction et équipement des logements destinés aux étudiants

Offices publics de l'habitat

Plan départemental de l'habitat

Schéma départemental d'accueil des gens du voyage

Plan départemental d'actions pour le logement des personnes défavorisées

Prise en charge du logement étudiant en Île-de-France

- Appeler à la mise en cohérence des différents documents d'urbanisme et de planification (PLU, PLH, PDU)
en lien avec les SCOT

TROISIÈME PARTIE : POUR UNE REFONDATION DES FINANCES LOCALES

Comme il a été rappelé dans le rapport d'étape, la situation actuelle des finances locales se caractérise par un cadre budgétaire et comptable modernisé, des règles prudentielles fortes et une situation saine. Sans entrer dans le débat, récurrent, sur l'absence de juste compensation des charges transférées par l'Etat aux collectivités, soit de manière légale au travers des lois de décentralisation, soit insidieusement dans le champ des compétences qui restent du domaine de l'Etat, votre mission avait principalement critiqué l'inadaptation des ressources des collectivités et leur dépendance vis-à-vis de décisions externes .

A partir de ce constat, elle a posé plusieurs principes pour orienter la réforme :

- les impôts doivent être spécialisés sur un nombre limité de collectivités, pour être lisibles et compréhensibles par le contribuable ;

- les prises en charge par l'Etat de contributions dues localement doivent être limitées, voire supprimées ;

- chaque collectivité doit pouvoir recourir à la fois au contribuable ménages et au contribuable entreprises. De ce point de vue, la mission a, dans son rapport d'étape, jugé indispensable la conservation d'un impôt économique, expression du lien qui doit être préservé entre les territoires et les entreprises ;

- les collectivités doivent s'appuyer largement sur des impôts de stocks, de préférence à des impôts de flux, afin de respecter la contrainte de l'équilibre auquel doit satisfaire le vote en début d'année des budgets locaux ;

- les assiettes doivent être larges pour éviter la concentration de l'impôt et les cumuls d'impôt sur une même assiette doivent être limités ;

- la capacité de fixer les taux doit être réelle pour la collectivité.

La mission a souhaité approfondir ces principes, en les confrontant aux nombreux rapports et études qui ont abordé ces dernières années le sujet des finances locales, principalement les rapports de M. Philippe Valletoux 126 ( * ) et de M. Olivier Fouquet 127 ( * ) .

Les finances locales souffrent de déséquilibres et d' archaïsmes , souvent dénoncés et qui se sont amplifiés au cours des années en raison de réformes partielles et de court terme. Le contexte politique est aujourd'hui propice à une réforme globale et il ne doit plus être question, comme cela a été fait durant tant d'années, de simplement supprimer une part d'imposition ou une part d'assiette en compensant la perte de produit pour les collectivités par l'affectation d'une dotation non évolutive.

C'est pourquoi la mission propose une série de mesures qui doivent être appréhendées dans leur cohérence d'ensemble : ainsi, le renforcement souhaité de l'autonomie fiscale doit avoir comme pendant une amélioration significative des mécanismes de péréquation. De plus, le préalable à toute réforme est qu'elle doit s'effectuer à ressources constantes pour les collectivités .

I. UN PRÉSUPPOSÉ : L'AUTONOMIE

La libre administration des collectivités territoriales est un principe constitutionnel essentiel, qui conduit notamment à l'autonomie de gestion des collectivités . Celle-ci est maintenant explicite dans le droit français : la révision constitutionnelle du 28 mars 2003 a en effet introduit dans la Constitution un article 72-2, qui indique dans son premier alinéa que « les collectivités territoriales bénéficient de ressources dont elles peuvent disposer librement dans les conditions fixées par la loi » . De plus, la France a ratifié en 2007 la Charte européenne de l'autonomie locale du Conseil de l'Europe, dont l'article 9 prévoit que « les collectivités ont droit, dans le cadre de la politique économique nationale, à des ressources propres suffisantes dont elles peuvent disposer librement dans l'exercice de leurs compétences » .

Ceci étant acquis, le débat porte aujourd'hui, non pas sur la manière dont les collectivités utilisent leurs ressources, mais sur leur capacité à fixer le niveau de ces ressources, c'est-à-dire leur degré d'autonomie financière et fiscale.

A. LA DÉCENTRALISATION « À LA FRANÇAISE » S'EST CONSTRUITE SUR L'AUTONOMIE FINANCIÈRE ET FISCALE DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

Dès 1917, la création de l'impôt sur le revenu a permis à l'Etat de bénéficier d'une ressource moderne ; la patente et la contribution mobilière ont alors été transférées aux collectivités territoriales. Les deux taxes foncières, sur les propriétés bâties et les propriétés non bâties, ont été transférées à leur tour en 1948. Critiqués pour leur inadaptation aux structures économiques et sociales d'un pays industrialisé, ces impôts ont été réformés, d'abord par l'ordonnance du 7 janvier 1959, puis par la loi du 31 décembre 1973. La taxe foncière sur les propriétés bâties, la taxe foncière sur les propriétés non bâties et la taxe d'habitation, ainsi renouvelées, sont assises sur des bases simplifiées et actualisées, la valeur locative remplaçant la notion de loyer matriciel. Enfin, la loi du 29 juillet 1975 a créé la taxe professionnelle en remplacement de la patente et l'a complétée par un système de péréquation départementale.

Ces quatre impôts ont ensuite peu évolué, les principales modifications ayant consisté en la suppression, par la loi de finances initiale pour 1999, de la part salaires de la taxe professionnelle, la suppression de la part régionale de la taxe d'habitation par la loi de finances rectificative du 13 juillet 2000, ainsi que le nouveau plafonnement de la taxe professionnelle à 3,5 % de la valeur ajoutée, introduit par la loi de finances pour 2006.

Dès le 1 er janvier 1981, le principe du vote annuel des taux des quatre taxes par les collectivités territoriales devient effectif (loi du 10 janvier 1980). Le système de la quotité se substitue ainsi au système de la répartition, dans lequel le taux est calculé en fonction de la somme à percevoir. Le système de fixation libre des taux a perduré avec peu d'évolutions jusqu'à aujourd'hui.

Les impôts locaux ont ainsi pris leur forme actuelle au moment où la décentralisation allait connaître son élan majeur et ils ont efficacement accompagné le développement des services publics et des politiques économiques et sociales locales tout au long des trois décennies qui ont suivi.

Ainsi, comme l'a souligné le rapport d'étape de la mission, l'autonomie financière des collectivités territoriales est indissociable, dans le contexte français, d'une large autonomie fiscale .

Certains estiment aujourd'hui que la capacité à agir des collectivités ne serait pas entamée si les impôts locaux étaient remplacés en tout ou partie par des dotations ou des parts d'impôts nationaux sans possibilité de fixation du taux. Le cas des Länder allemand, dont les ressources proviennent à 80 % de parts d'impôts nationaux dont le montant n'est pas modulable et de dotations de l'Etat, est fréquemment donné en exemple. Cependant, la différence d'échelle entre les Länder et les collectivités françaises rend la comparaison peu pertinente : le budget des Länder atteint ainsi une « masse critique » qui leur garantit une marge de manoeuvre importante, ce qui n'est pas le cas des collectivités françaises, même les plus importantes. Surtout, l'Allemagne n'est précisément pas un pays décentralisé, mais fédéral : les Länder forment, en tant qu'Etats, la seconde chambre du Parlement fédéral, le Bundesrat, où ils ont une capacité législative directe, notamment dans les matières qui relèvent de leurs compétences, ce qui inclut la répartition du produit des impôts nationaux. L'autonomie des Etats fédérés y est très forte et ancrée dans l'histoire, au contraire de la France, où la tradition jacobine est encore prégnante. Dès lors, la préservation d'une liberté fiscale, encadrée par le législateur, apparaît comme un contrepoids indispensable à la tradition centralisatrice d'un pays.

De plus, il convient de noter que différents pays européens augmentent l'autonomie fiscale de certaines de leurs collectivités : au Danemark par exemple, les fourchettes des taux des deux principaux impôts communaux (impôt local sur le revenu des personnes physiques et impôt foncier local) ont été élargies lors de la réforme de 2007.

B. LE RENDEZ-VOUS MANQUÉ DE LA RÉVISION CONSTITUTIONNELLE DE 2003

A l'initiative de son président, M. Christian Poncelet, le Sénat avait adopté, le 26 octobre 2000, une proposition de loi constitutionnelle relative à la libre administration des collectivités territoriales et à ses implications fiscales et financières. Le constat était double et reste d'ailleurs d'une grande actualité :

- diverses mesures législatives avaient entraîné un démantèlement progressif de la fiscalité locale : suppression en 1993 des parts régionale et départementale de la taxe foncière sur les propriétés non bâties, suppression en 1999 de la taxe additionnelle régionale aux droits de mutation à titre onéreux, réduction en 1999 du taux des droits de mutation à titre onéreux des départements sur les locaux à usage professionnel, suppression progressive de la fraction de l'assiette de la taxe professionnelle assise sur les salaires, réforme des droits de mutation en 2000, suppression de la part régionale de la taxe d'habitation et de la vignette automobile en 2001 ;

- l'Etat transférait des charges, qui s'alourdissaient et qui étaient insuffisamment compensées .

Le Gouvernement a alors déposé au Sénat, le 23 octobre 2002, un projet de loi constitutionnelle, examiné conjointement avec plusieurs propositions de loi constitutionnelle 128 ( * ) . Adoptée définitivement par la loi du 28 mars 2003, cette révision constitutionnelle contient diverses dispositions relatives à l' organisation décentralisée de la République . En matière financière, elle introduit dans la Constitution un article 72-2, dont le troisième alinéa indique que « les recettes fiscales et les autres ressources propres des collectivités territoriales représentent, pour chaque catégorie de collectivités, une part déterminante de l'ensemble de leurs ressources » .

Le rapport 129 ( * ) de notre collègue René Garrec précise que cet article « tend à poser le principe de l'autonomie financière, en particulier fiscale, des collectivités territoriales » et que, « selon la direction générale de la comptabilité publique, les ressources propres des collectivités comprennent les recettes de la fiscalité locale directe, les recettes de la fiscalité locale indirecte et les produits des domaines et d'exploitation ».

Or, en s'appuyant sur une certaine interprétation de la rédaction de l'article 72-2 de la Constitution, l'Assemblée nationale a souhaité, lors des débats sur la loi organique fixant les conditions de mise en oeuvre de ce principe 130 ( * ) , que l'ensemble des ressources fiscales, y compris celles provenant d'impôts nationaux partagés, soient considérées comme des ressources propres : le législateur a ainsi inclus dans les ressources propres les impositions dont « la loi détermine, par collectivité, le taux ou une part locale d'assiette » . M. Daniel Hoeffel, rapporteur au nom de la commission des lois du Sénat, précisait d'ailleurs en séance que « cette [rédaction] est destinée à garantir l'assimilation à une ressource propre de la part non modulable de la taxe intérieure sur les produits pétroliers transférée aux départements par la loi de finances pour 2004 pour compenser les charges induites par la loi du 18 décembre 2003 relative au RMI et au RMA » 131 ( * ) .

Au total, la notion de ressources propres est entendue de manière très large par la loi organique puisque, outre les impositions dont les collectivités peuvent fixer l'assiette, le taux ou le tarif, elle inclut notamment les impositions partagées avec l'Etat sur lesquelles elles n'ont aucun moyen d'action. La révision constitutionnelle de 2003 constitue donc sur ce point un rendez-vous manqué pour la reconnaissance de l'autonomie financière et fiscale des collectivités territoriales .

C. LE LIEN FISCAL EST UN FACTEUR DE RESPONSABILITÉ DÉMOCRATIQUE ET ÉCONOMIQUE

Dans un Etat essentiellement centralisé, le consentement à l'impôt, principe défini par les articles 13, 14 et 15 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 s'exerce d'abord à l'échelle de la communauté nationale. Toutefois, lorsque la décentralisation est inscrite à l'article premier de la Constitution et que des décisions de plus en plus importantes pour la vie quotidienne des citoyens sont prises par les élus locaux, comme c'est désormais le cas en France, il apparaît légitime qu'un consentement à l'impôt local soit solennellement organisé.

Payer l'impôt local est ainsi d'abord un signe d'appartenance à une communauté politique locale et d'attachement exprimé par les citoyens au territoire où ils vivent. En ce sens, il convient sans doute, selon l'expression du rapport Valletoux, de « réhabiliter l'impôt », tant il est vrai que sa « déligitimation rampante » 132 ( * ) constitue une des causes d'affaiblissement du lien social.

Par ailleurs, l'impôt local constitue le prix des services publics dont bénéficient les ménages et les entreprises dans leur vie quotidienne. Il établit un lien direct entre le niveau de services attendus par les citoyens et les charges qui pèsent sur eux , leur permettant de juger la gestion des collectivités territoriales à cette aune. Le lien fiscal est dès lors un facteur de responsabilisation des acteurs locaux et l'autonomie fiscale permet de se placer dans une logique de « retour sur investissement » et de construire un cercle vertueux de l'action publique. Une gestion saine et de bons projets de développement permettent d'espérer une augmentation de la richesse du territoire, donc une augmentation du produit fiscal perçu.

Certains estiment pourtant que ce principe de responsabilité est battu en brèche par la confusion actuelle, due au grand nombre de prescripteurs locaux : 39 000 collectivités territoriales, établissements publics et autres organismes locaux votent des taux d'imposition. Une unification des ressources des collectivités par le biais des dotations de l'Etat offrirait, selon eux, l'avantage de la simplicité et de la clarté pour les citoyens. Toutefois, l'impression de confusion naît surtout du système de l'empilement des taux sur une même assiette, chaque niveau de collectivité prélevant sa part d'un même impôt. Ce point peut fort bien être réformé sans pour autant renoncer au principe même de la fixation des taux par les collectivités. En outre, les dotations actuelles sont elles-mêmes marquées par une complexité et une confusion qui nuit tout aussi gravement au principe de responsabilité.

D. L'AUTONOMIE FISCALE EST UN FACTEUR DE BONNE SANTÉ FINANCIÈRE POUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES ET UN FACTEUR POSITIF POUR LES FINANCES PUBLIQUES

Combinés à des règles prudentielles judicieuses 133 ( * ) , les impôts locaux permettent aux collectivités territoriales de bénéficier d'un effet de levier important sur leur capacité d'endettement et d'investir pour répondre aux besoins exprimés par les citoyens. Elles peuvent ainsi recourir à l'emprunt pour financer leurs projets dans des conditions économiques avantageuses et avec un risque maîtrisé. D'ailleurs, les banques étudient attentivement les bases fiscales des collectivités avant de leur proposer des prêts, un bon potentiel fiscal étant la meilleure garantie de solvabilité. De même, les rehausseurs de crédit et les agences de notation attribuent une note d'autant plus élevée aux collectivités, toutes choses égales par ailleurs, que leur marge de manoeuvre fiscale et la robustesse des bases d'imposition sont importantes.

Inversement, une dépendance accrue vis-à-vis de financeurs extérieurs ne peut que rendre plus fragile leur situation financière. Selon un rapport récent 134 ( * ) , la diminution de leurs marges de manoeuvre fiscale est susceptible de « limiter leur capacité à restaurer leur équilibre financier en cas de crise ». En particulier, la majorité des dépenses des départements et des régions est absorbée par des compétences transférées sur lesquelles ces collectivités ont peu ou pas de pouvoir décisionnel. La flexibilité fiscale leur permet d'ajuster le niveau de recettes et de dépenses, par exemple en cas de choc exogène comme la crise immobilière actuelle.

Par ailleurs, l'autonomie fiscale n'est pas contradictoire avec l'équilibre des finances publiques de la nation. Grâce à ses règles budgétaires et comptables prudentielles, le secteur des collectivités territoriales a pesé marginalement dans la dégradation des équilibres financiers du secteur public, tant en termes de déficit que de dette.

En revanche, comme le souligne le rapport Brunel 135 ( * ) , la transformation progressive des élus en gestionnaires de dépenses et non plus en entrepreneurs locaux risquerait de les déresponsabiliser et de les transformer en simples porte-parole des revendications des usagers - électeurs. En effet, en l'absence d'impôts locaux, le citoyen ne percevrait plus de lien direct entre les décisions locales et leur coût et l'Etat pourrait se retrouver seul face à un front uni de revendications des citoyens appuyées par les élus locaux.

Recentraliser la pression fiscale et décentraliser les décisions de dépenses se révèlent en définitive deux démarches contradictoires .

E. L'AUTONOMIE FISCALE, ENCADRÉE PAR LE LÉGISLATEUR, DOIT ÊTRE COMPLÉTÉE PAR UNE PÉRÉQUATION AMÉLIORÉE

Dès la création de la fiscalité locale, le législateur a entendu encadrer la liberté de fixation des taux. Il s'agissait notamment d'éviter que les politiques fiscales locales n'augmentent les inégalités et n'engendrent des distorsions de concurrence entre les territoires. Le législateur a ainsi cherché à fixer soit une cotisation minimale, soit un taux plafond de référence. Par exemple, la liberté de fixation du taux sur les droits de mutation et autres taxes de ce type a été progressivement rognée pour presque disparaître aujourd'hui. En outre, pour empêcher les transferts de charges entre catégories de contribuables, la variation relative des taux des quatre taxes locales les plus importantes a été strictement encadrée, notamment pour éviter que la charge pesant sur les entreprises, qui ne sont pas des électeurs au sens strict, augmente plus rapidement, sauf exception, que celle pesant sur les ménages.

Par ailleurs, nul ne songe à contester que conforter l'autonomie fiscale des collectivités implique, pour éviter le creusement des inégalités, une amélioration de la péréquation . A cet égard, le passage à un système de dotations serait, selon ses défenseurs, une garantie d'égalité de traitement des citoyens sur tout le territoire, la péréquation des ressources étant réalisée en amont au niveau national. En outre, il favoriserait les petites collectivités aux ressources limitées, pour lesquelles l'autonomie fiscale est largement théorique.

Or, d'une part, il se trouve que les dotations actuelles n'ont qu'une efficacité péréquatrice réduite : la dotation la plus péréquatrice est paradoxalement la dotation forfaitaire de la DGF, les dotations explicitement dédiées à la péréquation se révélant peu efficaces du fait de leur faible volume 136 ( * ) . La pratique suggère donc qu'un système fondé exclusivement sur des dotations ne garantirait pas, par lui-même, davantage d'égalité.

D'autre part, le développement très important de la taxe professionnelle unique (TPU) atténue fortement les distorsions de concurrence entre territoires proches et renforce la solidarité financière, notamment en faveur des collectivités disposant de ressources faibles ou de charges élevées.

Finalement, comme l'a souligné le rapport Valletoux, la défiance envers l'autonomie fiscale reflète en partie une défiance plus générale vis-à-vis de l'action publique locale dont certains pensent qu'elle est menée par des acteurs parfois peu au fait de l'économie et de la discipline financière. La bonne santé financière globale des collectivités, mainte fois soulignée, apporte un démenti flagrant à une telle vision des choses.

Proposition de la mission

- Réaffirmer la nécessité de préserver l'autonomie fiscale des collectivités territoriales et de leurs groupements.

II. UNE RÈGLE GÉNÉRALE POUR L'ÉQUITÉ DES CONTRIBUTIONS ET L'ÉQUILIBRE DES FINANCES PUBLIQUES : DISPOSER D'ASSIETTES LARGES ET RÉGULIÈREMENT ACTUALISÉES

A. LA MODERNISATION DES VALEURS LOCATIVES CADASTRALES

S'il existe bien un consensus en matière de finances locales, c'est l'obsolescence et l'archaïsme des valeurs locatives cadastrales , utilisées comme assiette pour la taxe d'habitation, les taxes foncières, la taxe d'enlèvement des ordures ménagères et, partiellement, la taxe professionnelle. Pourtant, aucune réforme n'a jusqu'ici été possible , ce qui est clairement exposé dans un récent rapport de la Cour des comptes (cf. infra .) : outre la question des conséquences sur les ressources des collectivités, la raison principale en est l'important transfert de charges qu'elle entraîne nécessairement entre contribuables.

Dans ces conditions, et quels que soient les choix de réforme adoptés pour chacun de ces impôts, la révision des valeurs locatives est un impératif. Il peut techniquement être réalisé dans des délais assez brefs en reprenant et en actualisant les travaux réalisés en 1991 à l'occasion de la précédente réforme, que l'on n'est jamais parvenu à mettre en oeuvre.

Cependant, leur prise en compte pour le calcul des contributions doit être progressive et s'étaler sur une période longue, peut-être dix ans. Cette période de transition permettra d'atténuer les effets de la réforme sur les contribuables pris individuellement, mais aussi sur les recettes des collectivités.

L'idée, parfois évoquée, de prendre en compte les nouvelles valeurs à la seule occasion d'une mutation immobilière ne permettrait pas d'assurer l'égalité entre les contribuables et étalerait la réforme sur des dizaines d'années, ce qui ne semble ni souhaitable ni envisageable.

Propositions de la mission

- Procéder à la révision générale des valeurs locatives.

- Mettre en place des procédures efficaces pour leur réévaluation régulière.

En ce qui concerne le type de valeur locative à prendre en compte, deux pistes de réforme sont possibles :

- l'utilisation de valeurs économiques réelles des biens , avec une déclaration obligatoire et systématique par le contribuable. Plus proche de la réalité physique et financière, ce choix présente l'inconvénient de reposer sur la déclaration volontaire des contribuables. De plus, il entraîne une certaine volatilité des bases, puisque, en période de crise immobilière, les valeurs déclarées pourraient baisser fortement en quelques mois ;

- l'utilisation de valeurs administrées , qu'il est cependant nécessaire de simplifier et d'actualiser régulièrement. Moins corrélé à la réalité du marché, ce choix a l'avantage de la simplicité et de la stabilité.

Résumé du rapport de la Cour des comptes sur l'assiette des impôts locaux (mars 2009)

L'obsolescence des bases cadastrales a une double origine : une absence de révision générale des bases depuis 1961 (pour les propriétés non bâties) et 1970 (pour les propriétés bâties) et une mise en oeuvre trop restreinte des procédures qui permettraient d'actualiser ces données à droit constant.

En 1989, un rapport du Conseil des impôts notait le caractère inéquitable des classifications , en remarquant notamment que les immeubles anciens des centres-villes dont l'état réel n'avait pas été actualisé étaient sous-fiscalisés, alors que les habitations collectives construites à la fin des années soixante étaient surfiscalisées puisque dotées du « confort moderne ». Or, la situation actuelle est en fait inversée et beaucoup plus marquée par la dégradation des grands ensembles des périphéries des villes que par des difficultés particulières dans les zones pavillonnaires.

La révision générale a pourtant été abandonnée en 1992 en raison des transferts d'une ampleur jugée insupportable par les autorités politiques, ce qui a contribué à figer le paysage fiscal à la situation des années soixante-dix. Ainsi, les critères sont devenus archaïques et très marqués par les préoccupations architecturales des années soixante.

De plus, des biens similaires relevaient de classements différents selon les communes . Malgré diverses procédures possibles, l'actualisation a été très peu fréquente : par exemple, les procès-verbaux complémentaires, permettant de créer de nouvelles catégories d'habitation ou de mettre à jour les locaux de référence, se sont presque partout limités, quand ils existent, à la prise en compte des piscines. Le redressement des valeurs locatives à la suite d'une vérification sélective de locaux, outil à la disposition des services fiscaux, a joué un rôle marginal ; en l'absence de statistiques complètes, des exemples donnent des taux annuels de vérification compris entre 0,001 % et 0,008 % des locaux totaux (388 vérifications en 2007 dans une commune de la région parisienne de plus de 70 000 habitants).

Au total, les valeurs locatives sont éloignées des réalités et inéquitables . Le classement est sans rapport avec le parc immobilier existant aujourd'hui , puisqu'il concentre les logements dans la catégorie 6, supposée refléter un confort quasi-inexistant, et dans la catégorie 5, dont le descriptif suggère un confort modeste. Les catégories 7 et 8, qui renvoient théoriquement à un habitat très délabré, restent fortement représentées : 1 625 618 maisons et 649 400 appartements y sont classés, ce qui est en contradiction avec les études de l'Insee sur le logement en France. Elles le sont même avec celles des associations humanitaires du type de la Fondation Abbé Pierre ; cette dernière estime en effet à 400 000 le nombre de locaux insalubres et à 568 000 celui des logements « très inconfortables ». A l'autre bout du classement, le nombre de maisons de luxe ou de très grand luxe se limite à 4 139 unités sur l'ensemble du territoire national, celui des appartements de ce type à 15 291 unités, si l'on se réfère à leur classement en termes de valeur locative !

L'inéquité provient également du fait qu' un bien ancien non soumis à permis de construire ou déclaration de travaux peut continuer d'appartenir à une catégorie très inférieure à son niveau réel de confort .

En conclusion, la Cour des comptes appelle à un changement devenu indispensable , tout en étant consciente que le maintien du statu quo pendant de trop longues années n'a pu qu'aggraver les effets des transferts potentiels entre contribuables et entre collectivités territoriales . Elle précise d'ailleurs qu'il sera nécessaire de lisser la réforme sur plusieurs années . Elle privilégie la simplicité des procédures , la transparence pour le contribuable et des garanties de stabilité pour les collectivités .

B. L'IMPLICATION DES COLLECTIVITÉS DANS LES TRAVAUX RÉALISÉS PAR L'ETAT SUR L'ASSIETTE FISCALE

Dès le rapport d'étape, votre mission estimait qu'une réflexion devrait être engagée afin que certaines collectivités disposent de marges de décision plus importantes sur les assiettes d'imposition.

Cet axe de travail est conforté par le rapport récent de la Cour des comptes (cf. infra ), qui montre que « le processus d'établissement des bases cadastrales est d'une grande opacité, [...] extrêmement complexe, fragile et d'un coût mal cerné, [...] ce qui produit une situation obsolète et inéquitable ».

Les collectivités sont, hormis les contribuables eux-mêmes, les premières à être intéressées par un travail efficace et juste sur le calcul des assiettes des impositions qui leur sont destinées. Il semble en conséquence cohérent, face au désintérêt manifeste de l'Etat , de renforcer leur rôle, en leur permettant au minimum de collaborer plus étroitement , dans le cadre fixé par le législateur, aux actualisations opérées par les services fiscaux . Elles pourraient également avoir un pouvoir d'initiative pour inciter l'Etat à engager ces procédures. Elles y ont un intérêt direct et l'expérience de la décentralisation a montré que les collectivités sont tout à fait à même de mettre en oeuvre les moyens d'une telle politique.

Proposition de la mission

- Permettre aux collectivités territoriales de prendre toute leur part aux procédures de révision et d'actualisation des valeurs locatives, dans un cadre fixé nationalement par le législateur.

Au-delà des travaux réalisés sur le calcul des assiettes, la question peut également être posée, notamment pour les grandes collectivités, des modalités de recouvrement des impositions. Pour mémoire, l'Etat prélève des frais importants pour compenser le coût du recouvrement de l'impôt ; ils sont calculés en pourcentage du produit perçu, et non forfaitairement, et la Cour des comptes estime qu'ils sont « surfacturés » .

La question de la collectivité la plus à même de participer à ces travaux doit être regardée avec souplesse et la réponse apportée doit s'adapter au territoire. En effet, si les communes importantes ont la capacité technique et humaine suffisante, éventuellement au niveau intercommunal, les communes rurales ne le pourront certainement pas. Dans ce cas, les départements pourraient avoir un rôle décisif de soutien, mais également de coordination : il ne serait pas illégitime que l'actualisation des valeurs locatives soit réalisée sur un territoire relativement étendu, comme celui du département, pour éviter les distorsions et favoriser l'harmonisation des assiettes fiscales.

En outre, il peut être intéressant de rappeler que le deuxième alinéa de l'article 72-2 de la Constitution, introduit par la révision de 2003, prévoit que la loi peut autoriser les collectivités territoriales à fixer l'assiette et le taux des impositions qu'elles reçoivent, dans les limites fixées par le législateur. Il pourrait être pertinent, dans ce cadre constitutionnel, de confier aux collectivités la fixation de tout ou partie de l'assiette de certains impôts ou taxes.

Résumé du rapport de la Cour des comptes sur l'assiette des impôts locaux (mars 2009)

La chaîne des opérations permettant de déterminer la valeur locative d'un bien est longue et complexe, puisqu'elle comporte treize étapes. Son calcul revient à multiplier une surface pondérée par le tarif de la catégorie dans laquelle est classé le bien. L'administration dispose de moyens limités pour apprécier effectivement la valeur locative du bien ; le processus est entaché de nombreux points de fragilité et comporte un risque non négligeable d'erreurs matérielles ou d'appréciation.

Par ailleurs, le coût en est mal cerné par l'Etat : les effectifs qui y sont affectés ne sont plus identifiés et quantifiés depuis 2005 : à cette date, 3 020 agents environ, auxquels pouvaient être ajoutés les responsables de centres et une trentaine d'autres en administration centrale, assuraient les tâches dites fiscales.

En 2006, le coût de l'assiette et du contrôle de l'impôt a été évalué à 230 millions d'euros, celui du recouvrement à 202 millions, ce qui fait apparaître un taux de 1,75 %. Or, les impositions au titre de l'impôt foncier sont majorées de 4,4% pour frais d'assiette et de recouvrement. Pour la Cour des comptes, le coût de gestion de l'assiette est donc surfacturé par l'Etat . Les coûts réels des dégrèvements et admissions en non-valeur représentent en revanche pour l'Etat beaucoup plus que les 3,6% prélevés à ce titre. Pour autant, la Cour complète son analyse, en indiquant que cette situation est peu saine et que les collectivités territoriales ignorent le coût réel des dégrèvements et défauts de paiement des contribuables pris en charge par l'Etat.

En conclusion, la Cour des comptes souhaite que la réforme des valeurs locatives soit l'occasion pour l'Etat de revoir non seulement ses modes d'organisation, mais aussi ses méthodes de travail .

C. LA LIMITATION DES DÉGRÈVEMENTS ET EXONÉRATIONS

1. Une prise en charge par l'Etat en constante progression

On distingue traditionnellement les dégrèvements et les exonérations, qui permettent tous deux au contribuable d'alléger en totalité ou partiellement le montant de son imposition, mais qui se différencient nettement du point de vue de la collectivité territoriale concernée : les premiers ne modifient pas l'assiette fiscale totale, sur laquelle est calculé l'impôt, les secondes viennent la diminuer.

Pour les collectivités territoriales et pour l'Etat, la différence réside dans la compensation que le second verse aux premières. Dans le cas d'une exonération, l'Etat compense à la collectivité le manque à gagner l'année de la mesure, en calculant le produit que l'assiette supprimée aurait dû rapporter compte tenu du taux voté par la collectivité. Les années suivantes, l'Etat verse en général le même montant, sans tenir compte du nouveau taux voté par la collectivité, ni de l'évolution physique de la base. Il applique parfois un taux de progression (par exemple l'inflation), mais les compensations d'exonération peuvent aussi servir de variables d'ajustement à la baisse. Elles n'ont donc plus de lien avec l'impôt et se transforment en général, par la suite, en simples dotations.

Dans le cas d'un dégrèvement, la part de l'assiette reste théoriquement au sein de l'assiette totale de l'impôt. Le produit correspondant à l'assiette dégrevée reste calculé en appliquant le taux voté annuellement par la collectivité, mais c'est l'Etat, et non le contribuable, qui le verse à celle-ci.

Le taux de prise en charge par l'Etat des taxes directes locales a atteint 26 % en 2008 : plus de la moitié de la taxe professionnelle et près d'un tiers de la taxe d'habitation sont ainsi payés par l'Etat et non par les contribuables locaux. Symétriquement, les compensations d'exonérations et de dégrèvements représentent près de 20 % de « l'effort financier de l'Etat en faveur des collectivités territoriales » .

La progression des dégrèvements et des compensations d'exonérations se traduit de manière générale par un affaiblissement de l'autonomie fiscale des collectivités territoriales . C'est évident pour les compensations d'exonérations, puisqu'elles n'évoluent pas en fonction des taux votés par les collectivités. En outre, elles ont été progressivement transformées en dotations. La réforme de 2004 a ainsi intégré plus de 12 milliards d'euros de compensations d'exonérations au sein de la DGF, dont les compensations de perte de produit due à la suppression de la part salaires de la taxe professionnelle, à la suppression de la part régionale des droits de mutation à titre onéreux et à la réforme de la taxe d'habitation. Ces compensations d'exonération sont incluses dans l'enveloppe normée des concours de l'Etat aux collectivités et y servent en outre de variable d'ajustement. Certaines d'entre elles subissent ainsi une diminution importante depuis quelques années.

(en millions d'euros)

2006

2007

LFI 2008

LFI 2009

Compensations d'exonérations

Taxe foncière sur les propriétés bâties

377

388

401

377

Taxe foncière sur les propriétés non bâties

492

490

440

384

Taxe d'habitation

1 189

1 207

1 218

1 243

Taxe professionnelle

2 066

1 964

1 561

1 313

Total

4 125

4 049

3 630

3 326

Dégrèvements

Taxes foncières

574

583

640

650

Taxe d'habitation

2 967

3 028

3 220

3 320

Taxe professionnelle

8 715

9 356

11 700

12 700

dont : plafonnement à la valeur ajoutée

6 468

5 975

8 391

8 870

dégrèvement investissements nouveaux

746

1 442

1 300

1 760

Total

12 256

12 967

15 560

16 670

Source : jaune budgétaire « Effort financier de l'Etat en faveur des collectivités territoriales »,
annexé au projet de loi de finances pour 2009

Par ailleurs, les dégrèvements ne garantissent plus que les collectivités locales continuent à obtenir le produit correspondant aux taux qu'elles votent. Ainsi, lors de la réforme de la taxe professionnelle, introduite par la loi de finances pour 2006, le plafonnement à la valeur ajoutée a été accompagné de la mise en place d'un « ticket modérateur » à la charge des collectivités : lorsqu'elles augmentent leur taux d'imposition par rapport à un taux de référence, elles remboursent à l'Etat une partie du dégrèvement que celui-ci prend en charge. Ce mécanisme complexe a été adopté en raison des risques de dérive inhérents au système lui-même : au-delà d'un certain point, ce ne sont plus les entreprises qui payent la taxe professionnelle mais l'Etat, ce qui aurait pu conduire à des augmentations inconsidérées des taux. Mais finalement, les modalités du plafonnement à la valeur ajoutée obèrent largement la capacité des collectivités à augmenter le taux de la taxe professionnelle . Cette participation au coût du dégrèvement lié à la valeur ajoutée s'est élevé à 765 millions d'euros en 2008 pour l'ensemble des collectivités et groupements et a été particulièrement sensible pour certains EPCI et pour les départements et régions : elle représente ainsi 10,3 % du produit de TP des régions et 3,8 % de celui des départements.

2. Une situation qui présente de nombreux inconvénients

Comme le souligne le rapport Valletoux, les dégrèvements et exonérations sont responsables d'une « déliaison » croissante entre impôt local et contribuable local, de telle sorte qu'une distinction s'est désormais installée entre trois notions qui devraient pourtant coïncider : le « produit voté », le « produit payé » et le « produit perçu ». Cette situation présente plusieurs inconvénients.

D'abord, il semble anormal que certains contribuables soient totalement exonérés du paiement de l'impôt, alors même qu'ils bénéficient des services publics locaux et participent, au même titre que tous les autres citoyens, à la vie du territoire. Le fait de payer l'impôt local, même dans une mesure très limitée, est une des manières d'affirmer une appartenance à la communauté politique locale. Il ne s'agit pas, bien entendu, de fragiliser encore la situation de personnes parfois déjà en difficulté financière. Au contraire, un prélèvement modeste, même s'il présente un coût de perception, permettrait de valider le statut de citoyen-contribuable de ces personnes, dans une optique d'inclusion sociale. D'ailleurs, en matière de lutte contre la précarité, les débats actuels, notamment sur les droits connexes à certaines allocations, mettent l'accent sur une prise en compte globale de la situation d'une personne ou d'un foyer en difficulté, bien plus que sur des mesures ciblées d'exclusion fiscale partielle.

Ensuite, la multiplicité des dégrèvements et des exonérations crée une complexité excessive . La complexité culmine lorsque plusieurs dispositifs de dégrèvement se combinent, comme dans le cas du récent dégrèvement pour investissement nouveau, mis en place par la loi de finances rectificative pour 2008. En effet, la nécessité de prendre en compte le cas des entreprises bénéficiant déjà du plafonnement au titre de la valeur ajoutée et qui, de ce fait, n'auraient reçu aucun bénéfice consécutif au nouveau dégrèvement, a conduit le législateur à prévoir un dispositif spécifique pour ces entreprises.

De même, la profusion des dégrèvements et exonérations est source d' opacité , puisque l'imposition nationale qui alimente ainsi les budgets locaux est invisible pour le contribuable local. Elle nuit au principe de responsabilité des élus face à leurs électeurs-contribuables, dans la mesure où la pression fiscale qui s'exerce sur ceux-ci ne correspond pas à la réalité des besoins de la collectivité. Dorénavant, une augmentation des taux d'imposition locaux est indolore pour une large partie de la population.

Enfin, ces mesures décidées par l'Etat réduisent progressivement l'assiette fiscale . On aboutit ainsi à des impôts dont la structure est contraire à celle que prône la théorie économique comme étant la plus efficace et créant le moins de distorsions, c'est-à-dire un prélèvement modéré sur l'assiette la plus large possible. L'impôt perd ainsi sa légitimité, première étape vers sa remise en cause .

3. Des pistes pour la limitation des dégrèvements et exonérations

Face à la complexité actuelle et à l'empilement des dispositifs en vigueur, il apparaît nécessaire, dans un premier temps , de recenser l'ensemble des dégrèvements et exonérations .

Le principe général de l'interdiction de nouveaux dégrèvements et exonérations décidés par l'Etat pourrait ensuite être posé. Pour les contribuables bénéficiant de ces dégrèvements et exonérations au titre de la taxe professionnelle, la réforme serait de toute façon prévue dans celle de l'impôt économique local que la mission propose (cf. infra ). Pour les taxes « ménages », les contribuables exonérés ne pourraient pas être brutalement réintégrés dans l'assiette : cette réintégration devrait être progressive et tenir compte de leur niveau d'imposition global et de leur capacité contributive.

Par ailleurs, la question se pose de savoir si les exonérations décidées par les collectivités territoriales elles-mêmes, et non par l'Etat, deviendraient également impossibles. Dans la mesure où elles ne sont généralement pas compensées par l'Etat, ces exonérations ne posent pas le problème de l'opacité et de la déresponsabilisation des élus locaux : à une exonération correspond une moins-value, reconnue comme telle. Cet instrument, qui permet par exemple d'encourager le développement des économies d'énergie ou de prendre des mesures sociales, doit donc être préservé.

La réforme des dégrèvements et exonérations existants doit s'effectuer à ressource constante pour les collectivités territoriales . Plusieurs solutions sont envisageables : ils pourraient par exemple être consolidés puis définitivement remplacés par des dotations. Cependant, l'expérience montre que ces dotations risqueraient de servir tôt ou tard de variable d'ajustement. Ils pourraient également être remplacés par des parts d'impôts nationaux. Enfin, pourrait être envisagé l'élargissement de l'impôt économique local à l'ensemble des activités qui occupent le territoire, y compris les activités publiques. Cette substitution entre, d'une part, dégrèvements et exonérations et, d'autre part, fiscalité réelle aurait l'avantage de la transparence. M. Philippe Laurent a évoqué cette idée devant la mission lors de son audition du 9 février 2009.

En tout état de cause, cette question ne peut être traitée séparément de celle de la réforme des impôts locaux et de leurs nouvelles assiettes possibles.

Proposition de la mission

- Cesser de créer de nouveaux dégrèvements et de nouvelles exonérations.

III. LES PRINCIPES POUR UNE RÉORGANISATION RÉUSSIE DE LA FISCALITÉ LOCALE

Comme il a été précisé en introduction, une réforme de la fiscalité locale doit s'entendre, toutes choses égales par ailleurs, à ressources constantes pour les collectivités , qui ne doivent ni en bénéficier indûment ni en pâtir. Parallèlement, elle ne doit pas entraîner de transferts de charges trop lourds à supporter entre les différents contribuables. Dans cet esprit, il sera utile d'envisager des périodes de transition et des systèmes d'évolution plafonnée , à l'image des procédures d'harmonisation des taux de taxe professionnelle vers un taux unique dans les intercommunalités ayant adopté la TPU.

A. LA SPÉCIFICITÉ DES OUTRE-MER

Si la plupart des principes qui vont être présentés peuvent trouver à s'appliquer sur l'ensemble du territoire national, ils concernent plus spécifiquement la métropole, car les collectivités territoriales d'outre-mer connaissent des organisations et des statuts particuliers. Certaines disposent, par exemple, de la ressource de l'octroi de mer, qui représente une part importante des recettes fiscales de nombreuses collectivités des DOM : entre 40 % et 50 % de celles des communes, 27 % et 44 % de celles des régions et 25 % de celles du département de la Guyane, seul département à en percevoir une part.

La mission d'information sur la situation des départements d'outre-mer, créée par le Sénat le 5 mars 2009, a dégagé comme l'un de ses axes de travail la situation financière des collectivités territoriales et a organisé des déplacements dans chacun des départements pour y recueillir des informations concrètes ; c'est pourquoi votre mission s'est donné pour règle de s'en remettre aux conclusions de ces travaux, notamment en ce qui concerne le sujet des finances des collectivités territoriales d'outre-mer.

B. ADAPTER L'IMPÔT ÉCONOMIQUE LOCAL À L'ENVIRONNEMENT INTERNATIONAL

1. Affirmer le lien fiscal entre les entreprises et les collectivités territoriales

Le rapport d'étape affirmait déjà le nécessaire lien fiscal entre les entreprises et les collectivités, qui organisent leur « environnement » direct ou indirect et celui de leurs salariés.

Sans la préservation du lien entre contribuables et territoires, les élus auront les plus grandes difficultés à faire admettre aux citoyens le bien-fondé de l'implantation de certains établissements porteurs de nuisances. On peut cependant noter que les communes peuvent être favorables à l'implantation de zones d'activités, même si leur budget n'en bénéficie pas directement : elles profitent tout de même de l'effet indirect des emplois créés et de recettes fiscales prélevées par l'intercommunalité à laquelle elles appartiennent.

Par ailleurs, le développement de l'intercommunalité à taxe professionnelle unique a permis de régler un inconvénient majeur de l'impôt économique, celui de la distorsion de concurrence entre des territoires où les collectivités appliquent des taux d'imposition nettement différents. Au 1 er janvier 2009, 1 263 EPCI à TPU regroupent 16 964 communes et 44,3 millions d'habitants. L'achèvement de la carte intercommunale et l'amélioration des périmètres permettront de compléter ce succès et de rendre par conséquent inopérantes les critiques de ce type.

Enfin, la plupart des reproches des chefs d'entreprises portent plus sur la répartition de la taxe professionnelle entre secteurs économiques ou sur sa complexité que sur l'existence même d'une taxe locale sur leur activité 137 ( * ) .

Proposition de la mission

- Conforter l'existence du lien fiscal entre les entreprises et les collectivités territoriales.

2. Dénaturée et amputée par de multiples réformes, la taxe professionnelle est désormais pénalisante pour certains secteurs économiques

Créée en 1975 pour succéder à la patente, imposition d'origine révolutionnaire devenue anachronique, la taxe professionnelle a été décriée dès le début et a, en même temps, été un des ressorts du succès de la décentralisation en France.

Elle a subi de multiples réformes partielles, qui ont toutes eu tendance à en rogner l'assiette : premier plafonnement à la valeur ajoutée dès 1979, première réduction de la fraction imposable des salaires dès 1982, abattement général de 16 % des bases en 1987, réductions temporaires pour embauche et investissement et pour création de nouveaux établissements en 1988, suppression complète de la part salaires entre 1999 et 2003, réduction de 40 % des bases liées aux recettes de certaines entreprises entre 2002 et 2005, dégrèvement des nouveaux investissements en 2004, élargissement du plafonnement à la valeur ajoutée en 2007, enfin, en 2008, exonération définitive des investissements réalisés entre octobre 2008 et décembre 2009.

Au final, la taxe professionnelle pénalise, dans sa forme actuelle, les entreprises de l'industrie, secteur très soumis à la concurrence internationale, alors qu'elle est relativement indolore pour les entreprises du secteur tertiaire. L'ensemble combiné des multiples réductions a en effet rendu les bases de taxe professionnelle concentrées et injustes : après la suppression de l'imposition de 18 % de la masse salariale réalisée progressivement entre 1999 et 2003, les investissements et les valeurs locatives foncières sont quasiment seuls imposés.

Toutefois, si la mission se déclare favorable à un rééquilibrage de la taxe professionnelle entre secteurs économiques, elle n'en souligne pas moins qu'il convient d'éviter à cette occasion un transfert d'impôts vers les ménages.

Le rapport d'étape évoquait quelques comparaisons européennes, notamment le fait que l'impôt local sur les activités économiques, présent dans une dizaine de pays, est particulièrement important en France, en Allemagne, en Italie et au Luxembourg. Il peut porter sur le bénéfice des sociétés (Allemagne) ou le profit opérationnel (Luxembourg), la valeur ajoutée (Italie et Hongrie), le montant des salaires (Autriche) ou la valeur locative des immobilisations avec un correctif en fonction de la valeur ajoutée (France). Les systèmes d'imposition économique locale sont extrêmement divers, mais l'assiette foncière prédomine, ainsi que, dans une moindre mesure, l'assiette constituée par les bénéfices. La taxation de la masse salariale a enregistré un déclin au profit de celle de la valeur ajoutée.

Enfin, il est important de rappeler que l'ensemble des études internationales place régulièrement la France dans le peloton de tête des pays attractifs pour les investissements étrangers. De plus, les enquêtes montrent que la fiscalité est loin d'être un facteur déterminant pour l'implantation des entreprises. Finalement, même si l'on considère la taxe professionnelle comme un facteur négatif, on ne peut en tout cas pas la considérer comme un facteur rédhibitoire.

3. La scission de la taxe professionnelle en deux impôts : l'un assis sur le foncier, l'autre sur la valeur ajoutée

La partie de la taxe professionnelle assise sur le foncier ne pose pas les mêmes difficultés que celle pesant sur les biens et équipements ; elle est totalement liée à l'occupation et à l'utilisation du territoire local et des services publics qui y sont rendus, par exemple la voirie et les réseaux. Elle doit donc être préservée . Cependant, elle doit également être modernisée .

Les valeurs locatives utilisées varient selon le type des biens assujettis :

- valeur locative cadastrale théorique pour les biens à usage professionnel ordinaire, c'est-à-dire la même valeur locative que celle utilisée pour les locaux d'habitation soumis aux impôts ménages ;

- valeur réelle calculée grâce au bail pour les locaux commerciaux et biens assimilés donnés en location à des conditions de prix normale ;

- valeur locative cadastrale théorique ou par appréciation directe pour les autres locaux commerciaux et assimilés ;

- évaluation comptable, effectuée à partir des données du bilan, ou méthode particulière (bail, comparaison ou appréciation directe) pour les établissements industriels.

Cette assiette foncière n'est pas individualisée au sein des bases de la taxe professionnelle ; elle est donc relativement indolore, tout en étant estimée à environ 20 % de la totalité de l'assiette. Elle souffre pourtant, comme tous les impôts assis sur les valeurs locatives, d'archaïsme, d'opacité et d'inéquités. Les valeurs locatives des entreprises doivent donc être adaptées, ce qui ne devrait pas poser les mêmes difficultés que pour celles s'appliquant aux impôts ménages.

Cependant, ne prévoir que la part assise sur le foncier ne permet pas de répondre aux besoins de financement des collectivités et à l'impératif de neutralité fiscale entre les contribuables ménages et les contribuables entreprises.

Il pourrait alors être envisagé d' asseoir une deuxième partie de cet impôt sur la valeur ajoutée des entreprises . Contrairement à l'excédent brut d'exploitation ou aux différents résultats comptables, la valeur ajoutée présente l'avantage d'être une assiette large et plutôt stable . Il faut toutefois garder à l'esprit qu'elle est principalement constituée par les charges de personnel.

Le rapport Fouquet proposait cette solution, qui est presque devenue une réalité avec la réforme intervenue en 2007 du plafonnement de l'imposition de taxe professionnelle à 3,5 % de la valeur ajoutée. Ainsi, pour la première année d'application, on constate que 36 % des bases communales de taxe professionnelle sont plafonnées, 49 % pour les départements et 46 % pour les régions.

Par ailleurs, les redevables, dont le chiffre d'affaires hors taxes est supérieur à 7,6 millions d'euros, acquittent, depuis 1996, un supplément d'imposition de taxe professionnelle, lorsque leur cotisation est inférieure à 1,5 % de leur valeur ajoutée. Cette cotisation minimale est égale à la différence existant entre 1,5 % de la valeur ajoutée et le total des cotisations de taxe professionnelle. Actuellement, l'ensemble du produit de la cotisation minimale bénéficie au budget général de l'Etat, une recette évaluée à 2,6 milliards d'euros pour 2008.

La cotisation minimale, limitée aux entreprises de plus de 7,6 millions d'euros de chiffre d'affaires, pourrait être élargie à l'ensemble des entreprises, mais elle reste une imposition sur laquelle, par définition, il n'y a pas de vote de taux.

De plus, une évaluation précise est nécessaire pour mesurer l'impact de cet élargissement sur les petites et moyennes entreprises qui constituent un terrain à la fois fragile et indispensable pour l'économie française.

Parallèlement, la cotisation plafond qui s'applique depuis 2007, à savoir 3,5 % de la valeur ajoutée des établissements, pourrait être abaissée à produit constant pour les collectivités, grâce à l'élargissement de l'assiette, qui passerait d'une partie des équipements et biens mobiliers (EBM) à la valeur ajoutée.

Les soldes intermédiaires de gestion

Le code de commerce ne fait pas mention des soldes intermédiaires de gestion, qui sont donc des éléments facultatifs de la comptabilité . Le plan comptable général ne prévoit leur établissement que lorsque l'entreprise utilise le système développé.

Les principaux soldes intermédiaires de gestion sont la marge commerciale, la production de l'exercice, la valeur ajoutée, l'excédent brut d'exploitation, le résultat d'exploitation, le résultat courant avant impôts, le résultat exceptionnel et le résultat de l'exercice.

La valeur ajoutée exprime la création ou l'accroissement de valeur apportée par l'entreprise aux biens et services en provenance de tiers . Elle peut être mesurée soit par soustraction, soit par addition :

- c'est la différence entre la production globale de l'exercice et les consommations de biens et de services fournis par des tiers pour cette production. La valeur ajoutée brute ainsi calculée ne prend pas en compte la consommation des investissements via la dotation aux amortissements ;

- c'est la somme des rémunérations des facteurs de production , c'est-à-dire la somme des impôts et taxes, des charges de personnel, des charges financières, de la dotation aux amortissements et de la rémunération des capitaux propres (c'est-à-dire le résultat).

L'excédent brut d'exploitation est la différence entre la valeur ajoutée et les frais de personnel et impôts à la charge de l'entreprise . Il constitue la ressource tirée par l'entreprise de son exploitation pour maintenir et développer son outil de production et rémunérer les capitaux engagés, y compris ceux empruntés : c'est le « cash-flow » d'exploitation avant charges financières et impôt sur le résultat.

La valeur ajoutée présente l'avantage d'être une assiette large, plutôt stable - au contraire du résultat -, et de traduire mieux que le chiffre d'affaires l'activité propre de l'entreprise .

De plus, il en existe déjà une définition fiscale , puisque les entreprises remplissent le formulaire 2059-E de « détermination de la valeur ajoutée produite au cours de l'exercice ». Le calcul est différent de celui de la valeur ajoutée comptable et de celui utilisé pour la participation des salariés ou dans le secteur de la banque et de l'assurance, mais il est relativement homogène.

4. Les bénéficiaires de ces deux nouveaux impôts économiques

Le rapport Fouquet liait la taxe professionnelle et l'intercommunalité, dans la mesure où celle-ci est considérée comme porteuse de développement économique ; cette analyse est cependant à nuancer dans les territoires ruraux. De plus, le présent rapport propose d'aménager la compétence de développement économique, mais pas de la faire supporter par une seule collectivité.

Par ailleurs, la mission a adopté deux principes qu'il faut concilier en l'espèce : l'existence d'un impôt économique et la limitation du nombre de « prescripteurs » sur un même impôt . C'est pourquoi il peut être envisagé d'affecter à des niveaux différents de collectivités les deux nouveaux impôts successeurs de la taxe professionnelle.

En ce qui concerne celui sur la valeur ajoutée, il est nécessaire de garder à l'esprit qu'elle constitue une valeur comptable que les entreprises ne peuvent pas toujours calculer correctement en raison des flux multiples entre les établissements d'une même société et qu'elles peuvent assez aisément « déplacer » d'un établissement à l'autre au mieux de leurs intérêts. De plus, pour les secteurs bancaire et de l'assurance, le calcul même de la valeur ajoutée pose des difficultés comptables spécifiques.

Pour résoudre cette difficulté de localisation de la valeur ajoutée , un ensemble d'indicateurs parmi lesquels les effectifs des établissements et leur surface immobilière pourrait être utilisé comme clé de répartition.

Surtout, cet impôt pourrait être affecté à un niveau de collectivité, dont le territoire est le plus grand possible : les taux sont bas quand l'assiette est large et les différences de taux d'imposition sont toujours plus faibles quand le nombre des collectivités prescriptrices est lui-même limité. De ce fait, si, cet impôt était affecté aux départements et aux régions, les entreprises n'auraient pas d'intérêt prégnant à « optimiser » la localisation de la valeur ajoutée.

De son côté, l'attribution du nouvel impôt économique assis sur le foncier pourrait privilégier la proximité , c'est-à-dire les communes et les intercommunalités. Afin de s'approcher d'une certaine neutralité des conséquences de la réforme sur les ressources des collectivités, cela supposerait que l'adaptation et la revalorisation des valeurs locatives permettent d'en augmenter sensiblement le produit ; sinon, il faudrait, à produit constant pour le secteur communal, lui attribuer d'autres impôts ou des compensations, ce qui pourrait poser la question de l'autonomie fiscale. De même, comme il a été précisé précédemment, le nombre d'entreprises assujetties à la cotisation minimale pourrait être nettement augmenté afin de parvenir au total à un produit constant pour les collectivités et leurs groupements.

(en milliards d'euros)

Communes et intercom-
munalités

Dépar-tements

Régions

Total

Ressources nettes de taxe professionnelle perçues en 2007 (hors dégrèvements et exonérations provenant de l'Etat)

11,6

5,5

1,8

18,9

Part estimée liée au foncier (20 % des bases)

3,8

Cotisation minimale de taxe professionnelle (2009)

2,6

Source : rapport de Philippe Valletoux, Conseil économique et social, novembre 2006

L'ensemble des collectivités pourrait ainsi se voir garantir un pouvoir de fixation des taux , les communes et intercommunalités sur la part foncière, les départements et régions sur la part liée à la valeur ajoutée.

Il sera surtout nécessaire de prévoir une certaine période de transition pour lisser les effets de la réforme tant à la baisse qu'à la hausse, tant pour les collectivités que pour les entreprises. De plus, des évaluations suffisamment précises doivent être conduites pour mesurer l'impact d'une éventuelle réattribution des impôts locaux entre leurs différents bénéficiaires.

En conclusion, la mission souhaite à ce stade poser la problématique d' une certaine spécialisation des deux nouveaux impôts économiques locaux , dont le but serait de rendre l'impôt plus lisible pour le contribuable et de limiter le « millefeuille » fiscal. Elle réaffirme que les contraintes spécifiques de l'équilibre des budgets locaux nécessitent pour toutes les collectivités et groupements de disposer d'assiettes larges et stables quel que soit le cycle économique.

Propositions de la mission

- Scinder en deux parts l'impôt économique local :


• une première part assise sur le foncier, sous condition d'une actualisation et d'une modernisation des valeurs locatives prises en compte : cette part pourrait (après simulation) être attribuée aux communes et aux intercommunalités ;


• une seconde part assise sur la valeur ajoutée des entreprises, qui pourrait être attribuée aux départements et aux régions.

- Elargir la cotisation minimale de taxe professionnelle, après simulations et durant une période de transition, et l'attribuer aux communes et à leurs intercommunalités, en complément de la part de l'impôt économique assise sur le foncier.

5. D'autres pistes de travail pourraient être approfondies

Même en prévoyant une période longue de transition, l'adéquation entre les contributions des entreprises et les ressources des collectivités peut être difficile à trouver. C'est pourquoi plusieurs pistes de travail pourraient être explorées, à titre temporaire ou permanent, sous condition d'évaluation. Elles pourraient également permettre d'élargir les bases de l'imposition, ce qui est un impératif de justice et d'efficacité.

Il s'agit par exemple de prévoir une taxation spécifique des entreprises du secteur de l'énergie , grandes bénéficiaires de la transformation de la taxe professionnelle. Une telle taxation permettrait également de répondre aux nouveaux impératifs écologiques. Il faut cependant noter que l'idée parfois évoquée de renforcer la fiscalité sur les éoliennes ou sur d'autres équipements liés à des énergies renouvelables aurait un effet contre-productif par rapport à la philosophie du « Grenelle de l'environnement ». Il pourrait également s'agir d'une taxation sur les autres entreprises en situation de monopole, qui sont cependant de moins en moins nombreuses.

En outre, l'idée d' une taxation globale de l'activité avec une assiette très large englobant les administrations publiques pourrait être étudiée, comme cela a été mentionné précédemment. Elle induirait un coût pour l'Etat et la sécurité sociale au travers des budgets des établissements de santé ou des universités, mais elle pourrait être le pendant de la suppression totale ou partielle des dégrèvements et exonérations qui pèsent lourdement sur le budget de l'Etat. Elle aurait surtout une légitimité fiscale : l'occupation du territoire par des activités et services crée des contraintes en termes d'aménagement.

C. RÉFLÉCHIR ÉGALEMENT, DANS UNE OPTIQUE D'ENSEMBLE, AUX AUTRES TAXES LOCALES

Les valeurs locatives cadastrales une fois modernisées, les autres recettes fiscales locales souffrent de moins d'inconvénients que la taxe professionnelle. Cependant, la richesse des bases est là aussi très inégalement répartie sur le territoire, ce qui pose la question de la péréquation (cf. infra ).

On peut tout de même relever que la concentration des produits sur les « quatre vieilles » ne doit pas masquer l'extrême complexité et profusion des taxes locales. Un inventaire général du ministère de l'intérieur 138 ( * ) présente ainsi une liste des 51 « principaux » impôts locaux ! Certains ont été réformés depuis, mais le nombre reste important et les procédures difficiles à comprendre pour les élus et pour les contribuables.

en milliards d'euros, pour l'ensemble des collectivités et groupements

2005

Produit des « quatre vieilles »

56,9

Taxe d'enlèvement des ordures ménagères

4,3

Versement transport

5,0

Taxe pour frais de chambre d'agriculture, de commerce et d'industrie

et de chambre des métiers

1,6

Droits de mutation

7,6

Taxes liées à l'urbanisme

0,8

Taxe sur l'électricité

1,4

Taxe sur les cartes grises

1,5

Autres recettes fiscales directes et indirectes

1,0

Total de la fiscalité locale

80,1

Source : direction générale des impôts, état fiscal 1913, résumé général des rôles

En outre, les produits perçus sont extrêmement variables. Si la taxe professionnelle, les taxes foncières, la taxe d'habitation, la taxe d'enlèvement des ordures ménagères, le versement transport et les droits de mutation représentent 92 % du produit total de la fiscalité locale, directe et indirecte, le produit de certaines autres taxes est très faible, ce qui se justifie lorsqu'elles ne s'appliquent que sur une partie du territoire. Parmi ces taxes et impôts, on peut citer les redevances et taxes funéraires (11 millions d'euros en 2007), l'impôt sur les spectacles (33 millions), la taxe de ski de fond (2 millions), la taxe sur les remontées mécaniques (40 millions), la surtaxe sur les eaux minérales (19 millions), la taxe sur l'énergie hydraulique (5 millions), ou la taxe sur les rhums (5 millions).

On peut également mentionner la taxe de trottoirs ou la taxe de pavage, impôts facultatifs perçu par l'Etat au profit des communes ; le rendement de cette dernière était inférieur à 3 millions d'euros en 2001 pour l'ensemble du territoire national. Il serait intéressant en l'espèce de rapprocher le produit perçu du coût de la levée et de la perception de l'impôt.

Certaines de ces taxes locales résultent de l'histoire, mais ont perduré. Il semble souhaitable aujourd'hui de procéder à un « toilettage » de l'ensemble de la fiscalité locale , car les coûts liés à l'existence même de ces impôts sont certainement équivalents, dans certains cas, à leurs produits. Pour autant, ils ont parfois une justification locale forte (stations de ski par exemple), même si leur produit est faible au niveau national.

Par ailleurs, diverses réflexions doivent être menées concernant des ressources fiscales devenues importantes pour les collectivités.

Il en est ainsi des droits de mutation , qui regroupent d'une part les taxes additionnelles communale et départementale aux droits de mutation, d'autre part, le droit départemental d'enregistrement et la taxe départementale de publicité foncière, sur lesquels s'appliquent également une part encore affectée au budget de l'Etat. Les taux sont soit fixés par le législateur, soit plafonnés : tous les départements appliquent par exemple le taux plafond (3,6 %) du droit départemental d'enregistrement.

Le produit perçu par les collectivités et par l'Etat a connu un dynamisme important ces dernières années ; celui affecté aux budgets des collectivités territoriales est ainsi passé de 7,6 milliards en 2005 à 10,1 milliards en 2007, soit +33 % en deux années ! Calculés en pourcentage du prix des biens cédés et donc très liés aux évolutions du marché immobilier, les droits de mutation restent cependant très volatils et l'effet est presque immédiat sur les budgets locaux, car, contrairement à la taxe professionnelle, le décalage entre le calcul de la contribution, son paiement et son versement à la collectivité n'est que de quelques mois.

De plus, cet impôt est très inégalement réparti sur le territoire , puisque son assiette dépend directement de la valeur des biens cédés. Il pourrait alors être envisagé soit une réaffectation du produit à un niveau plus large que celui du département, en compensation d'une autre ressource fiscale, soit un écrêtement permettant d'alimenter le nouveau fonds national de péréquation (cf. infra ).

Dans un contexte de montée en puissance des charges de collecte et de traitements des déchets, conjugué à une pression de plus en plus lourde sur les « quatre vieilles » taxes locales, les collectivités ont régulièrement augmenté les produits votés au titre de la taxe d'enlèvement des ordures ménagères (TEOM). Au total, 53,8 millions d'habitants sont assujettis à cet impôt facultatif en 2008, pour un produit total de 5 milliards d'euros. On peut d'ailleurs noter le caractère relativement indolore de cette augmentation, puisque cette taxe est prélevée en même temps et sur la même base que la taxe foncière sur les propriétés bâties.

Pourtant, une telle utilisation de la TEOM semble arrivée à saturation et, en lien avec les réflexions générales sur la fiscalité écologique, il est maintenant important d'engager une évaluation de son assiette. Il s'agit notamment de prévoir son élargissement et des possibilités de modulation du taux ou du prélèvement sur le contribuable, notamment en fonction de critères de tri et de recyclage.

Le versement destiné aux transports en commun , dont le produit total s'élevait à 5 milliards d'euros en 2005, a également été utilisé par les collectivités ou leurs groupements comme complément de financement.

Souvent critiqué par les chefs d'entreprises, il est perçu au bénéfice des communes, des communautés urbaines et des autres EPCI compétents pour l'organisation des transports publics, lorsque la population concernée est supérieure à 10 000 habitants. Il est facultatif en dehors de la région Ile-de-France.

L'assiette du versement est constituée par les salaires versés par les entreprises qui emploient plus de neuf salariés. Le taux plafond du versement varie selon la population de la collectivité ou du groupement : en-dehors de la région Ile-de-France, il est égal à 0,55 % lorsqu'elle est comprise entre 10 000 et 100 000 habitants, à 1 % lorsqu'elle est supérieure à 100 000 habitants et il est majoré à 1,75 % pour les collectivités et groupements de plus de 100 000 habitants qui réalisent une infrastructure de transport collectif en mode routier ou guidé. En région Ile-de-France, le taux est fixé par le syndicat des transports d'Ile-de-France (Stif) et il est plafonné à 2,6 % à Paris et dans les Hauts-de-Seine, à 1,7 % en Seine-Saint-Denis et dans le Val-de-Marne et à 1,4 % dans les quatre autres départements (Essonne, Yvelines, Val d'Oise et Seine-et-Marne).

Le produit du versement transport est affecté au financement des dépenses d'investissement et de fonctionnement des transports publics urbains et des autres services de transports publics. Les employeurs procèdent eux-mêmes au versement auprès des organismes chargés du recouvrement des cotisations de sécurité sociale, qui prélèvent une retenue pour frais de gestion. Enfin, pour revenir au débat sur le rôle des collectivités dans la perception effective de l'impôt, on peut noter que le code général des collectivités territoriales permet à la commune ou à l'EPCI d'effectuer « tout contrôle nécessaire » au titre du versement transport, notamment envers les employeurs assujettis.

Une autre imposition pourrait être complétée et étendue : la taxe sur les cessions de terrains nus rendus constructibles du fait de leur classement par un plan local d'urbanisme ou un document d'urbanisme en tenant lieu dans une zone urbaine ou dans une zone à urbaniser ouverte à l'urbanisation. Cette taxe facultative a été créée, à l'initiative du Sénat, par l'article 26 de la loi du 13 juillet 2006 portant engagement national pour le logement. Elle connaît un succès certain, puisque, à la date du 10 juillet 2008, 3 735 communes ont pris une délibération pour la mettre en place, mais ses modalités et son périmètre restent à améliorer . Elle est en tout cas une réponse à la question toujours d'actualité de l' imposition des plus-values immobilières .

Proposition de la mission

- Réexaminer l'ensemble des nombreuses taxes locales (autres que les quatre principales), dont les rendements sont parfois faibles.

D. L'ATTRIBUTION DE PARTS D'IMPÔTS NATIONAUX DOIT ÊTRE LIMITÉE, DANS LA MESURE OÙ ELLE DIMINUE L'AUTONOMIE FISCALE

Lors des différentes phases de la décentralisation et des transferts de compétences de l'Etat vers les collectivités territoriales, la question du financement a toujours été essentielle et en même temps le « parent pauvre » de la réforme : il s'est en effet souvent agi de simplement compenser le coût des charges transférées à l'euro près, calculé au moment du transfert et non réévalué en fonction de leur évolution intrinsèque. Ces diverses compensations ont été opérées au cas par cas, parfois par des dotations budgétaires, mais principalement par l'attribution de parts d'impôts dits nationaux. Cette dernière solution cristallise souvent les débats, alors qu'elle a été organisée de facto de la même manière que si on avait choisi la solution de la dotation.

L'affectation de parts d'impôts nationaux peut en effet s'effectuer de deux manières totalement distinctes :

- soit on fixe un montant à transférer aux collectivités et on prélève un pourcentage du produit total de l'impôt, quelle que soit l'assiette fiscale. C'est le parti qui a été choisi en France : le législateur fixe chaque année en loi de finances un taux correspondant au montant de la compensation à effectuer ;

- soit on attribue une part additionnelle d'impôt aux collectivités. C'est le choix de financement qui est largement répandu dans les pays du Nord de l'Europe, où les collectivités disposent par exemple d'une grande liberté pour la fixation du taux de l'impôt local sur le revenu des personnes physiques 139 ( * ) .

Dans les faits, l'attribution de parts d'impôts nationaux a eu pour conséquence en France la diminution de l'autonomie fiscale des collectivités , car la liberté de fixation d'un taux ou la marge d'action sur l'assiette est nulle ou extrêmement réduite. Ainsi, le large transfert, au début des années quatre-vingt, des droits de mutations et taxes assimilées a certes bénéficié aux collectivités dans certains périodes d'euphorie immobilière, mais ce dynamisme a masqué l'absence de liberté des collectivités : l'assiette ne dépend pas de l'action de la collectivité et le taux a été fixé par le législateur ou plafonné à un niveau qui fait que tous les départements sont au taux plafond.

Par ailleurs, on peut relever une certaine contradiction dans l'utilisation de la TIPP comme compensation du transfert de charges en direction des régions. Celles-ci exercent largement une compétence de transport, mais en matière ferroviaire, alors que la TIPP est liée à la consommation de carburants...

Dans le cas d'une part additionnelle d'impôt affectée aux collectivités, celles-ci bénéficient de l'évolution de l'assiette fiscale lorsqu'elle progresse ou en pâtissent, lorsqu'elle est négative ou stable.

Ce serait donc plutôt cette voie qu'il serait nécessaire de privilégier, lorsque l'assiette est localisable : elle permet aux collectivités de voter un taux additionnel et elle ne prête pas le flanc aux récriminations permanentes, notamment à l'occasion de l'examen de chaque loi de finances initiale, sur le bas niveau de la compensation opérée à destination des collectivités.

Dans cet esprit, on peut rappeler la réforme, engagée puis abandonnée, de création d'une taxe départementale sur le revenu 140 ( * ) , en substitution de la part départementale de la taxe d'habitation : en même temps qu'il adoptait une actualisation des valeurs locatives, le législateur créait, à compter du 1 er janvier 1992, une taxe départementale sur le revenu assise sur le montant net des revenus et plus-values pris en compte pour le calcul de l'impôt sur le revenu établi au titre de l'année précédente et dont les conseils généraux auraient voté chaque année le taux, dans le cadre général des règles de lien entre les taux. Annulée par la loi de finances pour 1992, cette réforme n'est jamais entrée en vigueur, car elle entraînait des transferts de charges importants entre contribuables.

Si les conditions de « basculement » de l'imposition n'ont pas permis la mise en oeuvre de cette réforme, l'idée d'asseoir une partir de la fiscalité locale sur une assiette telle que le revenu a eu des défenseurs parmi les membres de votre mission. Pratiquée par plusieurs pays européens (Belgique, Danemark, Finlande, Italie...), elle présente en effet plusieurs avantages : justice, équité et relative stabilité.

Pour autant, depuis 1990, l'impôt sur le revenu a fortement évolué, puisque, à l'instar de ce qui a été décidé pour la taxe professionnelle, son assiette a été continuellement réduite. Parallèlement, la contribution sociale généralisée (CSG) s'est affirmée comme un impôt moderne et efficace grâce à son assiette large et son prélèvement à la source : après avoir été tant décriée lors de son adoption, elle a été de plus en plus utilisée.

Ainsi, une réflexion pourrait être engagée sur l'attribution aux départements, en lien avec leurs larges compétences dans le secteur social, d'une part additionnelle à la CSG . Les départements pourraient certainement moduler ce taux, éventuellement dans une fourchette fixée par le législateur, la territorialisation de l'assiette ne posant pas de problème insurmontable .

Il est à cet égard important de rappeler la situation spécifique des départements : une grande partie de leurs dépenses sont contraintes et strictement encadrées au niveau national, si bien que diminuer leur autonomie fiscale tendrait à les transformer en services déconcentrés de l'Etat, sans marge de manoeuvre budgétaire réelle, que ce soit sur les recettes ou sur les dépenses.

Enfin et pour mémoire, dans six pays européens, principalement des Etats fédéraux, la TVA est partagée entre l'Etat et certains niveaux de collectivités territoriales. Pour cette imposition, il ne semble pas possible pour des raisons pratiques et de conformité au droit communautaire de fixer localement une part du taux, mais il est également nécessaire de rappeler que, dans ces pays, l'Etat et les collectivités partagent un pourcentage préfixé de la ressource TVA. Si la ressource était ainsi partagée en France, elle poserait cependant une série de problèmes, notamment pour les modalités de répartition du produit entre les collectivités.

Proposition de la mission

- L'attribution de parts d'impôts nationaux aux collectivités est envisageable, mais ne doit pas avoir pour conséquence une diminution de leur autonomie fiscale.

IV. LA PÉRÉQUATION : PASSER À L'ACTE

L' autonomie fiscale , qui a précédemment été posée comme un principe consubstantiel à la démocratie locale , n'a de sens que si elle est accompagnée d'une péréquation forte et juste, permettant de rééquilibrer les différences de richesse entre les territoires.

Or, la péréquation est une question récurrente des finances locales, car toutes les collectivités sont loin d'avoir les mêmes bases fiscales . Le terme même, un peu barbare et technocratique, est une difficulté, mais aucun autre ne s'y substitue facilement, à l'exception peut-être de celui de solidarité ou de redistribution, dont le sens est cependant riche de connotations. Au total, elle est un grand sujet d'études, de rapports, de discours : on en parle beaucoup mais on la fait peu.

Comme le rappelait le rapport d'étape 141 ( * ) , les inégalités sont particulièrement marquées pour les communes. Si l'on prend en compte l'ensemble des communes de métropole, le potentiel fiscal par habitant varie de 0 euro à plus de 30 000 euros (Omonville-la-Petite, dans le département de la Manche). La moyenne est de l'ordre de 500 euros par habitant. En ce qui concerne les départements de métropole, le potentiel fiscal par habitant s'échelonne de 232 euros pour le département de la Creuse à 991 euros pour celui des Hauts-de-Seine, la moyenne s'établissant à environ 400 euros par habitant. Enfin, l'écart est plus faible dans le cas des régions, puisque le potentiel fiscal par habitant va de 67 euros en Corse à 111 euros pour la Haute-Normandie.

Au-delà des situations exceptionnelles, l'exemple présenté ci-dessous montre les écarts extrêmement importants dans la richesse fiscale entre communes d'un même département, que ce soit au titre des impôts entreprises ou des impôts ménages. L'indicateur de potentiel financier montre que certaines inégalités sont atténuées grâce aux dotations de l'Etat, mais elles laissent perdurer des écarts de richesse, qui vont de 1 à 83 dans l'Ain.

Exemple de quelques communes du département de l'Ain
(419 communes au total)

en euros par habitant
en 2007

Potentiel fiscal
de taxe professionnelle

Potentiel fiscal 3 taxes
(ménages)

Potentiel financier

Armix

0

433

1 667

Flaxieu

0

289

520

Lhopital

0

231

551

Sainte-Olive

2

332

436

Saint-Marcel

3

223

360

Valeur médiane

119

306

578

Valeur moyenne

256

319

727

Bourg-en-Bresse

438

382

1 047

Oyonnax

475

287

966

Groissiat

1 441

399

1 914

Arbent

1 600

427

2 114

Blyes

1 708

554

2 334

Brion

1 723

430

2 221

Saint-Vulbas

18 380

5 296

23 752

Source : DGCL, CD-ROM « Dotation globale de fonctionnement »

Bases de taxe professionnelle du secteur communal en 2006

Source : DGCL, in «Le guide statistique de la fiscalité directe locale 2006 »

La péréquation répond dorénavant à une exigence constitutionnelle , puisque l'article 72-2 de la Constitution précise, depuis l'adoption de la loi constitutionnelle relative à l'organisation décentralisée de la République 142 ( * ) , que « la loi prévoit des dispositifs de péréquation destinés à favoriser l'égalité entre les collectivités territoriales ».

Cette rédaction est cependant moins volontariste que celles proposées initialement par le Gouvernement et par le Sénat en première lecture :

- le projet de loi initial indiquait en effet que « la loi met en oeuvre des dispositifs pouvant faire appel à la péréquation en vue de corriger les inégalités de ressources entre les collectivités territoriales » ;

- le texte adopté par le Sénat en première lecture précisait de son côté que « la loi prévoit des dispositifs de péréquation destinés à compenser les inégalités entre collectivités territoriales ».

Finalement, la Constitution ne prévoit pas de « compenser les inégalités », mais de « favoriser l'égalité ».

En tout état de cause, le bilan des dispositifs de péréquation qui se sont succédé est plutôt mitigé . Comme l'indiquait le rapport d'étape de la mission, si certains résultats peuvent être significatifs, ils masquent le fait que les mécanismes actuels sont illisibles et d'une complexité telle que leur gestion est rendue difficile.

On distingue généralement deux types de péréquation :

- verticale , qui consiste en une meilleure répartition des concours financiers de l'Etat ;

- horizontale , qui fonctionne par prélèvement sur les recettes fiscales des collectivités disposant d'un niveau élevé de ressources.

La péréquation horizontale est très peu développée et la péréquation verticale reste également limitée . Ainsi, la vocation principale de la DGF, principal concours de l'Etat aux collectivités territoriales, n'est pas de rectifier les écarts de richesse 143 ( * ) et l'efficacité de ses mécanismes de péréquation semble décroître 144 ( * ) , même si le poids des dotations dites de péréquation progresse en son sein grâce à l'accroissement rapide de la DSU et de la DSR.

(en millions d'euros)

2004

2008

évolution

Masse de DGF à répartir

36 737

40 056

9,0 %

Dotation forfaitaire des communes

13 643

14 003

2,6 %

Dotation de solidarité urbaine (DSU)

635

1 094

72,2 %

Dotation de solidarité rurale (DSR)

421

711

69,1 %

Dotation nationale de péréquation (DNP)

569

689

21,2 %

Dotation d'intercommunalité

1 939

2 328

20,1 %

Dotation de péréquation des départements

866

1 300

50,2 %

Dotation de péréquation des régions

76

152

101,0 %

Total des dotations de péréquation

4 504

6 274

39,3 %

Poids dans la DGF

12%

16%

Source : comptes rendus des réunions du Comité des finances locales (DGCL)

La péréquation allie deux aspects , qu'il est nécessaire de nettement distinguer et de réformer parallèlement : ses ressources et ses bénéficiaires .

A. QUELLES RESSOURCES POUR LA PÉRÉQUATION ?

1. Améliorer l'attribution des concours de l'Etat aux collectivités territoriales : la péréquation verticale

Aujourd'hui, le bilan péréquateur de la DGF est faible , voire très faible. Les dotations pouvant être qualifiées de péréquatrices en représentent 15 % du total : 14 % au niveau communal, 36 % au niveau intercommunal, 10 % au niveau départemental et 3 % au niveau régional. Encore est-il nécessaire de préciser que la dotation d'intercommunalité ne prend en compte que partiellement les indicateurs de richesse fiscale ou financière.

en milliards d'euros, en 2007

Dotation pouvant être qualifiée de...

forfaitaire

péréquation

DGF des communes

Dotation forfaitaire

13,8

Dotation de solidarité urbaine (DSU)

1,0

Dotation de solidarité rurale (DSR)

0,7

Dotation nationale de péréquation (DNP)

0,7

Total

13,8

2,4

soit

86 %

14 %

DGF des groupements

Dotation de compensation

4,0

Dotation d'intercommunalité

2,2

Total

4,0

2,2

soit

64 %

36 %

DGF des départements

Dotation de compensation

2,8

Dotation forfaitaire

7,7

Dotation de péréquation urbaine (DPU)

0,48

Dotation de fonctionnement minimale (DFM)

0,65

Total

10,4

1,1

soit

90 %

10 %

DGF des régions

Dotation forfaitaire

5,1

Dotation de péréquation

0,1

Total

5,1

0,1

soit

97 %

3 %

Total de la DGF 2007

Total global

33,3

5,8

soit

85 %

15 %

Source : comptes rendus des réunions du Comité des finances locales (DGCL)

Or, la masse financière de la DGF doit naturellement en faire un outil privilégié de la péréquation renouvelée ; pour cela, il est nécessaire de faire évoluer les dotations forfaitaires des collectivités qui en ont le moins besoin. Ces dotations ne sont plus le reflet d'une quelconque réalité, mais sont souvent la cristallisation d'avantages acquis au fil des trente années de réforme permanente des finances locales, puisque de multiples éléments, en dernier lieu la compensation de la part salaires de la taxe professionnelle, y ont été amalgamés et évoluent dorénavant de manière indifférenciée.

Pour autant, il faut souligner que les dotations de péréquation, au premier chef la DSU et la DSR, ont fortement progressé dans les dernières années par un effort exceptionnel de l'Etat, mais une réorientation massive du dispositif par ce seul biais, si elle était encore possible malgré les contraintes budgétaires de l'Etat, prendrait en tout état de cause des dizaines d'années en raison de la forte inertie des dotations forfaitaires .

Proposition de la mission

-  Dégager des ressources pour les dotations de péréquation (DSU, DSR, dotation d'intercommunalité, dotations de péréquation départementales et régionales) à partir d'une réforme des dotations forfaitaires qui doivent être corrigées afin de favoriser une plus grande équité et d'éviter les effets de seuil.

2. Généraliser et renforcer les deux dispositifs principaux de péréquation horizontale

Le fonds de solidarité entre les communes de la région Ile-de-France (FSRIF)

Le FSRIF, créé en 1991, a pour objectif de contribuer à l'amélioration des conditions de vie dans les communes urbaines d'Ile-de-France supportant des charges particulières au regard des besoins sociaux de leur population sans disposer de ressources fiscales suffisantes. Il assure une redistribution entre communes par un prélèvement direct sur les ressources fiscales de celles qui sont le plus favorisées au profit de celles qui le sont le moins. La loi a créé en 1999 un second prélèvement sur les communes et les EPCI appliquant une taxe professionnelle de zone.

Le critère déclenchant le premier prélèvement est plutôt large, puisque toute commune dont le potentiel financier par habitant est supérieur d'au moins 25 % à celui de la moyenne des communes de la région est contributrice . Cependant, les communes éligibles à la DSU ou au FSRIF lui-même ne sont pas concernées et, surtout, un plafonnement a été mis en place pour contrebalancer le seuil de déclenchement relativement bas : le prélèvement ne peut pas excéder 5 % des dépenses réelles de fonctionnement de la commune ; 44 des 67 communes contributrices ont ainsi vu leur contribution plafonnée en 2008.

L'assiette de ce prélèvement est constituée du produit de la population par le montant du potentiel financier par habitant qui excède le potentiel financier moyen. A cette assiette est appliqué un taux, progressif selon l'écart avec la moyenne de potentiel financier. Le taux est ainsi de 8 % lorsque le potentiel de la commune se situe entre 25 % et 100 % au-dessus de la moyenne ; il est de 9 % pour les communes entre 100 % et 200 % au-dessus et de 10 % pour les communes au-delà de 200 % de la moyenne.

Le second prélèvement, lié à l'instauration d'une taxe professionnelle de zone, s'applique lorsque les bases de TP par habitant sont supérieures à trois fois la moyenne nationale. Après application de plusieurs plafonds, douze communes sont contributrices à ce prélèvement en 2008.

Au total, les contributions au FSRIF s'élèvent à 176,7 millions d'euros en 2008 , dont 151,4 pour le premier et 25,3 pour le second.

Les principaux contributeurs sont Paris (99,8 millions en 2008), Puteaux (17,6), Courbevoie (10,8), Boulogne-Billancourt (7,0), Levallois-Perret (6,3) et Vélizy-Villacoublay (5,2). En Seine-Saint-Denis, une seule commune est contributrice : Tremblay-en-France (4,4 millions) ; de même dans le Val-de-Marne, une seule commune est contributrice : Rungis (2,7).

L'exemple du FSRIF est intéressant, car il s'agit d' un prélèvement « à la base » sur la richesse fiscale intrinsèque « quatre taxes » de la collectivité, à partir de critères adoptés par le législateur. Il a naturellement été critiqué dans ses modalités d'application, qui, par définition, incluent ou excluent telle ou telle collectivité de la contribution.

M. Bertrand Delanoë, maire de Paris, a estimé, lors de son audition par la mission, que la question de la solidarité financière au sein de l'agglomération parisienne devait être posée. Relevant que le fonds de solidarité pour l'Ile-de-France était d'un montant insuffisant, en dépit de l'importante contribution versée par Paris, il a jugé nécessaire de renforcer considérablement ces mécanismes de solidarité, même si cela représente un coût supplémentaire pour les collectivités les plus riches.

En tout état de cause, le principe même du FSRIF, c'est-à-dire un prélèvement relativement limité effectué lorsque le potentiel fiscal ou financier d'une collectivité dépasse un certain seuil, devrait pouvoir être repris pour l'ensemble du territoire .

Il doit cependant y être adapté, notamment pour mieux prendre en compte l'existence des EPCI, à TPU ou à fiscalité additionnelle, qui sont nettement plus nombreux en province qu'en Ile-de-France.

De plus, il pourrait s'organiser sur une base régionale, afin de lui conserver une certaine lisibilité pour le citoyen - contribuable, mais cette solution aurait pour inconvénient de circonscrire la solidarité financière à l'intérieur d'un territoire par définition restreint.

Proposition de la mission

- Adapter à l'ensemble du territoire, sur une base régionale, les mécanismes du fonds de solidarité entre les communes de la région Ile-de-France (FSRIF).

Les fonds départementaux de péréquation de la taxe professionnelle (FDPTP)

Les FDPTP sont principalement alimentés par l'écrêtement de la taxe professionnelle provenant d'établissements considérés comme exceptionnels (583 millions d'euros en 2008), mais également par un prélèvement sur les recettes fiscales de certains EPCI à taxe professionnelle unique (194 millions) et par des attributions compensatrices provenant de l'Etat en raison des réformes successives de la TP (141 millions). Au total, les sommes gérées par les FDPTP s'élèvent à 918 millions .

Un établissement est considéré comme exceptionnel lorsque ses bases de taxe professionnelle, divisées par le nombre d'habitants de sa commune d'implantation, excèdent un seuil égal à deux fois la moyenne nationale des bases de TP par habitant. Le mécanisme concerne donc avant tout les petites communes , puisque l'écrêtement est déclenché à partir d'un seuil exprimé en euros par habitant. Les ressources des FDPTP sont le produit des bases excédentaires par le taux de taxe professionnelle en vigueur dans la commune : d'une part, cette disposition ne permet pas de lutter contre la faiblesse de certains taux d'imposition ; d'autre part, elle n'assure pas un montant péréqué à hauteur de l'importance physique, mais simplement relative, de l'établissement.

Par ailleurs, un certain nombre d'EPCI à TPU ne font plus l'objet d'écrêtement, mesure prise pour encourager leur création et les faire bénéficier du dynamisme de bases de taxe professionnelle ; ils sont soumis à un prélèvement sur leurs recettes fiscales qui est égal au montant du dernier écrêtement constaté l'année précédant leur constitution et dont la hausse est encadrée, puisqu'il ne peut augmenter plus vite que la DGF.

Les FDPTP ont été réformés à plusieurs reprises et présentent naturellement des marges d'amélioration , mais leur principe doit être préservé et amplifié , car ils assurent une réelle redistribution des ressources provenant de la localisation sur le territoire d'entreprises spécifiques par leur taille.

En conclusion, le FSRIF et les FDPTP constituent des mécanismes de péréquation horizontale, situés dans le même esprit mais différents : le premier prévoit un prélèvement assis sur le potentiel financier de la collectivité, les seconds un plafonnement de la recette de TP perçue par la collectivité sur les établissements dits exceptionnels et un abondement d'un fonds départemental par ces sommes « excédentaires ». Pour être juste, leur réforme doit donc être complémentaire et coordonnée .

Proposition de la mission

- Conserver et adapter aux nouvelles parts de l'impôt économique local l'écrêtement existant sur les établissements exceptionnels au titre de la taxe professionnelle.

B. AMÉLIORER LA RÉPARTITION DES RESSOURCES DE LA PÉRÉQUATION

Le reversement des sommes alimentant la péréquation pose des questions relatives aux bénéficiaires, aux critères d'attribution et aux modalités de leur gestion.

1. Limiter le nombre de bénéficiaires de la péréquation

Les dispositifs de péréquation souffrent à la fois des montants limités qui leur sont attribués et de leur faible concentration. Ils bénéficient souvent à un trop grand nombre de collectivités :

- la moitié des communes de plus de 10 000 habitants d'Ile-de-France sont éligibles au FSRIF , ainsi que les premiers 18 % des communes de 5 000 à 9 999 habitants ;

- les trois quarts des villes de plus de 10 000 habitants sont éligibles à la DSU ;

- 4 115 communes ont bénéficié de la fraction « bourg-centres » de la DSR en 2007 et 34 401 de sa fraction péréquation ;

- 33 départements ont bénéficié de la dotation de péréquation urbaine en 2007 et 63 de la dotation de fonctionnement minimale, versée aux départements « non urbains ». De fait, presque tous les départements touchent une dotation de péréquation de la DGF ;

- 13 régions sont éligibles à la dotation de péréquation de la DGF en 2007.

Même si les dispositifs de péréquation sont amplifiés, leurs ressources doivent être plus concentrées.

Proposition de la mission

- Réduire le nombre des bénéficiaires des différents mécanismes de péréquation pour les rendre plus efficaces. Une dotation ou une ressource de péréquation doit par exemple bénéficier à moins de la moitié des collectivités d'une même catégorie.

2. Généraliser l'utilisation d'indices synthétiques, qui sont plus justes et évitent les effets de seuil

La DSU et le FSRIF utilisent des indices synthétiques pour calculer le montant des dotations attribuées aux bénéficiaires. Cette méthode permet à la fois d' éviter les effets de seuil et d' assurer une distribution plus adaptée aux besoins et plus juste des fonds .

L'indice utilisé pour le FSRIF fait intervenir quatre critères : le potentiel financier par habitant à hauteur de 55 %, la proportion de logements sociaux pour 15 %, la proportion de bénéficiaires d'allocation personnelle au logement pour 20 % et le revenu par habitant pour 10 %.

Le projet de loi de finances pour 2009 prévoyait initialement, outre une réduction du nombre de bénéficiaires de la DSU, une simplification des critères de l'indice synthétique, mais, à la suite des réactions des associations d'élus devant l'absence de concertation préalable, le Parlement n'a pas modifié pour 2009 les modalités de calcul de son indice, qui reste lié au potentiel financier pour 45 %, aux logements sociaux pour 15 %, aux allocations logement pour 30 % et au revenu pour 10 %.

Proposition de la mission

-  Prendre pour base de comparaison des indices synthétiques pour la répartition des sommes allouées à la péréquation.

3. Créer un fonds national de péréquation

La gestion des FDPTP relève de la compétence du conseil général , qui dispose de marges de manoeuvre assez larges. Après versement aux communes et syndicats concernés des annuités d'emprunts contractés avant le 1 er juillet 1975, le conseil général répartit le solde entre les communes dites concernées (celles qui sont situées à proximité et qui subissent un préjudice ou une charge et celles qui accueillent au moins dix salariés de l'établissement, représentant avec leurs familles au moins 1 % de la population communale) et les communes dites défavorisées au regard de la faiblesse de leur potentiel fiscal ou de l'importance de leurs charges. Chacune de ces deux catégories doit recevoir au moins 40% du solde à répartir.

Les ressources des FDPTP en provenance d'un EPCI font l'objet de modalités spécifiques de répartition, puisqu'un reversement prioritaire, compris entre 20 % et 75 % selon le groupement, est attribué aux EPCI concernés.

Les conseils généraux ont fourni un important travail d'élaboration des règles de redistribution des fonds provenant des FDPTP, mais le strict cadre départemental , même élargi parfois à un niveau interdépartemental, ne semble pas suffisant pour assurer une réelle justice .

Il existait pourtant un fonds national de péréquation de la taxe professionnelle (FNPTP) et un fonds national de péréquation (FNP), mais ils étaient devenus un assemblage de recettes et de dépenses diverses, peu lisible et source de complexité. La loi de finances initiale pour 2004 a supprimé le FNPTP et lui a substitué un prélèvement sur les recettes de l'Etat permettant de verser une compensation dégressive aux communes et EPCI qui enregistrent une perte importante de bases d'imposition à la taxe professionnelle ou de ressources de redevance des mines. Le FNP était destiné à des communes ayant un faible potentiel fiscal et un effort fiscal supérieur à la moyenne ; répartie selon les règles applicables pour le FNP, la nouvelle dotation nationale de péréquation (DNP) est intégrée depuis 2004 à la DGF.

Les principales raisons qui ont justifié la suppression de ces mécanismes nationaux étaient la faiblesse des montants, le nombre important de bénéficiaires et la complexité des procédures.

En tirant les leçons de cette expérience, il peut sembler utile de recréer un fonds national de péréquation, aux ressources renouvelées et aux procédures simplifiées . Une première ressource pourrait provenir de l'écrêtement des établissements dits exceptionnels au titre des deux parts de l'impôt économique local. Une deuxième pourrait être liée à l'extension des mécanismes du FSRIF.

Enfin, une troisième ressource pourrait provenir de la cotisation de péréquation de taxe professionnelle , qui existe déjà et qui est destinée à réduire les différences de taux d'imposition entre collectivités locales. Elle est à la charge des établissements situés dans les communes où le taux global de cette taxe (c'est-à-dire la somme des taux votés par l'ensemble des collectivités et groupements à fiscalité propre) est inférieur au taux global moyen constaté l'année précédente au niveau national. Elle est égale au produit des bases nettes de l'établissement par un taux fixé par le législateur, qui est progressif selon la faiblesse relative du taux global de taxe professionnel constaté : le taux de péréquation est égal à 3,4 % dans les communes où le rapport entre le taux global de la taxe et le taux moyen national est inférieur à 0,5, il est égal à 2,5 % dans celles où ce rapport est compris entre 0,5 et 0,75, enfin, il est égal à 1,6 % dans celles où ce rapport est compris entre 0,75 et 1.

Cette cotisation de péréquation pourrait être adaptée à la réforme de la taxe professionnelle et continuer de s'appliquer sur les deux nouveaux impôts économiques locaux, principalement sur celui assis sur le foncier si le taux de l'impôt sur la valeur ajoutée est encadré entre un taux plancher et un taux plafond.

Depuis 2004, année de la réforme du FNPTP, le produit de cette cotisation, environ un milliard d'euros prévu pour 2009 , est entièrement affecté au budget général de l'Etat ; il pourrait être affecté au nouveau fonds national de péréquation, éventuellement en contrepartie d'une diminution progressive des dégrèvements et exonérations à la charge de l'Etat .

Proposition de la mission

- Créer un véritable fonds national de péréquation, organisé par le législateur et alimenté par trois grandes ressources renouvelées, issues de l'adaptation des mécanismes du FSRIF à l'ensemble du territoire, de l'écrêtement des établissements dits exceptionnels, et d'une cotisation de péréquation de l'impôt économique local assis sur le foncier, succédant à l'actuelle cotisation de péréquation de la taxe professionnelle.

PROPOSITIONS DE LA MISSION

I. - PROPOSITIONS RELATIVES À LA GOUVERNANCE TERRITORIALE

1. Créer, par la loi, une nouvelle catégorie d'EPCI dénommés « métropoles » dont les communes membres resteraient des collectivités territoriales de plein exercice.

2. Prévoir la faculté, par la loi, d'ériger les métropoles en collectivités territoriales de plein exercice, en lieu et place des communes membres, sur délibérations concordantes de celles-ci.

3. Fixer dans la loi des critères d'accès au statut de métropole et de délimitation du périmètre métropolitain et créer par la loi un nombre limité de métropoles, par exemple : Lyon, Lille, Marseille, Toulouse, Nice, Bordeaux, Nantes, Strasbourg.

4. Arrêter par décret le périmètre de la métropole après consultation des conseils municipaux concernés.

5. Attribuer un siège au moins à chaque commune membre dans le conseil métropolitain.

6. Fixer un ratio démographique pour l'attribution des sièges restants.

7. Désigner les conseillers métropolitains au suffrage universel direct par fléchage sur les listes de candidats aux élections municipales.

8. Définir un bloc minimal de compétences obligatoires des métropoles, à partir des compétences obligatoires des communautés urbaines créées après la loi du 12 juillet 1999 et qui correspondent aux grandes fonctions métropolitaines.

9. Réaffirmer la possibilité de délégations de compétences des départements et régions aux métropoles, et ouvrir la même possibilité de délégation pour l'Etat.

10. Reconnaître la capacité d'initiative de la métropole pour proposer l'organisation d'un champ de compétences nouveau : la mise en réseau du territoire péri-métropolitain.

11. Assouplir les outils de coopération existants pour les mettre à la disposition des métropoles, tels les syndicats mixtes.

12. Instituer une autorité organisatrice unique pour organiser les transports dans l'aire métropolitaine.

13. Instituer une dotation globale de fonctionnement (DGF) métropolitaine à la demande des communes membres.

14. Permettre l'institution, par décision des communes membres, d'une fiscalité communautaire se substituant progressivement aux fiscalités communales.

15. Faire émerger une gouvernance métropolitaine démocratique sur le périmètre de la métropole parisienne.

16. Apporter un soutien au plan de développement des transports en Ile-de-France élaboré conjointement par l'Etat et le conseil régional.

17. Recourir à des agences, en particulier dans le domaine économique, pour mutualiser les moyens et créer des outils communs à la métropole parisienne.

18. Renforcer les mécanismes de solidarité entre les territoires qui composent la métropole parisienne.

19. Dans les communes de plus de 500 habitants, répartir les sièges de conseillers communautaires de la même manière que pour les conseillers municipaux.

20. Limiter par la loi, en fonction de la population, la taille des exécutifs des conseils communautaires.

21. Faire disparaître les seuils ayant un effet dissuasif sur les groupements de communes à fiscalité propre ou sur l'élargissement des communautés existantes.

22. Remplacer la conférence régionale des exécutifs par un conseil régional des exécutifs , dont les réunions seraient obligatoires, pour retenir les orientations et faciliter les arbitrages nécessaires à la conduite des politiques territoriales.

23. Inclure, dans la composition du conseil régional des exécutifs, le président du conseil régional, les présidents des conseils généraux, les présidents des communautés urbaines, des communautés d'agglomération et des communautés de communes de plus de 50 000 habitants et un représentant par département des communautés de communes de moins de 50 000 habitants, désigné par elles, ainsi que, le cas échéant, les présidents de métropoles.

24. En tant que de besoin, le président du conseil régional des exécutifs peut associer à une négociation en cours le responsable d'une collectivité locale non représentée au conseil.

25. Assurer une périodicité trimestrielle aux réunions du conseil régional des exécutifs, sous la présidence du président du conseil régional.

26. Fixer un ordre du jour obligatoire pour les réunions du conseil régional des exécutifs portant sur les sujets entrant dans les attributions confiées à celui-ci.

27. En tant que de besoin ou en cas d'urgence, prévoir la réunion du conseil régional des exécutifs, sur demande d'un de ses membres, sur un ordre du jour comportant la question dont il souhaite débattre.

28. Prévoir la fixation par le conseil régional des exécutifs des objectifs des politiques territoriales engagées par chacun des membres et la définition des schémas d'orientation qu'ils ont à mettre en oeuvre.

29. Prévoir la possibilité pour le conseil régional des exécutifs de procéder à des auditions sur les sujets dont il a à connaître.

30. Faire figurer dans les compétences du conseil régional des exécutifs les sujets relatifs à l'exercice négocié de compétences ou nécessitant une coordination (politique d'investissement, articulation des schémas locaux avec les schémas régionaux).

31. Inscrire à l'ordre du jour obligatoire du conseil régional des exécutifs, pour l'exercice des compétences partagées, des conventions de délégation ou de répartition de compétences, de l'organisation des chefs de filat et les conditions de mise en place de guichets et d'instructions uniques .

32. Affirmer la vocation du conseil régional des exécutifs à se substituer, dans la limite de leurs compétences, aux instances de négociation entre collectivités déjà existantes ou en projet.

33. Informer régulièrement le conseil régional des exécutifs sur les sujets d'intérêt régional, et notamment sur l'avancée de la mise en oeuvre des contrats de projet Etat-région.

34. Prévoir la mise en délibération, dans un délai suffisamment rapproché, au sein des assemblées délibérantes des collectivités représentées au conseil régional des exécutifs, des orientations retenues par le conseil.

35. Créer dans chaque département une conférence départementale des exécutifs regroupant le président du conseil général et les présidents d'intercommunalité et, le cas échéant, de métropole.

36. Réunir cette conférence chaque trimestre, sous la présidence du président du conseil général. Elle serait chargée d'organiser la coordination locale et l'échange entre ses membres. Elle jouerait le rôle de courroie de transmission de l'information à destination du conseil général et du conseil régional des exécutifs.

II. - PROPOSITIONS RELATIVES AUX COMPÉTENCES TERRITORIALES

37. Reconnaître à chacun des niveaux de collectivités une « compétence d'initiative » fondée sur l'intérêt territorial, dans le respect de la répartition des compétences entre les différents échelons et du principe de subsidiarité.

38. Renforcer les compétences obligatoires par niveau de collectivité territoriale.

39. Ouvrir la possibilité pour une collectivité d'agir sur la base d'une procédure de « constat de carence », favorisant une approche négociée de la répartition des compétences.

40. Renforcer le « chef de filat » de la région en matière de développement économique et, dans cette perspective, créer par la loi dans chaque région une structure de coordination partenariale rassemblant tous les acteurs et notamment toutes les agences de développement économique locales.

41. Créer un portail unique au niveau régional en faveur des aides à la création et au développement des entreprises qui rassemblerait tous les intervenants.

42. Créer une agence de développement économique unique propre à chacune des métropoles 145 ( * ) , créées par la loi, qui rassemblerait tous les acteurs locaux et travaillerait en lien étroit avec l'agence régionale.

43. Spécialiser davantage le rôle de chacun des niveaux, les communes et intercommunalités se répartissant les compétences relatives à la promotion et l'accueil des entreprises et au commerce de proximité, les départements se chargeant de l'aménagement, de l'attractivité et de l'animation économiques et les régions de l'innovation, de l'internationalisation et de l'ingénierie financière.

44. Rendre obligatoire l'élaboration d'un plan région/département qui aurait pour objet de décliner les objectifs du CPER et d'intégrer les principaux projets des différents niveaux de collectivités. La mise en oeuvre de ce plan serait coordonnée par le conseil régional des exécutifs.

45. Généraliser le transfert aux régions de la gestion des fonds européens.

46. Adopter des schémas régionaux spécifiques en matière de couverture numérique : téléphonie, haut et très haut débit, télévision numérique terrestre.

47. Maintenir à disposition des intercommunalités et des départements une ingénierie publique au niveau des préfectures et des chambres régionales des comptes.

48. Confirmer la vocation des départements de mettre à disposition des territoires infradépartementaux les outils de conseils juridiques et techniques nécessaires.

49. Créer par la loi des structures régionales de coordination sous la forme d'autorités organisatrices de transport « partenariales » et non hiérarchisées associant les différents intervenants afin de favoriser l'intermodalité, la lisibilité et la péréquation.

50. Transférer la totalité de la compétence transport interurbain à la région afin notamment d'éviter la concurrence entre différents modes de transport collectif.

51. Généraliser le versement transport au bénéfice des nouvelles autorités organisatrices de transport « partenariales » régionales auxquelles il reviendrait d'assurer sa modulation pour chaque territoire desservi en tenant compte du service rendu et en encourageant l'adoption de PDU dans les agglomérations.

52. Rappeler à l'Etat ses engagements et sa mission qui est de financer seul les infrastructures d'intérêt national (LGV, autoroutes, routes nationales...).

53. Développer, au bénéfice des collectivités territoriales, des ressources financières issues des infrastructures pour leur permettre de contribuer au financement des infrastructures de transport d'intérêt local (généralisation de la taxe sur les poids lourds, transfert à l'AFITF et aux collectivités territoriales de la part de l'Etat dans le produit des amendes pour infraction au code de la route, mise en place d'une taxation des plus-values foncières, mise en place d'une modulation des péages ferroviaires pour les TER).

54. Instaurer un livret d'épargne populaire de financement des infrastructures de transport ouvrant la voie à des prêts bonifiés permettant le financement des grandes infrastructures par les collectivités.

55. Affirmer la compétence des communes et des intercommunalités pour l'accueil et la promotion locale.

56. Assurer le financement des équipements touristiques structurants par les communes, les intercommunalités et les départements, avec le soutien des régions pour les équipements de niveau régional.

57. Élaborer une convention Région/Départements/ Intercommunalités pour préciser les champs d'intervention de chaque niveau de collectivité et des communautés. La réalisation et le suivi de cette convention seraient assurés par le conseil régional des exécutifs.

58. Confier aux ARS et aux départements l'élaboration conjointe d'un schéma prescriptif fixant les objectifs pluriannuels partagés dans le domaine médico-social.

59. Prévoir une contractualisation entre les différents acteurs afin de déterminer en commun les modalités d'exécution des orientations fixées par le schéma départemental médico-social.

60. Transférer aux départements le financement de l'allocation adulte handicapé (AAH) et de l'ensemble du financement des établissements et services d'aide par le travail (ESAT).

61. Créer dans chaque département une commission de concertation réunissant des représentants des communes, des EPCI, du conseil général et des caisses d'allocations familiales.

62. Ouvrir, pour les départements et régions volontaires, la possibilité d'exercer à titre expérimental la compétence en matière de médecine scolaire.

63. Coordonner les politiques environnementales au niveau de la région sur les sujets d'intérêt régional, concernant notamment la préservation et la restauration des continuités écologiques, en cohérence avec les orientations nationales fixées par l'Etat.

64. Appeler à une mise en cohérence des différents documents d'urbanisme et de planification (PLU, PLH, PDU) en lien avec les SCOT.

65. Renforcer les compétences des communautés de communes et des communautés d'agglomération afin de leur donner davantage de moyens pour peser sur l'aménagement du territoire et sur les questions environnementales, en particulier pour la gestion de l'eau et l'assainissement.

66. Transférer aux régions le financement des actions concernant les publics spécifiques : ateliers pédagogiques personnalisés (APP), gestion du volet illettrisme du programme IRILL et du programme « objectif cadres ».

67. Confier aux régions la responsabilité d'autoriser la création des centres de formation des apprentis (CFA) et des centres de formation professionnelle et de promotion agricoles (CFPPA) ; assurer la construction et l'entretien des bâtiments nécessaires.

68. Transférer aux conseils régionaux volontaires, à titre expérimental, les compétences détenues par l'Etat en matière de politique de l'emploi.

69. Transfert aux collectivités de rattachement des gestionnaires chargés de l'encadrement des personnels TOS dans les collèges et lycées.

70. Confier à la région un rôle de « chef de file » des interventions locales en faveur de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation, en partenariat avec l'Etat (élaboration d'un schéma régional de l'enseignement supérieur et de la recherche et contractualisation avec les établissements), ainsi que la coordination, dans ce cadre, avec les agglomérations pour les actions relatives à la vie étudiante, ou avec les départements.

71. Associer les régions à la définition de la carte des formations supérieures professionnalisantes en étroite coordination avec l'Etat.

72. Généraliser des instances et outils de concertation entre les acteurs au niveau régional pour assurer, dans le respect des autonomies locales, la coordination des actions, la simplification de certaines modalités d'intervention financières et la définition d'objectifs partagés (conventions d'engagement pluriannuels, schémas régionaux, EPCC...).

73. Instituer une contractualisation au niveau régional afin d'assurer la coordination des interventions et la simplification des modalités d'instruction et de financement des projets (via notamment la désignation de « chef de file » en fonction des domaines d'intervention, la création d'un guichet unique et d'une instruction unique).

74. Confier aux communes et à leurs groupements la construction et la gestion des équipements sportifs, sans préjudice de la responsabilité des départements et régions pour la construction d'installations sportives dans les collèges et lycées ; généraliser la mise à disposition des équipements des collèges et lycées par voie de conventions locales.

III - PROPOSITIONS RELATIVES AUX FINANCES LOCALES

75. Réaffirmer la nécessité de préserver l'autonomie fiscale des collectivités territoriales et de leurs groupements.

76. Procéder à la révision générale des valeurs locatives.

77. Mettre en place des procédures efficaces pour leur réévaluation régulière.

78. Permettre aux collectivités territoriales de prendre toute leur part aux procédures de révision et d'actualisation des valeurs locatives, dans un cadre fixé nationalement par le législateur.

79. Cesser de créer de nouveaux dégrèvements et de nouvelles exonérations.

80. Conforter l'existence du lien fiscal entre les entreprises et les collectivités territoriales.

81. Scinder en deux parts l'impôt économique local :

- une première part assise sur le foncier, sous condition d'une actualisation et d'une modernisation des valeurs locatives prises en compte ; cette part pourrait (après simulations) être attribuée aux communes et aux intercommunalités ;

- une seconde part assise sur la valeur ajoutée des entreprises, qui pourrait être attribuée aux départements et aux régions.

82. Elargir la cotisation minimale de taxe professionnelle, après simulations et durant une période de transition, et l'attribuer éventuellement aux communes et aux intercommunalités en complément de la part de l'impôt économique assise sur le foncier.

83. Réexaminer l'ensemble des nombreuses taxes locales (autres que les quatre principales) dont les rendements sont parfois faibles.

84. L'attribution de parts d'impôts nationaux est envisageable, mais ne doit pas avoir pour conséquence une diminution de leur autonomie fiscale.

85. Dégager des ressources pour les dotations de péréquation (DSU, DSR, dotation d'intercommunalité, dotations de péréquation départementales et régionales) à partir d'une réforme des dotations forfaitaires qui doivent être corrigées afin de favoriser une plus grande équité et d'éviter les effets de seuil .

86. Adapter à l'ensemble du territoire, sur une base régionale, les mécanismes du fonds de solidarité entre les communes de la région Ile-de-France (FSRIF).

87. Conserver et adapter aux nouvelles parts de l'impôt économique local l'écrêtement existant sur les établissements exceptionnels au titre de la taxe professionnelle.

88. Réduire le nombre des bénéficiaires des différents mécanismes de péréquation pour les rendre plus efficaces. Une dotation ou une ressource de péréquation doit par exemple bénéficier à moins de la moitié des collectivités d'une même catégorie.

89. Prendre pour base de comparaison des indices synthétiques pour la répartition des sommes allouées à la péréquation.

90. Créer un véritable fonds national de péréquation, organisé par le législateur et alimenté par trois grandes ressources renouvelées, issues de l'adaptation des mécanismes du FSRIF à l'ensemble du territoire, de l'écrêtement des établissements dits exceptionnels et d'une cotisation de péréquation de l'impôt économique local assis sur le foncier, succédant à l'actuelle cotisation de péréquation de la taxe professionnelle.

CONTRIBUTION DU GROUPE UMP AU RAPPORT DE LA MISSION

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Le groupe UMP se félicite de la qualité de la réflexion conduite par les rapporteurs et l'ensemble des membres de la mission temporaire du Sénat sur l'organisation et l'évolution des collectivités territoriales, sous la présidence du sénateur UMP de la Charente-Maritime, Claude Belot.

Au cours des dernières années, le groupe UMP n'a cessé de dénoncer l'enchevêtrement des prérogatives des différents acteurs publics locaux et nationaux, source de confusion des responsabilités, de pertes de temps et d'inflation de la dépense publique.

Il a donc salué la décision du Président de la République d'ouvrir un grand chantier pour réformer les structures des administrations locales.

Le groupe UMP du Sénat réaffirme sa volonté de revoir en profondeur la gouvernance, les compétences et le financement des collectivités territoriales, afin de mettre en oeuvre, avec un certain courage politique, une réforme majeure qui soit à la hauteur des enjeux et des attentes des élus locaux et de l'ensemble des Français.

L'objectif est à la fois de faire mieux de manière moins coûteuse, de sortir du « jardin à la française » pour mieux prendre en compte la diversité territoriale de notre pays et de revoir la gouvernance des collectivités pour renforcer la légitimité des élus et améliorer l'efficience de la gestion publique.

Pour atteindre cet objectif, le groupe UMP du Sénat souhaite tout d'abord favoriser deux couples de collectivités territoriales pour simplifier leur gouvernance et clarifier leurs compétences : communes/intercommunalités d'une part, départements/régions, d'autre part.

A cet égard, il réaffirme son attachement à la commune, principal échelon de proximité .

A) LES PRINCIPAUX AXES DE LA RÉFORME SOUHAITÉE PAR LE GROUPE UMP DU SÉNAT

1. Achever l'intercommunalité

Le groupe UMP du Sénat propose d' achever la carte de l'intercommunalité d'ici fin 2011 , de réformer la composition des Commissions Départementale des Coopération Intercommunale (CDIC), en renforçant la place des intercommunalités existantes en leur sein, et de leur donner d'avantage d'autonomie.

Un système plus souple de fusion des communes, des intercommunalités et des syndicats pourrait être mis en place, avec pragmatisme. Il n'y aurait plus de création de nouveau pays et des pays existants seraient progressivement insérés dans les dispositifs de coopérations intercommunales.

Les délégués communautaires seraient élus au suffrage universel direct à l'occasion des élections municipales par un système de fléchage , et leur nombre proportionné en fonction de la taille des communes. La représentation de la commune à l'intercommunalité à la proportionnelle des résultats municipaux permettrait ainsi à toutes les listes d'être représentées.

Il apparaît par ailleurs nécessaire de prévoir l'accord de la commune représentant la majorité de la population au sein des communautés d'agglomération pour les décisions la concernant. Un vote à la majorité qualifiée serait en particulier exigé pour l'adoption de la section d'investissement du budget communautaire, hors remboursement du capital des emprunts,

2. La création de métropoles

Un nombre limité de métropoles seraient créées par la loi . La possibilité serait donnée à d'autres agglomérations de s'organiser en « groupements métropolitains de projets » pour tenir compte de leurs spécificités et de leurs initiatives de coopération locale.

Ces métropoles se verraient accorder la clause de compétence générale, les compétences départementales et la compétence économique, partagée avec la région, sur l'ensemble de leur territoire.

Les « conseillers métropolitains » seraient élus au suffrage universel direct selon un système de fléchage à l'occasion des élections municipales (et à la proportionnelle des résultats obtenus).

Enfin, la taille des exécutifs seraient encadrée pour qu'ils demeurent compatibles avec l'efficacité d'une bonne gouvernance.

3. Une meilleure articulation entre départements et régions

Il est proposé de spécialiser les compétences des départements et des régions pour mettre un terme aux doublons et aux financements croisés et accroître l'efficacité de leurs politiques.

Le département et la région relèvent de logiques de territoires distinctes dont découlent des missions différentes. De ce fait, la suppression ou la fusion de la région et du département ne paraissent pas souhaitables. Mais cela n'empêche pas de rechercher une meilleure coordination de leurs politiques devenues trop souvent concurrentes et marquées par un élargissement continu du champ de leur intervention.

Pour éviter la concurrence entre les différents niveaux d'administration, garantir une fluidité dans la répartition de leurs compétences et en finir autant que faire se peut avec les doublons, il apparaît nécessaire de spécialiser les compétences, chacune d'elles correspondant à des politiques bien distinctes, cohérentes avec le niveau territorial concerné et relevant de financements et de responsabilités non susceptibles de se chevaucher.

C'est dans ce cadre que s'inscrit la proposition de créer des conseillers territoriaux siégeant aux deux niveaux de collectivités.

B) LA CRÉATION DE CONSEILLERS TERRITORIAUX

Le groupe UMP considère que la création de conseillers territoriaux constituerait une véritable réforme à même de répondre à l'ambition de clarification et de simplification.

1. Créer des conseillers territoriaux pour exercer les compétences départementales et régionales

Il convient de rechercher une meilleure coordination entre les politiques départementales et régionales devenues trop souvent concurrentes et marquées par un élargissement continu du champ de leur intervention.

Certes, cette amélioration ne dépend pas uniquement des réformes des structures. La redéfinition des compétences était l'un des sujets du premier rapport de synthèse des travaux du groupe de travail de la majorité parlementaire, remis au Comité présidé par M. Edouard Balladur, en mars 2009.

Il semble cependant qu'une plus grande intégration des assemblées départementales et régionales favoriserait l'harmonisation des politiques mises en oeuvre et ferait émerger une solidarité territoriale plus forte entre les départements et les régions.

Il est proposé de remplacer les conseillers généraux et les conseillers régionaux par des conseillers territoriaux qui siégeraient au conseil général de leur département d'élection et au conseil régional. Le mandat de conseiller territorial ne compterait que pour un mandat (1 mandat - 2 fonctions).

Cette nouveauté permettrait de recentrer l'action des deux collectivités autour d'élus moins nombreux et qui seraient donc plus identifiables par les électeurs .

Cela mettrait également un terme à une concurrence institutionnelle (et donc financière) que l'on a vu apparaître entre les deux assemblées au cours de ces vingt dernières années.

Il reste néanmoins des questions d'ordre technique, constitutionnel et de mode de scrutin à débattre.

2. Le calendrier

Afin d'éviter toute critique de vouloir « changer les règles du jeu » à la veille du prochain scrutin, un calendrier de mise en place progressive pourrait être proposé:

- en 2009, vote de la loi réduisant les prochains mandats, et de la loi structurelle (métropoles, intercommunalité et conseillers territoriaux) ; en 2010, vote de la loi sur la répartition des compétences entre départements et régions,

- élection en 2010 des conseillers régionaux, selon le mode actuel, pour un mandat de 4 ans,

- élection en 2011 de la moitié des conseillers généraux, selon le mode actuel, pour un mandat de 3 ans,

- découpage des cantons avant 2012,

- et élection générale des conseillers territoriaux en 2014 .

CONTRIBUTION DU GROUPE CRC AU RAPPORT DE LA MISSION

Présentée par

Mme Marie-France Beaufils,

Sénatrice d'Indre et Loire, Maire de Saint-Pierre-des-Corps

et

M. Jean-François Voguet,

Sénateur du Val-de-Marne, Maire de Fontenay-sous-Bois

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Au terme de plusieurs mois de travail, d'auditions et de réflexions multiples, ce rapport semble offrir la vision d'un projet de réforme adouci , loin de tout Big Bang , et des propositions déstabilisantes du rapport Balladur.

Nous nous en félicitons.

Cependant, force est pour nous de constater qu'il ouvre tout de même les portes à une concentration des pouvoirs publics, et notre mission n'a pas réussi à élargir le champ de ses investigations et de ses propositions à toutes les problématiques auxquelles sont confrontées les collectivités locales.

Nous le regrettons.

A plusieurs reprises, nous avons formulé le souhait de partir des besoins de la population pour analyser la situation réellement vécue par nos collectivités locales.

Dans cet esprit, il nous semblait impérieux de nous livrer à une analyse critique des conséquences des différentes lois de décentralisation.

Nous avons proposé de revisiter les missions et le rôle de l'Etat pour assurer le respect des principes d'unité et d'égalité dans notre République, sur tout son territoire.

En un mot, il fallait nous pencher sur les maux avant de proposer des remèdes.

Ainsi, à partir des ajustements et des rééquilibrages nécessaires, nous pouvions alors ouvrir une période de stabilisation et de consolidation de la décentralisation, dans un environnement juridique clarifié et sécurisé.

Nous regrettons alors que la mission soit partie de postulats que nous ne partageons pas. Nous ne considérons pas qu'il est nécessaire de réorganiser la structure des collectivités locales et de faire émerger des unités territoriales renforcées pour imposer la mise en concurrence des territoires en France et en Europe

Ce n'est pas le soi-disant enchevêtrement des collectivités et de leurs compétences, ainsi que leur taille, qui est la source des difficultés qu'elles rencontrent pour répondre à leur mission et une complexité qui freinerait leur action.

Sans nier certaines difficultés, ni proposer le statu quo, l'essentiel des changements nécessaire pour répondre toujours mieux aux besoins et aux attentes des citoyens, ne relève pas de ces questions.

Aussi nous ne sommes pas dupes des véritables objectifs qui fondent la volonté de transformation, portée par les plus hautes autorités de l'Etat.

Nous contestons les arguments non fondés visant à déstabiliser l'organisation territoriale et démocratique de notre République.

Ils ne visent qu'à masquer le double objectif de reprise en main des pouvoirs locaux, afin de réduire le nombre et l'influence de ces milliers de contre-pouvoirs , à la base de la vitalité démocratique de notre pays et de réduire les dépenses et finances publiques, en imposant une Révision Générale des Politiques Publiques aux collectivités locales, pour réduire durablement les politiques et les services publics locaux, et ouvrir ainsi de nouveaux marchés aux actionnaires.

A l'inverse de ces orientations, nous nous prononçons en faveur :


du maintien de toutes les collectivités territoriales, Communes, Départements et Régions. Elles ont, chacune, un rôle indispensable pour répondre aux besoins de leur population et portent l'expression des choix de chaque citoyen.

Le renouvellement de leurs exécutifs rythme de façon essentielle la vie politique de notre pays et favorise ainsi régulièrement l'expression démocratique de la Nation tout entière.

En supprimant ou en restreignant leurs compétences, nous concentrerions alors les pouvoirs qu'elles détiennent, éloignant ainsi les citoyens des lieux de décisions qui sont censés les représenter.


• d'une réelle clarification des compétences de l'Etat et des collectivités locales.

Celle-ci doit être fondée sur l'objectif de mieux répondre aux attentes et aux besoins de notre population, tout en assurant les solidarités nécessaires au respect de l'égalité de tous les citoyens sur tout le territoire national.


du maintien d'une compétence générale, pour chaque collectivité locale.

Cette compétence leur permet de répondre aux besoins spécifiques de leur population. Elle est l'énergie du suffrage universel. En la supprimant, nous transformons les élus locaux en de simples administrateurs aux compétences définies ailleurs.


d'un renforcement et d'une stabilisation des moyens financiers pour l'ensemble des collectivités territoriales.

Il s'agit d'un enjeu considérable pour permettre aux collectivités locales de mener à bien leurs missions. Pour y parvenir, il faut que le pouvoir central renforce ses dotations et qu'il assure totalement le financement des compétences transférées. Nous proposons aussi que toutes les collectivités locales puissent disposer d'une autonomie fondée sur un panier fiscal de différentes taxations parmi lesquelles une taxe sur l'activité économique incluant les produits financiers dans ses bases, pour alimenter la péréquation.


du développement des coopérations, des mises en commun et du partage.

Ces coopérations doivent être en permanence librement consenties. Elles doivent permettre des partenariats élargis entre tous les niveaux de collectivités locales, avec l'assurance de pouvoir s'appuyer sur une solidarité nationale renforcée. Dans ce cadre, il faut veiller à ce que les choix exprimés par chaque collectivité, ainsi que leur liberté d'action, soient réaffirmés.

D'autre part, si la diversité de nos territoires et de leur population doit être respectée, le droit commun doit s'appliquer à tous, y compris dans les zones urbaines et dans la Région capitale.


• d'un renforcement de la vie démocratique au sein des collectivités locales.

Dans cette perspective de la rénovation des missions et de l'organisation des collectivités locales, le pouvoir de leurs conseils élus doit être consolidé.

Dans le même temps, et de façon indissociable, la place des citoyens doit être renforcée dans la conception et la mise en oeuvre des choix, y compris dans le domaine des coopérations, ainsi que dans le contrôle des actions engagées par leurs représentants.

Compte tenu de ces propositions, certaines résolutions de ce rapport sont pour nous des pistes ouvertes. Elles méritent d'être approfondies.

Il en est ainsi de la mise en place de Conseils des exécutifs . Nous souhaiterions que ce concept s'applique, en toute indépendance de ses structures, de la même manière au niveau régional que départemental, et que la liberté de tous les participants y soit renforcée. Aucune décision ne peut s'imposer sans consensus et sans que le rôle de chaque exécutif représenté ne soit renforcé ou réduit.

De même, il nous semble que la notion de chef-de-filat doit être affinée pour en réduire les aspects décisionnels, au profit d'une animation partenariale renforcée.

Par contre, nous ne pouvons souscrire à bon nombre des autres propositions.

Si nous sommes hostiles à celles qui renforcent les contraintes, voire substituent le libre choix à l'obligation, bon nombre nous inquiètent.

Il nous semble qu'elles orientent vers une certaine forme de hiérarchisation entre nos collectivités locales, assurant à certaines d'entres elles des missions de coordination renforcées.

Cela s'apparente donc plus à des mises en cohérence obligatoires -ce qui nie les différences d'approche- plutôt qu'à des coopérations fondées sur le respect de ces différences.

Ainsi, au nom de la coopération, nous prendrions le risque de la perte d'autonomie.

C'est particulièrement flagrant quand il est envisagé de refondre des intercommunalités existantes ou de transférer obligatoirement de nouvelles compétences au profit des métropoles. Cela se traduirait par la disparition de certaines communes.

Aussi, nous considérons que de telles propositions portent des risques graves de restructuration de notre paysage institutionnel, vers de nouvelles formes de concentration des pouvoirs, non pas au niveau du pouvoir central, mais au profit d'institutions locales aux pouvoirs renforcés. Cette concentration se ferait alors au détriment d'un Etat affaibli, pourtant garant de l'unité de la Nation et de l'égalité des citoyens, et au détriment aussi de la vitalité démocratique de nos communes, voire de nos départements.

Nous changerions alors la République. Nous ne pouvons accepter cette perspective.

Malgré ces remarques et ces critiques, nous tenons à saluer le travail de cette mission temporaire, de son Président et de ses rapporteurs.

Cependant, en s'enfermant dans la seule perspective d'une restructuration des collectivités locales, il manque dans ce rapport de très nombreuses réponses aux problèmes que rencontrent celles-ci, et dédouane toute remise en cause de l'action de l'Etat et de son désengagement.

Nous ne saurions nous en satisfaire.

Enfin, pour les risques portés par certaines des propositions, en particulier dans le domaine de l'autonomie de gestion de nos collectivités locales, nous ne saurions y souscrire.

ANNEXES

ANNEXE I - EXAMEN DU RAPPORT PAR LA MISSION

Le mercredi 17 juin 2009, sous la présidence de M. Claude Belot, président, la mission a procédé à l' examen de son rapport final , présenté par M. Yves Krattinger et Mme Jacqueline Gourault, rapporteurs .

M. Claude Belot, président , a tout abord salué les convergences qui s'étaient formées au fil des réunions de la mission et le travail remarquable des rapporteurs. Il a indiqué que, après l'adoption du rapport, un débat en séance publique serait organisé le 30 juin et que le Sénat aurait ensuite l'occasion, lors de la discussion du projet de loi qui sera déposé sur le sujet, de se prononcer sur ces questions. Il a enfin proposé que soient tout d'abord examinées les conclusions des rapporteurs relatives à la gouvernance.

Après avoir rappelé les préconisations du rapport d'étape et présenté les nouvelles propositions soumises à la mission, M. Yves Krattinger, rapporteur , a engagé ses collègues à appuyer leurs interventions sur des propositions d'amendements au texte, avant d'indiquer que venait de lui être remise la contribution sur la gouvernance territoriale et les conseillers territoriaux du groupe UMP du Sénat.

M. Charles Guené, vice-président, s'est enquis de la façon dont cette contribution serait insérée dans le rapport. Il a fait valoir que le groupe UMP estimait que la mise en place des conseillers territoriaux était la pierre angulaire de la réforme de la gouvernance, et il a souhaité que soit précisé dans le rapport que, sans être opposé au principe de la solution du conseil régional des exécutifs, le groupe UMP souhaitait aller plus loin dans la coordination entre les départements et la région grâce à la mise en place des conseillers territoriaux.

M. Claude Belot, président , a rappelé que, au cours de sa dernière réunion, la mission s'était accordée sur la nécessité de mettre en place une coordination renforcée entre le département et la région pour l'exercice de leurs compétences, que plusieurs possibilités étaient envisageables, dont celle des conseillers territoriaux, mais que ce n'était pas cette solution qui avait prévalu au sein de la mission. Il a considéré que, en revanche, il était tout à fait justifié que cette proposition soit présentée dans le rapport.

S'exprimant à titre personnel, M. Edmond Hervé a salué la qualité du travail de la mission, l'implication des rapporteurs et l'esprit ouvert avec lequel le président avait conduit les débats. S'attachant aux propositions qui lui étaient soumises, il s'est félicité qu'ait été retenue l'idée de fixer des critères d'accès aux métropoles, mais il a déploré qu'une liste limitées de futures métropoles soit déjà dressée à ce stade. Il a par ailleurs regretté que l'expression « Grand Paris » ait été utilisée pour désigner la région capitale, alors qu'elle renvoie à une proposition de réforme identifiée et il a demandé qu'il soit fait mention de l'initiative de « Paris métropole », qui obéit à une logique différente.

M. Claude Belot, président , a attiré l'attention de ses collègues sur le fait que l'objectif n'était pas que toutes les grandes villes créent des métropoles, mais que celles qui sont légitimes à le faire au regard de leur histoire et des réalités locales en aient la possibilité. Il s'est déclaré favorable à ce que toutes les positions sur la gouvernance de la région capitale soient présentées.

M. Philippe Dallier a marqué la satisfaction que lui inspiraient les propositions relatives à l'aire métropolitaine parisienne, dont il a estimé qu'elles étaient équilibrées et ne privilégiaient pas une solution plutôt qu'une autre.

M. Yves Krattinger, rapporteur, a recommandé, en accord avec Mme Jacqueline Gourault, rapporteur , qui soulignait l'inconvénient de toute liste en la matière, de supprimer la référence à une liste de futures métropoles. Sur la question de Paris, il a proposé d'utiliser le terme de « métropole parisienne » et il a précisé que le rapport présenterait en tout état de cause chacune des positions défendues et qu'il devait se limiter à des préconisations générales sans trancher entre les différentes options.

M. Pierre-Yves Collombat a souhaité que soit inscrit, au nombre des critères retenus pour déterminer l'accès d'une agglomération au statut de métropole, celui de continuité territoriale, et que soit rappelé le caractère nécessairement limité du nombre de métropoles que la loi devrait consacrer.

A l'issue d'un débat au cours duquel sont intervenus M. Yves Krattinger, rapporteur, MM. Jean-Claude Peyronnet et Edmond Hervé , ce dernier rappelant notamment que toute ville n'a pas vocation à devenir une métropole, M. Claude Belot, président , a proposé une rédaction maintenant la fixation par la loi des critères de la métropole et citant en exemple les huit métropoles proposées par les rapporteurs. Cette proposition a emporté l'approbation générale.

S'agissant de la métropole parisienne, M. Edmond Hervé a souhaité que la mission ne prenne pas parti entre le projet du Grand Paris et celui de Paris Métropole. A l'issue d'un débat au cours duquel est également intervenu M. Philippe Dallier , la mission a alors adopté une proposition de modification rédactionnelle remplaçant le vocable « Grand Paris » par celui de « métropole parisienne » afin de ne pas prêter à confusion.

Abordant ensuite les propositions sur l'intercommunalité, M. Jacques Mézard a proposé une modification rédactionnelle acceptée par la mission.

M. Claude Bérit-Débat a souhaité que la proposition de la mission sur la limitation du nombre de vice-présidents dans les bureaux des conseils communautaires ne soit pas focalisée sur les vice-présidents « indemnisés » et puisse être modulée en fonction de la population. Après un débat au cours duquel sont intervenus M. Claude Belot, président, MM. Claude Bérit-Débat et Bruno Retailleau, M. Yves Krattinger, rapporteur, M. Pierre-Yves Collombat, premier vice-président, et M. Charles Guené, vice-président, cette proposition a été retenue. A cette occasion, M. Edmond Hervé a déploré l'insuffisance des indemnités des maires de petites communes.

M. Claude Belot, président, a alors proposé d'intégrer une nouvelle proposition de la mission visant à faire disparaître les seuils qui ont un effet dissuasif sur les regroupements intercommunaux, évoquant en particulier le cas de la dotation de développement rural (DDR) à laquelle les communes rurales membres d'une communauté de communes dépassant le seuil des 60 000 habitants cessent d'être éligibles.

Abordant ensuite les propositions sur la coordination des politiques territoriales, M. Bruno Retailleau a tout d'abord indiqué qu'il ne considérait pas le conseil régional des exécutifs proposé par la mission comme incompatible avec la création des conseillers territoriaux uniques, tels qu'envisagés dans la contribution du groupe UMP. Par ailleurs, il a rappelé que, lors des précédents travaux de la mission sur la question, il avait semblé acquis que le conseil régional des exécutifs devait être une instance de coordination et non de décision. A cet égard, il a proposé des modifications rédactionnelles qui ont été acceptées par la mission.

M. Louis Pinton a déploré que la mission n'ait pas été plus audacieuse dans ses propositions et n'apporte pas de réponse suffisante à la question des compétences multiples, ni à celle des financements croisés. Il s'est dit favorable à la constitution d'un « couple » région-département, sur le modèle du couple commune-communauté de communes, doté d'un bloc de compétences exercées par l'une ou l'autre et géré par les mêmes conseillers.

Après que M. Claude Belot, président, eut émis des doutes sur la constitutionnalité de ce dispositif, M. Yves Krattinger, rapporteur, a salué la transparence et la cohérence de la proposition de M. Louis Pinton . Il a toutefois indiqué y être défavorable, estimant notamment que ce dispositif revenait à attribuer l'ensemble des compétences concernées au département qui organiserait ensuite une « interdépartementalité ».

M. Louis Pinton s'en est défendu en rappelant que la loi prévoyait bien au profit des communautés de communes des compétences obligatoires et que, sur ce modèle, il pouvait être tout aussi bien prévu que des compétences obligatoires soient réparties entre le département et la région. Il a insisté sur la nécessité de faire des propositions fortes, pour répondre à l'attente de réforme des citoyens.

A l'issue de ce débat, Mme Jacqueline Gourault, rapporteur , a constaté que la réforme envisagée des collectivités territoriales ne pouvait s'affranchir du cadre de la Constitution actuelle, et s'en trouvait nécessairement plus contrainte.

M. Pierre-Yves Collombat, premier vice-président, a proposé une modification rédactionnelle pour faire des représentants des communautés de communes de chaque département des membres à part entière, et non simplement consultatifs, du conseil régional des exécutifs. Cette modification a été acceptée par la mission.

M. Jean-Claude Peyronnet a estimé que le conseil régional des exécutifs proposé par la mission et les conseillers territoriaux uniques tels que proposés par le groupe UMP constituaient deux propositions alternatives. A cet égard, il a estimé que le projet de création de ces conseillers territoriaux signifiait, à terme, la disparition des départements, qui deviendraient de simples guichets de la politique de l'Etat ou les exécutants de celle de la région. Il a également mis en garde ses collègues contre un excès de démagogie sur la question du nombre des élus.

M. Rémy Pointereau, vice-président, a considéré que le conseil régional des exécutifs serait peu efficace et pouvait d'ores et déjà être mis en place, sans texte. S'agissant des conseillers territoriaux, il a estimé qu'ils répondaient à une demande très forte des citoyens et des élus de rapprochement et de cohérence entre région et département.

A l'invitation du rapporteur, M. Charles Guené, vice-président, a alors présenté la contribution du groupe UMP. Il a rappelé son objectif : assurer une meilleure articulation entre le département et la région. Il a indiqué que le groupe UMP avait, pour diverses raisons, notamment constitutionnelles, rejeté d'autres solutions comme la suppression d'un niveau de collectivité, la fusion de collectivités ou encore la constitution d'un « couple » département-région sur le modèle proposé par M. Louis Pinton. La création de conseillers territoriaux uniques qui siègeraient tous tant au conseil général qu'au conseil régional était alors apparue comme la meilleure des solutions au groupe UMP. Ce dispositif permettrait, selon M. Charles Guené, vice-président , de réduire la concurrence entre collectivités et de diminuer le nombre des élus (qui passeraient au niveau national de 6 000 à 3 000). S'agissant du système électoral, il a indiqué que le groupe UMP proposait que le seuil de population retenu pour chaque canton se situe dans une fourchette de plus ou moins 20 % autour de la moyenne régionale. Toutefois, afin que les élus siègent en nombre suffisant au niveau départemental, il a précisé que des règles dérogatoires pourraient être appliquées sur certains territoires trop faiblement peuplés. Le mode de scrutin proposé serait uninominal majoritaire à deux tours en milieu rural et proportionnel en milieu urbain, situant le seuil entre urbain et rural autour de 30 ou 40 000 habitants par canton. Il a enfin précisé que cette réforme pourrait entrer en vigueur pour une première élection en 2014.

Mme Jacqueline Gourault, rapporteur, a estimé que la contribution de l'UMP mettait en cause le travail de la mission et n'était pas, dans ses arguments, toujours très cohérente. En réponse, M. Charles Guené, vice-président, a reconnu que la rédaction de la contribution n'était peut être pas parfaitement aboutie.

M. Edmond Hervé a fait part de sa profonde opposition personnelle à la contribution de l'UMP et a indiqué que, s'il en avait eu connaissance auparavant, il n'aurait pas demandé à devenir membre de la mission. Il a considéré, en particulier, que la proposition de diminuer le nombre de conseillers municipaux constituait une atteinte à la démocratie. En outre, il s'est montré très défavorable à la proposition de suppression des départements en cas de création d'une métropole et au mode de scrutin mixte (uninominal et proportionnel) retenu pour l'élection des conseillers territoriaux uniques. Il a demandé une suspension de séance.

M. Charles Guené, vice-président, a répondu que la proposition de diminution du nombre de conseillers municipaux ne constituait, à ce stade, qu'une piste de travail. Il a rappelé, par ailleurs, que la suppression des départements là où des métropoles seraient créées était une proposition du rapport de la mission de M. Edouard Balladur et qu'il ne s'agissait que d'une possibilité et non d'une obligation.

Dans un souci d'apaisement, M. Claude Belot, président , a rappelé que la mission avait travaillé de manière approfondie depuis plusieurs mois et qu'elle avait publié un rapport intermédiaire qui faisait état d'un socle d'accord très large entre ses membres. Il a reconnu que la création des conseillers territoriaux uniques constituait un point de divergence au sein des membres de la mission et a indiqué que, à titre personnel, il entendait défendre le travail mené jusqu'à présent par la mission.

M. Charles Guené, vice-président, a réaffirmé qu'il n'y avait aucun casus belli entre la mission et le groupe UMP et que ce dernier avait, par courtoisie, choisi de faire connaître à la mission l'ensemble de réflexions qu'il avait conduites en son sein.

M. Yves Krattinger, rapporteur, a proposé à la mission, par souci de transparence, d'intégrer en annexe du rapport l'intégralité de la contribution du groupe UMP.

M. Charles Guené , vice-président , a apprécié que soit annexée au rapport de la mission la contribution du groupe UMP, sous la réserve que son approche différente soit mentionnée en conclusion des propositions concernant la gouvernance. M. Yves Krattinger, rapporteur , a approuvé cette proposition.

A M. Claude Belot , président , qui demandait si le groupe UMP adhérait à l'essentiel des travaux de la mission, M. Charles Guené , vice-président , a répondu par l'affirmative à partir du moment où était admise la divergence sur la création des conseillers territoriaux.

Le président Claude Belot , rappelant la grande diversité du territoire français, a indiqué qu'elle impliquait une coordination forte, dont les conseillers territoriaux constituaient une variante.

M. Charles Guené , vice-président , a précisé que, globalement, le groupe UMP se reconnaissait dans les travaux de la mission, relevant en particulier une identité de vues sur l'intercommunalité. Notant l'existence de points d'achoppement qui n'étaient pas primordiaux, il a considéré que la question des conseillers territoriaux était le seul point de divergence fondamental. Il a précisé que, s'il trouvait l'idée du conseil régional des exécutifs (CRE) et de la conférence départementale des exécutifs (CDE) intéressante, elle ne lui paraissait peut-être pas aller assez loin.

M. Rémy Pointereau, vice-président , s'est déclaré surpris de la méprise provoquée par la contribution du groupe UMP. Il a avoué avoir accepté, lors de l'adoption du rapport d'étape, un certain nombre de points sur lesquels il n'était pas forcément d'accord, dans le but de rassembler une majorité au sein de la mission. Soulignant que la question des conseillers territoriaux avait été évoquée depuis le début des travaux de la mission, il s'est déclaré satisfait de l'insertion en annexe du rapport de la contribution du groupe UMP, les rapporteurs manifestant leur accord à cette demande.

Après avoir mis en évidence les deux conceptions exprimées pour la coordination des politiques locales, M. Claude Belot , président , a relevé qu'il existait des similitudes entre la contribution du groupe UMP et le rapport du comité Balladur.

Rejoignant M. Rémy Pointereau, vice-président , M. Charles Guené , vice-président , a indiqué que la contribution était un document brut de réflexion.

M. Jean-Claude Peyronnet a remarqué que cette contribution constituait un retour au point de départ, à savoir la reprise des propositions du comité Balladur, et mettait donc à bas les travaux de la mission, non seulement sur la question des conseillers territoriaux, mais également sur celles de la disparition des départements dans les périmètres métropolitains, du maintien de la clause générale de compétence aux seules communes et intercommunalités, par délégation. Pour lui, ce document préfigurait la loi. Il a exprimé le sentiment d'avoir été floué.

M. Claude Belot, président , s'est déclaré solidaire des propositions de la mission.

M. Bruno Retailleau a relevé que la présentation, à ce moment des travaux de la mission, de la contribution de l'UMP soulevait un problème de tempo. Tout en jugeant normal que le Président de la République et le Premier ministre puissent donner, au cours du débat, des directions, cette contribution était une maladresse car elle apparaissait comme la contre proposition du groupe majoritaire du Sénat. Il s'est déclaré opposé à l'insertion de ce document en annexe du rapport de la mission dont il fait apparaître les conclusions comme des propositions « Potemkine ». Pour sa part, il a manifesté son accord avec l'institution de conseillers territoriaux, mais son opposition à la suppression de la clause générale de compétence et à la réduction du nombre des conseillers municipaux. Même si elle se réfère aux responsabilités assumées par les élus locaux, particulièrement dans les petites communes, et si elle mentionne le besoin de lien social, cette dernière proposition signifie, selon lui, la réduction du nombre de bénévoles en France. En conclusion, il a approuvé le droit d'expression du groupe UMP, mais s'est déclaré défavorable à la publication en tant que telle d'une contribution qui « fusille » les travaux de la mission, préférant l'insertion des seuls développements consacrés aux conseillers territoriaux. Il a rappelé que les travaux de la mission avaient fait apparaître des convergences. Pour sa part, M. Claude Belot, président , a souligné que tel devait bien être l'esprit donné au rapport.

M. Jacques Mézard a souligné qu'un certain nombre de membres de la mission ne pouvaient ressentir la contribution du groupe UMP, à ce stade des travaux, que comme une provocation. Il a salué l'esprit imposé par le président Claude Belot aux travaux de la mission, qui démontrait la capacité des sénateurs, sur des dossiers de fond, à dépasser leurs divergences pour travailler ensemble, même si, au moment du vote, des expressions différentes pouvaient apparaître. Il a considéré que la contribution du groupe UMP remettait en cause le travail de la mission. Il a exprimé le sentiment de la nécessité, pour chacun, de consentir un effort pour écouter les autres afin que le Sénat fasse entendre sa voix. Evoquant les propositions contenues dans la contribution en matière électorale, il a déclaré en connaître les conséquences sur le terrain. Il a avoué se sentir aujourd'hui trahi à l'issue de la somme de travail effectué.

M. Edmond Hervé , dans un souci de transparence démocratique, a estimé justifié de publier la contribution du groupe UMP.

M. Pierre-Yves Collombat, premier vice-président , rappelant la recherche de l'élaboration d'un texte suffisamment consensuel pour qu'il constitue le socle commun de la discussion à venir du projet de réforme des collectivités territoriales, a rappelé que la question des conseillers territoriaux était posée depuis le début.

Pour lui, demeurait le problème de la présentation de cette problématique et de la contradiction, qu'elle faisait apparaître avec les conclusions consensuelles du rapport.

Mme Anne-Marie Escoffier , vice-présidente , a exprimé sa tristesse, en cette séance de conclusion, où la contribution UMP représentait la négation des travaux préalables de la mission, qui débouchaient sur un texte consensuel et de bon sens. Elle a souhaité voir une maladresse dans les propositions du groupe UMP, à contre courant de celles de la mission. Elle s'est déclarée favorable à la seule publication de la partie de la contribution traitant des conseillers territoriaux.

M. Philippe Dallier a affirmé ne pas partager la totalité du contenu de ce document, notamment sur les métropoles. Il lui a semblé naturel que les groupes politiques puissent annexer leurs contributions au rapport de la mission, comme, d'ailleurs, cela s'était fait dans le rapport du comité Balladur. Il est convenu que la contribution pouvait être toilettée afin de ne pas apparaître comme une contradiction au travail de qualité fait par la mission. Il a conclu en faveur de l'insertion en annexe du rapport de la partie de la contribution consacrée aux conseillers territoriaux.

M. Yves Krattinger, rapporteur , a déclaré n'avoir aucune objection de principe à la méthode proposée, MM. Claude Belot , président, et Rémy Pointereau , vice-président , manifestant leur assentiment. M. Edmond Hervé a estimé qu'il était normal que les groupes politiques s'expriment tout en soulignant l'état d'esprit de consensus qui avait présidé aux travaux de la mission.

A la demande de MM. Claude Bérit-Débat et Edmond Hervé , la réunion a alors été suspendue.

A sa reprise, M. Yves Krattinger, rapporteur , a fait part de son embarras et de celui des membres de son groupe face à la tournure prise par les discussions. Il a rappelé qu'il était prévu, au début des travaux de la mission, que celle-ci s'accorde sur une position unanime, au-delà de quelques points de divergence. Il a indiqué que la question des conseillers territoriaux était abordée dans le rapport et qu'elle pourrait donner lieu à une contribution du groupe UMP en annexe. D'autres groupes pourraient également apporter leur contribution. Il a ajouté que la note émanant du groupe UMP, en contradiction sur de nombreux points avec les orientations de la mission, ne pouvait être considérée comme un simple document de travail interne dès lors qu'elle a été diffusée aux membres de la mission et qu'il n'était pas possible de l'ignorer.

M. Charles Guené, vice-président, a tenu à relativiser la portée de ce document, qui avait été remis au président de la mission, mais qui n'avait pas forcément vocation à être diffusé dans son intégralité. Il a précisé que le groupe UMP allait revoir la rédaction de sa contribution, en indiquant qu'il adhérait, sous quelques réserves, à la quasi-totalité des orientations et propositions du rapport de la mission, à l'exception, cependant, des décisions concernant les conseillers territoriaux.

M. Claude Belot, président , a souscrit à cette démarche, en rappelant qu'il avait été convenu, lors de la dernière réunion de la mission, que la contribution du groupe UMP porterait sur la seule question des conseillers territoriaux. Il a également invité ses collègues à constater, par ailleurs, l'accord auquel la mission était parvenue sur de nombreux sujets. Il a considéré, ensuite, que ce serait un échec pour le Sénat s'il ne parvenait pas, le moment venu, à un large consensus lui permettant d'exister très fortement dans le débat parlementaire, face à l'Assemblée nationale. Il a ajouté que le Président du Sénat, lorsqu'il lui avait confié la présidence de cette mission temporaire, avait tenu des propos sans équivoque sur le sens des réflexions conduites au sein de la mission et sur le rôle du Sénat dans la réforme territoriale. Il a souligné que les conclusions de la mission ne pouvaient qu'être utiles à la réflexion sur un sujet aussi complexe.

M. Claude Bérit-Débat a fait part de ses interrogations par rapport au document émanant du groupe UMP, faisant observer qu'il remettait en cause certaines des préconisations déjà formulées par la mission.

M. Louis Pinton a considéré que tous les avis, même minoritaires, pouvaient être exprimés et que personne, au sein de la mission, ne devait se sentir lié par quelque contribution de groupe que ce soit. Il a indiqué que le rapport de la mission n'avait pas force de loi, mais qu'il apportait un éclairage.

M. Jean-Claude Peyronnet a relevé que sa sensibilité politique, qui était à l'origine de la décentralisation, aurait également pu produire sa propre contribution, mais que le groupe socialiste avait préféré, dès le départ, participer de façon loyale aux travaux de la mission. Il a indiqué que le document émanant du groupe UMP ne pouvait être une note improvisée et a constaté de fortes similitudes avec la feuille de route adressée par le Président de la République au comité Balladur. Il a regretté que cette contribution remette en cause la crédibilité de la mission, au sein de laquelle un travail consensuel avait pourtant été réalisé.

M. Claude Belot, président , a considéré qu'une contribution d'un groupe politique constitue une prise de position. Il a rappelé que la mission temporaire cesserait d'exister à l'issue du débat qui aura lieu en séance publique le 30 juin.

Puis, la mission a abordé les propositions relatives aux finances locales. M. Yves Krattinger, rapporteur , a tout d'abord rappelé que le diagnostic posé par le rapport d'étape sur les finances locales avait recueilli un large assentiment au sein des membres de la mission : les finances locales souffrent de nombreux défauts, que les réformes successives, par leur caractère partiel, n'ont fait qu'aggraver. De ce fait, il n'est plus possible, aujourd'hui, de se contenter de supprimer des parts d'imposition ou d'assiette en les remplaçant par des dotations peu évolutives. Par ailleurs, le renforcement de l'autonomie fiscale doit aller de pair avec une amélioration de la péréquation. Puis, le rapporteur a proposé à ses collègues d'intervenir sur les amendements qu'ils souhaitaient présenter aux propositions qu'il leur soumettait.

M. Claude Belot, président , a marqué son accord avec l'idée de réviser les bases locatives, en demandant toutefois que cette révision soit qualifiée de permanente (et non pas simplement régulière).

M. Bruno Retailleau a souhaité que l'Etat garantisse le processus de révision. M. Yves Krattinger, rapporteur, a signalé que cette exigence était prise en compte dans la rédaction de la proposition, qui mentionnait bien un cadre législatif pour la révision.

M. Edmond Hervé a souhaité que ne soit pas exclue la possibilité d'affecter une partie de l'impôt économique sur la valeur ajoutée aux intercommunalités.

M. Bruno Retailleau a indiqué qu'il convenait de prendre garde à ne pas trop imposer les petites et moyennes entreprises par le biais de l'extension de la cotisation minimale. Les « simulations » prévues par la proposition devraient toutefois permettre d'éviter cet écueil.

Mme Marie-France Beaufils s'est interrogée, concernant la part de l'impôt économique assise sur le foncier, sur les distorsions qui pourraient résulter de cette assiette, selon que les entreprises sont fortement consommatrices de surface bâtie ou non, indépendamment de leur chiffre d'affaires. M. Yves Krattinger , rapporteur , a estimé que ce genre de problème pourrait être traité par la création d'abattements spécifiques.

Concernant la péréquation, M. Claude Belot, président, a jugé les propositions du rapport satisfaisantes. M. Philippe Dallier a rappelé les disparités considérables que faisait perdurer la dotation forfaitaire au sein de la dotation globale de fonctionnement entre les communes. Considérant qu'elle était responsable d'une grande partie des inégalités, il a souhaité qu'elle soit réformée. La proposition correspondante a été reformulée de manière à manifester clairement cette nécessité de réforme. M. Pierre Jarlier a également regretté qu'une collectivité dont la population diminue puisse voir ses dotations de péréquation baisser, citant le cas de l'Auvergne. Par ailleurs, il a évoqué les effets de seuil de certaines dotations, notamment de la dotation de fonctionnement minimale.

La mission a apporté des ajustements aux propositions de la partie « finances » du projet de rapport pour tenir compte de ces observations, puis a approuvé l'ensemble ainsi modifié.

La mission a ensuite abordé les propositions relatives aux compétences.

M. Yves Krattinger, rapporteur, a précisé que, si le rapport d'étape avait préconisé un renforcement des compétences « exclusives », la formulation de compétences « obligatoires » avait, dans la suite des débats, paru plus conforme à l'objectif de clarification poursuivi. La mission a donc repris cette proposition en la reformulant en ce sens.

Mme Jacqueline Gourault, rapporteur, a rappelé les principes et instruments d'une clarification des compétences proposés par la mission. Elle a précisé que les propositions soumises à la mission portaient sur les différentes compétences locales, mais qu'elles seraient présentées par objectifs, en quatre grands chapitres, l'idée centrale étant de spécialiser davantage les compétences par niveau. Au titre du premier objectif « Animer et développer le territoire », elle a abordé, en premier lieu, les compétences relatives au développement économique, notamment l'instauration d'un rôle de « chef de filat » pour la région, la création d'un portail unique au niveau régional en faveur des aides aux entreprises et la définition du rôle des autres niveaux de collectivité.

M. Bruno Retailleau a demandé des éclaircissements sur la compétence d'« environnement économique » confiée aux départements. Il s'est également déclaré perplexe sur la proposition de création d'une agence de développement économique rassemblant toutes les autres agences au niveau régional.

Mme Jacqueline Gourault, rapporteur, a précisé que la compétence des départements en matière d'environnement économique comprenait notamment l'aménagement de zones d'activité.

M. Yves Krattinger, rapporteur, a reconnu qu'il était difficilement envisageable de supprimer toutes les agences de développement économique présentes sur le territoire d'une région, mais qu'il s'agissait en fait de coordonner l'action de ces agences au niveau régional et d'améliorer ainsi leur cohérence.

M. Bruno Retailleau a alors proposé le terme de « structure » ou de « lieu », plus approprié selon lui que celui d' « agence » qui renvoie à l'idée d'un organisme contraignant reposant sur un syndicat mixte.

M. François Patriat , faisant valoir les difficultés que rencontrent de nombreuses agences, a suggéré de limiter leur nombre à une par département, position à laquelle s'est associé M. Yves Krattinger, rapporteur , rappelant toutefois que la première priorité était de créer un endroit où toutes les agences de la région puissent travailler ensemble.

La mission a décidé, pour tenir compte également des observations de Mme Jacqueline Gourault, rapporteur , de proposer la création d'une structure régionale de coordination des acteurs de développement économique à caractère partenarial et non d'une agence régionale.

M. Edmond Hervé , apportant des observations sur l'ensemble des propositions soumises à discussion, a regretté que le « développement durable » et « la formation tout au long de la vie » ne soient pas mentionnés. Il a estimé, par ailleurs, que la liste des propositions faisait apparaître un déséquilibre entre les régions et les départements d'un côté, les intercommunalités et les communes de l'autre.

S'agissant des compétences confiées au département, M. Bruno Retailleau a rappelé que la mission avait déjà souligné le rôle de celui-ci dans l'attractivité du territoire, tandis que M. Jacques Mézard considérait que la compétence économique revenait d'abord à la communauté d'agglomération et à la région. Mme Josette Durrieu a insisté sur le caractère trop limité et mal défini selon elle de la notion d'environnement économique au regard du rôle réel joué par le département et a souhaité qu'on y ajoute l'attractivité et l'animation. M. Claude Bérit-Débat s'est interrogé pour sa part sur le contenu de la compétence d'accueil attribuée aux communes et intercommunalités, considérant que c'était insuffisant, relayé sur ce point par Mme Jacqueline Gourault, rapporteur.

En conséquence, la mission s'est accordée sur une extension des compétences du bloc communes-intercommunalités à la promotion économique et sur l'attribution au département d'une compétence en matière d'aménagement, d'attractivité et d'animation économiques.

La mission a ensuite abordé les compétences relatives au soutien à la dynamique d'aménagement du territoire.

Présentant la proposition tendant à confirmer la vocation des départements à mettre à disposition des territoires infra-départementaux les outils de conseil juridiques et techniques nécessaires, M. Yves Krattinger, rapporteur, a expliqué que le département ne pouvait, à l'heure actuelle, se substituer à l'Etat pour apporter aux collectivités locales une aide à l'ingénierie.

M. Pierre-Yves Collombat , premier vice-président, a souligné que le besoin d'un appui de la part du département se posait particulièrement pour les petites communes. Mme Jacqueline Gourault, rapporteur, a estimé que l'aide du département n'était pas exclusive de l'action que pouvaient exercer les intercommunalités qui en ont la capacité. Mme Josette Durrieu a souligné que certaines intercommunalités pourraient avoir, elles aussi, un besoin de soutien. M. Edmond Hervé s'est déclaré favorable à cette proposition, soulignant que le rôle de solidarité territoriale des départements ne s'opposait pas, le cas échéant, à une organisation des intercommunalités entre elles.

La mission a ensuite abordé la question des transports, puis celle des infrastructures. M. Rémy Pointereau, vice-président, a émis des réserves sur la proposition ayant pour objet de rappeler à l'Etat sa mission de financer seul les infrastructures d'intérêt national, telles que les lignes à grande vitesse et les autoroutes, considérant qu'il s'agissait d'un voeu pieux. M. Claude Belot, président, a souligné que, pour la construction de la ligne TGV Paris-Tours, par exemple, les collectivités plus éloignées n'avaient pas été mises à contribution. M. Edmond Hervé a signalé que les collectivités territoriales cofinancaient leurs rocades. En conséquence, il a été décidé de supprimer dans la note de présentation la phrase relative au fait que les métropoles n'avaient pas participé au financement des infrastructures qui les desservent dans le passé. Sur la proposition de M. Yves Krattinger, rapporteur , la mission a souhaité inclure les routes nationales parmi les infrastructures relevant du financement de l'Etat.

M. Jacques Mézard a rappelé que, outre sa mission de financement des infrastructures d'intérêt national, l'Etat devait respecter les engagements qu'il prenait. Mme Josette Durrieu a ainsi regretté que certains engagements pris par l'Etat dans les contrats de plan Etat-région n'aient pas été tenus, tandis que M. François Patriat a suggéré que de tels engagements puissent être pris dans les deux sens, l'Etat ne pouvant demander aux collectivités de participer au financement de ses compétences propres sans aider parfois celles-ci à mener à bien des projets relevant de la compétence locale. La mission a décidé d'inclure la mention des engagements pris par l'Etat dans la proposition.

S'agissant ensuite de la proposition tendant à développer, au bénéfice des collectivités territoriales, des ressources financières afin de leur permettre de contribuer au financement des infrastructures de transport d'intérêt local, M. Yves Krattinger, rapporteur, a attiré l'attention de la mission sur la proposition d'instauration d'un livret d'épargne populaire, sur le modèle des livrets d'épargne consacrés au financement du logement social.

Mme Jacqueline Gourault, rapporteur , a présenté ensuite les propositions de la mission relevant du deuxième objectif territorial : « Assurer les solidarités sociales », qui regroupent les politiques d'action sociale et médico-sociale, ainsi que les questions sanitaires.

Mme Marie-France Beaufils a souligné les problèmes susceptibles d'apparaître en cas de transfert de la compétence en matière de médecine scolaire de l'Etat vers les collectivités territoriales, notamment en raison du manque criant de médecins scolaires.

M. Pierre-Yves Collombat, premier vice-président, a rappelé le caractère expérimental de cette proposition et souligné la nécessité de procéder à une évaluation du déroulement de cette expérimentation.

Mme Jacqueline Gourault , rapporteur , a ensuite présenté dans leur ensemble les propositions relevant de l'objectif « Offrir un cadre de vie amélioré » qui concernent les domaines de l'environnement, du logement, de l'urbanisme, de l'eau et de l'assainissement et de la gestion des déchets, puis celles présentées au titre de l'objectif « Promouvoir le capital humain et préparer l'avenir », regroupant la formation professionnelle et la politique de l'emploi.

M. Pierre-Yves Collombat, premier vice-président, a proposé que l'intitulé de ce chapitre fasse l'objet d'une modification rédactionnelle, afin que les mots « capital humain » soient supprimés.

Cette modification ayant été approuvée, son intitulé a été ainsi reformulé : « Promouvoir la formation personnelle et professionnelle et préparer l'avenir ». M. Yves Krattinger, rapporteur , a rappelé que la région se voyait confier la mission de coordonner les interventions locales en faveur de l'enseignement supérieur.

M. Bruno Retailleau a observé que le rôle de « chef de filat » confié à la région en matière universitaire ne devait pas être trop prescriptif, afin de ne pas interdire les initiatives originales, prenant racine dans les spécificités du territoire, menées par les autres collectivités territoriales.

M. Yves Krattinger, rapporteur, a proposé que la rédaction de la proposition élaborée par la mission soit précisée et concerne en priorité les actions en direction des actions de vie étudiante avec les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) et les départements.

M. Philippe Dallier a regretté que la mission n'ait pas élaboré de propositions plus nombreuses dans les domaines de l'urbanisme et du logement. Il a rappelé que la région capitale, qui rassemble 20 % de la population française et souffre d'un déficit de logement important, ne disposait d'aucune vision globale en matière d'urbanisme.

M. François Patriat a suggéré que la mission définisse le rôle de chaque niveau de collectivités territoriales en matière d'équipements sportifs.

M. Yves Krattinger, rapporteur, a précisé que la mission ne souhaitait pas confier la gestion des équipements sportifs aux régions ou aux départements mais bien coordonner leurs interventions auprès des communes et des EPCI souhaitant construire des équipements sportifs.

M. Bruno Retailleau a mis en garde contre d'éventuels risque de confusion dans les interventions des différents niveaux en matière d'équipements sportifs. Il a souhaité que la participation de la région au financement de ces infrastructures soit limitée aux équipements de haut niveau, citant à titre d'exemple les pôles France qui accueillent les sportifs de haut niveau.

M. Pierre Jarlier a estimé que la question du financement de la construction et de l'entretien des bâtiments est indissociable de la compétence accordée aux régions en matière d'autorisation des centres de formation des apprentis (CFA). Il a donc souhaité que la proposition élaborée par la mission soit complétée en ce sens.

Il a ensuite observé que les propositions élaborées par la mission en matière d'urbanisme avaient un caractère limité, alors que les propositions en matière d'achèvement de l'intercommunalité auraient dû conduire à proposer de mettre en cohérence les documents d'urbanisme (plan local d'urbanisme ou PLU, plan de déplacement urbain ou PDU, programme local de l'habitat ou PLH), afin de rechercher une gouvernance unique pour régler la question de l'urbanisme.

Mme Marie-France Beaufils a estimé que les schémas de cohérence territoriale (SCOT) avaient vocation à réaliser cette harmonisation des documents d'urbanisme.

Afin de tenir compte de l'observation de M. Pierre Jarlie r, M. Yves Krattinger, rapporteur, a proposé à la mission d'adopter une nouvelle proposition ainsi rédigée : « appeler à une mise en cohérence des différents documents d'urbanisme et de planification (PLU, PLH, PDU) en lien avec les SCOT ».

L'examen des propositions étant achevé, M. Rémy Pointereau, vice-président, a indiqué que le groupe UMP du Sénat souhaitait publier sa propre contribution en annexe du rapport de la mission, afin d'exprimer son attachement à la création de conseillers territoriaux.

M. Jean-François Voguet, vice-président, a fait part de l'intention du groupe CRC du Sénat de présenter sa propre contribution.

En conclusion, M. Claude Belot , président , a indiqué que les travaux de la mission s'achèveraient le 30 juin, à l'issue du débat organisé en séance publique. Il a rappelé que le Gouvernement devait déposer prochainement un projet de loi sur la réforme des collectivités territoriales, dont il espérait que le contenu puisse s'inspirer des travaux de la mission.

Il a observé qu'un accord global s'était dégagé sur le contenu du rapport dont les propositions venaient d'être validées, et a félicité ses collègues pour la qualité du travail accompli.

ANNEXE II - RAPPEL DES PRÉCONISATIONS DU RAPPORT D'ÉTAPE

1. Recomposition préalable et amélioration de la représentativité des commissions départementales de coopération intercommunale (CDCI) et renforcement de leur rôle pour déterminer les périmètres pertinents d'intercommunalités

2. Achèvement de la carte de l'intercommunalité à fiscalité propre avant fin 2011 en envisageant d'utiliser des outils incitatifs

3. Augmentation progressive du nombre des compétences obligatoires et optionnelles des intercommunalités à fiscalité propre pour tendre vers un socle commun plus consistant

4. Avant fin 2012, sur proposition du représentant de l'Etat validée par la CDCI, après une large concertation départementale, forte réduction du nombre des syndicats intercommunaux (SIVU, SIVOM) et transfert des compétences correspondantes aux groupements à fiscalité propre

5. Election des conseillers communautaires par « fléchage » sur les listes de candidats aux élections municipales

6. Corrélativement, application du mode de scrutin des communes de plus de 3 500 habitants aux communes de plus de 500 habitants et obligation de candidature au conseil municipal dans toutes les communes

7. Suppression des dispositions législatives réglementant l'existence des pays, sans porter atteinte à la liberté de coopérer des communes et des intercommunalités dans le périmètre des pays existants

8. Reconnaissance du fait métropolitain par la création législative d'un nombre limité de métropoles et prise en compte de ce fait par le renforcement des compétences communales transférées, avec possibilité complémentaire de délégation de compétences

9. Renforcement des possibilités de délégation des compétences du département et de la région à la métropole

10. Incitation à la fusion volontaire de communes sur la base de référendums proposés par une majorité qualifiée des membres des conseils municipaux des communes concernées

11. Possibilité de regroupement volontaire ou de modification des limites territoriales des régions, sur proposition concordante des assemblées délibérantes des territoires concernés statuant à la majorité et ratifiée par un référendum organisé par les pouvoirs publics à l'issue d'un large débat

12. Possibilité de regroupement volontaire ou de modification des limites territoriales des départements selon la même procédure que ci-dessus

13. Possibilité de regroupement volontaire entre une région et les départements qui la composent selon la même procédure que ci-dessus

14. Réaffirmation du principe de coopération entre les collectivités territoriales et leurs établissements publics

15. Election de tous les conseillers généraux en même temps pour une durée de six ans

16. Réaffirmation du principe de libre administration des collectivités territoriales

17. Renforcement des compétences exclusives par niveau de collectivités territoriales avec faculté de délégation de compétences d'un niveau à l'autre, et possibilité pour un niveau d'exercer une compétence attribuée à un autre sur la base d'un « constat de carence »

18. Affirmation des départements dans leur rôle de garant des solidarités sociales et territoriales, et des régions dans leurs missions stratégiques et liées à la préparation de l'avenir

19. Attribution des parties du pouvoir réglementaire liées à leurs compétences aux départements et aux régions

20. Attribution aux régions de la compétence de répartir les fonds européens

21. Reconnaissance d'un « chef de filat » pour les compétences partagées entre plusieurs niveaux et instauration d'un guichet et d'un dossier d'instruction uniques

22. Développement du droit à l'expérimentation, par exemple pour le transfert de la compétence emploi aux régions

23. Dans les domaines de compétences transférées, suppression des interventions des services déconcentrés de l'Etat et transfert de leurs personnels aux collectivités territoriales

24. Refondation des relations financières entre l'Etat et les collectivités territoriales, subordonnant toute nouvelle décision à une concertation préalable et codifiée avec les associations nationales d'élus locaux

25. Attribution de deux types de ressources fiscales par niveau de collectivité territoriale, limitation des cumuls d'impôts sur une même assiette et maintien d'un impôt lié à l'activité économique pour préserver les relations entre les territoires et les entreprises

26. Instauration d'une collectivité unique dans chaque département et région d'outre-mer

27. Poursuite des réflexions sur le Grand Paris

ANNEXE III - LISTE DES PERSONNALITÉS AUDITIONNÉES PAR LA MISSION

Les comptes rendus des auditions de la mission sont disponibles sur les pages internet du Sénat consacrées aux travaux de la mission :

www.senat.fr/mission_temporaire_coll_ter

Le 5 novembre 2008 :

M. Jean-Luc Boeuf , directeur général des services du conseil général du Val-d'Oise, maître de conférences à l'IEP de Paris

M. Pierre-Yves Collombat , sénateur du Var, adjoint au maire de Figanières, conseiller général du Var, conseiller à la communauté d'agglomération dracénoise, premier vice-président de la mission

M. François Patriat , sénateur de la Côte-d'Or, président du conseil régional de Bourgogne, président de la commission économique de l'Association des régions de France, membre de la mission

Le 12 novembre 2008 :

M. Jean-Robert Pitte , professeur à l'université Paris IV-Sorbonne, membre de l'Institut (Académie des sciences morales et politiques)

M. Jean-Bernard Auby , professeur titulaire de la chaire « Mutations de l'action publique et du droit public » de Sciences-Po

Le 19 novembre 2008 :

M. Pierre Dartout , préfet en service détaché, délégué interministériel à l'aménagement et à la compétitivité des territoires

M. Claudy Lebreton , président du conseil général des Côtes-d'Armor, président de l'Assemblée des départements de France (ADF)

Le 26 novembre 2008 :

M. Gérard Marcou , professeur, université Paris-I Panthéon-Sorbonne, directeur du GRALE (Groupement de Recherches sur l'Administration Locale en Europe)

Mme Anne-Marie Escoffier , sénateur de l'Aveyron, conseillère générale de l'Aveyron, membre de la mission

M. Claude Lise , sénateur de la Martinique, président du conseil général de la Martinique, membre de la mission

M. Yves Krattinger , sénateur de la Haute-Saône, conseiller municipal de Rioz, président du conseil général de la Haute-Saône, président de la communauté de communes du Pays Riolais, co-rapporteur de la mission

Le 3 décembre 2008 :

M. Jacques Lévy , géographe et professeur à l'Ecole polytechnique fédérale de Lausanne

M. Pierre Martin , ingénieur de recherche à l'Institut d'études politiques de Grenoble, spécialiste des modes de scrutin

M. Jacques Pélissard , député du Jura, maire de Lons-le-Saunier, président de l'Association des maires de France

Le 10 décembre 2008 :

M. Philippe Richert , questeur du Sénat, sénateur du Bas-Rhin, membre de la mission

M. Charles Guené , sénateur de la Haute-Marne, maire de Vaux-sous-Aubigny, vice-président du conseil général de la Haute-Marne, président de la communauté de communes de Prauthoy-en-Montsaugeonnais, membre de la mission

M. Philippe Dallier , sénateur de la Seine-Saint-Denis, maire des Pavillons-sous-Bois, membre de la mission

Le 17 décembre 2008 :

M. Daniel Delaveau , maire de Rennes, président de Rennes Métropole, président de l'Assemblée des communautés de France, accompagné de MM. Michel Piron, Dominique Braye, Charles-Eric Lemaignen et Joseph Spiegel , membres de cette association

M. Alain Rousset , député de la Gironde, président du conseil régional d'Aquitaine, président de l'Association des régions de France

Le 14 janvier 2009 :

M. Jean-Pierre Chevènement , ancien ministre, sénateur du Territoire de Belfort

Le 20 janvier 2009 :

M. Pierre Mauroy , ancien Premier ministre, sénateur du Nord, membre du Comité pour la réforme des collectivités locales

M. Edward Jossa , directeur général des collectivités locales, membre du Comité pour la réforme des collectivités locales

Le 21 janvier 2009 :

M. Bruno Retailleau , sénateur de la Vendée, premier vice-président du conseil général de la Vendée, membre de la Mission

M. Jean-Pierre Raffarin , ancien Premier ministre, sénateur de la Vienne

Le 27 janvier 2009 :

M. Daniel Canepa , préfet de la région Île-de-France, membre du Comité pour la réforme des collectivités locales, président de l'Association du corps préfectoral

M. Michel Verpeaux , professeur à l'Université de Paris-I Panthéon-Sorbonne, membre du Comité pour la réforme des collectivités locales

Le 28 janvier 2009 :

M. John Loughlin , professor of European politics, Cardiff University of Wales, professeur invité à l'Institut d'études politiques d'Aix-en-Provence (spécialiste droit comparé des collectivités territoriales)

M. Henri Nayrou , député de l'Ariège, président de l'Association nationale des élus de la montagne

M. Vincent Descoeur , député du Cantal, secrétaire général de l'Association nationale des élus de la montagne

Le 11 février 2009 :

M. Jacques Mézard , sénateur du Cantal, conseiller municipal d'Aurillac, président de la communauté d'agglomération du bassin d'Aurillac, membre de la Mission

M. Philippe Laurent , maire de Sceaux, vice-président de l'Association des maires de France (AMF) et président de la commission des finances de cette association

M. Philippe Valletoux , membre du Conseil économique, social et environnemental (CESE), rapporteur des avis sur les relations financières entre l'Etat et les collectivités locales (2006 et 2008)

Le 19 février 2009 :

M. Jean-François Bernardin , président de l'Assemblée des chambres françaises de commerce et d'industrie

Mme Marie-Christine Coisne-Roquette , présidente du groupe SONEPAR, présidente de la commission fiscale du MEDEF

M. Jean-Paul Bailly , président de la Poste

M. Jean-Marie Euvrard , président de la Chambre de commerce et d'industrie de la Haute-Saône, président de Vesoul Electrodiesel Groupe

M. Jérôme Bédier , président de la Fédération des entreprises du commerce et de la distribution

M. Philippe Bassot , consultant de CM International, rédacteur du rapport de la DIACT sur le bilan des pôles de compétitivité

M. Philippe Valletoux , membre du Conseil économique, social et environnemental (CESE), rapporteur des avis sur les relations financières entre l'Etat et les collectivités locales (2006 et 2008)

M. Jacques Pélissard , député du Jura, maire de Lons-le-Saunier, président de l'Association des maires de France

M. Benoît Huré , sénateur, président du conseil général des Ardennes

M. François Patriat , sénateur de la Côte-d'Or, président du conseil régional de Bourgogne, président de la commission économique de l'Association des régions de France, membre de la mission

Mme Estelle Grelier , présidente de la communauté de communes de Fécamp

M. Bruno Lucas , membre de la commission développement des territoires du MEDEF, président du MEDEF de la région Pays-de-la-Loire

Le 4 mars 2009 :

M. Guy-Dominique Kennel , président du conseil général du Bas-Rhin

M. Charles Buttner , président du conseil général du Haut-Rhin

M. Adrien Zeller , président du conseil régional d'Alsace

Le 10 mars 2009 :

M. Edouard Balladur , ancien Premier ministre, président du Comité pour la réforme des collectivités locales

Le 24 mars 2009 :

M. Martin Malvy , président de l'Association des petites villes de France

Le 25 mars 2009 :

M. Serge Grouard , vice-président de l'Association des maires des grandes villes de France

M. Philippe Adnot , sénateur, président du conseil général de l'Aube

Le 31 mars 2009 :

M. Patrick Kanner , président de l'Union nationale des centres communaux et intercommunaux d'action sociale

Le 1 er avril 2009 :

M. Bertrand Delanoë , maire de Paris

M. Jean-Paul Huchon , président du conseil régional d'Ile-de-France

Le 8 avril 2009 :

M. Yves Pozzo di Borgo , sénateur de Paris

Le 29 avril 2009 :

M. Jacques Pélissard , député du Jura, maire de Lons-le-Saunier, président de l'Association des maires de France

M. Claudy Lebreton , président du conseil général des Côtes-d'Armor, président de l'Assemblée des départements de France (ADF)

M. Jean-Jack Queyranne , représentant le président de l'Association des régions de France

Le 6 mai 2009 :

M. Olivier Fouquet , président de section au Conseil d'Etat

Le 12 mai 2009 :

M. Michel Berson , président du conseil général de l'Essonne

M. Vincent Eblé , président du conseil général de Seine-et-Marne

M. Daniel Guiraud , vice-président du conseil général de Seine-Saint-Denis

Le 13 mai 2009 :

M. Christian Blanc, secrétaire d'Etat chargé du développement de la région capitale

Le 20 mai 2009 :

M. Jean-Louis Sanchez, délégué général de l'Observatoire national de l'action sociale décentralisée

M. Guy Pustelnik, directeur de l'établissement public interdépartemental de Dordogne, délégué général de l'association française des établissements publics territoriaux de bassins (EPTB)

M. Jean-Pierre Dufès , vice-président de l'association des maires et élus des communes associées de France (AMECAF)

M. Emile Blessig , député du Bas-Rhin, président de l'Association de promotion et de fédération des pays

Le 10 juin 2009 :

M. Alain Even , président du conseil économique et social de Bretagne, président de l'assemblée des conseils économiques et sociaux de France

ANNEXE IV - COMPTE RENDU DES DÉPLACEMENTS EN TARN-ET-GARONNE ET DANS LES HAUTES-PYRÉNÉES LES 18 ET 19 MAI 2009

M. Gérard Larcher, président du Sénat, a accompagné une délégation de la mission temporaire, composée, en particulier, de M. Pierre-Yves Collombat, vice-président , et de Mme Jacqueline Gourault , rapporteur, qui s'est rendue à Montauban le 18 mai 2009 et à Tarbes le 19 mai 2009 .

I - TARN-ET-GARONNE

Une première matinée de débat, organisée à l'Abbaye de Belleperche (Tarn-et-Garonne), à l'invitation du sénateur et président du conseil général de Tarn-et-Garonne, M. Jean-Michel Baylet , en partenariat avec La Dépêche du Midi , a permis de recueillir les analyses de plusieurs responsables locaux, parmi lesquels M. Martin Malvy, président de la région Midi-Pyrénées, Mme Brigitte Barèges, députée-maire de Montauban, Mme Sylvia Pinel, députée, M. Yvon Collin, sénateur, et M. Francis Labruyère, président de l'association des maires.

Après avoir accueilli la délégation sénatoriale, M. Jean-Michel Baylet, sénateur, président du conseil général, a exposé son point de vue : la réforme envisagée des collectivités territoriales ne devait pas porter atteinte aux équilibres existants, ni remettre en cause les financements croisés ou encore se traduire par des risques pour la fiscalité locale. Il a insisté sur le rôle du Sénat qui devra s'attacher, a-t-il estimé, à rendre la réforme acceptable. Il a indiqué qu'il existait aujourd'hui de nombreuses inquiétudes, en particulier sur l'avenir des services publics locaux, objet des débats qui allaient suivre, en citant le cas de La Poste, dont la présence territoriale était menacée.

M. Gérard Larcher, président du Sénat, a souligné que la réforme des collectivités territoriales devait aller de pair avec le renforcement de l'autonomie fiscale, indiquant qu'un développement supplémentaire des dotations budgétaires pourrait être considéré comme un retour à une « République jacobine ». Il a déclaré que l'existence de 520 000 élus locaux constituait une grande richesse pour la France, et a remarqué que le montant des investissements des collectivités territoriales s'élevait à 211 milliards d'euros et que les collectivités employaient 1,9 million de salariés. Il a insisté sur la composition pluraliste de la mission sénatoriale et sur le fait que le Sénat aurait à examiner en premier le projet de loi annoncé par le gouvernement pour l'automne. Il a expliqué que si certains sujets restaient encore à débattre, comme les modes électoraux, le travail de la mission sénatoriale avait déjà permis de clarifier les évolutions possibles concernant le couple communes / intercommunalités, ainsi que les missions des échelons départementaux et régionaux. Evoquant l'avenir des services publics, il a déclaré qu'il était nécessaire de favoriser leur qualité et leur adaptabilité pour améliorer la compétitivité des territoires.

Animé par MM. Pierre-Henri Gergonne , journaliste à Public Sénat , et Alain Baute , journaliste à La Dépêche du Midi , le débat s'est ensuite engagé sur la réforme des collectivités locales , Mme Jacqueline Gourault , rapporteur, indiquant que les associations d'élus demandaient depuis longtemps une réforme globale qui n'oublierait pas la fiscalité locale. Elle a expliqué que la population attendait plus de lisibilité dans l'action locale, Mme Brigitte Barèges, députée-maire de Montauban, ajoutant qu'il était nécessaire de clarifier les compétences et de simplifier l'organisation.

M. Martin Malvy , président du conseil régional, a estimé également qu'une réforme était indispensable et qu'il existait des sujets de consensus, notamment concernant l'achèvement de l'intercommunalité, mais il a aussi remarqué que plusieurs différends subsistaient concernant une éventuelle suppression de la clause de compétence générale et la création de conseillers territoriaux.

M. Jean-Michel Baylet a souhaité que l'on privilégie une approche fondée sur les principes fondamentaux, indiquant pour sa part que le conseil général de Tarn-et-Garonne n'hésitait pas à intervenir dans le développement numérique, compte tenu de l'inaction des autres niveaux de collectivités. Il a observé, par ailleurs, que des progrès restaient à réaliser en matière de déconcentration et de répartition des services entre l'Etat et les collectivités territoriales.

M. Martin Malvy a considéré qu'un des problèmes à résoudre concernait le principe du chef de filat qui n'était pas toujours véritablement établi. Il a souhaité que l'on progresse vers la suppression des instructions multiples des dossiers de demandes d'aide économique.

Mme Jacqueline Gourault , rapporteur, après avoir insisté sur le rôle des élus municipaux bénévoles, a rappelé que le texte de la Constitution rendait impossible la suppression d'un niveau de collectivité territoriale.

M. Francis Labruyère , président de l'association des maires, a déclaré que la commune devait conserver la compétence générale et qu'il était nécessaire de préserver un lien fiscal entre l'entreprise et le territoire. Il s'est inscrit également en faux contre toute évolution vers davantage de « supra-communalité ».

Mme Brigitte Barèges, députée-maire de Montauban, a rappelé la nécessité de mieux contrôler l'évolution des dépenses locales, notamment pour ce qui concerne le nombre des fonctionnaires, alors que le président du conseil régional, M. Martin Malvy, remarquait qu'il existait un risque de disparition de la fiscalité locale qui pourrait être de nature à remettre en cause la capacité d'action des collectivités territoriales.

M. Aymeri de Montesquiou , sénateur du Gers, a regretté que le contribuable soit absent du débat sur la fiscalité locale et a considéré que c'étaient les processus de décisions qui pouvaient se révéler particulièrement coûteux.

Evoquant les différences démographiques dans le cadre du découpage cantonal, Mme Jacqueline Gourault , rapporteur, a plaidé en faveur d'une révision de la carte cantonale et a expliqué qu'une évolution vers un nouveau mode de désignation des conseillers communautaires était nécessaire à travers le « fléchage » de certains candidats sur les listes municipales.

Au cours d'une seconde table ronde, consacrée à la modernisation des services publics à l'échelon local, Mme Sylvia Pinel , députée, a expliqué son action en faveur du maintien de la présence postale sur le territoire , en particulier au niveau du canton et du bassin de vie. Elle a indiqué qu'elle avait obtenu l'élaboration d'un schéma départemental de la présence postale, à l'issue d'un dialogue conduit entre La Poste et les élus locaux.

M. Pierre-Yves Collombat , vice-président de la mission sénatoriale, s'est inquiété de savoir si l'on n'avait pas tendance à confondre services publics modernes et services publics marchands. Il a remarqué, par ailleurs, que La Poste avait tendance à solliciter le fonds de péréquation territoriale pour financer son désengagement.

Mettant en avant son expérience de sénateur et de président du conseil général, M. Jean-Michel Baylet a estimé que la présence des services publics constituait un droit pour la population sur tout le territoire et que c'était la vocation du conseil général de préserver leur implantation grâce, en particulier, à l'exercice de la clause de compétence générale.

M. Gérard Larcher, président du Sénat, a considéré que le recours à des schémas d'organisation territoriale constituait une méthode satisfaisante. Il a observé, par ailleurs, que l'action de l'Europe, depuis vingt-cinq ans, s'était concentrée sur le développement de la concurrence, mais avait laissé de côté l'élaboration d'une véritable politique industrielle. Il a appelé de ses voeux l'émergence d'un nouveau volontarisme et a évoqué la nécessité d'accroître le niveau des investissements dans les infrastructures, en citant l'exemple du réseau électrique.

Concernant l'évolution de la taxe professionnelle , Mme Jacqueline Gourault, rapporteur, a déclaré que la mission sénatoriale souhaitait la création d'un nouvel impôt économique au bénéfice des collectivités territoriales, et a indiqué qu'il serait opportun que chaque niveau de collectivité puisse disposer de deux ressources fiscales distinctes, l'une concernant l'économie, l'autre les ménages. M. Pierre-Yves Collombat , vice-président, a rappelé que la taxe professionnelle était déductible de l'impôt sur les sociétés et qu'elle était plafonnée à 3 % de la valeur ajoutée. M. Jean-Michel Baylet, sénateur et président du conseil général de Tarn-et-Garonne, après avoir rappelé que la taxe professionnelle avait été réformée à de nombreuses reprises, a observé que les entreprises s'intéressaient davantage aux infrastructures numériques, aux axes de transports et aux possibilités de logements qu'au montant de la taxe professionnelle qu'elles devraient acquitter. M. Martin Malvy, président du conseil régional, s'est inquiété de savoir si l'attribution d'une part d'un impôt national correspondrait à une ressource dynamique ou fixe.

M. Yvon Collin , sénateur, a conclu en soulignant tout à la fois l'intérêt et l'inquiétude suscités par la réforme.

II - HAUTES-PYRÉNÉES

A - LE PIC DU MIDI

Dans l'après-midi du 18 mai, la délégation a été accueillie à La Mongie par M. François Fortassin , sénateur et président du syndicat mixte pour la valorisation touristique du Pic du Midi, accompagné d'une délégation d'élus locaux et de membres du syndicat mixte.

A l'issue d'une visite des installations scientifiques du Pic du Midi, une réunion a été organisée au cours de laquelle M. Gérard Larcher , président du Sénat, a constaté que l'intervention des collectivités territoriales et notamment du conseil général avait permis d'apporter une réponse au défi scientifique et financier constitué par la préservation de l'outil irremplaçable que représente l'observatoire du Pic du Midi. Mme Josette Durrieu, sénatrice et présidente du conseil général des Hautes-Pyrénées, a observé que les collectivités territoriales avaient pris le relais de l'Etat pour sauver un outil essentiel et établir une collaboration inédite entre les élus locaux et la communauté scientifique.

M. Pierre-Yves Collombat , vice-président, s'est interrogé sur la méthode utilisée par les collectivités territoriales pour conduire en commun ce type de projet, Mme Josette Durrieu, sénatrice et présidente du conseil général des Hautes-Pyrénées, précisant que la principale difficulté a consisté à réunir les fonds nécessaires pour développer les installations touristiques permettant d'assurer la soutenabilité financière du projet. Elle a observé que la région avait décerné au Pic du Midi le label de « Grand site », ce qui marquait également son engagement.

M. Bernard Dupré, directeur de l'observatoire du Pic du Midi, a souligné que l'engagement de l'Etat restait important à travers le paiement des salaires des personnels scientifiques, qui représentaient un budget de 1,4 million d'euros par an, et a expliqué qu'il était compréhensible que l'Etat demande à la communauté scientifique de réaliser des choix entre différentes catégories d'équipements, ce qui expliquait la remise en cause de cet équipement, malgré son intérêt international.

M. François Fortassin, sénateur et président du syndicat mixte pour la valorisation touristique du Pic du Midi, a indiqué que le syndicat mixte était chargé spécifiquement des activités touristiques et de la maintenance du site, ce qui nécessitait 40 emplois permanents, les emplois de scientifiques représentant, pour leur part, une trentaine de personnes.

B - TARBES

Une seconde matinée de débat, organisée à Tarbes le 19 mai, à l'invitation de Mme Josette Durrieu , sénatrice et présidente du conseil général des Hautes-Pyrénées, en partenariat avec la presse régionale, a permis de recueillir les analyses de plusieurs responsables locaux, parmi lesquels M. Pierre Forgues , premier vice-président du conseil régional, M. Gérard Trémège, maire de Tarbes et président du Grand Tarbes, M. Rolland Castells, président de la communauté de communes de Haute-Bigorre, M. Jean-Louis Cazaubon , maire de Poueyferré, président de la Chambre d'agriculture, M. Bernard Verdier , président du Pays des Coteaux, M. Henri Nayrou , député et président de l'association nationale des élus de la montagne (ANEM).

Après avoir accueilli la délégation sénatoriale, Mme Josette Durrieu , sénatrice et présidente du conseil général des Hautes-Pyrénées, a, en ouverture de la matinée de débats, estimé que nous étions entrés dans la phase active de la redéfinition de nos institutions locales et a souhaité dénoncer les jugements injustes habituellement prononcés sur la décentralisation et ceux tendant à stigmatiser le trop grand nombre d'élus.

Elle a souhaité que la réforme engagée n'aboutisse pas à la remise en cause du système d'administration locale et a marqué son désaccord avec la définition communément employée du secteur rural selon laquelle 70 % du territoire métropolitain serait rural et « vide » alors même qu'il concentre deux tiers des emplois. Elle a évoqué le développement des Hautes-Pyrénées qui constitue le deuxième pôle d'attraction de la région Midi-Pyrénées qui a su créer plus de 10 000 emplois ces dernières années pour répondre aux importants sinistres industriels qui ont eu lieu. Elle a expliqué que c'étaient les élus qui avaient élaboré les outils permettant de recréer un tissu économique dynamique en recourant en particulier à l'intercommunalité dans les zones de montagne.

Elle a précisé que le département des Hautes-Pyrénées comportait 474 communes et 39 communautés de communes dont seulement 10 recouvraient la taille d'au moins un canton. Elle a insisté sur l'importance du développement du tourisme en lien avec le pôle de Lourdes. Elle a remarqué que c'était la clause de compétence générale qui avait, par exemple, permis au département de soutenir le développement du pôle universitaire et a souhaité le maintien des financements croisés.

M. Gérard Larcher , président du Sénat, a fait ressortir le lien entre la réforme des collectivités territoriales et la nécessité de rendre le territoire plus compétitif. Il a insisté sur l'utilité de permettre aux citoyens d'accéder à des services publics de qualité. Il a rappelé que la République avait aujourd'hui changé de nature puisque la Constitution reconnaissait que son organisation était décentralisée et a fait part de sa préférence pour le terme « terroir » qui lui semblait de portée plus large que le mot « territoire ». Il a insisté sur le rôle des 520 000 élus locaux qui constituent les acteurs du développement local et rappelé la mission spécifique du Sénat en matière de représentation des collectivités territoriales telle qu'elle lui était reconnue par la Constitution. Il a expliqué, en particulier, que la Haute Assemblée accueillait des débats sereins et respectueux des différentes sensibilités, ainsi qu'en témoignait la composition pluraliste de la mission sénatoriale. Il a indiqué qu'un débat en séance publique aurait lieu le 30 juin prochain pour discuter les propositions de la mission sénatoriale, débat au cours duquel il a souhaité que s'exprime le souci de l'intérêt général du territoire. Il a défendu le principe de l'adaptation de l'organisation locale et a fait état des convergences fortes qui existaient déjà sur l'avenir des métropoles et des intercommunalités. Il a exprimé son intérêt pour le renforcement de la notion de chef de file.

M. Pierre-Yves Collombat , vice-président de la mission sénatoriale, a indiqué que la mission avait pour but d'aboutir à un texte qui serait utile à la fois aux collectivités territoriales, aux élus et aux citoyens. Il a estimé que le rôle de la mission n'était pas de réduire les dépenses des collectivités locales mais de préserver leur capacité d'initiative. Evoquant une démarche pragmatique, il a fait référence au travail de la mission consistant à essayer de clarifier l'exercice des compétences des collectivités territoriales, ainsi que leur capacité d'association et d'action en commun. Il a expliqué qu'un accord semblait se dessiner concernant trois sujets : la nécessité de désigner les conseillers municipaux et les conseillers communautaires lors d'un même scrutin en recourant au « fléchage », la mission de solidarité sociale et territoriale reconnue au département et le rôle stratégique dévolu à la région en matière de développement économique.

Animé par M. Pierre-Henri Gergonne , journaliste à Public Sénat , le débat s'est ensuite engagé sur l'organisation locale dans les zones de montagne. M. Gérard Trémège , maire de Tarbes et président du Grand Tarbes, a estimé que la décentralisation n'était pas achevée et qu'il existait dans l'opinion une certaine incompréhension sur les compétences de chaque niveau de collectivité territoriale. Il a appelé de ses voeux un effort de simplification et de transparence, ainsi qu'une réforme de la fiscalité locale et a souhaité que la compétence économique soit attribuée plus clairement et que soit instaurée une structure unique de développement économique permettant de faire travailler ensemble les différents acteurs.

Le président de l'ANEM, M. Henri Nayrou , a estimé qu'il aurait été préférable de commencer par la réforme de la fiscalité locale avant d'engager la réforme de la gouvernance ou celle des compétences. Il a appelé au respect du fait départemental en évoquant notamment le rôle joué par le conseil général pour préserver l'activité dans les fonds de vallée notamment à travers les stations de ski de moyenne montagne.

Mme Jacqueline Gourault , rapporteur de la mission sénatoriale, a rappelé que la mission avait proposé de fixer une date butoir au 1 er janvier 2012 pour l'achèvement de la carte de l'intercommunalité, ce délai devant être mis à profit pour réorganiser ou fusionner les communautés de communes existantes. Elle a expliqué que les conseillers communautaires avaient vocation à demeurer des délégués des conseils municipaux qui seraient choisis dorénavant à l'occasion des élections municipales par une procédure de « fléchage ».

En réponse à une question de M. Gérard Trémège, relative à la création de « communes nouvelles » préconisée par le rapport Balladur, Mme Jacqueline Gourault a estimé que si les fusions de collectivités devaient être facilitées, il n'était pas envisagé par la mission de transformer les intercommunalités en nouvelles communes. M. Pierre-Yves Collombat a observé qu'il existait effectivement un risque que la réforme des collectivités territoriales cherche à favoriser des rapprochements autoritaires, ce qui ne lui semblait pas acceptable.

Abordant la question des « pays », M. Bernard Verdier a expliqué que le département des Hautes-Pyrénées en comptait cinq, qui constituaient autant d'outils de développement dans chaque bassin de vie, afin de mener des projets. Mme Jacqueline Gourault a considéré que les pays différaient selon les territoires et que, s'il n'était pas envisageable de les transformer en nouvelles structures, il convenait de préserver ceux qui avaient démontré leur utilité.

M. Jean-Louis Cazaubon , maire de Poueyferré, président de la Chambre d'agriculture, a évoqué le rôle productif du parc national des Hautes-Pyrénées ainsi que sa fonction de préservation du pastoralisme. Il a fait part de sa crainte que la réforme engagée se traduise par l'oubli des territoires situés en dehors des métropoles. M. Pierre Forgues , premier vice-président de la région Midi-Pyrénées, a indiqué que la région n'hésitait pas à développer des politiques différenciées selon les territoires pour être équitable.

Mme Josette Durrieu , sénatrice et présidente du conseil général, a insisté sur le fait que le département devait rester moteur en matière de développement touristique et a regretté que le tourisme ait disparu des contrats de plan Etat-région (CPER). M. François Fortassin , sénateur, a estimé que les paysages naturels constituaient la principale richesse du département et qu'il était dès lors nécessaire de préserver un équilibre entre le développement local et la protection des paysages.

M. Pierre Forgues , premier vice-président de la région Midi-Pyrénées, a considéré que chaque niveau de collectivité avait sa spécificité et sa légitimité et qu'une réforme des collectivités territoriales se devait d'être consensuelle. Il a insisté sur la nécessité de traiter la question de la fiscalité locale et des compétences et s'est interrogé sur le rôle de l'Etat et de l'Europe. Mme Jacqueline Gourault , rapporteur, a rappelé qu'il n'était pas envisagé de supprimer un niveau de collectivité mais qu'une réforme était cependant nécessaire et qu'elle devrait notamment aboutir à la création d'un nouvel impôt économique qui succèderait à la taxe professionnelle.

M. Pierre-Yves Collombat , vice-président, après avoir considéré qu'il n'existait pas d'accord sur la proposition de création des conseillers territoriaux, a souligné l'intérêt de s'en tenir à une démarche pragmatique au lieu de chercher à appliquer un projet parfaitement rationnel. Il a déclaré qu'il était essentiel de préserver la capacité d'initiative des collectivités territoriales au lieu de chercher à tout prix à réduire leurs dépenses.

Le président du Sénat, M. Gérard Larcher , a estimé que le rôle du Sénat était de construire la position de législateur qui serait la sienne dans le débat à venir et non de se positionner face au rapport demandé par le Président de la République à M. Edouard Balladur, dont il a apprécié la qualité, notamment dans sa contribution à faire émerger le débat et à en clarifier les termes. Il a observé que la réforme envisagée devrait être réalisée à cadre constitutionnel inchangé et qu'il était nécessaire de renforcer la cohérence de notre système d'administration locale pour répondre au besoin de clarification et de simplification exprimé tant par les élus que par l'opinion. Il a estimé normal que des points de divergence apparaissent au sein de la mission, compte tenu de son caractère pluraliste, et nourrissent ainsi le débat démocratique. Il s'est déclaré favorable à ce que l'ensemble des élus locaux soit renouvelé le même jour et a insisté en conclusion sur le fait que le Sénat était décidé à être un partenaire actif de la réforme.

ANNEXE V - 2ÈME PARTIE DES AUDITIONS DE LA MISSION

Mardi 24 mars 2009

Audition de M. Martin Malvy, président de l'Association des petites villes de France (APVF), Mme Marie France Beaufils, vice présidente de l'APVF
et M. Pierre Jarlier, secrétaire général de l'APVF

Sous la présidence de M. Claude Belot, président, la mission a auditionné M. Martin Malvy, président de l'Association des petites villes de France (APVF) et ses collègues, Mme Marie France Beaufils, vice-présidente de l'APVF et M. Pierre Jarlier, secrétaire général de l'APVF.

Après avoir présenté l'APVF, M. Martin Malvy a mis en avant le fait que les petites villes représentaient le dernier maillon d'une chaîne qui reliait l'État à la commune, en passant par toutes les autres collectivités territoriales. Il a souligné la dépendance financière des petites villes à l'égard des autres maillons de la chaîne territoriale et il en a conclu à l'absolue nécessité de maintenir, pour les communes, la clause générale de compétence, qui leur permet d'obtenir les cofinancements dont elles peuvent avoir besoin pour réaliser les équipements publics qui maillent le territoire national. Estimant que la clause générale de compétence était la clé de voûte de l'aménagement du territoire et qu'elle offrait une réponse, grâce à la solidarité territoriale, non seulement aux inégalités de ressources existant entre les différentes communes mais aussi aux demandes des citoyens comme des entreprises, il a défendu la pertinence des financements croisés. Il a d'ailleurs marqué son désaccord avec une des solutions parfois envisagées pour encadrer le recours aux cofinancements, qui consisterait à obliger le maître d'ouvrage à participer à hauteur de 50% à l'investissement, estimant que si cela avait été le cas, 80 % des équipements locaux importants n'auraient pas vu le jour.

M. Martin Malvy a ensuite souligné la réussite de l'intercommunalité qui a permis de remédier à l'éparpillement communal. Il a marqué son accord sur cette question avec les propositions du Comité présidé par M. Edouard Balladur et s'est prononcé pour une rationalisation des périmètres des intercommunalités, conduite par des commissions départementales de coopération intercommunale dont la composition serait à rénover, pour la désignation des délégués communautaires par fléchage sur les listes de candidats aux élections municipales. En revanche, il s'est déclaré opposé à un affaiblissement des mairies des communes regroupées au sein d'un établissement public de coopération intercommunale (EPCI), qui les cantonnerait dans un rôle de mairie de quartier.

Sur la question de la répartition des compétences entre les différents niveaux de collectivité, M. Martin Malvy a jugé nécessaire de mieux définir les compétences devant revenir à chaque échelon, dans le respect de la clause générale de compétence, l'exercice de certaines d'entre elles devant être réservé, en matière d'instruction notamment, à une collectivité chef de file. Il a conclu son intervention en indiquant que certaines questions liées aux finances locales, comme l'impôt susceptible de remplacer la taxe professionnelle, appelaient, elles aussi, des réponses.

S'attachant à ce dernier sujet et rappelant que la mission s'était déjà saisie de la question de la fiscalité locale et qu'elle poursuivrait ces travaux en la matière, M. Yves Krattinger a souhaité connaître l'analyse de M. Martin Malvy à la fois sur les conséquences que serait susceptible d'avoir la suppression de la taxe professionnelle sur l'exercice par les différents niveaux de collectivité de leur compétence de développement économique et sur les voies que devrait, selon lui, emprunter la réforme de la fiscalité locale.

Sur le premier point, M. Martin Malvy a estimé souhaitable que les collectivités qui portent les projets de développement économique continuent de bénéficier d'un impôt reposant sur l'activité économique ; en revanche, il a souligné que l'intérêt porté par les collectivités territoriales aux questions de développement des entreprises et des emplois ne se limitait pas au seul retour sur investissement qu'elles pouvaient espérer à travers la taxe professionnelle. Par ailleurs, il a considéré qu'il fallait veiller à ce que la recette censée remplacer la taxe professionnelle soit suffisamment dynamique, ce qui ne serait pas forcément le cas d'une dotation évoluant selon un rythme fixé à l'avance. Sur la question de la réforme de la fiscalité locale, il a souligné les difficultés que la spécialisation de l'impôt par niveau de collectivité pourrait engendrer en matière de péréquation.

Interrogé par M. Pierre Yves Collombat, vice-président, sur l'impact que la mise en place de métropoles serait susceptible d'avoir sur les petites villes, selon le seuil de population retenu pour leur constitution, M. Martin Malvy a jugé que, plutôt que de mettre en place des métropoles, il convenait en priorité de prévoir, éventuellement sur une base expérimentale, des schémas d'aménagement périurbain qui soient prescriptifs et de renforcer la coopération intercommunale.

M. Pierre Jarlier a indiqué que l'APVF était, d'une manière générale, plus proche des préconisations adoptées par la mission que de celles formulées par le comité présidé par M. Edouard Balladur. Il a ainsi marqué son accord avec la désignation par fléchage des délégués communautaires, le scrutin proportionnel de liste étant étendu aux communes de 500 habitants et plus, une obligation de candidature étant mise en place en deçà. Il a également approuvé l'achèvement de la carte intercommunale et la rationalisation des périmètres des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) avant 2012. À cet égard, il a relevé que de nombreux textes législatifs intervenus récemment dans le domaine de l'environnement mettaient en place une planification de l'action des intercommunalités à l'échelle du bassin de vie, ce qui rendait d'autant plus nécessaire la mise en cohérence de leurs périmètres respectifs. Enfin, il a rappelé la double vocation des petites villes, dont certaines jouent le rôle de satellite dans les grandes métropoles alors que d'autres jouent celui de centre structurant de l'espace rural dans les territoires moins peuplés, ce qui rendait d'autant plus nécessaire le maintien de la clause générale de compétence au niveau communal.

Insistant sur l'importance de la coopération intercommunale, Mme Marie-France Beaufils a souligné la différence entre le fait d'obliger les intercommunalités à se saisir de plus de compétences au détriment des communes et celui de créer les conditions d'une coopération plus aboutie entre les communes qui les composent. Elle a rejoint M. Martin Malvy sur l'idée de privilégier la solution consistant à développer des schémas de cohérence territoriale, sur celle consistant à étendre le statut de métropole aux grandes agglomérations, tout en se déclarant réservée sur la pertinence de rendre ces schémas prescriptifs. Quant à la fiscalité, elle a estimé absolument nécessaire que les collectivités territoriales bénéficient d'une recette fiscale dynamique basée sur l'activité économique. S'agissant de la répartition des compétences, elle a appelé de ses voeux un recours plus poussé à la notion de chef de file, dans un cadre coopératif.

Revenant sur la question de la taxe professionnelle, M. Martin Malvy a considéré que son principal inconvénient tenait à ce que l'État en supportait une grande partie. Soulignant la difficulté particulière qui s'attachait à une réforme de la fiscalité locale conçue dans un contexte de crise des finances publiques, il a suggéré de modifier l'assiette de cet impôt pour y intégrer la valeur ajoutée et lui permettre de peser de manière plus équitable sur les services et la production industrielle. Il a jugé que, en tout état de cause, il fallait éviter que la réforme de la fiscalité locale affaiblisse les collectivités territoriales, et particulièrement les régions et les départements, au point de leur rendre impossible d'aider, comme elles le font aujourd'hui, les petites villes.

M. Yves Krattinger, rapporteur, a estimé que, en matière de réforme de la fiscalité locale et particulièrement de la taxe professionnelle, la mission devait s'appuyer sur les travaux des rapports Valletoux et Fouquet. Par ailleurs, il a jugé problématique que l'État intervienne autant dans la fiscalité locale, ce qui, à la fois, prive les citoyens de la capacité qu'ils ont à déterminer, à travers leurs élus, les taux des impôts locaux, et est susceptible de fragiliser l'équilibre des finances locales.

M. Claude Belot, président, ayant considéré que les élus locaux étaient amenés à voter les taux d'impôts dont les bases ne sont plus conformes à la réalité, ce qui constituait un des problèmes principaux de la fiscalité locale actuelle, M. Martin Malvy a fait valoir que cela était à l'origine d'une inégalité entre les communes centres et leur périphérie, les citoyens déménageant dans les communes alentour, car les bases foncières y sont moins élevées, tout en profitant des services offerts par la commune centre dont l'assiette fiscale se rétracte.

M. Yves Détraigne s'est interrogé sur les conséquences qu'il convenait de tirer de la généralisation de l'intercommunalité s'agissant de l'élargissement des compétences transférées aux EPIC, de la réduction du nombre de conseillers municipaux corrélative à la réduction des tâches dévolues aux communes, et du maintien des pays alors que les intercommunalités se verraient dotées d'un périmètre pertinent et d'une entière compétence d'aménagement du territoire. Il s'est par ailleurs demandé s'il ne convenait pas de revoir la répartition des compétences entre le département et la région en fonction de leur vocation respective, de proximité pour le premier et d'aménagement et de structuration du territoire pour la seconde.

Sur le premier point de l'élargissement des domaines de compétences transférées aux intercommunalités, M. Martin Malvy a jugé nécessaire d'observer une certaine prudence, afin de conserver toute l'efficacité d'action que permet le consensus construit au sein de l'intercommunalité. S'agissant des pays, il a relevé que leur réussite était très variable d'une région à l'autre, certains fonctionnant bien et d'autres non, et qu'ils permettaient souvent de rassembler plus de communes que ne le pourrait une structure intercommunale. En réponse à une question de M. Yves Détraigne sur le rapprochement des collèges et des lycées, il a, enfin, estimé que la solution de simplification consistant à en confier la gestion à une seule collectivité, serait mise en échec par la spécificité de ces deux types d'équipements, les formations offertes au sein des collèges étant conçues sur un modèle uniforme, alors que celles des lycées sont organisées de manière spécifique, ce qui justifie que, dans le premier cas, la gestion en revienne aux départements qui garantissent ainsi un accès de proximité à une même formation, alors que dans le second cas, elle revient aux régions, qui construisent, sur l'ensemble du territoire, un échantillon varié de formations spécifiques.

M. Claude Belot, président, a souhaité que la mission approfondisse la question des relations entre départements et régions, se demandant s'il fallait aller dans le sens d'un partenariat organisé entre ces deux échelons. Ayant souligné que certaines compétences devaient être exercées à une échelle plus large que le département, il a jugé nécessaire de bien définir la compétence en matière d'aménagement du territoire.

M. François Patriat a indiqué que le Président du Sénat recevait le lendemain des présidents de régions.

Mme Josette Durrieu a demandé l'avis de l'intervenant sur la proposition 18 avancée par la mission temporaire dans son rapport d'étape, visant à « l'affirmation des départements dans leur rôle de garant des solidarités sociales et territoriales, et des régions dans leurs missions stratégiques et liées à la préparation de l'avenir ». Elle a estimé nécessaire de mieux définir les actions stratégiques des régions, ainsi que la répartition des rôles en matière d'accompagnement des initiatives économiques, soulignant que les régions avaient jusqu'alors assumé cette mission de façon insuffisante. Elle s'est demandé, notamment, à quel échelon territorial devraient revenir le déploiement des réseaux de très haut débit ou encore la gestion des aéroports de villes moyennes.

Mme Marie-France Beaufils a relevé que certaines compétences transférées aux collectivités territoriales pesaient lourdement sur leur budget, sans que celles-ci aient parfois les moyens de les assumer.

Mme Anne-Marie Escoffier a souligné que la diversité de la France constituait une force. Aussi a-t-elle plaidé pour l'établissement de règles a minima, simples et lisibles, et non pas pour l'imposition d'un cadre uniforme ou d'exigences trop contraignantes, afin de laisser une marge de liberté aux collectivités territoriales. S'agissant des pays, elle a souhaité que puissent perdurer ceux qui fonctionnent bien, tout en s'interrogeant, néanmoins, sur l'existence de certains qui mobilisent des moyens sans pour autant apporter la preuve de leur utilité.

M. Yves Krattinger, rapporteur, a rappelé que la mission temporaire avait formulé des propositions raisonnables en faveur de l'instauration d'un guichet et d'un dossier d'instruction uniques, soulignant l'énergie et le temps perdus dans les instructions parallèles par les services de l'Etat et ceux des collectivités territoriales. Il a indiqué que certains guichets uniques existaient déjà et que cette pratique gagnerait à être banalisée. Il importe notamment pour l'Etat d'admettre que ses services ne peuvent plus continuer à intervenir en doublons des collectivités territoriales dans l'instruction des dossiers. Enfin, il a souligné qu'il était indispensable de développer l'interterritorialité, c'est-à-dire les échanges entre les territoires.

En réponse, M. Martin Malvy a indiqué que les régions étaient amenées à coopérer avec les régions voisines et que certaines politiques ne pouvaient être que partagées entre plusieurs collectivités. Il a reconnu, comme M. Claude Belot, président, que cela nécessitait néanmoins une coordination entre celles-ci, comme cela fonctionne déjà dans certaines régions. Il a suggéré que soit rendue obligatoire, par la loi, la création d'une conférence des autorités organisatrices de transports. Puis il a confirmé que la réforme de l'Etat était un préalable indispensable.

M. Claude Belot, président, a souligné la nécessité d'imposer un partenariat entre les régions, notamment en vue d'assurer une continuité territoriale en termes de transports. Mme Anne Marie Escoffier a fait observer que la partition du territoire français en grandes zones de défense, par exemple, montrait la nécessité de dépasser, dans certains cas, les limites régionales.

S'agissant, enfin, des modes de scrutin, M. Martin Malvy a estimé que l'élection de conseillers qui soient à la fois conseillers généraux et régionaux signerait l'arrêt de mort de toute politique régionale. Il a indiqué que le fait, pour un élu, d'être attaché à un territoire le placerait d'abord au service de celui-ci et non pas de l'ensemble du territoire régional.

M. Yves Krattinger, rapporteur, a ajouté que cela remettrait en cause à la fois la proximité du département et la vocation stratégique de la région. Il a souligné, en outre, le risque de concurrence entre des conseillers généraux et régionaux élus au niveau d'une circonscription législative et le député de cette circonscription.

M. Claude Belot, président, a souligné un attachement largement partagé au scrutin uninominal.

Mercredi 25 mars 2009

Audition de M. Serge Grouard, vice-président de l'Association des maires de grandes villes de France (AMGVF)

Sous la présidence de M. Claude Belot, président, la mission a entendu M. Serge Grouard, vice-président de l'Association des maires de grandes villes de France (AMGVF).

Appuyant son intervention sur la plateforme commune adoptée par l'AMGVF, M. Serge Grouard a rappelé les raisons pour lesquelles la réforme était aujourd'hui nécessaire : complexité, manque de lisibilité et coûts de l'organisation territoriale, difficultés de gouvernance et enchevêtrement des compétences. Estimant que l'accent était parfois trop mis sur le couple région/département, il a jugé souhaitable que la réflexion s'attache aussi aux dysfonctionnements propres au couple commune/intercommunalité, notamment en raison des gains financiers que, en la matière, une réforme de la gouvernance pourrait apporter, grâce à la mutualisation des services ou à la mise en cohérence des choix d'aménagements opérés, au sein de l'intercommunalité, par les différentes communes.

M. Claude Belot, président, ayant fait observer que, d'ores et déjà, une telle coordination de l'action des communes était possible grâce aux transferts de compétences à l'intercommunalité, ou aux arbitrages rendus par les départements ou les régions en matière de cofinancement des équipements sollicités par les communes, M. Serge Grouard a estimé que, en s'appuyant notamment sur des règles de majorité qualifiée ou sur la clause générale de compétence, les communes pouvaient faire échec à ces tentatives de coordination de leur action.

Il a par ailleurs indiqué que l'AMGVF souhaitait éviter que le transfert de compétences à l'établissement public de coopération communale (EPCI) n'aboutisse à dissocier l'exercice des compétences de la légitimité démocratique et qu'elle appelait à une modification du mode de désignation des délégués communautaires, mais refusait toutefois leur élection au suffrage universel direct car celle-ci aboutirait à faire des EPCI des collectivités territoriales de plein exercice.

Estimant que deux principes devaient guider la réflexion, à savoir la prise en compte de la diversité des territoires et l'association des collectivités à leur réforme, en particulier pour déterminer la part d'incitation ou de contrainte à laquelle il pourrait être recouru, M. Serge Grouard a estimé, conformément à la position adoptée par l'AMGVF, qu'il était nécessaire d'achever la carte intercommunale et de créer, sur la base du volontariat, des métropoles. Il a prôné pour celles-ci l'organisation d'une élection unique sur leur territoire, en marquant sa réserve à l'encontre du mode de scrutin de type Paris-Lyon-Marseille qui ne fait pas l'unanimité au sein de l'AMGVF.

En réponse à M. Yves Krattinger, rapporteur, qui l'a interrogé sur le soutien qu'une telle proposition pourrait recevoir au sein de la ville d'Orléans dont il est le maire et de son agglomération, il a indiqué qu'elle pourrait rencontrer un écho favorable. Relevant l'intérêt que manifestaient d'une manière générale les citoyens pour la réforme territoriale, il a estimé que ceux-ci pourraient se montrer plus favorables à la mise en place des métropoles que les élus municipaux, plus réservés au sujet de l'affaiblissement des communes qu'impliquerait la création de la collectivité métropolitaine.

M. Yves Krattinger, rapporteur, a demandé à l'intervenant de préciser la définition qu'il donnait de la notion de métropole, faisant observer que celle-ci variait fortement selon les différentes propositions. Ainsi, pour le maire de Lyon, il s'agirait du regroupement de plusieurs agglomérations, de façon à ce que cette métropole puisse faire jeu égal avec les autres grandes métropoles européennes.

En réponse, M. Serge Grouard a indiqué que l'AMGVF ne partageait pas cette conception, précisant que, selon l'association, les métropoles devraient correspondre aux territoires des actuelles agglomérations, à condition que leur périmètre soit cohérent, réunir les compétences des communes et des groupements, et permettre de concilier légitimité et compétence, par l'organisation d'un mode de scrutin à l'échelle du territoire de la métropole.

M. Pierre-Yves Collombat, premier vice-président, ayant relevé que cela signifiait la disparition des communes situées sur le territoire de la métropole, ou que celles-ci ne disposeraient plus que de compétences déléguées, M. Serge Grouard a confirmé que la proposition de l'AMGVF consistait à attribuer la clause générale de compétence à la métropole et à prévoir la possibilité pour celle-ci de déléguer des compétences de proximité aux communes, dans une logique de « mairies de proximité » et dans un souci de cohérence. En revanche, l'AMGVF, à la différence du « comité Balladur », ne propose pas, a-t-il précisé, de transférer l'ensemble ou la totalité des compétences du département à la métropole, mais certaines d'entre elles.

M. Yves Krattinger, rapporteur, a indiqué que la proposition de l'intervenant reviendrait à créer un nouveau type de collectivité territoriale de plein exercice, ayant pour conséquence de faire passer de trois à quatre le nombre d'échelons territoriaux. Il a rappelé que la mission temporaire s'était accordée sur le principe de la création, par la loi, d'un nombre limité de métropoles qui ne soient pas seulement un regroupement de communes au sein d'une agglomération.

M. Serge Grouard a indiqué, en réponse, qu'il ne s'agirait pas d'une strate supplémentaire puisque la métropole se substituerait aux communes. Il a précisé que la position qu'il présentait devant la mission temporaire avait été arrêtée dans une plateforme adoptée par le bureau de son association. Par ailleurs, il a rappelé avoir cosigné avec M. Michel Destot, président de l'AMGVF, un article dans Le Monde reprenant cette position.

M. Claude Belot, président, a relevé que cette proposition pouvait surprendre la mission. Il a souligné que la Constitution ne mentionnait que les communes, les départements et les régions, les intercommunalités n'étant que des « coopératives de communes », bénéficiant de compétences déléguées. La proposition de l'AMGVF supposerait soit de créer un nouveau statut de collectivité, soit que les communes concernées décident de se réunir en une commune unique.

Il s'est demandé, en outre, si toutes les grandes villes avaient vocation à devenir des métropoles, faisant observer que les différentes définitions qui en sont données peuvent contribuer à brouiller le message. Ainsi, un grand nombre de villes jouent un rôle « métropolisant » sur un territoire donné. Cependant, il a estimé que les métropoles seraient d'autant plus puissantes qu'elles seraient peu nombreuses. Il a voulu savoir, par ailleurs, si l'AMGVF envisageait bien que l'évolution proposée n'ait lieu que sous réserve d'une volonté démocratique et d'une adhésion populaire.

M. Serge Grouard a confirmé ce dernier point et a indiqué que l'AMGVF n'avait pas arrêté de position sur le nombre de villes susceptibles de prendre le statut de métropole, estimant néanmoins que ce dernier pourrait être proposé de façon plus large que ne le suggère le « comité Balladur ». Il s'est demandé, toutefois, ce qui pourrait être proposé aux autres grandes villes qui ne deviendraient pas des métropoles. Reconnaissant que différentes acceptions de ce terme pouvaient exister, il a admis qu'il serait peut-être préférable de qualifier les agglomérations concernées, dans le cas de la proposition de l'AMGVF, de collectivités uniques, plutôt que de métropoles.

M. Philippe Dallier a jugé innovant et intéressant le modèle de type « PLM » (Paris-Lyon-Marseille), dans lequel la métropole constitue la collectivité territoriale de plein exercice et les communes existent en tant qu'arrondissements. Il a ajouté qu'il était possible d'avoir des approches différentes de la notion de métropole, selon leur taille.

M. Yves Krattinger, rapporteur, a estimé que la loi ne pourrait pas décider de tels regroupements à la place des populations et des conseils municipaux concernés. Il a fait observer que des fusions de communes étaient d'ores et déjà possibles. Rappelant que l'objectif était de réfléchir aux moyens de renforcer la compétitivité des métropoles françaises au niveau européen, il a jugé que celles-ci perdraient en lisibilité si elles étaient trop nombreuses.

Mme Jacqueline Gourault, rapporteur, a relevé que la proposition de l'AMGVF consistait à envisager la création de collectivités territoriales de plein exercice au niveau d'espaces agglomérés.

M. Pierre-Yves Collombat, premier vice-président, a demandé si l'AMGVF disposait d'études sur les économies d'échelle à attendre de tels regroupements.

M. Charles Guéné s'est demandé si la position exprimée rejoignait les propositions n° 7, 8 et 9 du « comité Balladur ». Celui-ci a en effet suggéré que les métropoles disposent de la clause générale de compétence, formant ainsi une « avant-garde » de ce que pourraient devenir, à terme, les intercommunalités. Par ailleurs, en dehors des onze métropoles créées par la loi, la proposition n° 8 a ouvert la possibilité pour les autres intercommunalités d'accéder par la suite à ce statut, sur la base du volontariat. Enfin, la proposition n° 9 vise à permettre à toute intercommunalité de se transformer en commune nouvelle, c'est à dire en collectivité de plein exercice.

M. Edmond Hervé a souligné que la définition de la métropole devait également prendre en compte des critères de solidarité et de péréquation. Puis il a mis l'accent sur l'importance de la notion de réseau, peu évoquée jusqu'alors au sein de la mission, en vue de favoriser les complémentarités, précisant qu'un réseau peut être international, comme dans le domaine universitaire notamment, et concerner différents niveaux de collectivités. Il s'est interrogé, en outre, sur la façon dont la proposition de l'AMGVF pourrait être accueillie au sein des conseils d'agglomération. Il a souligné que les grandes villes s'étaient montrées exemplaires en n'exigeant pas une représentation proportionnelle à leur population au sein des groupements, contribuant ainsi à la réussite de la coopération intercommunale. Il a souhaité que la notion de compétences obligatoires constitue une référence à prendre en compte, ce à quoi M. Yves Krattinger et Mme Jacqueline Gourault, rapporteurs, ont souscrit.

Par ailleurs, M. Edmond Hervé a indiqué qu'une difficulté venait de l'exercice de la maîtrise d'ouvrages, qui exige beaucoup de travail de négociation. Il a insisté pour que les maires ne soient pas privés de compétences telles que le pouvoir de police municipale et la signature des permis de construire, qui sont les principaux attributs de leur rôle de proximité et auxquels ils sont attachés. Enfin il a estimé que la « boîte à outils » juridiques en matière de coopération intercommunale était pleine et qu'il convenait désormais de l'utiliser.

M. Rémy Pointereau a jugé nécessaire de veiller à la répartition géographique des métropoles, dans un souci d'équilibre et d'aménagement du territoire. Il s'est interrogé sur l'opportunité de prévoir un seuil de population pour l'accès à ce statut et s'est demandé si les capitales régionales avaient vocation à devenir des métropoles. En matière de gouvernance, il a estimé qu'il appartenait au président du conseil général ou à celui du conseil régional de veiller à ce qu'il n'y ait pas de redondance d'équipements de proximité sur le territoire. Enfin, il a interrogé l'intervenant sur la fiscalité locale.

En réponse, M. Serge Grouard a indiqué que l'AMGVF avait fixé, dans sa plateforme, quelques grands principes en matière de fiscalité locale, notamment sur la part des ressources propres dans les budgets locaux et sur l'existence d'un lien fiscal entre territoire et activité, afin que les collectivités conservent un intérêt direct à favoriser le développement économique. L'AMGVF ne dispose pas d'études globales sur les économies d'échelle à attendre des regroupements au sein de métropoles mais a conduit des réflexions sur les mutualisations de personnel. A partir de son expérience personnelle, il a relevé que, dans les aires urbaines, chaque commune avait davantage tendance à utiliser l'intercommunalité pour faire aboutir ses propres projets plutôt que pour promouvoir une cohérence d'ensemble. De fait, un équilibre doit toujours être recherché.

M. Yves Krattinger, rapporteur, s'est demandé si la transformation des communes en « mairies de quartier », dans le cadre de la proposition de l'AMGVF, conduirait à résoudre ce problème. Il a douté, en outre, que la création d'une agglomération unique permette de réaliser des économies d'échelle, par exemple pour l'entretien de la voirie.

M. Claude Bérit-Debat a estimé que l'intercommunalité avait pour avantage de reposer sur un accord « gagnant-gagnant », à la différence d'une grande collectivité unique qui imposerait ses décisions à tous. Il a douté que cela puisse être le gage d'une plus grande efficacité.

M. Serge Grouard a indiqué qu'il y aurait, dans le cas d'une collectivité unique, une unité de décision et que, par ailleurs, des cohérences pourraient être trouvées dans la durée, par exemple en matière d'équipements publics. Citant l'exemple de l'agglomération d'Orléans, il a fait observer qu'il existait actuellement une quinzaine de directions de la voirie, et qu'il pourrait à terme n'y en avoir qu'une.

&&Audition de M. Philippe Adnot, sénateur et président du conseil général de l'Aube&&

La mission a ensuite procédé à l'audition de M. Philippe Adnot, sénateur et président du conseil général de l'Aube.

Après avoir proposé à la mission de se rendre dans le département de l'Aube dans le cadre de ses déplacements sur le terrain, M. Philippe Adnot a expliqué qu'il aurait préféré que le comité Balladur commence par poser le cadre de ses réflexions, plutôt que de partir d'hypothèses a priori privilégiant les niveaux régionaux et intercommunaux pour envisager la réforme des collectivités locales. Observant qu'aucun élu rural n'était membre de ce comité, il a estimé que le rapport comportait de nombreuses analyses discutables qui étaient maintenant diffusées « en boucle » sans aucune démonstration. Il a considéré qu'il aurait été préférable d'adopter une démarche consistant à déterminer les objectifs de la réforme parmi lesquels il a cité la nécessité de préserver des services publics de proximité, la recherche du meilleur rapport qualité-prix à travers une gestion responsable et l'utilisation de ratios ainsi que l'application du principe de subsidiarité pour déterminer le bon niveau d'exercice des compétences.

Il a déclaré que les critiques du « millefeuille » administratif ne reposaient sur aucune évaluation chiffrée et que le reproche d'une trop grande complexité ne s'appuyait sur aucune explication. Evoquant les compétences qui seraient mal identifiées, il a indiqué que le rapport du comité Balladur, comme celui de la mission, n'avaient pas, à ce stade, mis en évidence des problèmes liés aux enchevêtrements en observant, par ailleurs, que les matières pour lesquelles plusieurs niveaux de collectivités intervenaient, tels le tourisme et le développement économique, ne constituaient pas des compétences exclusives des collectivités territoriales. Il a rappelé à cet égard qu'il était normal que le département prenne à sa charge la mise en oeuvre de campagnes touristiques au niveau national tandis que la région s'occupait du niveau international.

M. Philippe Adnot a estimé que le véritable chef de file était la collectivité qui se saisissait d'une problématique. Citant le développement économique, il a expliqué que c'était le conseil général de l'Aube qui prenait souvent la responsabilité d'étudier le dossier de demande d'aide de certaines entreprises et de solliciter les partenaires comme l'Etat et la région pour un tour de table. Il a déclaré que la région ne pouvait être la seule à s'occuper de développement économique compte tenu, en particulier, du risque qu'une telle « recentralisation » ne profite surtout au département qui accueille le siège de la capitale régionale. Il a remarqué que la région Champagne-Ardenne n'avait pas soutenu le projet de développement d'une université en dehors de Reims, que seule la possibilité d'organiser des financements croisés avait rendu possible. Il a considéré que la remise en cause du millefeuille administratif aurait surtout pour conséquence de remplacer des élus par des fonctionnaires et d'augmenter ainsi les coûts de gestion. Il a regretté que les incitations financières au développement de l'intercommunalité, dont il a estimé le coût à 2 milliards d'euros, reviennent à subventionner la coopération entre communes et à augmenter les charges de fonctionnement.

Répondant à M. Yves Krattinger, rapporteur, M. Philippe Adnot a précisé qu'il n'était pas hostile à l'intercommunalité mais qu'il considérait qu'elle devait permettre de faire baisser les coûts. Il a déploré que le régime financier actuel de l'intercommunalité n'incite pas à rationaliser la programmation des équipements structurants.

Il a souscrit à l'analyse du rapporteur selon laquelle les départements étaient meilleurs gestionnaires que l'Etat, mais a souhaité que les collectivités, comme les communautés, adoptent de manière plus systématique des critères de gestion précis et définissent, par exemple, des taux minimum et maximum d'imposition.

Il a estimé qu'il était indispensable de préserver un lien direct entre les dépenses publiques et leurs bénéficiaires et s'est donc déclaré hostile à l'idée de n'attribuer que deux impôts à chaque niveau de collectivité en observant que cela ne permettait pas d'atteindre toutes les catégories d'administrés. Il a regretté en particulier que la mission envisage de réserver l'impôt local économique aux seules régions et intercommunalités en observant qu'une telle évolution était de nature à remettre en cause l'action des départements en faveur des entreprises, comme par exemple les aménagements de routes ayant pour objectif de les rendre praticables par tout temps pour les camions de marchandises. Il a considéré qu'il n'y avait pas de difficulté à ce qu'une multiplicité de collectivités puisse bénéficier du produit de chaque impôt local en observant que la feuille d'imposition locale était parfaitement lisible. Il a souhaité, à cet égard, le rétablissement de la vignette automobile.

Il a relevé, en réponse à M. Yves Krattinger, rapporteur, que les exonérations mises en place par l'Etat concernant certains impôts locaux et leur compensation avaient eu pour conséquence de fragiliser le système français de finances locales. Il a observé que la suppression de la taxe foncière sur le non bâti avait constitué une aubaine pour certaines terres viticoles et a considéré que la suppression de la taxe professionnelle n'était pas envisageable sans son remplacement par un nouvel impôt économique.

Mme Jacqueline Gourault, rapporteur, a rappelé que de nombreuses intercommunalités fonctionnaient bien alors que, a contrario, il existait des conseils généraux très dépensiers. Elle a souhaité qu'on ne jette pas l'anathème sur une strate territoriale en particulier.

En réponse à une question de Mme Jacqueline Gourault, rapporteur, sur les conseillers territoriaux, M. Philippe Adnot s'est déclaré opposé au rapprochement entre départements et régions en estimant que la force du département résidait dans l'enracinement de ses élus. Interrogé par M. Bruno Retailleau sur le maintien du scrutin uninominal en milieu rural, il s'y est déclaré favorable ainsi qu'au recours à la représentation proportionnelle en milieu urbain.

M. Pierre Yves Collombat, vice-président, a considéré que le développement des intercommunalités se traduisait par une augmentation des dépenses qui correspondait le plus souvent à la mise en oeuvre de projets que les communes membres n'avaient pas les moyens de conduire seules. Il a insisté sur la nécessité de recourir avec précaution au principe de subsidiarité en estimant qu'il n'était pas souhaitable que le département se limite au financement des grands projets de niveau départemental, mais qu'il lui revenait également d'apporter son aide à des projets plus modestes notamment dans le champ associatif. M. Philippe Adnot a déclaré qu'il revenait au département d'assurer la solidarité entre communes riches et pauvres à travers l'utilisation du produit de la taxe professionnelle.

M. Rémy Pointereau, vice-président, a souscrit à la nécessité de mieux évaluer les coûts de gestion des collectivités mais s'est déclaré, rejoint sur ce point par M. Claude Bérit-Débat, en désaccord avec l'estimation du coût de l'intercommunalité faite par M. Philippe Adnot, considérant que les projets mis en oeuvre par les intercommunalités étaient le plus souvent indispensables. Il s'est prononcé pour le projet de scrutin mixte pour élire les conseillers territoriaux, en estimant que leur existence serait de nature à permettre une meilleure cohérence entre les deux niveaux de collectivités. Il a regretté que la clause de compétence générale ait souvent pour conséquence d'obliger les départements à financer une multitude de projets de faible ampleur et a souhaité que soit reconnue la possibilité pour un niveau de collectivité de se substituer à un autre sur la base d'un constat de carence.

MM. Bruno Retailleau et Claude Bérit Débat ont l'un et l'autre défendu la clause de compétence générale, qui constitue une liberté essentielle dont la mise en oeuvre s'arrête là où commence la compétence exclusive d'une collectivité locale. Mme Jacqueline Gourault, rapporteur, a observé pour sa part qu'il ne fallait pas interdire aux collectivités d'agir.

M. Philippe Adnot a regretté que la mission préconise la suppression des syndicats à vocation unique en observant que certains étaient très utiles et que leur disparition pourrait constituer un recul. M. Pierre Yves Collombat lui a fait observer qu'il était surtout question de lancer un mouvement afin de permettre aux intercommunalités d'absorber à terme toutes les compétences déléguées par les communes.

M. Claude Belot, président, a annoncé l'intention de créer au sein de la mission deux groupes de travail, l'un relatif aux compétences, l'autre aux finances locales, afin d'approfondir ces deux aspects de la réforme des collectivités locales.

Mardi 31 mars 2009

Audition de M. Patrick Kanner, président de l'Union nationale des centres communaux d'action sociale (UNCCAS)

Sous la présidence de M. Claude Belot, président, la mission a procédé à l'audition de M. Patrick Kanner, président de l'Union nationale des centres communaux d'action sociale (UNCCAS).

M. Patrick Kanner a indiqué que l'union nationale des centres communaux d'action sociale (UNCCAS) rassemblait 3 600 centres communaux et intercommunaux d'action sociale, soit environ 5 200 communes de toute sensibilité politique, et 41 millions de citoyens. L'action de l'UNCCAS s'inscrit dans un contexte économique et social caractérisé par une importante crise économique et financière, mais également dans des perspectives démographiques préoccupantes. En effet, en 2050, un tiers de la population sera âgé de plus de soixante ans, situation qui aura un impact sur les politiques d'action sociale.

Il a observé que les centres communaux d'action sociale (CCAS) doivent également tenir compte des évolutions institutionnelles provoquées par la mise en oeuvre de la révision générale des politiques publiques et de la réflexion en cours sur une nouvelle réforme de la décentralisation, ainsi que des conséquences de la mise en oeuvre du revenu de solidarité active (RSA) ou des agences régionales de santé (ARS).

Il a indiqué que l'ambition de l'UNCCAS est de développer un réseau de proximité auxquels les conseils généraux pourront avoir recours pour développer l'action sociale locale. Les CCAS présentent en effet de nombreux atouts : proximité, coordination des acteurs sociaux, réactivité, souplesse, expérimentation. Les CCAS entretiennent par ailleurs une relation privilégiée avec les usagers, puisque ces derniers sont représentés au sein des conseils d'administration des CCAS.

M. Patrick Kanner a indiqué que l'UNCCAS a défini plusieurs axes de travail pour les années à venir. Elle souhaite un renforcement du processus de décentralisation, une clarification du rôle stratégique de l'Etat, une amélioration de la péréquation financière, un meilleur maillage territorial avec des regroupements organisés sur la base du volontariat, la formation et la valorisation des acteurs.

M. Yves Krattinger, rapporteur, s'est interrogé sur les mécanismes indispensables à la promotion d'une action sociale intercommunale ainsi que sur les moyens de renforcer la professionnalisation des acteurs. Il a ensuite voulu connaître les modalités d'articulation de l'action sociale intercommunale avec l'action sociale légale dispensée par les conseils généraux.

Mme Jacqueline Gourault, rapporteur, s'est interrogée sur les moyens susceptibles de permettre une évaluation des interventions menées par les centres intercommunaux d'action sociale pour le compte des départements.

M. Patrick Kanner a indiqué que le développement des centres intercommunaux d'action sociale (CIAS) est freiné par le fait que les maires souhaitent conserver un lien de proximité avec la population de leur commune. Mais, il a admis que cette recherche de la proximité peut nuire à l'efficacité de l'action publique. La création d'un équipement lourd, pour prendre cet exemple, nécessite l'intervention du niveau intercommunal et le soutien financier du département.

Il a rappelé que dans le cadre de la libre administration des collectivités territoriales, ces dernières peuvent choisir de créer un CIAS sans supprimer les CCAS.

M. Yves Krattinger, rapporteur, a observé que cette solution avait pour effet de créer une structure administrative supplémentaire.

M. Jean-François Voguet a souligné le décalage existant entre les politiques sociales menées par les différents niveaux de collectivités territoriales. Il a estimé que les CCAS répondaient à des demandes ne relevant pas de la compétence des conseils généraux, et que le recours à la clause générale de compétence permettait aux communes de répondre à des besoins nouveaux non pris en charge par ailleurs.

Mme Jacqueline Gourault, rapporteur, a souligné que les CIAS pouvaient modeler leur organisation interne afin de maintenir des référents de proximité. Elle a estimé que l'échelon intercommunal favorisait la mise en oeuvre de nouveaux services en direction de la population, notamment dans les EPCI regroupant des petites communes.

M. Patrick Kanner a indiqué que la création d'un CIAS permettait de renforcer la professionnalisation des intervenants, de mutualiser les moyens et de constituer un interlocuteur reconnu et identifié par le monde associatif.

M. Jacques Mézard a souligné qu'au sein d'un même établissement de coopération intercommunale (EPCI), les CCAS pouvaient offrir des services différents aux populations. Il a estimé que cette situation n'était pas satisfaisante et constituait un point clé de la future réforme des collectivités territoriales, dont un des objectifs doit être de répondre aux besoins de ceux qui rencontrent le plus de difficultés.

M. Patrick Kanner a reconnu le rôle de chef de file du département en matière d'action sociale, son action devant néanmoins s'appuyer, selon lui, sur un maillage territorial aussi fin que possible. La collaboration entre les CCAS et les conseils généraux peut être organisée à travers des conventions d'objectifs et de moyens, sans confusion des rôles entre les différents intervenants. Il a estimé que la création d'unions départementales des CCAS favoriserait la signature des conventions d'objectifs et de gestion (COG) et que des délégations de pouvoirs étaient envisageables entre le département et les intervenants de proximité.

M. Claude Belot, président, a rappelé la nécessité de conserver une action de proximité qui favorise l'immédiateté de la réponse. Il a observé que les moyens financiers dont disposait le département en faisaient un acteur incontournable en matière d'action sociale. Les acteurs locaux doivent donc tenir compte de cette double contrainte et définir les modalités d'une meilleure articulation de leurs interventions respectives.

M. Patrick Kanner a considéré que les départements devaient associer les CCAS à leur action, deux exemples pouvant illustrer cette nécessité. Tout d'abord, les CCAS savent bâtir des diagnostics de l'état social de la population susceptibles de contribuer à optimiser l'intervention des conseils généraux, ensuite la mise en oeuvre des nouveaux dispositifs tels que le RSA ne peut aboutir qu'avec l'intervention des CCAS, les conseils généraux et les caisses d'allocation familiale ne disposant pas de moyens suffisants pour faire face au traitement des demandes.

Il a estimé que les présidents de conseil général devaient accepter de développer des partenariats avec les communes dans le domaine de l'action sociale.

M. Claude Belot, président, s'est interrogé sur les modalités de coopération susceptibles d'être mises en oeuvre en matière sociale entre les départements et les métropoles, telles que les envisage le comité Balladur.

M. Jean-François Voguet a relevé que l'État conservait des responsabilités importantes dans le domaine social, notamment afin de maintenir le principe d'égalité.

M. Patrick Kanner a rappelé que l'État était le garant de beaucoup de politiques sociales mises en oeuvre par d'autres opérateurs que ses services, en particulier les départements. Il a insisté sur la capacité des collectivités territoriales à apporter des réponses différenciées en fonction des territoires et à ne pas se limiter à l'approche légale et réglementaire. A titre d'exemple, il a évoqué le cas d'un CCAS qui avait mis en oeuvre un équipement d'accueil pour les personnes âgées ayant à leur charge des enfants handicapés.

M. Pierre-Yves Collombat a souligné la mauvaise articulation des interventions des collectivités territoriales et des organismes de sécurité sociale, notamment les caisses d'allocations familiales en matière de petite enfance.

M. Patrick Kanner a rappelé qu'historiquement les organismes de sécurité sociale avaient porté leurs propres politiques au niveau local. Il a estimé qu'une clarification des interventions était maintenant indispensable, car les caisses d'allocations familiales ne partagent pas la même vision de l'action locale que les CCAS et les conseils généraux.

Il a en outre observé que la représentativité des agents de direction des caisses de sécurité sociale n'était pas de même nature que celles des élus locaux, ces derniers ayant une réelle légitimité pour mener l'action locale.

Mercredi 1 er avril 2009

Audition de M. Bertrand Delanoë, maire de Paris

Sous la présidence de M. Claude Belot, président, la mission a procédé, tout d'abord, à l'audition de M. Bertrand Delanoë, maire de Paris.

A titre liminaire, M. Bertrand Delanoë a souhaité rappeler plusieurs éléments historiques. Il a fait valoir que l'institution de Paris comme collectivité territoriale de plein exercice était récente, ce qui a rendu nécessaires des modifications notables dans les relations que l'Etat entretenait avec elle et permis l'invention d'un partenariat efficace. En revanche, il a remarqué que les rapports établis entre Paris et sa périphérie ont trop longtemps été marqués par une certaine méfiance voire une certaine ignorance réciproque.

Il a souligné que, en tant que maire de Paris, il avait souhaité créer une dynamique de partenariat et de dialogue autour de projets majeurs et que la conférence métropolitaine dans un premier temps puis le syndicat mixte « Paris-Métropole », auquel prennent part la région, les départements et de nombreuses communes et intercommunalités franciliennes, répondaient à cette logique.

Se déclarant convaincu de la nécessité de poursuivre l'évolution en cours, M. Bertrand Delanoë a estimé nécessaire de tenir compte des réalités locales. A cet égard, il a notamment souligné le fait que l'agglomération parisienne, dont l'organisation aux plans territorial, humain et économique est particulièrement complexe, ne pouvait être réduite aux seuls départements issus de l'ancienne Seine, et qu'il convenait de tenir compte de plusieurs zones de développement comme le plateau de Saclay ou les zones aéroportuaires. De la même manière, il a considéré qu'il n'était pas possible de se limiter à la seule zone dense, qui compte 8 millions d'habitants quand la région francilienne en compte près de 12 millions, et il a rappelé que, prenant en compte les craintes parfois exprimées par les départements de la grande couronne d'être exclus de la dynamique engagée dans l'aire métropolitaine, il les avait associés au développement et au pilotage de la zone dense parisienne.

Dénonçant tout à la fois le conservatisme qui fige les situations et celui qui consiste à plaquer des logiques étrangères sur les réalités locales, il s'est déclaré opposé au projet défendu par le comité présidé par M. Edouard Balladur, qui consisterait à réunir en une seule collectivité les quatre départements de la zone dense, jugeant qu'un tel projet excluait sans pertinence les autres territoires et qu'il ne répondait à aucune nécessité au regard des compétences sociales des départements. En revanche, il a considéré qu'il était nécessaire de promouvoir une convergence pragmatique des actions des collectivités territoriales sur les enjeux stratégiques que sont l'urbanisme et le logement, le transport et l'attractivité économique du territoire. Paris-Métropole constituerait alors le lieu de pilotage et de gouvernance de l'agglomération parisienne, les projets engagés étant suivis par des agences ad hoc, dont la dimension serait adaptée aux bassins de vie intéressés.

Par ailleurs, M. Bertrand Delanoë a estimé que la question de la solidarité financière au sein de l'agglomération devait être posée. Relevant que le fonds de solidarité pour l'Ile-de-France était d'un montant insuffisant, en dépit de l'importante contribution versée par Paris, il a jugé nécessaire de renforcer ces mécanismes de solidarité, même si cela représente un coût supplémentaire pour les collectivités les plus riches.

Appelant à inventer des solutions originales, en s'inspirant notamment des exemples étrangers, que ce soit celui du Grand Londres ou celui des métropoles allemandes, M. Bertrand Delanoë s'est félicité de la réflexion et du travail en cours sur ces questions, qui doivent cependant se poursuivre.

En réponse à M. Yves Krattinger, rapporteur, qui l'interrogeait sur les compétences dont il estimait qu'elles devraient être prises en charge au niveau de « Paris-Métropole », M. Bertrand Delanoë a indiqué qu'il fallait avant tout adopter une approche pragmatique et ne rechercher de synergies que sur la base du volontariat ou pour garantir une plus grande efficacité. Ainsi, le transport, comme le logement ou l'attractivité économique relèvent naturellement du niveau de « Paris-Métropole », à la condition que l'ensemble de la région y soit associé. En revanche, s'agissant de l'eau, il a émis des doutes sur la pertinence d'une recentralisation alors que les structures actuelles fonctionnent correctement.

M. Claude Belot, président, l'ayant interrogé sur la part que prenait l'Etat dans les transports franciliens, M. Bertrand Delanoë a regretté que ce dernier n'intervienne plus suffisamment sur le plan financier, et a appelé de ses voeux le développement d'une logique partenariale, en particulier avec la RATP et la SNCF.

En réponse à Mme Jacqueline Gourault qui a souhaité connaître son avis sur l'extension à Paris et à sa périphérie du statut de métropole qui serait éventuellement appliqué à cinq ou six grandes agglomérations françaises, selon une logique proche de celle qui a prévalu pour le développement de l'intercommunalité, M. Bertrand Delanoë a estimé que la région métropole devait avoir un statut original en raison de ses spécificités, comme, par exemple, l'absence de continuité de son territoire, et des problématiques particulières qu'elle rencontrait.

A M. Pierre-Yves Collombat, premier vice-président, qui l'interrogeait, d'une part, sur ce que l'on pouvait attendre du volontariat s'agissant du partage entre collectivités riches et pauvres au sein des intercommunalités et, d'autre part, sur l'articulation à opérer entre Paris-Métropole et les agences ad hoc, le maire de Paris a apporté les éléments de réponse suivants :

- le volontariat ne suffisant pas pour assurer la solidarité financière, il souhaitait, à cette fin, l'intervention de l'Etat ;

- les élus locaux devaient être plus respectés : certaines intercommunalités ayant adhéré à Paris-Métropole fonctionnaient efficacement ;

- un comité de partenaires associant les acteurs économiques, les syndicats et présidé par le président de la chambre de commerce et d'industrie de Paris avait été créé ;

-  la gouvernance des agences devrait rester de la compétence des élus locaux qui ont créé les statuts de Paris-Métropole ;

- l'Atelier parisien d'urbanisme (APUR) travaillait, à leur demande, pour toutes les communes de l'agglomération parisienne qui le souhaitaient ;

- la réforme des collectivités territoriales serait peut-être un moyen d'introduire souplesse et innovation ;

- des projets étaient déjà élaborés dont certains ne concernaient ni n'intéressaient tout le monde ;

- la création d'agences était une solution efficace et économique.

M. Philippe Dallier a interrogé M. Bertrand Delanoë sur le choix de l'outil de gouvernance de la métropole : soit une collectivité locale sur un périmètre déterminé, dotée de compétences, d'un budget et gérée par des élus désignés sur un programme, soit, ce qui est le cas aujourd'hui, un syndicat mixte constituant un lieu d'échanges. Il a douté que ce dernier puisse devenir un lieu de gouvernance.

Il a observé que ce syndicat recouvrait un périmètre très vaste, réunissant 8 millions d'habitants, alors que le périmètre qu'il proposait, qualifié par ses adversaires de « mastodonte impuissant » ne rassemblait pourtant que 6 millions d'habitants. Il a souhaité que le maire de Paris précise si le syndicat constituait une étape préalable à la mise en place d'une collectivité territoriale ou s'il resterait un outil d'un type nouveau.

Il a considéré qu'en l'absence de décision sur le devenir de Paris, les intercommunalités constituées de quatre ou cinq communes préservant leur fiscalité, se multiplieraient dans toute l'Ile-de-France, et il s'est interrogé sur la pertinence du partage qui serait opéré, craignant que l'on ne bloque ainsi le système pour trente ans. Il s'est en particulier interrogé sur le traitement du dossier de l'urbanisme si les permis de construire demeuraient de la compétence des communes.

Il a rappelé que sa proposition de création d'un Grand Paris permettrait d'assurer la cohésion sociale de l'ensemble.

En réponse, M. Bertrand Delanoë a rappelé, en premier lieu, qu'il souhaitait l'intervention de l'Etat en matière de solidarité financière, puis que la gouvernance commune de Paris-Métropole devait se consacrer à des impératifs stratégiques. Il a rappelé que, pour lui, la seconde étape de ce dispositif résidait dans la délégation de compétences assortie d'instruments de gouvernance.

Le maire de Paris a affirmé que Paris-Métropole était en état de développer la cohésion territoriale et donc sociale et que la création du sentiment d'appartenance serait fonction du contenu, du sens et de la performance établis.

M. Claude Belot, président, a noté la volonté des parties de faire évoluer la situation.

Mme Josette Durrieu a interrogé le maire de Paris, successivement, sur le projet de création de métropoles, sur les enseignements tirés de la gestion de deux niveaux de collectivités territoriales à Paris, commune et département, et sur la solidarité financière dans la capitale.

Après avoir évoqué la contribution parisienne au fonds de solidarité pour l'Ile-de-France, le maire de Paris a exprimé sa disponibilité à construire des projets pour les collectivités voisines.

Abordant la question du double niveau de collectivité, il a souligné l'existence d'une spécificité de la compétence départementale, concluant à la non-confusion des compétences respectives des deux niveaux. Il a remarqué que, à son initiative, les pouvoirs des maires d'arrondissement de Paris avaient été considérablement accrus avec une nouvelle extension prévue au mois de juin prochain. En revanche, il a estimé que le droit de veto constituait la limite et ne pouvait pas être accordé aux maires d'arrondissement.

Il a ajouté que s'il avait largement augmenté les budgets d'investissements des mairies d'arrondissement, celles-ci ne levaient pas l'impôt.

M. Jean-François Voguet a remarqué que l'histoire commune de Paris et de la banlieue s'était considérablement améliorée au cours des dernières années par le dialogue et la mise en oeuvre de projets communs.

Il a considéré que la coopération ne pouvait s'établir que sur la base de la liberté et du consensus, notant que le projet de Paris-Métropole, fondé sur l'intelligence, était la seule solution possible.

M. Bertrand Delanoë a tout d'abord précisé qu'il s'opposait à toute destruction brutale des dynamiques partagées dont il a souligné les résultats. Il a insisté ensuite sur les partenariats mis en oeuvre, observant que le consensus ne devait pas être l'immobilisme mais la conduite commune de projets.

M. Edmond Hervé a abondé en ce sens, appelant à la constitution d'espaces de consensus à terme. Il s'est déclaré fondamentalement opposé à l'édiction d'un même schéma institutionnel pour toutes les métropoles dont la création est envisagée, Paris présentant un cas exceptionnel. Il a souligné l'avance des régions, en matière de coopération, pour des raisons historiques. Il a approuvé la proposition de création d'agences formulée par le maire de Paris qui lui apparaissait démocratique. Pour lui, il était important de retenir la notion de territoires spécialisés selon l'agence compétente. Il a conclu son propos sur l'intervention indispensable de la loi pour imposer la solidarité financière.

M. Bertrand Delanoë a manifesté son plein accord avec ces propos, l'intervention de la loi créant, selon lui, cohésion sociale et sentiment d'appartenance.

Puis, en réponse à M. Jacques Mézard qui l'interrogeait sur la formation des deux assemblées locales parisiennes par les mêmes élus, le maire de Paris a mis en avant le bon fonctionnement de ce dispositif au travers d'optimisation et de synergies, y compris dans l'administration. Il a indiqué que la contrepartie résidait dans la décentralisation interne.

&&Audition de M. Jean-Paul Huchon, président du conseil régional
d'Île-de-France&&

La mission a ensuite auditionné M. Jean-Paul Huchon, président du conseil régional d'Île-de-France.

M. Claude Belot, président, a souligné en préambule la spécificité du cas de l'Île-de-France parmi les régions françaises, en raison de son poids démographique et du rôle de « ville-monde » joué par Paris.

M. Jean-Paul Huchon, président du conseil régional d'Île-de-France, s'est d'abord présenté comme un régionaliste convaincu, habitué à travailler avec les départements, les communes et leurs groupements. Il a approuvé le souci de réalisme de la mission temporaire du Sénat ainsi que l'accent mis dans son rapport d'étape sur la volonté de réforme et sur la recherche d'un consensus. Il a indiqué que, s'agissant des conclusions du comité présidé par M. Édouard Balladur, les élus avaient au contraire manifesté leurs vives réticences lors de la conférence nationale des exécutifs organisée par le Premier ministre la semaine précédente.

M. Jean-Paul Huchon a consacré la première partie de son exposé au rôle de l'État, principal responsable selon lui du manque de lisibilité de l'action publique, les personnels de l'administration centrale et déconcentrée n'ayant pas toujours été transférés aux collectivités en même temps que les compétences. Il a pris l'exemple des fonctionnaires de certaines directions du ministère de l'éducation nationale dont il a indiqué avoir demandé en vain le rattachement aux services de la région, et de la compétence de développement économique que l'administration d'État continue d'exercer malgré le rôle reconnu à la région dans ce domaine. Il s'est également demandé pourquoi les aides de l'Union européenne étaient instruites en parallèle dans deux administrations différentes.

En second lieu, M. Jean-Paul Huchon a jugé sans fondement les critiques portant sur des supposés doublons entre les actions des régions et celles des départements. Il a fait valoir que, dans la région Île-de-France, moins de 5 % du budget portait sur des actions menées en commun avec les départements au moyen de financements croisés et qu'il ne s'agissait jamais de recoupements ni de dédoublements, mais d'une addition de forces.

M. Jean-Paul Huchon a déclaré soutenir une grande partie des préconisations formulées par la mission temporaire dans son rapport d'étape. Il a plaidé pour que la région Île-de-France soit traitée comme les autres, qu'il s'agisse de ses droits ou des obligations, tout en lui reconnaissant un devoir spécifique de solidarité avec les autres régions en raison de son importance démographique et économique. Il a notamment approuvé les considérations de la mission relatives à la responsabilité de l'État dans la constitution d'un « millefeuille » administratif, à l'émergence du fait urbain, à la nécessité de clarifier les compétences des collectivités et à l'impératif d'une réforme de la fiscalité et des finances locales.

Très fortement opposé à la fusion des modes de scrutin départemental et régional, M. Jean-Paul Huchon a plaidé pour le maintien du mode de scrutin régional actuel, faisant valoir qu'il favorisait l'émergence d'une majorité, qu'il donnait un espace d'expression à l'opposition et qu'il permettait d'atteindre l'objectif de parité voire, si les partis politiques en avaient la volonté, de diversité. Il a craint que, dans le cas où un conseil unique réunirait les actuelles assemblées départementales et régionale, des débats portant aujourd'hui sur les thèmes stratégiques d'aménagement du territoire et de développement économique ne soient réduits à des questions de niveau cantonal.

M. Jean-Paul Huchon a ensuite insisté sur la nécessité de prendre en compte les réalités de l'agglomération parisienne telles que confirmées par les experts. Celle-ci ne se limite en effet pas aux quatre départements de Paris et de la petite couronne, mais inclut les villes nouvelles ou encore les vallées de la Seine, un tel périmètre étant nécessaire pour mener les politiques de développement durable, de transports en commun, de développement économique et d'emploi. S'opposant aux critiques qui déplorent une insuffisance de la coopération entre les collectivités territoriales d'Île-de-France, il a au contraire affirmé l'utilité de l'intercommunalité en petite couronne : 50 % des communes sont couvertes par un établissement public de coopération intercommunale et certaines de ces structures se regroupent actuellement dans des ensembles plus vastes ou coopèrent entre elles, selon le scénario dit de la « marguerite ». S'agissant des départements, il a indiqué que la région avait conclu des contrats avec chacun d'entre eux pour un montant de deux cents millions d'euros, pour des projets portant principalement sur les transports publics.

Abordant les politiques sectorielles, M. Jean-Paul Huchon a mis l'accent sur le rôle de l'agence mise en place par la région pour le développement économique avec l'appui des départements et des organismes consulaires, du syndicat des transports d'Île-de-France (STIF) dont les décisions sont prises à l'unanimité depuis trois ans, et de l'établissement public foncier régional qui n'a toutefois pas pu recueillir l'appui de tous les départements. Concluant sa présentation de la situation actuelle de la métropole parisienne, il a estimé que les éléments de coopération entre les collectivités devaient être valorisés.

Évoquant ensuite les perspectives d'évolution, M. Jean-Paul Huchon a observé qu'il n'existait pas de solution miracle pour gérer la nécessaire complexité des métropoles mondiales. Il a dégagé cependant trois pistes possibles de réforme :

- une stratégie coopérative : celle-ci consisterait à achever la carte de l'intercommunalité en petite couronne, à clarifier la répartition des compétences et à réformer la fiscalité et les finances locales. L'État devrait transférer aux collectivités les compétences de proximité comme de stratégie, en conservant les fonctions régaliennes ainsi que la responsabilité de la péréquation. Cette stratégie apporterait son appui aux outils de coopération mis en place par les collectivités en leur attribuant éventuellement un pouvoir réglementaire. Les régions pourraient prendre en charge la formation, l'éducation, les universités et la recherche tout en abandonnant leurs compétences en matière sociale ;

- une stratégie plus avancée de clarification : il s'agirait de distinguer les fonctions métropolitaines des fonctions locales, la même collectivité ne pouvant traiter à la fois les questions de stratégie et celles qui requièrent une approche de proximité. Les compétences d'intérêt métropolitain reviendraient dans ce scénario à la région et celles d'intérêt local à une structure intercommunale, qui pourrait être une communauté urbaine ou une confédération d'intercommunalités mais sur un périmètre limité ;

- une stratégie d'innovation, évoquée à titre personnel et prospectif, par laquelle un Grand Paris serait pourvu, au niveau de la région d'Île-de-France, d'une assemblée panachant une représentation issue d'un scrutin de liste et une représentation significative des intercommunalités et des conseils généraux. Ce scénario demanderait par ailleurs une structuration du territoire en intercommunalités de grande taille.

M. Jean-Paul Huchon a enfin apporté son soutien au syndicat Paris Métropole. Prenant l'exemple du projet Arc Express, il a expliqué que la méthode de la délibération entre les collectivités au sein d'un syndicat permettait de faire naître et grandir des idées jusqu'au moment de leur mise en oeuvre. Il a également approuvé la constitution d'un syndicat pour le traitement des questions relatives au logement, concluant son exposé en proposant de confier à des agences la mise en oeuvre des décisions prises par consensus dans le cadre de Paris Métropole.

En réponse à M. Yves Krattinger, rapporteur, M. Jean-Paul Huchon a précisé qu'il n'envisageait pas la création d'un « Sénat d'Île-de-France », mais bien de faire siéger au sein d'une assemblée unique les conseillers régionaux, ainsi que des représentants des intercommunalités et des départements. Interrogé sur la capacité du syndicat mixte Paris Métropole à préparer l'action puis à la mettre en oeuvre, il a expliqué qu'il manquait en Île-de-France un lieu d'expression et de consensus et a évoqué l'exemple du STIF, qui permet d'assurer l'équité entre Paris, la petite couronne et la grande couronne, tout en représentant l'ensemble des collectivités, ainsi que l'exemple de l'établissement public foncier régional qui a réussi de manière consensuelle à lancer la construction de 8 000 logements, ainsi que l'acquisition de 500 000 m² de bureaux.

Mme Jacqueline Gourault, rapporteur, a déclaré suivre le raisonnement de M. Jean-Paul Huchon, consistant à privilégier une clarification des compétences par rapport à un débat sur l'évolution de la clause de compétence générale. Elle a partagé son opposition au mode de scrutin proposé par le Comité Balladur pour l'élection des conseillers territoriaux. Elle a observé néanmoins que la proposition du président de la région Île-de-France consistant à faire siéger des représentants des intercommunalités et des départements au Conseil régional revenait sous une autre forme à créer des conseillers territoriaux. M. Jean-Paul Huchon a reconnu la ressemblance entre les deux projets mais a expliqué qu'ils étaient de nature différente puisque le sien ne remettait pas en cause la spécificité de chaque mandat local, mais visait seulement à permettre la prise en commun des décisions stratégiques.

M. Philippe Dallier, après avoir observé que le président de la région Île-de-France privilégiait le recours à des statuts de droit commun, s'est interrogé sur la structure Paris Métropole qui créait un niveau supplémentaire devant constituer un outil de gouvernance selon les déclarations du maire de Paris. Il s'est étonné qu'un syndicat réunissant près de huit millions d'habitants soit défendu par ceux qui critiquent le gigantisme d'un Grand Paris constitué de seulement six millions d'habitants. Il a affirmé que, le territoire français étant divers, il convenait de choisir des solutions adaptées à chaque situation et donc, d'envisager un statut particulier pour l'agglomération en Île-de-France. Il a dénoncé les modalités de recours à l'intercommunalité dans la petite couronne parisienne, considérant qu'elles privilégiaient des critères politiques par rapport à des considérations géographiques comme les bassins de vie. Il a regretté le fait que le président de la région ne tire pas les conséquences de l'émergence du fait métropolitain qu'il reconnaissait par ailleurs. Il a estimé qu'il était indispensable de renforcer la cohésion sociale dans l'agglomération, laquelle avait été fragilisée par la réforme de 1964 qui avait supprimé le département de la Seine. Il a expliqué qu'il était nécessaire qu'un acteur puisse prendre en charge la solidarité sur le territoire de l'agglomération et a déclaré qu'il était favorable aux politiques partenariales, notamment entre la région et le futur Grand Paris. Il a dénoncé le fait que le développement de l'intercommunalité était motivé par le souci d'échapper, au moins partiellement, à la contribution au fonds de solidarité des communes de la région Île-de-France (FSRIF).

M. Jean-Paul Huchon a réaffirmé sa conviction que la région constituait le niveau métropolitain. Il a expliqué qu'il avait appris à travailler avec chacun des départements, lesquels avaient tous une population supérieure à un million d'habitants et un budget supérieur à un milliard d'euros. Il s'est déclaré défavorable à leur suppression et a insisté sur la nécessité d'accepter la complexité des réalités en Ile-de-France. Il s'est interrogé sur l'objectif final des projets de simplification en estimant qu'ils visaient à diminuer les dépenses des collectivités et la qualité des services. Il a estimé que le renforcement de la cohésion sociale n'avait pas besoin d'une réforme institutionnelle, mais reposait d'abord sur l'application de la loi SRU et sur l'augmentation du FSRIF. Pour celui-ci, il s'est déclaré favorable à ce que les exemptions dont bénéficient les intercommunalités soient supprimées. Il a indiqué que le maire de Paris n'était pas favorable à la création de structures de gouvernance supplémentaires et qu'il existait des partenariats entre la capitale et la région, notamment sur le financement de nouveaux projets de tramway qui ne pouvaient être remis en cause. Il a estimé que le terme de gouvernance devait être compris dans son sens générique.

M. Charles Guené a évoqué ses réticences face à l'idée qu'il faudrait recourir à un statut de droit commun pour organiser l'Île-de-France en considérant qu'il était incompréhensible que l'on n'arrive pas à dépasser le niveau départemental dans cette métropole, ce qui signifiait, selon lui, une incapacité des démarches intercommunales à répondre à la situation. Il a déclaré ne pas avoir d'objection à ce que la région soit également le niveau de la métropole, mais a estimé que la gouvernance de l'agglomération, telle qu'elle avait été évoquée, lui apparaissait insuffisante. Il a fait part de son inquiétude face à la défiance manifestée par le président de la région vis-à-vis de l'État.

M. Jean-Paul Huchon a expliqué qu'il était désespéré par l'évolution de l'État, qui se retirait progressivement de toutes ses fonctions et critiquait dans le même temps les collectivités locales. Évoquant l'exemple de l'entretien des lycées, il a expliqué que la région y consacrait aujourd'hui plus d'un milliard d'euros par an, alors que l'État lui attribuait, pour exercer cette mission, l'équivalent des 350 millions de francs estimés lors du transfert de la compétence en 1986. Il a indiqué par ailleurs que l'État n'avait rien investi dans les transports franciliens depuis 1988, alors que l'effort des collectivités locales avait depuis été doublé pour s'élever aujourd'hui à 1,1 milliard d'euros. Il a estimé que dans les Etats fédéraux les ressources financières des collectivités locales étaient davantage garanties et a regretté le caractère fluctuant des dotations attribuées par l'État. Il a remarqué que sur un euro de dépense engagé par la région, seulement 28 centimes étaient financés par des ressources fiscales. Évoquant son plan de 18 milliards d'euros en faveur des transports en Île-de-France, il a expliqué qu'il faisait l'objet d'un partenariat avec les collectivités locales, ce qui expliquait le fait qu'il ne demandait pas la suppression des départements, qui jouaient un rôle de proximité et qui avaient une véritable identité.

M. Pierre-Yves Collombat a observé qu'en région parisienne le développement des structures de coopération intercommunale est moins développé que dans le reste du pays. A contrario, les relations entre conseil régional et départements semblent organisées de manière plus formelle.

Il s'est interrogé sur l'opportunité de revoir, dans l'attente d'une réforme globale, la composition du conseil économique et social régional d'Île-de-France afin d'intégrer dans sa composition les représentants des établissements publics de coopération intercommunale et des conseils généraux. Ces élus seraient ainsi associés aux débats sur l'avenir de la région et son développement économique, et les interventions du conseil régional et des conseils généraux pourraient être coordonnés plus aisément.

M. Jean-Paul Huchon a souligné le climat de coopération existant d'ores et déjà entre le CSER d'Île-de-France et le conseil régional et a estimé que la présence d'élus au sein du CSER aurait pour conséquence de modifier la nature des débats se déroulant au sein de cette assemblée. Il s'est déclaré favorable à la proposition d'un renforcement des dispositifs tels que la conférence des exécutifs régionaux. Par ailleurs afin de favoriser une meilleure association des acteurs économiques aux travaux du conseil régional, il a relevé que ces derniers étaient associés aux grands projets, notamment en matière de transports, et que le conseil régional était membre de la chambre de commerce et d'industrie d'Île-de-France.

M. Claude Belot, président, a voulu savoir si une intervention du législateur était nécessaire pour rendre obligatoire cette coopération entre conseil régional et conseils généraux.

Mme Catherine Tasca a estimé que le scénario coopératif imaginé par le président du conseil régional d'Île-de-France était séduisant et moderne. Toutefois, la recherche permanente d'un consensus entre les différents acteurs est de nature à affaiblir cette stratégie. Elle s'est donc interrogée sur les instruments qui seraient nécessaires pour rendre la coopération obligatoire

M. Jean-Paul Huchon a estimé que la reconnaissance du rôle de la région comme chef de file suppose une clarification de la répartition des compétences entre les différentes collectivités locales. Il a estimé que les régions devraient détenir des compétences en matière de formation, d'innovation, de recherche et d'enseignement supérieur. Il a rappelé à cette occasion que le conseil régional d'Île-de-France finance 50% du budget d'entretien des universités, en application du principe de compétence générale, dans la mesure où cette compétence n'a pas été transférée aux régions.

Il a estimé qu'a contrario les conseils régionaux devraient se dessaisir de certaines compétences et cesser d'intervenir dans certains domaines comme l'action sociale par exemple.

Mercredi 8 avril 2009

Audition de M. Yves Pozzo di Borgo, sénateur de Paris

Sous la présidence de M. Claude Belot, président, la mission a procédé à l'audition de M. Yves Pozzo di Borgo, sénateur de Paris.

Après avoir rappelé que le comité pour la réforme des collectivités locales, présidé par M. Edouard Balladur, n'avait pas abordé la question du statut de la ville de Paris, M. Yves Pozzo di Borgo a expliqué que la loi du 31 décembre 1982 - dite loi PLM - avait constitué l'aboutissement de l'évolution du statut de la capitale marqué notamment par le rétablissement d'un maire de Paris en 1977. Il a estimé que le débat sur le Grand Paris devait s'accompagner d'une réflexion concernant une réorganisation des compétences communales entre les arrondissements et la ville de Paris, afin d'aboutir à une réforme de la loi PLM. Il a considéré en effet que le statut actuel des arrondissements parisiens en faisait des entités juridiques indéterminées et a évoqué deux pistes d'évolution : soit l'extension du statut des arrondissements aux communes avoisinantes, ce qui aurait pour conséquence de mettre en cause leur identité et de créer une ville de Paris plus difficile encore à gouverner, soit le renforcement des pouvoirs des maires et des conseils d'arrondissements pour les rapprocher de ceux des communes avoisinantes. Il a fait part de sa préférence pour cette dernière solution en observant que la réforme de 2001 engagée par le maire de Paris avait déjà permis de transférer aux maires d'arrondissements la gestion des équipements de proximité.

M. Yves Pozzo di Borgo a expliqué que le pouvoir décisionnaire des maires d'arrondissements se limitait aujourd'hui à l'implantation, à l'aménagement et à la gestion des équipements collectifs ce qui lui semblait insuffisant, de même que les faibles moyens budgétaires qui leur étaient accordés. Il a remarqué que la dotation accordée au XVe arrondissement s'élevait à 8 millions d'euros, alors que la ville de Bordeaux, qui dispose d'une population équivalente, bénéficie d'un budget de 378 millions d'euros, tandis que le XIXe arrondissement peut compter sur un budget de 12 millions d'euros alors que Le Havre, qui compte autant d'habitants, dispose d'un budget de 338 millions d'euros. Sans aller jusqu'à proposer de doter les arrondissements parisiens d'une fiscalité propre, il a estimé nécessaire d'augmenter sensiblement les dotations et les pouvoirs du conseil d'arrondissement en matière budgétaire, considérant qu'il n'était pas normal que le maire de Paris détienne tous les pouvoirs en la matière. Il a déclaré qu'un renforcement des pouvoirs des élus d'arrondissement permettrait de rendre plus homogène le fonctionnement du Grand Paris en réduisant l'effet « millefeuille » de l'empilement administratif.

M. Yves Pozzo di Borgo a présenté ensuite plusieurs propositions parmi lesquelles le renforcement du pouvoir décisionnaire des maires d'arrondissements en matière d'attribution des logements sociaux, en matière de voirie et en matière de gestion des sols. Il a préconisé une déconcentration des personnels des services de la ville au bénéfice des arrondissements ainsi qu'un rapprochement de leur statut de celui de la fonction publique territoriale. Evoquant la question des pouvoirs de police, il a rappelé qu'ils étaient dévolus à un préfet de police depuis l'arrêté du 12 messidor an VIII et a proposé que soit créée une police municipale placée sous l'autorité du maire de Paris, lequel pourrait déléguer certains de ses pouvoirs de police aux maires d'arrondissements.

M. Yves Pozzo di Borgo a apporté son soutien à la proposition de son collègue M. Philippe Dallier, reprise par le comité Balladur, de créer un Grand Paris sur le territoire de Paris et des départements des Hauts-de-Seine, de la Seine-Saint-Denis et du Val-de-Marne en expliquant que l'empilement des structures administratives actuelles avait pour conséquence de réduire de plus d'un point le taux de croissance de l'agglomération comme l'avait expliqué M. Christian Blanc, secrétaire d'Etat chargé du développement de la région capitale. A cet égard, il a relevé que, parmi les quatre ou cinq « villes-mondes » dont fait partie Paris, celle-ci était la seule à ne pas entraîner son environnement par des points de croissance supplémentaires. Il a observé, en outre, que de nombreux investissements étaient aujourd'hui réalisés en double par Paris et sa banlieue, notamment dans le domaine de la gestion de l'eau, ce qui constituait un facteur d'accroissement de la dépense publique. Il a considéré que le Grand Paris devrait exercer des compétences à la fois départementales et intercommunales, notamment en matière d'urbanisme, de transports, d'eau et de gestion des déchets. Il a estimé que le projet « Paris métropole » n'allait pas assez loin dans la mutualisation des moyens d'action.

Mercredi 29 avril 2009

Audition de MM. Jacques Pélissard, président de l'Association des maires de France, Claudy Lebreton, président de l'Assemblée des départements de France, et Jean-Jack Queyranne, représentant le président de l'Association des régions de France

Sous la présidence de M. Claude Belot, président, la mission a procédé à l'audition de MM. Jacques Pélissard, président de l'Association des maires de France, Claudy Lebreton, président de l'Assemblée des départements de France, et Jean-Jack Queyranne, représentant le président de l'Association des régions de France.

En réponse à une question de M. Claude Belot, président, concernant l'achèvement de la carte de l'intercommunalité et la taille des communautés, M. Jacques Pélissard a déclaré que l'Association des maires de France (AMF) proposait que la date limite soit fixée au 31 décembre 2011 pour que les communes isolées rejoignent une intercommunalité. Il a souhaité que durant ce délai soit rouverte la possibilité de remodeler les périmètres des intercommunalités à l'initiative du préfet, de la Commission départementale de Coopération Intercommunale (CDCI) ou des communes en observant que trop d'intercommunalités avaient un caractère défensif. Il a indiqué qu'il était favorable, à titre personnel, à ce que les délégués des conseils municipaux aux conseils des communautés soient désignés par fléchage lors des élections municipales, tout en soulignant que l'AMF était partagée sur ce sujet. Il a estimé qu'il n'y avait pas de taille optimale pour les différentes communautés et que celles-ci dépendaient de la nature de chaque territoire, de son histoire et des incitations qui pouvaient exister. Il a demandé que soit clarifiée la possibilité de mutualiser les services communaux et intercommunaux en soulignant qu'il existait des incertitudes liées à l'évolution du droit européen. Il a réaffirmé l'attachement de l'AMF aux démarches fondées sur le volontariat, en rappelant que le succès de la loi Chevènement de 1999 tenait aux dispositions incitatives qu'elle comportait.

Sur une question de M. Claude Belot, président, relative au statut des futures métropoles, M. Jacques Pélissard a indiqué qu'il convenait de reconnaître un nombre limité de grandes métropoles, autour de 5 à 7, et qu'il était important de préserver le caractère volontaire des coopérations, notamment si la reconnaissance du nouveau statut devait s'accompagner d'une remise en cause de la clause de compétence générale et du pouvoir fiscal des communes membres.

M. Jean-Jack Queyranne a estimé que les métropoles devaient se construire autour d'un noyau central constitué par la communauté urbaine auquel seraient associés des territoires partenaires, à l'exemple de Saint-Etienne et de la communauté des portes de l'Isère pour le Grand Lyon. Il a indiqué qu'il fallait permettre des coopérations « à la carte » et des expérimentations. Il a considéré qu'une intégration plus forte serait peut-être d'actualité d'ici 10 ou 20 ans mais qu'il était prématuré de décréter un périmètre dès maintenant. Il a évoqué le cas de certaines communes périphériques du Grand Lyon qui venaient de prendre position contre la perspective d'une intégration pour illustrer le caractère sensible du développement du fait métropolitain.

M. Claude Belot, président, s'est interrogé sur la nécessité pour la mission de formuler de fortes préconisations en observant qu'en l'absence de décisions, il risquait de ne pas y avoir de changements.

M. Yves Krattinger, rapporteur, a évoqué la nécessité pour la mission de bien identifier les caractéristiques propres aux grandes métropoles, en observant que toutes les communautés urbaines revendiquaient d'être reconnues comme des métropoles, avec l'idée de pouvoir bénéficier du transfert de compétences des régions et des départements.

M. Claudy Lebreton a estimé que la création des métropoles aurait des conséquences pour les trois niveaux des collectivités territoriales et qu'il était par conséquent nécessaire de bien les définir, en tenant compte de leur caractère européen et de l'existence de grandes fonctions métropolitaines. Il s'est interrogé sur le fait de savoir si ces métropoles bénéficieraient d'un statut de collectivité territoriale ou d'un statut d'établissement public. Il a remarqué que les métropoles n'étaient pas caractérisées par l'exercice de compétences sociales et que c'était le département qui conservait la responsabilité d'assurer l'équilibre entre les territoires et les populations.

M. Claudy Lebreton a indiqué que les conseils généraux n'étaient pas hostiles aux délégations librement consenties par convention entre différents niveaux de collectivités.

Il a souligné la nécessité, pour celles-ci, de rationaliser la dépense publique, notamment par le biais de mutualisations. Il a regretté la suspicion manifestée par l'Etat envers les collectivités locales et exprimé le souhait d'un abandon de cet état d'esprit.

M. Jacques Pélissard s'est, d'une part, déclaré favorable à la conclusion de conventions de délégation de compétences entre collectivités et a, d'autre part, précisé que le seuil démographique de création d'une métropole devait être assez élevé.

M. Claude Belot, président, et M. Yves Krattinger, rapporteur, ont considéré qu'il convenait, à côté de critères démographiques, de prendre également en compte des critères fonctionnels.

M. Jean-Jack Queyranne a estimé que les métropoles n'avaient pas vocation à exercer sur leur territoire les compétences départementales et régionales et appelé à l'adoption de règles souples permettant des évolutions. S'appuyant sur l'exemple de l'agglomération lyonnaise, il a indiqué que la région était un gage d'équilibre et salué la conclusion de partenariats intégrant la délégation de compétences sur le noyau de la communauté urbaine.

Rejoint par le président de l'association des maires de France (AMF), il a précisé, en réponse à M. Claude Belot, président, que l'extension du périmètre métropolitain au-delà du territoire départemental n'impliquant pas une modification des limites des départements, ne constituait pas un problème.

En réponse à M. Claude Bérit-Débat qui l'interrogeait sur les moyens envisagés pour rationaliser la carte des intercommunalités, M. Jacques Pélissard a mentionné trois principes : le volontariat, des incitations fortes et l'élaboration par la commission départementale de la coopération intercommunale (CDCI) -réformée- de propositions transmises au préfet pour décision.

M. Yves Krattinger, rapporteur, a marqué son accord pour cette approche mais a insisté sur la fixation de critères pour guider les propositions des CDCI.

M. Jacques Pélissard a indiqué que l'Association des maires de France, lors de la dernière réunion de son bureau, s'était prononcée en ce sens.

M. Claude Belot, président, rappelant le caractère coopératif des intercommunalités, a considéré qu'il convenait de dépasser le principe du simple volontariat, soulignant l'existence de graves déséquilibres territoriaux.

M. Jacques Pélissard a déclaré adhérer à cette démarche.

Abordant la question des compétences des collectivités locales, le président Claude Belot a évoqué les interrogations soulevées par les activités d'intendance des régions qui, pour la mission sénatoriale, ont plutôt vocation à remplir des fonctions stratégiques.

Pour M. Jean-Jack Queyranne, il n'y a pas lieu de modifier l'attribution à la région, qu'il a jugé satisfaisante, de blocs de compétences comme celui qui réunit les lycées, la formation professionnelle, l'apprentissage au bénéfice des jeunes de 15 à 25 ans.

M. Claudy Lebreton a évoqué le constat établi par l'ADF qui distingue les collectivités locales relevant de la proximité -le département, la commune- de celles relevant de l'avenir, compétentes en matière de recherche notamment. Il a rattaché les collèges à la première catégorie et les lycées, comme l'enseignement supérieur, à la seconde catégorie. Il a conclu à la cohérence de la répartition des compétences dans ce domaine et souhaité le maintien des dispositifs satisfaisants, recommandant de réserver les ajustements à ce qui apparaît nécessaire, notamment pour supprimer les doublons.

Il s'est interrogé sur le choix, en matière de compétences, d'une réponse unique sur l'ensemble du territoire.

Pour M. Yves Krattinger, rapporteur, la réponse réside dans la délégation qui permet de sortir de l'uniformité.

Le président de l'ADF a approuvé ce choix qui peut être mis en oeuvre par le biais de conventions.

M. Jean-Jack Queyranne a considéré, pour sa part, que le transfert éventuel aux départements de la compétence en matière de lycées sortirait les régions de la logique constituée par la formation professionnelle et l'apprentissage.

En réponse à l'hypothèse avancée par M. Claude Belot, président, de l'institution d'une compétence régionale dans le secteur de l'enseignement supérieur, le président de la région Rhône-Alpes, après avoir rappelé le principe d'autonomie des universités, a constaté une certaine cohérence, et considéré que le fléchage des régions comme partenaires de l'enseignement supérieur était une bonne chose.

M. Philippe Leroy a évoqué le soutien apporté par des départements aux universités implantées sur leur territoire. Approuvant la compétence régionale en matière d'enseignement supérieur, il a considéré qu'il fallait éviter d'interdire toute intervention aux départements.

Pour le président de l'AMF, il faut un chef de file.

M. Yves Krattinger, rapporteur, a soumis au débat la question du transfert aux régions, à titre expérimental, de l'insertion professionnelle des personnes en grande difficulté.

Le président de l'ADF a affirmé que l'essentiel résidait, aujourd'hui, dans la gouvernance, s'appuyant sur l'exemple du RSA (revenu de solidarité active) pour lequel le département, détenteur de la responsabilité politique en la matière, ne peut rien sans ses partenaires.

Il a considéré que devait être renforcé le domaine conventionnel.

Il a, par ailleurs, souligné que l'insertion avait aussi une dimension économique relevant de la région et que cette dernière était, sur ce point, concurrencée par les communautés urbaines.

Après avoir précisé que l'action de formation professionnelle associée au revenu minimum d'insertion (RMI) pourrait être prise en charge par la région, M. Jean-Jacques Queyranne, en réponse à M. Yves Krattinger, rapporteur, concernant le transfert sur une base expérimentale de la compétence emploi à la région, s'est déclaré très favorable à cette solution, tout en regrettant que le projet de loi en cours de rédaction sur la formation professionnelle ne s'inscrive pas dans cette logique décentralisatrice.

Sur la question de l'insertion, M. Philippe Leroy a souhaité attirer l'attention de ses collègues sur les différences existant entre les bénéficiaires du RSA, qui sont engagés dans l'emploi et ceux du RMI qui en sont exclus : les premiers peuvent être intégrés dans un parcours de formation professionnelle géré par les régions, alors que les seconds requièrent un accompagnement social différent, qui relève plutôt du département.

En réponse à M. Claude Belot, président, concernant la coordination des compétences des collectivités territoriales relatives au transport, M. Claudy Lebreton a considéré qu'il fallait envisager la question sous l'angle de la mobilité des hommes. Jugeant que la prise en charge par les départements du transport scolaire était plutôt un succès, il s'est attaché au problème posé par le transport interurbain routier. Il a estimé que les départements pourraient utilement abandonner cette compétence aux régions afin de promouvoir l'intermodularité et éviter la concurrence entre les différents modes de transport. Il a par ailleurs jugé essentiel dans ces matières de tenir compte des différences de situations existant entre les départements urbanisés et les départements ruraux et de procéder par voie d'expérimentation, sur un temps suffisamment long.

M. Jacques Pélissard a relevé que les communautés urbaines assumaient pleinement la compétence transport qui leur était dévolue. Interrogé par M. Claude Belot, président, sur l'opportunité d'attribuer le versement transport à l'autorité organisatrice, il a estimé que la finalité originelle de ce versement qui était de financer les transports intra-urbains interdisait qu'il soit affecté au financement des transports extérieurs aux villes.

Pour sa part, M. Jean-Jacques Queyranne a proposé que le versement transport soit unifié sur un bassin de déplacement qui corresponde à un bassin d'emploi et il s'est prononcé pour la création d'autorités organisatrices de la mobilité urbaine, qui favorisent la mutualisation des services. Il a, en outre, recommandé que des transferts ponctuels de compétence soient organisés lorsque des situations de concurrence entre le rail et la route existaient, afin d'y apporter une réponse.

M. Yves Krattinger, rapporteur, ayant évoqué la possibilité que soient promues des autorités organisatrices partagées et non hiérarchisées qui permettent aux différentes collectivités territoriales d'adopter des solutions uniques en termes de billetique ou de prix de transport, M. Jacques Pélissard s'est déclaré tout à fait ouvert à ce que des syndicats mixtes exerçant cette compétence soient ainsi mis en place au sein d'un même bassin de population. M. Jean-Claude Peyronnet a marqué son accord avec cette proposition.

En réponse à M. Claude Belot concernant l'opportunité et la pertinence de l'instauration d'un constat de carence qui permette à une collectivité non titulaire d'une compétence confiée à une autre, d'agir dans ce domaine, en cas d'inaction de la seconde, M. Claudy Lebreton a estimé que la question de l'exercice des compétences se posait différement selon le type de compétence ou le type de territoire. Il a ainsi fait valoir que la mise en place du haut débit était le fait des villes centres dans les départements urbains et celui des départements dans les zones rurales.

M. Bruno Retailleau a pour sa part considéré que la procédure du constat de carence ne pourrait régler toutes les difficultés dans l'exercice par les collectivités de leurs compétences et qu'il convenait, pour conserver une souplesse au système, de réaffirmer la clause générale de compétence.

L'audition s'est poursuivie en présence de M. Philippe Valletoux, membre du Conseil économique et social et vice-président de Dexia Crédit Local.

M. Yves Krattinger, rapporteur, a souhaité soumettre à la discussion les grands principes de réforme de la fiscalité locale dégagés par le rapport de M. Philippe Valletoux qu'il a rappelés :

- ne plus concevoir l'impôt local que dans le cadre d'une relation directe entre la collectivité territoriale et chaque catégorie de redevables ;

- proscrire, autant que possible, les impôts locaux sur lesquels s'exercent plusieurs niveaux de pouvoir fiscal, pour la fixation de taux qui s'additionnent ;

- obtenir de l'Etat qu'il s'interdise désormais d'intervenir financièrement en direction des collectivités territoriales pour se substituer aux redevables locaux ;

- une fois cette nouvelle répartition établie, moderniser les bases fiscales les plus obsolètes et instituer des correctifs atténuant les disparités entre collectivités territoriales.

Il a également soulevé le problème de la réforme de la taxe professionnelle, sur lequel l'actualité impose de prendre position.

M. Jacques Pélissard a alors présenté les propositions conjointes de l'AMF, l'ADF et l'ARF sur la réforme de la fiscalité locale :

- redéfinir l'autonomie fiscale comme le fait, pour les collectivités, de disposer de ressources fiscales dont elles maîtrisent les assiettes ou les taux ;

- attribuer à chaque niveau de collectivité un « panier d'impôts » ;

- mettre fin aux dégrèvements et aux exonérations pris en charge par l'Etat ;

- préserver l'équilibre actuel entre l'effort fiscal des ménages et celui des entreprises ;

- rénover la fiscalité locale économique en gardant un impôt sur les entreprises, avec un taux fixé par les collectivités, assis pour une part sur la valeur locative et pour une part sur la valeur ajoutée. En revanche, l'impôt sur le carbone ne constitue pas, a-t-il estimé, une solution viable ;

- dans l'assiette de la taxe d'habitation, introduire une part correspondant au revenu des ménages ;

- renforcer la péréquation dans un cadre national.

M. Claudy Lebreton a souligné qu'il existait, depuis l'acte II de la décentralisation, une certaine ambiguïté dans la notion d'autonomie fiscale. Il a donc rappelé que celle-ci consistait, pour une collectivité, en la possibilité d'intervenir sur les bases et l'assiette ou sur les taux d'un impôt. Par ailleurs, il a souligné que la question de l'autonomie des recettes ne devait pas faire oublier le problème de l'autonomie des dépenses des collectivités, 80 % de celles-ci étant contraintes. Il a en outre indiqué que :

- l'ADF préconise le transfert d'une part de la contribution sociale généralisée (CSG) pour financer les compétences des départements ;

- le nouvel impôt économique local pourrait être assis pour partie sur la valeur ajoutée, cela ne devant toutefois pas conduire à négliger le foncier bâti des entreprises ;

- une péréquation entre tous les départements est nécessaire ;

- il est urgent de remplacer la taxe professionnelle par une autre contribution des entreprises.

M. Jean-Jack Queyranne a estimé que l'autonomie fiscale était indissociable du principe du consentement à l'impôt et de la responsabilité de l'élu devant l'électeur. Par ailleurs, si l'attribution à chaque niveau de collectivités d'une ressource fiscale en rapport avec les compétences exercées à ce niveau apparaît légitime, l'exemple du transfert de la taxe intérieure sur les produits pétroliers, dont le produit est en déclin, doit inciter à la prudence. Enfin, la réforme ne peut pas faire l'économie d'un partage des impôts nationaux : la CSG pour les départements, un impôt économique pour les régions ; l'impôt sur le revenu doit également faire l'objet d'une répartition.

M. Philippe Valletoux, invité à participer au débat, a rappelé que son rapport, rédigé en 2006, entendait définir un « schéma-cible » pour la fiscalité locale, à partir duquel il fallait élaborer un « chemin » de la réforme. Or, c'est ce chemin, nécessairement fait de plusieurs étapes, qui présente les principales difficultés. L'une de celles-ci est la nécessité de préserver, à chaque étape, un équilibre entre la taxation des ménages et celle des entreprises. De même, la réforme de la taxe professionnelle constitue sans doute un premier pas dans la réforme de la fiscalité locale, mais elle doit prendre place dans un processus global sur lequel un consensus aura été acquis. Enfin, il a estimé que la taxe intérieure sur les produits pétroliers posait problème du fait du déclin de son produit mais également de l'absence de marge de manoeuvre des collectivités sur cette ressource.

A une question de M. Yves Krattinger, rapporteur, sur la possibilité de mettre en place une péréquation rénovée, qui pourrait reposer sur une enveloppe spécifique alimentée par un impôt, M. Philippe Valletoux a répondu que les dotations de l'Etat ne pouvaient jouer un rôle péréquateur du fait de leur fonction actuelle de garantie de revenu pour les collectivités. Dès lors, une combinaison de recettes fiscales ou une recette fiscale unique, complétée par un mécanisme de répartition, pourrait effectivement, selon lui, jouer ce rôle péréquateur.

M. Charles Guené a observé que la France était l'un des rares pays européens où les collectivités votent des taux sur des assiettes d'impôts, ce qui n'en fait pas pour autant le seul pays démocratique. Par ailleurs, il a estimé qu'en une période où le produit intérieur brut stagne, voire diminue, il paraissait normal que les collectivités territoriales réduisent elles aussi leur train de vie. Il a par ailleurs relevé que l'idée d'introduire le revenu dans l'assiette de la taxe d'habitation serait impopulaire.

Concernant la réforme de la taxe professionnelle, nombre d'entreprises, a-t-il souligné, espèrent une contribution fixée à 1,5 % de la valeur ajoutée assortie d'un correctif en faveur de celles qui, actuellement, paient moins que ce taux. Le problème de la localisation de la valeur ajoutée, quant à lui, pourrait être résolu par une collecte au niveau national doublée d'une répartition entre collectivités territoriales selon une clef tirée de l'assiette actuelle de la taxe professionnelle. Enfin, il s'est montré favorable à l'idée d'attribuer les « quatre vieilles » aux communes et à leurs groupements et d'effectuer un partage d'impôts d'Etat pour les départements et les régions. L'impôt sur les sociétés et la taxe sur la valeur ajoutée, liés à l'activité économique du pays, pourraient ainsi être partagés entre les collectivités ; la taxe intérieure sur les produits pétroliers, quant à elle, devrait bénéficier très probablement de la remontée inévitable du cours du pétrole.

M. Edmond Hervé a souligné qu'il était nécessaire, en matière de réforme fiscale, de prendre une certaine hauteur. En effet, le temps de l'impôt est un temps long, contrairement au temps budgétaire. De plus, a-t-il rappelé, de très bons rapports ont été produits au cours des années passées sur ce sujet, permettant de considérer la réforme dans son ensemble et non pas du point de vue, nécessairement biaisé, d'une collectivité territoriale particulière. Il a, par ailleurs, estimé qu'un consensus était possible, les positions des différents acteurs s'étant sensiblement rapprochées, par exemple sur l'idée d'asseoir une partie de la taxe d'habitation sur le revenu. En revanche, ce consensus doit s'établir très rapidement, a-t-il estimé, sous peine de l'instauration d'un système uniquement fondé sur des dotations. Il convient donc de lever toute ambiguïté sur le contenu de la notion d'autonomie fiscale. Ainsi, notamment, il a jugé que la spécialisation fiscale pourrait nuire à cette autonomie lorsque le produit d'un impôt chute brutalement, d'autant que les collectivités ont besoin de ressources pérennes pour investir à long terme : c'est donc plutôt la notion de « panier fiscal » qui devrait être retenue. Cette stabilité des ressources fiscale est notamment indispensable, a-t-il estimé, pour que les collectivités puissent mener à bien les investissements que le Grenelle de l'environnement implique.

Il s'est par ailleurs déclaré défavorable à la fixation d'un maximum pour les prélèvements obligatoires, cela contredisant le principe de l'autonomie fiscale. Concernant les nouveaux impôts locaux, certains d'entre eux pourraient avoir la même assiette que des impôts d'Etat. Quant à la valeur ajoutée, il a relevé qu'elle pourrait très bien être territorialisée, comme le prouve la référence à cette grandeur économique dans la formule de plafonnement de la taxe professionnelle. Enfin, l'amélioration de la péréquation verticale, qui ne peut reposer sur un seul impôt, doit être conditionnée par des progrès dans la péréquation horizontale.

M. Bruno Retailleau s'est dit attaché à l'autonomie fiscale davantage qu'à l'autonomie financière, la liberté de la dépense ne pouvant aller, selon lui, sans la responsabilité de voter l'impôt. Par ailleurs, il a désapprouvé le principe de la spécialisation fiscale en raison de son incompatibilité avec une gestion saine et respectueuse des règles prudentielles. Enfin, il a relevé deux inconvénients que recèle, à ses yeux, le choix de la valeur ajoutée (VA) comme assiette : d'une part la VA est essentiellement constituée par la masse salariale, d'autre part elle varie, bien plus que la valeur foncière, en fonction de l'activité économique.

M. Philippe Valletoux a considéré que la valeur ajoutée présentait l'avantage d'être une notion économiquement signifiante, facile à calculer. En revanche, en ôter les salaires reviendrait à créer une assiette sans réelle consistance. Il a, par ailleurs, admis que les collectivités territoriales avaient, jusqu'à présent, toujours bénéficié de recettes en partie indépendantes de la conjoncture.

M. Jacques Pélissard a réagi à l'ensemble de ces propos en insistant sur la nécessité de prévoir une assiette large pour la taxe d'habitation, tous les citoyens devant contribuer ; il a également estimé que la péréquation devait d'abord être verticale et mise en oeuvre par l'Etat. Il a en outre confirmé qu'il était possible de territorialiser la valeur ajoutée en utilisant des critères tels que la valeur du foncier bâti et le nombre d'emplois. Enfin, il a estimé qu'en demandant davantage d'autonomie fiscale et de responsabilité, les associations d'élus apportaient une réponse pertinente à la question de la maîtrise de la dépense publique.

M. Claudy Lebreton a relevé que les élus locaux des autres pays européens enviaient l'autonomie fiscale française. Celle-ci joue un rôle important dans l'acceptation sociale de l'impôt et dans la confiance que les citoyens-contribuables accordent aux élus lorsqu'ils peuvent constater la bonne utilisation de la ressource fiscale. Il s'est ensuite félicité que les trois grandes associations d'élus locaux soient parvenues à un accord et a souhaité que celui-ci permette d'influencer les réformes en cours.

M. Jean-Jack Queyranne, après avoir également manifesté sa satisfaction sur l'accord auquel les trois associations sont parvenues, a regretté que les règles de la fiscalité locale aient été trop souvent modifiées par les lois de finances au détriment des collectivités. Le plafonnement de la taxe professionnelle à la valeur ajoutée des entreprises a ainsi été particulièrement préjudiciable aux régions. Il a ensuite jugé nécessaire de réfléchir, en concertation avec le ministère des finances, à la répartition des impôts d'Etat, afin d'éviter une nouvelle attribution de dotations plafonnées aux collectivités.

M. Claude Belot, président, a conclu en relevant que des lignes de consensus pouvaient être dégagées sur la question de la réforme de la fiscalité locale.

Mardi 6 mai 2009

Audition de M. Olivier Fouquet, président de section au Conseil d'Etat

Puis, la mission a procédé à l'audition de M. Olivier Fouquet, président de section au Conseil d'Etat.

Invité par M. Yves Krattinger, rapporteur, à présenter devant la mission les conclusions du rapport sur la réforme de la taxe professionnelle qu'il avait remis au premier ministre en 2004, M. Olivier Fouquet a indiqué que la commission qu'il présidait alors s'était efforcée de trouver un équilibre entre l'intérêt des entreprises engagées dans une économie mondialisée et celui des collectivités territoriales, qui ont besoin de ressources fiscales modulables et pérennes. Par ailleurs, il ne s'agissait pas de supprimer la taxe professionnelle (TP) mais seulement d'amender son assiette.

Il a rappelé que cette assiette devait à l'origine, en 1976, être composée des salaires, des investissements, de la valeur foncière et des bénéfices des entreprises. Cette dernière part avait finalement été abandonnée. En outre, une erreur de calcul avait généré, la première année, des transferts de charges imprévus entre entreprises. Les critiques dont la nouvelle assiette avait alors fait l'objet avaient finalement conduit, dès 1980, à acter le principe d'un impôt assis sur la valeur ajoutée (VA) assorti d'un plafonnement. En 1998, le constat que l'assiette « équipements et biens mobiliers » (EBM) était défavorable à l'investissement et à l'emploi avait conduit le ministre des finances à envisager d'instaurer cette assiette « valeur ajoutée ». Toutefois, en raison des craintes de l'administration devant la difficulté technique de cette réforme, l'évolution de la TP s'était finalement réduite à la suppression de la part salaires. Cette amputation peu judicieuse a exagérément favorisé, selon M. Olivier Fouquet, les entreprises riches en main-d'oeuvre, sans apporter de solution au problème de la taxation des investissements, défavorable à l'emploi. Il a ainsi souligné la singularité de l'assiette de la taxe professionnelle française en Europe, la plupart des collectivités territoriales des autres pays s'appuyant uniquement sur une assiette foncière. Si cette singularité ne provoque probablement pas de délocalisations, elle dissuade sans doute certains investissements étrangers.

Le choix de la valeur ajoutée comme nouvelle assiette, proposé par le rapport Fouquet, permettrait notamment d'opérer un transfert partiel de la charge fiscale supportée par les entreprises les plus exposées à la concurrence internationale, qui sont souvent celles qui ont le plus d'EBM, à celles du secteur moins exposé. Ce choix ne représenterait pas une révolution intellectuelle, puisque la notion de valeur ajoutée est déjà utilisée pour calculer la cotisation minimale de TP (1,5 % de la VA) et la cotisation plafond introduite en 2006 (3,5 % de la VA). Il imposerait cependant de mettre en oeuvre des critères de localisation tels que la surface et le nombre d'employés. Les simulations effectuées dans le cadre de la commission Fouquet avec ce type de critères ont montré de forts transferts entre collectivités territoriales, que la commission avait envisagé de lisser sur 10 ans. Les transferts de charges entre entreprises seraient, quant à eux, moins importants.

En revanche, M. Olivier Fouquet a indiqué que l'excédent brut d'exploitation (EBE) ne constituerait pas une bonne assiette, du fait de sa grande volatilité. En outre, ce choix conduirait à de trop grands transferts de charges entre entreprises.

Enfin, la commission Fouquet avait proposé, comme première étape de la réforme, une année de simulation « en blanc », avec une déclaration supplémentaire fictive des entreprises correspondant à la nouvelle assiette.

Après la remise du rapport, la réforme s'était réduite à une mesure d'exonération des investissements nouveaux, avec comme objectif implicite l'extinction progressive de l'assiette investissements.

Concernant la nouvelle réforme annoncée par le président de la République, elle consiste en la suppression de la part EBM de l'assiette de la TP. La substitution pure et simple d'une dotation à cette ressource fiscale poserait à l'évidence problème au regard de la notion constitutionnelle de « part prépondérante de ressources propres » dans les ressources totales des collectivités locales. Le remplacement de cette assiette « EBM » devra donc nécessairement être assuré, au moins en partie, par une ressource fiscale. Celle-ci pourrait consister en une généralisation de la cotisation minimale de la taxe professionnelle, établie à 1,5 % de la valeur ajoutée, probablement assortie d'un transfert de parts d'impôts nationaux sur lesquelles les collectivités n'auraient pas de marge de manoeuvre.

M. Olivier Fouquet s'est montré défavorable à cette dernière solution et a préconisé que les collectivités territoriales puissent faire varier le taux appliqué à la valeur ajoutée dans une fourchette allant de 1,5 % à 2,5 % ou 3,5 %. Une liaison souple de ce taux avec ceux des taxes « ménages » garderait par ailleurs un intérêt pour éviter les situations anormales. A cet égard, il convient de noter que le rapport entre l'effort fiscal des ménages et celui des entreprises est resté stable au cours des dernières années.

Par ailleurs, ce principe de modulation des taux dans une fourchette pourrait également être retenu pour créer un second impôt économique, reprenant l'assiette « foncier bâti » des entreprises. Les collectivités pourraient ainsi, par exemple, tenir compte des nuisances engendrées par les gros établissements en augmentant le taux s'appliquant au foncier, sans grever parallèlement la valeur ajoutée. L'assiette foncière, pour le moment très archaïque, doit cependant être profondément rénovée pour qu'une telle solution soit envisageable. Toutefois, cette rénovation ne pose pas de problème politique majeur.

M. Yves Krattinger, rapporteur, a ensuite interrogé M. Olivier Fouquet sur les points suivants :

- quelles sont les modalités envisageables d'une conciliation entre la vision du Sénat sur la réforme de la TP, marquée par son rôle constitutionnel de représentant des collectivités territoriales, et celle du gouvernement ?

- comment expliquer que la France soit un des principaux pays d'accueil des investissements étrangers si la taxe professionnelle est dissuasive ?

- le plafonnement à 3,5 % de la valeur ajoutée n'a-t-il pas permis de parvenir à un degré satisfaisant d' « acceptabilité » de la TP ?

En réponse, M. Olivier Fouquet a d'abord indiqué que le pouvoir exécutif ne pourrait, en tout état de cause, ni ignorer le point de vue des élus locaux, ni risquer d'aggraver le déficit public. Le remplacement de la taxe professionnelle par des ressources fiscales étant par conséquent une nécessité, le Parlement devrait, selon lui, s'efforcer d'obtenir le pouvoir de modulation des taux déjà évoqué. Par ailleurs, si l'assiette « valeur ajoutée » était retenue, toute solution permettant de minimiser les transferts de compétences entre collectivités recueillerait probablement l'assentiment du gouvernement.

Concernant les investissements étrangers, il est vrai que, dans les critères d'implantation des entreprises, le degré de pression fiscale passe après les infrastructures ou la formation de la main-d'oeuvre. D'ailleurs, la fiscalité française sur les entreprises, caractérisée par des taux élevés mais des assiettes réduites, n'est globalement pas plus lourde que dans les autres pays. Toutefois, les entreprises sont sensibles à la complexité excessive de l'assiette de la TP et au fait qu'elle soit, sur un plan comptable, déductible de l'impôt sur les sociétés : cette dernière caractéristique, en réalité favorable aux entreprises, fausse néanmoins les comparaisons internationales.

Enfin, si le plafonnement à 3,5 % de la valeur ajoutée a effectivement corrigé certains abus, la persistance de l'assiette EBM est préjudiciable aux petites entreprises qui, achetant de nouveaux équipements en gardant les anciens, payent ainsi deux fois la TP.

En réponse à une question de M. Charles Guené, M. Olivier Fouquet a ensuite confirmé que le Conseil constitutionnel considérerait comme une ressource propre des collectivités territoriales une part de la valeur ajoutée fixée au niveau national. M. Charles Guené a également indiqué que le monde économique espérait une taxe fixée à 1,5 %, assise sur le foncier, et a soumis l'idée d'une nouvelle taxe économique locale entièrement versée aux communes et à leurs groupements, les autres niveaux de collectivités recevant des parts d'impôts nationaux. Sur ce dernier point, M. Olivier Fouquet a estimé qu'il serait trop compliqué de procéder à la fois à la réforme de la TP et à une réaffectation de son produit entre les différents niveaux de collectivités.

M. Edmond Hervé a d'abord salué l'exposé de M. Olivier Fouquet. Il a ensuite souhaité que les principes dégagés par le Conseil constitutionnel, tels que la prépondérance des ressources propres, ne soient pas oubliés. Il a également exprimé son accord avec le principe d'une possibilité de modulation des taux par les collectivités, assorti de règles de liaison des taux. Il a par ailleurs rappelé que la taxe professionnelle unique avait été une source d'économies importantes en provoquant la suppression de nombreuses zones industrielles ou artisanales inutiles. Il a ensuite appelé chacun à prendre de la hauteur et à ne pas se laisser influencer par la considération des transferts dont pourrait pâtir sa propre collectivité territoriale. Il s'est en outre montré défavorable à la spécialisation sur un seul type d'assiette de l'impôt économique local, à l'intégration de la TIPP dans le « panier fiscal » bénéficiant à chaque niveau de collectivités pour compenser la diminution du produit de TP, ainsi qu'à la progression des dotations de l'Etat aux collectivités. Enfin, il a estimé que la fiscalité mixte était légitime dans une intercommunalité exerçant des compétences importantes en matière de services à la population.

Mme Jacqueline Gourault, rapporteur, l'ayant interrogé sur le maintien ou non d'une part départementale et régionale sur chacune des deux assiettes (valeur ajoutée et foncier bâti) envisagées pour le nouvel impôt, M. Olivier Fouquet a estimé que chaque niveau de collectivités avait de bons arguments à faire valoir pour se voir attribuer une part d'impôt. Néanmoins, la commune ou l'intercommunalité sont sans doute, selon lui, le niveau privilégié du contact entre les chefs d'entreprise et les élus, et à ce titre les bénéficiaires les plus naturels de l'impôt économique local.

M. Philippe Adnot a, quant à lui, estimé que le département était la collectivité essentielle pour le développement économique, du fait de sa compétence voirie. En outre, les départements ont un important rôle péréquateur et il serait donc malvenu de les exclure des produits perçus sur les éoliennes ou les installations nucléaires.

En réponse à une question de M. Philippe Dallier, M. Olivier Fouquet a par ailleurs indiqué que le gouvernement n'envisageait pas, dans cette réforme, un jeu à somme nulle entre entreprise, Etat et collectivités, mais bien une diminution globale des charges pesant sur les entreprises.

Enfin, M. Pierre-Yves Collombat, premier vice-président, a souhaité savoir quelle assiette, des investissements ou des salaires, était la plus préjudiciable à l'emploi, et si des pays étrangers pouvaient fournir des exemples intéressants d'impôt économique local. M. Olivier Fouquet a répondu que l'assiette « investissements » était sans conteste la plus défavorable aux entreprises et à l'emploi. Concernant les points de comparaison possibles, il existe un impôt italien proche de la TP et qui semble bien fonctionner.

Mardi 12 mai 2009

Audition de M. Vincent Eblé, président du conseil général de Seine-et-Marne, de M. Daniel Guiraud, vice-président du conseil général de Seine-Saint-Denis, et de M. Michel Berson, président du conseil général de l'Essonne

Sous la présidence de M. Claude Belot, président, la mission a procédé à l'audition de MM. Vincent Eblé, président du conseil général de Seine-et-Marne, Daniel Guiraud, vice-président du conseil général de Seine-Saint-Denis, et Michel Berson, président du conseil général de l'Essonne.

A titre liminaire, M. Vincent Eblé a fait valoir que la grande majorité des élus de l'Ile-de-France s'accordaient sur la nécessité de traiter de l'ensemble de la région, sans privilégier le centre au détriment de la grande couronne. Il a souligné combien les territoires périphériques participaient à la dynamique de la région capitale dans des domaines très variés, tels, entre autres, l'environnement, les transports ou la logistique. Faisant référence aux critiques parfois formulées contre la position des représentants des départements de la grande couronne, jugée trop défensive, il a considéré qu'elles présentaient le défaut de transposer à l'Ile-de-France un modèle de développement commun aux aires métropolitaines du reste de la France, sans prendre suffisamment en compte les spécificités de la géographie francilienne.

Estimant qu'il était nécessaire de faire évoluer la gouvernance territoriale de l'Ile-de-France, M. Vincent Eblé s'est déclaré totalement opposé à la mise en place d'un couple départements / région, en raison des finalités différentes poursuivies par chacun de ces niveaux, la proximité pour les premiers et le développement stratégique pour la seconde.

Souscrivant, en tant que représentant d'un département de la zone dense, aux propos tenus par M. Vincent Eblé, M. Daniel Guiraud a rappelé qu'un débat sur l'échelle pertinente pour la région capitale avait eu lieu au sein de la conférence métropolitaine, et que les élus s'étaient rapidement accordés sur le fait que le périmètre de Paris Métropole devait dépasser celui de la seule zone dense, contrairement aux propositions formulées par M. Philippe Dallier dans son rapport présenté au nom de l'Observatoire de la décentralisation du Sénat.

Appelant à s'inspirer des exemples étrangers et notamment de celui de l'Allemagne, il a souligné l'intérêt que présentent les démarches de projets qui associent partenaires publics et privés et il a jugé nécessaire de tirer parti de toutes les ressources du procédé contractuel. Dénonçant le maintien de certains services déconcentrés de l'Etat lorsque la compétence correspondante a été transférée aux collectivités territoriales, il a par ailleurs indiqué que, selon lui, les couples pertinents de collectivités étaient le couple département / communes-intercommunalité, couple de la proximité et des solidarités, et le couple Etat / région, couple des grandes stratégies de développement. Enfin, il a estimé que la question fondamentale pour le territoire francilien était la question financière et fiscale.

M. Michel Berson s'est inscrit en faux contre la vision, qu'il a jugée dépassée, qui consisterait à opposer la première couronne et la grande couronne et il a appelé à appréhender la région Ile-de-France dans sa globalité. Il a, à cet égard, noté que les dynamiques de développement de ce territoire suivaient moins des cercles concentriques que des axes traversants. A titre d'illustration, il a cité les pôles de développement, situés dans la grande couronne, tel que le plateau de Saclay, cela expliquant la mise en oeuvre, par les départements concernés, de projets interdépartementaux de développement, en association avec la région et les grandes agglomérations. Il a, par ailleurs, souligné le rôle spécifique des départements franciliens, véritables territoires pivots assurant le lien entre les intercommunalités et la région.

Jugeant anormal que le département de la Seine-Saint-Denis ait une dotation globale de fonctionnement par habitant inférieure à celle des Hauts-de-Seine, M. Michel Berson a fait valoir que la réforme la plus urgente en la matière était moins celle des institutions que celle de la fiscalité locale et du renforcement des mécanismes de péréquation verticale et horizontale. Il a considéré que, dans le cadre de Paris Métropole, des solutions pourraient être avancées pour répondre à ces enjeux. Enfin, se déclarant opposé au remplacement de la taxe professionnelle par une dotation de compensation, il a émis le voeu qu'une autre ressource fiscale lui soit substituée.

M. Yves Krattinger, rapporteur, a voulu savoir si la question de la solidarité financière entre les collectivités territoriales d'Ile-de-France devait être traitée dans le cadre de la structure Paris métropole, ou dans le cadre d'une modification législative qui fixerait de nouvelles règles et de nouvelles modalités de mise en oeuvre de cette péréquation.

Il s'est ensuite interrogé sur le rôle de l'Etat dans la région capitale et, notamment, sur l'opportunité de laisser à ce dernier une capacité d'initiative.

Il a ensuite abordé la question de la gouvernance locale en rappelant que Paris métropole était un syndicat mixte d'études et qu'une interrogation pouvait se faire jour sur les modalités et les moyens de mise en oeuvre des projets qui seraient conçus en son sein.

Il a voulu savoir si les projets métropolitains allaient au-delà des seules questions de transports et de déplacements pour prendre en charge, par exemple, les questions liées à l'enseignement et à la recherche.

M. Vincent Eblé a souligné que la question de la péréquation financière avait des visages multiples, estimant que la réforme de la taxe professionnelle pourrait fournir l'occasion d'une nouvelle péréquation. En effet, a-t-il fait valoir, si le maintien d'un lien entre les entreprises et les territoires est nécessaire, l'Ile-de-France souffre d'un déséquilibre dans l'implantation géographique des entreprises. Or, plutôt que de corriger ce déséquilibre, les réformes successives de la taxe professionnelle ont maintenu les inégalités constatées et la suppression de la part salariale de la taxe professionnelle s'est traduite par le versement d'une compensation à des collectivités territoriales dont le potentiel fiscal était jusqu'à sept fois supérieur à celui des collectivités territoriales les plus défavorisées.

Par ailleurs, il a jugé que les départements étaient victimes de la faiblesse des compensations versées par l'Etat au titre des compétences transférées, citant le manque à gagner d'au moins 55 millions d'euros pour la seule compensation du RMI, constaté par le département de Seine-et-Marne. Il a estimé que la simple compensation des dépenses engagées au titre de l'action sociale permettrait ainsi d'améliorer les finances départementales et réduirait la nécessité d'un recours à la péréquation.

M. Vincent Eblé a, en outre, rappelé que le département de Seine-et-Marne avait vu sa population doubler en 40 ans. Or, l'actualisation des dotations versées par l'Etat est beaucoup moins dynamique que cette croissance démographique qui pourtant nécessite de construire des équipements nouveaux, des collèges par exemple, dont le coût de construction pèse sur le budget du conseil général. La question financière doit donc être abordée dans son intégralité et pas seulement sous le seul angle de la péréquation, bien qu'il soit indispensable de traiter de ce sujet au sein de la région Ile-de-France.

Il a considéré que le syndicat Paris métropole constituait un espace de réflexion au sein duquel avaient vocation à siéger tous les départements de la région.

Il a estimé que Paris métropole constituait un outil pertinent de gestion de la métropole susceptible de traiter les questions de l'ensemble de la région, du coeur de l'agglomération à sa périphérie, en tenant compte des particularités de chaque territoire, et a mis en garde contre toute tentative d'encadrer de façon trop stricte le fonctionnement de cette structure.

Il a rappelé que le maire de Paris s'était déclaré prêt à contribuer à un nouveau dispositif de péréquation au sein de la région et que le président du conseil général des Hauts-de-Seine n'avait pas refusé d'examiner cette question.

Il a observé que, de manière globale, Paris métropole devait être considéré comme un mode de gouvernance élaboré de façon négociée et permettant des espaces d'expérimentation. La décentralisation n'oblige pas à la définition d'un modèle unique, mais doit permettre des aménagements tout en respectant un principe d'équité nationale, notamment sur le montant des prestations sociales versées par les collectivités territoriales.

Il a fait part de son opposition à la suppression de la clause générale de compétence qui permet d'adapter les politiques publiques aux spécificités des territoires.

M. Daniel Guiraud a estimé que la question de la péréquation financière pourrait être abordée dans le cadre de Paris métropole, lorsque les collectivités territoriales des Hauts-de-Seine auraient rejoint cette structure. Toutefois, l'État est dans son rôle lorsqu'il décide de modifier, par la loi, les règles de péréquation financière.

Il a souligné que la question financière comportait également un volet de mutualisation des dépenses, susceptible d'être organisé par les collectivités territoriales elles-mêmes, rappelant que les élus membres de Paris métropole avaient affirmé leur volonté de financer des projets communs conçus dans un premier temps autour de trois politiques publiques : les déplacements, le logement et le développement économique.

M. Michel Berson a jugé que le syndicat Paris métropole devait débattre de projets avant de se pencher sur la question de sa gouvernance future, tout en se félicitant que la création de cette structure ait permis l'émergence d'un lieu de débat entre les collectivités territoriales de la région, hors de la présence de l'État. Il a salué le rôle de cet outil pour développer une réflexion commune à la fois sur des projets et sur des modalités de péréquation financière.

Il a rappelé que le fonds de solidarité Île-de-France n'était alimenté que par les contributions des communes, à l'exception des autres niveaux de collectivités territoriales, et estimé l'intervention du législateur nécessaire pour faire évoluer cette situation.

Il a considéré que l'idée de fusionner les trois départements de la petite couronne et Paris soulevait des difficultés insurmontables et devait être écartée, tout comme la création d'une gigantesque communauté urbaine. Ces solutions constituent des outils peu adaptés à la gestion de l'espace francilien. Les élus locaux doivent faire preuve de pragmatisme et d'imagination pour mettre en place de nouvelles modalités de gestion de cet espace.

Il a rappelé que l'Etat avait un rôle fondamental à jouer dans la région capitale mais que ce rôle était différent de celui, très directif, joué dans les années soixante car les effets de la décentralisation devaient être pris en compte.

M. Claude Belot, président, a relevé que la situation des départements de l'Île-de-France était enviable au regard de celle de beaucoup de départements de province, et a invité les intervenants à tenir davantage compte de la réalité de leur situation dans le cadre de leurs revendications. Il a observé que l'Île-de-France concentrait 40 % du produit fiscal pour 25 % de la population. Il a rappelé que beaucoup des problèmes que rencontrait l'Île-de-France étaient pris en charge par le budget de l'Etat et a observé que la région n'avait pas été sollicitée pour financer les lignes TGV. Il s'est interrogé enfin sur la forme que pourrait prendre l'outil de gouvernance qui pourrait résulter de la démarche initiée par Paris Métropole, en observant qu'il pourrait être préjudiciable d'aboutir à une structure qui demeurerait indéterminée.

M. Daniel Guiraud a rappelé que les élus de grande couronne ne revendiquaient pas de péréquation nationale, mais régionale, afin d'aider les territoires les plus démunis, à l'exemple de certains quartiers de Seine-Saint-Denis. Il a évoqué le risque permanent de nouvelles émeutes urbaines pour justifier la nécessité d'obtenir davantage de moyens.

M. Jean-François Voguet a déclaré qu'il existait un certain consensus sur l'analyse de la situation et sur la nécessité d'améliorer le fonctionnement, et a observé que la banlieue concentrait aujourd'hui les problèmes dont la capitale ne voulait plus. Il a rappelé que les décisions structurantes qui déterminaient la réalité de ces territoires n'avaient pas été prises au niveau local, à l'image de la ZUP de Fontenay-sous-Bois, tout en considérant que c'était le développement de la paupérisation qui avait remis en cause le bien-fondé de ces projets. Il a estimé qu'il pouvait y avoir des points d'accord avec les annonces faites par le Président de la République, mais s'est interrogé sur le contenu des projets en matière de développement économique. Rappelant que les réflexions sur la gouvernance avaient été reportées, il a souscrit à la perspective consistant à lancer d'abord un certain nombre de projets. Il a appelé à une large concertation au-delà des clivages habituels et à une clarification du rôle de l'Etat, qui devait préserver son rôle de facilitateur et de financeur de projets. Il a observé que la décentralisation avait été un facteur d'inégalités, en particulier dans le domaine de l'éducation, en indiquant que les dépenses des communes pouvaient varier du simple au double selon leurs moyens. Il a considéré que le syndicat Paris Métropole pourrait, le moment venu, dépasser le simple rôle de syndicat d'études, pour autant qu'il s'attacherait à privilégier une démarche consensuelle. Il a estimé enfin qu'il existait des histoires locales fortes dans les territoires de banlieue qu'il convenait de prendre en compte.

M. Edmond Hervé a indiqué que la France et sa capitale Paris connaissaient aujourd'hui une nouvelle époque et qu'il n'était plus temps de critiquer l'urbanisme hérité du passé. Il a considéré que, si la prise en compte de la réalité des territoires était importante, il ne fallait pas négliger les liaisons entre ceux-ci, et a appelé les élus franciliens à sortir d'une démarche trop autocentrée afin de nourrir leurs réflexions des expériences menées ailleurs, que ce soit en province ou en Europe. Il a marqué son désaccord avec M. Vincent Eblé en considérant qu'il ne pouvait y avoir d'autonomie fiscale dans le cadre du développement du recours aux dotations d'Etat. Il a estimé que la question de la solidarité et de la péréquation ne se résumait pas à la question de la répartition de la taxe professionnelle, mais devait également prendre en compte la qualité des services publics locaux. Il a considéré qu'il n'était pas opportun de consacrer trop de temps, à ce stade, à la question de la gouvernance, et s'est interrogé sur la façon de mettre en oeuvre certaines compétences comme le logement au niveau métropolitain, compte tenu des difficultés qu'il pouvait y avoir pour déterminer les lieux de construction de nouveaux logements.

M. Pierre-Yves Collombat, premier vice-président, a déclaré que si l'on percevait bien les inconvénients que pourrait induire la création d'une nouvelle collectivité territoriale métropolitaine ou d'une communauté urbaine, il lui semblait indispensable de faire émerger de nouveaux lieux de décision, qui pourraient peut-être comporter une dimension thématique. Il s'est interrogé, dans ces conditions, sur l'intérêt de développer des syndicats mixtes pour chaque grande problématique et a estimé qu'il n'était pas possible d'en rester à des démarches fondées uniquement sur des échanges de vues.

M. Michel Berson a considéré que deux types de gouvernances pouvaient être envisagés, l'une fondée sur les territoires et l'autre sur les secteurs d'activités. Il a déclaré que les communautés d'agglomération qui existaient aujourd'hui en Île-de-France n'étaient pas pertinentes, compte tenu de leur périmètre. Evoquant le cas de l'Essonne, il a indiqué qu'une perspective possible consistait dans le rapprochement entre communautés d'agglomérations, à l'image de Massy et Palaiseau, pour constituer une communauté à l'échelle du plateau de Saclay. Il a observé que ces nouvelles communautés d'agglomérations pourraient se constituer sur le territoire de plusieurs départements. Estimant que le STIF fonctionnait de manière satisfaisante, bien que perfectible, il a déclaré que le principal chantier concernait le logement, qui constituait, à ce jour, une compétence répartie entre un trop grand nombre d'acteurs. Revenant sur la question de la solidarité, il a expliqué que le département de l'Essonne avait été amené, aux côtés de la région mais sans le concours de l'Etat, à participer de manière importante au financement des infrastructures, à l'image du Synchrotron SOLEIL et du parc de recherche en sciences et technologies de l'information Digiteolabs. Il a indiqué enfin que les collectivités locales franciliennes s'étaient engagées à financer les deux tiers du plan de développement régional des transports, dont le montant était évalué à 18,5 milliards d'euros.

Mercredi 13 mai 2009

Audition de M. Christian Blanc, secrétaire d'Etat chargé du développement de la région capitale

Sous la présidence de M. Claude Belot, président, au cours d'une séance tenue le matin, la mission a procédé à l'audition de M. Christian Blanc, secrétaire d'Etat chargé du développement de la région capitale.

A titre liminaire, M. Christian Blanc a indiqué qu'il n'aborderait pas lors de cette audition la question de la gouvernance, précisant que la responsabilité qui lui avait été confiée par le Président de la République connaîtrait deux étapes : tout d'abord, la définition d'un projet global concernant Paris et Paris région capitale, puis celle de la gouvernance pour laquelle il serait amené à esquisser des propositions dans quelques mois.

Insistant sur la spécificité de Paris, il a évoqué l'émergence, dans l'économie mondialisée, des villes-monde. Toutefois, il a rappelé que celles-ci existaient déjà à la fin du Moyen-âge et sous la Renaissance, lors du développement du commerce et de l'industrie, évoquant en particulier les foires de Champagne, qui étaient à l'époque au point de liaison entre Gènes et Venise, d'une part, et les villes hanséatiques, d'autre part. Il a noté que le phénomène actuel de mondialisation créait un processus identique : l'apparition de plates-formes urbaines qui ne se caractérisent pas seulement par leur population.

M. Christian Blanc, secrétaire d'Etat, a rappelé l'identification, par l'OCDE, de quatre villes-monde actuellement (Paris, Londres, New-York et Tokyo), ainsi que l'élaboration, dans les très grandes villes, de 80 % des brevets d'invention, en insistant sur l'importance de la capacité de recherche de ces collectivités.

Il a regretté l'absence, en France, de conscience du rôle particulier joué par ces moteurs de la vie moderne. Il a souligné que le développement des très grandes métropoles régionales était lié à cette présence d'une ville-monde constituée par Paris, en relevant l'essor inéluctable des relations entre Londres et Paris et le rôle de Lille comme ville de connexion. M. Christian Blanc a conclu au caractère national du projet économique du Grand Paris. Il a mentionné les portes d'entrée de celui-ci -aéroports et gares- et l'absence de volonté de les valoriser alors que, par exemple, Roissy-Charles-de-Gaulle est le premier aéroport européen de fret et le deuxième au monde. Il a signalé l'existence du plateau scientifique de Saclay, le pôle de la plaine Saint-Denis consacré aux industries de la création, l'implantation autour d'Orly de 50 à 60 % des laboratoires pharmaceutiques sans aucune mise en réseau.

Abordant la question de l'urbanisme, le Secrétaire d'Etat a indiqué que le problème posé aujourd'hui n'était pas d'étendre le Paris haussmannien à l'aire urbaine de 8 millions d'habitants, et estimé que le Grand Paris existerait le jour où la banlieue aurait disparu. Notant que les quatorze premières villes françaises se caractérisaient par une histoire, un grand théâtre, une identité..., il a précisé que l'enjeu urbanistique tournerait autour de la création d'identité. Affirmant la nécessité d'un réseau de transport, M. Christian Blanc a tracé le double schéma élaboré à cette fin : son développement avec la création d'un métro automatique de grande capacité et les rattrapages nécessaires pour remédier aux difficultés de liaison de banlieue à banlieue. Ces projets se concrétiseront par l'établissement d'un réseau stratégique et la poursuite des schémas existants.

Quant au problème de la gouvernance, le Secrétaire d'Etat a relevé la convergence des différents rapports élaborés par le sénateur Philippe Dallier au nom de l'Observatoire sénatorial de la décentralisation, le comité Balladur et de l'initiative du Maire de Paris qui, tous, établissent la reconnaissance du fait urbain et la nécessité d'instituer des formes de gouvernance démocratique. Il a estimé que la démarche devait partir des projets, leur mise en oeuvre permettant de déterminer les modalités de la gouvernance et de renforcer les solidarités.

En conclusion, il a souligné le pragmatisme de la méthode retenue par le Président de la République pour conduire la réforme de la région capitale.

Interrogé par M. Yves Krattinger, rapporteur, concernant le renforcement indispensable des solidarités et la question du financement des nouvelles infrastructures de transports, M. Christian Blanc, secrétaire d'Etat, a indiqué que tous les élus franciliens évoquaient la question de la solidarité. Il a expliqué, concernant la Seine-Saint-Denis, qu'il s'agissait du territoire qui connaissait le développement le plus important en Île-de-France, en observant que c'était la zone située entre l'aéroport de Roissy et les espaces urbains qui se développait le plus, en dépit du fait que ce développement n'était pas encouragé depuis des décennies. Il a indiqué que, si l'emploi augmentait autour de Roissy et Villepinte, des territoires comme Clichy et Montfermeil restaient enclavés, ce qui constituait un facteur de déséquilibre, de manque de solidarité et d'exclusion pour plusieurs centaines de milliers de personnes. Il a expliqué qu'un des objectifs devait être le désenclavement de ces territoires et leur articulation avec les zones de développement économique. Il a considéré que la péréquation fiscale devait également trouver sa réponse dans le développement des territoires.

Interrogé sur le financement des nouvelles infrastructures de transports, M. Christian Blanc a déclaré que le coût du réseau de transports primaires envisagé était évalué à 21 milliards d'euros, qui seraient financés de la même manière que le métropolitain parisien au début du siècle dernier, c'est-à-dire au moyen d'une dotation en capital public versée par l'Etat, qui serait complétée par des emprunts sur cinquante ou soixante ans. Il a expliqué que la région et les départements auraient la possibilité de participer à ce financement et à la détermination du projet, notamment pour ce qui est de la tarification.

M. Edmond Hervé a approuvé l'idée selon laquelle l'importance d'une ville était moins liée à sa démographie et à sa densité qu'à l'intensité de son activité. Il a rappelé son hostilité à toute spécialisation excessive des territoires et a dénoncé les effets de frontière. Evoquant la méthode, il a invité le ministre à ne pas négliger l'expérience des métropoles de province qui sont déjà familières des stratégies de développement polycentrique. Il a regretté que la notion de « mise en réseau » ne soit pas suffisamment prise en compte en France. Concernant les transports, il a expliqué qu'ils avaient pour objectif de raccorder les espaces les uns aux autres, ce qui constituait un facteur de dynamisme. Il a considéré que les investissements dans l'intermodalité étaient susceptibles de renforcer l'estime que les Franciliens avaient d'eux-mêmes, ainsi que l'identité des territoires. Il a invité le ministre à ne pas fixer de date-butoir pour la réalisation des travaux, en rappelant qu'il lui avait fallu treize ans pour bâtir le métro de Rennes.

En réponse à M. Edmond Hervé, M. Christian Blanc, secrétaire d'Etat, a rappelé qu'il avait fallu seulement quatre ans pour construire les 46 kilomètres du métropolitain parisien, « au pic et à la pioche ». Il a indiqué qu'il serait nécessaire de raccourcir les délais de procédure en recourant à la loi, afin de pouvoir débuter les travaux dans trois ans, et a souhaité que dix tunneliers puissent travailler de concert.

M. Philippe Dallier a fait part de sa satisfaction que le ministre considère que la gouvernance actuelle n'était pas tenable à long terme et que les règles de la péréquation devaient changer. Il a regretté l'immobilisme des élus locaux franciliens qui estimaient que « tout allait bien ». Il a fait part de son inquiétude que les investissements massifs de l'Etat aient pour conséquence, comme dans les années 1960, de créer de la richesse à des endroits donnés sans cohérence globale pour le développement et la solidarité. Il a marqué son désaccord avec l'idée selon laquelle la banlieue ressemblerait à un chaos et a indiqué que les problèmes de ses habitants ne se limitaient pas au transport, mais concernaient également le social et l'éducation. Il a souhaité que l'on puisse apporter à tous les habitants le même niveau de service et a considéré que la création du Grand Paris était de nature à permettre un meilleur partage de la richesse. Il a déclaré que le développement des petites intercommunalités dans la première couronne ne constituait pas une bonne réponse et avait en réalité pour objectif d'empêcher l'émergence du Grand Paris. Evoquant le discours du chef de l'Etat, dans lequel celui-ci a annoncé la construction de 70 000 logements, à travers notamment la déréglementation des règles d'urbanisme, il a estimé qu'il conviendrait de remettre en cause la réalisation des PLU au niveau communal. Il s'est interrogé sur les avantages respectifs de la création d'un syndicat régional concernant le logement ou d'une collectivité territoriale de plein exercice.

M. Jean-François Voguet s'est interrogé sur le rôle de l'Etat en observant que, dans les années 1960, celui-ci avait créé des villes nouvelles sans leur accorder les moyens de fonctionner. Il a considéré qu'il était nécessaire que les citoyens adhèrent à un projet. Il a souhaité connaître dans quelle mesure les 70 000 logements annoncés répondraient aux besoins des familles modestes et s'il y aurait des dispositions à cet égard dans le futur projet de loi. Evoquant la question de l'urbanisme, il a observé que l'augmentation de la densité à travers la libération du foncier et les modifications des COS avaient inéluctablement pour conséquences une augmentation des besoins d'équipement, notamment en termes d'écoles, de voirie et de stationnement.

M. Jean-Pierre Vial a fait part de son admiration concernant les délais envisagés pour le début des travaux, compte tenu du temps qui a été nécessaire pour développer le projet de liaison à grande vitesse Lyon-Turin. Il s'est interrogé sur le développement de la plate-forme de Saclay.

M. Christian Blanc, secrétaire d'Etat, a déclaré partager le sentiment de M. Philippe Dallier selon lequel un développement économique qui ne profiterait qu'à quelques territoires constituerait un échec. Evoquant la question du logement et de l'urbanisme, il a expliqué que si les objectifs avaient été identifiés, il restait encore à déterminer la méthode, sachant que les capacités foncières existaient. Il a expliqué que l'Etat n'avait pas l'intention de remettre en cause le statut du STIF, mais qu'il envisageait la création d'un établissement public qui serait chargé spécifiquement des nouveaux investissements envisagés. Il a regretté néanmoins que le STIF ne se préoccupe pas aujourd'hui de la question des transports au-delà des frontières régionales et a considéré qu'il serait également nécessaire qu'il confie des missions à des autorités organisatrices des transports de second rang, par exemple en matière d'organisation des réseaux de bus.

Concernant la gouvernance, M. Christian Blanc a fait part de sa conviction que de nombreux élus locaux attendaient une évolution permettant de débloquer le système. Il a souligné l'importance du rôle des maires en Île-de-France et a considéré que l'identité de la banlieue ne pouvait reposer uniquement sur son histoire, mais devait pouvoir s'incarner, par exemple, dans la création d'équipes de football ou de rugby professionnelles, comme c'est le cas dans les très grandes métropoles. Il a estimé que les maires avaient jusqu'à présent un peu été oubliés dans la prise de décision relative à l'avenir de la métropole et a indiqué qu'il ferait des propositions concernant l'évolution de la gouvernance fin 2009 - début 2010.

Mercredi 20 mai 2009

Audition de M. Jean-Louis Sanchez, délégué général de l'observatoire national de l'action sociale décentralisée (ODAS)

Sous la présidence de M. Yves Krattinger, rapporteur, la mission a procédé à l'audition de M. Jean-Louis Sanchez, délégué général de l'observatoire national de l'action sociale décentralisée (ODAS).

Après avoir rappelé les circonstances ayant conduit à la création de l'observatoire national de l'action sociale décentralisée (ODAS) vingt ans auparavant, M. Jean-Louis Sanchez, délégué général de l'ODAS, a souligné la qualité de l'implication des départements en matière d'action sociale depuis la mise en oeuvre des premières lois de décentralisation en 1982-1983.

L'évaluation de ces politiques permet d'établir trois constats. Tout d'abord, contrairement aux craintes exprimées lors du vote des lois de décentralisation, les départements ont considérablement développé leurs interventions dans le domaine social, ce qui a permis une forte réduction des inégalités au sein de ces territoires, mais également entre les différents départements. Cette évolution s'explique par le transfert de compétences spécifiques aux conseils généraux, mais également par le développement de politiques locales mieux adaptées aux besoins sociaux exprimés par les territoires. Enfin, le développement de cette politique sociale s'adresse à tous les publics, les personnes âgées et handicapées en priorité. Ces dernières ont d'ailleurs bénéficié d'une forte augmentation des crédits consacrés à la prise en charge du handicap.

Il a fait part de son inquiétude sur les modalités de financement de cette politique d'action sociale sur laquelle la marge d'autonomie des départements est réduite, alors que ces dépenses représentent près de 40 % des budgets départementaux.

M. Jean-Louis Sanchez a insisté sur la nécessité d'organiser une meilleure coopération entre les communes et les départements dans le domaine social, notamment au niveau des grandes agglomérations.

Il a fait valoir, en effet, que les communes développent à leur tour des politiques sociales importantes, dont l'approche est plus sociétale, plus globale, que celles des départements puisqu'elles incluent des dimensions culturelles ou sportives et développent la notion de « prévenance ». L'évaluation de l'action sociale des communes doit donc aller au-delà de la simple prise en compte de l'activité des centres communaux d'action sociale (CCAS).

Il a estimé que les pouvoirs publics ont eu tort de procéder à une décentralisation du financement de certaines prestations sociales, notamment du revenu minimum d'insertion (RMI). De telles allocations doivent, en effet, bénéficier d'un financement national garanti par l'Etat.

Il a indiqué que le schéma de la gouvernance de la caisse nationale pour la solidarité et l'autonomie (CNSA) fait l'objet d'une adhésion des collectivités territoriales. Ce mode de gouvernance pourrait être étendu à l'ensemble des branches de la sécurité sociale. Des problèmes de coopération sont en effet constatés entre les collectivités territoriales et les organismes de sécurité sociale, notamment entre les communes et les caisses d'allocations familiales. Cette situation rend nécessaire l'instauration d'instances de coordination.

M. Jean-Louis Sanchez a estimé que, outre une réflexion sur la clarification des compétences entre les différents acteurs, les pouvoirs publics devaient également s'interroger sur l'objectif des politiques sociales.

En conclusion, il a jugé dangereux de bouleverser la répartition des compétences en matière d'action sociale en période de crise économique.

M. Yves Krattinger, rapporteur, a indiqué que la question du financement des minima sociaux constituait un sujet particulièrement important en matière de finances départementales. C'est effectivement le cas du RMI, mais également de l'APA, qui doit légalement être financé à 50 % par la solidarité locale. Or, des inégalités entre départements sont constatées, car les départements ayant les populations les plus âgées doivent supporter une charge financière plus lourde, alors que, parallèlement, leur dynamisme économique est moindre.

Abordant la question du rôle de la CNSA, il a rappelé que ses interventions au niveau départemental font l'objet de critiques de la part des acteurs locaux, qui se considèrent alors plus comme des services déconcentrés que comme des collectivités territoriales de plein exercice, tant la marge d'autonomie qui leur est laissée pour la gestion des maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) est réduite.

Il a rappelé que 98 % des dépenses sociales engagées par les départements étaient des dépenses d'action sociale légale, ce qui signifie que le domaine d'intervention des départements est déterminé par la loi.

Enfin, il a souhaité connaître l'avis de l'ODAS sur le schéma proposé par le comité Balladur tendant à transférer des compétences sociales des départements aux métropoles, après avoir mis en doute l'avantage que cela représenterait en termes d'équité territoriale.

M. Jean-Louis Sanchez a rappelé que la part des dépenses prises en charge par l'Etat au titre du financement des prestations sociales est en baisse constante. Cette prise en charge représente aujourd'hui 30 % du financement de l'APA ; elle est passée en quelques années de 55 % à 46 % pour la prestation compensatoire du handicap. Il a souhaité que l'Etat respecte ses engagements.

Il a insisté sur la nécessité de mettre en oeuvre une meilleure coordination des interventions des départements et des agglomérations dans le domaine social. Cette collaboration doit permettre une optimisation des interventions de chacun des acteurs, et notamment des départements.

Il s'est déclaré réservé sur la question de la délégation des compétences des départements vers les métropoles, estimant que cette question devait faire l'objet d'une évaluation préalable. Il a indiqué que des exemples de collaborations efficaces pouvaient être mis en exergue mais sans être représentatifs de la situation réelle, qui se caractérise par une quasi-absence de collaboration entre départements et agglomérations urbaines. Il a néanmoins estimé que les métropoles pourraient se voir confier des compétences en matière d'action sociale.

M. Yves Krattinger, rapporteur, a estimé que le transfert de compétences sociales des départements vers les métropoles soulevait d'importantes interrogations, notamment au regard du potentiel fiscal de chacun des acteurs. Il a observé que les pouvoirs publics devaient être très attentifs à ne pas créer, d'une part, une collectivité territoriale dotée de moyens financiers conséquents en provenance de l'aire urbaine et capable de supporter le poids des politiques sociales, voire de mener une politique sociale propre au-delà de ce que la loi lui impose, et, d'autre part, une collectivité territoriale rurale, dotée de faibles moyens financiers mais devant mener une politique sociale active destinée à répondre aux besoins d'une population plus âgée.

Il a estimé que le rôle des métropoles devait plutôt être axé sur le développement économique qu'orienté vers les politiques sociales.

M. Jean-Louis Sanchez a rappelé que l'ODAS avait dressé un bilan particulièrement flatteur de l'action des départements en matière d'action sociale. Il a jugé que la prise en charge des prestations sociales constituait une question cruciale pour les finances départementales.

Il a indiqué que les transferts de compétences des départements vers les métropoles ne devaient pas concerner les domaines de la protection de l'enfance ou de l'action en direction des publics en détresse, mais plutôt permettre le développement de politiques sociales plus globales qui intègrent une dimension culturelle, sportive et tiennent compte des actions menées en matière de politique de la ville.

Il a indiqué que les maires souhaitaient une coopération approfondie avec les départements sur de tels sujets.

M. Yves Krattinger, rapporteur, s'est interrogé sur les effets de ces délégations en matière institutionnelle, la création de services redondants au niveau municipal se traduisant par des coûts financiers supplémentaires.

M. Claude Berit-Débat a, à son tour, relevé qu'un transfert des compétences d'action sociale du département vers les métropoles posait un problème de solidarité financière entre les territoires, et notamment entre les zones urbaines et les zones rurales.

Il a souligné par ailleurs que toutes les agglomérations ne disposaient pas de moyens suffisants pour développer des politiques sociales novatrices.

Il a, par ailleurs, souhaité connaître la définition de la notion de « prévenance ».

M. Jean-Louis Sanchez a indiqué que la notion de prévenance, d'origine québécoise, définissait une politique active dont l'objectif est le bien-être des personnes.

Il a estimé que le rôle des communes en matière de politique sociale était sous-évalué et que la coopération entre communes et départements en la matière devait être renforcée. Les maires doivent être incités à développer des politiques plus ambitieuses afin de lutter contre le délitement du lien social et contenir l'augmentation des situations de grande précarité, cette évolution n'étant pas source de conflits d'intérêt entre les départements et les communes.

Audition de M. Guy Pustelnik, directeur de l'établissement public interdépartemental de Dordogne, délégué général de l'association française des établissements publics territoriaux de bassins (EPTB)

Sous la présidence de M. Yves Krattinger, rapporteur, la mission a procédé, ensuite, à l'audition de M. Guy Pustelnik, directeur de l'établissement public interdépartemental de Dordogne, délégué général de l'association française des établissements publics territoriaux de bassins (EPTB).

M. Guy Pustelnik a rappelé, au préalable, que la création des EPTB, dès le milieu des années 1960, avait apporté une réponse institutionnelle à un besoin de coordination pour faire face aux problèmes de gestion de l'eau, dans un souci d'adaptation aux besoins du territoire, de planification, de solidarité et, le cas échéant, de coordination interdépartementale. Soulignant la nécessité d'aborder ces questions à partir de la bonne échelle, il a regretté que les schémas directeurs d'aménagement et de gestion des eaux (SDAGE), en cours d'élaboration, soient peu axés sur la territorialisation de ces politiques et manquent de vision stratégique.

M. Yves Krattinger, rapporteur, a voulu savoir quelle pourrait être la répartition des compétences dans le domaine de l'eau, qui relève également de l'aménagement du territoire.

M. Guy Pustelnik ayant indiqué que les communes restaient au centre de ces politiques, notamment en matière d'assainissement, M. Yves Krattinger, rapporteur, a estimé que les intercommunalités devraient également être incitées à intervenir.

Puis M. Guy Pustelnik a souligné la pertinence, d'une part, du niveau départemental pour coordonner l'alimentation en eau potable, et, d'autre part, de l'échelle du bassin versant en matière de lutte contre les inondations, de protection coordonnée des zones humides et d'étiages. Par ailleurs, les conventionnements entre EPTB et communautés de communes présentent un grand intérêt. Il a fait observer qu'un grand nombre de syndicats de bassins rencontraient des difficultés financières, puis a rappelé que l'entretien des cours d'eau incombait aux riverains, en vertu du droit existant. Il a attiré l'attention sur les difficultés que rencontrent également les EPTB, en l'absence de modes de financement, et a souhaité que ces établissements deviennent des relais des agences de l'eau. Par ailleurs, il a regretté que ces dernières ciblent à présent leurs financements sur les priorités fixées par la directive européenne relative aux eaux résiduaires urbaines (ERU), au détriment, notamment, des eaux de baignade.

M. Yves Krattinger, rapporteur, s'est demandé s'il ne serait pas plus pertinent d'inciter à la coopération entre les intercommunalités plutôt que de recourir à des syndicats de bassins. Il a relevé une évolution des mentalités quant à l'obligation d'entretien des cours d'eau par les riverains. Enfin, il s'est interrogé sur le niveau du prix de l'eau.

M. Claude Bérit-Débat a souhaité que la mission intègre la question du financement dans ses préconisations, soulignant les problèmes liés au désengagement de l'Etat, notamment en termes d'impact sur les charges à supporter par les communes et de péréquation.

M. Guy Pustelnik a indiqué qu'il existait de grandes différences de prix de l'eau. Puis il a souhaité qu'une réflexion soit menée en vue de définir une stratégie sur les grands fleuves qui structurent notre territoire. Il a rappelé, par ailleurs, que l'Etat envisageait de transférer aux collectivités territoriales le domaine public fluvial, sans que soit réellement précisé le champ de ce transfert.

M. Yves Krattinger, rapporteur, a relevé que, si ce transfert intervenait, il devrait également concerner les concessions. Puis, M. Claude Bérit-Débat a insisté sur la nécessaire prise en compte de l'état du domaine concerné.

Audition de M. Jean-Pierre Dufès, vice-président de l'association des maires et élus des communes associées de France (AMECAF

Sous la présidence de M. Yves Krattinger, rapporteur, la mission a ensuite procédé à l'audition de M. Jean-Pierre Dufès, vice-président de l'association des maires et élus des communes associées de France (AMECAF).

M. Jean-Pierre Dufès a expliqué qu'il existait 744 communes associées, dont 150 étaient membres de l'AMECAF. Il a indiqué qu'il était maire-délégué de Terves, commune associée à Bressuire.

Il a considéré que le dispositif de fusion-association créé par la loi Marcellin de 1971 constituait une étape transitoire avant la fusion qui avait perdu beaucoup de son intérêt. Il a indiqué qu'il y avait eu beaucoup de séparations. Interrogé par M. Yves Krattinger, rapporteur, sur les évolutions à engager, il a évoqué le fait que le maire délégué d'une commune associée n'était pas forcément la personne la mieux élue sur le territoire considéré, ce qui pouvait constituer un problème. Il a également observé qu'il n'était pas opportun que la commune associée soit représentée au niveau de la communauté de communes seulement avec une voix consultative.

M. Jean-Pierre Dufès a fait trois propositions pour faire évoluer le statut de commune associée. Il a proposé, tout d'abord, que la population soit systématiquement consultée sur un projet de fusion simple. Dans l'hypothèse où la fusion serait refusée, il a préconisé le retour à l'indépendance pleine et entière de la commune associée, celle-ci devant néanmoins intégrer la communauté de communes dont était membre son ancienne commune de rattachement. Il a évoqué enfin la possibilité de s'inspirer de la loi PLM (Paris-Lyon-Marseille) afin de transformer les communes associées en arrondissements, certains élus siégeant également au conseil municipal de la commune et au conseil de la communauté de communes.

En réponse à M. Yves Krattinger, rapporteur, M. Jean-Pierre Dufès a estimé que les communes qui avaient appliqué le dispositif de fusion-association choisiraient aujourd'hui l'intercommunalité si elle n'avait pas précédemment fait ce choix.

Audition de M. Emile Blessig, député du Bas-Rhin, président,
et de Mme Catherine Sadon, directrice de l'association de promotion et de fédération des pays

Sous la présidence de M. Yves Krattinger, rapporteur, la mission a ensuite procédé à l'audition de M. Emile Blessig, député du Bas-Rhin, président, et de Mme Catherine Sadon, directrice de l'association de promotion et de fédération des pays.

M. Yves Krattinger, rapporteur, a d'abord rappelé que détracteurs et défenseurs des pays s'affrontaient dans le cadre des débats actuels sur l'évolution des structures territoriales. Dans ce contexte, il a souhaité connaître les réflexions menées sur l'avenir de ces institutions par l'association de promotion et de fédération des pays.

M. Emile Blessig a d'abord souhaité présenter quelques données chiffrées, permettant de mesurer l'ancrage des pays dans le paysage territorial français : 80 % du territoire est couvert par les pays, ce qui représente 47 % de la population, soit 23 millions de personnes et plus de 29 000 communes. Le plus grand pays (Rennes) compte 450 000 habitants et le plus petit 6 250 habitants. Leur superficie varie entre 150 et 4 700 km² et ils rassemblent entre 1 et 20 groupements de communes. Il a ensuite rappelé que les pays n'étaient pas des collectivités territoriales. A cet égard, il ne lui est pas apparu légitime qu'ils soient évoqués dans le débat sur la réduction du nombre de niveaux de collectivités.

Les pays doivent être évalués en fonction des missions qu'ils remplissent : ce sont en effet, selon le souhait du législateur, des administrations de mission et non de gestion. Dans cette optique, les pays sont des outils à la disposition des intercommunalités et déploient leur activité sur un territoire infra-départemental ou infra-régional. La pertinence de ce territoire de mission se mesure à l'aune de quatre critères : une superficie suffisante, un nombre d'habitants de l'ordre de 100 000, la présence d'activités économiques et des services publics indispensables, ainsi que le sentiment, pour les habitants, d'appartenir à un territoire ayant une personnalité propre.

Il a jugé, par ailleurs, indispensable au bon fonctionnement d'un pays que la région et le département en comprennent et en appuient la démarche : c'est à cette condition que des projets peuvent être portés par ce pays à une échelle plus large que celle d'une seule communauté de communes.

M. Yves Krattinger, rapporteur, a estimé que certains pays faisaient preuve de beaucoup de dynamisme, notamment en matière de réflexion stratégique ou de coordination des actions des communautés de commune. D'autre pays, au contraire, ont seulement joué le rôle de « boîte aux lettres » pour la distribution ponctuelle de subventions à leurs membres. Il a, par ailleurs, évoqué l'éventualité d'une institutionnalisation de la coopération entre les départements et les régions par le biais d'un conseil des exécutifs. Compte tenu de ces éléments, il a interrogé l'intervenant sur l'utilité de préserver un cadre législatif pour les pays : ne suffit-il pas de faire confiance aux collectivités et à leur désir de coopérer dans un cadre plus large que celui de l'intercommunalité ?

M. Emile Blessig a estimé nécessaire de préserver les dispositions législatives concernant les conseils de développement, organes de réflexion stratégique d'une grande utilité, parfois vus d'un mauvais oeil par les collectivités de niveau supérieur. En outre, l'expérience montre que les collectivités territoriales, s'appuyant sur la clause de compétence générale, font souvent passer la défense de leur périmètre d'action avant la coopération inter-collectivités. Dès lors, il a souhaité le maintien d'un cadre législatif permettant de soutenir les initiatives de coopération entre groupements de communes, notamment en milieu rural, par exemple en matière de haut débit, d'aménagement sanitaire ou d'emploi, surtout lorsque ces initiatives ne sont pas reconnues par le département ou la région.

M. Yves Krattinger, rapporteur, a, par ailleurs, estimé que les pays pouvaient constituer des territoires à l'identité forte, que les citoyens s'approprient et dont les actions en matière de développement touristique s'avèrent souvent utiles.

M. Emile Blessig a confirmé que l'économie touristique pouvait recevoir un soutien efficace de la part des pays, en incitant les agents économiques à coopérer et à élargir leur action.

Mercredi 10 juin 2009

Audition de M. Alain Even, président de l'assemblée des conseils économiques et sociaux régionaux de France

Sous la présidence de M. Yves Krattinger, rapporteur, au cours d'une première réunion tenue le matin, la mission a procédé à l'audition de M. Alain Even, président du conseil économique et social de Bretagne, président de l'assemblée des conseils économiques et sociaux de France.

M. Alain Even, président de l'assemblée des conseils économiques et sociaux de France, a indiqué que l'association qu'il préside regroupait l'ensemble des conseils économiques et sociaux régionaux (CESR). Les membres de cette association ont souhaité élaborer des propositions susceptibles de contribuer à la réflexion sur la réforme territoriale annoncée par le Président de la République.

L'assemblée des CESR n'a pas souhaité se prononcer sur le bien-fondé de la suppression d'un échelon territorial, mais a considéré qu'une réforme conduisant à clarifier la répartition des compétences entre les acteurs était nécessaire pour assurer une meilleure articulation des interventions de ceux-ci et éviter une dispersion des moyens. Cette réforme devrait permettre de conforter la région, qui s'est affirmée comme un acteur responsable, dans ses compétences et ses réalisations en matière de développement économique, de formation professionnelle, afin de lui permettre de jouer un rôle de mise en cohérence des actions au sein de l'espace régional.

L'assemblée des CESR s'est également déclarée favorable au renforcement de l'approche consultative, par le maintien ou le renforcement des conseils de développement existant au niveau des pays et des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI). Elle souhaite que la composition des CESR soit ajustée pour être plus représentative de la société. Or, il a regretté que ces questions n'aient pas été évoquées jusqu'à présent.

M. Alain Even, président de l'assemblée des conseils économiques et sociaux régionaux de France, a souligné que la création des conseillers territoriaux pourrait avoir une influence sur le rôle des CESR, notamment en les conduisant à se prononcer sur la politique menée au niveau départemental.

M. Yves Krattinger, président, a souhaité disposer de précisions sur les positions adoptées par l'assemblée des CESR de France, notamment sur le périmètre de la réforme territoriale évoquée, sur le rôle et la place des CESR comme porteurs de l'intérêt régional et sur leur articulation avec le rôle des conseils régionaux, ainsi que sur leurs relations avec les départements, leur positionnement comme acteurs stratégiques en charge de la préparation de l'avenir ou comme acteurs de proximité.

Mme Anne-Marie Escoffier a souligné la nécessité d'examiner les effets de la révision générale des politiques publiques (RGPP) menée par l'État sur la question de l'enchevêtrement des compétences entre État et collectivités territoriales.

M. Alain Even a souligné que les propositions de l'assemblée des CESR étaient le fruit d'un consensus et n'avaient pas vocation à se présenter sous la forme d'un projet de réforme concurrent de ceux élaborés par le Gouvernement ou le Parlement. L'assemblée des CESR souhaite simplement souligner les effets dommageables provoqués par l'absence de coordination de certaines politiques locales. C'est le cas, par exemple, pour les actions menées en réponse à la crise économique par les régions, les départements et les intercommunalités de grande taille. L'absence de coordination entre les différents projets peut se traduire par des interventions redondantes. C'est également le cas dans le domaine des transports puisque chaque région compte en moyenne quatre opérateurs distincts, ce qui ne favorise ni la concertation, ni l'intermodalité.

Mme Anne-Marie Escoffier a voulu savoir si c'était le nombre d'opérateurs qui soulevait des difficultés ou l'absence de concertation entre les différents acteurs. Elle a indiqué que, dans la région Midi-Pyrénées, malgré un contexte relationnel difficile, les acteurs définissent des politiques complémentaires.

M. Alain Even a estimé que la répartition des compétences entre l'État et les collectivités territoriales devait être clarifiée. Il a souligné que, en Bretagne, de nombreux acteurs, dont le CESR, souhaitaient que la région puisse disposer de compétences en matière de gestion de l'eau ou de protection du littoral afin de faire valoir une approche différente de celle de l'État et d'accélérer la mise en oeuvre de certains projets qui sont aujourd'hui retardés par la complexité des relations entre l'État et les collectivités territoriales.

M. Yves Krattinger, président, s'est interrogé sur les moyens d'organiser les relations entre territoires au sein d'une région, ainsi que sur l'opportunité de transférer les services de l'État aux régions lorsque les compétences correspondantes ont été transférées. Il a évoqué la perspective de création d'un conseil régional des exécutifs.

M. Alain Even a indiqué que de nombreuses difficultés subsistaient en matière de répartition des compétences. C'est le cas en matière de tourisme, tout comme en matière de développement économique. Il a estimé difficile pour une entreprise souhaitant bénéficier d'aides au titre du développement des pôles de compétitivité de devoir s'adresser à trois guichets distincts installés aux niveaux communal, départemental et régional.

Il a souhaité que les schémas de cohérence territoriale (SCOT) soient articulés avec le schéma régional d'aménagement du territoire, afin d'éviter des contradictions entre ces documents.

Il a émis le souhait que les CESR puissent être associés à la définition de l'intérêt régional et participer aux travaux du conseil régional des exécutifs.

Enfin, il s'est prononcé en faveur d'un mode de scrutin qui permette de dégager des majorités au niveau régional estimant que toute autre solution constituerait un retour en arrière.

M. Yves Krattinger, président, a jugé que le mode de scrutin actuel au niveau régional aboutissait à une sous-représentation des minorités mais garantissait l'existence d'une majorité de gestion.

M. Alain Even a regretté que les débats sur la réforme territoriale n'évoquent pas la question de l'association de la société dans ses différentes formes : conseils de quartier, conseils de développement ou CESR.

Mme Anne-Marie Escoffier s'est déclarée favorable à un débat sur le rôle des conseils de développement qui assurent la représentation de la société civile et du monde économique. Elle s'est interrogée sur les moyens d'assurer une meilleure représentation de la société civile dans la gouvernance locale et sur l'opportunité de transformer les CESR en conseils régionaux du développement.

M. Alain Even a indiqué que la majorité des CESR entretenaient des relations régulières avec les conseils de développement des pays et des EPCI et leur apportaient un soutien méthodologique. L'évolution de l'intercommunalité pourrait modifier le rôle des conseils de développement qui verraient leur rôle renforcé, notamment en prévoyant des saisines obligatoires de ces structures.

A titre d'exemple, il a indiqué que, en Bretagne, le conseil régional ne signe aucune convention avec les pays sans avoir préalablement consulté le conseil de développement de la structure concernée.

Les CESR peuvent également jouer un rôle de référent au niveau régional pour les multiples organes consultatifs qui sont créés, tels que les conférences régionales de santé. Il conviendrait également de redéfinir le rôle des CESR dans la nomination des membres de ces structures.

M. Claude Bérit-Debat a souligné l'existence de fortes hétérogénéités dans les modalités de nomination et de fonctionnement des conseils de développement. Il s'est prononcé en faveur d'une harmonisation de ces procédures et s'est interrogé sur l'origine des ressources financières qui leur sont affectées, considérant qu'il n'appartenait pas nécessairement aux collectivités territoriales de financer ces conseils consultatifs.

M. Alain Even a distingué la situation des CESR dont les modalités de composition sont définies par la loi, des conseils de développement existant dans les EPCI ou les pays. Il a fait part de son accord sur la nécessité d'harmoniser la nomination de leurs membres.

M. Yves Krattinger, président, a rappelé qu'il était parfois difficile de trouver un président pour ces conseils de développement. Il a ensuite voulu connaître l'opinion de l'orateur sur la répartition des rôles entre région et départements.

M. Alain Even a estimé que la région constituait l'échelon pertinent pour les questions d'avenir et le développement des grandes infrastructures. A ce titre, il a estimé qu'elles devraient disposer d'une compétence élargie en matière de développement économique, social, culturel et environnemental, ainsi que pour l'enseignement supérieur et la recherche. Certains domaines, tel le développement économique, devraient donc faire l'objet de clarification.

Il a reconnu que, après avoir considéré que la région et les EPCI devraient suffire à gérer le territoire, il admettait aujourd'hui que, dans les zones les moins denses, l'action du département était fondamentale pour préserver l'équité territoriale et assurer la cohésion sociale tandis que l'animation civique relève de la responsabilité des communes. La région ne peut assurer l'action sociale de terrain.

* 1 Cf. compte rendu en annexe.

* 2 Cf. infra, la contribution du groupe UMP du Sénat.

* 3 Mission commune d'information sur la situation des départements d'Outre-mer, créée le 18 mars 2009 , Président : M. Serge Larcher (Soc., Martinique) ; Rapporteur : M. Eric Doligé (UMP, Loiret).

* 4 Cf. communiqué du 26 mars 2009.

* 5 Cf communiqué du 15 mai 2009.

* 6 Cf. communiqué du 5 mars 2009.

* 7 Cf. communiqué du 5 mars 2009.

* 8 Cf. débats Sénat du 18 mars 2009, p. 3108.

* 9 Cf. auditions par la mission du 29 avril 2009.

* 10 Voir le rapport d'étape de votre mission n° 264, tome I, p. 118 et suivantes.

* 11 Voir en particulier le compte rendu de la réunion du 3 juin 2009.

* 12 Voir le compte rendu de la réunion du 1 er avril 2009.

* 13 Discours du Président de la République du 29 avril 2009 à la Cité de l'architecture et du patrimoine

* 14 Voir le compte rendu de la réunion du 12 mai 2009.

* 15 Voir le compte rendu de l'audition du 1 er avril 200.9

* 16 Idem.

* 17 A défaut d'une telle solution, les conseillers fléchés pourraient l'être sur toute la liste des candidats et il y aurait alors un risque que la liste se voit attribuer un siège supplémentaire de conseiller communautaire sans que le conseiller fléché correspondant ait été élu en tant que conseiller municipal. De la même manière, l'organisation du remplacement des conseillers communautaires par le suivant de liste poserait problème si ce suivant de liste « fléché » ne correspondait pas au conseiller municipal appelé à remplacer le conseiller démissionnaire dans ses seules attributions de conseiller municipal.

* 18 Ce ne sera pas le cas dans les communautés urbaines, compte tenu du mode de désignation des conseillers communautaires en vigueur en leur sein (à partir de deux postes : scrutin de liste à un tour, à la représentation proportionnelle à la plus forte moyenne).

* 19 Propositions de loi visant à confier à des conseillers territoriaux l'administration des départements et des régions , déposées l'une à l'Assemblée nationale par MM. Jean-François Mancel et Jérôme Bignon (n° 655 - XIII e législature) et l'autre au Sénat par M. Charles Pasqua et plusieurs de ses collègues (n° 21 - 2008-2009).

* 20 Cf. réunion du 10 juin 2009, Bulletin des commissions.

* 21 Les conseillers régionaux étant actuellement au nombre de 1 880 et les conseillers généraux à celui de 4 037, ceci reviendrait en augmentant les premiers d'un millier et en diminuant les seconds du même nombre, à retenir à peu près le chiffre de 3 000 conseillers territoriaux.

* 22 Cf. art. 8 de la loi n°72-619 du 5 juillet 1972 portant création et organisation des régions , codifié à l'article 4221-3 du CGCT : « [le conseil régional] propose aux collectivités territoriales de la région toutes mesures tendant à favoriser la coordination des investissements publics locaux dans la région ».

* 23 Cf. , pour les départements, l'article L. 3142-1 du CGCT, qui trouve son origine dans la loi n° 82-213 du 2 mars 1982 relative aux droits et libertés des communes, des départements et des régions ; et, pour les régions, l'article L. 4152-1 du CGCT, qui reprend des dispositions prévues à l'origine par la loi précitée n°72-619 du 5 juillet 1972.

* 24 Cf. l'article L. 4421-3 du CGCT, créé par la loi n° 2002-92 du 22 janvier 2002 relative à la Corse .

* 25 Aux termes du deuxième alinéa de l'article 72 de la Constitution (introduit par la loi constitutionnelle n° 2003-276 du 28 mars 2003), « les collectivités territoriales ont vocation à prendre les décisions pour l'ensemble des compétences qui peuvent le mieux être mises en oeuvre à leur échelon ».

* 26 Rappelons que la loi du 13 août 2004 a transféré aux départements les crédits de l'Etat dans ce domaine.

* 27 Article L. 3232-1-1 du code général des collectivités territoriales.

* 28 Rapport d'étape sur la réorganisation territoriale n°264 (2008-2009), Mission temporaire sur l'organisation et l'évolution des collectivités territoriales, tome 1, p. 125 et suivantes.

* 29 Le deuxième aliéna de l'article 72 dispose que « Les collectivités territoriales ont vocation à prendre les décisions pour l'ensemble des compétences qui peuvent le mieux être mises en oeuvre à leur échelon » .

* 30 Voir en particulier l'audition commune des représentants de l'AMF, de l'ADF et de l'ARF le 29 avril 2009.

* 31 Comme le souligne l'ADCF dans sa réaction au rapport Balladur : « les financements croisés les plus importants s'opèrent au sein des politiques contractuelles initiées par l'Etat dans le cadre des contrats de plan Etat-région mais aussi des appels à projets engagés par les ministères et les grandes agences nationales (ANRU, AFITF...). Ce sont également sur des maîtrises d'ouvrage d'Etat que les financements croisés atteignent les niveaux les plus élevés (universités, lignes à grande vitesse, monuments historiques) ».

* 32 Ces compétences sont les suivantes : développement économique, aménagement du territoire, transports, infrastructures, action sociale et médico-sociale, santé, éducation, enseignement supérieur, tourisme et culture.

* 33 Voir les comptes rendus des déplacements de votre mission dans les départements du Tarn-et-Garonne le 18 mai 2009 et des Hautes-Pyrénées le 19 mai 2009 en annexe du présent rapport.

* 34 Idem.

* 35 JO débats Sénat, séance du 18 mars 2009, p. 3113.

* 36 Rapport du Comité pour la réforme des collectivités locales, p. 91.

* 37 Idem, p. 88.

* 38 Rapport d'étape sur la réorganisation territoriale n°264 (2008-2009), Mission temporaire sur l'organisation et l'évolution des collectivités territoriales, tome 1, p. 128 et 129.

* 39 Les neuf plus importantes métropoles sont : le Grand Paris, Lyon, Lille, Marseille, Bordeaux, Toulouse, Nantes, Nice et Strasbourg.

* 40 L'article L. 4251-1 du CGCT dispose ainsi que : « Le plan de la région est constitué par le schéma régional d'aménagement et de développement du territoire prévu à l'article 34 de la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983 portant répartition de compétences entre les communes, les départements, les régions et l'Etat. Il fixe les orientations mises en oeuvre par la région soit directement, soit par voie contractuelle avec l'Etat, d'autres régions, les départements, les communes ou leurs groupements, les entreprises publiques ou privées, les établissements publics ou toute autre personne morale. ».

* 41 Les contrats Etat/Région ont été instaurés par la loi n° 82-653 du 29 juillet 1982.

* 42 Voir en annexe le compte rendu du déplacement de la mission sénatoriale à l'Observatoire du Pic du Midi le 18 mai 2009.

* 43 On peut signaler que la région Aquitaine et le conseil général de Gironde ont adopté une convention d'objectifs Région-Département 2007-2013 qui fixe les engagements réciproques de chacune de deux collectivités. Ce texte vise à compléter les orientations et crédits négociés dans le cadre des contrats de projet Etat-Régions 2007-2013, notamment en ce qui concerne le développement numérique, la question du foncier, la complémentarité des espaces urbains, périurbains et ruraux et le développement touristique et culturel.

* 44 Lors du débat du 18 mars 2009 (JO débats p. 3106), vos rapporteurs ont expliqué que « les compétences des intercommunalités pourraient être renforcées, en particulier celles des communautés de communes, qui sont aujourd'hui limitées ».

* 45 Le problème de coordination et d'interopérabilité des transports a été confirmé par notre collègue Eric Doligé, lors d'un débat organisé, le 18 février 2009, par la mission.

* 46 Rapport d'information n° 1153 de l'Assemblée nationale, « Pour un big-bang territorial », octobre 2008, M. Jean-Luc Warsmann, président, MM. Didier Quentin et Jean-Jacques Urvoas, rapporteurs, p. 79.

* 47 Idem.

* 48 Voir l'audition du 18 février 2009.

* 49 M. Pierre-Yves Collombat, premier vice-président, a notamment soutenu ce scénario lors du débat organisé le 18 février 2009 par la mission.

* 50 Voir l'audition commune des représentants de l'AMF, de l'ADF et de l'ARF le 29 avril 2009.

* 51 Idem.

* 52 En Province, le taux est plafonné à 0,55 % des salaires entre 10.000 et 100.000 habitants, 1 % au-dessus de 100.000 habitants et 1,75 % en cas de mise en place d'un système de transport collectif en mode routier ou guidé. En Ile-de-France, le taux est plafonné à 2,6 % à Paris et dans les Hauts-de-Seine, 1,7 % en Seine-Saint-Denis et dans le Val-de-Marne et à 1,4 % dans l'Essonne, les Yvelines, le Val d'Oise et la Seine-et-Marne.

* 53 « Des régions à l'Europe : les nouveaux défis du chemin de fer français », rapport de M. Hubert Haenel au Premier ministre, octobre 2008, pp. 117 et suivantes.

* 54 Le versement transport a déjà été à plusieurs reprises élargi jusqu'à comprendre toutes les autorités organisatrices de plus de 10 000 habitants.

* 55 Voir l'audition commune des représentants de l'AMF, de l'ADF et de l'ARF le 29 avril 2009.

* 56 Dans un amendement du 28 octobre 2005 n° II-81 au PLF pour 2006, M. Destot et plusieurs de ses collègues députés socialistes proposaient de porter à 1 % des salaires le VT des communes ou EPCI dont la population est comprise entre 10 000 et 100 000 habitants dès lors qu'elles s'engageaient dans une démarche globale de gestion des déplacements.

* 57 Rapport du Comité pour la réforme des collectivités locales, p. 89.

* 58 « Infrastructures de transport : remettre la France sur la bonne voie », rapport n° 196 (2007-2008) de la Mission d'information sur les transports terrestres : infrastructures, fonctionnement et financement, M. Francis Grignon, président, MM. Daniel Reiner, Michel Billout et Claude Biwer, rapporteurs.

* 59 Voir à ce sujet le dossier consacré au financement du TGV Est dans la Revue « Sénat & Territoires », n°1, p. 51 et suivantes.

* 60 Voir rapport sur les infrastructures de transport précité, p. 37.

* 61 Voir rapport précité, p. 48.

* 62 « Des régions à l'Europe : les nouveaux défis du chemin de fer français », rapport de M. Hubert Haenel au Premier ministre, octobre 2008, pp. 117 et suivantes.

* 63 Il s'agit de l'amendement n°301 rectifié bis à l'article 12 du projet de loi.

* 64 Réunion du sous-groupe « compétences » de la mission le 5 mai 2009.

* 65 Rapport d'information n° 1153 de l'Assemblée nationale, « Pour un big-bang territorial », octobre 2008, M. Jean-Luc Warsmann, président, MM. Didier Quentin et Jean-Jacques Urvoas, rapporteurs, p. 74.

* 66 Réunion du sous-groupe « compétences » de la mission du 5 mai 2009.

* 67 Rapport du Comité pour la réforme des collectivités locales, p. 86.

* 68 Voir en particulier le rapport n° 304 (2008-2009) de la Commission des Affaires économiques sur le projet de loi de développement et de modernisation des services touristiques, Mme Bariza Khiari, rapporteur, pp. 83 et suivantes.

* 69 Comme le relève l'étude réalisée par Ernst & Young à la demande de la mission, « les services de l'Etat, via le réseau d'infirmières et de médecins scolaires, interviennent dans le cadre de la prévention (1 er degré) complété de dispositifs d'animation (2 nd degré), notamment dans le cadre de la lutte contre les conduites additives. Là encore, le champ d'intervention est relativement proche des interventions du département en matière de protection de l'enfance. ».

* 70 Loi n° 85-729 du 18 juillet 1985 relative à la définition et à la mise en oeuvre de principes d'aménagement.

* 71 Projet de loi de programmation relatif à la mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement, dans sa version adoptée par le Sénat en première lecture le 10 février 2009.

* 72 Code de l'environnement, art. L. 220-1.

* 73 Ibid. , art. L. 221-1.

* 74 Ibid ., art. L. 222-4.

* 75 Loi n° 2002-276 du 27 février 2002 relative à la démocratie de proximité, art. 109, dispositions reprises dans le code de l'environnement, art. L. 222-1.

* 76 Créés par l'article 5 de la loi n° 96-1236 du 30 décembre 1996 sur l'air et l'utilisation rationnelle de l'énergie.

* 77 Loi n°2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales. La loi n° 2006-872 du 13 juillet 2006 portant engagement national pour le logement a rendu l'élaboration de ce plan obligatoire , dans un délai de trois ans, pour toutes les communautés de communes compétentes en matière d'habitat de plus de 50 000 habitants comprenant au moins une commune de plus de 15 000 habitants, les communautés d'agglomération et les communautés urbaines.

* 78 Code de la construction et de l'habitat, art. L. 302-1 et suivants.

* 79 Ibid ., art. L. 302-10 et suivants.

* 80 Association des communautés de France, Etat de l'intercommunalité en 2009 .

* 81 Rapport sur la lutte contre l'habitat indigne , présenté par Dominique Ducos-Fonfrède et Claude Hossard, membres du Conseil général des ponts et chaussées (CGPC), Roger Marion et XavierPrétot, membres de l'Inspection générale de l'administration (IGA) et Philippe Blanchard, membre de l'Inspection générale des affaires sociales (IGAS), mai 2007.

* 82 Code général des collectivités publiques, art. L. 422-8 , rédaction résultant de l'ordonnance n°2005-1527 du 8 décembre 2005 relative au permis de construire et aux autorisations d'urbanisme.

* 83 CGCT, art. L. 5215-20.

* 84 CGCT, art. L. 5216-5.

* 85 CGCT, art. L. 2224-11.

* 86 Loi du 30 juillet 2003 sur les risques technologiques et naturels.

* 87 Cour des comptes, La gestion des services publics d'eau et d'assainissement , décembre 2003.

* 88 Conseil économique, social et environnemental, Les usages domestiques de l'eau , avis présenté par M. Paul de Viguerie, 22 mai 2009.

* 89 L'élu et les déchets , AMORCE, mai 2008.

* 90 Loi n° 75-633 du 15 juillet 1975 relative à l'élimination des déchets et à la récupération des matériaux et loi n° 92-646 du 13 juillet 1992 relative à l'élimination des déchets ainsi qu'aux installations classées pour la protection de l'environnement.

* 91 L'article L. 2224-13 du CGCT distingue ainsi « l'ensemble de la compétence d'élimination et de valorisation des déchets des ménages » et « la partie de cette compétence comprenant le traitement, la mise en décharge des déchets ultimes ainsi que les opérations de transport, de tri ou de stockage qui s'y rapportent », en précisant que « les opérations de transport, de tri ou de stockage qui se situent à la jonction de la collecte et du traitement peuvent être intégrées à l'une ou l'autre de ces deux missions ».

* 92 Source : Conseil général de la Creuse .

* 93 Aux termes de l'article L. 211-1 du code de l'éducation, tel qu'issu de la loi du 13 août 2004, « L'éducation est un service public national, dont l'organisation et le fonctionnement sont assurés par l'Etat, sous réserve des compétences attribuées par le présent code aux collectivités territoriales pour les associer au développement de ce service public ».

* 94 Les Agents territoriaux spécialisés des écoles maternelles (ATSEM) ou les personnels techniciens, ouvriers et de service (TOS) dans les collèges et lycées.

* 95 Voir sur ce point le rapport public thématique de la Cour des comptes sur « Les communes et l'école de la République », décembre 2008.

* 96 Installé le 15 mars 2006, ce conseil, présidé par le ministre de l'éducation nationale qui fixe l'ordre du jour des réunions, est composé de 36 membres dont 17 représentants de l'Etat et 18 représentants des collectivités territoriales.

* 97 Ainsi, la mission présidée par M. Jean-Luc Warsmann a estimé que la région constituait « le niveau le plus adapté pour exercer cette compétence unifiée », « compte tenu de l'expérience acquise à cet échelon en matière d'enseignement supérieur et d'orientation professionnelle ».

* 98 Dans un rapport d'information sur les transferts de compétences de l'Etat aux collectivités territoriales et leur financement, présenté au nom de la commission des finances de l'Assemblée nationale, les députés Marc Laffineur et Augustin Bonrepaux relevaient que l'absence de transfert de la gestion des intendants était « quelque peu paradoxale alors qu'ils encadrent les personnels TOS » (Assemblée nationale, n° 3523, 2006-2007).

* 99 Comme le relève l'étude réalisée à la demande de la mission, « les services de l'Etat, via le réseau d'infirmières et de médecins scolaires, interviennent dans le cadre de la prévention (1 er degré) complété de dispositifs d'animation (2 nd degré) notamment dans le cadre de la lutte contre les conduites additives. Là encore le champ d'intervention est relativement proche des interventions du département en matière de protection de l'enfance. »

* 100 « France, ton atout « jeunes » : un avenir à tout jeune », rapport d'information de la mission commune sur la politique en faveur des jeunes, Mme Raymonde Le Texier, présidente, et M. Christian Demuynck, rapporteur, Sénat, n° 436 (2008-2009).

* 101 Sur la période 2000-2006, l'Etat et les collectivités territoriales ont participé à parts égales aux dépenses des CPER en faveur de l'enseignement supérieur et de la recherche : sur 6 milliards d'euros, 3 provenaient de l'Etat, 2 des régions et 1 des autres niveaux de collectivités locales. Le poste enseignement supérieur et recherche a représenté 12 % des dépenses totales des régions dans le cadre des CPER et environ un tiers des sommes qu'elles ont affecté sur la même période à l'enseignement supérieur et à la recherche (source : « Aménagement du territoire, enseignement supérieur et recherche : entre proximité et excellence », rapport présenté par M. Jean-Pierre Duport, Conseil économique et social, 2008).

* 102 Instituts Universitaires de Technologie.

* 103 Centres régionaux des oeuvres universitaires et scolaires.

* 104 « Aménagement du territoire, enseignement supérieur et recherche : entre proximité et excellence », rapport présenté par M. Jean-Pierre Duport, Conseil économique et social, 2008.

* 105 Loi n° 2007-1199 du 10 août 2007 relative aux libertés et responsabilités des universités.

* 106 Un tel transfert a été préconisé en 2000 par le « rapport Mauroy » et celui de la mission du Sénat chargée de faire un bilan de la décentralisation, ou plus récemment par la « mission Warsmann ». La mission d'information de la commission des affaires culturelles chargée d'étudier le patrimoine immobilier universitaire avait proposé une dévolution « expérimentale et réversible » des bâtiments universitaires aux collectivités et établissements volontaires, susceptible d'être encouragée par des aides spécifiques (« Voyage au bout...de l'immobilier universitaire », MM. Jacques Valade, président, et Jean-Léonce Dupont, rapporteur, Sénat, n° 213 (2002-2003)).

* 107 Article L. 4252-1 du code général des collectivités territoriales (CGCT), issu de la loi n° 82-610 du 15 juillet 1982 d'orientation et de programmation pour la recherche et le développement technologique de la France.

* 108 « Recherche et territoires », rapport de l'inspection générale de l'administration de l'éducation nationale et de la recherche (IGAENR), n° 2005-103, novembre 2005.

* 109 Rappelons que la loi du 13 août 2004 a reconnu la possibilité pour les communes ou EPCI d'avoir la charge de la construction, de la reconstruction, de l'extension, des grosses réparations et de l'équipement des locaux destinés au logement des étudiants et de se voir transférer, dans le même temps, les biens appartenant à l'Etat ou à un établissement public (CROUS). En Ile-de-France, cette compétence peut être confiée à la région si la commune ou l'EPCI y renonce ; par ailleurs, la politique de logement des étudiants fait l'objet, dans cette région, d'un schéma élaboré par le conseil régional (article L. 822-1 du code de l'éducation).

* 110 Si, aux termes de la loi du 22 juillet 1983, les collectivités territoriales sont propriétaires de leurs archives et en assurent elles-mêmes la conservation et la mise en valeur, les services départementaux sont tenus de recevoir et gérer les archives des services déconcentrés de l'Etat, et peuvent également recevoir des archives communales (celles des communes de moins de 2 000 habitants doivent y être versées) ou, par convention, les archives des régions.

* 111 Dans ce domaine, la loi du 1983 a confié aux communes l'organisation et le financement des bibliothèques municipales et a transféré aux départements les bibliothèques centrales de prêt.

* 112 Si tous les niveaux de collectivités -essentiellement les communes- sont propriétaires de monuments historiques, la loi du 13 août 2004 a prévu le transfert aux régions de la gestion et de la conduite de l'inventaire général du patrimoine culturel, compétence qu'elles peuvent exercer en coordination avec les autres collectivités.

* 113 « Les dépenses culturelles des collectivités locales en 2006 », Culture Chiffres n° 2009-3, mars 2009.

* 114 « L'intercommunalité culturelle en France », Rapport d'étude conduit sous la direction d'Emmanuel Négrier, Julien Préau et Philippe Teillet, Observatoire des politiques culturelles, février 2008. Une synthèse a été publiée en octobre 2008 par le département des études, de la prospective et des statistiques (DEPS) du ministère de la culture (Culture études n° 2008-5).

* 115 « Décentralisation et déconcentration culturelles : des questions de cohérence », rapport d'information fait au nom de la commission des finances sur le rapport de la Cour des comptes par M. Yann Gaillard, Sénat, n° 393 (2002-2003).

* 116 Le premier rapport des Entretiens de Valois est paru en janvier 2009.

* 117 Institué en février 2000, celui-ci ne s'était pas réuni depuis plus de cinq ans.

* 118 Loi n° 2002-6 du 4 janvier 2002 relative à la création d'établissements publics de coopération culturelle, modifiée par la loi n° 2006-723 du 22 juin 2006 (résultant d'une initiative sénatoriale, faisant suite au rapport d'information de M. Ivan Renar, au nom de la commission des affaires culturelles, « L'établissement public de coopération culturelle : la loi à l'épreuve des faits », n° 32 (2005-2006), Sénat).

* 119 « Décentralisation des enseignements artistiques : des préconisations pour orchestrer la sortie de crise », Rapport d'information de Mme Catherine Morin-Desailly, au nom de la commission des affaires culturelles, n° 458 (2007-2008), Sénat.

* 120 Aux termes de l'article L. 311-3 du code du sport, le département élabore, en ce sens, un « plan départemental des espaces, sites et itinéraires relatifs aux sports de nature ».

* 121 Loi n° 84-610 du 16 juillet 1984 relative à l'organisation et à la promotion des activités physiques et sportives.

* 122 Article L. 100-2 du code du sport.

* 123 Article L. 4424-8 du code général des collectivités territoriales, issu de la loi n° 2002-92 du 22 janvier 2002 relative à la Corse.

* 124 Il existe au moins un équipement sportif dans toutes les communes de plus de 1 000 habitants.

* 125 Rappelons qu'aux termes de l'article L. 1311-15 du code général des collectivités territoriales, « l'utilisation d'équipements collectifs par une collectivité territoriale, un établissement public de coopération intercommunale ou un syndicat mixte fait l'objet d'une participation financière au bénéfice de la collectivité territoriale, de l'établissement public de coopération intercommunale ou du syndicat mixte propriétaire de ces équipements. ».

Par ailleurs, la possibilité, pour les collectivités territoriales gérant les collèges et les lycées, d'utiliser les installations sportives communales a été admise par le Conseil d'Etat dans ses arrêts du 3 septembre 1997, ville de Montpellier, et du 13 mars 1998, département de la Moselle.

* 126 Rapport présenté par M. Philippe Valletoux au nom de la section des finances du Conseil économique et social, « Fiscalité et finances publiques locales : à la recherche d'une nouvelle donne », 29 novembre 2006.

* 127 Rapport au Premier ministre présenté par M. Olivier Fouquet au nom de la commission de réforme de la taxe professionnelle, 21 décembre 2004.

* 128 Le dossier législatif présente l'ensemble des documents et peut être consulté sur le site internet du Sénat à l'adresse : www.senat.fr/dossierleg/pjl02-024.html .

* 129 Rapport n° 27 (2002-2003) de M. René Garrec, au nom de la commission des lois, sur le projet de loi constitutionnelle relatif à l'organisation décentralisée de la République.

* 130 Loi organique prise en application de l'article 72-2 de la Constitution relatif à l'autonomie financière des collectivités territoriales, n° 2004-758 du 29 juillet 2004.

* 131 Séance publique du 22 juillet 2004.

* 132 « Réinventer la démocratie », Pierre Rosanvallon, professeur au collège de France, in Le Monde, 29 avril 2009.

* 133 Rapport d'étape sur la réorganisation territoriale, mission temporaire sur l'organisation et l'évolution des collectivités territoriales, Sénat, mars 2009, n° 264 (2008-2009), p. 48.

* 134 « Suppression de la taxe professionnelle : un risque pour la solvabilité des collectivités locales », FitchRatings, mai 2009.

* 135 « L'avenir de l'autonomie financière des collectivités locales », rapport de M. Jean-Pierre Brunel au Conseil économique et social, juin 2001.

* 136 Rapport d'étape sur la réorganisation territoriale, mission temporaire sur l'organisation et l'évolution des collectivités territoriales, Sénat, mars 2009, n° 264 (2008-2009), p. 144.

* 137 Auditions publiques de la mission sur le thème « Collectivités territoriales, entreprises et développement du territoire », Sénat, 19 février 2009, et interview de chefs d'entreprises, in La Gazette, 4 mai 2009, p. 30.

* 138 Inventaire général des impôts locaux, direction générale des collectivités locales, ministère de l'intérieur, 2003.

* 139 Rapport d'étape sur la réorganisation territoriale, mission temporaire sur l'organisation et l'évolution des collectivités territoriales, Sénat, mars 2009, n° 264 (2008-2009), p.142.

* 140 L'article 56 modifié de la loi n° 90-669 du 30 juillet 1990 relative à la révision générale des évaluations des immeubles retenus pour la détermination des bases des impôts directs locaux, en posait le principe.

* 141 Rapport d'étape sur la réorganisation territoriale, mission temporaire sur l'organisation et l'évolution des collectivités territoriales, Sénat, mars 2009, n° 264 (2008-2009), p.144.

* 142 Loi n° 2003-276 du 28 mars 2003.

* 143 Le rapport d'information n° 40 (2003-2004) de MM. Jean-François Poncet et Claude Belot « La péréquation interdépartementale : vers une nouvelle égalité territoriale » (Sénat), relevant « le très faible effet péréquateur de la DGF », indiquait que « l'ensemble de la DGF [départementale] n'affiche aucune corrélation véritable avec le degré de pauvreté des départements ».

* 144 Etude réalisée pour la DGCL par MM. Guy Gilbert et Alain Guengant sur les indicateurs de performance de la péréquation entre collectivités territoriales, juillet 2007.

* 145 Les huit plus importantes métropoles sont : Lyon, Lille, Marseille, Bordeaux, Toulouse, Nantes, Nice et Strasbourg.

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