2. Des améliorations souhaitables
a) Lutter contre la sous-notification des effets indésirables
Le premier obstacle auquel se heurtent les professionnels de la pharmacovigilance des CRPV est l' insuffisante mobilisation des professionnels de santé en matière de notification spontanée des effets indésirables.
Sensibiliser les médecins de ville
Pour ce qui concerne les médecins, ce phénomène touche essentiellement la médecine de ville. Il faut reconnaître, à cet égard, que l'implantation des CRPV dans les CHU facilite la notification par les services hospitaliers qui sont à l'origine de la moitié des déclarations d'effets indésirables.
Le niveau de notification semble en effet satisfaisant à l'hôpital selon les critères de la HAS qui vérifie désormais l'organisation de la pharmacovigilance (présence d'un référent pharmacovigilance, notamment) lors de ses visites d'accréditation des établissements de santé. Lors de la première visite, il est toutefois apparu que 18 % d'entre eux doivent améliorer leur procédure en la matière.
Pour la médecine de ville, on estime à un tiers la proportion de praticiens qui préfèrent signaler directement un effet indésirable au laboratoire pharmaceutique concerné par le biais des visiteurs médicaux. La raison la plus fréquemment invoquée pour contourner le système institutionnel est la crainte d'être accusé d'une mauvaise prescription.
Sans pour autant rendre la notification obligatoire, il convient donc de sensibiliser les médecins aux enjeux de la pharmacovigilance et aux mécanismes du dispositif public et ce, dès leur formation initiale. Or, l'enseignement en pharmacovigilance se limite aujourd'hui à deux heures au cours de la quatrième année d'études de médecine, ce qui semble largement insuffisant malgré la création récente d'un cours d'iatrogénie médicamenteuse. Toutefois, il semble que l'effort d'information de l'Afssaps sur les bonnes pratiques de la pharmacovigilance commence à porter ses fruits, avec une légère augmentation du nombre de notifications.
Cet effort de sensibilisation passe également par une meilleure reconnaissance du rôle des médecins dans le système de pharmacovigilance, notamment en les informant systématiquement des suites données à leurs signalements .
En outre, afin de faciliter le travail de notification, souvent considéré comme une tâche administrative rebutante, il serait souhaitable de promouvoir, auprès des praticiens, les déclarations par Internet sur le site de l'Afssaps.
Renforcer le rôle des pharmaciens
Par ailleurs, les pharmaciens déclarent très peu d'effets indésirables - 87 % des notifications sont le fait des médecins -, malgré l'obligation qui leur est faite de signaler les accidents médicamenteux qu'ils observent dans le cadre de leur exercice professionnel. A cet effet, l'Ordre des pharmaciens met à leur disposition des fiches de pharmacovigilance. Il apparaît, en réalité, que les pharmaciens éprouvent des difficultés à renseigner l'intégralité des demandes formulées dans ces fiches et réorientent le plus souvent les patients souffrant d'effets secondaires vers les médecins prescripteurs.
C'est pourquoi l'Ordre des pharmaciens propose de renforcer l'implication de ces derniers en matière de pharmacovigilance par la généralisation du signalement informatique permettant au pharmacien de déclarer un accident à la fois au médecin prescripteur, qui compléterait la fiche de signalement en cas de besoin, et aux autorités sanitaires. 31 ( * ) Il apparaît, plus largement, que le développement de nouveaux logiciels dédiés à l'activité des pharmaciens d'officine sera de nature à améliorer la sécurité des patients en facilitant une éventuelle demande de retrait grâce à une meilleure traçabilité des lots de médicaments.
Aussi l'Afssaps travaille actuellement avec l'Ordre des pharmaciens, à qui la loi de financement de la sécurité sociale pour 2006 a accordé des compétences en matière de développement des systèmes d'information dans les officines, sur un système de codage amélioré de ces lots - composé de seize caractères au lieu de douze actuellement - qui permettra d'identifier précisément une boîte de médicaments et de remonter jusqu'au patient.
Ce type de logiciel sera, en outre, compatible avec le futur dossier médical personnalisé (DMP), sans toutefois donner au pharmacien un accès à la totalité des données cliniques de l'assuré, ni même au diagnostic : il sera centré sur le suivi de la thérapeutique, c'est-à-dire des médicaments prescrits ou acquis sans ordonnance. De fait, aujourd'hui, lorsqu'un patient fréquente plusieurs pharmacies, il n'existe aucun moyen de suivre sa consommation médicamenteuse, ce qui complique considérablement la recherche du produit en cause en cas d'effet secondaire indésirable.
La mission d'information souhaite que cette initiative aboutisse rapidement, afin de renforcer le maillage du dispositif de pharmacovigilance grâce à la participation accrue des pharmaciens.
* 31 Audition de Jean Parrot, président du Conseil national de l'Ordre des pharmaciens, p. 193.