14. Audition de M. Michaël Boukobza, directeur général de Free et de M.Alexandre Archambault, chargé des affaires réglementaires

M. Michaël Boukobza a tout d'abord rappelé que Free appartenait à 100% au groupe Iliad, dont il représentait l'essentiel (75 %) de l'activité. Il a précisé que ce groupe, dont le chiffre d'affaires s'élevait pour l'année 2004 à 491 millions d'euros, avait dégagé un résultat net de 41 millions d'euros cette même année. Il a, par ailleurs, indiqué que Free était implanté exclusivement en France où il employait 1000 personnes et comptait, au 31 mars 2005, 1,2 million d'abonnés au haut débit, soit près de 18 % du marché.

Après avoir insisté sur la priorité donnée par Free à l'innovation, notamment à travers le perfectionnement continu de son terminal multiservices « Freebox », il a indiqué que Free souhaitait commercialiser ses services à un tarif unique de 30 euros par mois dans toutes les zones couvertes par l'ADSL, soit en dégroupant, soit en utilisant les offres de gros de France Télécom. Constatant les avantages du dégroupage, il a fait valoir qu'il était économiquement peu rentable pour Free d'être présent dans les zones non dégroupées, sauf d'un point de vue strictement commercial, et que les offres proposées dans ce cadre étaient beaucoup moins intéressantes pour les clients qui, pour le même prix, bénéficiaient de débits moins élevés et ne profitaient pas de la télévision sur ADSL. Toutefois, a-t-il insisté, Free juge essentiel de proposer une offre nationale au même tarif, quelle que soit la localisation de l'abonné sur le territoire, contrairement à d'autres opérateurs qui, ayant fait le choix de la dépéréquation tarifaire, proposent des offres très compétitives dans les zones dégroupées et des offres beaucoup plus chères, voire pas d'offre du tout, dans les zones non dégroupées.

A ce titre, il a considéré que la construction par les collectivités territoriales de réseaux à haut débit en fibre optique constituait une grosse opportunité pour les opérateurs tels que Free en raison des synergies qui peuvent en être rapidement dégagées. Il a, à cet égard, montré que les disparités de pénétration de la concurrence reflétaient les différences d'implication des collectivités territoriales, relevant, à titre d'exemple, que les territoires de collectivités telles que l'Alsace, le Tarn, l'Oise ou des grandes villes comme Montpellier étaient plutôt bien couverts, ce qui n'était pas le cas de la Bretagne. Il a estimé que les zones encore non dégroupées représentaient un véritable réservoir de croissance pour le marché du haut débit, alors que les marges de progression étaient désormais faibles dans les grandes zones urbaines.

Puis il a expliqué que compte tenu du coût que représente pour eux le déploiement d'infrastructures de collecte, il fallait, pour faciliter l'expansion géographique des opérateurs alternatifs, soit leur permettre de louer de la fibre auprès de France Télécom, soit mettre à leur disposition, comme le font les collectivités locales, des réseaux ouverts de fibre optique.

M. Claude Belot s'étant interrogé sur l'intérêt d'une collectivité à investir dans de tels réseaux, M. Michaël Boukobza a indiqué qu'au-delà du bénéfice direct qu'elle tire de la fourniture de haut débit à moindre coût, la collectivité se rémunère en louant son réseau durant des années. M. Alexandre Archambault a considéré, à cet égard, que la collectivité ne faisait que mutualiser des dépenses d'investissement, dont elle se rémunérait ensuite sur la durée auprès des opérateurs, tout en gardant à terme la propriété du réseau.

M. Michaël Boukobza a indiqué que Free dégroupait systématiquement les répartiteurs à partir de 1000 lignes et au cas par cas en-deçà de ce seuil, la plus petite commune dégroupée par Free étant un village de 37 habitants (Buxerolles en Côte d'Or) et le plus petit répartiteur dégroupé par Free comptant quelques centaines de lignes. Mettant l'accent sur le montant prohibitif des coûts fixes facturés par France Télécom pour le dégroupage des petits répartiteurs, il a plaidé pour une modulation de ces tarifs en fonction de la taille des noeuds de raccordement d'abonnés (NRA). Indiquant, par ailleurs, que la « co-localisation distante » des DSLAM, c'est-à-dire leur installation dans des locaux extérieurs au répartiteur, pouvait permettre de diminuer ces coûts, il a plaidé pour que les collectivités territoriales qui le souhaitent puissent, le cas échéant, les prendre en charge comme une dépense liée à l'exploitation d'un réseau à haut débit.

M. Alexandre Archambault a constaté que l'offre de référence du dégroupage avait d'abord été mise au point par l'ARCEP pour répondre aux besoins des grands centres urbains, mais qu'elle n'était plus aujourd'hui adaptée aux réalités des zones rurales restant à dégrouper. Concernant, par ailleurs, les prestations de gros commercialisées par les collectivités territoriales grâce à leurs réseaux à haut débit, il a indiqué que Free préférait la location de fibre à l'achat de bande passante ou de lignes d'abonnés, qui ne lui permettent pas de maîtriser techniquement les offres qu'il élabore. Il a, cet égard, précisé, que la stratégie de Free le conduisait à ne pas dégrouper les zones où il ne pouvait louer de la fibre.

M. Michaël Boukobza a indiqué que Free louait de la fibre à toutes les collectivités territoriales qui en proposent, quel que soit le montage juridique utilisé et a fourni une liste des accords déjà établis avec les collectivités territoriales (reproduite en annexe de la présente audition). Il a constaté néanmoins que dans le cadre de certaines concessions (Pyrénées Atlantiques, Loiret), le délégataire avait imposé des tarifs de location trop élevés afin de pouvoir négocier leur baisse auprès de la collectivité concédante en contrepartie d'une réévaluation de sa subvention. Il a mis en garde les collectivités territoriales contre un tel marchandage, leur conseillant, avant de valider les tarifs proposés par le concessionnaire, de les soumettre aux opérateurs clients afin de prendre connaissance de leurs intentions. Il a considéré que le montage séparant la construction d'une infrastructure passive dans le cadre d'un marché de travaux et son exploitation dans le cadre d'un affermage était plus sécurisant pour les collectivités territoriales.

En réponse à M. Claude Belot , qui l'interrogeait sur le positionnement de Free à l'égard des autres opérateurs alternatifs, M. Michaël Boukobza a indiqué que son principal concurrent restait France Télécom qui, grâce à la maîtrise complète de son réseau, possédait une forte capacité d'innovation.

Après avoir constaté que les premières initiatives dans les réseaux à haut débit avaient été surtout portées par les villes, il s'est félicité de la montée en puissance des départements et des régions qui, de par leur taille, peuvent conduire une action plus structurante. Il a considéré que les régions avaient un rôle à jouer pour coordonner des initiatives départementales parfois contradictoires. Evoquant ensuite le Wimax, il a estimé que s'il était difficile de préjuger des performances de cette technologie, elle n'offrirait sûrement pas des débits aussi élevés que l'ADSL.

Il s'est, par ailleurs, dit ouvert sur la possibilité d'intégrer le haut débit dans le service universel, à condition que cela ne se traduise pas par une subvention sans contrepartie à France Télécom. L'élargissement du périmètre du service universel, a-t-il insisté, doit s'accompagner d'une obligation pour l'opérateur qui en a la charge, de mettre à disposition des autres opérateurs l'ensemble de ses infrastructures passives, notamment sa fibre optique, afin d'éviter que ne se constituent au niveau local des barrières empêchant une concurrence sur l'accès. Ainsi, a t-il poursuivi, le service universel pourrait financer la mise à disposition de fibre optique par l'opérateur historique. Il a également déclaré ne pas être opposé à un fonds alimenté par le service universel et destiné à soutenir les collectivités territoriales les moins favorisées dans leur effort d'équipement numérique à condition que ce mécanisme se traduise par la mise à disposition d'infrastructures passives, telles que de la fibre, pouvant permettre de desservir les répartiteurs.

Enfin M. Michaël Boukobza a souligné que les collectivités territoriales détenant un réseau à haut débit avaient intérêt à lier la vente de leurs prestations aux opérateurs à l'obligation pour chacun d'entre eux de desservir l'ensemble des répartiteurs situés sur leur territoire. Cette modalité de commercialisation, dite « en plaques », qui impose en pratique une péréquation à l'échelle d'un territoire, est pour Free de nature à favoriser le dégroupage.

LISTE DES ACCORDS CONCLUS PAR FREE AVEC LES COLLECTIVITÉS LOCALES

Source : Free

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