2. La tradition française de la formation professionnelle tout au long de la vie
Toute
rétrospective historique pose le problème du choix de la date de
départ. On peut remonter jusqu'au
Moyen-âge
pour trouver,
dans le système des corporations définissant des règles de
perfectionnement des compagnons, les premières traces d'une formation
liée à l'activité professionnelle.
Cependant, les principales contributions en ce domaine s'accordent à
penser que c'est avec la
période révolutionnaire
que
s'affirme en France le principe d'éducation permanente. Ainsi, en 1792,
Condorcet dans son rapport sur l'organisation générale de
l'Instruction publique énonce ce qui constitue la première
définition explicite de la formation pour adultes :
« Nous avons observé que l'instruction ne devait pas
abandonner les individus au moment où ils sortent de l'école,
qu'elle devait embrasser tous les âges; et qu'il n'y en avait aucun
où il ne fut plus utile et possible d'apprendre, et que cette seconde
instruction est d'autant plus nécessaire, que celle de l'enfance a
été resserrée dans des bornes plus
étroites »
. La notion d'éducation permanente, qui
figure encore aujourd'hui dans le code du travail, était née, et
avec elle tout un courant de pensée considérant la formation
comme un instrument de justice sociale et d'intégration dans la
communauté nationale.
Ensuite, au cours du
XIX
ème
siècle
, la
formation des adultes se développe autour du processus
d'industrialisation de la société française : les
capitaines d'industrie cherchent, à diffuser l'esprit d'entreprise qui
préside à la création de plusieurs sociétés
d'enseignement professionnel pour adultes. D'autres, comme les hérauts
d'une éducation ouvrière populaire (Pierre Joseph Proudhon) ou
chrétienne (Marc Sangnier), donneront à l'éducation
permanente un objectif de développement culturel, encore présent
dans le code du travail.
Durant le
XX
ème
siècle
, les pouvoirs publics
vont donner un cadre législatif au système de formation
professionnelle :
- 1919 : la «
loi Astier
» pose les bases
d'un enseignement professionnel unifié pour les apprentis et institue
pour les ouvriers des cours de perfectionnement ;
- 1925 : instauration de la
taxe d'apprentissage
pour financer
le système de formation des apprentis ;
- 1946 : unification des structures de formation adultes existantes
au sein de ce qui deviendra, en 1966, l'Association pour la formation
professionnelle des adultes (
AFPA
) ;
- 1959 : la «
loi Debré
»
vise à donner aux moins diplômés les moyens d'une promotion
sociale ;
- 1963 : la création du
fonds national de l'emploi
(FNE) permet d'offrir aux entreprises des aides pour la reconversion des
salariés menacés de licenciement ;
- 1968 : à la suite des
accords de Grenelle
, les
partenaires sociaux s'entendent pour «
étudier les moyens
d'assurer, avec le concours de l'État, la formation et le
perfectionnement professionnels
» ;
- 1970 :
l'accord national interprofessionnel du 16 juillet
pose les jalons de «
l'organisation de la formation
professionnelle continue dans le cadre de l'éducation
permanente
». La formation professionnelle devient une
«
obligation nationale
», inscrite dans la loi
fondatrice de 1971 dont les principes figurent encore au livre IX du code du
travail.
Depuis cette date, la formation professionnelle est entrée dans une
crise d'identité permanente, subissant l'épreuve des crises
économiques dans les années 70, les exigences de la
compétitivité internationale des années 80 et
l'émergence de la notion d'employabilité et de compétences
à partir des années 90.